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Full text of "Comptes rendus des séances"

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ACADEMIE 


DES 


INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 

ANNÉE  1889 


QUATRIEME    SERIE 

TOME   XVII 


ACADÉMIE 


DES 


INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


COMPTES  RENDUS 


DES 


SEANCES   DE   L'ANNEE    1889 


QUATRIEME   SERIE 


TOME    XVII 


3  I  \^j'^H- 


PARIS 
IMPRIMERIE  NATIONALE 


M  DGCC  XC 


AS. 


COMPTKS    RENDUS  DES  SÉANCES 

DE 

L'ACADÉMIE    DES    INSCRIPTIONS 

ET  BELLES-LETTRES 
PENDANT   L'ANNÉE  1889. 


COMPTES  RENDUS  DES  SEANCES. 
JANVIER-FÉVRIER. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  BARBIER  DE  MEYNAPJ). 


SÉ.WCE  DU   !i  J\NVIER. 

M.  le  marquis  d'Hervey  de  Saint-Denys,  en  quittant  le  fauteuil 
de  la  présidence,  remercie  l'Acade'mie  du  concours  quelle  lui  a 
prêté.  La  seule  ambition  de  sa  vie  a  été  de  lui  appartenir.  La 
présider  a  été  le  plus  grand  honneur  auquel  il  put  [trétendre.  Il 
en  gardera  le  souvenir  tant  qu'il  lui  sera  donné  rie  siéger  parmi 
nous. 

Il  invile  M.  Barbier  de  Meynard  el  M.  Schefcr,  élus  président 
et  vice-président,  à  prendre  place  au  bureau. 

M.  Barbier  de  iMeyiVard,  en  prenant  possession  du  fauteuil, 
remercie  TAcadémie  de  Thonneur  qu'elle  lui  a  fait;  il  en  sent 
tout  le  prix  et  il  ne  méconnaît  pas  la  difficulté  des  obligations 
que  cet  honneur  lui  impose;  mais  il  se  rassure,  sachant  le  con- 
cours qu'il  trouvera  dans  les  deux  membres  qui  siègent  à  ses 
côtés  au  bureau.  Il  espère  que  cette  année  épargnera  à  l'Acadé- 
mie des  pertes  semblables  à  celles  qui  Tout  affligée  l'an  dernier, 
et  que,  malgré  les  préoccupations  du  dehors,  la  Compagnie 
poursuivra  fermement  ses  travaux.  Ce  qu'elle  doit  le  plus  s'alta- 


Wll. 


(•lier  à  Hionlrer  aux  (Uraugors  qui  vonl  aHluer  à  Paris,  c'est  que 
ia  culture  des  lettres  est  toujours  en  honneur  et  eu  progrès  dans 
notre  pays. 

Il  ne  veuf  pas  laisser  M.  d'Hervey  de  Saint-Dcnys  reprendre 
sou  ancienne  place  parmi  ses  confrères,  sans  lui  adresser,  au  nom 
de  TAcade'mie,  des  remerciements.  La  tâche  qu'il  avait  à  remplir 
e'tait  plus  qu'une  tâche  ordinaire  :  il  n'avait  pas  seulement  à 
pre'sider  l'Acade'mie,  il  avait  à  pre'sidcr  l'Institut,  et  il  l'a  fait 
avec  une  ame'uite',  une  bonne  grâce,  dont  la  tradition  est  d'ail- 
leurs dans  notre  Compagnie. 

Les  remerciements  à  M.  d'Hervey  de  Saint-Denys  sont  votés 
à  l'unanimité'. 

L'Acade'mie  se  forme  en  comité  secret.  La  séance  étant  redeve- 
nue publique,  il  est  procédé  au  scrutin  pour  la  désignation  de 
deux  candidats  à  la  chaire  de  chinois  vacante  à  l'Ecole  des 
langues  orientales  vivantes. 

Un  premier  scrutin  est  annulé,  les  membres  libres  ayant  volé 
sur  une  indication  erronée. 

On  vote  pour  un  premier  candidat. 

Il  y  a  3i  votants;  majorité,  18. 

M.  Devéria  obtient  3o  voix;  M.  Jametel,  6. 

En  conséquence,  M.  Devéria  est  proclamé  premier  candidat. 

Au  scrutin  pour  un  second  candidat,  M.  Jametel  obtient 
8  voix;  M. Cordier,  1  ;  M. Devéria  (par  erreur),  1,  et  il  y  a  9/4  bul- 
letins marqués  d'une  croix. 

Les  bulletins  marqu(;s  d'une  croix  étant  comptés  dans  les 
scrutins,  selon  une  décision  antérieure  de  l'Académie,  comme 
un  signe  d'absteulion,  il  en  résulte  que  la  majorit'  est  acquise  à 
l'abstention  pour  la  présentation  d'un  second  candidat. 

En  conséquence,  M.  Devéria  sera  ])résenté  comme  candidat 
uni([ue  de  l'Académie  à  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique. 

Sont  adressés  à  l'Académie  pour  les  divers  concours  de  l'an- 
née 1889: 

Antiquités  de  la  France  : 

l'Àiiile  historique  Pt  (lescriplive  sur  In  Cerlangue  et  Sainl-Jean-iï Ahe- 
tot,  par  M.  Al|)h.  Martin  (Fécamp,  1888,  in  8'); 


Sigillographie  des  seigneurs  de  Laval,  iogo-i6o5 ,  par  Beiirand 
de  Broussillon  et  Paul  de  Farcy  (Paris  etMamers,  1888,  in-8°); 

Recueil  des  documents  concernant  le  Poitou,  contenus  dans  les  re- 
gistres de  la  chancellerie  de  France,  publie'  par  M.  Paul  Gue'rin, 
t.  IV,  i36g-i3j6  (Poitiers,  1888,  iii-8°); 

La  vie  politique  de  Louis  de  France ,  duc  d'Orléans  [iSjù-iùoj], 
par  M.  E.  Jarry  (Paris  et  Orléans,  1889,  in-8°); 

Etude  historique  et  archéologique  sur  la  cathédrale  et  le  palais  épi- 
scopal  de  Paris  du  vf  au  xif  siècle,  par  M.  V.  Mortel  (Paris,  1888 , 
in-8°); 

Olivier  de  la  Marche ,  historien ,  poète  et  diplomate  bourguignon  . 
par  M.  H.  Slein  (Paris,  1888,  in-Zi"); 

Le  Jouvencel,  par  Jean  de  Bueil,  suivi  du  Commentaire  de  Guil- 
laume Tringant,  publie'  pour  la  Socie'te'  de  l'histoire  de  France.  In- 
troduction biographique  et  litte'raire  par  M.  Camille  Favre,  texte 
e'tabli  et  annoté  par  M.  L.  Lecestre  (Paris,  1887-1888,  2  vol. 
in-8"); 

Les  Castehiau-Tursan ,  par  ^I.  Tabbe'  Le'gé  ( Aire-sur- l'Adour, 
9  vol.  in- 8"); 

Epigrapliie  romaine  du  Poitou  et  de  la  Saintonge,  par  M.  E.  Es- 
pérandieu  (Melle,  1888,  in-8"); 

Des  un.  tenz  d'auge  d'ome,  par  M.  de  Fréville  (in-8°); 

Les  fastes  de  la  Numidie  sous  la  domination  romaine,  par  M.  Cle'- 
ment  Pallu  de  Lessert  (Constanline  et  Paris,  1888,  in-8°)  ; 

Jean  de  Pœilhac,  secrétaire,  maître  des  comptes ,  général  des  finances 
et  ambassadeur  des  rois  Charles  VII ,  Louis  XI  et  Charles  VIII.  Docu- 
ments 'pour  servir  à  l'histoire  de  ces  règnes,  de  iâ55  àiàgg  (Paris, 
1886-1888,  3  vol.  in-Zi°); 

Prix  Gobert  : 

La  maison  du  Temple  de  Paris.  Histoire  et  description ,  par  M.  Henri 
de  Curzon  (Paris,  1888,  in-8°); 

Les  registres  d'Honorius  IV.  Recueil  des  bulles  de  ce  pape,  publiées 
ou  analysées  d'après  le  manuscrit  original  des  archives  du  Vatican ,  par 
M.  Maurice  Prou  (Paris,  1888,  in-Zi°); 

Géographie  historique  de  la  province  de  Languedoc  au  moyen  âge, 
par  M,  Aug.  Molinier  (Toulouse,  1889,  in-Zi"); 


—  h  — 

Prix  Bordin  {Etudier  les  sources  qui  ont  servi  à  Tacite  pour  com- 
poser ses  Annales  et  ses  Histoires)  : 

Trois  mémoires  portant  pour  devises,  le  preoiier,  une  phrase 
tirée  de  Tacite  {Ann.,  m,  19); 

Le  deuxième  :  ffLes  origines  sont  toujours  obscures;  mais, 
pour  un  esprit  philosophique,  elles  ont  un  intérêt  sans  égal  v ,  etc. 
(Renan,  U Eglise  chrétienne ,  p.  vu); 

Le  troisième  :  Arduaresest  historiœ  recludere  fontes  ; 
Prix  Stanislas  Julien  : 

Uart  chinois,  par  M.  Paléologue   (Paris,  in-8"); 
Seize   mémoires  ou  notices   relatifs    à  la   Chine,  publiés  en 
1887  et  1888  par  M.  Terrien  de  Lacouperie; 
Prix  Loubat  : 

The  American  commonwealth ,  par  M.  James  Bryco  (Londres, 
3  vol.  in-8°); 

Codex  Peresianus.  Manuscrit  hiératique  des  anciens  Indiens  de  r Amé- 
rique centrale,  conservé  à  la  BibUothe<iuc  nationale,  publié  en  cou- 
leurs avec  une  introduction  par  M.  Léon  de  Rosny  (Paris,  1887, 
in-8''). 

Si,  aux  ouvrages  ou  mémoires  présentés  à  la  séance  de  ce  jour 
on  ajoute  ceux  qui  ont  été  adressés  à  TAcadémie  dans  les  séances 
précédentes,  on  a,  pour  les  concours  de  1889,  la  situation  sui- 
vante : 

Prix  ordinaire  [Etude  sur  le  théâtre  hindou)  :  1  mémoire; 
Antiquitks  de  la  France  :  35  concurrents; 
Prix  de  numismatique  (Allier  de  Hauterociie)  :  3  confunonts; 
Prix  Gobert  :  5  concurrents; 

Prix  Bordin  [Etudier  les  sources  qui  ont  .servi  à  Tacite,  etc.)  : 
3  mémoires; 

Prix  Stanislas  Julien  :  5  concurrents; 
Prix  Loubat  :  9  concurrents. 
Prix  La  (iRANfiE  :  pas  de  concuncnl. 

il  est  ensuite  procédé  au  scrutin  pour  l,i  toiniation  des  Com- 
missions (le  prix.  Sont  élus  : 

Prix  ordinaire  (  Etude  sur  le  théâtre  hindou)  :  .M.\L  Maui  y,  Biéal. 
Opport .  Sonarl  : 


5 


Prix  de  numismatique  (Allier  de  Hauteroche)  :  MM.  Deloche, 
d'Hervey  de  Saint-Denys,  Schlumberger,  de  Barthélémy; 

Prix  Bordin  {Étudier   les  sources   qui  ont  seni  à   Tacite,  etc.): 
MM.  Girard,  Weil,  Boissier,  Croiset; 

Prix  Stanislas  Julien  :  MM.  Mauiy,  Pavet  de  Courteiile,d'Her- 
vey  de  Saint-Denys,  Oppert; 

Prix  Loubat  :  MM.  Maury,  d'Hervey  de  Saint-Denys,  Oppert, 
Maspero. 

M.  Tabbe'  DucHES>E,.au  nom  de  la  Commission  du  prix  Go- 
bert,  fait  le  rapport  suivant  : 

ffLa  Commission  chargée  de  l'examen  des  ouvrages  pour  le 
prix  Gobert  de  1889  s'est  réunie  aujourd'hui  pour  la  première 

fois. 

tf  Après  avoir  nommé  président  M.  Hauréau  et  secrétaire 
M.  l'abbé  Duchesne,  la  Commission  a  arrêté  ainsi  qu'il  suit  la 
liste  des  ouvrages  qui  pourront   prendre  part  au  concours  de 

1889: 

K  1°  L'empire  des  Francs  depuis  sa  fondation  jusquà  son  demcm- 

brement,  par  le  général  Favé; 

ff  2°  I.  Inventaire  des  arrêts  du  Conseil  d'État  [règne  de  Henri  IV) , 
1. 1  et  t.  II  (  i"'  partie),  par  M.  Noël  Valois; 

tril.  Le  Conseil  du  Roi  aux  xiv%  xv'  et  ivi"  siècles,  par  le  même 
auteur  ; 

rr  3°  La  maison  du  Temple  de  Paris.  Histoire  et  description,  par 
M.  H.  de  Curzon; 

trZi°  Les  registres  d'Honorius  IV,  par  M.  Maurice  Prou; 
r  5°    Géographie  historique  de  la  province  de  Langnedoc  au  moyen 
flg-e,parM.  Aug.  Molinier. 

tcA  ces  trois  ouvrages  s'ajoutent  les  œuvres  qui.  Tannée  der- 
nière, ont  obtenu  le  premier  et  le  second  prix  et  qui,  aux  termes 
mêmes  du  testament  du  baron  Gobert,  devront  rester  en  pos- 
session de  ces  prix  jusqu'à  ce  qu'un  ouvrage  supérieur  les  leur 
enlève. 

trLes  ouvrages  couronnés  l'année  dernière  sont  : 
«Pour  le  premier  prix,  celui  de  M.  Elie  Berger  :  Les  registres 
d'Innocent  IV; 


—  6  — 

rfPour  ie  second  pi'ix,  celui  de  M.  E.  Cosneau  :  Le  cotniétable 
de  Bichemont  (^Artur  de  Bretagne). v 


SEANCE    DU    1 1    JANVIEU. 

M.  Geffruy,  directeur  de  TÉcole  française  de  Rome,  adresse 
au  Secre'taire  perpe'tuel  une  lettre  (^)  dans  laquelle  il  mentionne  : 

i°  La  découverte  de  i88  nouveaux  frag-ments  du  ce'lèbre  plan 
de  Rome,  gravé  sous  Septime  Sévère,  qui  occupait  une  paroi  du 
temple  de  la  Ville,  au  forum; 

.  9°  Une  conférence  faite  par  notre  associé  le  commandeur  de 
Rossi,  le  3  janvier,  dans  la  catacombe  de  Priscilla; 

3°  Deux  découvertes  épigrapliiques  faites  à  Rome  par  M.  Gsell, 
membre  de  l'Ecole  française. 

L'Académie  procède  à  l'élection  des  Commissions  du  prix  La 
Grange  et  de  la  fondation  Garnier; 

Sont  élus  : 

Prix  La   Grange  :   MM.  Gaston  Paris,  Lace,  xMeyer,  Gautier; 

Fondation  Garnier  :  MM.  Renan,  Pavel  de  Courteille,  Mas- 
pero,  Senart. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret  pour  entendre  le  rap- 
port de  la  Commission  des  Écoles  françaises  d'Athènes  et  de 
Rome  sur  les  travaux  des  membres  de  ces  deux  écoles  pendant 
l'année  1887  '''^^. 

La  séance  redevient  publique. 

M.  d'Arbois  de  JuBAiNviLLE  commuuique  des  observations  sur  les 
noms  de  lieu  "d'origine  romaine  qui  se  rencontrent  en  France. 

Les  noms  de  lieu  de  la  France  qui  datent  du  temps  de  l'em- 
pire romain  peuvent  se  diviser,  dit  notre  confrère,  en  trois  classes  : 

La  première  classe  comprend  les  composés  :  Augusîo-dunum, 
Cœsaro-magus ,  etc.  ; 

lia  seconde  classe  comprend  les  noms  de  lieu  qui  reproduisent 
sans  changement,  soit  des  noms  dhommes,  Anicius,  Afranitis, 
Turnus,  soit  des  noms  communs,  Très  Tabernœ,  Très  Arbores; 

'')  Voir  aux  Communications,  n°  I  (p.  19-2 3). 
W  Voir  rAppENDiCE  n"  I  (p.  58-70). 


La  troisième  classe  comprend  les  dérive's.  Ceux-ci  viennent, 
les  uns  de  noms  communs ,  les  autres  de  noms  propres. 

Les  noms  de  lieu  qui  sont  de'rive's  de  noms  communs  latins  el 
qui  se  trouvent  dans  les  documents  français  du  moyen  âge  sont 
formés  à  l'aide  du  suffixe  êlum,  comme  Roboretum,  ou  du  suffixe 
-arius,  comme  Asinaria;  une  grande  partie  d'entre  eux  peut  re- 
monter à  Tempire  romain.  Ce  qui  y  remonte  certainement,  ajoute 
M.  d'Arbois  de  Jubainville,  ce  sont  les  dërive's  tire's  de  gentiiices, 
soit,  comme  Marciacus  (de  Marcius)^  à  l'aide  du  suflixe-ffCMs,soit, 
comme  Albucio ,  -onis  (Aubusson),  à  l'aide  du  suffixe  -o,  -onis;el 
les  dérivés  de  cognomina,  comme  Turnacus,  de  Turnus,  et  Caranto, 
Carantonis,  de  Carantos. 

La  plupart  des  gentiiices  qui  ont  fourni  des  noms  de  lieu  à 
l'aide  du  suffixe  -acus  se  terminaient  en  iiis.  C'est  aujourd'hui  un 
genre  de  formation  bien  connu.  Mais  on  a  peu  parlé  jusqu'ici 
des  noms  de  lieu  dérivés  de  gentiiices  romains  en  -enns  et  en 
-ennius.  Il  y  en  a  un  certain  nombre  en  France.  Tel  est  Avennacus 
(Avenay),  dérivé  en  -acus  d'Avenus ,  gentilice  parallèle  à  Avius;  tel 
est  Aveimio  (Avignon),  dérivé  d'Avennius,  qui  lui-même  est  un 
gentilice  romain  dérivé  d'Avenus. 

M.  d'Arbois  de  Jubainville  ayant  cité  incidemment,  à  propos 
des  gentiiices  en  -emis,  -ennius,  -enna,  les  noms  Vibius,  Vibenna, 
M.  Maury  fait  observer  que  ces  noms  propres  sont  étrusques  et 
non  latins. 

M.  d'Arbois  dk  Jubainville  reconnaît  qu'ils  sont  d'origine 
étrusque,  mais  il  dit  que  les  Romains  les  ont  empruntés  à  la 
langue  étrusque  et  se  les  sont  appropriés  (^'. 

M.  Bréal  cite ,  à  l'appui  de  cette  manière  de  voir,  un  suffixe 
étrusque  qui  a  passé  en  latin  :  c'est  le  suffixe  -ita,  qui  a  donné 
naissance,  selon  toute  probabilité,  aux  suffixes  -el,  -eite,  employés 
en  français  pour  former  des  diminutifs. 

M.  Ravaisson  commence  la  lecture  d'un  mémoire  sur  les  mo- 
numents funéraires  des  Grecs. 

<''   Voir  ci-après  (p.  lo,  27-39). 


—  8 


SÉANCE    DU    18    JANVIEU. 

M.  de  Kremer,  récemment  élu  correspondant,  adresse  à  TAca- 
démieunc  lettre  de  remerciement. 

M.  Edmond  Le  Blant  communique  de  nouveaux  renseijjne- 
menls  sur  les  résultats  des  fouilles  entreprises  par  le  P.  Ger- 
mano,  passionistc,  dans  le  sous-sol  de  Téglise  des  Saints  Jean 
et  Paul,  au  mont  Célius,  à  Rome('l 

M.  Revillout,  du  Musée  du  Louvre,  annonce  la  découverte 
d'un  fragment  inédit  de  l'orateur  Hypéride. 

On  ne  connaissait  jusqu'ici  le  talent  d'Hypéride,  le  rival  de 
Démosthène,  que  par  un  Iragmont  de  quelques  pages  décou- 
vert il  y  a  quelques  années  et  aujourd  liiii  conservé  en  Angleterre. 
Le  nouveau  fragment,  contenu  dans  un  rouleau  de  papyrus  qui 
vient  d'être  acquis  par  le  Musée  du  Louvre,  comprend  seize  co- 
lonnes de  l'un  des  deux  plus  célèbres  plaidoyers  du  grand  ora- 
teur, le  discours  contre  Athénogène.  Longin,  dans  son  Timté 
(lu  suhlimc,  assure  qu'Hypéiide,  dans  ce  discours,  avait  montré 
dcs(jualilés  que  Démosthène  lui-même  n'aurait  pas  su  égaler. 
On  ne  peut  encore  donner  un  texte  complet  des  ])arties  retrou- 
vées: il  faut  d'abord  rapprocher  et  remettre  en  ordre  les  par- 
celles du  papyrus.  Ce  travail  est  en  bonne  voie  et  M.  Revillout 
espère  l'achever  prochainement. 

M.  Ravaisson  continue  la  lecture  de  son  mémoire  sur  les  bas- 
reliefs  funéraires  grecs  et  la  signification  des  scènes  qui  y  sont 
représentées. 

Après  avoir  constaté  que,  depuis  la  publication  qu'il  a  faite 
en  18-^5  du  Monument  de  Myrrhine,  et  celle  qui  l'a  suivie,  par 
M.  Milchhocler,  de  stèles  spartiales  représentant  des  morts  divi- 
nisés, la  plupart  des  archéologues  paraissent  accorder  qu'un 
certain  nombre  au  moins  des  monuments  funéraires  grecs  sont 
relatifs  à  l'autre  vie,  il  essaie  de  démontrer  rigoureusement,  au 
moyen  de  certains  exemples  typiques,  (|u'il  en  est  de  même 
de    tous   ces  monuments,  sans  exception.    Cette   démonstration 

'''    Voir  aux  Commiimicatio>s,  n"  Il  ([).  a^i-i'S). 


—  9  — 

résulte,  selon  lui,  de  la  de'termination  préalable  de  sijriies  ou 
emblèmes  usités,  distinguant,  sur  les  monuments,  ce  qui  se 
rapporte  à  la  vie  terrestre  et  ce  qui  se  rapporte  à  l'autre  vie.  Il 
applique  ensuite  sa  théorie  à  l'interprétation  de  plusieurs  œuvres 
d'art  célèbres  qu'on  n'a  pu  encore  expliquer  d'une  manière  satis- 
faisante, notamment  le  groupe  de  la  villa  Ludovisi,  où  l'on  a 
cru  voir  en  dernier  lieu  Electre  et  Oreste,  et  le  grand  bas-relief 
à  ligures  colossales  d'Eleusis. 


SÉANCE  DU  2  5  JANVIER. 


M.  Geffroy,  directeur  de  l'Ecole  française  de  Rome,  adresse 
au  Président  de  nouveaux  renseignements  sur  les  résultats  des  der- 
nières fouilles  opérées  par  le  P.  Germano,  sous  l'église  des  Saints 
Jean  et  Paul,  au  Célius.  Il  fait  savoir,  en  outre,  à  l'Académie  que 
les  travaux  de  démolition  et  de  fouilles  vont  commencer  dans  le 
quartier  de  Rome  qui  occupe  l'emplacement  du  forum  d'Auguste  O. 

Le  Secrétaire  perpétuel  communique  à  l'Académie  une  lettre 
dans  laquelle  M.  Rénédite  donne  d'excellentes  nouvelles  de  la 
mission  dans  l'Arabie  Pétrée,  qui  lui  a  été  confiée  pour  la  re- 
cherche des  inscriptions  sinaïliques  destinées  à  enrichir  la  collec- 
tion du  Corpus  inscriptionum  semiticarum. 

Le  Président  et  M.  le  marquis  de  Vogué  confirment  et  com- 
plètent ces  renseignements.  M.  Rénédite  n'en  est  qu'au  début  de 
son  voyage  et  il  a  déjà  recueilli  environ  trois  cents  textes  épigra- 
phiques  inédits. 

Le  Président  rappelle  qu'un  mois  s'est  écoulé  depuis  la  mort 
de  M.  Riant  et  il  consulte  l'Académie  pour  savoir  s'il  y  a  lieu  de 
le  remplacer. 

L'Académie  décide,  au  scrutin,  qu'il  y  a  lieu,  et,  sur  la  pro- 
position du  Président,  elle  fixe  au  22  février  l'examen  des  titres 
des  candidats. 

Le  Président  annonce  à  la  Compagnie  que  la  Commission  des 

"'   Voir  aux  Cosimuîsicatioxs,  n"  lit  (p.  a5-27). 


—   10  — 

travaux  littéraires  a  désigne  M.  de  Mas  Latrie  pour  achever  le 
V"  volume  du  Recueil  des  historiens  occidentaux  des  Croisades. 

Le  Secrétaire  perpétuel  donne  lecture  de  son  rapport  sur  les 
travaux  des  Commissions  de  publication  de  l'Académie  pendant 
le  second  semestre  de  l'année  1888. 

Ce  rapport  sera  imprimé  et  distribué  selon  l'usage  '^l 

M.  d'Arbois  de  JuBAiNViLLE  vcprcnd  et  développe  les  considéra- 
tions qu'il  avait  présentées  en  quelques  mois,  à  la  dernièj-e  séance, 
en  réponse  à  une  observation  de  M.  Maury,  au  sujet  des  gentilices 
romains  d'origine  non  latine  dans  les  noms  de  lieu  de  la  Gaule^-'. 

Il  continue  ensuite  et  termine  sa  communication  sur  les  noms 
de  lieu  d'origine  romaine  qui  se  rencontrent  en  France. 

M.  Ravaisson  continue  la  lecture  de  son  mémoire  sur  les  bas- 
reliefs  funéraires  grecs  et  la  signification  des  scènes  qui  y  sont 
représentées. 

M.  VioLLET  commence  la  lecture  d'un  niémoiie  sur  le  système 
successoral  appelé  <flms/n/  et  la  fondation  du  Saint-Empire  romain 
de  la  nation  germanique. 


SEANCE  DU    1"  FEVRIER. 


M.  Ravaisson  termine  la  lecture  de  son  mémoire  sur  les  bas- 
reliefs  funéraires  des  Grecs. 

\[  cite  et  analyse  de  nombreux  monuments  égyptiens,  phéniciens, 
lyciens,  étrusques,  surtout  grecs  et  particulièrement  attiques ,  où  est 
figurée  l'idée  du  réveil  du  mort  dans  un  autre  monde.  11  explique, 
conformément  à  sa  théorie,  des  bas-reliefs  funèbres  par  les(|uels 
on  a  cru  la  réfuter,  notamment  les  stèles  athéniennes  consacrées 
aux  deux  jeunes  lîUcs  Plangon  et  Malthace,  et  plusieurs  vases 
peints  appailenant  soit  au  Musée  du  Louvre,  soit  au  Cabinet  des 
antiques  de  la  BiJjliothèque  nationale. 

M.  ViOLLET  termine  la  lecture  de  son  mémoire  sur  le  système 
successoral  appelé  laiiistry  et  la  fondation  du  Saint-Empire  romain 
d(!  la  nation  germanique. 

">   Voir  i'ArPKNDicE  n"  Il  (j).  70-72). 

'"   Voir  aux  Commumcatios,  n"  IV  (p.  37-29). 


—  11  — 

Le  régime  successoral  qui  attribue  la  succession  au  plus  âge'  de 
la  famille,  et  par  conséquent,  dans  bien  des  cas ,  au  frère  ou  au  ne- 
veu du  défunt,  de  préférence  au  fils ,  a  joué  et  joue  encore  un  grand 
rôle  dans  les  régions  du  globe  les  plus  diverses.  On  le  rencontre  en 
Irlande,  dans  l'Empire  Oitoman,  au  Mexique,  dans  la  région  du 
Rio-Nunez,  à  Quoja,  etc.  Ce  régime,  que  les  sociologistes  appellent 
tanistry,  a  laissé  des  traces  dans  le  monde  grec  et  parmi  les  Macé- 
doniens. Chez  nous,  un  courant  d'opinion  favorable  au  tanistry  a 
existé  certainement  pendant  la  période  mérovingienne; enfin  c'est 
le  tanistry  qui  assure,  ou  plutôt  qui  établit  à  deux  reprises,  sous 
les  premiers  Carolingiens,  l'unité  de  l'empire  franc  :  c'est  à  lui 
que  fait  appel  Charlemagne,  en  l'an  806,  lorsqu'il  promulgue 
la  loi  successorale  de  la  famille  carolingienne.  Sans  le  tanistry, 
la  grande  puissance  territoriale  de  Charlemagne  n'eût  jamais 
existé  et  le  second  empire  d'Occident  n'eût  pas  été  fondé.  Le  ta- 
nistry se  retrouve  au  moyen  âge  dans  une  région  du  Poitou;  il 
régit  la  vicomte  de  Thouars. 

M.  Deloche  demande  si  les  pays  011  le  tanistry  a  été  en  vigueur 
ne  sont  pas  ceux  oii  des  voisinages  dangereux  rendaient  néces- 
saire une  organisation  militaire  fortement  constituée. 

M.  Maury  répond  qu'en  certains  cas  cette  hypothèse  est  dé- 
mentie par  les  faits.  En  Russie,  par  exemple,  on  a  vu  le  tanistry 
appliqué  en  faveur  des  femmes. 

M.  Oppert  croit  devoir  mettre  M.  VioUet  en  garde  contre  la 
tentation  de  voir  l'application  d'une  règle  positive  de  droit  dans 
certains  faits  qui  ne  sont  peut-être  que  l'exercice  du  droit  du 
plus  fort.  Ainsi,  quand  certains  princes  mérovingiens  ont  écarté 
du  trône  leurs  neveux  en  bas  âge  pour  se  substituer  à  eux,  il  est 
douteux  qu'ils  se  soient  souciés  d'avoir,  pour  agir  ainsi ,  un  pré- 
texte légal.  En  fait,  trouve-t-on  quelque  part  chez  nous  un  texte 
officiel  qui  édicté  clairement  la  loi  du  tanistry'^ 

M.  VioLLET,  en  réponse  à  la  première  observation ,  dit  que  pro- 
bablement les  nécessités  militaires  ont  été  la  cause  qui  a  fait 
imaginer  à  l'origine  le  système  du  tanistry,  mais  qu'ensuite  ce  sys- 
tème a  dû  se  maintenir  par  la  seule  force  de  la  tradition.  Sur  le 
second  point,  M.  Viollet  pense  qu'à  l'époque  mérovingienne  les 


—  V2  — 

deux  principes  oppose's ,  celui  du  tanistry  el  celui  de  la  succès 
sion  en  ligne  directe,  avaient  chacun  leurs  partisans,  et  que, 
selon  les  circonstances ,  ceux  qui  disposaient  de  la  force  se  sont 
appuye's  sur  l'un  ou  sur  l'autre.  Quant  à  des  textes  officiels  qui 
proclament  expresse'ment  la  règle  du  tanistry,  on  peut  en  citer, 
pour  notre  pays,  au  moins  deux  :  un  capitulaire  de  Charlemagne, 
de  l'an  8oG,  et  la  coutume  de  Poitou,  du  xv""  siècle. 

M.  Deloche  estime  que,  si  les  deux  principes  contraires,  quant 
à  la  succession  au  trône ,  se  sont  trouve's  en  opposition  parmi  les 
sujets  des  rois  me'rovingiens ,  cela  lient  peut-être  à  ce  que  l'un 
de  ces  principes  avait  pour  lui  la  tradition  germanique  et  l'autre 
la  tradition  romaine. 


SÉWCE  DU   8   FÉVRIER. 

Le  Minisire  de  l'inslruction  publique  adresse  à  l'Académie  un 
arrête',  en  date  du  3i  janvier  dernier,  pris  conrorniémcnt  aux 
propositions  du  Conseil  de  perlectionnomeut  de  1  Kcole  des 
chartes  et  portant  nomination  d'archivistes  pale'ographes. 

La  liste  des  archivistes  pale'ographes  nommés  par  cet  arrêté 
sera  lue  dans  la  prochaine  séance  publique  annuelle  de  l'Aca- 
démie. 

M.  Charles  NiSARD  commence  une  lecture  sur  le  poète  Fortunat 
et  sur  ses  relations  intimes  avec  sainte  Radegonde  et  la  mère 
Agnès,  abbesse  du  monastère  de  Sainte-Croix  de  Poitiers ('l 

11  examine  quelle  était  la  nature  de  ces  relations  et  comment 
elles  commencèrent.  Quand  le  poète,  dit  notre  conlrère,  se  lut 
présenté  à  Radegonde,  à  qui  il  était  recommandé  parle  roi  Sige- 
bert  et  la  reine  Rrunehaut,  aussi  bien  que  par  son  titre  de  poète  et 
sa  qualité  d'ecclésiastique,  il  lut  accueilli  avec  la  plus  grande  bien- 
veillance, et  bientôt  agréé  comme  l'homme  de  conGance  de  la 
sainte  et  de  l'abbesse,  et  l'agent  des  aflaires  temporelles  de  leur 
communauté.  L'amitié  réciproque  vint  ensuite  et  se  traduisit 
bientôt   par  un   échange  de  présents,  cf ainsi    <|u"il   se   pratique 

i''    Vdir  aux  Commumcations.  n"  V.   i"  parlio  (p.  So-'io). 


—   13  — 

entre  les  amitiés  innocentes  qui  n  ont  pas  assez  de  leur  agre'able 
babil  pour  se  manifester  à  leur  gre'. ^5  Fortunat  en  prit  Tinifia- 
tive.  11  donna  des  fleurs  de  son  jardin ,  des  corbeilles  tressées     e 
sesmaius,des  fruits,  parmi  lesquels  étaient  des  cbâlaignes  et  des 
prunelles  sauvages,   trCes  prunelles,  écrit-il   à    Radegonde,  ne 
sont  pas    des  cbampignons   sortis  de  terre,  ce  sont   des    fruits 
qu'un  arbre  a  portés  ;   c'est  un   aliment  sain  que  vous  pouvez 
manger  sans  crainte;  je  n'aurais  pas  la  cruauté  de  vous  donner 
ce   qui   pourrait  vous  faire  du   mal.  ii    On   le  croit  bien.  En  re- 
vanche, Radegonde  et  Agnès  lui  envoient  toutes  sortes  de  frian- 
dises, telles,  ajoute  M.  Ch,  Nisard,  qu'on  en  a  préparé  de  temps 
immémorial   chez   les    religieuses,    et   dont   quelques-unes  en 
gardent  encore  le  nom.  Elles  lui  envoyaient  aussi  des  pièces  de 
résistance,  surtout  lorsqu'il  régalait  ses  amis  chez  lui.  Elles  firent 
si  bien  c{ue  le  poète  en  tomba  malade  et  que  le  médecin  dut  le 
mettre  au  régime.  Fortunat  se  plaint  de  sa  rigueur  avec  une  amer- 
tume des  plus  plaisantes,  et  se  rétablit  cependant.  Mais  bientôt 
il  retombe  dans  les  mêmes  excès,  et,  ce  qu'il  y  a  de  pis,  il  ne  fait 
plus  de  vers.  Ses  deux  amies  lui  en  font  un  reproche.  11  s'en 
excuse  en  ivrogne  qui  a  le  vin  bon  et  qui  se  raille  de  lui-même 
avec  bonne  humeur.  Il  dit  tout  cela  en  vers  écrits  d'une  plume 
tremblante,  et  sous  l'inspiration  d'une  muse  ivre. 

Tels  sont  les  premiers  rapports  de  Fortunat  avec  ses  amies;  ils 
sont  presque  enfantins.  Les  autres  sont  plus  graves  et  ont  même 
donné  lieu  à  de  malins  et  très  immérités  commentaires.  M.  Charles 
Nisard  en  feivi  l'objet  d'un  second  travail. 

M.  Héron  de  Villefosse  communique  à  l'Académie  le  moulage 
et  les  photographies  de  deux  monuments  romains  fort  intéres- 
sants pour  la  reconstitution  du  groupe  célèbre  trouvé  à  Olympie 
en  1877  et  connu  sous  le  nom  d'Hermès  de  Praxitèle. 

Cette  statue  représente  Hermès  ou  Mercure,  portant  sur  son 
bras  gauche  Bacchus  enfant.  Le  bras  droit  est  malheureusement 
brisé  et,  d'après  le  mouvement,  il  est  facile  de  voir  que  ce  bras 
était  levé  et  tenait  un  objet  qui  fixait  l'attention  de  l'enfant.  Les 
nombreux  érudits  qui  se  sont  occupés  de  cette  œuvre,  si  impor- 
tante pour  l'histoire  de  la  sculpture  grecque,  ont  pensé,  les  uns 


—  l/l  — 

qu'Hermès  lenail  une  bourse  doiil  il  agitail  lo  contenu  pour 
amuser  Tenfanl,  les  autres  qu'il  lenait  une  grappe  de  raisin,  pré- 
sent qui  devait  naturellement  plaire  au  dieu  de  la  vigne.  Une 
peinture  murale  de  Pompe'i,  où  la  grappe  est  repre'senle'e,  venait 
à  lappui  de  cette  opinion. 

Les  deux  monuments  récemment  découverts  en  France  con- 
firment pleinement  cotte  dernière  restitution.  Le  premier  est 
un  petit  bronze,  qui  a  été  découvert  en  Bourgogne  et  qui  ap- 
partenait à  un  amateur  de  celte  province.  Mercure  y  est  repré- 
senté debout,  tenant  le  jeune  Bacchus  assis  dans  les  plis  de  sa 
chlamyde;  Mercure  tient  de  la  main  droite  une  grappe  de  raisin. 
Le  second  est  une  stèle  romaine,  trouvée  à  Hatrize,  près  Briey 
(Meurthe-et-Moselle),  sur  laquelle  Mercure  est  figuré  dans 
la  même  attitude,  portant  le  jeune  Bacchus  sur  le  bras  gauche 
et  lui  monijant  de  la  main  droite  nne  grappe  de  raisin.  Il  n'y  a 
aucun  rapprochement  à  établir,  au  point  de  vue  du  style,  entre 
l'œuvre  de  Praxitèle  et  ces  deux  monuments  gallo-romains,  qui 
nous  en  présentent  des  répliques  si  atl'aiblies;  mais,  sous  le  rap- 
port archéologique,  ils  offrent  le  plus  grand  intérêt  et  permettent 
de  compléter  par  la  pensée  la  célèbre  statue  (rOlympie.  Il  n'est 
pas  douteux  que  l'Hermès  de  Praxitèle  n'ait  tenu  de  la  main 
droite  une  grappe  de  raisin. 

M.  F.  de  Mély  soumet  à  la  Compagnie  des  observations  sur  le 
portrait  du  cardinal  Etienne  de  Vancza,  archevêque  de  Strigonie 
ou  Gran  (Hongrie),  à  la  cathédrale  de  Chartres. 

On  voit  au  bas  d'une  des  verrières  de  la  cathédrale  de  Chartres, 
du  XIII*  siècle,  le  portrait  d'un  cardinal  agenouillé.  Au-dessus  de 
sa  tête,  on  lit  :  Stephanus  cardinalis.  Les  auteurs  qui  se  sont  oc- 
cupés jusqu'ici  de  ce  portrait  n'ont  pas  réussi  à  reconnaître  le 
personnage  qu'il  représente.  M.  de  Mély  s'attache  à  établir  que 
le  seul  cardinal  du  nom  d'Etienne  auquel  il  puisse  convenir  est 
l'archevêque  de  Gran,  cardinal -évêque  de  Palestrina,  de  laBa 
à  1266,  Etienne  de  Vancza. 

Ce  prélat  fut  un  des  plus  vaillants  soutiens  de  la  monarchie 
hongroise;  après  l'invasion  des  Tartares,  il  présida  au  relèvement 
des  iiiino';  (\o  sa  patrie.  A  ce  moment,  l'architecte  français  Villard 


—  15  — 

(l(?  Honnecourt  fut  mando  à  Gran,  et,  dans  ralbiim  de  dessins 
Qu'il  emporta  avec  lui  pour  le  soumettre  à  Tarrhevêque,  on  trouve 
pre'cise'ment  une  esquisse  de  la  grande  rosace  de  la  cathédrale 
de  Chartres.  Ceci  peut  aider  à  deviner  par  suite  de  quel  con- 
cours de  circonstances  le  prélat  hongrois  aura  e'te'  amené  à  don- 
ner une  verrière  à  la  cathédrale  de  Chartres. 

Ce  portrait  a  dû  être  exécuté  fort  peu  de  temps  après  le  retour 
en  France  de  Villard  de  Honnecourt.  Le  portrait  du  cardinal 
n'aurait-il  pas  été  peint  d'après  un  carton  du  célèbre  architecte 
français?  C'est  une  hypothèse  séduisante,  mais  on  ne  peut  rien 
affirmer. 

Il  est  intéressant,  en  tout  cas,  de  constater  ici  un  nouvel 
exemple  des  rapports  artistiques  qui  ont  uni ,  à  un  certain  mo- 
ment du  xiii'' siècle,  la  France  et  la  Hongrie. 

M.  Rémi  Siméon  lit  une  note  où  il  compare  deux  manuscrits 
mexicains,  appartenant,  l'un  à  la  Bibliothèque  nationale,  l'autre 
au  Palais-Bourbon.  (]es  documents  renferment,  entre  autres  pièces , 
un  toualamatl  ou  calendrier  religieux  et  divinatoire.  Après  avoir 
expliqué  la  disposition  de  ce  calendrier,  M.  Siméon  signale  les 
lacunes  des  deux  manuscrits  et  en  fait  ressortir  l'importance  au 
point  de  vue  historique.  11  pense  qu'ils  ont  été  composés,  l'un  et 
l'autre,  vers  les  années  i555  à  ihb']. 

SÉANCE   DU    l5    FÉVRIER. 

Le  Président  donne  lecture  d'une  lettre  de  M.  Désiré  Charnay, 
qui  annonce  l'effondrement  d'un  temple  de  Palenqué  (Mexique), 
ainsi  que  la  découverte  de  plusieurs  salles  situées  au-dessous  du 
temple  et  inopinément  ouvertes  par  cet  accident  (^). 

M.  DE  VoGiJÉ  revient  avec  plus  de  détails  sur  les  fouilles  du 
P.  Delattre  à  Carthage,  dont  il  a  déjà  entretenu  verbalement  l'Aca- 
démie. 

Il  présente  des  photographies  et  des  dessins  de  la  nécropole 
primitive  découverte  sur  la  colline  de  Byrsa.  Un  tombeau  surtout 

W   Voir  aux  Communications,  n°  VI  (p.  liç^-^o). 


—   IG  — 

mérite  l'altenfioii  :  il  est  construit  en  gros  blocs  de  pierre  et  ren- 
fermait deux  étages  de  corps  accompagnés  de  vases,  d'armes  de 
bronze  donnant  le  premier  spécimen  autbentiquc  de  l'art  cartlia- 
ginois  du  vii^  ou  du  viii"  siècle.  Des  sépultures,  paraissant  remon- 
ter au  v'^  ou  au  iv"  siècle,  ont  fourni  des  figurines  en  terre  cuite 
de  style  égyptisant,  des  colliers  de  verre,  des  vases  phéniciens 
olfrant  la  plus  grande  analogie  avec  les  objets  découverts  dans 
les  nécropoles  de  Chypre  et  de  Sardaigne. 

Enfin,  il  communique  des  dessins  et  des  photographies  qui  dé- 
montrent que  la  nécropole  dite  de  Gamart  était  celle  de  la  colonie 
juive  à  l'époque  romaine. 

MM.  Georges  Perrot  et  Rav.visson  insistent  sur  lintérêt  des 
découvertes  dont  M.  de  Vogué  vient  de  rendre  compte  et  ex- 
priment l'espoir  quelles  pourront  jeter  un  jour  nouveau  sur  les 
relations  des  peuples  sémitiques  de  l'antiquité  aver  1p  monde 
grec. 

MM.  Renan  et  Derenbourg,  à  propos  de  quelques  détails  de  la 
communication  de  M.  de  Vogué,  pensent  que  le  P.  Delattre  de- 
ra  se  mettre  en  garde  contre  la  tentation  de  faire  des  rapproche- 
ments précipités  entre  certains  faits  constatés  au  cours  des  fouilles 
et  des  passages  bibliques  ou  des  usages  juifs  encore  mal  connus. 

M.  (>barles  Nisard  commence  une  nouvelle  lecture  sur  les  rela- 
tions intimes  de  Forlunat  avec  sainte  Radegonde  et  l'abbesse 
Agnès  (^^. 

Notre  confrère  cite  plusieurs  extraits  fort  curieux  des  lettres 
du  poète  à  la  première,  oii,  quelle  que  soit  la  passion  avec  la- 
quelle il  s'exprime,  on  n'oserait  l'imputer  à  un  autre  sentiment 
qu'à  celui  d'une  admiration  exaltée  pour  une  personne  (juil 
lient  déjà  pour  sainte,  et  à  laquelle  il  rend  une  espèce  de  culte. 
Il  y  a  autant  d'innocence  dans  la  passion  de  Fortunat  pour 
l'abbesse  Agnès,  mais  il  y  a  plus  d'aisance,  plus  de  liberté, 
plus  peut-être  de  ce  qui  pourrait  ressembler  à  de  lamour  pro- 
fane. On  l'avait  remarqu  >  dans  le  couvent  de  Sainte-Croix,  et 
on  avait  médit  jusqu'à  joircr-  Agnès  à  eu  aveilir  le  poète  et  à  lui 

*'     Viiif  ;\ii\  (ioMMiMcMiiiNS.  n"  V,  •?.'  parlic  (p.  'lo-'ii)). 


v 


__   17  — 

dcmandordos  explications.  Il  en  donna  dans  une  pièce  de  quelques 
vers,  qui  est  une  protestation  digne  et  e'ioquente  de  la  pureté  de 
ses  sentiments  pour  Agnès,  et  un  te'moignage  de  son  amitié  aussi 
étrangère  à  toute  pensée  charnelle  (|ue  si  Agnès  était  sa  propre 
sœur,  et  qu'ils  fussent  sortis  Tun  et  Tautre  des  entrailles  mêmes 
de  sainte  Radegonde.  Cette  protestation  fit  tomber  toutes  les  mé- 
disances, et  Fortunat  continua  jusqu'à  la  fin  de  la  vie  de  ses 
deux  illustres  amies  des  relations  qui  avaient  fait  le  charme  le 
plus  vif  de  la  sienne. 


SEANCE  DU   2  9   FEVRIER. 

MM.  Ciermont-Ganneau,  Courajod  et  R.  de  Lasleyrie  écrivent 
à  l'Académie  pour  se  porter  candidats  au  fauteuil  laissé  vacant 
par  la  mort  de  M.  le  comte  Riant. 

M.  Geffroy,  directeur  de  l'École  française  de  Rome,  adresse 
au  Président  de  fAcadémie  des  détails  circonstanciés  sur  un  nou- 
veau musée  qui  va  être  ouvert  dans  la  villa  di  Papa  Giulio,  près 
delà  porta  del  Popolo,  et  qui  est  composé  uniquement  des  objets 
découverts  dans  les  fouilles  de  Cività  Castellana,  l'antique  Pa- 
ierie (". 

M.  BoissiER,  qui  a  vu  dans  un  de  ses  derniers  voyages  une 
partie  des  objets  signalés  par  M.  Geffroy,  insiste  sur  fintérêt  ex- 
ceptionnel de  cette  nouvelle  collection. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret  pour  fexamen  des  titres 
des  candidats  à  la  place  de  membre  ordinaire  vacante  par  suite 
du  décès  de  M.  le  comte  Riant. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  M.  Charles  Nisaud  termine 
sa  seconde  communication  sur  les  relations  du  poète  Fortunat 
avec  sainte  Radegonde  et  l'abbesse  Agnès  '-'. 

M.  Oppert  communique  une  note  intitulée:  Les  époques  de  Ham- 
murabi  et  d'Ainénophis  IV ^'-^^ 

Les  dernières  découvertes  faites  en  Assyrie  et  en  Egypte  ont 

'')   Voir  aux  Communications,  n"  Vtt  (p.  5o-53). 

(-'  Voir  aux  Communications,  n°  V,  9"  partie  (p.  60-/19). 

(^)   Voir  aux  Communications,  n"  VIII  (p.  53-58). 

xvii.  2 

ïMPRIMtBlE    SATIOXALF. 


~  18  — 

fait  entrer,  dit  notre  confrère,  dans  le  domaine  de  la  chronologie 
pre'cise,  des  époques  que  naguère  on  pouvait  regarder  comme 
mythiques  et  légendaires.  C'est  ainsi  qu'on  possède  aujourd'hui, 
du  xxiv°  siècle  avant  notre  ère,  une  grande  quantité  de  docu- 
ments juridiques,  administratifs  et  historiques,  émanant  de  roi8 
tels  que  Rim-Sin  ou  Arïoch,  Hammurabi  et  d'autres.  Un  passage 
d'un  texte  déjà  connu,  mais  mutilé,  vient  d'être  complété  par 
l'examen  d'un  nouveau  cylindre  du  roi  Xabonid  (555-538  avant 
notre  ère)  et  M.  Bezold  a  fait  connaître  la  vraie  teneur  du  document. 
Il  y  est  dit  qu'un  certain  roi  Purnapuriyas  vivait  700  ans  après 
Hammurabi,  et  que  tous  deux  embellirent  le  temple  du  Soleil  à 
Sippara.  Or,  un  roi  du  même  nom  de  Purnapuriyas,  nom  appar- 
tenant à  la  langue  cissienne  ou  élamite,  est  nommé,  comme  con- 
temporain d'Aménopliis  IV,  roi  d'Egypte,  dans  les  textes  curieux 
qui  ont  été  récemment  découverts  à  Tell-Amarnah  (Egypte). 
Comme  on  croit  qu'Aménophis  IV  régnait  en  i45o  avant  notre 
ère,  on  en  a  conclu  que  le  règne  de  Hammurabi,  antérieur  de 
700  ans  à  celui  de  Purnapuriyas,  contemporain  d'Aménophis, 
devait  être  placé  en  2i5o.  Mais,  par  une  série  de  déduclions 
arithmétiques  qu'il  s'attache  à  conduire  avec  la  plus  grande  ri- 
gueur, M.  Oppert  soutient  que  l'époque  011  vivait  Hammurabi 
doit  être  placée  dans  le  xxiv''  siècle,  entre  les  années  289^  et 
2889  avant  noire  ère.  Donc,  ou  le  Purnapuriyas  de  Tell-Amarnah 
est  bien  le  même  dont  parle  Nabonid ,  et  alors  le  règne  d'Amé- 
nophis IV  doit  être  placé  en  i65o  et  non  en  ii5o  avant  notre 
ère;  ou  bien,  si  l'on  veut  maintenir  pour  le  roi  d'Egypte  la 
date  consacrée  jusqu'ici ,  il  faut  admettre  qu'il  y  eut  deux  Purna- 
puriyas et  que  le  correspondant  chaldéen  dAménophisIV  est  pos- 
térieur de  deux  siècles  à  son  homonyme  cité  dans  le  cylindre 
du  roi  rV'abonid. 


—   19 


COMMINICATIOAS. 


N"  I. 

LETTRE     DE    It.    GEFFROV. 
DIRECTEUR    DE    L'ECOLE    FRANÇAISE    DE   ROME. 

(  SÉANCE  DU    11    J.ANVIEK    l88g.) 

Rome,  le  7  janvier  1889. 

Monsieur  le  Secrétaire  per[)ét,uel  el  cher  confrère. 

Une  des  découvertes  les  plus  importantes  qu'aient  amenées 
les  récents  travaux  d'édilité  accomplis  dans  Rome  sera  peut- 
être  celle  de  188  morceaux  du  célèbre  plan  de  la  ville,  gravé 
sur  le  marbre  sous  Septime  Sévère,  et  qui  couvrait  une  paroi 
du  templum  mcrae  Urbts,  derrière  l'église  des  Saints  Cosme 
et  Damien.  au  Forum.  On  a  découvert  au  cours  des  derniers 
mois  ces  fragments  engagés  dans  la  grossière  maçonnerie  sou- 
tenant, sur  la  rive  gauche  du  Tibre,  un  petit  jardin  situé  der- 
rière le  palais  Farnèse.  ils  y  auront  été  placés,  soit  dès  l'époque 
delà  première  découverte  du  plan  Capitolin.  au  x\f  siècle, 
quand  les  morceaux  en  ont  été  immédiatement  transportés  au 
palais  Farnèse  et  qu'on  aura  dédaigné  les  plus  petits,  soit 
lorsque,  donnés  au  pape  en  17/12,  les  principaux  d'entre  eux 
ont  été  placés  au  musée  Capitolin.  On  n'avait  rencontré  jadis 
de  tels  fragments  qu'au  pied  du  mur  où  le  plan  Capitolin  avait 
été  primitivement  fixé ,  et  où  probablement  de  nouvelles  fouilles 
bien  ordonnées  en  feraient  trouver  de  nouveaux  encore. 

Il  n'y  en  a  qu'un  petit  nombre  qui  ofTrent  parleur  étendue 
une  réelle  valeur;  mais  rapprochés  les  uns  des  autres,  ou  bien 
rattachés  aux  fragments  actuels  du  musée  Capitolin,  ils  don- 
neront peut-être  les  indications  les  plus  précieuses. 


—  20  — 

On  sait  de  quel  prl\  peuvent  être  pour  la  connaissance  de 
la  topographie  romaine  des  représf^ntations  si  authfntiques. 
Si  de  tels  souvenirs  n'étaient  di'jà  lointains,  je  rappellerais  à 
rAcad('mieque,  danssa  séance  du  ai  avril  1882,  elle  recevait 
de  moi  l'estampage  d'un  fragment  du  plan  Capitolin  singuliè- 
rement instructif.  Pendant  une  visite  au  Forum ,  quelques  jours 
auparavant,  j'avais  entendu  MM.  Fiorelli  et  Lanciani  émr'ttro 
l'avis  que  les  anciens  Romains  montaient  du  Forum  au  Palatin 
par  une  ouverture  praticpiée  vers  ce  qu'ils  pensaient  avoir  été 
le  clivus  Victoriae,  à  l'angle  nord  de  la  colline.  Une  heure  après, 
les  ouvriers,  en  démolissant  un  mur  du  viii"  siècle,  mettaient 
au  jour  un  heau  fragment  du  célèhre  plan  de  Rome  où  se 
montrait  une  salita,  probahlement  les  gradus  in  nova  via  de 
Varron,  entre  la  basilique  Julienne,  avec  le  temjde  de  Castor 
et  Pollux,  et  l'angle  du  Palatin.  (Voir  les  Comptes  rendus  des 
séances  de  l'Académie,  séance  du  2  1  avril  1882.  Cf.  les  Notizte 
degli  scain,  avril  1882,  p.  2 3 y.) 

Les  188  fragments  ont  été  donnés  par  l'Etat  au  municipe 
de  Rome.  Ce  ne  sera  pas  un  petit  travail  que  de  les  insérer  à 
leur  vraie  place  dans  l'escalier  du  musée  Capitolin. 

Le  jeudi  3  janvier,  M.  le  commandeur  de  Rossi,  associé 
étranger  de  l'Institut  de  France,  a  donné  dans  la  catacomhe 
de  Priscilla ,  sur  la  via  Salaria,  une  de  ces  conférences  qui  ont 
lendu  son  enseignement  célèbre. 

M.  Le  Blant  a  trop  bien  fait  connaître  à  l'Académie,  avec 
sa  compétence  spéciale,  les  progrès  des  fouilles  qui  ont  rendu 
celte  catacomhe  à  la  science,  il  a  trop  bien  signalé  les  princi- 
pales inscriptions  qui  y  ont  été  découvertes,  celles  en  particu- 
lier qui  concernent  la  famille  des  AcHii  Glahrioncs,  pour  que 
je  sois  tenté  d'en  reprendre  l'histoire. 

.l'ai  seidement  à  dire  quel  a  été  le  sens  de  la  fête  du  3  jan- 
vier. 

Il  V  a  six  ans.  à  la  fin  de  1882.  une  souscription  a  été  ou- 


—  -21   — 

verle  par  les  soins  de  la  Sociélé  d'aicliéologie  chrétienne  de 
Rome,  de  l'Institut  allemand  de  correspondance  archéolo- 
gique de  Rome,  et  de  l'École  française,  pour  offrir  à  M.  de 
Rossi,  à  l'occasion  de  sa  soixantaine  d'âge,  une  médaille  d'or. 
La  souscription ,  à  laquelle  la  France  a  contribué  pour  une 
large  part,  a  produit  une  somme  supérieure  à  ce  que  devait 
coûter  la  médaille.  M.  de  Rossi  a  voulu  que  le  surplus,  mon- 
tant à  8,000  francs,  fût  employé  aux  travaux  de  découverte 
dans  la  catacombe  de  Priscilia. 

Une  inscription,  composée  par  le  P.  Tongiorgi,  va  être 
l)lacée  ces  jours-ci  mêmes  dans  la  salle  souterraine  où  ont  été 
trouvées  les  sépultures  des  Acilii  Glahrwnes. 

Je  transmets  le  texte  de  cette  inscription  : 

HYPOGAEVM  •  A  C  I  L  I  O  RV  M 
IN  ■  COEMETEHIO-PRISCILLAE 
EFFOSSVM-E  T •  IN  STAV  R  ATV M 
A  •  CHR  •  MDCCCLXXXVIII 
PER  -XTl  -VIR  •  SACRIS  •  MONVMENTIS 
INVESTIGANDIS  •  TVENDIS 
PECVNIA-  COLLA  TA  •  AB  -IIS 
Q_y  I  •  AVREVM  •  NOMISMA 
H  ON  ORI  S -ER  GO-  OBTVLERVNT 
lOANNI  •  BAPTISTAEJDE  •  ROSSI 
AETATIS  •  SVAE  •  ANN VM  •  LX •  EXPLENTI 
FELICITER 

Les  derniers  travaux  pratiqués  dans  la  catacombe  de  Pris- 
cilia n'ont  fait  que  confirmer  les  résultats  précédemment  an- 
noncés. Cette  catacombe  est  remarquable  entre  toutes  parce 
que,  remontant  au  temps  apostolique,  creusée  dans  le  domaine 
d'une  riche  famille  comme  celle  des  Acilii  Glabnones,  elle 
témoigne,  par  sa  belle  architecture,  par  ses  peintures  et  ses 
stucs  de  grand  style,  de  la  prompte  conversion  d'une  partie 
de  la  haute  sociélé  romaine  au  christianisme,  et  des  lumières 
que  peut  tirer  de  l'archéologie  chrétienne  l'histoire  générale. 


O-l 


11  agréera  sans  doute  à  1  Académie  de  recevoir  parfois,  avec 
les  communications  du  Directeur,  les  observations  dues  aux 
membres  de  l'Ecole  française  de  Rome,  celles  dont  ils  doivent 
a\oir  seub  tout  le  mérite. 

M.  Gsell,  membre  de  troisième  année,  en  visitant  avec 
M.  l'abbé  Le  Louët  les  lieux  vagues  situés  près  du  \  alican.  der- 
rière le  Jauicule,  a  trouvé  dans  une  osta-ia .  sur  une  margelle 
de  puits,  de  o".5o  de  diamètre  intérieur,  une  inscription  cir- 
culaire ainsi  conçue  : 

FOPÎLLT\^-L-LMENOPHILVS  D     SP       D 

BopiUius  L.  liiixTtus)  Menophiius  ti\(e'i  s^tui)  p[ecunM)  (i\^edii). 

11  v  a  en  outre  sur  le  jflanc  : 

ET  PAJiiPHILVS-[P-CPILUL  L 

Peut-être  faut-il  lire  :  PojfUU  liihertî)  l{ihertu.f).  Pamphilus 
aurait  été  l'affranchi  de  Popillius  Menophilus. 

Je  transmets  à  FAcadémie  une  seconde  observation  du 
même  membre  de  l'Ecole,  M.  G>ell  : 

r  Inscription  sur  une  petite  base  remarquée  près  de  1  église 
de  Santa-Lucia-in-Selce.  dans  le  prolongement  de  la  via  Ca- 
row  (quartiers  nouveaux  à  Test  de  Rome^  : 


H     E     R     C     V     L     I 

FI   •   LOLIIANVS      V      C       PRAEF 


TI  II 


r.Ce  personnage   est  fort    connu.  Son  nom  complet  était 
Q.  Flanuj.  Miifttw  E^titt¥f  LoiintMHi:  Mm^rt>u.s.  Il   fut  ^mteUor 


—  23  — 

candidatus,  praetor  urhanus,  augiir  pubhcus  populi  romani  Qui- 
ritium,  cornes  Augusli  et  Caesarum,  consulans  (ou  curator)  alvei 
Tiberis  et  cloacarum,  consulans  operum  pubhcorum,  consulans 
aquarum  et  Minuciae,  consulans  Campamae ,  cames  jlavialis ,  cornes 
On'entis  (avant  336,  car  il  le  fut  sous  Constantin,  qui  mourut 
cette  année-là),  cornes primi  ordinis,  proconsul provinciae  Afncae, 
praefectus  Urbi  (en  3^2,  depuis  le  3i  mars  jusqu'au  6  juil- 
let), consul  ordinarius  (en  3 ^b^,  praefectus  praetono  (en  355 
et  356).—  (Cf.  C.  I.  L,  VI,  1723;  X,  1695,  1696, 
Unb^;  — Firmicus  Maternus,  Matheseos prœfal.  (ce  livre  lui  est 
dédié),  VIII,  i5,  etc.;  —  Ammien  Marcellin,  XV,  8,  17; 
XVI ,  8  ,  5  ;  —  Indiculus  prcefect.  Urbi;  —  De  Rossi ,  Inscr. 
Christ.,  n°  122:  —  Fastes  consulaires  manuscrits; —  Code 
théodosien,  VI,  29,  i;  XI,  3o,  20;  36,  11.) 

t^Voir  encore  sur  ce  personnage  Corsini,  Séries  prœf.  Urbis, 
p.  200;  —  M.  Gervasio,  Osservazioni  sulla  iscrizione  onorana 
di  Mavorzio  Lolliano  m  Pozzuoli,  Napoli,  i8/i6;  —  Borghesi, 
Œuvres,  t.  IV ,  p.  519,  sqq.  ;  —  Moramsen ,  Memorie  dell'  Inst. 
arch.,  t.  II ,  1 865 ,  p.  3o3  ,  sqq.  ;  —  De  Rossi,  Bull.  deW  Instit. 
arch.,  1877,  p.  8t;  —  De  Vit,  Onomasticon,  t.  III,  p.    109. 

«La préfecture  indiquée  sur  notre  inscription,  malheureu- 
sement incomplète,  peut  être  soit  la  préfecture  de  la  ville, 
soit  celle  du  prétoire. 

«Le  chiffre  IIII,  qu'on  lit  sur  la  base,  serait-il  l'indication 
du  poids  de  la  statue  en  métal  qui  probablement  surmontait 
cette  base  ?  » 

Veuillez  agréer,  etc. 

A.  Geffrot. 


—  2^ 


IV  II. 


J\OTE  SUR   LES   FOUILLES   DE  L'EGLISE  DES   SAINTS  JEAN    ET   PAUL, 
AU   MONT  CÉLIUS,   À  ROME,   PAR  M.  EDMOND  LE  BLANT. 

(séance  du  i8  janvier  1889.) 

J'ai  eu  l'honneur  d'entretenir  l'année  dernière  l'Académie 
d'une  découverte  im])orlante  faite  sous  l'église  du  Célius,  dédiée 
aux  saints  Jean  et  Paul.  Ce  sanctuaire  a  été,  comme  on  le 
sait,  élevé  sur  la  maison  môme  de  ces  saints,  qui  y  ont  été 
martyrisés  par  ordre  de  Julien  l'Apostat,  ainsi  que  le  rap- 
portent leurs  actes.  Grâce  aux  investigations  sagaces  et  hardies 
du  R.  P.  Germano,  on  a  vu  reparaître  de  nombreuses  chambres 
ornées  de  peintures  du  iv*  siècle,  rappelant  par  leur  style 
celles  des  catacombes,  et  dont  plusieurs  se  rattachent  à  l'his- 
toire même  du  lieu.  Poussées  j)lus  avant,  les  recherches 
viennent  de  donner  des  résultats  nouveaux,  et  l'Académie  me 
permettra  de  lui  communicjuer  les  quelques  renseignements 
que  dom  Germano  veut  bien  m'adresser  à  ce  sujet. 

Parallèlemeiil  au  cUvus  Scnuri,  qui  borde  l'église,  on  a 
déblayé  une  vaste  salle  construite  en  briques  et  décorée ,  au 
moyen  âge,  de  fresques  dont  il  reste  encore  une  partie  impor- 
tante. 

Au  centre  est  le  Christ,  vêtu,  selon  la  mode  de  l'éjjoque 
byzantine,  d'un  pdllium  chargé  de  broderies  et  de  pierres  pré- 
cieuses. Sur  le  livre  des  Evangiles,  (ju'il  tient  à  la  main,  sont 
écrits  les  mots  LVX  EGO  SVM  MVNDl  TOTIVS.  A  ses  côtés 
sont  debout  les  deux  archanges  ailés,  vêtus  avec  la  même  ri- 
chesse et  que  désignent  leurs  noms  écrits  en  lettres  super- 
posées :  S  MICAEL  AR  S  GABRIEL.  On  voyait  auj)rès  de 
ces  derniers  deux  personnages  d'une  taille  moins  élevée  et  qui 
ne  sauraient  dès  lors  représenter  des  apôtres.  Le  pren)ier  a 
malheureusement  disparu;  le  second,  qui  jiorte  la  sfoln  byzan- 


25 


line,  |)arait  tenir  une  couronne;  son  nom,  S  PAVLV,  se  lit  à 
côté  de  lui.  Celui  qui  lui  faisait  pendant  était  sans  doute 
saint  Jean,  son  compagnon  de  martyre.  La  forme  des  lettres 
et  le  caractère  de  la  peinture  permettent  d'altribuer  cette 
fresque  au  vni^  ou  au  ix"  siècle.  Le  culte  des  saints  Jean  et  Paul 
était  donc  demeuré  vivant,  au  moyen  âge,  sur  le  lieu  même 
qu'ils  avaient  habité  et  où  ils  avaient  souffert  la  mort. 

En  enlevant  les  terres  qui  remplissaient  cette  partie  de 
leur  maison,  le  savant  religieux  y  a  recueilli  la  partie  supé- 
rieure d'une  amphore  sur  le  col  de  laquelle  est  peint  au  mi- 
nium le  monogramme  du  Christ  accosté  des  lettres  symboliques 
ACl),  groupe  qui  se  rencontre  à  Rome  dès  355  (De  Rossi, 
Inscriptîoiies ,  t.  I,  n°  127).  Si  ce  débris  n'a  pas  été  apporté 
d'ailleurs,  quand  le  lieu  a  été  remblayé,  peut-être  a-t-il  appar- 
tenu aux  saints  dans  la  maison  desquels  on  l'a  retrouvé.  Le 
savant  M.  Armellini,  à  qui  je  dois  ce  détail  et  qui  connaît  si 
bien  l'épigraphie  antique,  incline  à  le  penser. 

Autant  que  des  ressources  malheureusement  bornées  peuvent 
le  permettre,  on  poursuit  le  déblaiement  de  l'antique  habita- 
tion qui  occupait  entièrement  la  place  recouverte  par  l'église. 


N"  ÏIL 

EXTRAITS  D'LNE  LETTRE   DE  M.  GEFFROY, 
DIRECTEUR  DE  L'ECOLE  FRANÇAISE  DE  ROME. 

(séance  du  25  JANVIER   1889.) 

Rome,  le  ao  janvier  i88g. 

Monsieur  le  Président  et  cher  confrère , 

A  peine  arrivé  à  Rome,  je  me  suis  empressé  de  visiter  les 
fouilles  du  père  Germano  sous  la  basilique  des  Saints  Jean  et 
Paul. 


—  26  — 

Le  plus  important  résultat  des  derniers  travaux  est  la  dé- 
couverte par  le  P.  Germano  d'une  chambre  dans  laquelle  il  a 
pu  s'introduire  par  le  plafond  éventré,  chambre  absolument 
remplie  de  décombres,  comme  l'était  la  maison  entière,  et  dans 
laquelle  je  n'ai  pu  pénétrer  à  cause  du  peu  d'avancement  des 
travaux,  mais  où  le  P.  Germano  assure  avoir  vu  des  peintures 
païennes  fort  belles  d'exécution,  bien  supérieures  à  toutes 
celles  qu'il  a  jusqu'à  présent  découvertes,  et  qu'il  croirait 
pouvoir  dater  sûrement  du  ii"  siècle.  Il  se  propose  de  dégager 
les  thermes  (ou  la  fuUonica?)  situés  au  bas  de  la  maison  ro- 
maine :  j'en  ai  vu,  au  milieu  du  travail  des  ouvriers,  les  pre- 
miers vestiges;  il  dégagera  en  outre  les  parties  de  l'antique 
rue  qui  se  retrouvent  de  plain-pied  avec  les  chambres  infé- 
rieures. 

21  janvier. 

Les  travaux  de  démolition  et  de  fouilles  vont  commencer 
dans  le  quartier  de  Rome  qui  occupe  l'emplacement  du  Forum 
d'Auguste.  Il  s'agit  de  savoir  si  l'on  retrouvera  les  restes  du 
double  portique  construit  en  ce  lieu  par  Auguste,  avec  les 
statues  des  plus  célèbres  chefs  militaires,  dont  les  bases  por- 
taient les  inscri|)tions  rédigées  par  ordre  de  l'empereur.  Nous 
avions  jadis  obtenu  la  permission  de  pénétrer  dans  le  couvent 
de  la  via  Alessandrtna  qui  occupe  toute  une  partie  de  ce  Forum 
d'Auguste.  J'y  ai  fait  une  longue  visite  avec  un  des  architectes 
pensionnaires  de  l'Académie  de  France,  M.  Laloux,  qui  a  re- 
levé les  mesures  de  quelques  salles  antiques.  Il  lui  avait  paru, 
en  vérifiant  les  bases  de  quelques  colonnes  engagées  dans  la 
construction  moderne,  que  nous  étions  en  présence  de  l'ancien 
sol,  sans  aucun  vestige  des  statues  ou  des  inscriptions  si  sou- 
vent recherchées.  Mais  des  portions  entières  du  couvent,  qu'il 
eût  fallu  abattre,  restaient  inaccessibles.  11  faut  voir  si  les  pro- 
chaines fouilles,  accompagnées  de  démolitions  considérables. 


—  27  — 

vont  rendre  au  monde  savant  le  commentaire  au  chapitre  xxi 
de  la  Vie  d'Auguste  par  Suétone.  Nous  suivrons  avec  attention 
les  travaux. 

Veuillez  agréer,  etc. 

A.  Geffroy. 

NMV. 

GENTILICES    ROMAINS    D'ORIGINE    NON    LATINE 

DANS    LES   NOMS    DE    LIEU    DE    LA    GALLE, 

PAR  M.    U.  D'ARBOIS   DE   JUBAINVILLE. 

(séance   du   •20    JANVIER    1889.) 

Notre  savant  confrère  M.  Maury  a  fait  observer  avec  très 
juste  raison  que  le  nom  d'homme  Vibenna,  donné  par  moi  pour 
un  gentilice  romain,  n'est  pas  latin,  mais  étrusque,  et  que 
le  gentilice  Vibius,  qui  appartient  à  la  même  famille,  est  d'ori- 
gine étrusque.  Mais  je  n'ai  pas  dit  que  Vibenna  fût  un  mot 
latin,  j'ai  dit  que  c'était  un  gentilice  romain.  En  l'an  i  oo  après 
J.-C,  0.  Vibenna  Quietus  était  édile  d'Aricia  dans  le  Latium. 
Nous  le  savons  par  une  inscription  trouvée  près  d'Aricia,  à 
Nemi,  et  qui  porte  le  numéro  2218  au  tome  XIV  du  Corpus 
mscnptionum  laLinarum. 

Parmi  les  gentilices  romains,  il  y  en  a  qui  sont  d'origine  la- 
tine :  Flavius  vient  de  favus,  Fulvius  de  fulvus;  mais  un  grand 
nombre  sont  d'origine  étrangère,  et  parmi  ceux-ci  il  y  en  a 
qui,  portés  en  Gaule  par  la  conquête  romaine,  attestent  encore 
aujourd'hui,  dans  nos  dictionnaires  géographiques,  combien 
était  mêlée  et  d'origine  diverse  la  population  qui ,  sortie  du  sein 
de  Rome  conquérante ,  vint  en  Gaule  s'enrichir  des  dépouilles 
du  vaincu. 

Certains  gentilices  romains,  qui  ont  donné  naissance  en 
Gaule  à  des  termes  géographiques,  sont  osques  ou  ombriens. 

Tel  est  Pomponms,  devenu  le  nom  d'un  village  du  départe- 


—  28  — 

ment  de  l'Oise,  aujourd'hui  Pontpoinl,  comme  l'a  reconnu 
très  justement  M.  Longnon;  d'où  le  dérivé  Pomponunius .  au- 
jourd'hui Pompi<jnan  (Tarn-et-Garonne  et  Gard),  qui  appar- 
tient à  l'histoire  littéraire  comme  à  la  géographie.  Tel  est 
Ponlnis,  d'où  le  dérivé  Pontiacus,  en  français  Poncé  (Sarthe), 
Poncey  (Côte-d'Or),  Poincy  (Seine-et-Marne).  Pomponius  tire 
son  origine  du  nom  de  nombre  cardinal  osque  et  ombrien  si- 
gnifiant rcinrp,  et  Pontius  du  nom  de  nombre  ordinal  corres- 
pondant. 

L'origine  de  ces  gentilices  est  itali([ue.  Mais,  parmi  les 
gentilices  que  la  conquête  romaine  a  implantés  dans  la  géo- 
graphie de  la  Gaule,  il  y  en  a  qui  ont  été  puisés  à  une  source 
étrangère  à  l'Italie.  Nous  citerons  par  exemple  un  nom  de 
lieu  que  nous  a  conservé  la  Table  de  Peutinger.  C'est  celui 
qui  y  est  écrit  Filo-musiaco.  C'est  une  station  romaine  située 
entre  Besançon  et  Yverdun.  Filo-musiacus  est  dérivé  de  Pliilo- 
musnis,  dérivé  lui-même  du  nom  d'homme  grec  <I><Àû/«o'jcto5 , 
ç^ami  des  muses».  C'est  un  mot  dont  l'origine  grecque  ne  peut 
être  contestée  et  dont  l'existence  dans  la  langue  grecque  est 
attestée  par  plusieurs  témoignages  qu'il  est  inutile  de  rap- 
peler ici. 

Il  y  a  un  genfilice  romain  d'origine  grecque  qu'il  peut  être 
intéressant  de  signaler,  parce  qu'en  France  il  a  donné  nais- 
sance à  deux  noms  de  lieu  encore  vivants  aujourd'hui,  et  parce 
(}ue,  malgré  sa  provenance  grecque,  il  est  en  grec  un  mot 
d'emprunt  :  c'est  Ammonius.  Ammonius  est  le  grec  Afxfxcôvtos. 
Il  est  dérivé  d'Ammon,  terme  mythologique  égyptien.  Un 
exemple  caractéristique  nous  est  donné  par  une  inscription  du 
nmsée  de  tapies.  C'est  réj)i(aphe  de  M.  Amonius  Bossus,  na- 
tione  ^gyplius'^^K  L'indication  de  l'origine  du  défunt  nous  fait 
signaler  ce  monument,  malgré  l'orthographe  par  une  seule  m 
qui,  suivant  M.  Maspero,est  seule  étymologique,  et  (pii  n'est 
(')  C.  I.  L.,\,Ui-2. 


—  29  — 

pas  celle  des  autres  inscriptions,  exemple  l'inscription  de  Pouz- 
zoles  où  on  lit  les  noms  d'Ammonius  Ammonumus^^\ 

La  conquête  romaine  apporta  ce  nom  en  Gaule. 

Un  vaste  territoire,  qui  formerait  aujourd'hui  une  partie  du 
département  de  la  Nièvre,  appartint  à  un  propriétaire  dont  le 
gentilice  était  Ammonms  et  on  y  bâtit  des  casas  ou  des  villas 
Ammonias^  d'où  le  nom  de  pagus  Ammonias  dans  un  testament 
du  commencement  du  viu"  siècle  ^-^  Le  nom  de  cette  région 
persiste  encore  dans  le  nom  de  la  commune  de  Saint-Jean-aux- 
Amognes  (Nièvre).  Ammonius  a  donné  aussi  le  nom  de  lieu 
dérivéylwmo/^mcHS,  aujourd'hui  Ameugny  (  Saône-et-Loire) ,  qui 
apparaît  plusieurs  fois  dans  le  cartulaire  de  Saint-Vincent  de 
Mâcon,  noté  à  l'ablatif  Ammoniaco  (p.  335),  Amomaco  (p.  i  /io, 
ay-y),  au  ^émùî Amiminiaci  (p.  3^8,  379  ),  Amomaci{j^.  1  ^o), 
dans  des  documents  dont  les  plus  anciens  datent  du  ix"  siècle, 
les  plus  récents  du  xif  siècle. 

On  s'appelait  Amoniosou  Ammoniosà  Alexandrie  en  Egypte 
par  piété  envers  le  grand  dieu  égyptien  Amon  ou  Ammon,  et 
les  termes  géographiques  français  Amognes  et  Ameugny  sont 
en  quelque  sorte  un  écho  lointain  de  la  religion  pratiquée  sur 
les  bords  du  Nil. 

Ammonios  est,  comme Vibenna,  un  gentilice  romain.  L'ori- 
gine étrangère  de  ces  deux  noms  ne  les  a  pas  empêchés  de 
prendre  place  dans  la  longue  nomenclature  des  noms  de  fa- 
mille romains  que  nous  ont  conservés  les  inscriptions  du  temps 
de  l'empire;  ils  v  ont  pénétré  à  côté,  par  exemple,  du  gentilice 
romain  Camullius,  qui  est  d'origine  gauloise,  qui  est  dérivé 
du  nom  du  dieu  gaulois  Camulus,  et  d'où  vient  le  nom  de 
Chamouille  (Aisne),  monument  de  la  religion  des  Gaulois 
comme  Ameugny  de  celle  des  Egyptiens. 

(')  C.  I.  L.,X,  35i/i. 

^-'   pin  pago  Avaleiise  et  Nivernense  sive  Ammonias.n  {P avàesaus,  Diplomata, 
t.  II,  p.  395.) 


—  30  — 


iV  V. 

DES    RAPPORTS    D'INTIMITE    ENTRE    FORTD.NAT,    SAINTE    RADEGO>'DB 
ET  L'ABBESSE  AGNÈS.    PAR    M.    CHARLES  MSARD. 

(SÉANCES   DES   8,    l5    et   3  3    FÉVRIER    1889.) 


Fortunat  n'était  pas  de  ces  poètes  qui  aiment  le  danger  et 
qui  l'attendent.  Boileau  (4  Racine  allaient  résolument  à  la 
tranchée  pour  y  mieux  voir  et  mieux  remplir  leur  charge  d'his- 
toriographe. Mais  c'étaient  des  poètes  de  nom  et  d'effet,  et  de 
grands  poètes,  et  le  courage  dans  ces  âmes  élevées  était  une 
partie  de  leur  talent.  Fortunat  était  un  versificateur  abon- 
dant, quoique  rarement  facile,  incapable  d'une  idée  grande 
et  suivie,  inspiré  par  l'occasion,  faisant  des  vers  à  la  chaude, 
et.  comme  le  poète  Lucile  et  toute  proportion  gardée, 

Garrulus,  atque  piger  scribendi  ferre  laborem. 
Scrihcndi  recle. 

Horaco.  Snt.,  I ,  i,  v.  lo. 

Il  aimait  la  nature,  qu'il  a  peinte  plus  d'une  fois  avec  agré- 
ment et  vérité;  il  aimait  la  bonne  chère  et  l'avouait  en  homme 
qui  a  bonne  envie  de  s'en  vanter;  il  aimait  enfin  qu'on  le  re- 
cherchât, le  louât,  le  caressât.  Sa  modestie,  qui  était  véritable, 
n'en  était  point  troublée;  car,  ce  qu'on  lui  donnait  à  cet 
égard,  il  le  rendait  aussitôt  avec  usure.  La  plupart  du  temps 
même,  et  pour  peu  qu'il  crût  que  sa  sûreté  personnelle  y  fût 
intéressée,  il  prenait  les  devants.  De  pareilles  dispositions 
n'allaient  pas  à  en  faire  un  preux.  Aussi,  dès  que  les  Goths 
eurent  envahi  l'Italie,  il  dil  adieu  à  la  villn  de  ïrévise,  son 
pays  natal,  traversa  une  grande  partie  de  la  Germanie  où  il  fit 
quelques   belles  connaissances,  et   vint  avec  ses  tablettes  et 


—  31   — 

précédé  d'une  sorte  de  renommée  poétique,  s'échouer  sur  le 
sol  de  la  vieille  Gaule,  dans  les  Etats  de  Sigebert,  roi  d'Aus- 
trasie. 

C'est  sans  doute  parce  qu'il  chanta  dans  un  épithalame 
le  mariage  de  ce  prince  avec  Brunehaut  qu'Ampère  en  a  fait 
un  poète  de  cour.  Il  lui  en  a  même  donné  le  nom.  La  vé- 
rité est  que  son  épithalame  est  bien  à  tous  égards  de  la  poésie 
de  cour.  Mais  la  sienne  a  plutôt  l'air  de  celle  d'un  poète  qui 
aspire  à  gagner  des  lauriers,  que  d'un  poète  qui  en  serait  déjà 
couronné.  Un  pareil  genre  de  vie  lui  plaisait  assez  et  il  eût 
peut-être  prolongé  davantage  son  séjour  à  Metz,  s'il  ne  se  fût 
rappelé  qu'il  n'était  pas  venu  en  Gaule  seulement  pour  fuir 
les  Goths,  mais  aussi  pour  aller  à  Tours  remercier  saint  Martin , 
dont  l'huile  miraculeuse,  dans  l'éghse  des  saints  martyrs  Jean 
et  Paul,  à  Ravenne,  l'avait  guéri  d'un  mal  d'yeux.  Il  en  avait 
faille  vœu.  Ce  devoir  rempli,  il  quitta  Tours  et  vint  à  Poi- 
tiers, où  il  obtint  par  faveur  (car  il  était  dans  les  ordres  quand 
il  abandonna  l'Italie)  d'entrer  dans  le  clergé  de  cette  ville, 
quoiqu'il  fût  étranger. 

C'est  alors,  si  je  ne  me  trompe,  qu'il  connut  Radegonde. 
On  ne  sait  par  quels  moyens,  si  ce  n'est  qu'il  lui  avait  été  pro- 
bablement recommandé  par  Grégoire  de  Tours;  mais  il  a  né- 
gligé de  nous  le  dire.  Nulle  part,  dans  ses  poésies,  il  n'y  est 
même  fait  allusion.  On  y  voit  seulement  qu'il  devint  l'agent (^', 
le  conseiller  intime  de  Radegonde  et  l'intendant  du  temporel 
du  monastère  de  Sainte-Croix,  fondé  par  celte  reine;  on  y 
voit  surtout  qu'il  en  fut  le  poète  attitré. 

Très  peu  des  billets  qu'il  a  adressés  à  sa  royale  maîtresse  et 
à  la  mère  Agnès,  abbesse  du  monastère,  ont  une  date  tant 
soit  peu  précise.  A  cet  égard,  il  reste  presque  constamment 
dans  le  vague  ou  l'oubli,  participant  ainsi  du  sexe  de  ses  cor- 

^')   Fortunalus  agens,  liv.  XI,  pièce  h. 


—  32  — 

respoiulantes,  sexe  ennemi  des  dates  qu'il  ignore  volontiers, 
coinnie  si  cette  ignorance  tenait  en  suspens  la  course  de  l'âge. 
Mais  il  était  le  plus  souvent  tout  près  d'elles  en  leur  écrivant, 
et  l'on  croirait  même  qu'il  écrivait  de  cellule  à  cellule,  s'il 
avait  eu  une  cellule  dans  le  monastère. 

Son  premier  billet  (car  toutes  ses  lettres  ne  méritent  pas 
un  autre  nom)  adressé  à  Radegonde  est,  selon  moi,  la  cin- 
quième pièce  du  huitième  livre.  Il  y  avait  vingt  ans  que  Rade- 
gonde vivait  dans  son  monastère  et  dans  la  pratique  la  plus 
rigoureuse  de  la  vie  spirituelle,  lorsque  Fortunat  vint  en 
Gaule  ^^'.  R  yen  avait  bien  davantage  quand  il  vint  à  Poitiers 
dans  la  seule  pensée  de  la  voir  et  de  l'honorer.  Il  est  présu- 
mable  qu'outre  la  recommandation  de  Grégoire  de  Tours,  il 
avait  emporté  avec  soi  celles  de  Sigebert  et  de  Rrunehaut,qui 
l'avaient  si  bien  accueilli  à  Metz,  et  qui  ne  pouvaient  lui  refuser 
cette  grâce.  Radegonde  avait  alors  environ  quarante  ans.  Ce 
qui  perçait  de  sa  vie  retirée  faisait  l'étonnement  et  excitait 
l'admiration  des po|)ulalions  gauloises,  de  Metz  à  Marseille,  et 
Fortunat  partageait  cette  inqnession.  Il  n'était  pas  homme  à 
se  dérober  à  l'entraînement  général  on  [)ar  orgueil  on  par 
scepticisme;  il  suivait  volontiers  la  foule,  croyait  ce  qu'elle 
crovait  et  quelquefois  plus  encore. 

Dès  qu'il  eut  approché  Radegonde.  il  lui  fut  acquis  tout 
entier.  Elle  avait  à  la  fois  le  prestige  du  rang,  de  la  beauté 
et  d'une  piété  qui  participait  de  celle  des  martyrs  et  de  celle 
des  anges.  On  s'imagine  aisément  ce  que  notre  poète  dut  res- 
sentir à  l'aspect  de  celte  triple  majesté.  Ce  qui  l'en  frappa  le 
plus  d'abord  et  ce  (ju'on  voit  dès  le  début  de  son  premier 
billet,  c'est  la  majesté  de  la  personne,  c'est  la  reine  des  Francs, 
comme  anéantie  sous  le  voile  de  la  religieuse,  ot  n'y  perdant 
pas  néanmoins  un  ravon  df  la  s|)len(leur  roNalo.  Fortunat  en 

0)  En  56/j  ou  r)G5. 


—  33  — 

parle  romme  s'il  s'en  fût  senti  plus  touché  qu'un  autre,  et  qu'il 
eût  connu  le  premier  ce  qui  était  déjà  de  notoriété  publique. 
J'imagine  qu'il  en  fit  sa  cour  à  Radegonde,  que  les  flatteries 
ne  pouvaient  guère  toucher;  il  lui  plut  par  d'autres  raisons. 
11  lui  plut  parce  qu'il  avait  pour  répondants  des  princes  de  sa 
famille  et  un  saint  évêque,  Grégoire  de  Tours;  parce  qu'il 
était  poète  et  correspondait  ainsi  à  son  propre  goût  pour  la 
poésie,  et  qu'elle  pourrait  s'en  servir  ou  comme  de  maître  ou 
comme  de  collaborateur;  il  lui  plut  par  son  caractère  de 
prêtre,  toujours  plus  imposant  aux  yeux  d'une  femme  qu'à 
ceux  de  l'autre  sexe;  il  lui  plut  enfin  par  son  enjouement,  sa 
délicatesse,  sa  modestie,  sa  douceur  et  son  dévouement  ab- 
solu, toutes  qualités  ayant  pour  efî"et  de  faire  toujours  désirer 
la  présence  de  ceux  qui  les  possèdent,  et  contracter  l'habitude 
de  ne  pouvoir  plus  se  passer  d'eux'. 

Il  est  aisé  de  croire  que  le  poète  en  avait  amené  là  Rade- 
gonde et  Agnès,  lorsqu'il  s'établit  entre  tous  les  trois  un 
échange  de  petits  cadeaux,  ainsi  qu'il  se  pratique  entre  les 
amitiés  innocentes  qui  n'ont  pas  assez  de  leur  agréable  babil 
pour  se  manifester  à  leur  gré.  Fortunat  en  prit  l'initiative. 
11  envoie  des  fleurs;  elles  sont  de  son  jardin.  Ce  sont  entre 
autres  plantes  odoriférantes  des  violettes  pourprées,  espèce 
rare.  11  prie  qu'on  l'excuse  s'il  n'envoie  pas  des  roses;  il  n'en 
a  point,  et  pour  en  avoir,  il  faudrait  qu'il  en  achetât.  L'amitié 
de  ses  amies  lui  en  épargnera  la  dépense,  en  faisant,  dit-il, 
des  roses  de  ses  violettes  '''.  Le  compliment  manque  de  dis- 
tinction et  de  hardiesse;  mais  gardez- vous  d'en  rire;  les 
plus  grandes  passions  à  leur  naissance  ont  des  timidités  de  ce 
genre. 

Il  eut  lieu,  sans  doute,  de  se  louer  de  cette  manière  de 
faire  sa  cour  avec  des  fleurs;  car  il  en  use  souvent.  Cesl  qu'il 

<'^   Liv.  VII r,  pit're  6.  Prnferl  qui  violas  fer l  Pt  ttinorc  rouas. 

xvii.  o 


IU7RIUE<lIti    .MTIOMLIS- 


I 


—  u  — 

n'avait  pas  seulement  pour  objet  de  procurer  à  ses  amies  un 
plaisir  qui  leur  fût  personnel,  il  voulait  aussi  contribuer  pour 
sa  part  à  orner  les  autels,  en  ces  jours  de  fête  où  les  fleurs 
en  sont  presque  toute  la  parure.  C'est  là  le  fond  d'un  certain 
nombre  de  ses  plus  jolies  pièces.  On  me  permettra  de  m'y  ar- 
rêter un  moment.  Dans  ces  solennités,  c'était  un  devoir  pour 
les  religieuses  et  un  très  vif  amusement  de  travailler,  si  j'ose 
me  servir  de  cette  expression  profane,  à  la  toilette  des  autels, 
et  de  les  rehausser  par  tout  l'éclat  dont  la  moindre  partie 
leur  était  interdite  à  elles-mêmes.  Radegonde  et  Agnès  prê- 
taient leurs  mains  à  ce  pieux  oflice,  et  l'accaparaient  même 
quelquefois.  C'est  à  une  circonstance  de  ce  genre  que  se  rat- 
tache la  pièce  suivante,  qui  a  beaucouj)  de  charme,  que  les 
antithèses  même  ne  déparent  pas,  et  où  l'on  remarque  ce  sen- 
timent vif  des  beautés  do  la"  nature  que  j'ai  signalé  plus  haut 
dans  la  poésie  de  Fortunat  : 

f^ L'hiver  sévit;  la  terre  est  gelée  partout.  La  vie  est  morte 
dans  les  champs  faute  de  fleurs.  Au  printemps,  saison  où  le 
Seigneur  triompha  de  l'enfer,  rherbo  pousse  et  dé[iloie  sa 
chevelure  avec  plus  d'abondance.  Les  hommes  ornent  de  fleurs 
les  portes,  les  ihi'àtres;  les  femmes  parfument  leur  corsage 
en  le  garnissant  de  roses.  Vous  autres,  c'est  aux  églises  que 
vous  en  offrez  les  prémices.  Vous  tressez  de  vos  mains  des 
guirlandes  et  parez  les  autels  de  ces  fleurs  nouvellement  édoses. 
Il  y  a  une  disposition  particulière  pour  le  safran  à  la  corolle 
dorée,  une  autre  pour  la  violette  aux  reflets  de  pourpre.  Ici 
sont  le  rouge  vif  et  le  blanc  de  neige;  là  le  bleu  est  voisin  du 
vert.  Les  couleurs  se  contrarient  tellement  qu'on  croirait  toutes 
ces  fleurs  en  guerre  les  unes  avec  les  autres  dans  le  sanctuaire 
de  la  j)aix.  L'une  plaît  par  sa  blancheur,  l'autre  par  des  tons 
jaune  d'or;  celle-ci  sent  meilleur,  celle-là  brille  davantage. 
Bref,  c'est  une  lutte  entre  ces  diverses  espèces,  à  qui  l'em- 
[)ortera  ou  |)ar  la  rouleur.  (mi   par  l'odeur.  Cet  arrangement. 


—  35  — 

Radegonde  et  Agnès,  est  l'œuvre  de  vos  mains.  Puissiez-vous 
respirer  un  jour  les  senteurs  éternelles  '"!  w 

Voilà  bien,  si  je  ne  me  trompe,  de  la  poésie  comme  il  en 
faut  pour  les  couvents  de  filles;  elle  a  de  la  grâce,  et  le  diable 
n'y  a  pas  un  coin  où  se  loger. 

Fortunat  assiste  à  un  festin  en  l'honneur  de  Radegonde. 
Ce  ne  sont  partout  que  des  fleurs.  La  table,  les  murs,  le  pla- 
fond y  sont  enfouis.  L'odeur  en  est  si  forte  que  tout  autre  que 
le  poète  eût  craint  d'en  être  incommodé;  lui  les  respire  avec 
délices,  y  voyant  un  présage  de  la  saveur  des  mets.  La  table 
seule  est  un  vrai  jardin.  Les  roses  et  les  lis  s'y  disputent  la 
place,  et  c'est  sur  ce  parterre  que  les  plats  sont  dressés.  Ces 
fleurs  étaient  sans  doute  effeuillées  sur  l'ais  que  la  nappe  re- 
couvre habituellement,  car  le  poète  en  fait  ressortir  le  con- 
traste et  en  marque  la  supériorité.  Sur  les  murs  tapissés  de 
guirlandes  de  lierre  et  de  bouquets  de  roses,  on  ne  voit  plus 
la  chaux  dont  ils  sont  enduits.  Les  plafonds  eux-mêmes  sont 
cachés  sous  cette  quantité  de  verdure;  on  penserait  voir  les 
prés  verdir  jusque  sous  les  toits  '-^.  Tout  cela  était  merveil- 
leux, et  un  homme  moins  sur  sa  bouche  que  notre  Fortunat 
en  eût  peut-être  un  moment  oublié  sa  faim. 

Les  fleurs  n'étant  pas  quelque  chose  d'assez  rare  pour 
être  toujours  nouveau,  le  poète  y  suppléait  par  des  présents 
d'autres  espèces;  mais  ils  sont  si  modestes  qu'il  rougit  presque 
de  les  offrir.  Néanmoins  il  s'efforce  de  les  faire  valoir  ou  par 
des  raisons  de  sentiment,  ou  par  sa  bonne  humeur,  ou  même 
par  des  jeux  de  mots  :  ç^Ne  dédaignez  pas,  dit-il,  ces  présents 
à  cause  de  leur  peu  de  valeur,  car  si  vous  me  demandez  ce 
que  j'en  pense,  je  vous  dirai  qu'on  voit  la  grandeur  de  l'amitié 
à  la  petitesse  du  présent  '^\  v  II  dit  ailleurs  quelque  chose 

(')  Liv.  Vlll,  pièce  7. 
'^)  Liv.  XI ,  pièce  1  j . 
(^'  Liv.  T\  ,  pièco  9J\. 


—  36  — 

d'analogue,  mais  avec  plus  de  délicatesse  :  ^Si  vous  voulez 
bien  rcflécliir,  vous  verrez  que  les  petite  présents  de  ceux  qui 
aiment  avec  constance  ont  une  grâce  que  n'ont  pas  les  autres^'^  w 

Un  jour  que  Radegonde  et  Agnès  étaient  à  complies,  For- 
tunat  eut  l'idée  de  leur  faire  je  ne  sais  quels  présents.  Il  pre- 
nait bien  son  temps!  La  Règle  de  saint  Benoît,  (jui  était  celle 
de  saint  Césaire,  de  qui  Radegonde  l'avait  prise,  défendait  aux 
personnes  de  la  congrégation  de  recevoir  des  cadeaux  de  qui 
que  ce  fût,  une  fois  complies  dites.  Or  le  poète,  ayant  pour  la 
circonstance  un  jeu  de  mots  en  réserve,  qu'U  avait  autant  à 
cœur  de  produire  que  ses  cadeaux  mêmes,  n'attendit  pas  la 
fin  derolïice,et  il  fit  son  envoi  qu'accompagnait  cette  prière  : 
^^S\  vous  n'avez  point  encore  accompli  vos  complies,  si  non 
complosds  compléta,  je  vous  prie  humblement  d'accepter  ces 
présents  '-1  » 

Lfn  autre  jour  il  envoie  des  châtaignes  dans  une  corbeille 
de  jonc  ou  d'osier  tressée  de  ses  mains '•*';  un  autre,  ce  sont 
des  prunelles  noires  cueillies  dans  les  bois,  et  qui  pendaient 
encore  à  leurs  branches.  A  propos  de  ces  prunelles,  il  prévient 
Radegonde  «que  ce  ne  sont  pas  là  des  champignons  sortis  de 
terre,  mais  des  fruits  qu'un  arbre  a  portés,  que  c'est  un  ali- 
ment'sain  ot  qu'elle  peut  en  manger  sans  crainte;  «pi'il  n'au- 
rait pas  la  cruauté  de  donner  à  sa  mère  ce  qui  ])Ourrait  lui 
faire  du  mal  ''l  w  Radegonde  avait-elle  vécu  juscpi'à  quarante 
ans,  sans  avoir  jamais  vu  de  prunelles? 

Ces  détails  paraîtront  sans  doute  un  ])eu  bien  puérils,  comme 
ils  le  sont  en  elfet  ;  mais  ils  le  paraîtront  encore  davan- 
tage, si  l'on  considère  que  la  scène  se  passait  il  y  a  1 1  5o  ans, 
à  une  épo(|ue  et  dans  un  pavs  où   les  mœurs  étaient  aussi 

<■'  Liv.  \1 ,  pièce  17. 

<**  Liv.  XI,  pièce  ad. 

<'>  Liv.  \l,  pièce    1  ',i. 

"'  Liv.  M ,  pièce  its. 


—  37  — 
dissolues  que  les  allcntats  dont  elles  étaient  l'objet  étaient 
impunis;  que  les  relations  d'un  sexe  à  l'autre  dans  les  cou- 
vents avaient  déjà  bien  ])erdu  de  leur  innocence,  et  que  celui 
de  Sainte-Croix  même  fut,  immédiatement  après  la  mort  de 
Radegonde,  le  théâtre  de  désordres  abominables,  quelques- 
uns  impossibles  à  décrire.  C'en  est  assez  pour  faire  excuser  ces 
détails. 

Il  va  sans  dire  que  Radegonde  et  Agnès  reconnaissaient 
les  cadeaux  reçus  par  des  cadeaux  rendus,  et  comme  elles 
étaient  plus  riches  que  leur  poète,  elles  étaient  aussi  plus 
libérales.  Leurs  libéralités  consistaient  principalement  en  vic- 
tuailles. C'étaient  d'innombrables  friandises  et  ces  petites  délica- 
tesses de  table  qui  sont  le  secret  des  religieuses,  et  dont  quel- 
ques-unes en  ont  jusqu'ici  retenu  le  nom.  C'étaient  aussi  ce 
qu'on  nomme  aujourd'hui  des  pièces  de  résistance.  Quels  qu'ils 
fussent  d'ailleurs,  les  deux  amies  appelaient  ces  présents  d'un 
nom  pieux ,  c'est-à-dire  des  eulogies  "^  Rien  ne  plaisait  da- 
vantage à  Fortunat,  car  il  était  gourmand  jusqu'à  ne  sauver 
pas  même  les  apparences,  et  à  confesser  son  vice  avec  plus 
d'audace  qu'il  n'eût  fait  une  vertu.  Une  fois  qu'il  avait  régalé 
ses  amis  de  la  cuisine  du  couvent,  Agnès  voulut  savoir  quel 
usage  il  avait  fait  des  eulogies  qu'on  lui  avait  envoyées.  Il  ré- 
ponditque  certains  légumes  tout  farcis  de  miel  avaient  défrayé 
le  premier  service,  et  qu'on  y  était  revenu  non  pas  une,  non 
pas  deux,  mais  trois  et  quatre  fois;  qu'on  apporta  ensuite  un 
superbe  quartier  de  viande,  dressé  en  forme  de  montagne, 
et  flanqué  de  collines  dont  les  intervalles  étaient  remplis  par 
un  jardin  de  ragoûts  variés;  que,  gourmand  comme  il  est,  il 

f"  Les  eulogies  proprement  dites  étaient  dans  la  primitive  Eglise  des  pains 
bénits  offerts  aux  fidèles  pendant  la  messe,  et  dont  on  réservait  une  partie  pour 
la  sainte  eucharistie.  C'étaient  aussi  des  pains  ou  autres  aliments  que  lesévêques 
et  les  prêtres  s'envoyaient  réciproquement,  en  les  accompagnant  de  missions 
salutatoires.  Enfin  on  comprit  en  général  sous  le  nom  d'eulogies  Ions  présents, 
mêmes  profanes,  envoyés  ou  reçus  :  ce  qui  est  le  cas  dont  il  s'agit  ici. 


—  38  — 

a  eu  raison  de  tout  cela,  et  que  montagne  et  jardin  ont  passé 
dans  son  ventre  et  s'y  sont  bien  logés  ^^\ 

Un  second  convoi  de  vivres  succède  au  premier.  Agnès  en 
demande  des  nouvelles.  Comme  il  est  beaucoup  plus  copieux 
que  l'autre,  Fortunat  est  embarrassé  et  ne  sait  par  oii  com- 
mencer son  rapport.  trO  incertitude  délicieuse!  5?  s'écrie-t-il. 
Cependant  il  fait  l'énumération  des  mets,  et  c'est  à  Radegonde 
cju'il  l'adresse.  C'est  d'abord  un  beau  morceau  de  viande  dressé 
sur  un  plat  d'argent;  c'est  ensuite,  sur  un  plat  de  marbre,  ces 
fameux  légumes  au  miel  qui  ont  déjà  ravi  son  palais,  puis,  sur 
un  plat  de  verre  contourné,  des  poulets  d'un  poids  énorme, 
bien  qu'ils  n'aient  plus  leurs  plumes;  puis,  jetés  pêle-mêle  dans 
des  corbeilles  ornées  de  peintures ,  quantité  de  fruits  ;  puis  enfin 
une  jatte  de  terre  noire  remplie  de  lait  qui  était  arrivée  triom- 
phante, tant  elle  était  sûre  de  lui  plaire,  c^ C'est  ainsi,  dit-il, 
que  soumis  à  la  mère,  ma  maîtresse,  je  lui  rends  compte  de 
l'emploi  des  présents  de  sa  fille,  demeurant  toujours  avec 
elles  en  tiers  dans  leur  pieuse  affection  ^~\  » 

Les  bonnes  religieuses  firent  si  bien  que  notre  homme  en 
tomba  malade.  Son  médecin  dut  le  mettre  au  lait.  C'était 
maigre.  Mais  enfin  saint  Paul  en  prescrit  l'usage  aux  malades; 
le  poète  suivra  donc  l'ordonnance  de  l'apôtre.  De  son  côté, 
Agnès  s'ingénie  à  le  lui  préparer  sous  mille  formes  diverses. 
Il  est  question  ici  d'une  crème  solidifiée  de  manière  à  recevoir 
des  images  gravées  à  l'ongle.  Agnès  y  avait  montré  un  vrai 
talent  d'artiste,  ^t Dites-moi,  je  vous  prie,  lui  écrit  le  poète, 
qui  a  dressé  vos  jolis  ongles  à  graver  si  bien?  Dédale  se- 
rait-il voire  maître'^'? 55  Allez  donc  lui  recommander  d'être 
sobre,  comme  le  faisait  Agnès,  au  milieu  de  toutes  ces  ten- 
tations. Il  y  était  au  supplice.   «Avec  toutes  vos  douceurs, 

^'>  Liv.  IX ,  pièce  9. 
^^'>  Liv.  XI,  pièce  10. 
f'*'  Liv.  XI,  pièco  1  ^1. 


—  39  — 

c'est  lin  jeune  que  vous  m'envoyez;  c'est  le  l'en  que  vous 
me  faites  soull'rir,  rien  qu'à  les  voir,  (ie  que  mes  yeux  con- 
voitent, le  médecin  le  refuse  à  ma  bouche,  et  sa  main  me 
retire  ce  qu'appète  ma  gourmandise  ''l»  Il  en  voulait  à  ce 
médecin  pour  l'avoir  empêché  d'aller  à  un  repas  qu'Agnès 
avait  préparé  exprès  pour  lui.  «Tout  médecin  est  trompeur, 
disait-il,  et  c'est  en  trompant  qu'il  démontre  son  art.  Le  mien, 
qui  a  un  estomac  insatiable,  a  jugé  que  j'aurais  assez  de  mon 
ordinaire.  Pardonnez-moidonc  mon  absence ,  Agnès ,  et  ne  m'im- 
putez pas  un  manquement  qui  est  le  crime  d'aulrui  *-l»  Le 
voilà  donc  décidément  au  régime;  tout  envoi  de  bons  mor- 
ceaux a  cessé.  Il  ne  reçoit  plus  guère  que  des  herbes  rafraîchis- 
santes, des  laitues,  des  pruneaux,  du  lait  et  des  œufs  frais. 
«Sont-ce  là,  dit-il  à  ses  amies,  vos  présents  cl  vos  provisions? 
Puisse  leur  diversité  ne  pas  troubler  la  paix  de  mon  ventre  ! 
Vous  voulez  que  je  m'en  tienne  à  deux  œufs  le  soir  :  à  vous 
dire  vrai,  j'en  ai  gobé  trois.  Plaise  à  Dieu  que  ma  pensée 
obéisse  à  vos  ordres  toute  ma  vie  comme  ma  gourmandise  le 
fait  aujourd'hui  '^'  !  v 

Il  finit  pourtant  par  se  rétablir,  et  il  se  rétablit  si  bien 
qu'il  se  hâta  d'en  abuser.  Il  en  négligea  la  poésie,  et  força  ses 
amies  à  l'y  rappeler.  Un  jour  elles  lui  demandent  des  vers; 
mais  ce  jour-là  il  donnait  à  diner  chez  lui,  et  son  esprit  tout 
tourné  vers  la  cuisine  n'avait  ni  le  temps  ni  le  moyen  de  rêver 
à  des  distiques.  Le  lendemain  pourtant  il  dut  se  justifier,  et 
il  le  fait  gaillardement.  Il  raconte  qu'étant  plongé  dans  les 
délices  d'une  table  oii  il  y  avait  pour  tous  les  goûts,  tantôt  il 
ouvrait  la  bouche,  tantôt  il  fermait  les  yeux ,  et  que  tout  en- 
tier au  manger  et  au  boire,  il  avait  l'esprit  trop  brouillé  pour 
avoir  la  parole  libre  et  facile.  Ses  doigts  ni  sa  plume  n'étaient 

(''   Liv.  I\ ,  pièce  g. 
<''  Liv.  IX,  pièce  16. 
'^'  Liv.  IX,  pièce  20. 


—  /jO  — 

capables  d'écrire  des  vers;  sa  muse  était  ivre,  et  sa  main  n'eût 
formé  que  des  zigzags.  De  plus,  la  table  lui  semblait  nager 
dans  le  vin.  ?t Cependant,  ajoute-t-il,  pour  répondre  à  l'ai- 
mable requête  de  ma  mère  et  de  ma  sœur  *^',  je  leur  ai  fait 
aujourd'hui,  comme  je  l'ai  pu,  ces  petits  vers.  Quoique  le 
sommeil  m'assaille  et  m'enlace,  mon  amitié  l'emporte,  et  je 
vous  écris.  Mais  que  ma  main  est  mal  assurée  '-^  !  " 

On  dira  peut-être  que  c'est  trop  s'étendre  sur  des  choses 
d'un  ordre  aussi  vulgaire;  mais  outre  que  leur  vulgarité  est 
relevée  par  la  qualité  des  personnes,  et  par  le  milieu  et  le 
temps  où  elles  se  sont  passées,  elles  nous  apprennent  que  là 
où  nous  pensions  trouver  de  grands  contrastes  avec  les  mœurs  * 
actuelles,  nous  ne  trouvons  que  des  similitudes,  et  que  ce 
côté  modeste  de  la  civilisation  qui  consiste  en  distractions  in- 
nocentes et  en  débauches  de  table  inofîensives  était  le  même 
chez  les  Gaulois  du  vi"  siècle  que  chez  les  Français  du  xix*. 
Mais  nous  en  avons  fini  avec  ces  témoignages  presque  enfan- 
tins d'une  amitié  où  les  trois  amis  ne  semblent  diflférer  les 
uns  des  autres  ni  par  l'âge,  ni  par  le  sexe;  nous  allons  en 
aborder  d'autres  où  celte  homogénéité  apparente  disparaîtra 
tout  à  fait. 

II. 

La  grande  affection  pour  Radegonde,  née  à  peu  près  à 
i'improviste  dans  le  cœur  de  Fortunat,  s'était  développée  rapi- 
dement sous  le  couvert  de  la  familiarité  dont  elle  l'honorait. 
A  cet  égard  Radegonde  n'avait  besoin  ni  d'efforts  ni  d'avances; 
elle  n'avait  qu'à  être  simplement  bonne  et  gracieuse,  et  les 
gens  tombaient  à  ses  pieds.  Cependant  notre  poète  n'était 
point  en  péril.  On  doit  croire  qu'il  se  surveillait  de  très  près, 
et  qu'il  ne  se  mit  jamais  dans  le  cas  d'obliger  sa  maîtresse  à  le 

^''  C'est  ainsi  qu'il  appelle  Radegonde  et  Agnès. 
'"^  Liv.  IX,  pièce  3  3. 


—  /il  — 

reiiieKri;  à  sa  |)Iacc,  s'il  cul-  tenté  d'en  sortir.  V  dire  viai, 
Kadcj^diidc,  à  ses  yeux,  élait  déjà  une  sainte,  et  sa  passion 
j)Our  elle  allait  aussi  loin,  si  ce  n'est  davantage,  que  peut  aller 
ic  culte  de  dulie.  On  sait  que  par  ce  mot  on  désigne  l'honneur 
et  le  respect  que  l'on  rend  aux  saints.  Néanmoins,  au  milieu 
de  toutes  les  dévotions  qui  constituent  le  culte  du  poète  envers 
Radegonde,  il  se  mêle  ([uelciuclois,  et  selon  l'occurrence,  des 
exhortations  et  des  conseils;  mais  alors  il  a  (oujours  soin  de 
s'y  couvrir  de  l'adhésion,  dirai-je  de  la  complicité,  d'Agnès  et 
même  des  autres  religieuses.  Ainsi,  pendant  le  carême,  Kade- 
gondc  se  privait  presque  absolument  de  nourriture.  Elle  était 
intraitable  sur  ce  point.  Sa  santé  en  était  compromise,  et 
toute  la  communauté  en  était  dans  des  inquiétudes  qui  s'ac- 
croissaient au  fur  et  à  mesure  (|ue  le  carême  touchait  à  sa 
fin.  On  aurait  voulu  du  moins  qu'elle  combattit  sa  faiblesse 
en  buvant  un  peu  de  vin,  et  on  l'en  su[)pliait.  Fortunat  ne 
manquait  pas  d'alléguer  le  commandement  de  saint  Paul  à 
Timothée  :  «Ne  continuez  plus  à  ne  boire  ([ue  de  l'eau;  mais 
usez  d'un  peu  de  vin,  à  cause  de  votre  estomac  et  de  vos  fré- 
quentes maladies ^^l»  Il  est  vrai  que  saint  Paul  ordonne  aussi 
le  lait,  mais  c'est  aux  intempc'rants,  ainsi  qu'on  l'a  pu  remar- 
quer plus  haut,  et  non  pas  aux  jeûneurs,  et  l'on  a  vu  au  même 
endroit  que  Fortunat  avait  dû  se  soumettre  à  ce  régime.  Saint 
Paul  comme  médecin  de  l'animal  avait  donc  sa  confiance;  il 
ne  s'agissait  que  de  la  faire  partager  à  Radegonde.  Mais  telle 
était  l'obstination  de  cette  grande  révoltée  contre  les  remèdes 
humains  que  saint  Paul,  s'il  eût  été  là  et  lui  eût  présenté  la 
coupe,  n'eût  pas  été  plus  obéi  qu'un  petit  médicastre. 

A  l'approche  de  Pâques,  les  austérités  redoublaient.  Rade- 
gonde s'enfermait  alors,  et  restait  cachée  et  inaccessible  à  toutes 
et  à  tous  sans  exception.  On  ignorait  même  où  était  sa  retraite. 

<''  Timolhcc,  I,  cli.  v,  v.  2.3. 


—  Ii2  — 

Cela  n'empêchait  pas  cependant  notre  poète  de  lui  écrire  les 
billets  les  plus  tendres  pour  l'engager  à  en  sortir.  Elle  ne  lui 
répondait  pas  plus  que  ne  répondait  la  Sainte  Vierge  à  ce 
dévot  qui  lui  écrivait  des  lettres  qu'il  mettait  à  la  poste.  Un 
de  ces  billets  portait  :  ^Esprit  que  Dieu  féconde,  lumière  qui 
vous  dérobez  à  nos  yeux,  sans  vous  je  suis  plongé  dans  des 
ténèbres  épaisses.  Vous  nous  privez  de  vous  voir,  comme  si 
celui  qui  vous  aime  ne  vous  voyait  pas  toujours,  et  comme  si, 
quand  je  vous  vois,  je  ne  pensais  pas  que  je  ne  vous  vois  pas 
assez,  w  Et  dans  son  dépit,  il  s'écriait  :  wJe  le  jure  cependant, 
je  pénétrerai  avec  vous  dans  votre  cachette,  car  je  vous  suivrai 
en  esprit  là  où  vous  me  défendez  d'aller  moi-même  '''.  55 

Ignorait-il  vraiment  oii  se  cachait  Radegonde,  ou  feignait- 
il  de  l'ignorer?  Je  crois  qu'il  l'ignorait;  mais  je  crois  aussi  que 
ses  billets,  je  devrais  dire  ses  sommations,  n'étaient  pas  de 
simples  jeux  d'esprit,  destinés  à  entrer  quelque  jour  dans  son 
recueil  de  poésies,  mais  que,  à  la  faveur  de  quelque  com- 
plicité obligeante  et  discrète,  il  était  sûr  qu'ils  arriveraient  à 
leur  adresse.  Quel  était  le  complice?  Ce  ne  pouvait  être 
qu'Agnès,  la  seule  personne  du  monastère  qui  devait  tout 
savoir  et  qui  savait  tout.  N'était-elle  pas  en  tiers  dans  les  épan- 
chements  oii  le  poète  dissipait  les  dons  de  son  âme  aimante? 
N'avait-elle  pas  le  désir  qu'il  n'en  fût  rien  perdu?  Elle  était 
donc  naturellement  portée  à  servir  d'intermédiaire  entre  For- 
tunat  et  la  cruelle  recluse ,  et  à  donner  à  Radegonde  les  billets 
du  poète  sans  même  l'en  aviser  lui-même,  ce  qui  eût  été  une 
violation  indirecte  du  secret  prescrit. 

Les  plaintes  de  Forlunat  sur  la  disparition  de  Radegonde, 
et  l'explosion  de  sa  joie  quand  elle  reparaît,  sont  pleines  de 
cette  grâce  aimable  que  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  louer,  et  la 
forme  en  est  aussi  élégante  que  le  fond  en  est  spirituel.  «Où 

<')  Liv.  VIII,  pièces  8  et  9. 


—  àW  — 

se  cache  sans  moi  ma  lumière,  dit-il:  j)oiir({uoi  se  refuse-t-elle 
de  paraître  à  mes  yeux  qui  s'égarent  à  lu  chercher?  Je  regarde 
le  ciel,  la  terre  et  l'eau,  tout  cela  m'est  peu  de  chose,  si  je  ne 
vous  vois  pas.  Quoiipie  le  ciel  soit  pur  et  serein,  si  vous  vous 
cachez,  le  jour  est  pour  moi  sans  soled .  .  .  Nous  pensons,  les 
saintes  sœurs  et  moi,  que  vous  consoliez,  en  leur  laissant  voir 
votre  figure,  ceux  que  vous  faites  état  d'aimer '^l»  Pâques 
arrive  enfin.  Radegonde  rompt  sa  clôture  et  paraît.  Son  visage 
est  radieux.  On  a  beau  être  sainte,  l'air  et  la  liberté,  après 
un  mois  de  réclusion,  dérident  et  égayent  les  plus  austères. 
kVous  nous  ramenez  la  joie,  lui  dit  son  poète,  vous  êtes  cause 
que  nous  célébrerons  deux  fois  Pâques.  Quoique  le  blé  ne 
commence  qu'à  lever  dans  les  sillons,  du  moment  que  je  vous 
revois,  je  fais  la  moisson  :  je  forme  déjà  les  gerbes,  j'entasse 
déjà  le  grain,  je  fais  en  avril  ce  qu'on  fait  en  août.  Bien  que 
le  bourgeon  de  la  vigne  ne  commence  qu'à  percer,  je  fais  la 
vendange.  Les  pommiers  et  les  poiriers  exhalent  toutes  leurs 
odeurs,  mais  ils  me  donnent  des  fleurs  et  des  fruits  en  même 
temps.  Quoique  la  campagne  soit  nue  et  qu'on  n'y  voie  pas  un 
épi,  depuis  que  vous  avez  reparu,  elle  est  riante  et  l'abon- 
dance est  partout'-'.  55  Rien  de  plus  frais  et  rien  de  plus  galant. 
Ce  n'est  pourtant  qu'un  simple  thème  de  rhétorique,  mais 
l'idée  principale  en  est  développée  d'une  manière  charmante; 
on  en  trouve  de  pareils  dans  Catulle. 

Si  l'innocence  de  Fortunat  dans  ses  pieuses  amours  avait 
besoin  d'une  preuve  qui  dispensât  de  toutes  les  autres,  il  suf- 
firait de  rappeler  qu'il  les  répartissait  sur  deux  personnes  à  la 
fois,  Radegonde  et  Agnès.  Egalement  jalouses  d'en  recevoir  le 
tribut,  elles  ne  s'en  inquiétaient  pas  autrement  et,  loin  d'être 
rivales,  elles  n'avaient  pas  même  l'idée  de  la  rivalité.  D'ailleurs 
ce  qu'on  nomme  proprement  l'aiijour  ne  s'épar|)dle  point  sur 

'"'  Liv.  XI,  pièce  a. 
f^'  Liv.  VIII,  pièce  10. 


—  lili  -^ 

divers  objets  et  dans  le  même  temps,  ou  alors  c'est  de  l'amitié 
banale,  ou  c'est  de  la  débauche.  L'une  ne  peut  être  imputée 
à  Fortunat,  l'autre  moins  encore,  et  c'est  déjà  trop  de  l'avoir 
nommée.  Que  si  pour  distinguer  par  un  nom  sa  sympathie 
pour  Radegonde  et  Agnès,  ilse  sert  constamment  du  mot 
amor  au  lieu  à'amicitia,  et  à^imans  au  lieu  d'amicus,  c'est  d'abord 
parce  que  ces  mots,  par  leur  quantité  prosodique,  s'adaptent 
mieux  à  la  forme  de  ses  vers;  c'est  ensuite  qu'ils  ont  une 
emphase  qui  était  une  beauté  aux  yeux  des  poètes  latins  de  ce 
siècle  ;  c'est  enfin  qu'ils  étaient  d'une  langue  familière  à 
Fortunat,  la  langue  ecclésiastique,  oii  l'on  n'en  connaît  pas 
d'autre  pour  exprimer  la  passion  religieuse  dont  l'âme  est 
possédée. 

Quant  aux  billets  que  le  poète  écrit  à  Agnès,  il  est  impos- 
sible de  n'y  pas  remarquer  une  différence  sensible  d'avec  ceux 
écrits  à  Radegonde.  Il  ne  s'y  mesure  pas  autant,  il  y  est  plus 
ouvert,  d'une  tendresse  moins  grave,  et  parfois  même  un  peu 
mondaine.  Peut-être  bien  y  aurait-il  à  redire.  Et,  en  effet, 
parmi  les  personnes  qu'il  fréquentait  et  qui  vraisemblablement 
n'étaient  pas  toutes  des  religieuses,  quelques-unes,  à  ce  qu'il 
paraît,  le  mordirent  à  belles  dents '^*.  Un  couvent  de  jeunes 
fdles  n'est  pas  une  école  de  discrétion,  et  la  charité  n'y  est 
pas  toujours  la  règle  des  discours.  Toutefois,  il  est  peu  croyable 
qu'on  y  ait  communiqué  les  billets  du  poète  à  l'abbesse;  ni  lui 
ni  elle  ne  s'y  fussent  hasardés.  Si  naïve  qu'ait  été  leur  candeur, 
elle  n'eût  pu  les  induire  à  faire  cette  sottise.  Un  autre  la  fit 
donc.  Ne  cherchons  pas  le  coupable;  aucun  indice  ne  nous  le 
révèle,  ne  nous  le  fait  même  soupçonner.  Voyons  seulement 
les  pièces  qui  donnaient  quelque  fondement  à  ces  médisances. 

Deux  ont  pour  objet  l'anniversaire  de  la  naissance  de  la 
mère  Agnès,  et  de  la  fête  célébrée  au  monastère  à  rcttn  occa- 

'"  Liv.  XI,  pièce  6. 


'i5 


sion^".  Ce  jour  de  naissance  n'élait  pas  cciui  où  elle  élail  née 
à  la  vie  charnelle,  mais  celui  où,  ayant  été  nommée  par  Hade- 
gomle  abbesse  de  Sainte-Croix,  Agnès  était  née  en  même 
temps  à  la  vie  spirituelle.  C'est  ainsi  que  le  dies  nalalis  des 
évêques  était  le  jour  de  leur  intronisation,  et  qu'on  en  céb'brait 
communément  les  anniversaires.  La  première  pièce  est  adressée 
à  Hadegonde;  «car,  dit  Fortunat,  toujours  à  l'allùt  d'un  jeu 
de  mots,  c'est 'en  l'honneur  de  cet  agneau  qui  a  donné  Agnès 
à  cette  bergerie,  que  la  fête  est  célébrée.:^?  «  Cette  i\\[e,  ajoute- 
t-il,  n'est  pas  le  fruit  de  vos  entrailles,  elle  est  le  fruit  de  la 
grâce;  elle  n'est  pas  votre  fdle  selon  la  chair,  c'est  le  Christ 
qui,  dans  son  amour,  vous  l'a  donnée;  c'est  l'auteur  et  père 
de  toutes  choses  qui  vous  la  donne  pour  être  perpétuellement 
avec  vous.  Heureuse  la  postérité  dont  les  siècles  ne  rompent 
point  la  chaîne  et  qui  demeure  immortelle  avec  sa  mère!  »  Cette 
dernière  ])ensée  est  belle.  Elle  veut  dire  que  tandis  que  la  fa- 
mille civile  se  brise  et  disparaît  souvent  de  la  surface  de  la  terre, 
la  familhî  religieuse  ne  subit  ni  interruption  ni  déchet,  et  se 
perj)étue  par  l'adoption  plus  sûrement  que  l'autre  par  les  voies 
naturelles.  Le  reste  de  la  pièce  est  dans  le  ton  que  je  viens 
d'indiquer;  il  n'y  perce  rien  encore  de  plus  vif  pour  Agnès  que 
pour  Radegonde;  interrogeons  la  deuxième  pièce. 

Fortunat  a  passé  la  journée  entière  avec  ses  deux  amies;  il 
était  le  paranymphc  de  la  fête,  il  en  fut  nécessairement  le 
témoin.  La  cérémonie  fut  à  la  fois  religieuse  et  profane.  Après 
l'oHice  on  alla  dîner.  Dans  les  deux  cas,  il  paye  de  sa  per- 
sonne, et  s'il  fut  zélé  à  l'office,  à  table  il  ne  le  fut  pas  moins. 
Il  en  fait  lui-même  la  remarque,  quand  il  dit  que  Hadegonde 
et  Agnès  n'ont  mangé  ni  l'une  ni  l'autre,  tandis  qu'il  a  mangé 
pour  deux.  Il  l'ait  une  autre  remarque  qui,  si  elle  venait  d'un 
autre  cpie  lui.  passerait  fort  bien  |)0ur  de  la   laluité  :    c'est 

(')   La  3'  et  la  ô"  du  livre  \l. 


—  A6  — 

qu'Agnès  s'était  occupée  de  lui  pendant  toute  cette  journée  au 
delà  de  ce  qu'elle  faisait  d'habitude,  et  qu'ainsi  elle  avait  privé 
sa  maîtresse,  au  profit  de  son  serviteur,  du  charme  de  son 
entretien  ;  que  si  à  table  elle  n'avait  pas  senti  le  réveil  de  son 
appétit,  c'est  f^que  le  lourd  sommeil  pesait  sur  ses  yeux 
brillants,  et  qu'elle  anticipait  ainsi  sur  les  longues  nuits 
d'hiver,  dont  une  seule  est  aussi  longue  que  deux  jours 
entiers  ^^'.  55  L'abstinence  de  Radegonde  s'explique  par  le  besoin 
qu'elle  avait  de  se  mortifier  sans  cesse,  et  principalement  dans 
les  repas  de  fête  où  les  occasions  de  succomber  s'offrent  d'elles- 
mêmes  sans  qu'on  les  appelle;  il  n'en  fut  pas  de  même  d'Agnès 
qui  n'y  mangea  pas,  ou  de  peur  de  scandaliser  sa  maîtresse, 
ou  parce  qu'elle-même  était  triste.  Fortunat,  qui  n'était  point 
fat,  mais  qui  ne  manquait  pas  de  diplomatie,  semble  mettre 
cette  tristesse  sur  le  compte  du  temps  qui  était  couvert,  et  où 
l'on  ne  voyait  ni  lune  ni  étoiles  :  «Mais,  dit-il,  si  la  gaieté  est 
dans  votre  cœur,  les  nuages  se  dissiperont  devant  moi  ^~\  »  Si 
donc  ce  langage  n'est  que  de  l'amitié,  avouons  qu'il  en  est  la 
fine  fleur,  Jlos  delibatus,  et  que  tel  qui  ferait  ainsi  la  cour  à 
une  femme  du  monde,  même  en  ce  style  de  madrigal,  ne  serait 
pas  loin  d'en  devenir  amoureux. 

Agnès  répondait  par  des  actes  aux  douces  paroles  de  For- 
tunat. Nous  avons  vu  qu'elle  s'était  faite  en  quelque  sorte 
l'intendante  des  plaisirs  gastronomiques  du  poète  et  à  l'oc- 
casion la  pourvoyeuse  de  ses  menus.  C'est  même  par  là  qu'elle 
portait  la  satisfaction  du  poète  jusqu'au  ravissement,  et  lui 
arrachait,  dans  le  temps  même  où  il  était  à  la  diète,  des 
exclamations  comme  celle-ci  :  «Qui  me  rendra  ces  repas  où 
je  vous  appelais  sans  façon  délices  de  mon  âme'-^^î?)  S'il  ne 
mangeait  pas  au  monastère  (et  il  y  mangeait  souvent  à  n'en 

<')  Liv.  XI,  pièce  5. 
^'  Liv.  XI,  pièce  5. 
<^'  Liv.  XI,  pièce  1  fi. 


\ 


M 


j>as  doiilf'ij,  et  qu'il  eût  table  dressée  à  son  logis,  elle  lui 
envoyait  (le  quoi  faire  honneur  à  un  amphilrvon  où  l'on  dîne. 
En  retour  elle  lui  demandait  un  compte  détaillé  delà  qualité 
des  mets,  de  l'accueil  qu'y  avaient  fait  les  convives,  de  la  façon 
dont  ils  avaient  été  mangés,  de  l'ordre  enfin  qu'on  avait  observé 
dans  le  service.  C'est  ce  qui  ressort  avec  toute  évidence  des 
pièces  9  et  1 0  du  livre  XI.  Fortunat  y  insiste  tellement  sur  les 
détails  qu'il  semble  bien  les  donner  autant  pour  son  propre 
plaisir  que  pour  obéir  à  un  commandement  qui  lui  est  cher. 
Il  énumère  consciencieusement  les  plats  principaux  selon  le 
tour  de  leur  arrivée  sur  le  théâtre  de  l'exécution;  il  s'arrête 
un  moment  sur  les  légumes,  il  s'enthousiasme  sur  les  frian- 
dises, sucreries  ou  pâtisseries,  car 

De  tous  mets  suci'és,  secs,  en  pâte  ou  liquides 
Les  estomacs  dévots  furent  toujours  avides. 

Boiieau. 

J'omets  d'autres  ressources  qu'Agnès  trouvait  dans  son  gentil 
esprit  pour  amuser  ce  grand  enfant;  mais  le  fond,  hélas!  en 
est  trop  souvent  de  la  mangeaille.  Tout  plaisir  temporel  dans 
les  couvents  tournait  alors  sur  ce  pivot.  C'était  un  des  effets 
les  plus  nets  de  l'oisiveté  claustrale,  et  un  des  plus  forts  déri- 
vatifs à  d'autres  idées  dont  la  seule  piété  n'eût  peut-être  pas 
suffi  pour  arrêter  la  fermentation  dans  des  esprits  trop  com- 
primés. 

Quoi  qu'il  en  soit,  et  sans  que  le  poète  nous  apprenne  com- 
ment on  eut  vent  de  cette  correspondance  avec  la  mère  abbesse, 
on  dit  que  l'amitié  y  parlait  un  peu  trop  le  langage  de  son 
frère;  on  broda  sur  ce  thème  toutes  les  fleurs  de  la  mali- 
gnité; on  eut  soin  surtout  qu'il  en  arrivât  quelque  chose  aux 
oreilles  des  intéressés.  J'imagine  qu'Agnès  fut  la  première 
avertie.  Mais  aussi  [)eu  sensible  pour  elle-même  à  des  propos 
011  elle  ne  se  reconnaissait  [)as,  que  persuadée  de  l'innocence 


—  d8  — 

de  son  ami,  elle  ne  laissa  pas  que  de  lui  parler  de  cette  aven- 
ture et  de  lui  demander  même  une  explication.  Le  poète  la  lui 
donna  sans  équivoque  et  sans  obscurité  dans  un  billet,  le  seul 
monument  qui  nous  fasse  connaître  le  commencement  et  l'issue 
de  cette  affaire.  C'est  une  protestation  pleine  de  dignité  et  de 
mesure;  c'est  l'accent  de  la  vérité  dans  sa  candeur  intrépide 
et  modeste,  c'est  l'expression  de  la  tendresse  même  qui  trouve 
l'éloquence  pour  se  relever;  c'est  encore  la  crainte  que  les 
mauvais  propos  dont  le  poète  reconnaît  le  péril  ne  le  forcent  à 
refouler  au  fond  de  soi  les  épancbements,  libres  jusqu'alors, 
de  son  amitié;  c'est  enfin  la  résolution  avouée  de  continuer  à 
se  conduire  avec  ses  amies  comme  il  l'a  fait  jusqu'à  présent,  si 
elles  veulent  bien  y  consentir.  Voici  ce  billet  : 

et  Vous  qui  êtes  ma  mère  par  votre  dignité  ''',  et  ma  sœur  par 
le  privilège  de  l'amitié,  à  qui  je  rends  bommage  en  y  faisant 
concourir  mon  cœur,  ma  foi  et  ma  piété,  que  j'aiuie  d'une 
affection  céleste,  toute  spirituelle  et  sans  la  criminelle  com- 
plicité de  la  chair  et  des  sens,  j'atteste  le  Christ,  les  apôtres 
Pierre  et  Paul,  sainte  Marie  et  ses  pieuses  compagnes  que  je 
ne  vous  ai  jamais  regardée  d'un  autre  œil  et  avec  d'autres  sen- 
timents que  si  vous  aviez  été  ma  sœur  Titiana  par  le  sang,  que 
notre  mère  Radegonde  nous  eût  portés  l'un  et  l'autre  en  ses 
chastes  flancs,  et  que  ses  saintes  mamelles  nous  eussent  nourris 
de  leur  lait.  Je  crains,  hélas!  car  j'en  vois  le  danger,  que  les 
moindres  insinuations  des  méchaulcs  ne  compriment  la  mani- 
festation de  mes  sentiments.  Cependant,  je  suis  résolu  de  vivre 
avec  vous  comme  je  l'ai  fait  jusqu'ici,  si  vous  voulez  bien  vous- 
même  me  continuer  votre  amitié  ^-^.jj 

En  présence  d'une  déclaration  si  calégoricjue,  (jui  oserait 
mettre  en  doute  la  véracité  de  Fortunat?  Le  mensonge  ne  parle 
pas  avec  coi  abandon;  il  y  a  toujours  un  point  par  où  il  se 

("    La  clijjnilc  d'abbesse. 
(''   Livro  XI,  pièce  6. 


—  /.y  — 

trahit.  Ici  rien  de  pareil.  On  sent  bien  qu'il  dut  en  router 
assez  au  [)oète  de  faire  cette  espère  d'amende  honorable  et 
qu'il  eut  préféré  n'y  être  pas  réduit,  mais,  la  nécessité  en  étant 
reconnue,  il  ne  pouvait  s'y  soumettre  avec  une  plus  noble 
fierté.  Toutefois,  il  est  une  réflexion  à  faire  qui  résulte  de  la 
teneur  même  de  cette  déclaration.  C'est  que  dans  tous  les  extraits 
que  j'ai  donnés  précédemment  des  lettres  de  Fortunat  à  Agnès, 
il  n'y  a  peut-être  pas  de  quoi  justifier  la  peine  qu'il  a  prise  de 
la  fornmler;  h  peine  ai-je  relevé  quelques  lignes  qui  pourraient 
donner  à  penser.  Gomment  donc  expliquer  ce  fait?  Serait-ce 
que  les  plus  incriminées  de  ces  lettres  n'ont  point  trouvé  place 
dans  ce  recueil,  le  poète  ayant  jugé  prudent  de  les  supprimer? 
Il  me  répugne  de  croire  à  une  pareille  supercherie.  On  sait  en 
effet  qu'il  faut  à  certaines  gens  bien  peu  de  chose  pour  fonder 
une  accusation,  et  qu'un  homme  qui  s'y  connaissait  est  resté  à 
tort  ou  à  droit  chargé  de  ce  propos  :  «Donnez-moi  une  ligne 
d'écriture  du  premier  venu,  et  je  m'engage  à  en  tirer  de  quoi 
le  faire  pendre.  «  Les  accusateurs  de  Fortunat  étaient-ils  de 
cette  école? 

N"  VI. 

LETTRE  AU  PRESIDENT   DE  L'ACADEMIE, 
SUR  L'EFFONDREMENT  DU  TEMPLE  DE  LA  CROIX,  À  PALENQl'É  (mEXIQUe), 

PAR   M.    DÉSIRÉ  CHARNAY. 

(séance   du    1.^   FÉVRIER    1889.) 

Paris,  le  1/4  février  1889. 

Monsieur  le  Président , 

J'ai  l'honneur  de  vous  faire  part  d'un  événement  qui  inté- 
ressera les  archéologues  en  général,  mais  spécialement  les 
américanistes.  On  m'écrit  de  Mexico  :  «Le  temple  de  la  Croix 
à  Palenqué,  dont  les  ruines  couronnaient  une  pyramide,  s'est 
effondré  récemment  et  a  disparu  en  partie  dans  l'intérieur  de 

XVII.  4 

llftatVKkll     SAItUHALI. 


—  50  — 

la  pyramide.  Le  Gouvernement  averti  a  envoyé  sur  les  lieux  le 
capitaine  Villa  avec  un  détachement  du  '7^  d'infanterie.  Le  ca- 
pitaine a  pénétré  avec  ses  hommes  dans  les  suhstructions  ou- 
vertes par  l'effondrement  du  temple.  Il  a  trouvé  de  vastes 
salles  ornées  de  statues  polychromes  et  de  nombreux  sarco- 
phages renfermant  des  momies.  Un  habitant  du  pays  nous 
raconte  qu'avant  l'arrivée  de  l'expédition  Villa,  les  gens  de 
Palenqué  avaient  déjà  pénétré  dans  l'intérieur  de  la  pyramide 
et  fait  main  basse  sur  une  telle  quantité  d'objets  qu'ils  en 
avaient  chargé  des  convois  de  mules.  On  arrête  le  pillage.  57 

Ce  temple  est  celui  d'où  l'on  a  extrait  la  fameuse  dalle  à 
la  Croix,  si  connue  et  dont  nous  avons  heureusement  rapporté 
le  moulage,  ainsi  que  celui  des  deux  autres  dalles  qui  ornaient 
l'autel  du  temple.  Ces  trois  dalles  sont  au  musée  du  Trocadéro. 

Cet  effondrement,  avec  la  découverte  qui  s'en  est  suivie,  est 
certainement  l'événement  le  plus  considérable  du  siècle  au  point 
de  vue  archéologique;  de  là  surgiront  à  n'en  pas  douter  des 
études  et  des  appréciations  nouvelles  et  peut-être  éclaircira- 
t-on  le  mystère  qui  plane  encore  sur  les  civilisations  américaines. 

Veuillez  agréer,  etc. 

Désiré  Charnay. 

N"  VIL 

LETTRE  DE   M.   GEFFROY, 
DIRECTEUR  DE  L'ECOLE  FRANÇAISE  DE  ROME. 

(séance  DU  39  FKVRIEn    1889.) 

Rome,  le  i  i  février  1889. 

Monsieur  le  Président  et  cher  confrère, 

L'administration  des  fouilles  et  musées  du  royaume  d'Italie 
va  ouvrir  dans  quelques  semaines  un  nouveau  musée  dont  la 
création  et  l'ordonnance  lui  font  beaucoup  d'honneur.  Etabli 


—  51   — 

(lails  la  ct'IMjhî  et  inu^juiliqu»'  \'i\\h  di  Popii  (riulio,  à  |)('ii  de 
(lislaiicc  (If  la  porta  del  Popolo,  ce  musée  est  composé  iinu|ue- 
moiil  (les  |»lus  importanls  objets  qu'ont  fournis  les  fouilles 
|)rati((U('cs  depuis  deux  ans  dans  le  seul  territoire  de  Civilà 
(laslellaua.  ranticjue  Faléries. 

L'administration  des  fouilles  et  musées,  qui  a  déjà  réglé  si 
habilement  le  service  archéologique  dans  toute  l'étendue  du 
royaume,  a  voulu  surtout  donner  ici  un  modèle  de  ce  que 
doit  être  un  musée  desliné  à  servir  utilement  l'étude  et  la 
science. 

Il  faut  distinguer  d'une  part  l'abondance  et  la  richesse  sin- 
gulière du  butin  offert  par  une  seule  localité,  et  d'autre  part 
l'intelligente  et  rigoureuse  disposition  qui  met  en  valeur  tant 
d'objets  précieux  pour  l'histoire. 

Les  fouilles  ont  été  exécutées  par  M.  le  comte  Cozza  et 
M.  Pasqui,  sous  la  direction  de  M.  l'inspecteur  Gamurrini. 
La  belle  ordonnance  du  musée  est  due  à  l'administration  cen- 
trale, et  particulièrement  (ce  n'est  un  secret  pour  personne)  à 
M.  le  professeur  Barnabei. 

L'antique  Faléries  remontait  tout  au  moins  au  temps  de  la 
fondation  de  Rome.  Prise  par  Camille  et  détruite  par  Manlius 
Torquatus  en  a  Ai,  elle  a  été  reconstruite  par  les  Romains. 
On  a  retrouvé  parmi  ses  ruines  les  débris  de  trois  temples  et 
la  nécropole.  La  disposition  des  restes  d'un  de  ces  temples  a 
paru  reproduire  les  traces  d'une  disposition  primitive  conforme 
à  celle  du  temple  de  Jupiter  Capitolin  à  Rome,  avec  la  triple 
cella.  On  aurait  là  un  exemple  peut-être  unique  du  plan  d'un 
grand  temple  étrusque.  Une  tête  hardiment  taillée  dans  le 
péperin  et  aux  formes  essentiellement  archaïques,  conservée 
dans  le  musée,  serait  celle  du  dieu  :  elle  porte  encore  quel- 
ques fragments  des  feuilles  de  bronze  dont  se  composait  la 
couronne  de  laurier,  et  les  trous  pour  les  pendants  d'oreilles. 
Surtout  beaucoup  des  ornements  plasiiques  d'un  de  ces  lenq)les 


—  52  — 

ont  subsisté,  antéfixes,  terres  cuites  aux  diverses  couleurs, 
portions  de  frises,  etc.  L'administration  des  fouilles  et  musées 
fait  enchâsser  ces  morceaux  dans  une  maçonnerie  qui  les  laisse 
visibles  tout  en  les  mettant  en  place,  et  l'une  des  salles  infé- 
rieures du  musée  montrera  ainsi  de  très  beaux  spécimens  de 
l'ornementation  générale. 

Quant  aux  objets  trouvés  dans  la  nécropole,  voici  quelle 
disposition  a  été  adoptée.  La  série  des  tombes  ayant  été  soigneu- 
sement numérotée,  chacune  de  celles  qui  ont  offert  d'utiles 
dépouilles  figure  avec  son  propre  butin  dans  une  vitrine  ou 
partie  de  vitrine.  Chaque  tombe  est  en  outre  représentée  par 
un  dessin  qui  en  reproduit  le  numéro  et  en  fait  voir  la  dispo- 
sition au  moment  de  l'ouverture.  La  série  des  vitrines  observe 
l'ordre  chronologique  :  les  tombes  archaïques  d'abord,  avec 
l'ambre,  les  silex,  les  armes  de  bronze,  la  terre  travaillée  sans 
la  roue  du  potier.  Les  tombes  suivantes  trahissent  les  impor- 
tations phéniciennes  dans  le  monde  étrusque.  Plus  tard  l'in- 
fluence de  la  civilisation  grecque  paraît  sur  les  vases;  une  école 
d'art  local  devient  visible;  l'art  gréco-romain  l'emporte  enfin, 
et  produit  de  belles  œuvres,  parmi  lesquelles  certains  morceaux 
de  sculpture  tout  à  fait  remarquables.  La  série  est  ininterrom- 
pue depuis  le  viif  siècle  avant  J.-C.  jusqu'aux  derniers  temps 
de  l'empire.  Peu  de  figurines  de  terre  cuite,  autant  que  m'a 
permis  d'en  juger  une  visite  nécessairement  rapide.  Beaucoup 
de  vases  peints;  beaucoup  de  petits  bronzes  bien  travaillés; 
des  bijoux,  des  métaux  précieux,  de  la  poussière  d'or;  deux 
cercueils  de  chêne  en  partie  conservés,  etc. 

L'important,  je  le  répète,  c'est  l'incrovable  richesse  de  ces 
fouilles  pratiquées  dans  le  seul  territoire  falisque;  c'est  sur- 
tout l'ingénieux  arrangement  d'un  musée  vraiment  scientifique, 
qui  va  donner  aux  hommes  d'étude  beaucoup  d'informations 
nouvelles.  Le  philologue  y  recherchera  les  inscriptions  falisques 
et  latines  primitives;  l'historien  de  l'art,  des  noms  d'artistes 


—  53  — 

encore  inconnus.  L'esthéticien  v  admirera  de  beaux  fragments 
de  décoration  et  de  sculpture,  les  petits  bronzes,  et  le  très 
pur  dessin  de  plusieurs  représentations  sur  les  vases. 

11  faut  ajouter  qu'une  série  d'aquarelles  très  soigneusement 
exécutées  reproduit  déjà  tous  les  plus  intéressants  objets  du 
nouveau  musée.  Ce  sont  les  éléments  tout  préparés  d'une  pu- 
blication qui  offrirait  un  grand  intérêt,  mais  qui  exigerait  évi- 
demment une  dépense  considérable. 

Agréez,  etc. 

A.  Geffroy. 

N"  VIII. 

LES  éPOQCES  ÛE  HAMMURABI   ET  D'AMÉ.N'OPHIS   IV,  PAR  M.   J.   OPPERT. 

(séance  du   93    FÉÏRIER    1889.') 

•  Un  cylindre  de  Nabonid,  nouvellement  découvert  et  publié 
par  M.  Bezold  dans  les  Proceedings  de  la  Société  d'archéologie 
biblique  de  Londres,  comble  une  lacune  chronologique  d'un 
texte  publié  jadis  par  M.  lîawlinson  (  FK.  ^4.  /. ,  I,  p.  69  )  et  tra- 
duit par  moi  dans  mon  Expédition  en  Mésopotamie  (t.  I,  p.  267). 
Ce  document,  très  mutilé,  citait  le  nom  de  Hammurabi  et  fai- 
sait suivre  le  chiffre  de  700  ans.  Or,  le  texte  que  nous  devons 
à  M.  Bezold  nous  informe  que  ces  700  ans  se  rapportent  à 
l'intervalle  écoulé  entre  Hammurabi  et  Purnapuriyas,  l'un  des 
rois  élamites  qui  régnèrent  sur  Babylone. 

Les  fouilles  si  fécondes  de  Tell  Amarnah  nous  indiquent, 
comme  contemporain  de  Purnapuriyas,  le  roi  Aménophis  IV, 
de  la  dix -huitième  dynastie  égyptienne.  On  a  voulu  établir 
comme  à  peu  près  certaine  la  date  de  i^i5o  av.  J.-C.  pour 
le  Pharaon  réformateur,  et  on  a  conclu  de  là  que  Hammu- 
rabi aurait  vécu  vers  2  i5o  av.  J.-C. 

La  question  ainsi  posée,  le  problème  ainsi  formulé,  est 
contraire  aux  procédés  rationnels.  On  doit  fixer  les  nombres 


^  5A  — 

inconnus  par  les  nombres  connus,  et  non  inversement;  aussi 
la  date  de  2i5o  av.  J.-C.  est-elle  en  contradiction  flagrante 
avec  les  données  précises  que  nous  possédons  déjà. 

Une  liste  publiée  par  M.  Pinches  donne  les  dynasties  baby- 
loniennes avec  leur  durée  et  la  longueur  des  règnes  qui  les 
i-omposent.  Malheureusement,  la  tablette  est  mutilée,  et  dans 
la  troisième  dynastie  il  se  trouve  une  lacune  de  3/i3  ans. 
Hammurabi  est  le  sixième  roi  de  la  première  dynastie,  et  y 
occupe  les  années  i  12  à  167.  Nous  compterons  les  années  à 
partir  de  son  avènement,  et  nous  dirons  alors  que  l'intervalle 
de  H.  698  à  H.  qya  nous  est  entièrement  inconnu.  De  H.  972 
à  H.  1087  manquent  les  noms;  mais  de  H.  1087  à  H.  1371 
nous  avons  une  suite  presque  non  interrompue,  de  manière  que 
nous  pouvons  savoir  si  des  monarques  connus  par  d'autres 
monuments  s'y  trouvent  ou   s'ils  n'y  sont   pas  mentionnés. 

I.  La  date  de  aiSo  pour  Hammurabi  est  impossible,  à 
cause  des  raisons  suivantes  : 

a.  Nous  savons,  par  le  monument  taillé  dans  le  roc  de  Ba- 
vian,  que  Ai<S  ans  avant  l'époque  de  Sennachérib,  Marduk- 
nadin-akkè,  roi  de  Babylone,  avait  enlevé  les  idoles  que  le 
roi  de  Ninive  réinstalla  dans  leurs  anciens  temples.  La  date 
de  l'expédition  de  Marduk-nadin-akkè  est  donc  fixée  entre 
1128  av.  J.-C,  au  plus  tôt,  et  1  to6  av.  J.-C.  au  plus  tard. 
L'hypothèse  qui  fixerait  Hammurabi  à  2i5o  av.  J.-C.  ne  pour- 
rait admettre  qu'un  intervalle  de  i  o5o  ans  entre  Hammurabi 
et  Marduk-nadin-akkè,  qui  fut  le  contemporain  deTeglathpha- 
lasar  I,  auquel  il  enleva  les  idoles  en  question.  Or,  nous  con- 
naissons les  rois  qui  ont  régné  1000  ou  1100  ans  après  Ham- 
murabi; Marduk-nadin-akkè  ne  peut  pas  se  trouver  parmi  eux, 
car  il  est,  et  de  beaucoup,  plus  récent  que  ces  rois. 

b.  Car  à  H.  n'àk  figure,  comme  n'ayant  régné  qu'une 
année, Zamama-nadin-sum ,  qui  fut  l'adversaire  d'Assur-edil-el, 


—  aa  — 

roi  d'Assyrie.  Or,  entre  ce  roi  ninivite  et  Teglalliplialasar,  con- 
temporain de  Marduk-nadin-akkè,  se  placent  au  moins  quatre 
rois,  dont  l'un,  Assur-dayan,  a  régné  très  longtemps. 

c.  Entre  Assur-dayan  et  son  arrière-petit-fils  Teglathpha- 
lasar  se  sont  écoulés  60  ans,  ainsi  que  l'atteste  ce  dernier. 
Entre  ces  deux  rois  so  place  le  père  de  Teglalhphnlasar,  Assur- 
ris-isi,  qui  eut  pour  adversaire  Nabuchodonosor  I,  roi  de  Ba- 
bylone.  Or  pendant  la  période  de  187  années  comprise  de 
H.  11  3/1  à  H.  1271  ne  se  trouvent  ni  Nabuchodonosor  ni 
Marduk-nadin-akkè.  Ils  doivent  donc  être  placés  après  cette 
période  :  il  est  possible,  il  est  vrai,  que  Nabuchodonosor  I  ait 
régné  de  H.  19 58  à  H.  1271;  mais,  en  tout  cas,  Marduk- 
nadin-alkè  ne  pourrait  jamais  avoir  régné  avant  H.  1271. 

Abaisser  l'âge  de  Hammurabià  2i5o  av.  J.-G.  serait  placer 
Teglathphalasar  900  ans  av.  J.-C.  Ce  serait  contraire  au  texte 
de  Bavian;  au  surplus,  nous  savons  qu'à  cette  époque  régnaient 
à  Ninive  les  monar([ues  qui  nous  ont  laissé  les  monuments 
de  Galach  ,  Nimroud  d'aujourd'hui, 

La  date  de  2160  n'est  donc  pas  même  discutable;  l'âge  de 
Hammurabi  est  plus  reculé.  Mais  quel  est-il  ?  Examinons 
d'autres  hypothèses. 

II.  rt.  Trois  ans  après  Zamama-nadin-sum  ,  adversaire  d'As- 
sur-edil-el ,  commença  une  dynastie  do  onze  rois  nommés  Pasê, 
pendant  72  ans  et  6  mois,  donc  de  H.  1  187  à  H.  1210.  Les 
chifTres  désignant  les  règnes  sont  conservés,  les  noms  des  rois 
sont  mutilés  ou  effacés.  Si  Nabuchodonosor  I  et  Marduk-nadin- 
akkè  appartenaient  à  cette  dynastie,  ils  ne  pouvaient  être  pla- 
cés, le  premier  que  dans  une  liste  entièrement  détruite,  de 
H.  1  i.)/i  à  H.  1 160,  et  le  second  dans  une  liste  où  Marduk 
seul  est  conservé,  de  H.  1 16/i  à  H.  1 186.  Donc,  en  admettant 
même  que  la  date  la  plus  récente  possible  pour  l'expédition  de 
Marduk-nadin-akkè  fut  1 106  av.  J.-C.  et  que  cet  exploit  coin- 


—  56  — 

cidàt  avec  ia  première  année  du  roi,  l'avènement  de  Hammu- 
rabi  ne  tomberait  pas  avant  2270  av.  J.-C. 

Cette  date  serait  remontée  à  2809  av.  J.-C.  si  la  date  la 
plus  reculée  possible,  celle  de  1128  av.  J.-C,  coïncidait  avec 
la  dernière  année  du  règne  de  Marduk-nadin-akkè. 

b.  Mais  M.  Amiaud  a  montré  que  cette  hypothèse,  à  la- 
quelle je  m'étais  arrêté,  reposait  sur  une  erreur  matérielle,  sur 
une  confusion  entre  deux  rois  différents,  Assur-edil-el  et  Assur- 
dayan.  La  confusion  était  excusable  :  le  père  d'Assur-dayan 
s'appelait  Ninip-habal-ekur;  un  roi,  dont  le  nom  mutilé  com- 
mençait avec  les  deux  premières  syllabes  de  celui-ci,  était 
l'adversaire  d'un  roi  Bin-nadin-sum ,  et  la  liste  porte  deux  rois 
de  ce  nom  avant  Zamama-nadin-sum.  Mais  rien  ne  prouve 
que  le  nom  même  de  l'ennemi  d'un  des  Bin-nadin-sum  soit 
à  compléter  par  Ninip-habal-ekur. 

Donc,  toute  cette  argumentation  pèche  par  la  base,  et 
nous  ne  devons  plus  proposer  de  placer  les  deux  rois  baby- 
loniens dans  la  dynastie  Pasë,  même  en  changeant  le  chiffre 
de/n8en5i8,à  cause  d'une  donnée  capitale,  dont  nous  avons 
à  nous  occuper  maintenant.  En  effet,  Hammurabi  doit  être 
placé  encore  plus  haut  que  2270  av.  J.-C. 

m.  a.  Nous  avons  heureusement  une  date  précise,  fixant 
l'âge  de  Hammurabi. 

Nabonid  dit  dans  deux  cylindres  que  800  ans  avant  lui  vi- 
vait le  roi  Sagasaltiyas.  Or,  ce  prince  se  retrouve  dans  la  liste 
comme  régnant  pendant  treize  ans,  de  H.  io65  à  H.  io58. 
Nabonid  fut  roi  de  555  à  538  av.  J.-C,  ce  qui  porte  Saga- 
saltivasà  i3A5  av.  J.-C.  en  moyenne,  et  l'Age  de  Hammurabi 
se  trouve  ainsi  déterminé,  comme  ayant  rempli  la  première 
moitié  du  xxiv'  siècle  avant  l'ère  chrétienne. 

b.   On  pourrait  se  demander  si  les  Sagasaltiyas  de  la  liste 


0/ 


et  du  cylindre  de  Nabonid  sont  identiques.  Nous  prouverons 
l'airirmative.  Le  Sagasalliyas  de  Nabonid  n'a  pu  être  un  prince 
se  trouvant  dans  la  lacune  de  35o  ans  signalée  plus  haut. 

L'expédition  de  Mardiik-nadin-akkè  tombe  entre  112.3 
et  iioG  av.  J.-C,  donc  en  moyenne  tout  au  moins  56o  ans 
avant  Nabonid,  et  2A0  ans  après  le  Sagasaltiyas  de  Nabonid. 
Or,  ce  même  fait  d'armes  étant  forcément  postérieur  à  H.  1  208, 
ce  Sagasalliyas  ne  peut  être,  en  moyenne,  antérieur  à  H.  1018. 

En  ellet.  le  Sagasalliyas  de  la  liste  règne  de  H.  10 /i5  à 
H.  10 38.  Les  deux  cilnlions  se  rapportent  par  conséquent  à  une 
même  personne. 

IV.  Nous  rattachons  donc  l'avènement  de  la  première  dy- 
nastie, 1 1  2  ans  avant  celui  de  Hammurabi,  au  commencement 
du  cycle  lunaire  qui  eut  lieu  i8o5  ans  avant  712  av.  J.-C, 
à  2517,  et  nous  commencerons,  à  cause  des  Bgigi  ans  ou 
653  sosses  et  1  1  ans  du  cours  d'Eusèbe,  cette  dynastie  32606 
av.  J.-C,  ce  qui  donne,  conformément  aux  textes  cunéiformes, 
pour  le  règne  de  Hammurabi,  239/1  à  2  33c)  av.  J.-C 

V.  Comme  Purnapuriyas  a  vécu  700  ans  après  Hammu- 
rabi, il  tombe  vers  i65o  avant  l'ère  chrétienne.  Ce  fait  est 
réel.  Il  s'est  occupé  d'orner  le  temple  du  Soleil  à  Sippara, 
tout  comme  le  Purnapuriyas,  contemporain  d'Aménophis  IV. 
En  cela,  le  ou  les  Purnapuriyas  ont  suivi  la  coutume  de  beau- 
cou  [)  d'autres  rois. 

La  question  chronologique  se  pose  donc  ainsi  : 
Ou   Aménopliis   IV   a    vécu    vers   i65o    av.   J.-C,  con- 
formément au  système  de  beaucoup  d'égyptologues,  et  alors 
le    Purnapuriyas  de  Nabonid  est  identique  à  celui  de  Tell 
Ainarnah. 

Ou  bien  il  n'est  pas  possible  de  placer  si  haut  le  roi  de  la 
dix-huitième  dynastie,  et  alors  le  correspondant  du  Pharaon 


—  58  — . 

égyptien  est  postérieur  au  roi,  son  homonyme,   dont  parle  le 
cylindre  de  Nabonid. 

C'est  là  la  seule  conclusion  à  tirer  de  l'importante  notice 
que  nous  devons  à  M.  Bezold. 


APPENDICE  N°  I. 


RAPPORT 

DE  LA  COMMISSION   DES  ÉCOLES  D'ATHENES  ET  DE  ROME 

SUR  LES   TRAVAUX  EXECUTES  PAR   LES  MEMBRES  DE  CES  DEUX  e'cOLES 

PENDANT  L'ANNÉE  1  887  ET  REÇUS  PAR  L'ACADÉMIE  EN  1  888  , 

PAR  M.  A.  CROISET. 

(lu  dans  LA  SÉANCE  DU    11   JANVIER   1889.) 

Messieurs, 

Les  Ecoles  d'Athènes  et  de  Rome,  qui  soumettaient  l'année 
dernière  six  mémoires  à  l'Académie,  lui  en  ont  cette  année 
adressé  sept.  Plusieurs  sont  des  travaux  considérables;  tous 
sont  des  travaux  sérieux.  Trois  d'entre  eux  sont  des  envois  de 
troisième  année  et  appellent  de  nouveau  l'attention  de  l'Aca- 
démie sur  des  noms  qui  lui  ont  déjà  été  signalés  avec  éloge, 
ceux  de  MM.  Fougères  et  Deschamps,  de  l'École  d'Athènes,  et 
Auvray,  de  l'Ecole  de  Rome.  Les  quatre  autres  sont  des  envois 
de  seconde  année,  dus  à  MxM.  Lechat  et  Doublet,  de  l'Ecole 
d'Athènes,  Gsell  et  Cadier,  de  l'Ecole  de  Rome. 

M.  Fougères,  qui  avait  exploré  Délos  en  1886,  a  consacré 
la  campagne  de  1887  à  faire  des  foudles  en  Arcadie,  à  Man- 
tinée.  L'Académie  sait  déjà  que  M.  Fougères  y  est  retourné 
en  1888,  et  qu'ayant  obtenu  la  permission  de  passer  en  Grèce 
une  quatrième  année,  il  se  |)ropose  d'employer  encore  cette 
prolongation  de  séjour  à  poursuivre  ses  recherches  dans  une 


—  51)  — 

contrée  qu'il  seniblc!  vouloir  l'aire  sienne  par  l'ardeur  heureuse 
avec  laquelle  ill'éUulie.  (Jette  fois,  pourtant,  au.vdifllcultés  or- 
dinaires dn  ce  genre  de  travaux,  la  maladie  en  a  joint  d'inatten- 
dus. M.  Fougères  et  son  compagnon,  M.  Bérard,  ont  tous 
deux  clé  atteints  |)ar  les  lièvres;  mais  ce  sont  là,  pour  nos 
jeunes  savants,  dos  causes  de  retard,  non  des  motifs  de  dé- 
counigeuient,  et  les  fouilles  vont  reprendre  de  plus  belle. 
Quoi  iiu'il  en  soit,  ce  sont  celles  de  1887  dont  le  présent  mé- 
moire nous  entretient. 

On  sait  l'importance  que  prit  Mantinée,  quand,  recon- 
struite par  Epaminondas,  elle  devint,  avec  Mégalopolis  et 
Messène,  un  des  trois  boulevards  qui,  dans  la  pensée  de 
l'homme  d'État  thébain,  étaient  destinés  à  arrêter  Sparte  et  à 
l'enfermer  en  Laconie.  Ses  fortifications  ne  pouvaient  manquer 
de  nous  ofl'rir  un  spécimen  intéressant  de  l'architecture  mi- 
litaire grecque  dans  le  second  quart  du  quatrième  siècle. 
iM.  Fougères  a  été  le  premier  à  les  étudier  d'une  manière 
suivie.  Son  travail  débute  par  un  bon  chapitre  sur  la  topo- 
graphie de  l'enceinte  de  Mantinée.  Grâce  aux  planches,  aux 
croquis,  aux  vues  photographiques  qui  accompagnent  sans 
cesse  le  texte,  rien  n'est  plus  facile  pour  le  lecteur  que  d'en 
acquérir  une  prompte  intelligence,  et  ce  mérite  de  clarté  est 
celui  de  tout  l'ouvrage.  Après  l'enceinte,  M.  Fougères  étudie 
les  monuments  intérieurs  de  la  ville.  Ici,  les  difficultés  étaient 
plus  grandes  encore;  plusieurs  bâtiments  ne  présentent  que 
des  traces  assez  confuses.  L'explorateur,  en  certains  cas,  a  be- 
soin de  prudence  autant  que  de  sagacité.  11  faut  souvent  savoir 
ignorer.  Ce  qu'il  était  possible  de  discerner  encore  à  travers 
ces  ruines,  M.  Fougères  l'a  mis  en  lumière  avec  le  plus  grand 
soin.  Dans  les  restes  du  théâtre  en  [)articulier,  (juclques  dis- 
positions curieuses  ont  éveillé  son  attention  et  il  n'a  pas  man- 
(jué  de  les  signaler.  Sans  avoir  été  très  abondant,  le  butin 
épigraphique  a  aussi  son  prix.  Une  inscription  votive,   datée 


—  60  — 

de  la  quatrième  stratégie  de  Phiiopœmen,  est  le  premier  texte 
lapidaire  où  paraisse  le  nom  de  ce  grand  homme.  Un  fragment 
beaucoup  plus  ancien  a  de  l'intérêt  pour  l'histoire  de  l'alphabet 
arcadien.  Quelques  inscriptions  de  l'époque  romaine,  dont 
une  fort  longue,  fournissent  des  renseignements  utiles  sur  la 
vie  de  la  cité  au  second  siècle.  Parmi  les  restes  de  sculptures 
que  les  fouilles  ont  dégagés,  on  remarquera  surtout  trois 
dalles  qui  représentent  Apollon ,  Marsyas  et  les  Muses  :  elles 
ornaient  le  piédestal  d'une  statue  de  Latone  attribuée  par  Pau- 
sanias  à  Praxitèle.  M.  Fougères  incline  à  reconnaître  dans  ces 
trois  dalles  la  main  de  Praxitèle  lui-même.  C'est  peut-être  se 
hasarder  beaucoup.  Accordons  du  moins  à  l'heureux  et  vaillant 
explorateur  qu'elles  sont  d'une  bonne  époque ,  et  qu'elles  ont 
subi  l'influence  de  la  grande  école  attique. 

M.  Fougères  se  sert  avec  la  même  aisance  des  monuments 
de  l'épigraphie  et  de  ceux  de  la  plastique;  il  a  appris  à  user 
de  tous  les  instruments  qui  peuvent  conduire  à  la  connaissance 
de  l'antiquité  grecque.  Plusieurs  excursus  témoignent  de 
l'étendue  de  ses  lectures.  Ainsi  armé,  il  aborde  dans  les  con- 
ditions les  plus  favorables  une  nouvelle  campagne  de  fouilles 
pour  laquelle  on  doit  espérer  le  même  succès  qui  a  déjà  cou- 
ronné les  précédentes. 

M.  Gaston  Deschamps  reste  fidèle,  lui  aussi,  à  la  contrée 
qui  lui  avait  fourni  l'occasion  de  ses  recherches  antérieures. 
L'Académie  se  rappelle  qu'en  cherchant  à  identifier  les  em- 
placements et  les  sanctuaires  célèbres  de  la  Carie,  M.  Des- 
champs, accompagné  de  M.  Cousin,  en  avait  rencontré  un 
tout  à  fait  nouveau,  ignoré  des  modernes  et  oublié  par  les  an- 
ciens, le  sanctuaire  de  Zeus  Panamaros.  De  nombreux  débris 
épigraphiques  lui  avaient  permis  de  réparer  les  omissions  des 
géographes  et  de  nous  donner  sur  ce  centre  religieux  tout  un 
ensemble  de  renseignements  inédits.  C'était  l'objet  de  son  pre- 
mier mémoire.  Celui  de  cette  année,  consacré  encore  à  la 


—  Gl   — 

mythologie  carionne,  «^tudift  trois  cultes  (^nigmatiques  et  à 
peine  hellënisés  :  ceux  de  Zeus  Lahrandeus  et  de  Zeus  Osogô 
à  Mvlasa,  celui  de  Zeus  Chrysaor  à  Stratonicëe.  Qu'était-ce 
au  juste  que  ces  divinités  aux  noms  étranges?  Qu'était  même 
le  peuple  qui  les  adorait?  Autant  de  problèmes  fort  obscurs, 
et  que  M.  Deschamps  n'a  pas  eu  la  prétention  de  résoudre ,  ni 
même  d'éclaircir  beaucou[)  plus  qu'on  ne  l'avait  fait  avant  lui. 
Vouloir  dire  le  dernier  mot  sur  ces  questions  serait  une  en- 
treprise prématurée.  La  seule  chose  à  faire  dans  l'état  présent 
de  la  science  est  de  réunir  avec  soin  les  données  insuffisantes 
dont  on  dispose,  afin  de  permettre  aux  travailleurs  qui  vien- 
dront plus  tard,  si  de  nouvelles  découvertes  se  produisent, 
d'en  mieux  apprécier  la  valeur  et  de  s'appuyer  tout  d'abord 
sur  des  recherches  préliminaires  solides.  Ce  n'est  pas  que 
M.  Deschamps  n'ait  déjà  son  hypothèse.  A  son  avis,  Labrandeus, 
Osogô  et  Chrysaor  sont  les  trois  aspects  primitifs  d'une  sorte 
de  Baal  carien,  conçu  comme  le  principe  de  toute  vie  et  de 
toute  création,  et  qui  s'est  plus  tard  disséminé,  pour  ainsi 
dire,  en  une  foule  de  déterminations  locales,  indiquées  par  les 
nombreux  noms  qu'on  lui  a  donnés.  Mais  ce  n'est  là  qu'une 
hypothèse  indiquée  en  passant,  avec  toute  la  discrétion  qui 
est  encore  nécessaire  en  un  pareil  sujet.  «Pour  pénétrer,  dit-il 
lui-même,  jusqu'aux  lointaines  origines  du  mythe,  il  faudrait 
la  connaissance  de  ces  langues  primitives  et  de  ces  alphabets 
mystérieux  qui  n'ont  pas  encore  livré  tous  leurs  secrets.  En 
attendant  la  venue  des  documents  nouveaux,  j'ai  essayé  de 
faire  une  sorte  de  cadre  oii  viendront  se  classer  les  textes  en- 
core inconnus.»  Conformément  à  ce  sage  progrannne,iM.  Des- 
champs a  réuni  dans  son  travail,  sans  se  presser  de  conclure, 
tous  les  renseignements  épigraphiques  qu'il  a  pu  rencontrer. 
A  son  texte  il  a  joint  une  série  de  photographies  dont  plusieurs 
représentent  des  monuments  antiques  de  la  Carie  non  dessinés 
jusqu'ici  par  les  précédents  voyageurs.  Enfin  un  supplément 


—  02  — 

au  mémoire  comprend  le  texte  et  la  transcription  en  carac- 
tères courants  de  trente  inscriptions  inédites  que  l'auteur  a 
découvertes  dans  l'île  d'Amorgos  pendant  une  courte  campagne 
de  fouilles  dont  le  Bulleùn  de  correspondance  hellénique  a  déjà 
rendu  compte.  Le  mémoire  de  l'année  dernière,  par  la  nature 
des  documents  recueillis,  formait  peut-être  un  ensemble  plus 
définitif  et  par  conséquent  d'un  intérêt  plus  immédiat.  Mais 
celui-ci  n'en  est  pas  moins  une  œuvre  fort  méritoire  qui  ser- 
vira de  très  utile  complément  au  précédenti 

M.  Lechat,  avec  son  Etude  sur  la  légende  athénienne  de  Thésée, 
s'établit  au  cœur  même  de  l'hellénisme,  et  traite  un  sujet 
plein  d'intérêt,  où  les  qualités  essentielles  qu'on  peut  attendre 
d'un  membre  de  l'Ecole  d'Athènes,  exactitude  dans  l'interpré- 
tation des  textes,  habileté  à  se  servir  des  monuments  de  l'art 
antique,  sentiment  juste  de  la  Grèce  et  des  choses  grecques, 
trouvaient  naturellement  leur  emploi.  Ce  n'est  pasj  comme  on 
pourrait  le  croire  au  premier  abord,  l'interprétation  mystique 
de  la  légende  que  poursuit  M.  Lechat;  il  s'attache  unique- 
ment au  développement  historique  des  traditions  relatives  à 
Thésée.  On  sait  ce  qu'était  Thésée  pour  les  Athéniens  du  v^  et 
du  iv"  siècle  :  un  type  idéal  où  l'on  aimait  à  reconnaître  toutes 
les  belles  qualités  que  l'orgueil  national  considérait  comme 
essentiellement  athéniennes.  Thésée,  patron  de  la  cité,  en  a 
fondé  l'unité;  il  y  a  fondé  aussi  une  sorte  de  royauté  démo- 
cratique et  libérale;  il  représente  la  beauté  athénienne;  c'est 
un  Héraclès  attique,  mais  un  Héraclès  intelligent  et  doux, 
protecteur  des  faibles,  hospitalier,  généreux,  un  sage  autant 
qu'un  héros,  une  sorte  de  Solon  mythologique.  Tel  est  le 
Thésée  des  poètes  dramatiques  et  des  orateurs,  celui  dont  on 
retrouve  les  traits  dans  la  biographie  composée  par  Plutarque. 
Mais  cette  conception  si  noble  ne  s'est  pas  formée  d'un  seul 
coup  et  ne  date  pas  d'une  époque  très  ancienne.  Elle  s'est 
développée  peu  à  peu,  à  mesure  qu'Athènes  elle-même  gran- 


—  G'A  — 

dissait  et  prenait  conscience  de  son  génie.  Heliaccr  l'iiistoire 
de  ces  dévf'loj)[>emenls,  de  cette  formation  successive  de  la 
légeiulf,  voilà  le  sujet  traité  par  M.  Lechat.  H  résume  d'abord 
la  légende  telle  qu'elle  nous  est  donnée  par  les  écrivains  de 
l'antiquité  sous  sa  forme  la  plus  complète.  Ensuite,  il  essaie 
de  fixer,  dans  l'ordre  chronologique,  la  date  des  différentes 
parties  dont  elle  se  compose.  11  montre  que,  jusque  vers  la 
fin  du  vi"  siècle,  malgré  l'existence  de  certains  récits  relatifs  à 
l'expédition  en  Crète,  à  la  guerre  contre  les  Amazones,  à 
l'enlèvement  d'Hélène  et  à  la  descente  aux  Enfers,  Thésée  n'a 
occupé  (|u'une  place  assez  modeste  dans  les  croyances  et  dans 
les  préoccupations  des  Athéniens.  Au  siècle  suivant,  au  con- 
traire, son  culte  est  en  grand  honneur  et  sa  légende  tout  à 
fait  épanouie.  C'est  donc  vers  la  fin  du  vi*  siècle,  un  peu  après 
Pisistrate,  que  doit  être  fixé  le  moment  décisif  où  s'accomplit 
cette  transformation.  C'est  aussi  le  moment  où  Athènes  prend 
en  tous  sens  ce  rapide  essor  si  vivement  noté  par  Hérodote 
lorsqu'il  raconte  la  chute  des  Pisistratides.  Le  travail  de  for- 
mation de  la  légende  s'arrête  au  iv"  siècle.  ^A  partir  de  ce 
siècle,  dit  M.  Lechat.  les  monuments  perdent  beaucoup  de 
leur  valeur  comme  documents,  et  ne  sont  guère,  pour  la  plu- 
part, qu'un  motif  banal  et  traditionnel  de  décoration.  ?•  On 
voit  comment  l'histoire  de  la  légende  de  Thésée  se  trouve  être 
un  aspect  particulier  ou  plutôt  encore  un  raccourci  de  l'his- 
toire de  la  civilisation  athénienne  :  les  deux  histoires  sont 
parallèles  et  solidaires.  Tant  que  Thésée  grandit.  Athènes 
aussi  s'accroît.  Quand  la  légende  est  fixée,  l'histoire  pohtique 
aussi  est  près  de  se  clore,  et  Athènes  va  devenir  un  musée. 
M.  Lechat  est  au  courant  de  tous  les  travaux  qui  pouvaient  lui  être 
utiles:  il  a  consulté  les  monuments,  et  en  particulier  les  vases, 
avec  autant  de  fruit  que  les  textes;  il  compose  avec  méthode, 
et  son  slvle  n'aura  besoin  que  de  légères  retouches  pour  se 
débarrasseid'un  petit  nombre  de  négligences  faciles  à  corriger. 


—  6/i  — 

M.  Doublet  traite  un  sujet  complexe,  difficile  et  fort  étendu 
dans  son  mémoire  sur  le  Droit  d'asile  et  l'idée  d'davXîa  dans  le 
monde  grec.  L'histoire  du  droit  d'asile  est  un  exemple  curieux 
de  cette  loi  générale  qui  veut  que  les  mots  aient  la  vie  plus 
longue  que  les  choses.  Celles-ci,  presque  toujours,  se  modi- 
fient profondément,  sans  cesser  pour  cela  d'être  désignées  par 
le  même  terme.  D'où  beaucoup  d'obscurités  et  de  méprises, 
par  suite  d'une  tendance  naturelle  à  croire  que  ce  qui  s'appelle 
toujours  de  même  n'a  pas  changé.  Dans  l'histoire  littéraire, 
cette  cause  d'erreur  est  fréquente.  Elle  ne  l'est  pas  moins 
dans  l'histoire  des  institutions.  C'est  ainsi  que  le  droit  d'asile, 
tel  qu'il  était  pratiqué  à  Rome  et  dans  les  premiers  siècles  du 
moyen  âge,  difi'ère  en  bien  des  points  de  ce  qu'on  appelait 
davAÎa  dans  le  monde  grec.  M.  Doublet  définit  avec  beaucoup 
de  soin  le  mot  a-vXv  et  son  dérivé  àa-vXia.  Il  montre  que  Yàa-vXta,, 
c'est-à-dire  la  sécurité  contre  certaines  violences  (pillages, 
actes  hostiles,  représailles),  est  essentiellement  un  privilège 
des  sanctuaires;  qu'elle  s'applique  aux  choses  et  aux  personnes, 
d'abord  à  celles  qui  sont  en  relation  régulière  avec  le  dieu, 
ensuite  à  celles  mêmes  qui  ne  font  qu'invoquer  sa  protection 
d'une  manière  accidentelle  et  se  donner  à  lui  d'une  manière 
fictive;  qu'elle  résulte  tantôt  d'une  ancienne  coutume,  tantôt 
de  stipulations  formelles  négociées  diplomatiquement  entre 
les  cités  ou  les  états;  qu'au  temps  des  Séleucides,  et  plus  tard 
sous  la  domination  romaine,  cette  garantie  est  accordée  t» 
titre  de  faveur  avec  une  libéralité  qui  peu  à  peu  produit  les 
plus  graves  inconvénients;  si  bien  qu'au  temps  de  Tibère, 
l'ào-tiA/a,  devenue  par  une  série  de  transformations  et  d'ex- 
tensions le  droit  d'asile  proprement  dit,  dont  abusent  les 
esclaves  fugitifs  et  les  mallaiteurs,  est  combattue  par  les  pou- 
voirs publics  et  subit  un  temps  d'arrêt.  M.  Doublet  raconte 
minutieusement  toute  cette  histoire;  il  fait  connaître  par  une 
foule  de  textes  littéraires  ou  épigraphiqu^  toutes  les  formes 


—  (15  — 

de  ïdavXia,  tous  les  fails  qui  s'y  rtipporleiil,  el  la  manière 
dont  ce  privilège  ëtail  réparti  dans  le  monde  ancien  aux  diiïé- 
renles  é[)oques  de  son  développement.  La  conscience  avec  la- 
quelle toutes  ces  recherches  ont  été  exécutées  ne  mérite  que 
des  éloges.  Le  présent  mémoire  n'est  pourtant  pas,  même  aux 
yeux  de  son  auteur,  une  œuvre  définitive.  Il  est  le  premier  à 
reconnaître  que  les  circonstances  ne  lui  ont  pas  encore  permis 
de  puiser  directement  à  toutes  les  sources  d'informations  qu'il 
aurait  désiré  consulter.  C'est  là  une  lacune  que  l'auteur,  grâce 
à  son  ardeur  laborieuse,  ne  manquera  pas  de  réparer.  Il  fera 
bien  aussi,  quand  il  reverra  son  travail,  de  donner  une  part 
de  ses  soins  à  la  mise  en  œuvre,  à  la  rédaction,  qui  laisse  en 
ce  moment  quelque  chose  à  désirer.  La  netteté  de  la  compo- 
sition, l'heureux  choix  des  détails,  la  fermeté  et  l'élégance  du 
style  ne  sont  pas  des  qualités  indifférentes  dans  un  travail  où 
le  nombre  et  la  complexité  des  faits  risquent  de  produire  un 
peu  de  confusion  et  de  surcharge  :  il  est  toujours  bon  d'ai)peler 
l'art  au  secours  de  la  science  el  d'invoquer  les  muses,  surtout 
quand  il  s'agit  de  la  Grèce  antique. 

Le  travail  de  M.  Auvray,  consacré  aux  cartulaires  et  obi- 
tuaires  d'origine  française  conservés  dans  les  bibliothèques 
italiennes,  est  un  travail  consciencieux,  instructif,  et  (pii 
comble  une  lacune;  mais,  par  la  nature  du  sujet,  il  échappe 
à  l'analyse.  L'auteur  a  exploré  plusieurs  bibliothèques  et  en 
particulier  la  Vaticane.  Le  mémoire  adressé  à  l'Académie  ne 
contient  pas  encore  le  résultat  complet  de  ses  éludes;  d'autres 
notices  viendront  plus  tard  s'y  ajouter  à  celles  qui  nous  sont 
données  aujourd'hui;  c'est  déjà  pourtant  un  travail  étendu.  La 
plupart  des  manuscrits  étudiés  par  M.  Auvray  avaient  été  an- 
térieurement signalés;  mais  on  ne  les  avait  pas  examinés  en 
détail.  Par  la  précision  de  ses  indications,  il  ajoute  un  complé- 
ment utilf  à  nos  connaissances.  Parmi  les  documents  sur  les 
quels  son  attention  s'est  arrêtée  .  plusieurs  oiïrciil  un  vi'ntabl 

xvn.  ^ 


i<- 


—  06  — 

intérêt;  notamment  un  exemplaire  du  recueil  de  chartes  connu 
sous  le  titre  de  Registrum  Curîœ,  le  livre  de  la  nation  d'Ecosse 
à  l'université  d'Orléans,  un  registre  de  Saint-Merri  de  Paris 
contenant  des  chartes  et  un  censier,  un  obituaire  de  la  cathé- 
drale de  Reims,  enfin  un  fragment  d'un  obituaire  de  Notre- 
Dame  de  Paris  plus  ancien  que  les  obituaires  de  cette  église 
conservés  à  Paris.  L'avertissement  que  M.  Auvray  a  mis  en 
tête  de  ses  notices  renferme  aussi  de  curieux  détails  sur  la 
bibliothèque  du  baron  Stosch,  qui  comprenait  beaucoup  de 
volumes  d'origine  française;  plusieurs  de  ces  volumes,  d'une 
grande  importance  pour  notre  histoire,  se  retrouvent  aujour- 
d'hui au  Vatican  dans  le  fonds  Ottoboni.  M.  Auvray,  en  les 
signalant,  rend  service  aux  travailleurs. 

Le  mémoire  de  M.  Gsell  sur  l'empereur  Domitien  est  un 
ouvrage  considérable,  qui  a  demandé  un  labeur  aussi  étendu 
que  minutieux.  Le  règne  de  Domitien  y  est  étudié  sous  toutes 
ses  faces.  L'auteur  examine  successivement  son  administration 
intérieure,  les  guerres  qu'il  a  faites,  les  lois  qu'il  a  promul- 
guées; il  cherche  à  connaître  quelle  pouvait  être  sa  politique, 
comment  un  règne  qui  avait  si  bien  commencé  a  si  miséra- 
blement fini.  Chacune  de  ces  questions  est  traitée  à  fond  ; 
plusieurs  d'entre  elles,  si  on  les  isolait,  pourraient  former  des 
mémoires  spéciaux  et  complets.  M.  Gsell  a  demandé  des  in- 
formations à  la  numismatique  et  à  l'épigraphie,  encore  plus 
qu'aux  historiens  proprement  dits.  Il  est  au  courant  de  tout 
ce  qui  a  été  publié,  en  France  et  à  l'étranger,  sur  le  sujet 
qu'il  traite.  Son  séjour  à  Rome  lui  a  permis  de  connaître  les 
résultats  des  dernières  fouilles  de  M.  de  Rossi,  qui  a  retrouvé 
les  sé|)uhures  des  Acilii  Glabrioncs  chrétiens.  Il  doit  aussi  à  sa 
connaissance  de  la  topographie  de  l'ancienne  Rome  d'avoir  pu 
faire  une  étude  complète  des  monuments  que  Domitien  a  con- 
struits ou  réparés. 

Le  seul  reproche  peut-être  qu'on  ])uisse  exprimer  en  pré- 


—  ()/  — 

sence  de  ce  travail  vraiment  immense,  c'est  qu'au  milieu  de 
tant  de  recherches  curieuses  et  savantes,  l'homme,  diez  Do- 
mitien,  ne  soit  pas  assez  mis  en  relief.  Il  semble  pourtant  que 
nous  ayons,  dans  les  écrivains  qui  nous  parlent  de  lui,  de 
quoi  nous  faire  mieux  comprendre  son  caractère.  Nous  ne 
vovons  pas  sullisamment ,  en  lisant  le  travail  de  M.  Gsell,  d'où 
a  pu  venir  cette  e.\j)losion  de  haine,  qui,  dans  les  dernières 
années  de  la  vie  de  Domitien,  s'attaque  à  sa  personne,  et  dont 
nous  trouvons  le  témoignage  aussi  bien  chez  les  petites  gens, 
comme  Juvénal,  que  chez  les  grands  personnages,  comme 
Pline  ou  Tacite.  Dans  le  mémoire  de  M.  Gsell,  Domitien  agit 
beaucoup,  il  ne  vit  pas  assez.  L'auteur,  habitué  k  ne  marcher 
qu'appnvé  sur  des  documents  très  précis,  a-t-il  craint  de  se 
hasarder  sur  un  terrain  nouveau  pour  lui,  celui  de  la  psycho- 
logie historique,  où  une  sorte  de  divination,  toute  voisine  de 
la  création  poétique,  a  son  rôle  nécessaire  à  jouer?  Ce  serait 
sans  doute  un  excès  de  prudence,  car  Thistorien .  comme  le 
savant  lui-même,  a  besoin  de  relier  les  faits  par  une  hypo- 
thèse, et  l'hypothèse,  quand  il  s'agit  d'apprécier  les  actes  d'un 
personnage  historique,  ne  peut  être  qu'une  certaine  manière 
de  se  représenter  l'àrae  de  cet  homme  dans  son  fond  et  dans 
son  unité. 

VEssai  sur  radministratio»  du  royaume  fie  Sicile  à  la  fin  du 
xiu'  siècle,  par  M.  Léon  Cadier.  est  un  mémoire  étendu  qui  se 
recommande  par  des  qualités  de  recherches  et  de  critique 
dont  l'auteur  avait  déjà  fait  preuve  dans  des  publications  an- 
térieures, et  notamment  dans  son  livre  sur  les  Etats  de  Béarn, 
auquel  l'Académie  a  décerné  la  première  médaille  dans  le 
dernier  concours  des  Antiquités  nationales. 

Les  deux  premières  parties  du  travail  de  M.  Cadier  sont 
consacrées  à  l'administration  de  Charles  I"  d'Anjou  avant  et 
après  les  Vêpres  siciliennes.  Une  troisième  et  dernière  partie 
poursuit  la  même  étude  pour  la  piMÎode  qui  correspond  à  la 


b 


—  G8  — 

captivité  de  Charles  II  et  au  gouvernement  des  régents.  Les 
deux  premières  parties  surtout  sont  très  intéressantes.  L'au- 
teur montre  très  bien  dans  quelle  mesure  l'organisation  in- 
troduite par  Charles  P'  a  été  un  compromis  entre  les  usages 
antérieurs  et  ceux  qui  avaient  cours  en  France.  Il  insiste  aussi 
sur  ce  fait  que  les  mesures  prises  après  les  Vêpres  siciliennes 
ne  marquent  point,  comme  on  l'avait  pensé,  un  changement 
dans  la  politique  du  roi ,  mais  qu'elles  sont  le  développement 
naturel  d'ordonnances  antérieures  à  cet  événement.  Sans  se 
faire  l'apologiste  du  frère  de  saint  Louis,  sans  même  dissi- 
muler ses  défauts,  M.  Cadier  a  été  amené  à  le  juger  moins 
sévèrement  que  ne  l'avaient  fait  quelques-uns  de  ses  prédé- 
cesseurs, et  l'on  est  presque  toujours  tenté  de  lui  donner  rai- 
son. Il  a  surtout,  sur  les  autres  historiens  de  Charles  d'Anjou, 
un  très  grand  avantage  :  c'est  de  connaître  avec  beaucoup 
plus  d'exactitude  et  de  précision  l'administration  du  roi  de 
Naples.  Mais  il  n'est  que  juste  de  rappeler  à  ce  sujet  le  nom 
de  M.  Durrieu,  dont  les  beaux  travaux  sur  les  Archives  ange- 
vines de  Naples  ont  seuls  rendu  possible  à  M.  Cadier  un  com- 
plet succès  dans  l'exécution  de  sa  tâche.  L'Académie  sait  en  effet 
que  les  registres  du  gouvernement  angevin,  lorsqu'on  les  a 
réunis  en  volumes  au  xvT  siècle  pour  les  faire  relier,  ont  été 
mis  dans  une  incroyable  confusion,  et  que  M.  Durrieu,  en 
établissant  la  concordance  entre  l'ordre  primitif  et  l'ordre  ac- 
tuel, a  le  premier  ramené  la  lumière  dans  ce  chaos;  de  plus, 
dans  le  premier  volume  de  son  ouvrage,  il  a  tracé  d'une 
main  très  sûre  un  tableau  de  l'organisation  du  royaume  de 
Charles  \".  M.  Cadier  a  pu,  en  suivant  pas  à  pas  l'exposé 
de  son  devancier,  le  compléter  sur  plus  d'un  [)oint  à  l'aide 
des  registres  maintenant  faciles  à  consulter,  et  faire  ainsi  un 
excellent  travail.  Le  lecteur  est  amené  pourtant  à  se  poser 
parfois  une  question  à  laquelle  il  voudrait  bien  que  M.  Cadier 
pûl  un  jour  ri'pondre  d'une  façon  plus  conq)lète  qu'il   ne  l'a 


—  G'J  — 

fait  dans  le  jjn'scnt  nirmoiro.  Ouel  rapport  y  avait-il  «Mitre  le 
système  d'administration  importi'  dans  l'Italie  méridionale  et 
celui  qui  fut  en  vigueur,  à  la  même  époque,  dans  les  Etats  du 
roi  de  France?  Le  système  angevin  est  incontestablement 
d'origine  française,  M.  Cadier  l'a  dit  et  d'autres  l'avaient  dit 
avant  lui.  Mais,  par  un  accident  singulier,  il  ne  nous  est  |)ar- 
venu  qu'un  petit  nombre  des  documents  de  l'administration 
de  saint  Louis,  tandis  que  celle  de  ses  frères  s'est  conservée 
presque  entière.  Il  serait  curieux  de  rechercher  ce  que  la  com- 
paraison de  ces  différentes  administrations,  à  Toulouse,  à 
Poitiers,  en  Provence,  à  Naples,  pourrait  nous  faire  entrevoir 
de  l'administration  royale,  et  de  noter  les  caractères  originaux 
de  chacune  d'elles.  Exj)rimer  ce  désir  n'est  pas  adresser  une 
critique  au  mémoire  de  M.  Cadier  :  les  recherches  suscitent 
les  recherches;  les  bons  travaux  éveillent  la  curiosité  en  même 
temps  qu'ils  la  satisfont,  et  le  travail  de  M.  Cadier  est  de 
ceux-là. 

Cet  ensemble  de  mémoires,  Messieurs,  fait  honneur  à  nos 
deux  grandes  écoles  et  à  ceux  de  nos  confrères  qui  les  di- 
rigent. L'un  d'eux,  qui  depuis  six  ans  présidait  aux  travaux 
de  l'Ecole  de  Rome,  arrivé  au  terme  de  son  mandat,  a  désiré 
qu'il  ne  fût  pas  renouvelé.  Il  a  le  droit  de  regarder  avec  sa- 
tisfaction l'œuvre  accomplie  et  de  réserver  à  d'autres  taches 
son  activité  toujours  en  éveil.  Héritier  d'une  tradition  con- 
temporaine de  la  fondation  même  de  l'Ecole,  M.  Le  Blant  la 
transmet  intacte  aux  mains  éprouvées  de  son  successeur.  Votre 
Commission,  Messieurs,  en  terminant  cet  examen  des  derniers 
travaux  de  ses  élèves,  ne  saurait  omettre  de  lui  adresser  des 
remerciements  pour  ce  qu'il  a  fait  en  faveur  de  l'Ecole  par  ses 
conseils  et  par  ses  exemples.  Elle  ne  saurait  non  plus  oublier 
avec  quelle  régularité  le  directeur  de  l'Ecole  de  Rome,  attentif 
à  toutes  les  découvertes  qui  se  faisaient  en  Italie,  prenait  soin 
de  les  faire  aussitôt  connaître  à  ses  confrères.  En  rappelant  ce 


L 


—  70  — 

souvenir  avec  reconnaissance,  voire  Commission  est  certaine 
de  répondre  aux  sentiments  de  toute  l'Académie. 


APPENDICE  N°  II. 


RAPPORT  DU  SECRÉTAIRE  PERPETUEL  DE  L'ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES- 
LETTRES  SUR  LES  TRAVAUX  DES  C03IMISSI0NS  DE  PUBLICATION  DE  CETTE 
ACADÉMIE  PENDANT  LE  SECOND  SEMESTRE  DE  1888,  LU  LE  25  JANVIER 
1889. 

Messieurs, 

Je  commence  mon  rapport  semestriel  en  vous  annonçant  la  publica- 
tion d'un  nouveau  volume  de  nos  Mémoires,  la  9°  partie  du  lome  XXXIH, 
entièrement  occupée  par  l'important  travail  de  M.  L.  Delisle  sur  les  Oji?e- 
ralions  financières  des  Templiers.  Un  volume  d\me  autre  collection  l'avait 
prëcëde'  dans  le  cours  de  ce  semestre,  le  lome  XXX  de  V  Histoire  littéraire 
de  la  France ,  et  le  Corpus  inscriptionum  semiticariim  s'accroîtra  sous  peu 
de  jours  d'un  nouveau  fascicule  :  le  1"  des  Inscriptions  hivnjarites ,  dû  au 
travail  particulier  de  M.  Derenbourg. 

Je  vous  disais  dans  mon  dernier  rapport  le  retai'd  que  la  santé  de 
M.  Riant  appoi'tait  à  la  publication  du  tome  V  des  Historiens  occidentaux 
des  Croisades.  Un  plus  grand  malheur  nous  attendait.  La  mort  vient  de 
nous  enlever  notre  savant  confrère.  Notre  dernier  président,  M.  le  mar- 
quis d'Hervey  de  Saint-Denys,  vous  a  dit,  en  rendant  un  funèbre  hom- 
mage à  sa  mémoire,  tout  ce  que  les  études  sur  l'Orient  latin  ont  perdu 
en  lui.  M.  Riant  y  avait  consacré  tout  son  temps  et  une  partie  de  sa  for- 
tune, et  c'est  avec  la  science  incomparable  acquise  à  ce  prix  par  lui  en 
ces  matières  qu'il  travaillait  à  notre  collection.  Le  V*"  volume  qu'il  laisse 
sur  le  métier  n'en  sera  pas  moins  son  oeuvre  :  car  le  texte  est,  dès  à  pré- 
sent, composé  en  placards,  et  les  papiers  qu'il  a  laissés  fourniront,  nous 
l'espérons,  la  matière  des  notes  dont  il  devait  l'enrichir.  Nous  comp- 
tons pour  cela  sur  la  pieuse  sollicitude  de  sa  famille  et  sur  le  zèle  intelli- 
gent du  confrère  qui  accepte  le  devoir  d'achever  ce  volume. 

Le  tome  11  des  Historiens  arméniens  des  Croisades,  comprenant  des 
textes  latins  ou  français  sur  l'Arménie,  se  continue  par  la  collaboration 


—  71   — 

de  MM.  Scheler  et  de  M;is  Latrie.  Le  texte  français  de  Brochard,  Advis 
directif,  est  totalement  inipriind  et  forme  53  placards.  Le  texte  latin, 
Directoritnn ,  en  compte  hb  et  touche  à  la  fin;  toute  la  copie  est  prête  pour 
l'achèvement  du  volume. 

Le  tome  XX.IV  des  Historiens  de  France  s'est  augmenta  d'un  tiers  dans 
ce  semestre.  11  compte  mainleiu\nt  trente-six  cahiers  lires  ou  bons  à  tiier 
et  les  placards  en  épreuves  ont  suivi  la  même  progression.  On  en  est  au 

n"2  88. 

Le  recueil  de  ms  Mcnioircs ,  je  l'ai  dit,  s'est  accru  d'un  volume.  Le 
tome  XXXll,  q*  partie,  quittait  en  relard,  approchera  do  son  terme  avec 
un  septième  mc-moire  de  M.  Deloche  sur  la  Procession  de  la  Lunade  et 
les  feux  de  la  Saint-Jean,  qui  vient  d'être  livré  à  l'impression. 

Dans  la  première  série  du  recueil  ouverl  aux  Mémoires  des  savants 
étranffcrs,  tome  X,  i"  partie,  aux  deux  mémoires  de  MM.  des  Michels 
et  de  la  Blanchère,  l'un  enlièrement  tiré,  l'autre  en  épreuve,  va  se 
joindre  un  troisième  r.jéinoirc,  cchii  de  M.  Maurice  Croiset  sur  le  Second 
Acteur  d'Eschyle,  qui  est  en  composition. 

La  mort  de  M.  Brrgaigiie,  si  cruellement  et  inopinément  enlevé  à  la 
Compagnie  dans  les  ])rcmiers  jours  des  vacances  dernières,  a  laissé  en 
suspens  le  travail  qu'il  avait  commencé  pour  le  tome  XXVll ,  i"  partie, 
des  Notices  et  extraits  des  manuscrits,  sur  les  Inscriptions  sanscrites  de 
Campa.  Les  planches  avaient  été  déjà  tirées  sous  sa  surveillance;  le 
texte  était  en  épreuve  jusqu'au  placard  52.  Notre  confrère  M.  Senart 
recueillera  la  succession  de  son  cher  compagnon  d'études  en  présidant 
à  l'achèvement  de  ce  dernier  travail. 

Dans  le  même  recueil,  le  tome  XXIX,  i'°  partie,  en  reste  toujours  à 
la  notice  de  M.  Doughty,  sur  les  Documents  épigrnphiqnes  recueillis  par 
lui  dans  le  Nord  de  l'Arabie,  mais  il  va  être  complété  par  un  mémoire  de 
M.  Amélineau  sur  les  Sectes  gnostiques. 

Le  tome  XXXllI,  i'°  partie,  jiour  lequel  cette  réserve  n'existe  plus, 
serait  dès  aujourd'hui  conq)lété  par  une  notice  do  M.  Langlois  sur  les 
Manuscrits  français  et  provençaux  de  Rome,  si  l'étendue  de  ce  travail, 
excédant  les  limites  du  volume,  n'avait  dû  le  faire  reporter  au  volume 
suivant. 

Les  auteurs  de  \ Histoire  littéraire  de  la  France,  MM.  Renan,  Hauréau, 
Gaston  Paris  et  L.  Delisle,  qui  nous  ont  donné  un  volume  celle  année, 
ont  commencé  le  suivant,  le  tome  XXXI,  qui  compte  déjà  huit  feuilles 
bonnes  à  tirer  et  des  placards  jusqu'au  n°  56. 

Le  Corpus  inscriplionum  semiticarum ,  dont  un  fascicule  {Inscripttons 


l 


—  72  — 

hiimjarkes,  h'  partie  du  recueil)  va  paraîli-e,  avance  très  sensiblement 
dans  les  au  1res  parties. 

Le  tome  II  des  Inscriptions  phéniciennes  (  i"  partie  du  Cot^us)  est  eo 
voie  de  publication.  Le  manuscrit  du  premier  fascicule  est  à  l'impression 
ou  jjnH  à  y  être  envoyé;  les  feuilles  i-3  sont  en  pages. 

Pour  les  Inscriptions  araméennes  (Corpus  inscriptionum  seniiticarum , 
pars  secunda),  les  seize  premières  feuilles  sont  en  pages  et  bonnes  à 
être  tire'es.  Elles  comprennent,  outre  la  préface,  les  inscriptions  de  l'As- 
syrie et  de  la  Babylonie,  de  l'Asie  Mineure  et  de  l'Arabie.  Dix  planches, 
correspondant  à  cette  partie,  sont  également  faites.  M.  le  marquis  de 
Vogiié  attend,  pour  livrer  ce  fascicule  à  l'impression,  d'y  avoir  joint  les 
inscriptions  et  les  papyrus  araméens  d'Egypte.  Les  inscriptions  ara- 
méennes formeront  ainsi  trois  grands  ensembles  :  i°  Inscriptions  ara- 
méennes anciennes,  de  iMésopolamie ,  d'Arabie  et  d'Egypte;  2°  Inscrip- 
tions nabatéennes;  3"  Inscriptions  paliiiyréniennes.  Le  premier  paraîtra 
certainement  au  cours  de  cette  année.  Il  formera  près  d'un  demi-volume. 

On  peut  voir  par  là  que  les  espérances  éveillées  dans  le  monde  savant 
par  cette  grande  entreprise ,  à  laquelle  l'Académie  consacre  la  meilleure 
partie  de  ses  ressources,  ne  seront  pas  trompées. 

H.  WALLON, 

Secrétaire  peifétuel. 


—  73  — 
LIVRES  OFFERTS. 


SÉANCE    DU    k    JANVIER. 

M.  Derenbouhg  a  la  parole  pour  un  honnnage  : 

rrj'ai  riiouneiM'  de  présenler  à  la  Compagnie,  au  nom  de  l'auleur, 
M.  Isaac  Bloch,  grand  rabbin  d'Alger,  une  forle  brochure  intitule'c: 
Inscriptions  tinnulaires  des  anciens  cimetières  inraélites  (V Alger  (l*ai-is, 
1888,  in-8"). 

rrLa  plus  grande  parlie  du  travail  est  consacre'e  aux  ëpitaphes  des 
membres  des  familles  Khallaç,  Serar,  Nahon,  Duran,  Siari,  Zacuto, 
Gabisson,  Narboui ,  Temim ,  Azubib,  Busnach  et  d'autres  qui  ont  fuit 
souche  h.  Alger  et  dont  les  desccndajils  font  encore  partie  de  la  commu- 
nautd  israélite.  Les  inscn[)tions  grave'es  sur  les  monuments  sont  des 
e'Iegies  plus  ou  moins  longues  sur  les  de'funts,  compose'es  dans  un  stvle 
assez  mëdiocre.  Aucune  inscri[)lion  ne  remonte  au  delà  du  wu'  siècle. 

tfLa  portion  la  plus  intéressante  de  la  brochure  est  Tintroductiou,  qui 
donne  l'histoire  de  difft^rents  cimetières  juifs  de  la  ville  d'Alger  et  fournit 
quelques  détails  sur  la  formation  de  la  conmiunauté.  M.  Bloch  prouve 
que  les  premiers  habitants  Israélites  de  la  ville  ne  furent  pas  ceux  qui  émi- 
grèrent  d(;  Majorque  vers  i^Sy,  ni  ceux  qui  y  débarquèrent  après  l'ex- 
pulsion des  juifs  de  l'Espagne.  Ceux-ci  furent  connus  pendant  longtemps 
sous  le  nom  de  reporteurs  de  bérets «,  Baalé  Ilakkipou: ,  tandis  que  les 
juifs  établis  déjà  dans  le  pays  étaient  désignés  par  celui  de  crporteurs  de 
ff  turbans  1,  Baalé  llamisncfet. 

irLa  communauté  la  plus  importante  de  la  province  était  certainement 
Tlemcen,  |)uisque  les  docteurs  de  cette  ville  sont  mentionnés  de  bonne 
heure,  et  il  n'y  aurait  rien  d'étonnant  qu'elle  eût  fourni  le  premier  con- 
tingent des  juifs  d'Alger.  Nous  connaissons  dès  le  x°  siècle  des  savants 
fameux  à  Kaïrowàn  en  Tunisie;  nous  en  voyons  d'autres  vers  la  même 
époque  à  Fez,  dans  le  Maroc;  1  Algérie  devait  donc  avoir  également  sa 
population  juive,  bien  qu'elle  n'ait  pas  donné  des  maîtres  célèbres  connus 
au  judaïsme. 

ff  Les  premiers  cimetières  ont  disparu ,  la  propriété  en  ayant  été  vendue 
pour  cause  d'utilité  publique.  Toutefois,  on  a  conservé  par  des  inscrip- 
tions la  mémoire  de  deux  docteurs,  R.  Isaac  Berfel  beu  Chéchet,  mort 
en  liioq,  et  Simon  Duran.  mort  en  \hk'i.  En  effet,  ces  deux  rabbins 


—  Ik  — 

jouissaient  d'une  très  grande  renommée,  et  les  ouvrages  du  dernier  sur- 
tout embrassent  toutes  les  parties  de  la  science  juive  au  moyen  âge.  Il 
ne  faut  pas  oublier  de  remarquer  que  les  inscriptions  gravées  sur  les 
marbres  qu'on  voit  actuellement  dans  le  port  d'Alger  sont  modernes,  n 

M.  Héron  DE  Villefosse  dépose  sur  le  bureau  de  l'Académie,  de  la 
part  de  M.  Clément  Fallu  de  Lessert,  un  travail  ayant  pour  titre  :  Les 
briques  légionnaires ,  contribution  à  la  géographie  militaire  de  l'Afrique 
rowjrtme  (Paris,  1888,  in-8°). 

«Dans  ce  mémoire,  M.  Fallu  de  Lessert  a  appelé  l'attention  sur  les 
briques  légionnaires  trouvées  dans  le  nord  de  l'Afrique.  On  désigne  sous 
ce  nom  les  divers  matériaux  en  terre  cuite  que  les  soldais  préparaient 
eux-mêmes,  sur  lesquels  ils  apposaient  un  timbre  indiquant  généralement 
le  numéro  du  corps,  son  nom  et  son  surnom,  et  qu'ils  utilisaient  ensuite 
dans  les  travaux  qui  leur  étaient  confiés.  Ces  briques  fournissent  de  pré- 
cieux renseignemenis  sur  la  composition  de  l'armée  d'Afrique,  sur  les 
légions  qui  ont  plus  ou  moins  séjourné  dans  la  province  à  des  époques 
diverses  et  sur  un  certain  nombre  de  cohortes  auxiliaires  qui  tenaient 
garnison  dans  les  Maurétanies  et  en  Numidie.  Ce  sont  les  seuls  docu- 
ments qui  puissent  nous  renseigner  sur  les  lieux  de  stationnement  de 
plusieurs  de  ces  divers  corps;  ils  fournissent  souvent  de  précieuses  men- 
tions au  point  de  vue  de  la  chronologie.  La  liste  que  public  M.  Fallu  de 
Lessert  est  le  fruit  de  recherches  faitos,  ii  y  a  trois  ans,  en  Algérie,  où 
l'avait  envoyé  rÉcole  des  hautes  études." 

M.  Héron  de  Villefosse  présente  ensuite  à  l'Académie,  de  la  part  de 
M.  Jules  Challamel,  docteur  en  droit,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de 
Faris ,  im  mémoire  intitulé  :  Loi  du  3o  mars  1 88 j  sur  la  conservation 
des  monuments  historiques  et  des  objets  d'art;  élude  de  législation  comparée 
(Faris,  1888,  in-8°,'  extrait  de  Winnuaire  de  législation  française). 

ffCe  travail  débute  par  une  sorte  dinlroduclion,  dans  laquelle  l'auteur 
a  présenté  avec  beaucoup  de  soin  et  d'une  manière  tout  à  fait  sincère  et 
saisissante  les  origines  du  grand  mouvement  archéologique  moderne, 
dont  le  développement  rapide  a  forcé  les  pouvoirs  publics  à  intervenir 
par  l'institution  du  Comité  des  travaux  historitjues  et  de  la  Commission 
des  monuments  historiques.  Outre  le  texte  de  la  loi  nouvelle,  ce  mémoire 
renferme  une  intéressante  étude  comparative  des  lois  analogues  en 
vigueur  dans  les  différents  pays  de  lEurope.  H  en  résulte  que  la  loi  fran- 
çaise actuelle  tient  le  milieu  entre  les  lois  rigoureuses  de  la  Suède,  de 
la  Finlande,  de  la  Hongrie  et  de  la  Grèce,  et  la  loi  très  libérale  de  la 
Grande-Bretagne.  Un  paragraphe  spécial  (p.  28)  est  consacré  à  la  loi 


—  75  — 

grecque  du  lo  mai  i83'i  ,  Tsspl  ipyjxioxijTwv,  loi  dont  les  disposilions 
intéressent  tous  les  archéologues,  i^ 

SÉANCE  DU    1  1    JANVIER. 

Sont  offerts  : 

Un  grand  amalcuv français  du  xvn'  siècle,  Fabri  de  Peircsc,  ])ar  M.  Léo- 
pold  Delislc,  membre  tle  rinslitul,  élude  suivie  du  Testament  inédit  de 
Peircsc,  publié  et  annoté  par  M.  Ph.  Tamizey  de  Larroque,  correspon- 
dant de  rinslitut  (Toulouse,  1889,  in-S",  extrait  des  Annales  du  Midi); 

Les  diocèses  d'Aire  et  de  Dax  ou  le  département  des  Landes  sous  la 
Bévolution  française ,  i-jSg-iSoS.  Bécits  et  documents,  par  M.  Joseph 
Légé,  prêtre  du  diocèse  d'Aire  (Aii'e-sur-1'Adour,  1876,  2  vol.  in-8"). 

M.  Georges  Perrot  jirésente  de  la  part  de  l'auteur,  M.  Jules  Martha, 
L'art  étrusque  (Paris,  1889,  gr.  in-8°). 

ffLe  livre  de  M.  Jules  Mai-lha  n'est  que  l'édition,  complétée  et  cor- 
rigée, d'un  mémoire  que  l'Académie  couronnait  l'an  dernier;  l'Académie 
ne  peut  qu'applaudir  au  succès  qu'obtient,  auprès  du  public,  nn  travail 
excellent  qui  a  été  provoqué  par  un  de  ses  concours.  Sur  la  con)pétence 
de  l'auteur,  sur  le  mérite  du  livre,  sur  son  plan,  sui»  la  précision  et  l'élé- 
gance du  style  très  bien  approprié  au  sujet,  nous  ne  saurions  rien  dire 
qui  n'ait  été  dit  il  y  a  peu  de  temps  par  le  rapport  de  votre  Commission. 
Nous  nous  bornerons  ici  à  indiquer  ce  que  l'éditeur  a  fait  pour  rendre 
l'ouvrage  digue  de  sa  valeur  scienlilique  et  utile  aux  lecteurs.  Le  format 
est  commode  et  l'impression  fort  belle;  il  y  a  quatre  planches  tirées  en 
couleur  et  quatre  cents  gravures  semées  dans  le  texte,  dont  quelques- 
unes  sont  des  reports  directs  de  photographies.  Les  autres,  exécutées 
avec  soin  sous  la  surveillance  de  l'auteur,  méritent  aussi  toute  con- 
fiance, n 

M.  Helzey  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

n-J'ai  l'honneur  de  présenter  à  l'Académie  le  sixième  fascicule  des 
Céramiques  de  la  Grèce  propre,  de  notre  cher  et  très  regretté  confrère 
Albert  Dumont  (Paris,  1888,  m-h").  Cet  hommage,  comme  les  précé- 
dents, est  fait  au  nom  de  M"'°  Albert  Dumont. 

frM.  Edmond  Potlior,  qui  contiime  à  donner  ses  soins  dévoués  a  la 
publication  posthume  des  œuvres  de  son  maître,  a  eu  l'heureuse  idée  de 
réunir  dans  le  second  volume  tous  les  articles  de  l'auteur  qui  se  rap- 
portent à  la  céramique  antique.  C'est  ainsi  que  dans  le  présent  fascicule 
nous  trouvons  la  réimpression  d'un  important  mémoire  sur  les  Pein- 
tures céramiques  de  la    Grèce,  extrait   du  Journal  des  Savants  de  187*:? 


—  76  — 

el  1873.  Ce  travail  est  ici  d'autant  mieux  à  sa  place  ([ii'ii  est  comme  le 
premier  dessein  du  grand  ouvrage  qu'Albert  Dûment  devait  entreprendre 
plus  tard,  sans  pouvoir  y  mettre  la  dernière  main.  Quand  un  peintre  ou 
un  sculpteur  laisse  quelque  grande  œuvre  inachevée,  les  esquisses  et  les 
études  préparatoires  qui  se  relrovivent  après  lui  acquièrent  une  valeur 
exceptionnelle.  11  en  est  de  même  de  ces  recherches,  où  se  montrent 
déjà  les  idées  et  les  doctrines  qui  devaient  recevoir  dans  les  Céramiques 
im  plus  large  développement  et  contribuer  à  renouveler  chez  nous  l'étude 
de  la  céramographie  grecque. 

rrLes  planches  de  ce  fascicule,  comme  celles  du  précédent,  ne  sont 
plus  consacrées  aux  vases  peints ,  mais  aux  figurines  de  terre  cuite ,  qui 
sont  reproduites  d'après  les  dessins  originaux  de  Jules  Ghaplain.  Il  est 
utile  de  rappeler  que  ces  charmants  dessins,  depuis  longtemps  gravés  et 
mis  sous  les  yeux  du  public  dans  plusieurs  expositions  déjà  anciennes, 
ont  été  les  premiers  exemples  qui  aient  révélé  en  France  l'extraordinaire 
richesse  des  collections  athéniennes  dans  ce  genre  d'antiquités,  devenues 
si  justement  l'objet  d'une  admiration  passionnée.  Le  nom ,  aujourd'hui 
célèbre,  de  Tanagre  n'était  pas  encore  prononcé  à  cette  époque.  On 
parlait  de  figurines  béotiennes,  parfois  de  figurines  deThèbes,  parce  que 
la  nécropole  de  Tanagre  s'étendait  dans  la  direction  de  cette  ville,  où  le 
fruit  des  premières  fouilles  fut  probablement  recueilli  avant  de  parvenir 
h  Athènes.  Mais  il  suffit  de  parcourir  les  planches  de  la  livraison  offerte 
à  l'Académie  pour  rester  convaincu  que  beaucoup  des  figurines  qu'elles 
représentent  appartiennent  déjà  aux  séries  tanagréennes. 

ffEn  réalité,  c'est  la  mission  de  Dumont  et  Ghaplain  en  Grèce,  ce 
sont  les  dessins  rapportés  par  eux  qui  ont  tout  d'abord  éveillé  l'attention 
de  nos  archéologues  et  de  nos  musées  sur  les  trésors  récemment  décou- 
verts, que  recelaient  alors  les  collections  locales  et  qui  se  sont,  depuis 
lors,  répandus  dans  la  plupart  des  grandes  collections  européennes  au 
grand  profit  de  l'art  et  de  la  science.  r> 

M.  Haurkau  dépose  sur  le  bureau,  au  nom  de  M.  Gabriel  Hanotaux, 
un  volume  qui  porte  pour  titre  :  Recueil  des  insiruclions  données  aux 
ambassadeurs  el  ministres  de  France ,  depuis  les  traités  de  WeslphaJie  jusqu'à 
la  Révolution  française ,  etc.  :  Rome ,  avec  une  introduction  et  des  notes, 
par  Gabriel  Hanotaux,  tome  I,  lôâS-iGS-j  (Pai-is,  1888,  in-8°). 

M.  SciiEFER  présente  à  l'Académie,  au  nom  du  traducteur,  un  ouvrage 
ayant  pour  titre  :  Léon  le  Magnifique,  premier  roi  du  Sissouan  ou  de  l'Ar- 
ménocilicie,  par  le  R.  P.  Léonce  Alishan,  traduit  par  le  P.  Georges 
Bayan  (Venise,  1888.  in-8"). 


/  / 


ffCelle  histoire  du  proniier  |nince  tic  la  dynastie  des  Roupriiicns  qui 
prit  le  titre  de  roi  est  extraite  d'un  ouvrage  arménien  publié  à  Venise, 
il  y  a  trois  ans,  par  le  P.  Aiislian,  de  la  coinrnunaut(!  des  Mekliitaristes 
de  Saint-Lazare.  Le  P.  Aiislian  a  surtout  mis  à  ronlribulion  pour  la 
rédaction  de  son  travail  les  (ouvres  des  auteurs  arméniens  qui  ont  retracé 
les  événements  dont  l'Asie  Mineure,  l'Arménie  et  la  Syrie  lurent  le 
lh('àlre  à  la  (in  du  xn'  et  au  commencement  du  xni"  siècle.  Il  a  recueilli 
(piclques  faits  nouveaux  dans  deux  manuscrits  en  sa  possession  et  dont 
l'un  aurait  ('té  rédigé  à  la  fin  du  xui"  siècle.  L'extrait  du  Sissouan ,  tra- 
duit par  le  P.  Bayan,  nous  donne  Thistoirc  de  l'émigration  et  des  con- 
([uéles'des  Arméniens  on  Cilicie,  de  leurs  expéditions  en  Asie  Mineure, 
lorsque  Léon,  sous  le  litre  de  baron,  eut  le  pouvoir  en  mains.  Un  cha- 
pitre est  consacré  à  la  marche  de  l'armée  de  l'enqiereur  Frédéric  à 
travers  la  Cilicie  et  aux  relations  que  Léon  avait  nouées  avec  les  chefs 
<le  la  croisade  ot  les  princes  chrétiens  d'Europe.  Après  avoir  réussi  à  rat- 
tacher l'église  armt'iiicnne  au  Saint-Siège,  Léon  fut  couronné  roi  d'Ar- 
ménie dans  la  cathédrale  de  Tarse,  par  l'archevêque  de  Mayence, 
Conrad  de  Witlelspach,  le  G  janvier  1199.  Ce  prince  mourut  le 
6  mai  1219,  après  un  règne  de  trente-deux  ans.  Il  faut  savoir  gré  au 
P.  Bayan  d'avoir  entrepris  la  traduction  de  l'histoire  d'un  prince  qui  prit 
part  aux  ('vénemenls  consitlérables  qui  se  sont  déroidés  en  Syrie  à  la  lin 
du  xn"  siècle.  Je  crois  cependant  que  le  P.  Alishau  aurait  pu  rendre  son 
récit  plus  conqilet  en  consultant  les  chroniqueurs  occidentaux  et  les 
historiens  oi-ientaux  qui  abondent  en  détails  précieux  sur  cette  époque. 
Un  certain  nombre  de  pièces  forment  l'appendice  de  cet  ouvrage,  et  je 
citerai,  parmi  les  plus  intéressantes,  une  note  sur  la  littérature  armé- 
nienne sous  la  dynastie  des  princes  Uoupéniens.  ^^ 

M.  ScHEFEK  oltre  ensuite,  au  nom  de  M.  Henry  Hovvorth,  membre 
du  Parlement ,  le  quatrième  volume  de  son  Histoire  des  Mogols  depuis  le 
ix'  juscpi'au  xix°  siècle  {Hislory  of  the  Mongols ,  from  the  g""  to  the 
/p"*  ceiiliirij.  part  III,  the  Mongols  of  Persia,  Londres,   1888,  in-S"). 

ffM.  H.  lloworth  a  fait  des  peuples  d'origine  turque  l'objet  de  ses 
éludes  et  il  a  déjà  publié  une  histoire  de  Djenghiz  Khan  ot  de  ses  succes- 
seurs, qui  forme  les  trois  premiers  volumes  de  l'ouvrage  dontjemetslc 
(piatrième  sous  les  yeux  de  l'Académie.  Celui-ci  comprend  une  période  de 
plus  d'un  siècle.  L'histoire  des  prédécesseurs  de  Houlagou  est  exposée 
dans  une  longue  introduction,  à  la  suite  d(;  la([uollo  M.  lloworth  ;d)orde 
le  récit  du  iè[;ue  de  co  prince,  cpii,  a[)ros  avoir  détruit  la  socle  des 
Ismaïliens  et  mis  lin  au  califat  do  Bagdad,  fonda  la  dynastie  des  llkha- 


—  78  — 

niens,  qui  régna  sur  la  Perse  jusque  vers  le  milieu  du  xiv°  siècle. 
M.  Howorth  trace  le  tableau  des  expéditions  des  Mogols  en  Syrie,  qui 
donnèrent  à  la  chrétienté  Tillusion  que  cette  province  pourrait  être 
arrachée  aux  sultans  d'Egypte  et  que  les  Francs  rentreraient  en  pos- 
session de  Jérusalem. 

rf  La  tolérance  religieuse  et  la  protection  accordée  aux  chrétiens  priren  t  fin 
sous  le  règne  du  sultan  Ahmed,  qui  embrassa  l'islamisme.  M.  Howorth 
n'a  pas  manqué  de  signaler  les  relations  d'Arghoun  avec  le  pape  Nico- 
las IV  et  avec  Philippe  le  Bel  :  il  s'étend  longuement  sur  le  règne  de 
Ghazan  et  sur  les  institutions  dont  il  dota  la  Perse.  La  dynastie  des  Ilkha- 
niens  prit  fin  en  io35 ,  et  à  la  mort  d'Abou  Saïd  les  provinces  qui  com- 
posaient le  vaste  empire  des  Mogols  devinrent  la  proie  de  chefs  tur- 
comans,  dont  M.  HoAvorth  retrace  l'histoire.  Le  chapitre  des  relations 
diplomatiques  et  commerciales  des  souverains  mogols  avec  l'Europe  pré- 
sente un  intérêt  particulier.  En  un  mot,  on  doit  savoir  gré  h  M.  Howorth 
de  nous  avoir  donné  une  histoire  des  Ilkhaniens  plus  complète  que 
celles  qu'avaient  publiées  avant  lui  MM.  Mouradjea  d'Ohsson  et  de 
Ha  m  mer.  55 

SÉANCE  DU    18   JANVIER. 

M.  Léopold  Delisle  dépose  sur  le  bureau  son  Catalogue  des  manu- 
scrits (les  fonds  Libri  et  Barrois  (Paris,  1888,  in-8°). 

Sont  encore  ofîerts  : 

De  l'emploi  des  bijoux  et  de  l'argenterie  comme  prix  d'achat  en  Irlande 
avant  l'introduction  du  monnayage ,  par  M.  d'Arbois  de  Jubainville ,  membre 
de  l'Institut  (Paris,  1888,  in-8°,  extrait  de  la  Revue  archéologique)  ; 

L'inscription  de  Varenilla  au  Musée  des  antiquaires  de  l'Ouest,  par 
Em.  Espérandieu  (Saint-Maixent,  1889,  in-8"',  extrait  de  X Epigraphie 
romaine  du  Poitou  et  de  la  Saintonge)  ; 

Indication  approximative  de  vestiges  laissés  par  les  populations  préco- 
lombiennes du  Nicaragua,  par  Désiré  Pector  (Paris,  1889,  ''^■8")^ 

IlpaxTocà  rffs  èv  kOijvan  dp^xioXoyiKijs  éraip/as  roi)  érovs  1887 
(Athènes,  i888,in-8°); 

Le  duc  Louis  d'Orléans ,  frère  de  Charles  VI,  par  Albert  de  Circourt 
(Bruxelles,  1889,  in-8^  extrait  de  la  jRei'«e  des  questions  historiques); 

An  cpigraphical  journetj  in  Asia  Minor,  par  J.-R.-Sitlington  Sterrett 
(Boston,  1888,  in-8°,  vol.  Il  des  Papers  of  the  American  school  of  clas- 
sical  studics  at  Athens); 


—  79  — 

De  Alexandri  magni  expedilione  Indica  quœstiones ,  par  J.  Lezius  (Dor- 
pat,  1887,  in-S'); 

Ein  ifriechtsc/tes  Lchvhnch  der  Metrilc ,  par  W.  Hoerschelmanii ,  pro- 
fesseur do  philolofjie  à  Dorpal  (Dorpat,  1888,  in-8°). 

M.  Gaston  Paris  présente  ,  de  la  part  des  auteurs  : 

1°  Le  7-omanz,  de  saint  Fanuel  et  de  sainte  Anne  et  de  Nostre  Dame  et 
de  Nostre  Scignor  et  de  ses  Apostres,  publid  |)our  la  première  fois  d'après 
le  manuscrit  de  Montpellier,  par  Camille  Chabaneau,  correspondant  de 
rinslitut  (Paris,  1889,  in-8'). 

2°  Le  Parnasse  provençal  du  père  Boug'erel,  prêtre  de  l'Oratoire, 
publii'  d'après  le  manuscrit  d'Aix,  par  le  même  (Paris,  1888,  in-8°). 

3°  Les  Mabinogion,  tiaduits  en  entier,  pour  la  jiremière  fois,  en 
français,  par  J.  Lolh,  tome  I  (Paris,  1889,  in-8°,  formant  le  tome  III 
du  Cours  de  littérature  celtique  de  MM.  H.  d'Arbois  de  Jubainville  et 
J.  Loth). 

ffOn  sait  qu'on  désigne  sous  le  nom  de  Mabinogion  (apprentissage  en 
poësie,  tel  parait  être  le  sens  de  ce  mot)  des  contes  en  prose  gallois, 
<lont  le  recueil  le  plus  complet  est  conserve  dans  le  Livre  rouge  de  Her- 
gest,  aujourd'bui  à  Oxfoi'd.  Les  Mabinogion  ont  été  publiés,  d'après  ce 
recueil,  par  lady  Guest,  en  i838,  et  traduits  par  elle  en  anglais.  Le 
recueil  comprend  trois  classes  distinctes  :  des  traductions  de  romans 
français  conservés,  des  récits  parallèles  à  des  romans  français,  mais  qui 
ne  paraissent  pas  en  dériver  directement,  des  contes  tout  à  fait  originaux. 
Bien  que  la  seconde  classe  ait  un  réel  intérêt  pour  l'histoire  littéraire 
comparée,  c'est  la  troisième  qui  a  de  beaucoup  la  plus  grande  valeur: 
elle  nous  présente  la  fiction  celtique  tout  à  fait  livrée  à  elle-même  et 
a  fourni  à  M.  llenau  quelques-uns  des  traits  les  plus  délicats  de  son 
Essai  sur  le  génie  des  races  celtiques.  L'édition  et  la  traduction  de  lady 
Guest  laissaient  cependant  à  désirer;  la  première  vient  d'être  remplacée 
par  une  édition  savante  et  critique  de  MM.  Rhys  et  G.  Evans;  la  seconde, 
sur  laquelle  avaient  été  faites  les  versions  subséquentes  en  allemand  ou 
en  français,  le  sera  dorénavant  par  celle  de  M.  Lotb.  Le  premier  volume 
contient  huit  contes,  tous  appartenant  à  la  troisième  série,  c'est-à-dire 
essentiellement  et,  sauf  quelques  influences  savantes  ou  chevaleresques, 
pui-ement  gallois.  M.  Loth  s'est  efforcé  de  donnei'  une  traduction  aussi 
fidèle  que  possible; il  n'a  pas  essayé  d'augmenter  le  charme  de  ces  récifs 
poétiques  et  bizarres  en  en  rapprochant  le  style  du  style  de  nos  contes 
d'enfants,  dont  ils  n'ont  pas  la  naïveté.  Il  a  laissé  subsister  dans  toute 
leur  brutalité  des  traits  de  mœurs  primitives  que  lady  Guest  avait  atté- 


—  80  — 

nues  ou  supprimés.  11  a  joint  h  sa  version  des  notes  critiques  qui  mon- 
trent sa  compétence  philologique,  et  des  remarques  sur  les  personnages 
ou  les  coutumes  qui  attestent  sou  érudition  et  seront  d'un  grand  secours 
aux  savants  qui  s'intéi'essent  à  la  littérature  narrative  des  Bretons  sans 
être  des  spécialistes.  Dans  son  introduction,  M.  Loth  cherche  à  établir 
que  les  récits  du  livre  de  Hergest  remontent  à  la  fin  du  su^  siècle;  il 
mentionne  à  ce  propos,  un  peu  trop  brièvement,  des  manuscrits  du 
xni°  siècle  qui  en  contiennent,  paraît-il,  des  fragments  considérables. 
On  voudrait  aussi  qu'il  eût  donné  une  description  exacte  du  Livre  rouge  et 
une  table  complète  de  ce  qu'il  contient.  Ce  sont  là  de  légères  omissions, 
qu'il  lui  sera  facile  de  réparer  dans  le  second  volume. 

frLa  publication  de  M.  Loth  fait  partie  du  Cours  de  littérature  cel- 
tique inauguré  par  notre  éminent  confrère  M.  d'Arbois  de  Jubainville, 
qui,  non  content  de  défricher  avec  une  énergie  infatigable  le  champ  de 
nos  antiquités  celtiques,  sait  y  attirer  des  travailleurs  dignes  de  le  se- 
conder, y  diriger  leurs  efforts  et  les  aider  à  les  rendre  fructueux,  v 

M.  Oppert  offie,  delà  part  de  l'auteur,  M.  P.  Ristelhuber,  un  volume 
intitulé  :  Heidelberg  et  Strasbourg.  Recherches  biographiques  et  littéraires 
sur  les  étudiants  alsaciens,  immatriculés  à  l'Université  de  Heidelberg  de 
i386ài662  (Paris,  1888,  in-8°). 

SÉAiNCE   DU    2  5    JANVIER. 

Le  Seciîétaire   perpétuel  offre  à  l'Académie  : 

1°  Le  second  volume  de  son  ouvrage  sur  Les  représentants  du  peuple 
en  mission  et  la  justice  révolutionnaire  dans  les  départements  en  l'an  11 , 
ijgS-ijg^i  (Paris,  1889,  in-8°); 

2°  Une  réimpi'ession  de  sa  Notice  sur  la  vie  et  les  travaux  de  M.  Jo- 
seph-Natalis  de  Wailli/  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait  de  la  Bibliothèque  de 
l'École  des  chartes,  t.  XLIX,  année  1888). 

Sont  encore  offerts  : 

Le  règne  de  Philippe  II  et  la  lu  Ile  religieuse  dans  les  Pays-Bas  nu 
xiv'  siècle,  par  M'^'  Namèche  (Louvain,  1885-1887,  8  volumes  in-8"); 

Statuts  de  la  corporation  des  barbiers  de  Rome.  Leclure  faite  à  la  So- 
ciété des  sciences  morales  de  Seine-el-Oise,  le  11  janvier  1889,  par 
M.  Emmanuel  Rodocanachi  (Paris,  1889,  'm-h°). 

M.  l>AVAis.-iox  offre  à  la  Compagmo,  de  la  pai-t  de  l'auleur,  M.  Jean- 
N.  Svoronos,  le  1"  fascicule  de  ses  Etudes  archéologiques  et  nuniismaliques 
(Paris  et  Athènes,  1889.  in-/i"). 


—   SI    — 

TfM.  S\(»roii(is  lirt'  des  lypes  itioiu-laiit-s  de  Vlaiilinec  iiiic  i'\|ilicalioii 
loiilc  iioint'Ih'  irmif  pallie  i-esleo  jnstiuà  |ii-éseiit  loit  oltsciiic  de  la 
lé<rende  d'Iilysse.  lello  (|iie  l'avait  ramiilf'e  le  coiitimialeiir  tlo  VOdijusée , 
l<]ii<>ammnn.  Il  inonlre  que  rerlaiiios  médailles  de  Maiiliiiée,  (jii'oii  n'avait 
pas  piicoi(>  expliquées  d'une  manière  satisfaisante,  représentent  le  roi 
dltliarpie  lorsipie,  se  conformant  an  ronseil  de  Trophonins,  il  va 
chercher  en  Arcadie  l'homme  io-norant  des  choses  rie  la  nier  dont  Tiri'- 
sias  lui  avait  antrefois  annoncé  la  rencontre,  rencontre  <|ni  devait  mettre 
lin  à  ses  perpé-lnels  voyages.  Il  commente  par  com|)arais(»n  avec  ces  \\\ér 
dailles  plusi(MM-s  antres  momunents  antiques. 

ff  M.  Svoronos  n'appartient  pas  à  celte  écolo  archéologique  qui  renonce, 
pour  se  borner  h  la  description  du  matériel  des  objets,  aux  explications 
(]ncn  peuvent  fournir  les  monuments  littéraires:  il  cherche,  au  contraire, 
à  retrouver,  an  moyen  de  la  comparaison  des  textes  et  des  monuments 
lipurés.  surtout  des  médailles,  les  idées,  les  crovances,  les  Iradilions 
auxquelles  les  uns  et  les  autres  se  rapportent. 

'rOn  a  al)us('  peut-être  des  recherches  et  des  rapprochements  mytho- 
logiques; ce  n'est  pas  une  raison  pour  n'en  pas  user.  M.  Svoronos  eu 
use  avec  succès.  " 

M.  Henri  Weil  offre  à  l'Académie,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Louis 
Havet,  un  mémoire  sur  le  Supplice  de  Phlégyns ,  dans  le  VP  livre  de 
V Enéide  (Paris.  i88(),  ni-H",  extrait  de  la  lievuc  de  philologie). 

tM.  Louis  Havet,  dit  notre  confrère,  propose  une  transposition  qui 
donne  une  suite  pins  satisfaisante  des  idées,  et  qui  est  confirmée  par 
deux  textes,  de  Valéi'ius  Flaccus  et  de  Slace,  indirectement,  il  est  vrai, 
mais  avec  évidence  pour  ceux  qui  savent,  comme  M.  Havel,  lire  et  com- 
prendre les  auteurs. 

(f  L'Académie  se  souvient  d'avoir  suivi  l'autre  jour  avec  intérêt  l'expo- 
sition claire,  la  démonstration  précise  et  élégante  de  M.  Havet.  Les  lec- 
teurs du  mémoire  imprimé  y  trouveront  quelques  pages  nouvelles. 
Même  après  la  transposition,  certaines  particularités  peuvent  encore 
étonner  un  lecteur  attentif  de  Virgile.  Pour  les  expliquer,  M.  Havet 
donne  l'ingénieuse  conjecture  que  le  poète  avait  sous  les  yeux  une  pein- 
ture, (pi'il  rendait  dans  ces  vers.  Tel  est  ce  mémoire,  intéressant  par  le 
résultat,  plus  intéressant  encore  par  la  méthode." 

\L  WvM.  présente,  en  outre,  au  nom  de  M.  Ch.-Km.  Kuelle.  wwq  Note 
sur  l'énigme  (ilchiinique  des  Oracnla  silujllina  (extrait  du  Ihillelni  de  lu 
Société  des  mili'/K aires  de  France ,  ann('e  iHSy  ). 

M.  SF.wnr  présente,  de  la  pari  de  M.  James  Darmeslelor,  im  Nolunie 

XVII.  '"' 


miaïUiitkr    ^àTi'tiii  ' 


—  8-2  — 

qui  a  pour  liU'e  :  Lellres  sur  Vhide.  A  la  frontière  afijhane  (Paris,  1888, 
iu-12). 

ffLe  sous-lilre  du  voluuie  en  indique  Tobjel  principal.  Ce  sont  surtout 
les  souvenirs  d'un  séjour  prolongé  à  Peshawer  et  à  Abbolabad  qui  rem- 
plissent ces  lettres.  Au  reste  de  l'Inde,  qu'il  a  rapidement  traversée, 
M.  Darraesteter  donne  des  notes  rapides.  Elles  sont  toujours  pittoresques, 
colorées,  expressives.  Sur  les  tribus  afghanes,  ses  récits  variés  de  ren- 
seignements historiques,  d'impressions  personnelles,  d'anecdotes  carac- 
téristiques, sont  instructifs,  piquants,  attachants  toujours.  On  imagine 
bien  que  nous  ne  sommes  point  ici  en  présence  d'un  de  ces  journaux 
de  voyage  dans  l'Inde,  naïfs,  consciencieux,  mal  informés,  dont  la 
librairie  anglaise,  quelquefois  la  librairie  continentale  s'enrichit  avec 
tant  d'excès.  Ces  lettres  sont  toutes  des  morceaux  d'une  littérature  très 
atîinée  et  très  savante,  un  peu  tourmentée  peut-êlre  au  gré  de  quelques  - 
uns,  animée  d'une  verve  humoristique  et  spirituelle,  soutenue  par  une 
connaissance  étendue  des  choses  de  l'Inde,  par  un  sentiment  très  juste 
du  milieu  psychologique  et  historique.  A  des  lecteurs  même  mal  préparés  , 
le  livre  sera  une  lecture  ingénieuse  et  charmante;  mais  quel  plaisir,  poui- 
qui  a  passé  par  les  lieux  qu'il  parcourt,  de  renouveler  ses  souvenirs  en 
compagnie  d'un  guide  si  habile  à  nuancer  avec  un  art  minutieux  la  phy- 
sionomie des  hommes,  des  monuments  et  des  paysages!  Je  ne  veux  pas 
manquer  de  dire  ce  que  ces  récits  empruntent  de  saveur  aux  citations 
nombreuses  que  M.  Darmesteter  a  tirées  du  trésor  des  chansons  afghanes 
rapportées  par  lui.  Elles  feront  l'objet  d'une  publication  spéciale  qui  s'im- 
prime en  ce  moment.  En  attendant  ces  extraits,  ceux  qu'il  nous  donne 
ici,  avec  leur  allure  un  peu  étrange,  font  h  merveille  dans  le  cadre  d'un 
travail  précieux  où  M.  Darmesteter  les  a  enchâssés.  Les  Lettres  fiur  l'Inde 
ne  sont  pas  un  livre  scientifique;  je  ne  dirai  pas  pourtant  que  l'écrivain 
y  fait  oublier  le  savant.  Us  sont  bons  à  y  rencontrer  côte  à  côte.  •" 

M.  Delisle  fait  hommage  d'un  opuscule  intitulé  :  Les  correspondants 
de  l'abhé  Nicaise.  L  Un  diplomate  éritdit  au  xvn'  siècle,  Ezéchiel  Span- 
heim.  Lettres  inédites  {1681-jyo]),  publiées  par  Emile  du  Boys  (Paris, 
i88(),in-8"). 

'fPar  ce  fascicule,  M.  du  Boys  inaugure  très  heureusement  la  [>ubli- 
calion  d'une  correspondance  littéraire  et  scientifique,  très  importante 
pour  la  seconde  moitié  du  xvn'  siècle.  L'éditeur  a  pris  pour  modèle  les 
davaux  de  M.   famizey  de  Laiin(|u<<  sur  la  correspondance  de  Peiresc." 

M.  ScHEFEr,  offre,  au  nom  (\p  lauteur,  M.  Gustav(!  Lcbon,  un  ctuvragf' 
intitulé;  Les  premières  eirilisalions  (Paris,  i88(),  gr.  in-8"). 


—  S8  — 

M.  Pfiiil  Mi'.MT.  prisonl»»,  ail  nom  ilo  M.  de  Mi'l},  li's  trois  mémoires 
siiivanls: 

t"  Ln  crosse  dite  de  Rageiifroid  (Paris,  1888,  in-^t",  extrait  de  la 
Gazelle  aic/téoloffu/Ke); 

fi"  l'Jtiide  icnuogrdphifjHe  suv  les  rihau.r  dit  xiu'  siècle  de  lu  cathédrnie 
de  CÀaiires  (in-A°,  extrait  de  la  Revue  de  l'art  chrétien); 

3"  l/«/.vo«.v  «orH«rt/»/t's  (Paris,  1889 ,  in-/»",  extrait  fie  la  levnc  ijjiis- 
trëe  Les  Lettres  et  les  Arts). 

SÉANCE    DU    l""^  FKVniKn. 

Le  SEC.RÉTAinE  PERPÉTUEL  oflrc  il  la  (Joiiipag-iiie,  de  la  part  de  M.  Gus- 
tave Huinhert ,  le  tome  VIII  du  Manuel  des  antiquités  romaines  de 
MM.  Th.  Mominsen  et  J.  Marquardt.  Ce  tome  comprend  X Organisation 
de  l'Empire  romain ,  par  J.  Marquardt,  traduite  par  MM.  André  Weiss  et 
Paul  Louis-Lucas,  tome  I"  (Paris,  1889,  in-8°). 

ffL'Acade'mie  sait,  ajoute  M.  Wallon,  quelles  garanties  offre  h  cette 
traduction  la  science  consommée  de  M.  Humbert,  qui  en  dirige  toutes 
les  parties.  71 

SÉANCE   DU   8    FÉVRIER. 

Le  Secrétaire  perpétuel  présente,  au  nom  de  Tauteur,  M.  Ilcné 
Kervilcr,  un  ouvrage  intitulé  :  La  Bretagne  à  l'Académie  fançaise  au 
Aviii'  siècle.  Eludes  sur  les  académiciens  bretons  ou  d'origine  bretonne, 
2°  édition,  complètement  refondue  (Paris,  1889,  in-S"). 

M.  Edmond  Le  Blant  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

«M.  Diehl,  ancien  membre  des  Ecoles  françaises  de  Rome  et  d'Athènes. 
a  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie  deux  volumes  qu'il  vient  de  publier  : 
les  Etudes  sur  l'administration  byzantine  dans  l'exarchat  de  Bavenne 
{568-j5i),  puis  un  travail  sur  L'église  et  les  mosaïques  du  couvent  de 
Saint-Luc  en  Phocide  (Paris,  1888  et  1  889,  3  vol.  in-8%  formant  les  fasci- 
cules 53  et  55  de  la  Bibliothèque  des  Ecolesfrançaises  d'Athènes  et  de  Rome). 

ffLe  premier  de  ces  ouvrages  est  une  thèse  de  doctorat  es  lettres.  Le 
sujet  sur  lequel  il  porte  est,  on  le  voit,  l'un  des  moins  étudiés.  C'est  un 
curieux  épisode  de  l'évolution  administrative  qui  transforma  au  vir  siècle 
l'Empire  byzantin,  l'histoire  de  la  tentative  faite  pour  helléniser  l'Italie. 
On  y  suit  avec  intérêt  les  efforts  d'une  politique  qui  n'est  ni  sans  habi- 
leté, ni  sans  quelque  grandeur. 

ff Bâtie  au  ix'  siècle  en  l'honneur  d'un  saint  byzantin  et  au  lieu  même 
où  il  avait  son  ermitage,  l'église  de  Sainl-Luc-le-Jeune  est,  au  jugemenl 


—  8/1  — 

(lu  voyageur  Wheler,  ia  plus  belle  qui  soit  dans  la  Grèce  actuelle. 
M.  Diehl  en  examine  avec  compétence  et  en  détail  la  disposition  archi- 
tectonique,  la  décoration  de  marbre  multicolore  et  le  pavement.  Ses  mo- 
saïques, presque  inconnues,  forment  un  ensemble  considérable,  cou- 
vrant le  second  narlhex  et  toute  l'église.  Leur  importance  est  grande 
pour  l'histoire  de  l'ai-t  byzantin.  L'auteur  les  rapproche  ingénieusement 
des  miniatures  du  ménolog-e  de  Basile,  avec  lesquelles  elles  ont  une 
parenté  étroite.  Etudiées  par  M.  Diehl,  elles  montrent  comment  se  sont 
établies  les  traditions  artistiques  dont  le  Gnide  de  la  peinture  offre,  pour 
ainsi  dire,  la  codification  achevée." 

M.  DE  BoisLisLE  présente  Le  Père  Joseph  et  Richelieu,  par  Gustave 
Fagniez  (Paris,  1888,  in-8%  extrait  de  la  Reime  historique). 

rrLe  travail  que  M.  Fagniez  m'a  chargé  de  présenter  à  l'Académie  se 
compose  de  quatre  parties  :  1°  la  jeunesse  du  P.  Joseph  (Fr.  Le  Clerc 
du  Tremblay)  et  son  éducation  jusqu'à  l'entrée  en  religion;  9°  son  rôle 
dans  la  pacification  de  Loudun  (1616);  3°  la  préparation  de  la  rupture 
avec  la  maison  d'Autriche;  à°  la  désignation  du  P.  Joseph  comme  suc- 
cesseur de  Richelieu  et  continuateur  de  sa  politique.  Ces  quatre  parties 
forment  autant  d'articles  séparés  entre  lesquels  l'auteur  n'a  pas  encore 
établi  le  lien  définitif.  Elles  doivent  être  un  jour  refondues  dans  un  en- 
semble où  la  figure  singulièrement  mystérieuse  de  YEminence  grise  se 
détachera  sur  l'histoire  religieuse  et  politique  de  son  temps.  Mais,  tels 
que  sont  ces  premiers  essais,  ils  donnent  une  idée  très  avantageuse  du 
travail  poursuivi  par  M.  Fagniez  pendant  de  longues  années,  et  des 
documents  innombrables,  inédits  pour  la  plupart  et  puisés  à  toutes  les 
sources,  empruntés  aux  archives  et  collections  de  tous  pays,  qui  lui 
donnent  une  base  solide  et  un  rare  caractère  de  nouveauté.  Suivre  à  la 
ibis  la  politique  intérieure  et  la  politique  extérieure  de  deux  hommes 
tels  que  le  cardinal  de  Piichelieu  et  son  dévoué  acolyte,  n'est  pas  une 
petite  tâche.  Il  me  semble  que  M.  Fagniez  a  su  en  débrouiller  les  com- 
plications incessantes,  y  faire  le  jour  et  mettre  en  pleine  lumière  la  part 
de  l'un  et  de  l'autre.  La  dernière  portion  de  son  travail  s'arrête  au  mo- 
ment où,  débarrassé  des  compétiteurs  les  plus  gênants,  par  la  mort  ou 
par  la  disgrâce,  arrivé  à  une  pleine  prépondérance,  introduit  au  Conseil 
des  ministres  d'Etat,  reconnu  même  h  l'étranger  cojnme  le  principal 
directeur  de  la  diplomatie  qui  était  parvenue  h  donner  à  la  France  et  les  al- 
liances et  les  places  fortes  nécessaires  pour  entamer  une  lutte  décisive  contre 
l'Autriche,  Je  P.  Joseph  n'avait  plus  qu'un  échelon  à  gravir,  un  dernier 
degré  à  monter  dans  la   hiérarchie  oflicielle,  un  chapeau  de  cardinal  à 


,1 


—  85  — 

obtenir;  mais  ses  jours  étaient  compt^^s,  et  bientôt  rbéiilioi'  présomptif 
du  cardinal  allait  précéder  celui-ci  dans  la  tombe.  Ce  sont  ces  dernières 
années  que  M.  Fagniez  abordera  sans  doute  avant  que  de  reprendre 
l'ensemble  du  travail  dont  je  viens  d'indiquer  les  lignes  principales." 

M.  Oppert  présente,  de  la  part  du  P.  Slrassmaier,  l'ouvrage  intitulé  : 
Babtjlonmhe  Texte,  V,  Inscltriften  des  Nabuchodonosor,  Kônig  von  Ba- 
byloii,  I  (Leipzig,  1889,  in-8°). 

cr  L'infatigable  éditeur  des  textes  babyloniens  nous  a  de  nouveau  donné 
une  grande  quantité  de  textes  juridiques  très  intéressants,  et  a  acquis  un 
nouveau  titre  à  notre  reconnaissance.  Le  [)remier  fascicule  du  travail 
que  j'ai  l'honneur  de  présenter  à  l'Académie  contient  deux  cent  soixante- 
sept  textes  nouveaux,  (pii  vont  jusqu'à  la  trente-(pialrième  année  du 
roi  qui  a  détruit  Jérusalem.  Le  fascicule  suivant  contiendra  les  neuf  der- 
nières années  du  règne  de  Nabuchodonosor.  Si  les  documents  ne  sont  pas 
aussi  abondants  pour  ce  règne  que  pour  celui  de  INabonid,  qui  régna  six 
ans  après  la  mort  du  célèbre  prince,  il  oflre  pourtant  encore  une  quan- 
tité de  textes  que  malheureusement  tout  monarque  grec  ou  romain  lui 
envierait.  1 

SÉAiNCE  DU   l5    FÉVRIKR. 

Le  Secrétaire  perpétlei-  dépose  sur  le  bureau  le  5i°  fascicule  des 
Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  j)our  l'année  1888 ,  septembre- 
octobre  (Paris,  1888,  in-8°). 

Est  offert  : 

Sept  sceaux  de  plomb  de  princes  et  prélats  latins  de  Palestine  et  de 
Syrie  an  XI II'  siècle,  par  M.  G.  Schlurnberger,  membre  de  l'Académie 
(Paris,  1888,  in -8°,  extrait  de  la  Revue  numismatique ,  3°  trimestre  de 
1888). 

M.  Gaston  Paris  offre  à  l'Académie,  de  la  part  de  l'auteiu-,  iM.  le 
comte  de  Puymaigrc,  Les  vicu,v  auteurs  castillans,  nouvelle  édition, 
1"  série  (Paris,  i888,  in-8°). 

(tM.  le  comte  de  Puy maigre  s'est  depuis  longtenqis  fait  connaiti-e  par 
des  travaux  de  deux  genres  différents,  mais  qui  se  complètent  et  souvent 
se  fondent  dans  ses  écrits.  Les  uns  touchent  à  l'histoire  littéraire  de  l'Es- 
pagne et  du  Portugal ,  les  autres  concernent  h  folli-lorc.  L'un  des  ou- 
vrages les  plus  justement  estimés  de  l'auteur  est  son  livre  sur  X,es  vieux 
auteurs  castillans,  dont  nous  voyons  paraître  avec  un  grand  plaisir  une 
nouvelle  édition.  On  y  trouve  l'instruction  étendue  et  l'exposition  claire  et 
intéressante  qui  distinguaient  la  première  édition,  et  M.  de  Puymaigre 


—  86  — 

a  eu  soin  de  tenir  celle-ci  au  courant  des  travaux  faits  depuis  vingl-cinq 
ans  dans  ce  domaine.  Le  premier  volume,  seul  paru  jusqu'à  pre'sent, 
est  consacré  pour  la  plus  grande  partie  au  Poème  du  Cid.  Les  autres 
chapitres  concernent  les  poèmes  sw  Apollonius  de  Tyr  et  Alea-andre ,  et 
divers  auteurs  de  légendes  pieuses,  entre  autres  Gonzalo  de  Berceo. 
Toutes  ces  études,  où  les  érudits  trouveront  parfois  des  observations 
nouvelles ,  sont  surtout  destinées  au  public  lettré.  Elles  ont  obtenu  le  succès 
qu'elles  méritaient,  comme  l'atteste  la  réimpression  qu'en  fait  l'auteur. 
Nous  souhaitons  que  les  deux  autres  volumes  qui  nous  sont  prorais  ne 
tardent  pas  à  nous  être  donnés,  n 

M.  Senart  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

rrj'ai  l'honneur  d'olFrir  à  l'Académie,  au  nom  de  M.Barth  et  au  mien, 
deux  notices  que  nous  avons  récemment  consacrées  dans  la  Revue  cri- 
tique d'histoire  et  de  littérature  et  dans  le  Journal  asiatique  à  Gustave 
Garrez. 

n-Je  suis  heureux  que  cet  hommage  me  fournisse  l'occasion  de  pro- 
noncer ici  le  nom  d'un  savant  accompli ,  qui  vient  d'être  prématurément 
enlevé  a  nos  études,  sans  avoir  joui  de  la  réputation  dont  il  était  digne. 
Ayant  peu  écrit,  ayant  été  étranger  à  toute  ambition  et  supérieur  à  toute 
vanité,  Garrez  a  trop  vécu  dans  l'ombre.  Cependant  ses  quelques  articles 
avaient  permis  aux  juges  attentifs  de  le  metti'e  à  son  rang.  Par  l'étendue 
et  par  la  solidité  de  son  savoir,  par  la  forte  originalité  de  ses  vues,  il 
doit  incontestablement  être  considéré  comme  l'un  des  premiers  pai-mi 
les  orientalistes  de  cette  génération.  Je  ne  veux  point  répéter  ce  que 
M.  Barth  et  moi  nous  avons  essayé  d'indiquer  avec  quelque  détail.  Notre 
compagnie  ne  pouvant  être  indifférente  aux  œuvres  ni  aux  hommes  qui 
honorent  la  science  française,  j'ai  voulu  seulement  présenter  d'un  mot 
dev.ant  elle  le  tribut  de  juste  admiration  consacré  par  ses  compagnons 
d'études  à  un  homme  vraiment  érainent,  dont  la  mémoire  mérite  si  bien 
d'être  honorée.  » 

SÉANCE  DU    2  9    FEVRIER. 

I^e  Secrétaire  perpétuel  dépose  sur  le  bureau  : 

1°  Le  tome  XXXI 11,  -2"  partie,  des  Mémoires  de  l'Académie,  compre- 
nant le  travail  de  M.  L.  Dehsie  intitulé  :  Mémoire  sur  les  opérations  finan- 
cières des  Templiers  ; 

9°  Le  Cotpus  inscriptionum  semiticarum,  h'  partie,  t.  1,  inscripliones 
himyariticas  cl  sabœas  continens ,  fasc.  1  (Paris,  1889,  in-fol.). 


—  87  — 

Soiil  olVcils : 

lîapport  sur  les  temples  éjnipliens ,  adressé  à  S.  E.  le  Ministre 
(les  Iraruiix  publics,  \n\v  Grand  Boy  (^le  (laire,  1888,  1  vol.  in-/»",  avec 
i5  planches); 

l'iat  celtibc'rien  en  terre  cuite  découvert  à  Ségovie,  par  Aloïs  Heiss 
(Paris,  1888,  in-^°,  extrail  de  la  Gazette  archcoloijiqne); 

Per  la  edizinnc  nirJotude  délie  opère  di  Galileo  Galilei  sollo  ffli  au- 
spicii  di  S.  M.  il  lie  d'Ilulia.  Indice  alj'abetico  et  topoirrajico  del  cvniinercio 
epistolare,  par  AnI.  Favaro  (Florence,  1889,  in-8°); 

Naukratis,  a"  partie,  par  Ern.-A.  Gardner  (Londres,  1888,  in-/i°, 
formant  le  Sixth  memoir  of  tlie  Egijpt  exploration  fund). 

M.  Dei-ochk  a  la  parole  pour  une  présentation  : 

frj'ai  l'honneur  d(>  faire  hoinmag-e  à  lAcath-mie,  an  nom  de  fauteur, 
d'une  brochure  inlituie'e  :  l/iniagc  de  la  France  sous  les  derniers  Valois 
{j5-j5-i58fj)  et  sous  les  premiers  Bourbons  (loSg-iSSs),  par  M.  Lu- 
dovic Drapeyron,  directeur  de  la  Revue  de  géographie  (Paris,  1889, 
in-8°,  extrait  de  la  Revue  de  géographie). 

ffj'ai  eu  déjà  l'occasion  de  présenter  à  l'Académie  des  publications  du 
même  auteur,  (pii  avaient  pour  objet,  soit  l'institution  d'une  faculté 
spéciale  pour  f enseignement  de  la  géographie,  soit  la  réforme  de  cet 
enseignement  dans  notre  Université.  La  nouvelle  brocbure  de  M.  Drapey- 
ron a  un  caractère  scientifique  :  il  y  a  fait  I  histoire  des  premiers  essais 
de  cartographie  pratiqués  en  France,  pour  reproduire  aux  yeux  l'image 
de  notre  pays,  sous  François  1"  et  ses  successeurs,  les  derniers  des 
Valois. 

r  C'est  sous  le  règne  du  vainqueur  de  Marignan,  du  vaincu  de  Pavie, 
qu'apparaît  le  premier  cartographe  français  s'occupant  de  la  France  : 
Oronce  Fine,  éminent  mathématicien  dauphinois,  professeur  au  Collège 
royal  de  France.  A  Oronce  Fine  succéda  J.  .lolivet,  de  Bourges,  l'auteur 
de  la  Description  du  très  puissant  royaume  de  France.  M.  Drapeyron  fait 
ressortir  l'ignorance  du  littoral  maritime,  qui  est  un  des  traits  distinctifs 
(le  ces  [)remiers  travaux  de  cartographie,  où  les  côtes  bretonnes  et  nor- 
mandes sont  si  inq)arfaitemeat  dessinées.  En  1670,  Guillaume  Postel, 
le  célèbre  voyageur  érudit,  combla  cette  lacune,  par  sa  Vraie  et 
entière  description  du  iwjanme  de  France,  que  Mercator  mit  à  profit 
dans  son  atlas,  publié  en  1080.  Viurent  à  sa  suite  Nicolas  de  Nicolaï 
et  de  nombreux  géographes  et  cartographes  provinciaux,  dont  les  noms 
sont  aujourd'hui  pour  la  plupart  inconnus.  Nous  touchons  à  l'époque 
où  parurent,  avec  les  nouveaux  systèmes  de  piojeclion  dont  Ihisloire  a 


—  88  — 

été  si  soigneusement  et  si  savamment  faite  pax*  notre  regrette  confrère 
et  mon  excellent  ami  d'Avezac,  les  beaux  travaux  des  Orlelius,  des  Mer- 
cator  et  des  Hondius, 

«C'est  en  lôgi  que  fut  édité  le  premier  atlas  national,  sous  le  titre  de 
Théâtre  français ,  où  sont  comprises  les  cartes  générales  et  particulières  delà 
France,  dédié  à  Henri  IV.  Mais  cest  avec  Nicolas  Sanson,  devenu  con- 
seiller d'Etat,  que  naît  la  cartographie  vraiment  scientifique.  11  publia 
sous  le  ministère  du  cardinal  de  Richelieu  une  carte  de  France  en  plu- 
sieurs feuilles,  puis  une  carte  fluviale  et  postale  (1632-16^2). 

(fOuelques  années  plus  tard  (1672),  Cassini,  Picard  et  Lahire  cor- 
rigeaient la  carte  de  Sanson.  Enfin,  les  feuilles  de  Cassini  et,  de  notre 
temps,  la  carte  de  l'Etat-major  nous  donnaient  une  image  vraie  de  notre 
territoire. 

fr Telles  sont,  en  résumé,  les  notions  principales  que  le  nouvel  opus- 
cule de  M.  Drapeyron  nous  fournit  sur  l'histoire  de  la  cartographie 
française.  On  y  retrouve  à  la  fois  cet  amour  de  la  science  géographique 
et  cet  ardent  patriotisme  dont  témoignent  toutes  les  productions  du 
savant  et  infatigable  directeur  de  la  Revue  de  géographie ,  du  zélé  secré- 
taire général  de  la  Société  de  topographie  de  France,  n 

M.  Bréal  présente,  de  la  part  de  l'auteur,  une  Lettre  au  directeur  du 
Muséon,  par  J.  Imbert  (1888,  in-8°). 

rfUn  jeune  employé  de  notre  administration  des  finances,  M.  J.  Ira- 
bert,  receveur  de  l'enregistrement  à  Tence  (Haute-Loire),  consacre  ses 
loisirs  à  l'étude  des  antiquités  et  des  inscriptions  lyciennes.  Il  a  déjà 
])ublié  sur  ce  sujet  des  travaux  qui  ont  attiré  l'attention  des  savants 
étrangers  adonnés  aux  mêmes  études.  Je  présente  aujourd'hui  à  l'Aca- 
démie un  court  article  extrait  du  Muséon,  où.  M.  Imbert  propose  des 
lectures  nouvelles  pour  l'inscription  de  Xanthus. 

ff  L'Académie  accueillera  avec  intérêt  cette  preuve  de  savoir  el  de  cu- 
riosité scientifique,  qui  nous  vient  d'un  jeune  homme  dont  l'éducation 
s'est  faite  toute  seule,  et  dont  les  travaux  méritent  nos  encourage- 
ments, r. 

M.  Siméon  Luce  offre  à  l'Académie,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Ernest 
Prarond ,  une  publication  intitulée  :  Valerandi  Varanii  De  gestis  Joantiœ 
Virginis  Francœ  egregiœ  bellatricis  (Paris,  1889,  in-8''). 

ffCe  volume,  dit  notre  confrère,  contient  la  réimpression  d'un  poème 
latin  sur  Jeanne  d'Arc,  dont  deux  éditions  furent  publiées  à  Paris  au  com- 
mencement du  xvi"  siècle,  la  première  en  i5i6,  la  seconde  en  1621.  Ce 
poème,  oîi  l'on  trouve  une  brève  histoire  de  la  Pucelle ,  depuis  sa  naissance 


—  89  — 

en  \fi\-?.  j«S(jua  sa  r»'l»aljilitalion  on  i/i56,  est  divisé  en  qnaliv  cliaiils 
et  comprend  plus  dp  trois  mille  vers  hexanK^lres.  f/anlour,  (pii  sest  fait 
connaître  par  un  autre  poème  consacre  h  la  prise  de  Gènes  en  i  ^107,  De 
expuipiatione  Genuemi ,  est  appelé  en  latin,  tantôt  Valernndus  Vavn- 
uius,  tantôt  Vnlerondus  ou  Valnroitdus  de  Vamnis.  Il  y  a  donc  lieu  de 
supposer  (ju'en  iranrais  son  nom  devait  être  quelque  chose  comme  \  ale- 
rand  Desvaiannes  ou  plutôt  Desvarennes.  Le  nom  de  baptême  Valerand 
indique  que  ce  laborieux  versificateur,  dont  la  vie  a  échappé  justju'à 
présent  à  toutes  les  recherches,  devait  être  originaire  de  ta  France  du 
Nord.  I/auleur  du  De  gestis  Joantup  Virginis  nous  dit.  en  eiïel,  dans  le 
titre  même  du  premier  chant  de  son  poème,  rrValerandi  V'aranii  Ahha- 
frvj7/et  liber  primus".  qu'il  t'iait  Abbeviilois  de  naissance.  M.  Ernest  Pra- 
rond,  natif  d'Abbeville  comme  Valerand,  a  jugé  que  l'œuvre  de  son 
compatriote  n'était  pas  indigne  d'une  réimpression  et,  dans  une  préface 
inspirée  par  le  plus  noble  et  le  plus  touchant  patriotisme,  il  a  dédié 
cette  réimpression  à  la  ville  d'Abbeville.  Il  y  exprime  celte  idée  profon- 
dément juste  qu'il  y  a,  pour  les  cités  comme  pour  les  familles,  une 
noblesse  morale  (ransmissible  de  génération  en  génération  et  que  c'est  un 
devoir  de  rappeler,  d'entretenir  pieusement  toutes  les  manifestations,  tous 
les  monuments  de  cette  noblesse  héréditaire.  Comme  il  revendique  au  pre- 
mier chef  la  tradition  de  patriotisme  dont  je  parle  pour  sa  ville  natale,  il 
lui  a  semblé  particulièrement  inféi-essant  de  monirer  que  Jeanne  d'Arc 
avait  été  célébrée  au  xvi'  siècle  par  un  enfant  de  cette  même  ville,  qui 
a  vu  de  nos  jours  naître  et  si  stoïquement  mourir  poiu"  son  pays  l'amiral 
Courbet. 

ff D'ailleurs,  l'œuvre  de  Valerand  ne  se  recommande  pas  seulement 
par  le  sentiment  de  reconnaissance  et  d'admiration  patriotiques  qui  l'a 
dictée;  elleofl're.  en  outre,  une  véritable  valeur,  moins  poétique,  il  est 
vrai,  qu'historique.  L'originalité  de  \alerand  est  d'avoir  puisé  les  élé- 
ments de  sa  narration  dans  les  deux  procès  de  condamnation  et  de  réha- 
bilitation, c'est-k-dire  à  la  source  la  plus  authentique.  Un  manuscrit  de 
ces  deux  procès  était  alors  conservé  dans  la  bibliotlièque  de  Saint-Victor 
de  Pitris,  et  l'abbé  prêta  ce  manuscrit  au  versificateur  abbeviilois. 
comme  celui-ci  nous  en  prt'vient  dans  une  dédicace  placée  en  tête  de 
son  poème  et  adressée  à  Georges  d'Amboise,  archevêque  de  Rouen  :  rSi 
frquempiam  delectet  plenius  historiam  nosse,  ex  cœnobio  Sancti  \ictoris 
ffParisiensis  librum  répétât  quem  aliquot  dies  mulualus  sum,  ubi 
frabunde  et  ex  fori  judiciarii  ordine  omnia  quœ  transcripsi  digerunlur. 'i 
Cette  pureté  de  la  source  mise  à  profit  par  Valerand  explique  l'exactitude 


—  90  — 

de  ))eancoiip  de  détails  dont  son  poème  est  semé.  Aucini  des  historiens 
anciens  on  récents  de  la  Pucelle  n'a,  par  exemple,  mieux  marqué  la 
situation  de  la  chaumière  où  la  vierge  de  Domremy  vit  le  jour  : 

.  .  .  Parentes 
Vivunt  Barricei  fluviali  in  limite  campi. 
rf  Mes  parents  vivent  sur  le  bord  d'un  ruisseau  situé  près  des  confins  du 
ff  pays  de  Barrois.  -n 

rrM.  Ernest  Prarond  a  donc  fait  une  œuvre  utile  en  réimprimant  le 
De  gestis  Joannœ  Virginis ,  quoique  toute  la  substance  vraiment  histo- 
rique contenue  dans  ce  poème  dérive,  comme  l'avait  très  bien  vu  notre 
regretté  maître  Jules  Quicherat,  des  deux  procès  de  condamnation  et  de 
réhabilition.  Il  y  a  lieu  de  regretter  seulement,  d'une  part,  qu'il  n'ait 
pas  collalionné  le  texte  sur  le  manuscrit  lô/iS  de  la  bibliothèque  Sainte- 
Geneviève;  d'autre  part,  qu'il  n'ait  point  pris  soin  de  numéroter  les  vers 
du  De  gestis,  précaution  qu'il  faut  toujours  prendre,  pour  la  commodité 
des  renvois,  lorsqu'on  publie  un  texte  en  vers." 

Ont  encore  été  offerts  : 

Ahhandlungen  der  philosophisch-pliilologisclien  Classe  der  Kônlglich  Baye- 
rischen  Akademie  der  Wissenschaften,\^\\\,  i"  partie  (Munich,  1888, 
in-6°); 

The  American  journal  of  philology,  publié  par  B.-L.  Gildersleeve, 
vol.  IX,  n°'  2  et  3  (3/»,  35)  [Baltimore,  1888,  ia-8°]; 

Annales  du  commerce  extérieur,  année  1889,  1"  fascicule  (Paris, 
i889,in-8°); 

Annales  du  musée  Guimet.  Reine  de  l'histoire  des  religions,  publiée 
sous  la  direction  de  M.  Jean  Béville,  9'  année,  t.  XVIII,  n"  9  (Paris, 
1888,  in-8^); 

Atti  délia  Reale  Accademia  dei  Lincei,  285'  année,  k'  série,  Rendi- 
conti,  vol.  IV,  fasc.  6-9  (Bome,  1888.  in-i"); 

Bihlioteca  naùonale  centrale  di  Firenze.  Bollettino  délie  pubblicazioni 
italiane  ricevule  per  diritlo  di  stampa ,  n"'  72-75  (Florence,  1888-1889, 
in-8°); 

Bibtioteca  nationale  centrale  Vitlorio  Emanuele  di  Roma.  Bollettino  délie 
opère  moderne  straniere  acquistale  dalle  hiblioteche  pubbliche  governative  del 
regno  d'Italia,  vol.  III,  n"  5  (Rome,  1888,  in-8'); 

Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes,  XLIX,  h'  et  5°  livraisons  (Paris, 
1888,  in-8"); 

Bulletin  de  la  Société  nationale  des  antiquaires  de  France ,  1887  (Paris, 
in-8"); 


—  91    — 

(jonipte  rendu  sommaire  des  séances  de  la  Snciclr  phHomulht'iur  de  Pans  , 
ir  i  (Paris,  i88(),  in-8"); 

Histoire  de  l'art  dans  l'niititjuil'' ,  |»ai-  MM.  (icMr{[f>s  l'cirol  ,  iiumiiIiip  de 
I  liistiliit,  fl  Charles  Cliipioz,  lome  V,  livraisons  -ja.'j-j-jô  (Taris,  1889, 

Histoire  des  (irccs,  depuis  les  k'mps  les  plus  reculés  jusqu'à  la  réduction 
de  la  Grèce  en  province  romaine,  par  M.  Vicloi"  Diiruy,  iiu^mhn"  dfi 
lliisliliil;  nniivollc  f'dilion,  revue,  rlc.  lomo  III,  livraisons  i.'îy-i'i'i 
(Paris,  1888,  jyr.  in-8'); 

Journal  asiatique,  8°  série,  Itmie  \II.  n'  3;  lomo  \lli,n°  1  (Paris, 
1888-1889,  in-8"); 

Mémoires  de  l'Ac(ulvmic  des  sciences,  inscriptions  ci  bellcs-leltres  de 
Toulouse,  8°  se'rie,  tome  \  (Toulouse,  1888,  iii-8"): 

Mémoires  de  la  Société  naliwialc  des  antiquaires  de  France,  1887 
(Paris,  iii-8''); 

Ministère  délia  pubblica  istruzionc.  ludici  e  calalogki.  IV.  /  codici  pala- 
tini  délia  R.  Bihiioteca  nationale  centrale  di  Firenze,  vol.  I,  fasc.  8  (Rome, 
1888,  in-8"); 

Miltcilun^rcn  des  akademisch-orientalistisclien  Vcreins  zu  licrliu ,  n"  3 
(Berlin,  1889,  iii-8°); 

Proccedinjjs  of  the  Socicti/  of  liihlical  archœologij,\i)\.  \l ,  -i'  et  .')'  par- 
ties (Londres,  1888,  in-8"); 

Revista  archcologica ,  estudos  c  notas,  recueil  publié  sous  la  direction 
de  M.  A.-C.  Borges  de  Figneircdo,  vol.  III,  n"'  1,  •>,  (Lisbonne,  1889, 
in-8"); 

Rerue  archéologique,  publiée  sous  la  direction  de  MM.  Vlex.  Bertrand 
*'{  G.  Perrol,  membres  de  Tlnslitut,  3"  série,  t.  \II  (Paris,  1888, 
in-8°): 

Revue  de  l'Afrique  française  (directeur,  J.  Poinssot;  secrétaire  de  la 
rédaction,  Aug.  Geoffroy),  7*  année,  n"  55  (Paris,  1888,  in-8°); 

Revue  des  questions  historiques,  a3'  année,  89"  livraison  (Paris,  1889. 
in-8''); 

Revue  épigrapliique  du  midi  de  la  France,  dirigée  par  A.  Vilnier,  n'  ôi 
(Vienne  [Isère],  1888,  in-8"); 

Revue  géographique  internationale  (directeur-gérant,  Georges  Benaud), 
i3'  année,  n"'  iSy,  i58  (Paris,  1888,  in-6"); 

RcA'uc  numismatique ,  dirigée  par  MM.  Anatole  de  Barlliélemv,  Gustave 
Srldinnbergei",  niernbies  de  rinstitul.  et  Lrn<'>^l  l'alx-jon  3"  >;éri<'.  (.  VI, 
'r  Iriinrsdv  .1.-  |,S88  (Paris,  188S.  iu-8"); 


—  92  — 

SitzMigsberichte  der  philosopliiscli-plii/ologhcheu  und  historischeii  Classe 
der  A.  B.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Mûnclien,  1888  (Munich, 
in-8°);    ^ 

Société  des  mùquaires  de  la  Morinie.  Bulletin  historique,  87"  année, 
nouvelle  série,  xliS"  livraison  (Sainl-Omer,  1888,  in-8°); 

Viestnilc  hrvatskoga  arkeologiclwga  druztva ,  1 1'  année,  11°  1  (Agram, 
1889.  in-8°). 


COMPTAS    KKNDUS   DES  SKANCKS 

DE 

L'ACADÉMIE    FJES    INSGRlPTlOiNS 

ET  lîELLKS-LKTTRES 
PEISDAIST   L'Ai\]\ÉE   1889. 


COMPTES  RENDUS  DES  SEANCES. 
MARS-AVRIL. 


PRESIDENCE  DE  M.  BARBIER  DE  MEYNARD. 


SEANCE  DU    l*'   MARS. 


L'Académie  se  l'orme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  l'ordre  du  jour  appelle 
l'élection  d'un  membre  ordinaire  en  remplacement  de  M.  le  comte 
Riant,  décédé. 

Le  Président  lit  les  articles  du  règlement  qui  concernent  cette 
opération.  11  rappelle  que  les  candidats  sont  MM.  (>lermont- 
Ganneau,  Courajod  et  de  Lasteyrie. 

Il  y  a  3/i  membres  inscrits  et  35  bulletins. 

Le  Président  procède  à  l'appel  nominal  pour  s'assurer  si  un 
membre  présent  n'a  pas  oublié  de  se  faire  inscrire.  C'est,  en  effet, 
ce  qui  avait  eu  lieu,  et,  cette  inscription  faite  séance  tenante,  le 
scrutin  est  déclaré  bon. 

Sur  ces  entrefaites,  un  autre  membre  étant  survenu,  la  ques- 
tion se  pose  s'il  sera  admis  à  voter. 

L'Académie  décide  que  le  scrutin  ayant  été  déclaré  clos,  il  ne 
peut  être  admis  à  déposer  son  bulletin. 

On  dépouille  ensuite  le  scrutin.  La  majorité  requise  est  i8. 


xvrr 


l>tril1llRtX     liTIdXAtl. 


—  9/1  — 

M.  Clermont-Gaimeau  obtient  1 6  suffrages;  M. de  Lasteyiie,  i li ; 
M.  Courajod,  5. 

Aucun  candidat  n'ayant  obtenu  la  majorité  absolue  des  suf- 
frages, il  est  procédé  à  un  second  tour  de  scrutin. 

Il  y  a  36  votants;  majorité  19. 

M.  Clermont-Ganneau  obtient  3i  suffrages;  M,  de  Lasteyrie,  U; 
M.  Courajod,  1. 

En  conséquence,  M.  Clermont-Ganneau  est  proclamé  élu.  Son 
élection  sera  soumise  à  l'approbation  de  M.  le  Président  de  la 
République. 

M.  Tabbé  Ddchesne  lit  une  note  dans  laquelle  il  s'attache  à 
établir  que  le  concile  de  Reims,  du  temps  de  l'évêque  Sonnatius 
(vers  626),  imprimé  dans  les  collections  de  conciles  sur  l'autorité 
de  Flodoard,  est  identique  au  concile  de  Clichy,  tenu  à  la  même 
époque  et  dont  le  texte  n'est  connu  que  depuis  1757.  Les  canons 
se  suivent  dans  le  même  ordre,  le  texte  est  absolument  le  même, 
sauf  que  Flodoard  a  supprimé  le  préambule  avec  le  premier 
canon,  et  transporté  au  commencement  la  liste  des  membres  du 
concile.  Celle-ci  est  identique  aussi  dans  les  deux  textes,  à  part 
quelques  légères  variantes,  qui  s'expliquent  non  moins  aisément 
que  celles  des  canons  eux-mêmes.  Du  reste,  Flodoard  ne  dit  pas 
que  le  concile  dont  il  parle  se  soit  tenu  à  Reims.  Ce  sont  les 
éditeurs  des  conciles  qui  ont  introduit  mal  à  propos  cette  déter- 
mination de  lieu. 

M.  Philippe  Berger  fait  une  lecture  sur  les  monnaies  des  rois 
de  Numidie. 

Il  y  a  quelque  temps,  M.Ph.  Berger  avait  communiqué  à  l'Aca- 
démie une  inscription  dans  laquelle  il  croyait  avoir  retrouvé  le 
nom  de  Micipsa.  Celte  lecture  l'a  amené  à  reprendre  les  monnaies 
des  rois  numides,  et  il  y  a  retrouvé,  écrits  en  abrégé,  non  seule- 
ment le  nom  de  Micipsa,  mais  aussi  les  noms  de  Gulussa,. 
d'Adherbal  et  d'Hiempsal.  Il  a  pu  ainsi  rectifier  les  attributions 
de  toute  une  séiie  de  monnaies  autonomes  de  la  Numidie. 

Une  des  conséquences  de  cette  découverte  est  de  nous  montrer 
comment  les  Phéniciens  procédaient  dans  leurs  abréviations, 
l'jlle  nous  prouve  qu'ils  aimaient  à  les  formel-  de  la  première  et 


—  !):)  — 


(Jo  la  (Jcniitîn;  lettre  (run  mol  ou  ujème  criinc  légende.  Jusqu'à 
préseiil  on  se  reliisait  à  admellre  que  cet  usage  cûl  élé  pratiqué 
par  les  anciens  peuples  s('niiliqucs.  Ainsi  se  trouve  ouverte  une 
nouvelle  voie  à  la  leclun;  des  légendes  monétaires,  et  peut-être 
même  de  certaines  inscriptions. 


SÉANC.K  DU  8   MARS. 

M.  d'Aubois  de  JiBAi.NviLLK  comiuuniquc  une  note  intitulée  : 
Pourquoi  Propcrce  a-t-il  dit  que  le  chef  gaulois  Vinlumaros  se  vantail 
(ravoir  le  lihin  pour  ancêtre  ^'^  ? 

Suivant  Properce,  le  chef  gaulois  Virdumaros,  tué  en  222  par 
le  consul  Glaudius  ^larcellus,  se  vantait  de  compter  le  lUiin  parmi 
ses  ancêtres  : 

Genus  hic  Rheno  jactabat  ab  ipso. 

Cela  veut  dire  que  son  père  s'appelait  Reno-genos.  Les  Gau- 
lois avaient  des  noms  d'homme  composés,  dont  le  premier  terme 
était  un  nom  de  divinité  et  dont  le  second  terme  était  genos, 
crfils  dev;  exemples,  Totati-gcnos,  «fds  de  Totatis  ou  Tentâtes», 
Camulo-genos,  cffils  de  Camulos'^.  Tentâtes  et  Camulos  ont  été 
assimilés  à  Mars  par  les  Romains.  Comparez  les  noms  grecs 
Diogène,  «fils  de  Zens  ou  Jupiter»,  Hermogène,  «fds  d'Hermès 
ou  Mercure».  Le  Rhin  était  un  dieu  pour  les  Celtes,  de  là  le 
nom  de  Reno-genos;  comparez  Eni-genos,  fffils  de  l'Euus  ou 
yEnus»,  aujourd'hui  l'Inn. 

M.  Oppert  donne  de  nouveaux  détails  sur  la  métrologie  chal- 
déenne,  en  ce  qui  concerne  l'arpentage  des  terrains  ('-^. 

Notre  confrère  a  précédemment  soutenu  ce  principe  que  les 
Bahyloniens  désignaient  toute  aire  par  une  ligne,  mesurée  en 
toises,  cannes,  aunes  et  pouces,  qui  formait  la  hase  d'un  rec- 
tangle, dont  la  hauteur  était  constante,  à  savoir,  une  canne.  La 
toise  avait  deux  cannes,  comprenant  chacune  sept  aunes  de  vingt- 
quatre  pouces;  l'aune,  de  deux  pieds  de  douze  pouces  chacun, 

'"   Voir  aux  (Communications,  n"  IX  (p.   «  i  i-i  l 'i  )■ 
'')   Voir  aux  Commusiications,  n"  X  (  p.  1  iT)-!  17). 


—  96  — 

a  persisté  chez  nous  jusqu'à  la  Révolulion.  Cette  dérogation,  par 
Tintroduction  du  chiffre  sept,  au  système  sexagésimal,  a  été 
contestée  par  M.  Aurès,  de  Nîmes.  M.  Oppert  apporte  main- 
tenant un  texte  précis  datant  de  Van  /iqS  avant  notre  ère, 
qui  prouve,  dit-il,  la  justesse  de  sa  théorie.  Cet  acte  de  vente, 
daté  de  Sippara,  rend  compte  de  deux  terrains,  dont  l'un  mesure 
2  3  cannes  k  aunes,  l'autre  3  aunes  5  7  pouces,  et  le  total  est 
évalué  à  ai  cannes  5  ~  pouces.  Donc,  la  canne  comprenait 
7  aunes.  Le  premier  terrain  a  35  aunes  de  long  sur  33  de 
large,  donc  1,1 55  aunes  carrées.  Or  ce  chiffre  de  1,1 55  s'obtient 
précisément  par  l'application  du  nombre  7  :  23  cannes  carrées 
l'ont  1,1  27  aunes  carrées,  et  le  rectangle  de  U  aunes  sur  7  donne 
28  aunes  carrées;  1,127  et  28  donnent  i,i5^.  L'évaluation  du 
second  champ  donne  un  résultat  analogue  et  confirme  les  théo- 
ries de  M.  Oppert. 

M.  Ravaisson  commence  la  seconde  lecture  de  son  mémoire 
intitulé  :  Nouvelles  considérations  sur  les  monuments  funéraires  des 
Grecs. 

M.  Théodore  Reinach  fait  une  communication  sur  Les  monnaies 
arsacides  et  l'origine  du  calendrier  juif. 

Les  monnaies  frappées  par  les  rois  parthes  à  l'usage  de  leurs 
sujets  grecs  de  Mésopotamie  portent  l'indication,  non  seulement 
de  l'année,  mais  encore  du  mois  où  elles  ont  été  frappées.  On 
peut,  d'après  cela,  déterminer  la  nature  du  calendrier  usité  dans 
ces  pays  :  c'était  un  calendrier  luni-solaire.  fondé  sur  le  cycle  de 
Méton  ou  cycle  de  19  ans;  7  années  sur  1  y  avaient  i3  mois  au 
lieu  de  12,  et  l'on  connaît  les  rangs  qu'occupaient  dans  le  cycle  3 
de  ces  7  années  :  6,  i4,  17.  Le  calendrier  ainsi  réglé  est  iden- 
tique au  calendrier  religieux  des  juifs,  dont  la  confection  n'est 
pas  antérieure  au  iv"  siècle  après  l'ère  chrétienne.  M.  Reinach 
montre  que  très  probablement  c'est  en  effet  de  Rabylonie  que 
vient  le  calendrier  juif  :  les  docteurs  des  académies  rabbiniques 
de  Babylonie  l'ont  emprunté  à  leurs  voisins  grecs  et  le  sanhédrin 
de  Palestine  ne  lui  a  donné  que  la  consécration  légale. 


—  \)1  — 

SÉANCE  DU    1  5    MARS. 

Le  Secrktaire  perpétuel  donne  lochiro  (Tnn  déorcl,  on  date 
du  7  mars  1889,  par  Iccjiud  le  Pn-sidcnl  de  la  Ue'[)ul)lique  a 
jij)prouve'  rélection  de  M.  (-lennonl-Ganneau  comme  membre 
ordinaire. 

Le  Secrétaire  perpétuel  introduit  M.  Cicrmont-Ganncau  et  le 
pre'sente  à  la  (Compagnie. 

Le  Président  invite  1\L  Ciermont-Gannoau  à  prendre  place 
parmi  ses  confrères. 

Le  Secrétaire  perpétuel  donne  connaissance  à  TAcadémie  de 
la  mort  de  M.  le  commandeur  Angelo  Genocchi,  pre'sident  de 
rAcadémie  royale  des  sciences  de  Turin. 

L'Académie  désigne  M.  Hauréau  pour  donner  lecture,  à  la 
prochaine  séance  trimestrielle  des  cinq  classes  de  ITnstitut,  de  sa 
notice  sur  le  Liber  de  copia  verborum. 

M,  Ravaisson  continue  la  seconde  lecture  de  ses  Nouvelles  con- 
sidérations sur  les  monuments  faner  aires  des  Grecs. 

M.  d'Arbois  de  Jubainville  lit  une  note  intitulée  :  De  la  compo- 
sition pour  crimes  et  délits  chez  les  Celtes  et  du  sens  du  mot  praemia 
dans  César. 

Suivant  M.  d'Arbois  de  Jubainville,  quand  César  {De  bello  Gal- 
lico,  VI,  xiii)dit  que  les  druides,  prononçant  comme  juges,  éta- 
blissent des  prœmia  et  des  peines,  par  le  mol  prœmia  il  a  voulu 
exprimer  l'idée  de  la  composition  pour  crimes  et  délits.  La  com- 
position pour  meurtre  devait  être  usitée  en  Gaule  :  l'insolvable 
qui,  faute  de  payement,  aurait  été  mis  à  mort,  échappait  à  cette 
peine  par  l'exil.  Nicolas  de  Damas  nous  l'apprend. 


SEANCE  DU    22    MARS. 


M.  Geffrov,  directeur  de  l'École  française  de  Rome,  adresse 
au  Président  une  lettre  relative  : 

1°  Aux  louilles  du  P.  Germano  sous  la  basilique  des  Saints 
Jean  et  Paul,  au  (lélius; 


—  98  — 

2°  Aux  rouilles  du  forum  d'Auguslc,  comnicncéos  depuis  le 
9  janvier  dernier,  sous  la  direction  de  M.  R.  Lanciani; 

3°  A  la  création,  à  Rome,  d'un  Musée  national  destiné  à  rece- 
voir les  objets  d'antiquité  découverts  dans  la  province  de  Rome, 
et,  jusqu'à  nouvel  ordre,  ceux  de  la  province  d'Ombrie; 

[i°  Aux  fouilles  d'Ostie,  dirigées,  comme  celles  du  forum  d'Au- 
guste, par  M.  R.  Lanciani; 

5°  Aux  fouilles  pratiquées  dans  la  nécropole  étrusque  de  Vulci , 
appartenant  au  prince  Torlonia  ^'l 

M.  Edmond  Le  Rlant  donne  des  détails  sur  les  travaux  de 
l'Académie  d'archéologie  chrétienne  à  Rome. 

rrM.  Horace  Marucchi,  secrétaire  de  l'Académie  d'archéologie 
chrétienne  présidée  par  M.  deRossi,  m'a  communiqué,  dit  notre 
confrère,  quelques  notes  sur  les  séances  de  janvier  et  de  février. 

ff L'Académie  des  inscriptions  y  verra  avec  intérêt  le  nom  d'un 
jeune  prêtre  français,  M.  l'abbé  Ratiffol,  et  la  mention  de  son 
étude  sur  un  manuscrit  grec  du  Vatican  contenant  la  vie  de  saint 
Macaire  le  Romain.  La  légende  de  ce  saint  est  une  sorte  de  roman 
important  pour  l'histoire  littéraire  chrétienne.  La  façon  dont  il  y 
est  parlé  des  Sarrasins  et  des  Perses  indique  une  compilation 
antérieure  aux  conquêtes  des  Arabes ,  et  de  toute  façon  au  x*  siècle. 
On  y  trouve  une  véritable  Pcregrinatio  ad  sancta  loca,  qui  peut  se 
placer  à  côté  des  itinéraires  de  la  Palestine.  Trois  moines,  qui 
vont  chercher  saint  Macaire  dans  sa  retraite,  partent  d'un  cou- 
vent situé  près  de  l'Euphrate,  celui  d'Asclépios,  que  nomme  Théo- 
doret.  Ils  se  dirigent  vers  Jérusalem,  où  ils  arrivent  en  huit  jours. 
Là  ils  visitent  l'église  du  Saint-Sépulcre  et  y  vénèrent  la  vraie 
croix,  qui  était  conservée  à  gauche  de  l'entrée  de  la  basilique. De 
Jérusalem,  ils  vont  à  Bethléem  et  prient  dans  la  grotte  de  la 
Nativité.  A  deux  milles  environ  de  Bethléem,  ils  voient,  dit  le 
texte  :  tf  l'étoile  du  Christ  et  le  puits tî.  M.  l'abbé  Batiffol,  se  réfé- 
rant à  d'autres  itinéraires,  a  démontré  que  ce  puits  était  celui  dans 
lequel,  d'après  une  antique  légende,  était  tombée  l'étoile  des 
Mages. 

C  Voir  aux  Communications,  n°  XI  (p.  1 17-1  ai). 


—  U«J  — 

ffDc  liclliléeni,  les  pèlerins  reviennent  à  Jérusalem,  passant 
par  le  nionl  des  Oliviers  rroij  le  Christ  monta  au  cieU;  puis  ils 
parlent  pour  la  Mésopotamie,  passent  le  Tij;ie  et  viennent  à 
Ctési|>lion,  où  ils  vénèrent  les  corps  des  Irois  jeunes  Hébreux 
Anauie,  Azarie  et  Misael. 

ff  Là  finit  la  partie  réelle  de  leur  voyage,  qui  se  termine  par  une 
description  de  pays  fantastiques. 

crM.  le  docteur  Ficker  a  présenté  une  série  iniporlanle  de  {ilio- 
lo{jraphies  prises  par  lui  d'après  les  sarcopha{[Cs  chrétiens  de 
rEspaijne.  Il  sijjnale  sept  monuments  inédits,  à  Ampurias,  à 
Gerona,  au  musée  de  Tarragone,  à  Madrid  e(  à  Ecija.  Ces  sarco- 
plia(fes  reproduisent,  avec  un  style  [)articulier,  les  sujets  courants 
sur  ceux  de  Rome  et  de  la  Gaule.  Les  nombreuses  sculptures 
cliri'liennes  ([ue  possède  l'Espagne  montrent,  a  fait  obsei-ver 
M.  de  Hossi,  que  le  décret  du  concile  d'Elvire  contre  les  images 
n'emportait  pas  une  prohibition  absolue,  mais  seulement  une 
défense  locale  et  occasionnelle. 

ffLes  fouilles  dirigées  par  l'illustre  anti(|uaire  dans  la  cala- 
combe  de  Priscille  se  poursuivent;  la  relation  très  succincte  que 
j'en  ai  reçue  mentionne  la  découverte  d'un  très  bel  escalier  de 
marbre,  conduisant  à  un  hypogée  dont  les  parois  sont  couvertes 
de  signatures  des  anciens  visiteurs,  et  d'une  grande  piscine,  con- 
tenant encore  de  l'eau.  On  a  trouvé  également  des  fragments  d'une 
grande  inscription  métrique  du  iv*^  siècle ,  dédiée  à  une  personne 
illustre,  qui  paraît,  autant  qu'on  peut  le  reconnaître,  avoir  donné 
à  la  CAincomhc  7iomenqîie  decHsque ,  probablement  sainte  Priscille, 
la  fondatrice  du  célèbre  cimetière. 

ffUne  communication  relative  à  une  inscription  grecque  du 
xni*  siècle  a  été  faite  par  M.  l'abbé  Cozza.75 

M.  llÉRON  DE  ViLLEFOssE  fait  uuc  Communication  sur  la  nou- 
velle exploration  archéologique  entreprise  dans  le  courant  de 
l'automne  dernier  au  Maroc  par  M.  de  la  Martinière. 

Ce  jeune  cl  zélé  vovageur  est  retourné  à  Volubilis,  où  il  a  dé- 
cou\ert  de  nouveaux  textes  très  intéressants.  On  y  remarque  sur- 
tout un  petit  texte,  très  mutilé,  (jui  se  rapporte  à  une  llatninique 
de  la  province  ïiugilane,  et  nous  fournil  ainsi  la  preuve  que  celle 


—  100  — 

province  possédait  une  assemblée  provinciale,  comme  l'Afrique 
proconsiilaire,  la  Numidie  et  la  Maurétanie  Césarienne.  Une 
autre  inscription  contient  une  dédicace  impériale  élevée  par  les 
habitants  de  Volubilis  en  l'honneur  de  Volusien;  elle  présente 
cette  particularité  que  les  noms  de  l'empereur  ont  été  martelés. 
Ce  martelage  a  été  exécuté  après  la  défaite  et  la  mort  de  Volu- 
sien, et  avant  l'avènement  de  Valérien,  pendant  le  règne  éphé- 
mère de  l'usurpateur  Émilien.  On  sait  que  ce  dernier  était  Maure 
d'origine;  il  est  donc  tout  naturel  de  penser  que  son  avènement 
fut  accueilli  avec  faveur  en  Afrique. 

Dans  une  autre  localité,  Ad  Mercurium,  M.  de  la  Martinière  a 
découvert  une  autre  dédicace  impériale  en  l'honneur  de  Gordien. 
Entin,  à  Banasa,  il  a  retrouvé  la  partie  supérieure  d'une  inscrip- 
tion publiée  par  Ernest  Desjardins.  Ce  fragment  permet  de  rendre 
à  Marc-Aurèle  un  texte  qui  avait  été  attribué  à  Commode. 

M.  Héron  de  Villefosse  met  sous  les  yeux  des  membres  de  l'Aca- 
démie des  estampages  de  ces  textes,  des  photographies  et  des 
plans  détaillés  de  Volubilis  et  d'AdMerciinum.  Il  annonce  que  M.  de 
la  Martinière  se  dispose  à  reprendre  le  chemin  du  Maroc  pour 
étudier  surtout  l'emplacement  de  Lixus.  Cette  étude  doit  donner 
de  très  bons  résultats,  car  rim[)ortance  de  Lixus,  à  l'époque  oii 
les  Phéniciens  étaient  les  maîtres  du  commerce,  était  considérable. 
On  y  découvrira  probablement  des  inscriptions  phéniciennes.  Il 
serait  donc  utile  que  la  Commission  du  Corpus  des  inscriptions 
sémitiques  et  celle  du  Nord  de  l'Afrique  donnassent  des  instruc- 
tions au  jeune  archéologue. 

Les  propositions  de  M.  Héron  de  Villefosse  sont  renvoyées  à  la 
Commission  des  inscriptions  sémitiques. 

M.  l'abbé  Duchesne  signale  un  passage  de  la  vie  du  pape  Gé- 
lasell,  qui  confirme  et  précise  les  conclusions  présentées,  il  y  a 
quelques  années,  par  M.  Noël  Valois  sur  la  jenaissance  du  style 
épistolaire  à  la  chancellerie  pontificale.  Cette  renaissance  se  pro- 
duisit au  xn"  siècle;  elle  eut  pour  effet  de  remettre  en  honneur 
l'observation  d'un  certain  rythme  prosaïque,  qui  avait  été  usité 
au  v^  et  au  vi^  siècle.  Le  texte  présenté  par  M.  l'abbé  Duchesne 
donne  le  nom  du  chancelier  qui  opéra  celle  réforme  :  c'est  Jean 


—  loi  — 

(laolimi,  iiomiué  chancelier  eu  1088  par  le  pape  Urhaiii  11,  plus 
lard  pap«  lui-niènie  sous  le  nom  de  Gélase  11.  Le  rylhuie  dont  il 
lil  levivre  rusu<je  porte  un  nom  qui  permet  de  le  rattacher  à  une 
date  précise  :  il  s'appelle  le  cursus  Lcomuus,  du  nom  du  pape  saint 
Léon  le  Grand  (660-6G1),  sous  qui  en  effet  il  paraît  avoir  été 
introduit. 

M.  Georges  Perrot  offre,  de  la  part  d'Ilanuli  bcy,  conservateur 
du  Musée  impérial  de  Tchinli-kieuck,  à  Constantinople,  le  mou- 
la<|e  de  la  ])artie  supérieure  d'un  cij)pe  qui  porte  trois  li<jues  ou 
plutôt  trois  bandes  de  cette  écriture  hiérogly[)lii(|ue,  à  caractères 
en  reliel",  qui  est  connue  sous  le  nom  d'écriture  haïualéenne  et 
que  Ton  attribue  au  peuple  des  Cliélas  ou  Héléeus.  Ce  moulage 
sera  déposé  au  Cabinet  des  inscriptions  sémitiques.  La  provenance 
exacte  de  la  pierre  n'est  pas  connue;  elle  a  été  envoyée  à  Con- 
stantinople  par  le  caïmakam  d'Alexandrette,  qui  n'a  pu  dire  sur 
quel  point  de  la  province  elle  avait  été  trouvée. 

M.  ScHEFER  demande  quelle  est  la  nature  des  caractères  de 
cette  inscription. 

M.  Menant  répond  que  la  lecture  de  ces  inscriptions  est  très 
peu  avancée.  Ce  qu'il  y  a  de  certain  jusqu'à  présent,  c'est  que 
cette  écriture  est  du  genre  boustrophédon ,  c'est-à-dire  que  la  pre- 
mière ligne  commence  à  droite,  et  que  la  lecture  doit  s'y  l'aire  de 
droite  à  gauche;  puis,  la  seconde  ligue  commençant  à  gauche,  la 
lecture  se  poursuit  vers  la  droite,  et  ainsi  de  suite.  Il  y  a  toute 
certitude  à  cet  égard,  grâce  à  la  comparaison  de  trois  inscriptions 
de  Hamath,  d'un  nombre  de  lignes  inégal,  qui  reproduisent  un 
même  texte.  Quant  à  la  valeur  des  signes,  l'assimilation  en  est 
encore  très  conjecturale,  malgré  les  travaux  très  sérieux  auxquels 
l'inscription  bilingue  de  Tarkudémos  a  donné  lieu. 

M.  l'abbé  Eug.  Mûller  adresse  à  l'Académie,  pour  le  concours 
La  Fons-Mélicocq  de  1890,  deux  ouvrages  intitulés,  l'un:  Guide 
dans  les  rues  et  environs  de  Senlis  (Senlis,  1887,  in-8°),  l'autre  : 
Découvertes  archéologiques  faites  à  la  ralhédrale  de  Senlis  en  188  j 
(Senlis,  1887,  iu-8",  extrait  du  Bulletin  du  Comité  archéologique  de 
Senlis). 

M.  Delaville  Le  Iloulx  lait  une  lecture  sur  un  nouvel  exemplaire 


—  102  — 

de  la  Règle  de  Tordre  des  Templiers,  qui  vient  d'êlre  découvert, 
sur  ses  indications,  aux  archives  de  la  couronne  d'4ra<|on,  à  Bar- 
celone. Il  date  des  dernières  années  du  xiii"  siècle,  et,  quoique 
incomplet,  donne  d'importantes  addilions  aux  Règles  déjà 
connues.  Au  point  de  vue  historique,  les  exemples  donnés  par  le 
nianuscrit  de  Barcelone  sont  très  importants,  et  spécialement 
celui  qui  raconte  en  détail  la  prise  d'Antioche  et  de  Gastin  par 
le  sultan  Bibais  en  1268. 

M.  J.  Halévy  commence  la  lecture  d'un  travail  intitulé  :  Examen 
critique  des  sources  de  la  tradition  relative  aux  martyrs  chrétiens  de 
Nedjrân. 

SÉANCE  DU    99  MARS. 

Il  est  adressé  au  Président  de  TAcadémic  une  lettre  de  faire 
part  de  la  mort  de  M,  Hucher,  conservateur  du  Musée  archéo- 
logicjue  de  la  ville  du  Mans. 

M.  Alexandre  Bertrand  communique  une  inscription  grecque 
dont  le  iac-similé  lui  a  été  adressé  par  M.  Salomon  Reinach  ^^\ 
L'estampage  en  a  été  envoyé  à  M.  Reinach  par  M.  Démosthène 
Baltazzi,  directeur  des  antiquités  dans  le  vilayet  d'Aïdin.  Elle  est 
gi-avée  sur  le  goulot  d'un  vase  de  bronze,  découvert  à  Notium, 
près  de  Colophon,  et  conservé  aujourd'hui  à  Smyrne,  dans  la 
collection  de  M.  Van  Lennep. 

Celte  inscription,  gravée  dans  le  sens  rétrograde  (de  droite  à 
gauche),  se  lit  ainsi  :  OXvyiTiîyov  ei(xï  rov  <l>iX6<Ppovo5.  D'après 
la  forme  des  lettres,  on  peut  la  rapporter,  semble- 1 -il,  au 
v*  siècle  avant  notre  ère. 

M.  Weil  estime  que  le  trait  le  plus  remarquable  de  cette  in- 
scription est  la  forme  spéciale  donnée  à  la  lettre  ^^^  dans  le  nom 
propre  OXv[X7rî^ov  (qu'il  faut,  d'ailleurs,  se  garder  de  confondre 
avec  l'adjectif  oXvixTriHOv). 

M.  Senart  soumet  à  l'Académie  deux  pierres  gravées  et  plusieurs 
moulages  de  pierres  gravées,  provenant  de  la  vallée  de  Caboul, 
qui  lui  ont  été  communiqués  par  le  capitaine  Deane. 

'''   Voir  aux  Communications,  11"  XII  (p.  f2t-} -j'.i). 


—  loa  — 

Une  de  CCS  pierres  [)ort('  une  insciiplion  en  caracîlères  indo- 
aryons.  .M.  Senaii  y  lil  le  nom  j;rcc  de  Tliéodanias.  Mais  ce  nom 
esl  précédé  d'une  syllabe  su,  que  M.  Senarl  rapproche  du  !ilT 
de  la  série  des  monnaies  indo-bactricnnes  dites  de  2i]TEI*M  AK  )w. 
Il  conclut  de  ce  rapprochement  qu'il  faut  renoncer  à  l'aire  de 
celte  syllabe  une  addition  purement  fortuite  et  complètement 
erronée  de  graveurs  maladroits.  Il  se  demande,  à  titre  de  simple 
conjecture,  si  cette  syllabe  ne  pourrait  pas  représenter  une  abré- 
viation de  a-jpos,  le  nom  de  Syrien  étant  pris  dans  le  sensgéné- 
r'i((ii('  de  Grec. 

M.  Senart  signale,  d'autre  part,  une  pierre  gravée  de  même 
style,  appartenant  au  (^abinet  des  médailles  et  portant  le  nom 
indien  de  Punamala.  Par  le  type,  elle  se  rattache  étroitement, 
comme  une  autre  pierre  dont  il  présente  le  moulage,  aux  mon- 
naies du  roi  indo-parihe  Gondopharès. 

Tout  tend  donc  à  ramener  ces  trois  petits  monuments  à  la 
même  période,  au  commencement  de  l'ère  chrétienne. 

Ils  ont  d'autant  [)his  d'intérêt  que  les  pierres  gravées  de  cette 
provenance,  garantie  par  des  épigraphes,  étaient  jusqu'à  présent 
inconnues. 

M.  Hw.ussoN  continue  la  seconde  lecture  de  ses  Nouvelles  con- 
sidérations sur  les  monuments  funéraires  des  Grecs. 


SÉANCE    DU    5    AVRIL. 

M.  Fabretli,  sénateur  du  royaume  d'Italie,  correspondant  de 
l'Institut,  adresse  à  l'Académie,  pour  la  Commission  des  inscrip- 
tions sémitiques,  le  cliché  négatif  de  la  photographie  d'un  pa- 
pyrus araméen  conservé  au  Musée  royal  de  Turin. 

M.  RwAissoN  termine  la  seconde  lecture  de  ses  Nouvelles  consi- 
dérations sur  les  monuments  funéraires  des  Grecs. 

M.  Gustave  Sohliimbergek  met  sous  les  yeux  des  membres  de 
l'Académie  une  fort  belle  bague  d'or  massif,  qui  appartient  à 
M.  le  baron  Piclion ,  et  qui  ollre  un  précieux  échantillon  de  l'or- 
fèvrerie byzantine  du  x"  siècle  '^^. 

<•'  Voir  aux  Communications,  ii"  XIII  (p.  138-1  an). 


—  lO/i  — 

iM.  Siniéon  Luge  lit  une  note  qui  porte  pour  litre  :  Jacques  d'Arc, 
père  de  la  Pucelle,  locataire  du  fort  de  File  de  Domremij. 

On  connaît,  par  divers  documents,  l'existence  à  Domremy,  au 
xv^  siècle,  d'une  maison  forte,  entourée  dun  grand  jardin  et 
munie  d'ouvrages  de  défense,  appelée  le  château  ou  le  fort  de 
rile.  La  Pucelle,  dans  son  interrogatoire,  dit  qu'il  lui  était  arrivé, 
étant  enfant,  d'aider  les  habitants  du  pays  à  conduire  leurs  bes- 
tiaux dans  celte  maison,  pour  les  mettre  en  sûreté  contre  les 
bandes  de  gens  de  guerre  qui  couraient  le  pays.  Or,  il  résulte 
d'une  découverte  toute  récente,  faite  aux  archives  de  Meurthe-et- 
Moselle  par  M.  J.-Ch.  Chapellier,  que  le  père  de  Jeanne,  Jacquol 
ou  Jacques  d"Arc,  était  l'un  des  deux  locataires  qui  avaient  pris  à 
bail,  des  seigneurs  de  Domremy,  l'exploitation  du  fort  de  l'Ile. 
L'acte  de  location,  passé  par-devant  notaire  et  daté  du  2  avril 
1620,  vient  d'être  publié  par  M.  Chapellier  dans  le  Journal  de  la 
Société  d'archéologie  lorraine.  Le  bail  est  fait  pour  neuf  années, 
ayant  commencé  à  courir  le  2^  juin  1^19  et  devant  expirer  par 
conséquent  à  pareil  jour  de  l'année  1  /i2  8.  Le  frère  aîné  de  Jeanne, 
Jacquemin  d'Arc,  figure  parmi  les  garants  du  contrat. 

M.   Halévy    continue   sa   communication    sur  la   légende   des 
martyrs  chrétiens  de  Nedjràn. 


SEANCE    DU    12    AVRIL. 


Le  Président  annonce  à  l'Académie  que,  suivant  les  usages,  la 
prochaine  séance  aura  lieu  le  mercredi  17  et  non  le  vendredi  19, 
qui  sera  le  Vendredi  saint. 

Le  Ministre  de  l'instruction  publique  informe  l'Académie  qu'il 
vient  d'autoriser,  sur  sa  demande,  M.  le  Directeur  de  l'Ecole  fran- 
çaise de  Rome  à  lui  adresser  à  une  date  ultéiieure  les  mémoires 
des  membres  de  ladite  Ecole,  et  il  fait  connaître  les  raisons  que 
M.  le  Directeur  de  l'Ecole  invoque  pour  justifier  ce  retard. 

M.  le  docteur  Bournet  adresse  à  l'Académie  le  catalogue  d'une 
bibliothèque  italienne  dont  une  partie  est  destinée  à  l'Ecole  fran- 
çaise de  Rome,  et  il  demande  rcsi  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  accepterait  cette  donation  ^1. 


—  lo: 


L'Acadoniie  na  point  à  so  prononcer  sur  cette  question. 

Kst  adresse'  à  TAcadi^niie,  pour  le  concours  des  Anli(piilés  de 
la  France,  (jui  sera  ouvert  en  1890  : 

Mémoires  cVOlimer  de  la   Marche,   muUre  (T hôtel  cl   capitaine  des 
gardes  de  Charles  le  Téméraire,  puljlii's,  pour  la  Société  de  l'his- 
toire de  France,   par  Henri   Bcaune  et  J.  d'Arbaumonl  (Paris, 
1883-1888,  h  vol.  in-8"). 

M.  ViOLLET  coninience  la  lecture  d'un  travail  intitulé  :  Gallo- 
Bomains  et  Barbares. 

On  peut  constater,  dit  notre  confrère,  entre  les  Gallo-Roniains 
et  les  Barbares,  certains  courants  de  sympathie  qui  s'expliquent 
par  diverses  causes.  L'une  de  ces  causes  a  dû  être  un  élat  de  civi- 
lisation commun  aux  Barbares  et  aux  classes  inférieures  de  la 
population  gallo-romaine.  On  peut  en  voir  une  autre  dans  le 
désir  d'échapper  à  la  domination  romaine,  devenue  oppressive  et 
impuissante,  désir  qui  devient  très  apparent  en  Gaule  au  v^  siècle. 

Dès  le  milieu  du  iii*^  siècle,  un  évéque  chrélien  (qui  d'ailleurs 
ne  se  rattache  pas  à  la  Gaule),  Commodien,  montrait  une  véri- 
table sympathie  pour  les  Barbares  qui  envahissaient  ou  qui  mena- 
çaient l'empire. 

M.  Abel  des  Michels,  professeur  à  l'Ecole  des  langues  orien- 
tales vivantes,  fait  une  communication  sur  Une  chanson  politique 
chinoise  au  temps  des  Huns. 

M.  des  Michels  donne  connaissance  d'une  énigme  ou  jeu  de 
mots  historique,  produite  par  la  décomposition  de  certains  carac- 
tères, et  renfermant  un  sens  politique.  Cette  énigme,  que  l'on 
trouve  dans  le  Tsin  chou  (annales  olïiciellcs  de  la  dynastie  des 
Tsi'n),  fait  allusion  à  la  fondation  de  la  dynastie  des  Tchad  pos- 
térieurs par  le  chef  hun  Chï  lé.  M.  des  Michels  en  donne  la  clef 
et  discute  la  valeur  qu'il  y  a  lieu  de  lui  accorder,  ainsi  qu'à  une 
variante  contenue  dans  l'ouvrage  chinois  apocryphe  intitulé:  Clu 
laù  kouô  Ich'hn  tsieoû. 


—  lOf)  — 

SÉANCE   DU    17    AVRIL. 
(Séance  avancée  an  mercredi  à  canse  du  Vendredi  sainl.) 

M.  VioLLET  termine  la  lecture  du  IVagment  qu'il  a  intitulé  : 
GaUo-Romains  et.  Barbares. 

Les  Burgoncles,  dit  notre  confrère,  lurent  appelés,  comme  les 
Visigoths,  par  un  complot,  un  complot  des  Lyonnais  ('^57).  Il 
est  vrai  cjue  Lyon  fut  repris  par  Majorien,  mais  il  est  permis  de 
croire  que  ce  prince  ne  poussa  pas  très  loin  ses  avantages. 

Les  Bretons  arrivèrent  en  amis  et  furent  reçus  comme  tels  :  ii 
paraît  bien  que,  comme  les  Visigoths  et  les  Burgondes,  ils 
reçurent  des  terres  à  titre  d'hospites. 

Après  Tinvasion  des  Francs,  les  empereurs  d'Orient  ne  per- 
dirent pas  de  vue  les  Gaules  et  continuèrent  à  jeter  sur  ce  pays 
des  regards  de  convoitise. 

M.  Gaston  Boissier  demande  à  faire  quelques  réserves  sur  cer- 
taines expressions  dont  M.  Viollet  s'est  servi  dans  sa  première 
lecture. 

M.  Viollet  a  dit  que  les  populations  gallo-romaines  avaient 
éprouvé,  dès  le  début,  une  très  vive  sympathie  pour  les  Barbares. 
L'expression,  dans  sa  généralité,  paraît  trop  forte  à  M.  Boissier. 
Sans  doute,  en  certains  pays,  les  rigueurs  de  la  fiscalité  romaine 
avaient  exaspéré  les  habitants.  Quelques-uns  s'étaient  enfuis  chez 
les  Barbares;  beaucoup  les  appelaient  et  les  ont  bien  accueillis. 
Mais  en  fut-il  ainsi  partout?  les  sentiments  des  classes  populaires 
sont  toujours,  après  quelque  temps,  difficiles  à  constater;  ceux 
des  classes  éclairées  se  reflètent  dans  les  écrivains  contemporains; 
or,  tous  les  écrivains  de  cette  époque  se  montrent  fort  attachés  à 
la  domination  romaine  et  très  ennemis  des  Barbares. 

M.  Hauréau  fait  remarquer  qu'un  auteur,  au  moins,  a  mani- 
festé, et  bien  haut,  sa  sympathie  pour  les  Barbares  :  c'est  le  prêtre 
Salvien. 

M.  Boissier  répond  :  Salvien  seul,  en  effet,  semble  faire  excep- 
tion; mais  il  faut  remarquer  que,  s'il  a  fait  tant  d'éloges  des 
mœurs  des  Baibares,  c'est  qu'il  voulait  justifier  la  Providence;  il 
tenait  à  démontrer  que  cette  fois,  comme  toujours,  Dieu  avait 


—  107  — 

donne  la  victoire  à  ceux  qui  la  méiilaicul  le  mieux.  Il  es!  diflicile 
de  croire,  sans  preuves,  qu'il  y  ail  eu  partout  autant  d'opposi- 
lion  entre  les  opinions  du  peuple  et  celles  des  classes  éclairées 
([uc  le  suppose  M.  Viollel.  En  jfénéral,  M.  Viollet  a  Iroj)  adouci 
les  traits  de  cctle  histoire.  Il  semble,  à  lentendre,  que  les  choses 
se  soient  passées  d'un  commun  accord,  prcs(]U(!  d'une  mani<''re 
pacilique.  II  n'en  est  rien  :  l'invasion  a  été  violente  et  teirihle.  Il 
sullit,  pour  en  être  convaincu,  de  lire  les  textes  des  conlctn- 
porains,  et  surtout  le  curieux  poème  de  Paulin  de  Pella.  Ou  peut 
être  sûr  que  ceux  même  qui  avaient  ap{)laudi  d  abord  à  l'arrivée 
des  Barbares,  quand  ils  les  ont  vus  s'établir  chez  eux  en  garnisaires, 
sous  le  nom  d'hôtes,  et  prendre  les  deux  tiers  de  leurs  biens, 
ont  dû  être  fort  irrités.  Il  ne  faudrait  pas  connaître  les  paysans 
de  tous  les  temps  pour  croire  qu'ils  aient  accueilli  avec  beaucou[) 
de  ffsympathiei  des  gens  qui  venaient  leur  prendre  leur  argent 
et  leurs  teries.  Ce  qu'on  peut  dire,  c'est  que  les  anciennes  popu- 
lations se  sont  assez  vite  résignées  au  voisinage  et  à  la  domina- 
tion des  Barbares.  Cette  résignation  s'aperçoit  déjà  dans  Orose, 
au  lendemain  de  l'invasion;  et  c'est  ainsi  que  la  lusion  n'a  pas 
lardé  à  se  faire  entre  les  vainqueurs  et  les  vaincus. 

M.  Deloohe,  dans  le  même  sens,  rappelle  la  défense  énergique 
qu'opposa  aux  cnvahisseui'S  la  population  de  Langres,  conduite 
par  son  évéque.  11  cite  également  la  courageuse  conduite  des  habi- 
tants de  Clermont,  qui,  au  temps  de  Sidoine  Apollinaire,  résis- 
tèrent pendant  douze  ans  à  toutes  les  forces  du  roi  Euiic.  De  tels 
faits  prouvent  sulïisamment  ([uo  les  habitants  de  la  Gaule  n'éprou- 
vaient à  l'avance  aucune  synq)alliie  pour  la  domination  des  Bar- 
bares. Mais,  (|uand  ceux-ci  furent  établis,  ils  durent  profiter  du 
sentiment  de  lassitude  générale  causé  par  les  exigences  écrasantes 
du  fisc  impérial.  En  outre,  les  Francs,  en  particulier,  trouvèrent 
un  appui  dans  l'épiscopat  callioli(|ue,  (|ui  les  préférait  naturelle- 
ment aux  Goths  et  aux  Burgondes  ariens. 

M.  Hauréau  communi(|ue  à  l'Académie  quelques  extraits  d'un 
sermon  du  chancelier  Philippe  de  Grève,  où  il  est  fait  mention 
d'un  hérétique  el  d'un  concile  de  Beims,  jus([u'à  ce  jour  inconuus. 

Cet  lii'i'('li((U(',  qui  se  uouMn.-iil  Guicluird,  lui  brûlé.  On  i<fiu)re 


~   108  — 

quelle  e'tait  sa  doctrine;  mais  on  voit  dans  le  sermon  qu'il  la  justi- 
fiait par  les  livres  saints,  dont  il  citait  une  version  française. 
Uéve'nement  eut  lieu  vers  Tannée  1280. 

M.  le  comte  de  Charencey  fait  une  communication  relative  à 
la  langue  mam.  parie'e  dans  le  Soconusco  (Mexique  occidental). 
«Cette  langue  appartient  incontestablement,  dit  M.  de  Cha- 
rencey, à  la  famille  maya -quiche.  Nous  avions  d'abord  cru, 
ajoute-t-il,  à  cause  du  caractère  compliqué  de  son  système  de 
conjugaison,  qu'elle  formait  un  groupe  à  part  dans  cette  l'amille, 
à  la  fois  différent  du  groupe  occidental  (quiche  et  pokome)  et 
du  groupe  oriental  (maya  et  tzendalc).  L'étude  de  ÏArte  du 
R.  P.  Reynoso  nous  a  obligé  à  modifier  notre  façon  de  voir.  La 
complication  bizarre  de  son  système  verbal  est  en  partie  due  à 
l'intrusion  d'éléments  mexicains,  lesquels  ont  exercé  en  mam  une 
influence  véritablement  extraordinaire  et  dont  on  retrouverait 
difficilement  l'analogue  ailleurs. 

cfA  presque  tous  les  autres  égards,  l'idiome  en  question  se 
rapproche  surtout  des  dialectes  occidentaux.  Comme  eux,  par 
exemple,  il  maintient  toujours  la  gutturale  finale  et  ne  la  trans- 
forme jamais  en  nasale,  comme  cela  a  souvent  lieu  en  maya.  Dans 
la  formation  de  ses  noms  de  nombres  supérieurs  à  dix,  le  mam 
suit  scrupuleusement  la  règle  observée  en  quiche.  Il  dira,  par 
exemple,  hunlnhuh,  ffonzew,  littéralement  fr un-dix»,  tandis  que 
le  tzendalc,  qui  est  du  groupe  oriental,  se  servirait  de  la  forme 
lagchunem,  littéralement  ffdix-umi. 

frSur  un  seul  point,  le  mam  s'éloigne  de  ses  congénères  occi- 
dentaux :  non  seulement  il  ne  possède  pas  la  gutturale  r,  dont  le 
maya  est  également  dépourvu,  mais  quelquefois  même  il  la 
transforme  en  «/,  comme  les  dialectes  orientaux. 

ff  Pour  nous  résumer,  le  mam  nous  lait  l'effet  d'une  langue  pour 
ainsi  dire  intermédiaire  entre  celles  du  groupe  orientai  et  celles 
du  groupe  occidental,  mais  se  rapprochant  surtout  de  ces  der- 
nières. Dans  notre  France,  n  avons-nous  pas  l'exemple  de  certains 
patois  intermédiaires  entre  la  langue  doïl  et  la  langue  d'oc?v 


00 


SÉANCE    Di;    af)    WRII,. 

M.  Bailly,  nionibre  do  rAcademie  des  beaux-arts,  président 
de  la  Société'  des  artistes  français,  écrit  au  Secrétaire  perp('tuel 
pour  l'informer  que  les  membres  de  Tlnslitut  pourront,  comme 
les  années  précédentes,  visiter  le  Salon  de  cette  année,  sur  la 
présentation  de  leur  médaille,  à  partir  du  3o  de  ce  mois. 

M.  ViOLLKT  communique  une  étude  intitulée  :  L'assemblée  du 
peuple  à  l  époque  fvanque. 

Les  affaires  de  peu  d'importance  étaient  soumises,  écrit 
Tacite,  à  la  délibération  des  principes;  les  grandes  à  celles  de 
tous.  Pour  donner  un  vote  favorable,  on  agitait  les  framées.  Ce 
vole  par  les  armes,  qui  d'ailleurs  n'est  point  spécial  aux  Ger- 
mains, se  retrouve  à  l'époque  barbare  cbez  les  Lombards,  où  il 
prend  le  caractère  d'un  rite  juridique  consacré;  on  le  retrouve 
aussi  chez  les  Scandinaves. 

Les  assemblées  populaires  ne  disparaissent  pas  entièrement  à 
l'époque  barbare;  nous  en  suivons  la  trace  au  vi*  siècle;  elles  sub- 
sistent au  vu",  au  viif  et  au  ix*  siècle. 

Au  VIII*  siècle,  une  sorte  de  fusion  paraît  se  consommer  entre 
les  assemblées  du  peuple  et  les  synodes. 

En  principe,  la  loi  ne  pouvait  être  modifiée  sans  l'assentiment 
du  peuple,  et  peut-être  l'unanimité  était-elle  théoriquement 
exigée. 

M.  Delochk  fait  des  réserves  sur  ce  dernier  point,  ainsi  que  sur 
des  rapprochements  que  M.  Viollet  a  cru  pouvoir  faire  avec  cer- 
taines institutions  des  Kabyles. 

M.  Dlruy  ne  peut  accorder  qu'il  subsistât,  sous  le  Bas-Empire 
romain,  ainsi  que  M.  Viollet  a  paru  incidemment  vouloir  le  faire 
entendre,  aucune  trace  du  principe  de  la  souveraineté  populaire. 

M.  Viollet  explique  qu'il  n'a  parlé  que  d'un  souvenir  théo- 
rique et  en  quelque  sorte  littéraire,  qui  existait  dans  l'esprit  des 
hommes  instruits,  mais  auquel  ne  répondait,  il  l'accorde  bien 
volontiers,  aucune  réalité  dans  la  pratique. 

M.  J.  Halévy  continue  et  termine  sa  communication  sur  les 
martyrs  chrétiens  de  Nedjràn. 

XVII.  c 


MraïUtBlK    AATtO>tALK. 


—  110  — 

La  légende  relative  au  martyre  des  chre'tieus  de  Nedjrâu,sous 
Dhou  Nouwas,  roi  juif  des  Himyarites,  repose,  dit  M.  Hale'vy,  sur 
trois  écrits  principaux,  tous  rédigés  en  langue  syriaque.  Les  deux 
premiers,  savoir,  la  lettre  de  Jacques  de  Saroug  aux  Himyarites 
et  Thymne  de  Jean  Psaltès  sur  les  martyrs  de  Nedjrân,  sont  au- 
thentiques. Ils  se  rapportent  aux  querelles  qui  eurent  lieu  à  Nedj- 
rân entre  la  communauté  des  Syriens  monophysites,  qui  était 
l'alliée  naturelle  des  Romains,  et  la  communauté  juive  de  la 
même  ville,  qui,  en  considération  des  maux  qui  accablaient  les 
juifs  de  l'empire  romain,  favorisait  la  politique  persophile  du  roi. 
Les  chrétiens  ayant  massacré  deux  fils  d'un  notable  juif,  celui-ci 
demanda  et  obtint  de  la  part  du  roi  un  acte  de  répression  contre 
les  chrétiens.  Cettre  répression  fut  grossie  en  passant  de  bouche 
en  bouche  et  changée  en  u(ie  persécution  religieuse.  Mais  les 
deux  auteurs  qui  viennent  d'être  nommés  ne  disent  nullement 
que  le  roi  himyarite  ait  professé  la  religion  juive. 

M.  Halévy  examine  ensuite  le  troisième  document  relatif  à  cet 
événement,  la  lettre  syriaque  attribuée  à  Siméon,  évêque  de 
Beth-Archam,  et  formant  la  base  du  Martiimim  Arethœ,  comme 
de  tous  les  historiens  et  ménologistes  postérieurs.  Après  avoir 
tracé  l'histoire  des  personnages  qui  y  sont  mentionnés  et  analysé 
le  style  mêlé  d'arabismes  de  la  compilation.  M,  Halévy  arrive  à 
la  conclusion  que  la  partie  la  plus  ancienne  de  la  lettre  a  été  ré- 
digée, non  pendant  le  règne  de  Justin,  comme  on  le  croit  ordi- 
nairement, mais  vers  la  fin  du  règne  de  Justinien. 

Quant  à  la  persécution  des  chrétiens  par  le  roi  juif  d'Himyar, 
c'est  une  légende  inventée  par  un  écrivain  monophysite,  afin  de 
susciter  une  persécution  contre  les  juifs  et  do  détourner  ainsi  de 
sa  secte  les  rigueurs  de  l'empereur  orthodoxe. 


COMMIMCVTIONS. 


N"   I\. 


POUHQLOl  l'ROPRRCR  \-T-ll.  DIT  OIK  I,i;  CIIEI'  CAUI.OIS  VIRDIJM  AHOS 
SK  VXATAIT  D'AVOin  LK  lUIKN  l'OlR  ANCRTHE?  l'VH  M.  D'AP.BOIS  DK 
JUBAINVILLE. 

(séance    du    8    MARS    1  889.  ) 

Les  Grecs  ont  formé  un  certain  nombre  de  composés  dont 
le  second  ferme  eslyévvs  et  qui  expriment  l'idée  d'une  filiation 
mythologique  :  Qeo-yévtjs,  ^lo-yévtjs,  Zvvo-yévris ,  AaxXtiTTio- 
yévrjç,  ÈpfjLo-yévns-  En  gaulois  -gcnos,  latinisé  en  -genus  par 
les  Romains,  renq)lit  une  fonction  identique  à  celle  de  yévr)ç 
en  grec.  De  là,  par  exemple,  dans  une  inscription  de  Rome 
(C.  l.  L.,  VI,  9Û07),  le  nom  du  soldat  gaulois  Totati-genus. 
Totati-  est  le  nom  du  dieu  gaulois  que  deux  autres  inscrip- 
tions appollont  Toutalis  (C.  l  L.,  III,  539 o;  VII,  8/1)  et 
assimilent  à  Mars.  C'est  le  Tentâtes  de  Lucain  : 

Et  quibus  immilis  placalnr  sanguine  diro 

Toula  les. 

(Pharsale,  I,  644-445.) 

Il  y  eut  d'autres  dieux  gaulois  que  les  Romains  assimilèrent 
à  Alars.  L'un  était  Camulos  (C.  L  L.,  VII,  i  to3;  Rrambach, 
iG/i);  de  là  le  composé  Camulo-genus,  nom  d'un  chef  au- 
lerque  dans  les  Commentaires  de  César  :  Camulo-genus  veut 
dire  fds  du  dieu  Camulos,  comme  Totati-genus,  fds  du  dieu 
Totatis,  et  Totatis  n'est  qu'une  notation  relativement  moderne, 
de  l'archaïque  Tentâtes  de  Lucain. 

Dans  des  inscriptions  de  Bordeaux  on  a  trouvé  le  nom 
d'homme  Divo-genus  et  le  nom  de  femme  Divo-gena  (Jullian, 
Inscriptiona  romaines  de  Bordeaux).  Ces  noms  expriment  en  cel- 

8. 


—  112  — 

tique  une  idée  identique  à  relie  qu'exprime  en  grec  le  nom 
d'homme  Seo-ysvtis. 

A  la  même  famille  appartiennent  des  composés  dont  le  pre- 
mier terme  exprime  une  idée  abstraite.  Tel  est  le  gaulois 
Rectu-genos  (  C.  /.  L. ,  II ,  2  /i  o  2 ,  2  9  0  7  )  ou  Rechtu-genos ,  écrit 
Rextu-genos  sur  le  monument  de  la  Vénus  de  Caudebec  qu'a 
savamment  étudié  M.  Héron  de  Villefosse.  Ce  nom  veut  dire 
«fils  du  droit»;  on  peut  comparer  les  noms  grecs  Aixaio-ysws 
et  &s{xia1o-y£vr]s,  qui  ont  le  même  sens.  Bud-ien,  dans  le 
Cartulaire  de  Redon,  est  la  forme  moderne  d'un  nom  gaulois 
*Bodi-genos  et  signifie  «fils  de  la  victoire»;  c'est  ce  que  veut 
dire  le  grec  'Ntxoyéviis. 

La  paternité  mythologique  a  été  chez  les  Celles  attribuée 
aux  minéraux.  On  trouve  dans  le  Cartulaire  de  Redon  les 
noms  d'hommes  Hoiarn-gen,  Esarno-genos,  «fils  du  fer»,  et 
Dubr-ien,  Dubro-genos,  «fils  de  l'eau». 

Les  Celtes  croyaient  à  la  divinité  du  fer  et  à  celle  de  l'eau, 
par  conséquent  à  la  divinité  des  rivières.  Cette  croyance 
explique  le  vers  où  Properce,  parlant  du  chef  gaulois  Virdu- 
maros,  tué  par  le  consul  Claudius  Marcellus  l'an  229  av.  J.-C, 
dit  que  Virdumaros  prétendait  compter  le  Rhin  parmi  ses  an- 
cêtres : 

.  .  .  genus  hic  Hheno  jactabat  ab  ipso. 

(  Livre  V,  élégie  i  o ,  v.  4 1 .  ) 

Cela  veut  dire  qu'il  était  fils  de  Reno-genos.  Reno-genos 
était  le  nom  de  son  père,  lui  s'appelait  Virdu-maros  Reno- 
geni-cnos.  Le  Rhin  (c'est-à-dire  non  seulement  le  grand  fleuve, 
mais  tout  amas  d'eau,  rian,  en  irlandais  «la  mer»)  était  dieu. 
De  *Reno-genos  on  peut  rapprocher  Eni-genus,  nom  du 
père  d'un  certain  Secundus,  qui  près  de  Vence  fit  élever  une 
stèle  funéraire  à  ses  enfants  (C.  /.  L.,  Xll,  33).  Eno-genus 
veut  dire  fils  de  l'Enus  ou  mieux  de  l'vEnus,  qui  est  l'Inn. 


—  113  — 

La  croyance  à  la  divinité  de  l'eau  et  du  fer,  qui  a  donné 
naissance  à  des  noms  comme  Dubro-gcnos,  Esarno-gonos,a  eu 
son  eiïel  dans  l'ordre  dt.'s  choses  juridiques.  Le  ler,  c'est-à- 
dire  l'épée,  était  le  juge  des  cont<'stations,  non  seulement 
quand  les  parties  recouraient  aux  armes,  mais  aussi  quand  le 
serment  d'une  des  parties  décidait  du  gain  du  procès  :  les 
L'iandais  juraient  sur  leur  épée  et  croyaient  que  l'épée  se  levait 
elle-même  pour  frapper  le  parjure.  L'épreuve  de  l'eau  bouil- 
lante était  usitée  dans  le  droit  irlandais  comme  dans  celui 
des  Germains.  Des  deux  côtés  on  l'appelait  l'épreuve  du  chau- 
dron, calre  en  irlandais,  aeneum  dans  la  loi  salique;  mais  ce 
n'était  pas  le  chaudron,  c'était  l'eau  qui,  en  brûlant  le  cou- 
pable, faisait  triompher  la  justice.  Le  Rhin,  en  qualité  de  dieu, 
était  le  juge  des  femmes  mariées  dont  les  maris  suspectaient 
la  fidélité;  il  engloutissait,  disait-on,  l'enfant  adultérin  qui, 
couché  sur  un  bouclier,  était  exposé  au  hasard  des  flots  par 
un  mari  soupçonneux;  l'enfant  légitime  surnageait- 
Un  poète  grec  anonyme  a  chanté  cette  épreuve  juridique  : 
il  peint  les  inquiétudes  de  la  mère  qui,  après  les  douleurs  de 
l'enfantement,  ressent  des  angoisses  nouvelles  et  attend  toute 
tremblante  le  jugement  des  flots  agités.  Si  l'on  prenait  cet  au- 
teur à  la  lettre,  tous  les  enfants  des  Celtes  auraient  été  soumis 
à  cette  redoutable  épreuve'^';  il  est  évident  qu'il  ne  faut  pas 
l'entendre  ainsi.  En  règle  générale,  chez  les  Celtes  comme 
chez  les  Germains,  on  ne  recourait  aux  ordalies,  au  ju- 
gement de  Dieu,  que  lorsqu'il  y  avait  contestation  et  que 
les  autres  preuves  faisaient  défaut,  et  il  faudrait  connaître 
bien  mal  le  cœur  humain  pour  admettre  (ju'un  mîiri  croyant 
être  père  aurait  exposé  son  enfant  au  danger  de  périr  dans 
les  flots  (2'. 


'')  xai  otJ  xs'ipoi  eiat  TOKVEi 

*-)   Anlholofriit .  I.  1\,  ép.  laô;  éd.  Diilol.  I.  II,  p.  a'i. 


—  lU  — 

Il  serait  intéressant  de  savoir  à  quelle  date  l'épigramme 
^^recque  dont  nous  parlons  remonte.  Nous  l'ignorons;  elle  est 
probablement  la  source  où  a  puisé  l'empereur  Julien  quand  il 
parle  de  cet  usage  dans  son  second  discours  à  l'empereur 
Constance,  et  surtout  dans  une  lettre  au  philosophe  Maxime. 

Voici  comment  Julien  s'exprime  dans  son  discours  :  «On 
dit  que  chez  les  Celtes  un  fleuve  est  le  juge  incorruptible  de 
la  légitimité  des  enfants:  jamais  les  pleurs  des  mères  n'ob- 
tiennent de  lui  qu'il  voile  et  cache  leur  faute;  les  pères  atten- 
dent sans  crainte  la  sentence  qu'il  prononce  sur  les  femmes 
et  sur  les  enfants;  c'est  un  juge  véridique  et  qui  ne  ment 
pas^.  »  Julien  ne  dit  pas  ici  le  nom  du  fleuve  dont  il  s'agit, 
il  est  plus  explicite  dans  sa  lettre  au  philosophe  Maxime  : 
«On  ne  peut,  écrivait-il.  accuser  le  Rhin  d'injustice  envers 
les  Celtes,  car  il  engloutit  dans  ses  flots  tourbillonnants  les 
bâtards  et  punit  ainsi  la  profanation  du  lit  conjugal;  mais 
quand  il  reconnaît  qu'un  enfant  est  légitime,  il  le  tient  élevé 
au-dessus  des  eaux  et  le  ramène  entre  les  mains  de  la  mère 
tremblante;  en  le  lui  rendant  plein  de  vie  il  est  en  quelque 
sorte  le  témoin  incorruptible  de  la  vertu  et  de  l'honneur  de 
l'épouse '^^.» 

Le  Rhin  était  donc  une  divinité.  Reno-genos  voulait  dire 
fils  du  dieu  Rhin,  et,  en  supposant  que  Reno-genos  était  le 
nom  du  père  de  Virdu-maros,  on  peut  expliquer  sans  difiiculté 
le  vers  de  Properce. 

'■'   Oratio  II,  édition  Herllcin  (Bibl.  Teubner) ,  p.  ioù-io5. 
f''  Ed.  Hertlein,  p.  ^go.  L'idée  de  la  mère  tremblante,  rpsyLovar) ,  parait  eii!- 
pruntée  par  Julien  à  Tépigramme,  dont  l'auteur  a  écrit  Tpofiéovaoï. 


—  1 1  ô  — 

N°  X. 

.•\OTE  SUR   LES  MESURES  CIIALDÉE.\.NES  DE  SUPERFICIE. 

PAU   M.  i.  OPPERT. 

(séance  du  8  HÀBs  1H89.) 

M.  Opport  a  depuis  Irenle-cinq  ans  retrouvé  la  base  de  la 
métrologie  assyrienne.  Dans  ce  laps  de  temps,  il  lui  a  été  donné 
de  faire  des  découvertes  nouvelles  et  de  rectifier  sur  quelques 
points  ses  premières  opinions.  L'étude  des  textes  juridiques, 
«jui  sont  remplis  d'indications  relatives  aux  poids,  aux  mesures 
de  capacité  et  aux  évaluations  de  superficie,  lui  a  permis 
d'établir  les  systèmes  qui  étaient  en  usage  pendant  les  quatre 
mille  ans  durant  lesquels  on  peut  suivre  le  développement  de 
la  métrologie  assyro-chaldéenne.  Des  calculs  assez  compliqués 
ont  fait  connaître,  entre  autres,  le  système  usité  en  Chaldée 
pour  évaluer  l'étendue  des  terrains  achetés  et  échangés.  Le  sys- 
tème principal  était  la  division  sexagésimale,  mais  des  considé- 
rations religieuses  et  mvsliques  en  ont. quelquefois  fait  aban- 
donner l'observance  stricte  et  y  ont  introduit  des  nombres 
premiers  étrangers  au  système,  qui  a  pour  base  le  chiftre 
soixante.  Quoique  les  Chaldéens  divisassent  le  jour  en  vingt- 
quatre  heures  de  soixante  minutes,  ils  employèrent  la  semaine 
de  sept  jours,  et  cet  usage  antique  de  la  division  du  temps, 
parvenu  jusqu'à  nous,  est  presque  la  seule  chose  qui  ait  sur- 
vécu aux  réformes  mélrologiques  de  la  Révolution  française. 

Bien  que  les  mesures  itinéraires  eussent  été  presque  toutes 
établies  d'après  le  système  sexagésimal,  les  Chaldéens  em- 
ployèrent dans  l'arpentage  un  autre  élément.  Ils  calculaient  les 
surfaces  agronomiques  d'après  des  rectangles  dont  la  hauteur 
était  constante.  Celle-ci  n'était  jamais  exprimée,  et  il  a  fallu 
la  retrouver  par  le  calcul. 

Cette  hauteur  constante  était  celle  d'une  canne,  c'était  la 


—  116  — 

moitié  (le  la  toise,  et  elle  se  subdivisait  en  sept  aunes  de 
vingt-quatre  pouces  chacune.  La  surface  est  donc  toujours 
donnée  par  la  base  seule,  en  toises,  cannes,  aunes  et  pouces. 
Des  textes  précis  nous  prouvent  que  les  Chaldéens  exécutaient 
des  calculs  avec  une  merveilleuse  habileté,  et  qu'ils  savaient 
faire  des  calculs  sur  des  nombres  de  si^v  chiffres.  Un  champ  ren- 
fermé dans  quatre  côtés  de  596,  56o,  5i8  et  boh  pouces 
est  évalué  à  10  cannes  3  aunes  7  pouces,  ou  1,769  pouces 
agraires,  chifï're  qu'il  nous  faut,  pour  exprimer  la  même  sur- 
face en  pouces  carrés,  multiplier  par  168,  nombre  des  pouces 
qui  composent  la  canne.  Pour  calculer  cette  surface  ,Hes  Chal- 
déens prenaient  les  moyennes  des  longueurs  des  côtés,  deux 
à  deux,  soit  678  et  5ii  ;  le  produit  de  ces  deux  nombres 
donne  996,358,  ce  qui,  divisé  par  168,  donne  1,768  et  une 
fraction  '^'. 

Beaucoup  de  calculs  ont  permis  à  M.  Oppert  d'établir  le 
fait  de  l'introduction  du  chiffre  sept.  M.  Aurès,  de  Nnnes,  a 
nié  ce  fait  et  a  voulu,  au  mépris  des  chiffres  transmis,  et  en 
les  changeant  arbitrairement,  introduire  le  calcul  sexagésimal, 
en  donnant  a  la  canne  sept  aunes  et  demie.  Mais  aucune  éva- 
luation cunéiforme  ne  s'accorde  avec  cette  hypothèse,  et  M.  Op- 
pert a  dernièrement  trouvé,  dans  un  recueil  de  textes  publiés 
par  M.  Peiser,  de  Berlin,  la  confirmation  directe  de  tout  le 
système  chaldéen. 

Un  acte  de  vente  du  à  Marcheswan  de  l'an  29  de  Darius  I" 
(/igS  av.  J.-C.)  fournit  l'évaluation  suivante  de  deux  champs  : 
1"  2  3  cannes  h  aunes;  2"  3  aunes  5  -f  pouces;  total,  9/»  cannes 
5  Y  pouces. 

Comme  quatre  et  trois  font  sept,  ce  passage  prouve  direc- 
tement ce  que  M.  Oppert  avait  obtenu  par  le  calcul,  c'est-à- 
dire  que  la  canne  se  composait  de  7  aunes,  l'aune  agraire,  de 

f')  En  réalité,  un  tétragone  de  096,  060,  5i8  et  5o4  de  côté  ne  peut  être 
au  maximum  que  de  ",Y,"-=  1757. 


—   117  — 

7  aunes  (■arn''('s,  cl  lu  caiine  aifiuirc  ou  canne  carrée,  de 
U^  aunes  carrées. 

Car  il  est  dit  en  outre  que  le  premier  champ  avait  35  aunes 
de  long  sur  33  de  large,  ou  i,i55  aunes  carrées;  le  second 
champ  avait  5  aunes  de  long  sur  /i  7  de  large,  ou  aa  faunes 
carrées. 

Or,  9  3  cannes  h  aunes  donnent  aS  X /ig  =  1 ,  «  97, 
/i  X  7  =  98,  total  1.1  55. 

De  plus  3  aunes  iiX7  =  92  '^,  ou  99  | (4-^)- 

Le  maximum  des  aunes  carrées  t|uepeut  contenir  un  paral- 
lélogramme de  35  et  33  de  côté  est  1.1 55,  et  non  pas 
1,39  3  Y,  ce  que  donnerait  l'hvpothèse  de  M.  Aurès. 

Le  système  émis  par  M.  Oppert  a  donc  été  conlirnié  par 
les  découvertes  récentes. 

N°  XL 

LETTRE  DE   M.   GEFFROV,  DIRECTEUR  DE   L'ÉCOLE  FRANÇAISE  DE   ROME. 

(SÉARCE   DU    a  a    MARS    1  889.  ) 

Monsieur  le  Président  et  cher  confrère, 

Si  je  ne  vous  ai  adressé  aucune  lettre  depuis  quelques 
semaines,  depuis  ma  visite  au  nouveau  musée  installé  dans  la 
Villa  (li  Papn  Giulio,  où  sont  exposées  les  antiquités  falisques; 
ce  n'est  pas,  vous  pouvez  le  penser,  que  les  découvertes  ici 
fassent  défaut,  c'est  que,  bien  plutôt,  elle  se  multiplient  de 
telle  sorte  que  le  temps  manque  à  les  suivre  et  à  les  décrire. 

Les  fouilles  du  P.  Germano  sous  la  basilique  des  saints  Jean 
et  Paul  ne  sont  sans  doute  pas  terminées,  et  il  peut  y  avoir 
encore  quelque  partie  de  la  maison  antique  à  découvrir.  Les 
travaux  étaient  du  moins  assez  avancés  au  commencement  de 
ce  mois  pour  qu'une  cérémonie  religieuse,  suivie  d'une  con- 
férence de  M.  de  Rossi,  convoquât  une  nombreuse  assistance. 
Il  v  a,  en  somme,  sept  chambres  ornées  de  peintures.  Les 


—   118  ~ 

plus  aiicieiiiies  dalciit  de  la  fin  du  second  ou  du  comtnence- 
ment  du  m*  siècle;  elles  décorent  la  chambre  principale,  pro- 
bablement le  tablinum  de  la  maison  antique.  C'est  là,  pendant 
la  matinée  du  8  mars,  que  près  de  cent  personnes  se  trou- 
vaient réunies.  Ces  peintures  ont,  pour  la  première  fois, 
fourni  la  preuve  que  les  représentations  symboliques  si  fré- 
quentes dans  les  Catacombes  se  rencontraient  aussi  dans  les 
habitations  privées:  il  y  a  ici,  outre  l'Orante,  Moïse  montant 
au  Sinaï,  le  Bon  Pasteur  et  les  Brebis,  etc.  Les  peintures  des 
autres  chambres  sont  du  iv"  et  puis  du  xf  siècle,  celles-ci 
d'apparence  toute  byzantine. 

Nous  avons  bien  des  fois  visité  les  fouilles  du  forum  d'Au- 
guste. Elles  ont  commencé  dès  le  9  janvier  sous  la  direction 
de  M.  Rodolphe  Lanciani.  Quelques  jours  aj)rès,  on  atteignait 
le  sol  antique,  à  une  profondeur  de  6'"5o.  Le  mur  immense 
qui,  s'inlléchissant  en  arc  de  cercle,  continue  YArco  dei  Pan- 
tani,  est  maintenant  découvert  [)resque  en  entier  sur  une  hau- 
teur de  122  mètres.  L'Académie  connaît  déjà  les  deux  impor- 
tantes inscriptions  découvertes  en  février  :  l'une  qui  est  un 
hommage  de  la  Bétique  à  Auguste,  la  pierre  inscrite  servant 
de  base  à  un  présent,  peut-être  un  vase  d'or  massif  pesant 
cent  livres;  la  seconde,  qui  est  une  dédicace  à  l'empereur  INi- 
grinianus,  dont  les  médailles  sont  si  recherchées,  et  qu'on  ne 
savait  pas  neveu  de  Carus.  Les  derniers  jours  ont  donné  en 
outre  une  inscription  relative  à  Appius  Claudnis  Cœcits.  Les 
eaux  du  sous-sol,  la  mauvaise  saison  et  la  masse  énorme 
de  terre  à  enlever  ont  arrêté  les  progrès  des  fouilles,  qui 
vont  devenir  sans  doute  plus  faciles  et  plus  productives.  On  a 
lieu  d'espérer  de  plus  qu'elles  vont  pouvoir  s'étendre  sous  le 
couvent  voisin,  jusqu'à  présent  fermé  à  toutes  les  recherches. 

Un  décret  royal  en  date  du  7  février  dernier  institue  dans 
Rome  un  Musée  national  qui  contiendra,  systématiquement 
ordonnés,  les  objets  d'antiquité  provenant  de  Rome  ou  de  la 


—  ll'J  — 

province  du  Huiikj.  On  y  joindra  les  objets  trouvés  en  Onibrie, 
jusqu'à  ce  que  cette  dernière  province  j)Ossèdc  un  Musée  na- 
tional. Le  Musée  nouvellement  institué  conq)rendra  deux  sec- 
lions.  Celle  des  antiquités  urbaines  aura  son  siège  aux  Tbermes 
de  Diodétien,  qui  vont  être  appropriés  à  cet  usage,  et  où  se 
trouvent  déjà  les  trois  belles  statues  de  bronze  trouvées  à  Home 
dans  ces  dernières  années,  et  les  magnifiques  restes  de  la  mai- 
son romaine  découverte  il  y  a  neuf  ans  sur  les  bords  du  Tibre, 
en  avant  de  la  Farnésine.  La  section  des  antiquités  extra-ur- 
baines aura  son  siège  dans  la  Villa  di  Papa  Gm//o  jusqu'à  ce 
que  le  futur  Musée  des  Tbermes  de  Dioclétien  soit  préparé 
pour  la  recevoir.  L'Académie  se  rappelle  que  c'est  dans  la 
Villa  di  Papa  Giulio  qu'est  déjà  installé  le  nouveau  Musée 
falisque  si  babilement  disposé  par  les  soins  de  M.  le  professeur 
Barnabei.  Le  décret  royal  du  7  février  contient  en  outre  les 
dispositions  suivantes  : 

«Art.  3.  Fera  partie  du  Musée  la  collection  de  moulages  et 
d'objets  destinés  aux  exercices  pratiques  de  l'Ecole  d'arcbéologie. 

ç^Art.  à.  Les  diverses  collections  désignées  ci-dessus  seront 
soumises  à  une  seule  et  même  direction,  et  dépendront  d'un 
seul  et  même  bureau  administratif. 

tt  Art.  5.  A  chacune  des  deux  sections  du  Musée  seront  ad- 
jointes des  archives  contenant  tous  les  documents  relatifs  à 
l'histoire  des  découvertes,  journaux  de  fouilles,  plans  et  reliefs 
topographiques,  dessins,  photographies  et  calques  des  inscrip- 
tions ne  faisant  pas  partie  des  collections  officielles. 

«Art.  6.  Le  Ministère  de  l'instruction  publique  rappellera 
les  particuliers  aussi  bien  que  les  administrations  locales  à 
l'entière  observation  des  règlements  en  vigueur  dans  la  pro- 
vince de  Rome  et  en  Ombrie  concernant  les  fouilles  archéo- 


—   120  -- 

logiques,  et  notamment  à  l'oLliijalion  de  déclarer  toute  dé- 
couverte fortuite,  et  à  celle  de  ne  pratiquer  aucune  fouille 
qu'en  se  conformant  à  ces  mêmes  règlements. 

«Art.  7.  Le  Musée  préhistorique  et  le  Musée  Kircher  con- 
tinueront à  avoir  leur  direction  et  leur  administration  propres 
dans  l'ancien  Collège  romain.  Pourront  être  détachés  du 
Musée  Kircher  pour  être  réunis  aux  collections  du  Musée  na- 
tional les  objets  ayant  une  relation  étroite  avec  les  séries  du 
nouvel  établissement.  » 

L'institution  d'un  musée  central  à  Rome  indépendant  des 
anciens  et  célèbres  musées  d'une  telle  ville,  et  destiné  à  rece- 
voir les  objets  d'antiquité  découverts  depuis  1870,  la  part 
respective  de  contribution  de  l'Etat  et  du  municipe  romain 
dans  une  telle  œuvre,  la  construction,  la  dépense  d'un  édifice 
répondant  à  un  tel  but,  ce  sont  là  des  questions  qui  ont  été 
agitées  sans  cesse  à  Rome  depuis  dix  années,  et  auxquelles  le 
décret  royal  du  7  février  n'apporte  pas  encore  une  solution 
définitive. 

Les  fouilles  d'Ostie,  que  dirige  aussi  l'infatigable  M.  Rod. 
Lanciani,  sont  chaque  jour  plus  intéressantes.  Une  caserne 
pour  six  cents  vigiles  est  découverte,  avec  des  inscriptions 
nombreuses  montrant  une  assimilation  ou  une  connexité  fré- 
quente entre  des  fonctions  civiles  et  des  grades  mililnires.  Les 
Notizie  (legli  scavi  donneront  incessamment  tous  ces  textes.  Une 
vaste  salle  de  l'édifice  contient  un  autel  et  un  large  suggesUis  ou 
sont  placés  régulièrement  d'autres  autels  dédiés  à  divers  em- 
pereurs et  impératrices.  On  serait  en  présence  d'un  Augtisleuîn. 

Le  court  résumé  des  Nolizic  dcgli  scavi  pour  le  mois  de  fé- 
vrier, lu  hier  dans  la  séance  ordinaire  et  publique  de  l'Aca- 
démie des  Lincei  par  M.  le  sénateur  Fiorelii,  président,  an- 
nonce que  des  fouilles  sont  eji  ce  moment  pratiquées  dans 
le  domaine  de  Vulci,  appartenant  au  prince  Torlonia.  Il  est 


1L>1    — 


dit  que  cette  ndcrnpolo  étrusque  a  été  j)lusieurs  fois  dans  ce 
siècle  activement  fouillée,  mais  que  les  nouvelles  recherches, 
conduites  suivant  une  sag<;  méthode,  livrent  des  informations 
utiles  pour  ré-didc  architor(urale  des  tomhos  et  pour  la  topo- 


graphie. 


J'aurai  à  entretenir  ultérieurement  TAcadénne  de  ces  fouilles 
étrusques,  auxquelles  l'Ecole  française  de  Rome  prend  une 
part  très  active.  J'aurai  à  lui  rendre  compte  aussi  de  fouilles 
opérées  en  Corse  par  un  des  membres  de  ri'>ole. 

Veuillez  agréer,  etc. 

A.   GeFP'ROV. 

N°  Xll. 

LETTRE  DE  M.    SALOMON   REINACH  À   M,  ALEXANDRE   BERTRA>'D. 
SUR    UNE  INSCRIPTION  GRECQUE  TROUVEE  À   NOTIUM.  PRES  DE   COLOPHON. 

(séance    du    29  MARS    l88().) 

Saint-Germain,  a8  mars  1889. 

Monsieur  et  cher  maître, 

Peut-être  trouverez-vous  à  propos  de  connnuniquer  à  l'Aca- 
démie une  courte  inscription  grecque,  conçue  dans  un  al- 
phabet archaïque,  dont  un   estampage  m'a    été  envoyé   par 

,(î,VOt;,,^, 

o  c> 

-^  -h 


o 


M.   Démosthène    Baltazzi.   directeur   des  Antiquités    dans  le 
vilayet  d'Aïdin.  Elle  est  gravée  sur  le  goulot  d'un  vase  en  bronze 


12'2  


découvert  à  Notium,près  de  Coloplion.  qui  se  trouve  aujour- 
d'hui à  Smyrne  dans  la  collection  de  M.  Van  Lennep. 

Le  fac-similé  de  la  page  précédente  a  été  exécuté  en  cal- 
quant l'estampage  original  au  ])apier  noir;  il  est  donc  d'une 
rigoureuse  exactitude. 

Nous  ne  possédons  encore  qu'un  petit  nombre  d'inscrip- 
tions archaïques  provenant  de  la  côte  d'Anatolie;  celie-ci  est 
la  première  que  l'on  connaisse  de  Notium.  Mais  il  est  probable 
qu'elle  n'y  a  pas  été  gravée.  En  effet,  la  forme  du  X  est  celle 
qui  caractérise  le  groupe  d'alphabets  d'il  occidental  \)ai'  M.  Kirch- 
hoff  (Eubée,  Ghalcis,  Béotie,  Péloponnèse).  On  conçoit 
qu'un  vase  de  bronze,  objet  d'un  transport  facile,  puisse  avoir 
été  introduit  par  le  commerce  à  Notium,  cité  éoliennc,  voi- 
sine de  Coloplion  ^''.  La  lettre  P  avec  boucle  angulaire  a  été 
gravée  par  erreur  de  gauche  à  droite,  alors  que  toutes  les 
autres  lettres  sont  gravées  de  droite  à  gauche,  l'inscription 
étant  rétrograde. 

La  lecture  cl  le  sens  ne  présentent  pas  de  difficultés  : 

C'est  le  vase  qui  est  censé  décliner  le  nom  de  son  posses- 
seur, Olympichos,  fils  de  Philophron.  On  peut  en  rapprocher 
l'inscription    du    célèbre    lécythe   de    Cumes  :    Taxa/jjs   slfA 

L'écriture  rétrograde  de  notre  texte  et  la  forme  du  2  à 
branches  très  divergentes  ne  permettent  pas  de  le  faire  descendre 
plus  bas  que  le  commencement  du  v"  siècle  avant  J.-C;  on 

'"'  Si  riiypolhèso  du  transport  rl'nn  vase  do  bronze  ne  se  présentait  pas  si 
facilement  à  l'esprit,  rinscription  que  nous  publions  serait  de  la  pins  haute 
importance  ponr  la  connaissance  de  l'alpliabel  éolien,  car  M.  Kirchhoff  lail  ex- 
pressément ressortir  que  nous  ne  savons  pas  encore  avec  certitude  par  quel 
signe  les  Eoliens  rendaient  le  X  {Studien  zur  Gpschichie  de.t  irriechischeit  Alplta~ 
bets,  /redit.,  p.  .^)8).  Il  faut  remarquer  d'ailleurs  que  Tinscriplion  du  vase  de 
Notium  n'est  pas  conçue  dans  le  dialocte  éolien. 


■_>:i  — 


ne  doit  pas  non  pins  le  phicrr  ;'i  une  ("pcKine  plus  ancif'niif, 
rar  la  forme  do  l'E  est  (IrJM  (•clic  de  r('|)()(|iii'  rlassifpic 
Af^^n'fV.  «'te. 


S.  1 


»KiN\(;ii. 


N'^  xm. 

UNE  BAGUE  BYZA>T1NE  DU  x"  SIECLE,  APPARTENANT  À  M.  LE  BARON  PICHON  , 
PAR   M.  CISTWE  SCIILUMBERGER. 

(séance  ni;  5  avril  i88g.) 

Je  ferai  passer  sous  les  yeux  de  mes  confrères  un  précieux 
et  bien  intéressant  échantillon  de  l'orfèvrerie  byzantine  du 
x"  siècle  environ.  C'est  un(î  magnifique  bague  de  mariage 
partenant  à  M.  le  baron  Pichon,  qui  a  bien  voulu  m'autorise 
à  la  communiquer  à  l'Académie,  (le  bijou  d'or  massif  ])orte 
quatre  inscriptions  finement  gravées  et  diverses  scènes  dont 
les  figures,  taillées  dans  le  iiiélal.  sont  remplies  d'un  émail 
bleuâtre. 


ai)- 
r 


Le  chaton  est  de  forme  circulaire  à  circonférence  découpée 
en  huit  lobes  dont  quatre  plus  grands  et  quatre  plus  petits. 
Dans  le  champ  figurent  quatre  personnages  :  à  savoir,  le 
Christ  et  la  Vierge,  bénissant,  le  premier  un  personnage  du 
sexe  masculin,  la  seconde  une  femme.  Les  nimbes,  les  vêle- 
ments, les  contours  des  visages,  etc.,  sont  indiqués  par  de 
l'émail.  Au-dessous  de  cette  scène  on  lit  le  mot  OMONYA 
(ô/!jto»^o<a,  et  accorda),  qui  indique  bien  qu'il  s'agit  là  d'une  bague 
de  mariage.  Sur  la  tranche  du  chaton  enfin  court  rinscrij)tion 
assez   incorrecte  :    +    Kvpis  S,o->iBti   rovs  SovXoi?    crov   TleTç>ov 


—  12/1  — 
Hcti  B-soSoTiç,  Seimieur,  'prête  secouru  à  tes  serviteurs  Pierre  et 


+  Kvpi€   BOHeiT  ovc  t^yA»ccov  nsTpyseeo&oTie 

Théodola.  Nous  avons  ià  les  noms  des  deux  époux.  Ce  devaient 
être  des  personnages  de  fort  haut  rang,  vu  l'importance  ex- 
ceptionnelle de  ce  joyau.  Malheureusement  il  m'a  été  impos- 
sible de  les  identifier. 

L'anneau  est  à  huit  pans,  dont  un  soudé  au  chaton.  Les 
sept  autres  portent  chacun  une  représentation  d'un  sujet  de 
l'Évangile,  autrement  dit  chacun  une  fête.  Voici  ces  fêtes  en 
commençant  par  la  droite.  Les  personnages  sont  indiqués  en 
émail  : 

L'Annonciation.  Marie,  filant  de  la  laine  dans  une  corbeille, 
écoute  l'ange  qui  lui  parle.  ^ 

La  Visitation.  Marie  et  Elisabeth  s'embrassent  au  milieu 
d'arbres  désignant  un  jardin. 

La  Nativité.  Marie  et  l'enfant  Jésus  couchés,  l'une  sous  la 
crèche,  l'autre  dans  son  berceau;  au-dessus  de  Marie,  deux 
têtes  de  bétail. 

La  Présentation  au  Temple,  ce  que  les  Grecs  appellent  la 
Rencontre,  Marie,  portant  son  fils,  le  présente  h  Siméon. 

Le  Baptême.  Le  Christ  est  plongé  dans  l'eau.  Saint  Jean 
le  baptise.  Au-dessus  de  lui  le  Saint-Esprit.  En  face  de  saint 
Jean  un  ange. 

Ecce  liomo.  Le  Christ  dans  une  longue  robe,  tenu  par  deux 
soldats  romains  coiffés  du  casque,  vêtus  d'une  courte  tunique. 

Les  Saintes  Femmes.  L'angf  devant  les  saintes  femmes  age- 
nouillées dans  un  jardin. 

Cette  suite  fait,  on  le  voit,  mémoire  de  l'incarnation  du 
Christ,  de  sa  manifestation,  de  sa  passion,  de  sa  résurrection. 

Sur  les  côtés  de  la  tranche  de  l'anneau  on  lit  les  deux  por- 
tions -du  97'  verset  du  chapitre  xiv  de  l'Evangile  de  saint 
Jean  : 


—  \'l:^  — 

«Jo  vous  laisse  ma  paix,  je  vous  donne  ma  paix»,  elpti'vtiv 
d(pivfxi  vii7v,  eipvvriv  7ijv  êfxtîv  SiScoixi  v(J.7v. 

ï/insciiption  est  assez  incorrectement  reproduite  :  +  sipivtjv 
Ttjv  sfxriv  aÇiiVfJ-V  vfxtjv  +,  +  sipvvrjv  efxriv  SriSofxe  {sic)  vntiv  +. 


+    €IPIHHHTHH€f1HHA»IHMHVM  HN^-t 
t   «lPHHHHTHH€MHHAH^OM<VMHHW*~ 

Je  ne  connais  cpi'un  seul  exemple  d'une  aussi  belle  hague 
byzantine;  c'est  un  anneau  conservé  au  Musée  de  Palerme, 
représentant  le  couronnement  d'un  empereur  et  d'une  impé- 
ratrice du  nom  d'Eudoxie.  Ce  bijou  est  également  à  huit  pans, 
sur  sept  desquels  sont  représentes  en  émail  les  mêmes  sujets 
de  l'Évangile,  avec  cette  différence  que  la  Présentation  au 
Temple  est  remplacée  par  l'Adoration  des  Mages. 


ZMl. 


26 


LIVRES  OFFERTS. 


SEANCI-:   I)U    l"   MARS. 

Sonl  offerts  : 

Pensées  et  maximes  diverses,  par  M.  ie  comte  de  Gharencey  (Paris, 
1888,111-8"); 

Actes  de  la  Société  philologique ,  tomes  XVI  et  XVII,  aniM^es  1886 
et  1887  (Alençon,  1888,  in-S"). 

M.  Georges  Perrot  offre,  au  nom  de  M.  Eugène  Miintz,  le  tome  1  de 
son  Histoire  de  l'art  pendant  la  Renaissance  (Paris,  1889,  gr.  in-8°). 

(rll  y  a  quelques  mois,  dit  notre  confrère,  j'offrais  à  l'Académie  les 
premières  livraisons  de  l'ouvrage  considérable  que  M.  Miintz  commen- 
çait à  publier,  cbez  MM.  Hachette  et  G",  sous  ce  titre  :  Histoire  de  l'art 
pendant  la  Renaissance.  L'auteur  et  les  éditeurs ,  sans  attendre  que  fût 
terminée  la  publication  par  livraisons  hebdomadaires,  ont  voulu  faire 
hommago  à  notre  bibliothèque  d'un  exemplaire  complet  de  ce  premier 
volume,  qui  a  pour  titre  :  Italie,  les  'primitifs.  Je  saisis  cette  occasion  de 
dire  que  le  mérite  de  l'ouvrage  a  encore  dépassé  l'attente  de  tous  ceux 
qui  savaient  avec  quel  trésor  d'études  préparatoires  et  de  faits  lentement 
amassés  M.  Miintz,  le  savant  conservateur  de  notre  Bibliothèque  des 
Beaux-Arts,  abordait  cette  lourde  tâche. 

frOn  ne  saurait  désormais  s'occuper  de  celte  période  sans  prendre 
comme  point  de  départ  ce  livre  si  riche  eu  renseignements,  tous  con- 
trôlés par  une  sévère  et  judicieuse  critique  et  classés  dans  un  ordre  qui 
en  rend  l'usage  facile.  L'illustration  est  à  la  fois  des  plus  abondantes  et 
des  plus  soignées.  Le  volume  contient  3 A  planches  tirées  hors  texte 
et  5i4  figures  encadrées  dans  le  texte.  Vignettes,  impression,  papier, 
tout  est  digne  de  ce  siècle  qui  fait  le  sujet  de  l'ouvrage  et  oîi,  comme 
le  montre  si  bien  l'auteur,  le  sentiment  de  l'art  était  si  vif  et  si  univer- 
sellement répandu.  Si  l'on  éprouve  un  étonnenient,  c'est  que  les  éditeurs 
puissent  donner  un  si  beau  livre  à  un  [)ri\  (]ui  permettra  à  tous  les 
amateurs  de  le  faire  entier  dans  leur  bibliothèque,  ri 

M.  G.  Perrot  offre,  en  outre,  les  n°'  i-ii,  janvier -février  1889,  du 
RuUctin  de  correspondance  hellénique  (Paris  et  Athènes,  in-8°). 

M.  VioLLKT  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

rj'ai   riiouneur  do  pr('senler  à   l'Académie,  de  la  pari  de  M.  Luca 


—  r27  — 

IJellrami,  une  publication  inliliilc'i' :  Description  de  la  ville  de  Purix  à 
l'époi/iie  (le  François  I"  (par  Albfi'l  Vijjiiali  ),  d'après  un  nxinuscril  inédit 
de  in  Bibliothhinc  nationale  de  Milan  (Milan,  1889,  iii-8"). 

ffCelle  tiescriplinn,  (pii  dalc do  1^17,  est  publi<'e  d'a|)r«js  un  niaïuiscrit 
<le  la  Biblioliièque  de  Milan;  elle  sera  accueillie  avec  reconnaissance  par 
tous  ceux  qui  s'intéressent  ii  l'histoire  de  l'ancien  Paris." 

M.  Dki.ism;  oiïre  :  Paléographie  et  diplnmatitjuc ,  [)ar  M.  le  comte  A.  de 
Boiuinont  ^  Paris,  in-8",  extrait  du  coiiiplc  rendu  des  travaux  du  (](mi>rès 
biblioffrapliitptc  international). 

ffOn  trouve  dans  ce  travail  une  intéressante  énumération  des  recueils 
et  opuscules  relatifs  à  la  paléograj)liie  et  à  la  di|»l()niati((ue.  publiés  dans 
les  dix  dernières  années,  w 

SÉAiNCK  DU   8    MARS. 

Sont  offerts  : 

Commentaire  de  Maîmonide  sur  la  Miscltnah  Seder  Tohorot ,  publié 
pour  la  première  fois  en  arabe  et  accompagné  d'une  traduction  h('braïque, 
par  M.  J.  Derenbourg,  membre  de  l'Institut.  3*  livraison  (Perlin,  1888, 

in-8°); 

Maxepia.ibi  no  apxecioriii  Pocci»,  H3,ïaBaeMbU'  IIsinepaTop- 
CKaro  Apxeo.ioniHecKOK)  KoMMiiccieio,  n°  3:  CiiôupcKiH  ^peB- 
HocTH,  ou  Matériaux  pour  serrir  à  l'archéologie  de  la  Russie,  n°  3  : 
Antii/uités  sibériennes,  par  M.  U.  RadIolV,  tome  1,  livraison  1  (Saint- 
Pétersbourg,  1888,  in-i"). 

M.  ScHLUMBERGKR  a  la  parole  pour  un  honunage: 

ffj'ai  rhonneiu'de  faire  hommage  à  l'Académie,  delà  part  de  M.  J.  De- 
laville  Le  Uoul\,  d'un  petit  travail  intitulé:  Les  joyaux  de  la  couronne 
d'Aragon  en  i3o3  (Paris,  1889,  in-iîî). 

fLe  document  publié  par  M.  J.  Delaville  F.e  Roulx  est  un  procès- 
verbal  de  dégagement,  en  1 3o3 ,  des  joyaux  de  la  couronne  d'Aragon,  que 
le  roi  Jacques  II  avait  déposés  aux  mains  des  Templiers.  Le  rôle  finan- 
cier des  Templiers  a  été  mis,  ici  même,  en  pleine  lumière  par  notre 
éminenf  confrère  M.  L.  Delisle,  M.  Delaville  Le  Roulx  apporte  un  nouvel 
et  curieux  exemple  à  l'appui  de  cette  thèse. 

tr L'inventaire  est  fort  intéressant,  deux  de  cette  époque  sont  i-ares. 
L'auteur  a  donné  une  reproduction  du  sceau  de  majesté  du  roi 
.lacques  II,  (jui  nous  montre  en  usage  les  attributs  mentionnés  dans  l'in- 
ventaire, fl 

M.    Gaston    PABrs    oiVre   à    l'Acadénue  The  end  oj  the   middle  âges. 


—  1-28  — 

Essfnjs  and  questions  in  history,  par  A.-Mary-K.   Itobinson  (M""  James 
Darmesleter)  [Londres,  1889,  gr.  in-8°]. 

ffC'est  avec  un  plaisir  particulier  que  j'offre  à  l'Académie  ce  recueil 
de  solides  et  brillants  essais.  L'auleiu-  a  récemment  échangé  le  nom 
qu'avaient  illustré  des  poésies  d'un  caractère  profondément  neuf  et  ori- 
ginal pour  celui  du  savant ,  bien  connu  de  notre  Compagnie ,  qui  avait 
fait  passer  les  beaux  vers  de  miss  Mary  Robinson  dans  la  plus  délicate  prose 
française.  On  ne  s'attendait  guère  à  voir  miss  Robinson,  après  avoir  été  le 
plus  personnel  des  poètes,  devenir  un  grave  et  impartial  historien,  et  s'en- 
fermer dans  de  sombres  archives  pour  y  troubler  la  poussière  des  chartes  et 
des  documents  du  moyen  âge.  C'est  cependant  ce  qu'elle  a  fait  avec  un 
courage,  une  suite  et  un  sérieux  que  lui  envieraient  bien  des  travailleurs 
qui  ne  sont  ni  jeunes,  ni  femmes,  ni  poètes.  Après  avoir  rêvé  d'écrire  une 
histoire  des  Staufen,  —  à  laquelle  appartiennent  encore,  études  pour 
un  monument  abandonné  par  l'architecte,  les  premiers  articles  de  ce 
volume,  —  elle  s'est  proposé  de  nous  donner  une  histoire  des  Français  en 
Italie  aux  xv'  et  xvi'  siècles,  dont  nous  avons  ici  quelques  chapitres  sous 
une  forme  qui  n'est  pas  définitive.  Nul  n'est  plus  apte  à  exécuter  cette 
grande  œuvre,  pour  laquelle  il  faut  autant  de  talent  que  de  science;  nul 
ne  s'y  est  mieux  préparé.  Elle  a  exploré  particulièrement  les  archives  et 
les  bibliothèques  de  France  et  d'Italie;  elle  s'est  pénétrée,  grâce  au  don 
de  sympathie  que  les  poètes  possèdent,  de  l'esprit  des  deux  peuples  si 
divers  que  mit  en  présence,  sur  le  plus  beau  des  théâtres,  ce  long  drame 
aux  actes  multiples,  aux  scènes  tour  à  tour  grandioses,  splendides  ou 
sanglantes;  elle  eu  a  démêlé  les  obscures  origines,  elle  en  suit  d'un  libre 
et  clair  regard  les  conséquer)ces  encore  vivantes.  On  ne  s'étonne  pas  de 
voir  apparaître  sous  ses  doigts,  toutes  fraîches  et  parlantes,  les  figuies 
de  Jean-Galéas  Visconti,  de  Valentine,  de  Louis  d'Orléans,  du  pauvre 
Charles  VI;  on  s'attend  h  voir  se  modeler  avec  vigueur  celles  de  Ludovic 
Sforce,  de  Louis  XII  et  des  autres.  On  est  plus  surpris  de  la  voir  dé- 
brouiller, grâce  à  de  longues  recherches  et  à  l'aide  de  documents  nom- 
breux déchiffrés  par  elle  souvent  pour  la  première  fois,  l'obscure  ques- 
tion des  prétentions  de  la  maison  d'Orléans  sur  le  Milanais,  ou  les 
intrigues  compHquées  qui  à  diverses  reprises  donnèrent  et  enlevèrent  Pise 
à  la  France.  L'époque  dont  M'"'  Darmestetei'  a  entrepris  l'histoire  occupe 
ncluellemeiît  en  France  et  en  Italie  plus  d'un  travailleur;  son  livre  pro- 
ifitera  de  toutes  leurs  lecherches  et  elle  les  conqjléicra  pai-  colles  qu'elle 
ne  se  lasse  pas  de  poursuivre.  Aussi  peut-on  en  former  le  plus  heureux 
pronostic,  et  doit-on  souhaiter  t|ue  re  grand  monument,  élevé  au  glo- 


—   121)  — 

lieux  |)assé  de  noire  pays  pnr  les  mains  les  plus  aniifscl  en  intime  temps 
les  plus  habili'S,  ne  larde  pas  à  sorlir  des  fondalions.  Un  allcndant,  <»n 
lira  avec  le  plus  \ir  |)laisii-  les  éludes  réunies  ici  sous  un  lilre  qui  déroule 
un  peu,  mais  <pi(^  l'auleui^  juslide —  ou  sacrilic  —  avec  une  parfaile 
bonne  {^râce.  Les  savants  y  recueilleront  des  laits  inédits  et  dos  vues  d'un 
grand  intérêt;  les  lecteurs  ordinaires  seront  ravis  de  trouver  tant  de 
notions  précises  et  nouvelles  présentées  dans  le  style  à  la  fois  le  plus 
simple,  le  plus  facile  et  le  plus  exquis." 

M.  Delisle  oITre  à  la  Compagnie  deux  ouvrages  : 

1°  Liber  diuriius  lloinanonim  pontificnm.  Ex  unico  codice  Vattcano  denuo 
edidtt  Th.  e.  ah  .SVde/  (Vienne,  1 889,  petit  in-Zi"). 

rr  Notre  savant  correspondant  M.  le  professeur  Théodore  de  Sickel  m'a 
fait  riionneur  de  me  charger  de  présenter  en  son  nom  h  l'Académie 
l'édition  qu'il  vient  de  faire  paraître  du  Liber  diurnus.  Cette  mission 
semblait  devoir  revenir  à  notre  confrère  M,  de  Rozière,  dont  le  nom 
restera  loujouis  attaché  à  un  document  qu'il  a,  à  vrai  dire,  le  premier 
mis  en  lumière.  Je  ne  regrette  pas  toul(;fois  d'avoir  été  désigné  pour 
i-omplir  cette  tâche.  M.  de  Rozière  n'aurait  guère  pu  dire  en  quelle 
estime  son  travail,  déjà  vieux  de  vingt  ans,  est  tenu  par  le  nouvel 
éditeur. 

ffLe  Lihcr  diurnus,  qui  est  le  plus  ancien  formulaire  connu  de  la 
chancellerie  pontificale,  nous  a  été  transmis  par  deux  manuscrits,  l'un 
jadis  conservé  à  Paris  au  collège  de  Clermont  et  disparu  «le[)uis  un 
siècle,  l'autre  recueilli  au  xvu"  siècle  dans  la  bibliothèque  de  l'abbaye 
cistercienne  de  Sainte-Croix  à  Rome,  et  passé  probablement  eu  1798  ou 
1799  dans  les  archives  secrètes  du  Vatican. 

ff  Deux  éditions  du  Liber  diurnus  furent  imprimées  au  .wii'  siècle,  l'une 
par  Holslenius  d'après  le  manuscrit  de  Rome,  l'autre  par  le  V.  Garnier 
d'après  le  manuscrit  de  Paris.  L'une  et  l'autre  laissaient  beaucoup  à 
désirer,  et  les  exemplaires  de  la  première  furent  supprimés  avant  même 
que  l'impression  en  fût  terminée.  Divei'ses  tentatives  furent  faites  au 
xvii'  et  au  .wni'  siècle  pour  donner  un  texte  fidèle  et  complet  du  Liber 
diurnus.  Elles  n'aboutirent  (|u  à  de  médiocres  résultats. 

rr  L'honneur  de  |)ubiiei'  la  première  bonne  édition  du  Liber  diurnus 
était  réservé  à  M.  de  Rozière.  Notre  confrère  ne  put  cepemlant  pas 
atteindre  la  perfection  qu'il  avait  rêvée.  A  son  grand  regret,  il  ne  put 
pas  examiner  le  manuscrit  de  Rome,  le  seid  qui  existe  aujourd'hui  et 
qui  jusqu'à  ces  derniers  lenq)s  était  soustrait  à  la  légitime  curiosité  des 
savants.  Mieux  servi  par  les  circonstances.  M.  de  Sickel  a  pu  à  loisir 


—   130  — 

étudier  le  manuscrit  dans  les  plus  menus  détails,  et  faire  compléter  et 
contrôler  ses  observations  par  des  disciples  expérimentés. 

rrLa  nouvelle  édition  repose  donc  sur  une  base  solide,  et  M.  de 
Sickel,  avec  des  ressources  qui  avaient  manqué  à  ses  devanciers,  a  pu 
reprendre  la  discussion  des  didiciles  problèmes  que  soulève  le  Liber 
(Humus.  Il  est  arrivé  à  peu  près  aux  mêmes  conclusions  que  M.  de  Ro- 
zière  sur  l'usage  qui  a  été  fait  du  célèbre  formulaire  depuis  le  ix°  siècle 
jusqu'au  XI^  et  sur  l'autorité  dont  il  jouissait  alors  à  la  cour  pontificale. 
Il  émet  une  opinion  nouvelle  sur  la  date  de  la  composition ,  qu'il  place 
aux  environs  de  l'année  800;  par  des  raisonnements  ingénieux,  mais 
qui  n'en  paraissent  pas  moins  très  vraisemblables,  il  a  essayé  de  démon- 
trer que  le  recueil  ne  forme  pas  im  tout  homogène  et  qu'il  y  faut  dis- 
tinguer des  morceaux  ajoutés  après  coup  et  à  diverses  reprises. 

'«•Indépendamment  du  mérite  de  ces  observations,  la  nouvelle  édition 
du  Lihcr  diurnus  se  reconnnande  par  l'exactitude  à  la  fois  scrupuleuse  et 
intelligente  avec  laquelle  a  été  reproduit  le  maïuiscrit  du  Vatican  et 
par  des  efforts  souvent  très  heureux  pour  retrouver  les  leçons  que  portait 
le  manuscrit  du  collège  de  Clermont.  C'est  une  publication  très  impor- 
tante pour  l'histoire  du  gouvernement  pontifical  et  pour  la  critique  des 
documents  émanés  de  la  chancellerie  des  papes  à  l'époque  carlovin- 
gienne.  " 

9°  La  captivité  et  la  mori  de  Duhouvg  dans  In  cage  de  fer  du  Monl-Saint- 
Michel ,  par  E.  de  Robillard  de  Beaurepaire  (Caen,  1889,  in-8°). 

ffLa  dissertation  de  M.  E.  de  Beaurepaire  nous  fournit  un  exemple  de 
la  facilité  avec  laquelle  les  légendes  se  forment  même  sur  des  événements 
à  peu  près  contemporains.  Dubourg  est  représenté  dans  beaucoup  d'écrits 
comme  une  victime  du  gouvernement  tyrannique  de  f.onis  \1V.  Or  il 
est  établi  par  les  documents  les  plus  authentiques  que  Dubourg  était  né 
en  1715,  et  que  ce  fut  en  ly/iB  qu'il  fut  emprisonné  au  Mont-Saint- 
Michel.  M.  de  Beaurepaire  a  exposé  en  1861  toutes  les  circonstances  de 
son  arrestation  et  de  sa  captivité,  ce  qui  n'a  pas  empêché  la  fausse  légende 
de  continuer  à  faire  son  chemin;  elle  est  répétée  tous  les  jours  par  les 
guides  qui  montrent  aux  visiteurs  les  curiosités  du  Mont-Saint-Michel. 
M.  de  Beaurepaire  ne  se  fiatte  pas  de  faire  accepter  par  le  public  les  rec- 
tifications irréfutable^  qu'il  vient  de  présenter  sous  une  forme  nouvelle.  Le 
principal  résultat  qu'il  croit  avoir  obtenu ,  c'est  de  montrer  que  les  légendes 
\es  plus  fausses  ont  parfois  une  singulière  et  merveilleuse  vitalité.') 

M.  Delisle  présente  en  outre,  de  la  part  de  l'auteur,  M.  l'abbé 
A.Fabre,  un  Lexique  de  la  langue  de  CJiapelain  (Paris,  1889,  in-8°). 


—   131   — 

M.  ScHEKKR  fait  lioiniua^rc  à  l'Acadt-uiie,  au  nom  de  M.  Ed.-C  Sa- 
cliaii,  membre  de  l'Académie  de  Berlin,  do  la  liadiictioii  du  tableau  de 
riiide  d"AI>ou  Hfilian  el-liii'oiiny,  doiil  lo  lexle  aiabe  u  6ié  publié  il  y  a 
dt'.ux  ans.  Cietle  intductioii  est  iiililuléo  :  A/ùentni'.s  ludia.  An  En^lish 
édition,  rvith  noies  and  indices  (Lrjiulres,  1888,  2  vol.  in-8''). 

•M.  Sacluui  a  lail  |>iira!trt;,  il  y  a  déjà  (|uelques  années,  le  texte  et  la 
traduction  <le  l'important  traité  de  cbronolog'ie  auquel  Birouny  a  donné 
le  litre  de  Vestiges  des  siècles  passés  subsislanl  encore.  Birouny,  né  en 
l'année  978  de  noire  ère,  dans  un  village  des  environs  de  la  capitale  du 
kbarezm.  avait  ('lé  l'un  des  conseilli'rs  du  deiiiier  prince  de  la  dynastie 
de  Mamouii,  renversée  par  le  sullan  Mabmoiid  le  Ghaznévide.  Em- 
mené à  Gbaznab,  il  s'y  livra  à  des  travaux  scienlifiques  et  il  pénétra  dans 
l'Inde  à  la  suite  des  armées  du  sulUui  Mabmoud.  Il  résida  lort  proba- 
blement à  Malboura  et  à  Canodje,  où  il  étudia  le  sanscrit  et  les  dialectes 
du  nord  de  l'Inde.  Il  traduisit  en  arabe  le  Pulundjuli ,  au(piel  il  conserva 
son  nom;  cet  ouvra^^e  a  élé  mis  à  conlriliution  par  le  vizir  Uechid  Eddiu 
pour  la  composition  de  son  grand  ouvrage  bistorique.  Mais  de  toutes  les 
œuvres  de  Birouny,  la  plus  importante  est,  sans  contredil,  l'ouvrage 
qu'il  a  consacré  à  l'exposition  des  croyances  religieuses,  des  idées  philo- 
soj)hiques  des  Indiens,  h  leui-s  systènies  d'astronomie  et  d'astrologie,  à 
leui-s  connaissances  bistoriques  et  géograpbiques,  à  leurs  lois  et  à  leurs 
coutumes.  Cet  ouvrage,  divisé  en  quatre-vingts  chapitres,  a  été  acbevé  à 
Gbaznab  en  l'année  1029  «le  noire  ère.  Je  ne  m'élendrai  pas  sur  le  mé- 
rite de  la  traduction  d  un  texte  qui  présente  les  plus  sérieuses  ibtlicultés. 
Je  ferai  cependant  remarquer  que,  dans  une  excellente  préface,  M.  Sa- 
cbau  a  réuni  les  quelques  renseignements  qu'il  a  pu  recueillir  sur  la  vie 
de  l'auteur,  sur  le  plan  qu  il  a  suivi,  sur  les  sources  auxquelles  il  a  puisé. 
Je  signalerai  surtout  les  di-lails  donnés  sur  la  conuaissanc«^  que  les  Arabes 
ont  eue  des  Iraiti's  scienliliques  et  littéraires  des  Indiens  et  sur  les  tra- 
ductions qui  en  ont  élé  faites  et  qui  ont  été  répandues  dans  le  monde 
musulman.  Une  série  dénotes  très  savantes,  consacrées  à  l'éclaircissement 
du  texte,  sont  placées  à  la  fin  de  la  traduction.  Dans  un  mémoire  lu  à 
l'Académie  en  18/19,  j\I.  Ueinaud  avait  signalé  l'importance  »le  l'ouvrage 
de  Birouny.  La  traduction  faite  par  M.  Sacbau  le  lait  connaître  dans  son 
entier,  et  il  s'est,  par  cette  publication,  acquis  de  nouveaux  litres  à  l'es- 
time du  monde  savant,  r 

SÉANCE    UL'    1  5    MARS. 

Est  oflerl  : 

Supplemenlanj  report  0/  llic  Commitire  appoiitted  lo  constder  an  inter- 


—  132  — 

national  Imiguage ,  read  before  the  American  Philosophical  Society ,  Dec.  y, 
1888  (in-8"). 

M.  Georges  Perrot  présente  un  ouvrage  intitulé  :  Le  trésor  de  Pétrossa. 
Historique.  Description.  Etude  sur  l'orfèvrerie  antique,  oxxwa^e  publié  sous 
les  auspices  de  Sa  Majesté  le  roi  Charles  I"  de  Roumanie,  par  A.  Odo- 
besco,  tome  I  (Paris,  1889,  in-/i°). 

«Parmi  toutes  les  antiquités  qui  ont  été  récemment  ramenées  au  jour, 
—  qu'elles  proviennent  de  fouilles  faites  à  dessein  ou  qu'elles  aient  été 
retrouvées  par  le  pur  effet  du  hasard ,  —  il  en  est  peu  qui,  par  leur  ori- 
gine et  par  leur  caractère  artistique,  offrent  un  plus  grand  hitérél  que 
cette  collection  de  vases  et  de  bijoux  en  or,  qui  a  été  découverte ,  en  1887, 
par  d'obscurs  paysans  roumains,  dans  une  des  ramifications  les  plus  igno- 
rées des  Carpathes. 

frLe  poids  et  la  richesse  de  la  matière,  la  profusion  des  pierreries,  les 
détails  de  l'ornementation,  la  forme  originale  de  chacune  des  pièces, 
l'aspect  bizarre  des  figures  et  des  caractères  gravés  sur  deux  d'entre 
elles,  tout  concourt  à  faire  du  trésor  de  Pétrossa  une  œuvre  pour  ainsi 
dire  unique  dans  l'hisloii-e  de  l'art.  C'est  un  véritable  monument  d'or- 
fèvrerie antique,  qui  se  dislingue  aussi  bien  de  tout  ce  que  nous  a  légué 
la  civilisation  grecque  ou  romaine  que  des  productions  si  intéressantes 
et  si  curieuses  du  moyen  âge. 

ffA  l'origine,  ce  trésor  se  composait  de  vingt-deux  pièces,  d'un  très 
grand  poids  et  d'une  très  grande  richesse  d'ornements.  Dix  de  ces  pièces 
ont  péri;  les  douze  autres,  les  seules  qui  subsistent  aujourd'hui,  repré- 
sentent, quoique  fortement  endommagées,  plus  de  60,000  francs  d'or. 
On  ne  trouvera ,  dans  le  volume  que  nous  avons  sous  les  yeux ,  que  la 
description  de  trois  pièces,  sur  les  douze  qui  existent.  C'est  que,  dans 
son  désir  de  mettre  ces  joyaux  à  la  place  qui  leur  appartient  dans  le 
développement  de  l'art,  M.  Odobesco  a  été  entraîné  à  étudier  tous  les 
objets  similaires  dont  l'antiquité  nous  a  laissé  des  modèles  ou  sur  les- 
quels elle  nous  a  transmis  des  documents,  et  voilà  comment  ce  qui  ne 
devait  être  d'abord  que  la  description  exacte  d'un  groupe  d'objets  est 
devenu,  comme  l'indique  le  sous-titre  donné  à  l'ouvrage,  une  Etude  sur 
t orfèvrerie  antique,  l'histoire  la  plus  complète  que  nous  possédions  de 
ses  procédés  et  des  types  qu'elle  a  mis  en  œuvre.  Ce  sont  les  plateaux  elles 
anneaux  que  l'auteur  éludie  dans  ce  premiei-  volume ,  après  avoir  raconté  la 
découverte  du  trésor,  cité  toutes  les  publications  et  mentions  dont  il  a  été 
l'objet,  puis  discuté  les  opinions  qui  ont  été  émises  sur  son  origine  et  sa 
date.  Les  nouf  autres  pièces  sont  réservées  pour  les  volumes  suivants. 


—  133  — 

rfl'ersoiuic  ne  pont  sonjrer  à  se  plaiiuliv  (|iie  la  nuiniliceiicf!  royale  ail 
i'ouini  à  M.  Odobesco  les  moyens  d'étendre  ainsi  son  plan  piiniitif  et  de 
nous  donner  les  prémices  d'un  si  beau  livre,  qui  témoijjne  de  si  vastes 
recherches;  on  ne  peut  qu'exprimer  une  crainte,  c'est  que,  malgré  la 
curiosité  j)assionnée  de  ranicur  et  son  ardeui-  au  travail,  Ifs  forces  ne 
lui  niaii(|uent  avant  cpi'il  ait  pu  achever  une  œuvre  eulreprise  dans  de 
telles  proportions.  Pour  ne  pas  la  laisser  interrompue,  peut-être  a{rirai(-il 
prudemment  en  la  resserrant  un  peu,  en  s'arran^rcant  pour-  terminei-. 
avec  le  second  volume,  la  description  du  trésor.  Il  lui  serait  loisible  de 
reprendre  ensuite,  dans  une  série  de  mémoires  spéciaux,  les  questions 
secondaires  qu'il  croirait  n'avoir  pas  sufTisammenl  éclaircies. 

ff L'exécution  de  l'ouvrage,  des  planches  qui  l'accompagnent  et  des 
ligures  qui  y  sont  si  libéralement  répandues,  fait  grand  honneur  à  l'ha- 
bile éditeur,  M.  Rothschild,  ipii  en  a  dirigé  et  surveillé  l'exécution. 
Parmi  les  dessins,  très  soigneusement  gravés,  il  en  est  un  très  grand 
nombre  qui  représentent  des  monuments  ou  tout  à  fait  inédits,  ou  ([ui 
n'avaient  jamais  été  lidèlonioiit  reproduits,  n 

M.  Perrot  dépose  sur  le  bureau,  en  même  temps  que  ce  volume, 
une  lettre  adressée  aux  membres  de  l'Académie  par  l'auteur,  qui  les 
prie  d'agréer  l'hommage  de  son  travail. 

Le  Secrétaire  perpétuel  donne  lecture  de  la  lettre  de  M.  Odobesco. 

Elle  est  ainsi  conçue  : 

«Bucarest,  le  i"  mars  1889. 

(f  Messieurs , 

rrEn  i865,  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  de  Paris  me 
fit  l'honneur  de  m'admettre  à  lui  communiquer  de  vive  voix  l'esquisse  . 
d'un  ouvrage  que  je  projetais  dès  lors  sur  le  Trésor  de  Pétrossa ,  l'orne- 
ment principal  de  notre  musée  de  Bucarest.  Celte  esquisse  contenait  en 
germe  mes  études  postt'rieures  sur  l'orfèvrerie  antique. 

ffDeux  ans  après,  quand  je  revins  en  France  pour  l'Exposition  uni- 
verselle de  1867,  mon  travail  n'était  pas  suflisamment  avance  pour 
prétendre  h  un  plus  grand  honneur,  celui  de  paraître  parmi  les  publi- 
cations de  votre  illustre  Compagnie.  Je  me  bornai  donc  à  faire  imprimer 
une  courte  Notice  sur  les  antiquités  de  la  Romnanie ,  à  l'usage  des  visiteurs 
de  la  section  roumaine,  en  attendant  qu(^  je  pusse  donner  à  mon  sujet 
tout  le  développement  qu'il  me  semblait  comporter  dans  le  travail  dont 
j'avais  antérieurement  esquissé  le  projet. 

ff C'est  une  partie  de  ce  grand  ouvrage,  c'est  son  premier  volume, 
.sorti  à  peine  de  la  presse,  que  je  suis   heiueux  de  pouvoir  enfin  ollrii 


—  \u  — 

aujoui'tl'liiii  à  l'Académie,  comme  uii  hommage  envers  le  corps  savant 
qui,  vingt-cin(j  ans  plus  tôt,  a  bien  voulu  encourager  mon  premier  essai, 
comme  un  témoignage  tle  ma  vive  reconnaissance  envers  les  illustres 
représentants  de  l'érudition  française,  parmi  lesquels  je  me  Halte  de 
compter  plus  d'un  bienveillant  appréciateur  de  mon  zèle  pour  la 
science. 

rrLe  génie  français  excelle  à  répandre  la  lumière  sur  tous  les  pro- 
blèmes qui  réclament  une  sagacité  particulière  d'investigation,  et  la 
langue  française  semble  faite  à  souhait  pour  propager  toutes  les  pro- 
ductions de  lintelligence  à  travers  le  monde.  Aussi,  malgré  mon 
insufiisaiice,  lai-je  adoptée  pour  interprète  de  ma  pensée,  par  un 
accord  tout  naturel  avec  mes  prédilections  pour  la  science  française,  à 
qui  je  dois  la  meilleure  part  de  mon  acquis. 

rc Eloigné  actuellement  de  ses  représentants  par  la  distance  des  lieux, 
je  ne  m'en  suis  jamais  cru  isolé,  n'ayant  jamais  permis  au  temps,  ni  à 
aucune  autre  circonstance,  d'elfacer  de  mon  cœur  le  souvenir  des  en- 
seignements et  des  encouragements  que  j  ai  toujours  puisés  en  France. 
De  loin  comme  de  près,  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres, 
—  je  me  fais  un  agréable  devoir  de  le  déclarer  ici  à  ses  membres,  — 
trouvera  de  tout  temps  en  moi  un  propagateur  dévoué  de  ses  savantes 
productions,  un  fervent  admirateur  de  l'esprit  droit,  éclairé  et  fécond 
qui  anime  cette  docte  Compagnie.  De  même,  la  France  aura  sans  cesse 
en  moi  ainsi  qu'en  la  plupart  de  mes  compatriotes  les  témoins  les  plus 
sympathiques  de  ses  destinées, 

ff  J'ose  espérer  que  mon  œuvre,  offerte  sous  les  auspices  gracieux  de 
mon  éminent  collègue  en  archéologie,  M.  Georges  Perrot,  ne  laissera 
pas  d'obtenir  de  vous.  Messieurs,  un  accueil  favorable.  Ce  sera  déjà 
pour  moi,  personnellement,  une  récompense  llatteuse,  et  pour  nous 
tous,  hommes  de  lettres  roumains,  qui  cherchons  assidûment  à  gagner 
le  droit  de  cité  dans  la  république  des  études  consciencieuses,  ce  sera 
un  indice  précieux,  nous  autorisant  à  croire  que  nos  efforts  ne  nous 
rendent  plus  indignes  de  graviter  fructueusement  vers  les  honneurs 
que  Ion  sait  distribuer,  en  France,  avec  tant  d'équité,  à  la  science, 
alors  même  qu'elle  y  viendrait  de  létranger. 

tf  Veuillez  bien  agréer,  etc. 

f  Odobesco, 

professeur  d'archéologie  à  TUniversité  de  Biicarest.i 
M.  Oppkrt  pre'senle,  au  nom  de  l'auteur,  l'ouvrage  intitulé:  Inscription 


.).) 


assifiienne  (trchaviuc  de  Samsi'-Rnmmâii  IV,  roi  d'Assijnc  (H'?Ji-Hti  av. 
J.-C).  transcrite,  Iraduile  ot  commentL'e  par  le  H.  I'.  Viiicciil  Scheil,  des 
Vrèvca  pn^clieurs  (Paris,  1889,  in-i"). 

'•I.e  clergé,  tant  n'giilier  que  séculier,  dit  notre  confrère,  a  formé, 
en  France  et  à  l'étranger, dans  ces  derniers  temps,  des  assyriologues  des 
plus  distingués.  Les  Jésuites  nous  ont  donné  le  U.  P.  Strassmnier.  un  des 
érudits  les  plus  infatigables  et  les  plus  utiles,  le  R.  P.  Laacli,  qui  étudie 
avec  succès  les  questions  astronomiques  se  rapportant  h  Tassyriologie, 
et  le  R.  P.  Méchineau.  Le  clergé  séculier  peut  mettre  en  ligne  MM.  les 
abbés  Quentin .  Loizy  et  d'autres.  L'ordre  des  Dominicains  nous  apporte 
une  recrue  de  la  plus  grande  espérance,  le  R.  P.  Scheil,  qui  s'est  révélé 
dans  le  travail  aujourdluii  présenté  à  lAcadénne. 

rrL'auleur  étudie,  avec  un  remarquable  savoir  et  une  érudition  sagace, 
le  texte  du  roi  Samsi-Ben,  que,  d'après  d'autres  assyriologues ,  il  appelle 
Samsî-Rauimàn.  L'original  de  ce  texte,  connu  depuis  longtemps,  est 
conservé  au  Musée  britannique.  Le  (ils  de  Saimanassar  II,  le  roi  de  l'obé- 
lisque de  Nimroud  (870-857),  y  relate  ses  campagnes  en  Arménie  et 
en  Chnldée  pendant  les  quatre  premiers  jours  de  son  règne. 

"Le  P.  Scheil  a  de  nouveau  soumis  ce  texte  à  un  examen,  et  a,  avec 
une  heureuse  perspicacité,  émis  des  opinions  très  plausibles  sur  plu- 
sieurs des  passages  encore  obscurs.  Ce  premier  travail  fait  bien  présager 
de  ceux  que  la  science  assyriologique  peut  encore  attendie  de  ce  savant 
ecclésiastique.  " 

SÉANCE  DU   0  9    MARS. 

Sont  offerts  : 

Rapport  sur  un  projet  de  langue  scientifique  internationale ,  par  le 
D'  Ad.  Nicolas  (Clermont  [Oise],  i889,in-8°): 

Catalogne  of  ancient  marbles  al  Landsdoxvne  Hoiise ,  publié  par  A.-H. 
Smith  (Londres,  1889,  gr.  in-S"). 

M.  Siméon  Lice  a  la  parole  pour  un  hommage: 

rrj'ai  riionncur  d'offrir  à  l'Académie,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Léon  de 
la  Sicotière,  sénateur  de  l'Orne,  un  ouvrage  intitulé  :  Louis  de  Frotté  et 
les  insun-ections  normandes  [ijgS-iSSfi)  [Paris,  1889,  3  voi.  in-8'']. 

ffLes  guerres  de  la  Vendée  ont  eu  de  nombreux  histoiiens,  Beau- 
champ,  Savary.  Crétineau-Joly.  Théodore  Maret.  l'abbé  Deninu,  et  tout 
récemment  notre  savant  confrère  M.  Céleslin  Port.  La  chouannerie  bre- 
tonne a  été  racontée,  dès  i836,  par  M.  Maufras  du  Châlellier,  dans  sa 
consciencieuse  Histoire  de  la  Révolution  dans  les  départements  de  l'ancienne 
Bretagne,  qui  forme  six  volumes  in-8°.  La  chouannerie  du  Maine  a  donné 


—  136  — 

lieu  aux  ouvrages  bien  connus  de  Ducheniin-Descepeaux  et  do  lahljë 
Paulouin,  ainsi  qu'au  travail  posthume  du  regretté  Victor  Ducbemin , 
publié  l'année  dei-nière  par  son  ami  M.  1».  Triger.  Seule,  la  chouannerie 
normande  n'avait  eu  jusqu'à  ce  jour  d'autre  annahste  qu'un  marchand  de 
mercerie  et  de  sabots,  Richard  Seguin,  dont  le  hvre,  imprimé  sur  du 
papier  à  chandelles,  parut  à  Vire  en  1828-182/1  en  deuxvolumes  in-18, 
sous  le  titre  d'Histoire  de  la  chouannerie  et  de  la  restauration  de  la  reli- 
gion et  de  la  monarchie  en  France. 

ffCet  historien  de  ses  chouans  que  la  Normandie  a  attendu  pendant 
près  d'un  siècle  avec  sa  patience  ordinaire  (tardif  eX  taisant,  deux  adjec- 
tifs qui  ont  à  peu  près  le  même  sens,  sont  devenus  des  noms  de  famille 
très  communs  en  Normandie),  elle  vient  enfm  de  le  trouver  dans  l'au- 
teur de  Louis  de  Frotté,  et  elle  vient  de  le  trouver  tel  qu'elle  n'a  vrai- 
ment plus  rien  à  envier  aux  provinces  ses  voisines.  En  général,  les  sources 
de  l'histoire  d'une  période  sont  plus  ou  moins  rassemblées  à  l'avance  et 
se  trouvent  pour  ainsi  dire  à  fleur  de  terre.  Pour  la  chouannerie  nor- 
mande, au  contraii'e,  ces  sources  étaient  éparses  et  comme  cachées  au 
plus  profond  des  archives  de  centaines  de  familles  dont  plus  d'une  avait 
parfois  intérêt  à  les  tenir  jalousement  dans  l'ombre.  11  a  donc  fallu, 
d'abord,  les  découvrir,  au  moyen  d'une  enquête  pom'suivie  pendant 
plus  de  vingt  années,  non  seulement  dans  les  cinq  déparlements  de  l'an- 
cienne Normandie,  mais  encore  sur  tous  les  points  de  la  France.  Cette 
enquête  une  fois  terminée,  restait  à  acconq)lir  la  partie  la  plus  malaisée 
delà  tâche,  car  il  n'aurait  servi  de  rien  d'avoir  découvert  les  documents 
si  Ion  n'était  parvenu  ensuite,  grâce  à  l'estime  personnelle  que  l'on 
inspirait  et  aussi  h  la  diplomatie  la  plus  persévérante,  à  en  obtenir  com- 
munication intégrale  ou  partielle.  Mais  que  ne  peut  l'amour  de  la  science 
lorsqu'il  est  aiguillonné  par  l'exaltation  du  patriotisme  local?  Originaire 
du  Bocage  comme  Louis  de  Frotté,  c'est-à-dire  de  la  région  de  basse 
Normandie  qui  fut  le  plus  ardent  foyer  des  insurrections  royalistes,  M.  de 
la  Sicotière  a  su  triompher  de  toutes  les  difficultés,  et  le  résultat  qu'il 
vient  d'atteindre  est  assurément  proportionné  à  la  grandeur  de  lefforl. 

rrLes  deux  volumes  dont  je  présente  un  exemplaire  à  l'Académie  com- 
posent un  ensemble  de  près  de  qninze  cents  pages,  sans  compter  une 
lable  1res  complète  et  une  carttî  du  théâtre  de  la  chouannerie  normande 
qui  achèvent  de  donner  un  caractère  scientifique  ;i  la  belle  publication 
de  l'honorable  sénateur  de  l'Orne.  Le  tiers  de  ces  deux  volumes  est  rempli 
par  des  documents  inédits,  et  si  cette  prodigalité  de  citations  ne  répond 
point  aux  sc'vères  exigences  de  l'art  historique,  elle  assure  en  revanche 


—  ]:r,  — 

lii  ronscrvnlioii  (riiii  ji^raiid  nombre  do  toxlcs  pn-cioiix  ;i|)|»;irt(Mi;iiil  ;i  rios 
jircliivcs  piiiliciilicres  cl  exposes  iiiiisi,  plus  (puis  ne  le  seiideiil  dans  nos 
df'pAls  publics,  à  des  cliaiices  de  deslriictioii  volonlaire  ou  ibitiiite. 

"[.es  archives  du  cliAteaii  de  (loiilerne,  résidence  séculaire  des  Frollf?, 
omI  fourni  l'appoint  le  plus  considt'rable.  Ces  archives  possAdenl  une 
niasse  énoi'uie  de  papiers  provenant  de  Louis  de  Frotté,  correspon- 
dances, brevets,  nié/noires  personnels  restés  inaclievc's,  matériaux  divers 
rassemblés  en  vue  de  la  continuation  projetée  de  ces  mémoires,  recueils 
de  pièces  détachées,  registres  de  coni[)(al)ilité,  tout,  jusqu'aux  essais  lit- 
téraires que  le  terrible  Blondel,  comme  l'apijebiienl  les  bleus,  trouvait  le 
temps  d'improviser  dans  l'intervalle  de  deux  de  ces  expéditions  où  il 
couchait  sur  la  ])aille  d'une  grange,  son  fusil  entre  les  jambes.  (7esl 
dans  ce  trésor,  inexploré  jusqu'à  ce  jour,  que  M.  de  la  Sicotière  a  puisé 
à  pleines  mains  pour  retracer  en  toute  sincérité,  mais  avec  une  com- 
plaisance dont  il  ne  se  défend  pas,  la  physionomie  énergique  et  intelli- 
gente du  chef  de  la  chouannerie  bas-normande. 

ff Après  les  papiers  de  Frotté  viennent  immédia (emeni  par  ordre 
d'importance  les  mémoires  inédits  de  Moulin,  adjudant  général  du  chef 
de  l'insurrection,  brave  houime  autant  qu'honinie  brave,  dont  on  a  pu 
dire  avec  vérité  qu'il  fut  le  plus  Vendéen  des  chouans  de  Noi-mandie.  Les 
pages  si  curieuses  que  cite  ou  utilise  l'hislorien  de  la  chouannerie  font 
vivement  désirer  qu'une  publication  prochaine  mette  le  texte  entier  de 
ces  mémoires  à  la  disposition  du  public.  C'est  un  vœu  que  nous  sou- 
mettons respectueusement  à  la  pelite-lille  de  Moulin,  qui  porte  avec  une 
distinction  exquise  le  nom  de  l'un  de  nos  plus  regrettés  et  plus  éminenls 
confrères,  enlevé  naguère  prématurément  à  deux  classes  de  l'Inslitul. 

ffSur  des  bases  aussi  larges  et  aussi  profondes,  l'auleiu'  de  Louis  do 
Frotté  a  élevé  un  édifice  solide  e(  même  un  peu  niassif  où  l'excellente 
(pialité  des  matériaux  de  construction,  la  simplicité  de  l'ordonnance 
générale,  la  sobriété  de  rornenienlation.  le  fini  de  beaucoup  de  détails 
et  l'aspect  imposant  de  l'ensemble  attestent  le  talent  non  moins  que  la 
conscience  de  l'architecte.  \\.  de  la  Sicotière,  en  ell'et.  ne  se  borne  pas  à 
mettre  en  lumière  des  faits  nouveaux;  il  les  expose  en  un  courant  de 
narration  vive  et  rapide  (pii  emporte  le  lecteur.  En  outre,  les  jugements 
<pi'il  porte  sur  les  événements  ri  '^ui'  les  hommes  sont  empreints  le  plu>^ 
souvent  d'un  rare  bon  sens.  Nul  hislorien.  par  exemple,  n'a  mieux  saisi 
les  causes  très  complexes  «fui  présidèrent  au  rcciulemeni  des  premières 
bandes  organisées  par  Frotté.  Sans  doute,  il  put  y  avoir  des  adversaires 
<le  l'ordre  de  choses  nouveau  (\\\\  se  firent  chouans  pour  échapper,  sui- 


—  138  — 

vant  les  fortes  ex])ressions  de  M.  Taine,  rà  la  servitude  inquiète  et  à 
rr l'arbitraire  incohérent  de  despolismes  instables»;  ce  fut  le  cas  d'une 
minorité  d'élite.  Combien  plus  nombreux  furent  ceux  qui  allèrent  grossir 
les  bandes  insurrectionnelles,  soit  pour  se  soustraire  à  la  conscription, 
soit  par  entraînement  irréfléchi  et  pour  suivre  l'exemple  de  leurs  cama- 
rades, soit  par  ce  goiit  des  aventures  qui  appartient  en  propre  à  la  jeu- 
nesse, soit  même  pour  assouvir  les  plus  mauvaises  passions  et  commettre, 
sous  le  couvert  de  la  guerre  civile,  des  délits  et  jusqu'à  des  crimes  de 
droit  commun! 

crLe  plus  grave  reproche  que  l'on  puisse  adresser  à  M.  de  la  Sicolière, 
c'est  que  dans  sa  méthode  d'exposition  il  ne  s'est  point  toujours  assez 
dépouillé  d'anciennes  habitudes  professionnelles.  Avant  d'être  investi 
d'un  mandat  politique  par  la  confiance  de  ses  concitoyens,  l'honorable 
sénateur  de  l'Orne  a  longtemps  occupé  une  place  éminente  au  barreau 
d'Alençon.  Aussi,  dans  maint  passage,  il  faut  bien  le  reconnaître,  l'avocat 
qui  plaide  une  cause  reparaît  sous  le  narrateur  et  tient  un  peu  l'historien 
en  échec.  Mais  c'est  le  plus  honnête  et  le  plus  convaincu  des  avocats. 
Non  content  de  communiquer  le  dossier  des  chouans,  ses  clients,  aux 
défenseurs  de  la  partie  adverse,  il  pousse  la  loyauté  jusqu'à  livrer 
toutes  les  pièces  du  procès  aux  jurés,  en  d'autres  termes  à  Topirnon  pu- 
blique.» 

M.  Maspero  offre  le  Vocabolario  geroglijico  copto-ebmico ,  par  le 
D'  Simeone  Levi,  vol.  VI,  supplément  (Turin,  1889,  in-i°). 

ff C'est  la  dernière  livraison  dune  œuvre  considérable.  Le  moment  de 
faire  un  dictionnaire  de  l't'gyptien  sur  un  plan  conforme  aux  princi[)es 
de  la  science  moderne  n'est  pas  encore  venu  :  trop  de  monuments  n'ont 
pas  encore  été  publiés ,  trop  de  ceux  qui  sont  publiés  n'ont  été  ni  étudiés 
ni  traduits;  les  groupes  de  mots  et  de  racines  n'ont  pas  été  encore  ana- 
lysés avec  assez  de  détails  ni  avec  un  nombre  d'exemples  suffisant.  M.  Levi 
a  fait  ce  qu'il  y  a  de  plus  utile  pour  le  moment  :  il  a  réuni  tous  les  mots 
que  contenaient  les  dictionnaires  de  Birch,  de  Brugsch  et  de  Pierret,  il  y 
a  joint  les  mots  et  les  acceptions  diverses  que  ses  propres  études  lui  ont 
fait  connaître  ou  qui  figurent  par  centaines  dans  les  monographies  dues 
aux  égyptologues  contemporains.  Le  classement  qu'il  a  adopté  a  le  mé- 
rite de  la  clarté;  peut-être  aurait-il  pu  bannir  des  acceptions  ou  recon- 
nues fausses  ou  qui  n'ont  d'autre  valeur  que  celle  d'à  peu  près.  Le  bon 
l'em{)orte  sur  le  mauvais  et  même  sur  le  médiocre  dans  son  travail;  et 
son  dictionnaire  nous  donne  exactement  l'étal  de  la  science  au  moment 
présent,  v 


—  \M)  — 

M.  Oi'PERT  présenle,  au  nom  du  liln-aiie-edileui'.  M.  |{ap,ster,  ••(  du 
directeur,  M.  A. -H.  Sayce.  le  premier  volume  de  la  secomle  série  des 
Hecorils  ofthe  past  (Londres,  1888,  in-S"). 

irLa  première  sërie  de  cette  publication,  contenant  douze  volumes,  a 
recueilli  les  textes  les  plus  importants  (jui  nous  sont  parvenus  des  É}(y|)- 
fiens  et  des  Assvriens;  elle  [)arut  sons  les  auspices  et  la  diiorlion  du 
regietlable  M.  Birch.  M.  Bagster,  un  des  éditeurs  anglais  les  plus  snncii'ux 
des  progiès  de  la  science,  a  engagé  M.  Sayce  à  continuer  l'œuvre  h 
laquelle  s'était  adonné  M.  Birch,  et  ce  choix  fait  honneur  à  Tëdileur  et 
à  celui  qu'il  a  choisi.  En  effet,  M.  A.-H.  Sayce  est,  après  M.  Rawlinson,  le 
cheldes  assyriologues  anglais,  et  Cflui  [larmi  les  vivants  qui  sost  occupé 
avec  le  plus  de  suite  et  le  plus  de  succès  des  textes  assyriens.  L'ii  savoir 
très  étendu,  une  sagacité  heureuse,  une  force  de  travail  très  féconde 
l'ont  rais  à  même  de  trouver  des  aperçus  justes,  et  de  faire,  sur  d'autres 
domaines  encore  que  celui  des  textes  cunéiformes,  des  découvertes  d'une 
importiiuce  capitale.  M.  Sayce  a,  un  des  premiers , établi  les  règles  gram- 
maticales de  la  langue  sumérienne,  dont  il  s'est  toujours  occupé  depuis 
avec  un  très  giand  succès  et  une  remarquable  sagacité.  Dans  cette  nou- 
velle série,  !\1.  Sayce  a  repris  la  traduction  d^  plusieurs  textes  comius 
depuis  quarante  ans,  qui  réclamaient  une  revision  conforme  aux  progrès 
de  la  science;  il  a  lui-même  donné  également  les  versions  de  plusieurs 
documents  nouvellement  découverts.  Parmi  les  collaborateurs  anglais, 
nous  nommons  M.  Pinches;  il  a  recouru,  pour  les  textes  de  Tellah,  à 
M.  Amiaud,  et,  pour  d'autres  traductions,  à  l'auteur  de  cette  comnnuii- 
cation.  Le  recueil  sera  continué  selon  l'ancien  plan,  et  le  second  fascicule 
sera  consacré  aux  travaux  de  divers  ëgyptolo{;ues  éminents.  En  tout  état 
de  cause,  nous  félicitons  les  auteurs  de  la  publication  de  n'avoir  pas  laissé 
sans  l'achever  l'ancienne  oeuvre  des  Records,  si  utile  et  si  pratique,  et  de 
lui  avoir  doimé  une  succession  qui  honore  la  science  de  la  Grande- 
Bretagne.  » 

M.  Heuzey  a  la  parole  : 

ff  Je  regrette  vivement  que  des  raisons  de  santé  ne  m'aient  pas  pei-mis 
de  me  rendre  plus  tôt  au  désir  de  mon  collègue  du  Musée  du  Louvre, 
M.  Louis  Gourajod,  qui  m'avait  pi'ié  d'offrir  en  son  nom  à  l'Académie  un 
travail  tiré  des  Mémoires  de  la  Société  nalionale  des  autiquaires  de  France 
(t.  \LV11I)  et  intitulé:  La  polycliroinie  dans  la  statuaire  du  moyen  âge 
et  de  la  Renaissance  (Paris,  1888,  in-8°). 

«rCette  question,  si  intéressante  et  encore  si  débattue,  de  la  sculpture 
peinte,  n'existe  pas  seulement  pour  ces  deux  époques;  elle  a  ses  origines 


—  lAO  — 

dans  l"an(i(jiiité.  C'est  ce  qui  m'excusera  de  parler  dun  ouvrage  qui  toul 
d'abord  semble  s'écarter  quelque  peu  de  mes  études  ordinaires. 

ffLa  méthode  suivie  par  M.  Gourajod  me  paraît  excellente  et  la  seule 
qui,  dans  une  matière  aussi  délicate,  puisse  conduire  à  la  vérité.  Il 
commence  par  déclarer  que  la  question  qu'il  étudie  n'est  pas  une  ques- 
tion d'esthétique,  mais  une  question  d'histoire.  Il  ne  se  préoccupe  pas 
de  décider  si  lusage  de  peindre  les  statues  est  bon  ou  mauvais,  s'il  doit 
être  repris  ou  rejeté  pour  toujours.  Il  se  place  nettement  sur  le  terrain 
des  faits,  et  il  montre  que  le  procédé  de  la  sculpture  polychrome  est  une 
tradition  constante,  qui  a  traversé  tout  le  moyen  âge,  pour  se  perpétuer 
jusque  pendant  la  première  moitié  du  xvf  siècle,  où  elle  a  été  encore 
pratiquée  par  quelques-uns  des  maîtres  les  plus  en  renom  de  la  sculp- 
ture italienne  et  de  la  sculpture  française,  non  seulement  sur  le  bois  ou 
sur  la  terre  cuite  et  les  autres  matières  du  même  genre,  mais  aussi  sur 
le  marbre  et  parfois  même  sur  le  métal. 

tf  Cette  perpétuité  est  démontrée  par  deux  sortes  de  preuves  :  —  des 
preuves  écrites,  tirées  principalement  des  Hvres  de  comptes ,  montrant 
les  sommf s  payées  à  des  artistes,  qui  ne  sont  pas  toujours  les  premiers 
venus,  pour  la  mise  pu  couleur  de  certaines  sculptures  célèbres;  —  des 
preuves  archéologiques,  faisant  passer  sous  les  yeux  du  lecteur  toute 
«ne  suite  de  statues,  dont  les  unes  ont  conservé  leurs  couleurs  et  dont 
les  autres  ne  les  ont  perdues  que  par  suite  de  nettoyages  dûment  con- 
statés. Parmi  ces  exemples  de  la  sculpture  coloriée  se  trouvent  plusieurs 
figures  qui  ont  enrichi  depuis  peu  le  Musée  du  Louvre. 

"Le  mouvement  qui,  à  partir  surtout  de  Michel-Ange,  a  fait  aban- 
donner la  sculpture  peinte  est  dû  principalement,  il'apiès  M.  Courajod, 
aux  nombreuses  découvertes  de  statues  antiques,  qui  tirent  croire  que  le 
goût  des  anciens  était  opposé  à  l'usage  de  colorier  les  statues.  C'est  ici 
que  l'auteur  touche  à  la  question  de  la  polychromie  dans  la  statuaire  an- 
tique et  qu'il  me  sera  peut-être  permis  d'inlroduire  une  réflexion  per- 
sonnelle. 

ff  Cette  question  a  été  renouvelée  de  nos  jours  par  la  découverte  faite 
à  l'Acropole  d'Athènes  de  toute  une  série  votive  de  statues  archaïques  de 
femmes,  qui  conservent  encore  leur  riche  décoration  polychrome.  Cepen- 
dant il  faut  dire  (jue.  si  les  vêtomenls,  les  yeux,  les  chevelures  sont 
relevés  par  des  colorations  très  brillantes,  on  n'en  a  pas  constaté  de 
traces  sur  les  chairs.  Il  semble  donc  que  déjà  le  beau  marbre  grec  eût 
pani  une  matière  assez  belle  et  assez  vivante  pour  se  passer  de  la  cou- 
leur. On  peut  dire  tpie.  dès  l'époque  archaïque,  la  pohjchromie  avnil  corn- 


—  Vil  — 

mencé  à  veculcr  devaiil  le  uim-ùre.  Il  osl  assoz  log'iquo  de  oioirc  ([ue  celte 
r(isei'vr>,  sans  iilloriieiil-i'liv  jusiiii'ii  la  (ItVolnrnfioii  cnmplpfp,  ndn  s'accon- 
tncr  à  mesure  que  la  sculpliiic  orecque  s'aKacliait  av.  c  une  pn-dilcctioii 
plus  gfrande  Ji  la  re|)résenlalioii  du  nu.  Tels  sont  les  ternies  dans  lesquels 
le  pr(d)lème  se  pose  aujonrdliui.  Si  Ion  parvient  à  lo  résoudre,  ce  ne 
sera  pas  par  des  dissertations  d'esthétique,  mais  par  lobservation  métho- 
dique d'un  grand  nond)n'  de  faits  accumulés,  suivant  la  méthode  si 
heurousemenl  appliipK'C  par  .M.  Gourajod  à  des  temps  plus  voisins  de 
nous,  f 

M.  Hkuzev  présente  ensuite  à  l'Académie  le  second  fascicule  de  la 
deuxième  livraison  des  Découvertes  en  Chaldée ,  par  M.  Ernest  de  Sarzec, 
publiées  par  ses  soins  (Paris,  1889,  in-fol.). 

r Maintenant,  toutes  les  principales  inscriptions  découvertes  à  Tello, 
celles  des  statues  et  d's  grands  cylindres  de  terre  cuite,  se  trouvent 
mises  entre  les  mains  des  savants  par  des  repioductions  phototypiques 
d'une  fidélité  indiscutable.  y> 

Î\I.  Tahbé  DucHESNE  a  la  parole  : 

trJ'ai  rhonneur  de  présenter  à  l'Académie  le  premier  fascicule  du 
Liber  ccnsuum  de  V Eglise  romaine,  de  (jcncius  Camérarius,  édité  par 
M.  Paul  Fabre,  ancien  membre  de  l'Hlcoie  de  Rome,  maître  de  confé- 
rences à  la  Faculté  des  lettres  de  Lille  (Paris,  1889,  in-i°,  formant  le 
volume  VI,  'Lî°  série,  de  la  Bibliothèque  des  Écoles  françaises  d'Athènes  et 
de  Rome). 

rrCel  ouvrage  important  aurait  pu  vous  être  offert  par  des  mains  plus 
autorisées;  mais  j'ai  revendi([ué  l'honneur  et  le  plaisir  de  vous  l'apporter, 
en  qualité  de  frère  aîné  des  membres  de  l'Fcole  de  Rome  et  aussi  à  cause 
de  la  parenté  spéciale  qui  unit  les  études  de  M.  Fabre  et  les  miennes. 

ffLe  livre  censier  que  publie  M.  Fabre  n'est  pas  l'ancien  Polyptyque 
dont  parle  Jean  Diacre  dans  la  Vie  de  saint  Grégoire.  Celui-ci,  dressé  sons 
le  pape  Gélase  à  la  lin  du  v' siècle,  et  constamment  tenu  à  jour,  contenait 
l'état  des  revenus  que  l'Eo-lise  romaine  tirait  de  ses  patrimoines,  de  ses 
propriétés  foncières.  Cette  ancienne  dotation  immobilière,  dont  les  ori- 
gines peuvent  être  suivies  en  remontant  jusqu'au  delà  de  Constantin 
et  de  Dioclétien,  disparut  peu  h  peu,  soit  par  la  confiscation  des  patri- 
moines, soit  par  la  répartition  des  propriétés  entre  les  établisse- 
ments ecclf'siastiques  do  Home,  soit  par  l'emjjhyléose  et  finféodation. 
A  la  fin  du  \i'  siècle  il  n'en  restait  h  peu  près  rien.  La  caisse  pontificale 
dut  s'alimenter  autrement.  Sa  principale  ressource  consistait  dans  la 
perception  des  cens  dont  étaient  grevés ,  h  son  profit .  divers  établissements 

XVII.  10 


luimurair   «ino 


—  U2  — 

religieux  ou  même  politiques,  évêchés,  monastères,  royaumes,  etc., 
dans  toutes  les  parties  de  la  chrétienté.  De  nouveaux  livres  censiers 
furent  alors  dressés;  ils  indiquaient  par  provinces  et  par  diocèses  les 
établissements  qui  devaient  le  cens  et  la  quotité  de  celui-ci,  exprimée 
suivant  les  divers  systèmes  monétaires  du  temps. 

ffLa  série  de  ces  nouveaux  livres  censiers  paraît  remonter  jusqu'au 
temps  de  Grégoire  VII;  mais  le  plus  ancien  qui  se  soit  conservé  sous  sa 
forme  propre,  indépendante  de  toute  compilation  postérieure,  c'est 
celui  qui  fut  rédigé  en  1192  par  le  maître  de  la  chambre  apostolique 
Crescentius  ou  Cencins ,  connu  sous  le  nom  de  Camerarius ,  bien  qu'il  ait 
fini  par  devenir  pape  et  par  s'appeler  Honorius  III. 

tLc  manuscrit  original  de  Cencius  est  conservé  au  Vatican.  Outre  le 
tableau  des  cens,  il  compread  le  dossier  des  documents  qui  en  justifient 
la  perception  et  beaucoup  d'autres  pièces,  relatives  en  général  aux  tem- 
poralités de  l'Eglise  romaine.  M.  Fabre  publiera  tout  cet  ensemble.  Il 
commence  naturellement  par  le  tableau  des  cens,  dont  une  partie  seu- 
lement, l'Italie  et  la  Dalmatie,  figurent  dans  ce  fascicule.  Tout  original 
qu'il  est,  le  manuscrit  du  Vatican  contient  beaucoup  de  compléments 
successivement  ajoutés,  au  fur  et  à  mesure  que  s'établissaient  de  nou- 
veaux cens.  M.  Fabre  est  parvenu  à  distinguer  dans  ces  adjonctions  deux 
couches  bien  nettes,  l'une  antérieure,  Tautre  postérieure  à  l'année  i254; 
il  les  a  imprimées  les  unes  en  italique,  les  autres  en  petits  caractères. 

rrMais  ce  qu'il  y  a  de  plus  remarquable  et  de  plus  méritoire  dans  son 
travail,  c'est  l'immense  annotation  qu'il  a  jointe  à  ces  textes.  Grâce  au 
caractère  œcuménique  des  cens  pontificaux ,  tous  les  systèmes  monétaires 
du  moyen  âge  sont  représentés  dans  le  Liber  censuum.  M.  Fabre  les 
étudie  l'un  après  l'autre,  avec  une  conscience  et  une  patience  qui  feront, 
je  n'en  doute  pas,  l'édification  de  ceux  de  nos  confrères  qui  s'occupent 
de  numismatique.  Quant  aux  questions  de  géographie  ecclésiastique  et 
politique,  il  me  suffira  de  dire  que,  par  les  recherches  de  M.  Fabre, 
celte  partie  de  la  science  sera  entièrement  renouvelée. 

crEn  somme,  par  M.  Fabre  l'Ecole  fi'ançaise  de  Rome  ajoute  un  livi*e 
de  haute  valeur  à  la  série  de  ses  travaux,  et  plus  particulièrement  au 
groupe  de  ceux  qui  intéressent  l'histoire  de  Rome  et  de  l'Italie.  Ce 
groupe  est  déjà  considérable.  Les  travaux  de  M.  Bloch  sur  l'origine  du 
sénat,  de  M.  Lécrivain  sur  sa  décadence,  ceux  de  MM.  Julian  et  Charles 
Diehl  sur  l'administration  de  l'Italie  depuis  Auguste  jusqu'à  Pépin  le 
Bref,  les  monographies  de  MM.  Fernique  et  de  la  Blanchère  sur  Préneste 
et  Terracine,  les  gros  volumes  des  registres  des  papes,  du  Liber  ponti- 


ficalis ,  (lu  Liber  censuiiin,  les  rcclicccliL's  ilc  M.  iMiiiit/  cL  do  M.  Faucon 
sur  riiisloirc  des  arls  et  des  hibliollièques  à  ht  cour  poiUilicale,  l'explo- 
ralioii  des  arcliives  angevines  de  Naples  par  M.  Paul  Durrieu,  lout  cela 
prouve  assez  qu'on  ne  perd  pas  son  temps  au  [)alais  Farnèse,  et  même 
qu'on  en  consacre  une  noIoMo  pari  à  nicllre  en  nieilleuri'  lumière  la 
niorveill<'use  histoire  do  Home  et  de  l'Italie,  n 

SÉANCE  DU    29  MARS. 

L'ambassadeur  d'Italie  adresse  en  bomma^je  à  l'Académie  un  exem- 
plaire du  h'  volume  de  Yliweiitario  de/  U.  Archivio  di  Stalo  in  Lucca 
(Lucqucs,  1888,  m-k"). 

Le  cliar;;!'  d'alliiires  de  Portugal  fait  parvenir  un  ouvrage  intitulé  : 
H.Ç  î  ^^tX  "  Ilistoria  de  Minus  Ademàs  Sagad,  rei  de  Elhiopia,  texto 
elhiopico,  publicado ,  Iraduzido  e  annotado,  |)ar  Fr.-M.  Esteves  Pereira 
(Lisbonne,  1888,  in-8°),  que  son  gouvernement  l'a  chargé  d'oiïrir  h 
l'Académie. 

Sont  encore  offerts  : 

Bihliolheca  aiabo-sicula ,  par  Michel  Araaii,  associé  étranger  de  l'In- 
stitut, Appendice  (Turin,  1889,  iu-i";  un  autre  titre  porte  :  Ad  reium 
italicarwn  scriplores  Cl.  Muratorit  tomi  I  p.  II  additanienta); 

L'œuvre  d'Abel  Bergaignc ,  leçon  d'ouverture  du  cours  de  grammaire 
comparée  à  In  Facullé  des  lettres  de  Paris  (aj  janvier  188g),  par  M.  V. 
Henry  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait  des  Mémoires  de  la  Société  des 
sciences  de  Lille); 

Le  culte  de  Jeanne  d'Arc  et  sa  nationalité,  par  A.  Renard  (Orléans, 
i888,in-ia); 

Rapport  sur  les  temples  égyptiens,  adressé  à  S.  E.  le  Ministre  des  tra- 
vaux publics,  par  Grand  bey  (le  (laire,  1888,  texte  et  allas  in-/r). 

M.  Joachiiu  Menant  présente  Le  Ravennate  et  son  exposé  cosmographique , 
par  feu  M.  d'Avezac,  membre  de  l'Académie,  publié  par  MM.  Jean  et 
Gabriel  Cfravier,  avec  une  notice  biographique  et  bibliographique  siu- 
M.  d'Avezac  (Rouen,  1888,  in-S"). 

«rj'ai  l'honneur,  dit  notre  confrère,  d'offrir  à  l'Académie,  au  nom  de 
M.  Gravier,  président  de  la  Société  normande  de  géograpliic,  un  mé- 
moire posthume  de  notre  regretté  confrère  M.  d'Avezac,  sur  les  travaux 
qui  ont  eu  pour  objet  l'exposé  de  cosmographie  de  l'anonyme  de  Ra- 
venne.  C'est  une  charmante  brochure  in-/i°,  (jui  sort  des  presses  de 
M.  Gagniard,  notre  imprimeur  roucnnais,  dinit  j'ai  eu  déjà  plusieurs  fois 
l'occasion  de  vous  signaler  le  zèle  et  l'inb^lligence. 

1  o. 


-rPeu  lie  leraps  avant  sa  moii,  M.  d'Avezac,  qui  honorait  M.  Gravier 
d'une  amitié'  particulière,  lui  parla  de  deux  manuscrits  qu'il  se  disposait 
à  livrer  à  l'impression.  —  l'un,  sur  l'anonyme  de  Ravenne  et  son  exposé 
cosmographique,  —  l'autre,  sur  le  triage  et  le  classement  final  des  docu- 
ments cartographiques  du  moyen  âge ,  publiés  sous  la  direction  du  vicomte 
de  Santarem.  En  ce  qui  concernait  le  Ravennate,  il  restait  à  relier  les 
notes  au  texte  et  à  dresser  la  carte;  —  pour  les  monuments  cartogra- 
phiques, il  y  avait  encore  un  tableau  à  terminer,  rr Lorsque  je  serai 
ffmort,  dit  M.  d'Avezac  à  son  jeune  ami,  M.  Charles  Defrémery,  mon 
rr gendre,  vous  les  remettra,  et  je  compte  sur  vous  pour  les  publier. n 
M.  Defrémery  remit  à  M.  Gravier  le  manuscrit  du  Ravennate;  l'autre 
ne  fut  pas  re(rouvé. 

ffM.  Gravier  a  rempli  consciencieusement  le  j)ieux  devoii'  dont  il  était 
chargé,  malgré  les  difficultés  qu'il  avait  à  surmonter.  Vous  connaissez 
l'importance  du  livre  à  la  fois  savant  et  barbare  de  l'anonyme  de  Ra- 
venne, et  les  nombreux  travaux  qu'il  a  suscités,  soit  pour  déterminer 
le  nom  de  l'auteur,  le  lieu  de  sa  naissance  et  l'époque  à  laquelle  il  ap- 
partenait, soit  pour  reconstituer  la  géographie  du  monde;  telle  que  le 
Ravennate  l'avait  présentée.  M.  d'Avezac,  avec  sa  grande  sagacité,  avait 
étudié  et  élucidé  toutes  ces  questions;  il  avait  recueilli  à  l'appui  de  ses 
appréciations  une  foule  de  notes  nécessaires  à  la  clarté  ou  à  l'intelligence 
de  son  texte.  Il  fallait  rattacher  ces  notes  au  mémoire  pour  donner  tout 
son  prix  h  l'étude  à  laquelle  il  s'était  livré,  et  enfin  dresser  la  carte  dont 
l'auteur  avait  indiqué  les  principaux  cléments.  C'est  ce  travail  aride,  auquel 
M.  Gravier,  aidé  de  son  fils,  s'est  livré,  qui  a  retardé  jusqu'ici  la  publi- 
cation promise;  elle  est  terminée  aujourd'hui  ;  je  suis  heureux  de  vous  la 
présenter  en  vous  rappelant  deux  confrères  dont  la  mémoire  est  chère  à 
plusieurs  d'entre  nous,  et  d'ofl'rir  à  MM.  Gravier  de  sincères  félicita- 
tions, ri 

M.  Gaston  Paris  offre,  de  la  part  de  l'éditeur,  M.  A.  d'Ancona,  L'Italia 
alla  jine  del  sccolo  xvi.  Giornale  del  viaggio  di  Michèle  de  Montaigne 
in  Italia,  ncl  i58o  e  i58i.  Nuova  edizione  del  testa  francese  ed  ita- 
liano,  con  note  ed  un  saggio  di  hihliografia  dei  viaggi  in  Italia  (Città  di 
Castello,  1889,  in-12). 

ffLc  Votjagc  de  Montaigne  en  Italie  est  peu  connu;  il  est  dédaigné 
même  de  beaucoup  parmi  les  plus  fervents  admirateurs  des  Essais.  Il 
ne  mérite  cependant  ce  mépris ,  ni  de  la  })art  de  ceux  qui  veulent  con- 
prendre  dans  son  ensemble  le  développement  de  cet  incomparable  esprit, 
ni  de  la  pari  de  ceux  qui  s'intéressent  à  l'histoire  de  la  civilisation  en 


i 


—   l'iT)  — 

Italie.  Les  reinarquos  do  Monl.iiji-ne  ont  lai-emeiit  une  forme  liltdrairo, 
—  d'atilaiil  (|iie  le  journal  a  élt'  iMl^/' ,  en  fji-anile  |»ailie  du  moins,  par 
le  secrétaire  qni  racrompa^niait;  en  revanclie,  elles  nous  présenlenl  au  vil 
des  impressions  dont  la  sincérité  absolue  nous  cause  quelque  surprise  et 
sou\ent  une  certaine  déce|)lion,  mais  qui  n'en  sont  que  plus  précieuses 
poui-  nVilre  nullenieiit  arrangées  et  retouche'es.  H  est  certain  qu'on  se 
passerait  volontiei'S  de  lire  tant  do  remarques  sur  l'eiïet  des  eaux  miné- 
rales et  aulres  et  sur  l'état  minufieusement  observé  de  la  vessie  du  voya- 
geur; mais  Montaigne  ne  recueillait  ces  notes  (|ue  pour  lui,  et,  connue  le 
(ait  spirituellement  observer  le  nouvel  éditeur,  il  mettait  là  encore  en 
[)raliqiie  la  grande  doctrine  du  Nosce  le  ipsuin.  Mais  c'est  surtout  par  les 
renseignements  qu'il  contient  sur  les  villes  d'Italie  visitées  par  le  voyageur 
gascon  (pie  l'ouvrage  est  intéressant,  et  cet  intérêt  avait  besoin  d'être 
signalé  et  mis  en  lumière.  M.  d'Ancona,  illustré  par  ses  beaux  travaux 
sur  riiistoire  et  la  littérature  de  l'Italie,  s'est  attaché  à  donner  aux  obser- 
vations de  Montaigne  un  commentaire  abondant,  critique  et  inslructil". 
Grâce  à  lui,  le  Fo?/ff^e  retrouvera  certainement  auprès  du  public  lettré 
l'attention  qu'il  mérite,  et  qu'il  était  d'ailleurs  assez  diflicile  de  lui  ac- 
corder, les  deux  éditions  données  par  Meunier  de  ()uerlon  étant  devenues 
tort  rares. 

f Comme  conqilément  à  son  curieux  volume,  li;  savant  professeur  de 
Pise  a  imiM'imé  un  Essai  de  bibliographie  des  voijnges  en  Italie  ;  les  nom- 
breux extraits,  fort  bien  choisis  et  judicieusement  appréciés,  de  ceux  de 
ces  voyages  qui  ne  sont  pas  généralement  connus  ajoutent  beaucoup  de 
prix  à  cette  bibliographie;  il  est  à  (b-sircr  que  lauteur  la  reprenne,  l'en- 
richisse et  la  complète.  Klle  forme  déjà  une  c;)utribulion  d'une  grande 
valeur  à  l'étude  historique  de  la  culture  italienne  depuis  la  Renaissance." 

M.  Siméon  Luce  insiste  sur  l'intérêt  que  présentent,  dans  le  journal 
de  Montaigne,  non  seulement  les  jKirlies  où  il  raconte  son  voyage  en 
Italie,  mais  aussi  les  quelques  pages  qu'il  a  consacrées  au  récit  de  son 
court  passage  à  travers  la  ('ihampa;;ne.  On  y  trouve  des  renseignements 
([ui  ne  se  rencontrent  pas  ailleurs,  nolanunent  l'indicaliou  des  [)ein- 
lures  qui  se  voyaient  sur  la  maison  de  Jeanne  d'Arc,  à  Domremy. 

M.  Georges  Peivrot  fait  hommage  du  Catalogue  of  Greek  coi its ,  Coriiilh, 
colonies  of  Corintk,  etc.,  par  Barclay  V.  Head,  publié  pnr  Reginald  Sluarf 
Poole  (Londres,  1889,  1  vol.  in-8°,  faisant  partie  du  CaViloguc  of  tltc 
Greck  coins  in  lltc  liritish  Musciim). 

ffLe  Musée  britaimique  rontinuc,  avec  mw  activité  (pii  est  d'(m  bon 
exemple,  h  publier  le  catalogue  de  ses  monnaies  antiques;  j  ai  déjà  d(!- 


—  146  — 

posé  sur  le  bureau  de  l' Académie  les  volumes  précédents  de  cet  ouvrage, 
qui  fait  grond  honneur  à  la  libéralité  éclairée  des  trustées,  au  zèle  de 
M.  Reginald  Stuart  Poole,  un  de  nos  correspondants,  et  de  M.  Barclay 
V.  Head,  qui  a  rédigé  le  présent  volume.  Celui-ci  comprend  les  mon- 
naies de  Gorinthe  et  des  cités  de  l'Italie  méridionale,  de  la  Sicile  et  delà 
Grèce  occidentale  qui,  soit  qu'elles  fussent  colonies  de  Gorintbe,  soit 
dans  le  seul  intérêt  de  leur  commerce,  ont  assimilé  leur  monnayage  à 
celui  de  Gorinthe,  en  ont  adopté  les  poids,  les  coupes  et  les  types. 

rrCe  volume,  comme  les  autres,  est  précédé  dune  savante  et  substan- 
tielle introduction.  L'auteur,  M.  Barclay  V.  Head,  y  fait  l'histoire  de  la 
naissance  et  du  développement  du  monnayage  corinthien,  depuis  65o 
environ  avant  notre  ère  jusqu'à  la  destruction  de  Gorinthe  en  1 46;  il  y 
étudie  ensuite  les  pièces  émises  par  la  colonie  romaine  de  Gorinthe  depuis 
le  temps  de  Jules  Gésar  jusqu'au  règne  de  Géta,  où  s'arrête  cette  série; 
enfin  il  donne  une  classification  géographique  et  chronologique  des  mon- 
nayages quasi-corinthiens  de  l'Italie,  de  la  Sicile,  de  rillyrie,de  TEpire, 
de  Gorcyre  et  de  l'Acarnanie,  où  il  suit,  dans  ses  grandes  lignes,  celle 
qu'a  préseutée  M.  Imhoof-BInmer  dans  son  essai  intitulé  :  Die  Mimzeii 
Akarnaniens  (Numismalische  Zcilschrift,  X,  1878)." 

M,  DE  Barthélémy  dépose  sur  le  bureau,  de  la  part  de  M.  le  comte 
de  Gharencey,  diverses  publications  de  l'OEuvre  de  Saint-Jérôme  : 

1°  Les  noirs  peints  par  eux-mêmes ,  par  M.  l'abbé  Bouché,  ancien 
missionnaire  apostolique  à  la  côte  des  Esclaves  (Paris,  i883,  in-S"); 

2°  Essai  de  grammaire  de  la  langue  de  Viti,  d'après  les  manuscrits  des 
missionnaires  maristes ,  par  le  P.  A.  G.  (Paris,  188^1,  in-8''); 

3°  Katekismu  l'ede  Yoruba,  par  le  R.  P.  Baudin,  des  missions  africaines 
de  Lyon  (Paris,  i88/i,  in-ist); 

U"  Dictionnaire  Intin-iwea,  h  l'usage  des  élèves  du  collège  de  Lano , 
•par  les  missionnaires  maristes,  revu  par  le  P.  A.  G.  (Paris,  1886, 
in- 19). 

rrM.  le  comte  de  Gharencey  a  désiré  que  je  présentasse  à  l'Académie 
les  travaux  dont  je  viens  d'énumérer  les  titres;  ils  sont  publiés  par 
l'OEuvre  de  Saint-Jérôme.  Je  m'empresse  de  satisfaire  à  ce  vœu  et  de 
faire  connaître  les  efforts  très  louables  tentés  par  cette  association  pour 
encourager  les  missionnaires  à  faire  connaître  leurs  observations.  Gelles- 
ci  sont  précieuses  poui-  la  linguistique  et  pour  r.'thnographie  des  popu- 
lations évangéiisées  par  eux. 

ff  M.  Bouché ,  en  réunissant  une  série  nombreuse  de  proverbes  recueillis 
chez  les  nègres,  s'est  donné  la  lâche  d'établir  que  ceux-ci  ont  une  intel- 


—   l/i7  — 

lig^oiicp  ([lie  IViii  est  {rén(^i;ileinenl  porh"  à  leur  relïiser;  do  plus,  que  sur 
la  prudence,  lajuslic»*,  la  force  et  la  tenip(^raiice,  ils  loiil  preuve  d'une 
conscience  et  d'un  esprit  qui  indiquent  cliez  eux  des  principes  sérieux  de 
morale. 

«rLe  P.  A.  G. ,  qui  ne  signe  que  de  ses  initiales,  s'est  surtout  occupe' 
de  linguistique;  il  donne  une  grammaire  de  la  langue  de  Vili  on  Fidji, 
qui  est  [)ari('C  dans  l'arcliipel  de  ce  nom,  à  l'est  de  la  Nouvelle-Calé- 
donie, plus  un  dictionnaire  latin-uvea,  idiome  polynésien  usité  aux  îles 
VVallis  et  dans  un  grand  nombre  d'Iles  océanieimes.  Ce  travail  a  été 
entrepris  pour  les  jeunes  indigènes  convertis  au  catholicisme  et  élevés 
dans  le  collège  fondé  à  Lono,  l'un  des  principaux  villages  de  l'île 
d'Lvea. 

rr Quant  au  R.  P.  Baudin,  il  a  traduit  le  cab'chisrae  de  Cambrai  en 
nago,  langue  pariée  dans  le  royaume  de  Yoruba,  limitrophe  du  Niger  et 
du  royaume  de  Dahomé.  Cette  traduction  est  destinée  à  être  très  pré- 
cieuse |)our  les  missionnaires,  puisque  la  langue  nago  est  parlée  par  plus 
de  trois  millions  de  noirs,  dans  la  Guinée  septentrionale.» 

SÉANCE  DU   5    AVRIL. 

M.  Ariodante  Fabretti,  correspondant  de  llnslilut,  adresse  en  hom- 
mage {(  l'Académie  deux  publications  qu  il  a  ('liitées  et  qui  sont  inti- 
tulées :  1°  Documenti  di  storia  perughui ,  vol.  I  (Turin,  1887,  in-8"); 
2°  Cronache  délia  città  di  Periigia,  vol.  1  et  III  (^Turin,  1887  et  1888, 
in-8°);  ainsi  que  les  Atli  délia  Società  di  archeologia  c  belle  arli  per  la  pro- 
vincia  di  Torino,  vol.  V,  fasc.  1  et  2  (Turin,  1887-1888,  in-8°). 

Sont  encore  offerts  : 

La  mi/tholoffie  égyptienne ,  les  trarau.v  de  .1/1/.  Bnigsch  et  Lantnne, 
par  M.  .Maspero,  membre  de  l'Institut  i^ Paris,  1889,  in-8%  extrait  de  la 
Revue  de  l'histoire  des  religions); 

Manuel  de  la  langue  égyptienne,  grammaire ,  tableau  des  hiéroglyphes , 
te-rtes  et  glossaire,  par  M.  Victor  Lord,  1"  livraison  (Paris,  i88(). 
iu-/.'); 

Quinze  ans  sous  le  cercle  polaire.  MacLcnzie ,  Anderson ,  Youhon,  par 
M.  l'abbé  Emile  Petitot  (Paris,  1889,  in-8"). 

M.  Gustave  Schlumiseuger  a  la  parole  pour  une  présentation  : 
ffj'ai  riionneur  de  faire  honmiage  à  1" Académie,  de  la  part  de  M.  Cha- 
bouillet,  conservateur  du  Cabinet  des  médailles,  im  des  vétérans  di'  la 
science  numismaticpie.  d'un  exemplaire  du  Discours  \)vonoiué  par  lui  à 


—  l/t8  — 

la  séance  annuelle  (16  décembre  188G)  de  la  Société  des  antiquaires  de 
Normandie,  en  qualité  de  directeur  de  celte  Société  (Caen,  i888,in-8°, 
extrait  du  Bulletin  de  ladite  Société). 

rrCe  discours,  d'un  tour  d'esprit  agréable,  n'est  du  reste  qu'un  pré- 
texte à  une  ou  plutôt  deux  dissertations  traitant  des  antiquités  normandes. 
La  première  est  consacrée  à  la  numismatique.  C/est  une  revision  de  l'his- 
toire du  monnayage  normand,  à  l'occasion  d'une  trouvaille  de  deniers 
inédits  de  celte  province,  acquis  par  le  Cabinet  des  médailles.  La  nou- 
veauté du  type  de  ces  deniers  est  fort  particulière.  Ils  portent  des  noms 
de  monnayeurs.  En  étudiant  ces  pièces  curieuses,  M.  Chabouillet  a  été 
appelé  à  passer  en  revue  toute  la  numismatique  du  duché  de  Normandie. 
Il  n'a  pas  de  peine  à  démontrer  que  la  classification  doit  en  être  entière- 
ment refaite.  On  n'est  même  pas  d'accord  pour  désigner  celles  de  ces 
monnaies  qui  doivent  prendre  la  tête  de  la  série.  Des  lacunes  nombreuses 
existent.  La  suite  des  huit  ducs  ne  comporte  que  trois  noms  différents  : 
Robert,  Guillaume,  Richard,  ce  qui  est  une  grosse  didiculté.  Puis  ces 
monnaies  sont  d'une  rareté  extrême,  ce  qui  n'a  pas  encore  été  bien  ex- 
pliqué. Toutes  les  questions  si  épineuses  de  cette  numismatique  si  inté- 
ressante sont  successivement  passées  en  revue  par  M.  Chabouillet.  Son 
étude  surtout  critique  sera  très  utilement  consultée  par  celui  qui  voudi'a 
entreprendre  un  travail  d'ensemble  sur  la  monnaie  ducale  normande. 
M.  Chabouillet,  qui  conclut  que  l'hisloire  de  cette  monnaie  est  à  refaire, 
s'il  ne  la  refait  pas,  apporte  du  moins  sa  pierie  à  l'édifice  à  reconstruire; 
il  éclaircit  divers  points  demeurés  jusqu'ici  douteux.  On  peut  lui  repro- 
cher trop  de  scepticisme  ou  plutôt  d'hésitation;  mais  il  a  une  grande 
qualité,  il  est  judicieux;  du  moins  cette  qualité  lui  a  été  plus  d'une  fois 
reconnue  par  des  juges  d'ordinaire  sévères. 

ff Après  ce  coup  d'oeil  sur  hs  obscurités  de  l'histoire  fie  la  monnaie 
en  Normandie,  M.  Chabouillet  traite,  dans  une  seconde  dissertation, 
d'oeuvres  de  sculpture  exécutées  dans  cette  même  province  par  un  artiste 
du  pays,  Pierre  Lefaye  ou  Lefeye;  ce  sont  les  deux  statues  funéraires  de 
Jacques  André ,  sieur  de  Sainte-Croix ,  et  de  sa  femme ,  conservées  au  musée 
de  Rayeux  et  exécutées  au  commencement  du  xva"  siècle.  A  propos  des 
blasons  de  ces  deux  personnages,  M.  Chabouillet  disserte  sur  le  symbole 
de  la  cordelière ,  qui  entoure  celui  de  la  femme ,  morte  alors  que  son  époux 
vivait  encore.  On  sait  que  la  cordelière  passe  pour  être  l'attribut  des 
veuves.  Il  faut,  dit  M.  Chabouillet,  distinguer  suivant  les  temps.  Ce 
fut  d'abord  un  simple  symbole  de  dévotion  à  saint  François.  M.  Cha- 
bouillet. qui  malmène  (bit  les  heValdistes.  le  P.  Ménestrier  en  particulier, 


—  i/l'.)  — 

s'élèvft  contre  los  pii'Ienfliics  lois  du  IjI.isoii;  il  iTy  en  avnil  |»as;  il  n'y 
eut  en  cette  matière  qiio  des  usiifres.  Celle  seconde  dissorlalion  est  curieuse 
au  point  de  vue  de  la  critique  des  auteiu-s  liëraldisles,  de  l'c^piff rapide  et 
aussi  à  celui  de  l'histoire  de  l'art  français.  Elle  fait  honneur  à  la  sûreté 
de  la  science  archéologique  de  l'auteur.  i 

M.  OiM'EiiT  présente,  de  la  part  de  l'auteur,  une  brochure intilnlén:  Indi- 
cation appro.rimatii-e  de  vcsli^res  laissés  par  les  populations  précolonihienncs 
du  yicara/jH:i ,  par  M.  Désiré  Pector,  pn-sidcnt  de  la  Société  améiicaine 
de  France,  'i'  partie  (Paris,  i88(j,  in-8°,  extrait  des  Archives  améri- 
caines). 

ff  L'auteur  de  cet  ouvrap^e  traite  avec  une  grande  compétence  ce  sujet 
intéressant  et  nouveau;  il  discute  les  diverses  opinions  émises  par  les 
aniéricanistes  sur  l'origine  des  populations  du  Nicaragua,  et  rend 
compte  des  lieux  où  se  trouvent  les  antiquités  les  phis  importantes.  Une 
carte  dressée  avec  exactitude  et  quelques  charmantes  vues  sont  jointes  à 
la  hrocliure.  ri 

M.  RwAissoN  offre,  au  nom  de  l'auteur,  M.  J.  Berger,  nn  volume  qui 
porte  pour  titre  :  Ecole  du  Louvre  :  un  nouveau  contrat  bilingue,  déniotique- 
grec,  publié  et  expliqué  {Vav'is,  1889,  in-/»°). 

tLc  contrat  cjui  lait  l'objet  de  cette  étude  est  un  contrat  de  vente  réiligé 
sous  Évergète  II,  187  ans  avant  J.-G.  Les  parties  contractantes  sont  deux 
femmes  de  la  corporation  des  choachytes,  qui  n'pandaient  les  libations 
sur  les  morts  et  leur  présentaient  des  offrandes.  Les  biens  vendus  sont 
des  tombes, 

ff  Avant  d'en  venir  au  document  lui-même,  l'auteur  rappelle  briève- 
ment les  croyances  et  les  pratiques  qui  peuvent  servir  à  le  faire  mieux 
comprendre.  Quelles  (étaient  les  croyances  des  Egyptiens  sur  la  mort  et 
la  vie  future?  quelles  pratiques  dérivaient  de  ces  croyances?  quelle  sorte 
de  fonctionnaires  étaient  les  choachytes?  que  savons-nous  de  leur  offici'  et 
de  leurs  mœurs?  telles  sont  les  questions  auxquelles  répond  d'abord 
M.  Berger. 

fil  étudie  ensuite  le  contrat  de  vente,  dont  on  possède  un  texte  grec  et 
un  texte  démotique.  Il  en  donne  une  traduction  française,  et  en  fait  avec 
soin  et  piécision  l'analyse  lexicograiihicpu'  et  ;;rammaticale. 'i 

M.  Delociik  a  la  parole  pour  une  présentation  : 

ffj'ai  mission  d'offrir  à  l'Acadt-mie,  au  nom  de  l'auteur,  une  bro- 
chure inliluK'e  :  Voies  antiques  nvinifestées  pur  la  nature  de  la  végétation , 
piu-  M.  J.  de  Saint-Venant  (Bourges,  1888,  in-8"). 

trDans  cette  brochure,    M.  d<'  Saint-VVnanl.   inspecteur   adjoint  des 


—  150  — 

foi"êts,  expose  les  circonstances  dans  lesquelles  il  a  découvert  sur  le  pla- 
teau forestier  de  l'Orléanais  des  voies  anciennes  dont  il  n'existait  aucune 
trace  apparente  à  la  surface. 

ffDans  les  sables  et  argiles  de  la  Sologne,  l'élément  calcaire  est  entière- 
ment absent,  et  la  végétation  se  compose  exclusivement  d'ajoncs,  de 
bruyères,  de  fougères  et  de  graminées,  appelés  dans  le  pays/en«sses  ou 
augères ,  c'est-à-dire  de  produits  purement  siUcicoles. 

ff M.  de  Saint- Venant  observa,  dans  ses  tournées,  la  brusque  dispari- 
tion de  ces  plantes  sur  certaines  bandes  de  ten-ain  peu  larges,  recou- 
vertes, en  revanche,  de  végétaux  tels  que  les  cornouillers  mâles  et  ner- 
pruns ,  qui  ne  viennent  qu'en  terre  calcaire ,  et  aussi  d'auti-es  espèces  : 
viornes,  fusains,  troènes,  etc. ,  qui  se  rencontrent  parfois  sur  un  sol  non 
calcaire ,  mais  dont  la  réunion  en  masses  dénote  le  voisinage  de  l'élément 
calcaire. 

ffM.  de  Saint-Venant  remarqua  que  partout  oh  ils  se  produisaient, 
ces  changements  dans  la  végétation  prenaient  la  forme  d'une  coulée, 
d'une  faible  largeur  assez  constante,  de  i5  à  5o  mètres,  et,  rapportés  sur 
une  carte,  donnaient  une  hgne  di'oite  parfaite.  Il  fit  pratiquer  des  coupes 
en  plusieurs  endroits  et  trouva,  à  des  profondeurs  variables  (suivant 
l'épaisseur  de  la  terre  végétale),  des  pierres  calcaires  disposées  par  lits  ré- 
guliers et  provenant  de  carrières  éloignées.  Dans  les  fonds  humides  les 
radiers  formaient,  en  alternant  avec  des  couches  de  pierrailles  noyées 
dans  un  mortier,  une  chaussée  dépassant  souvent  un  mètre  d'épaisseur, 
et  présentant  tous  les  caractères  des  voies  romaines. 

frSur  quelques  points  les  pierres  avaient  disparu;  mais  ces  pierres 
ou  des  concrétions  calcaires  provenant  de  matériaux  également  disparus 
avaient  imprégné  le  sol  de  leurs  principes  chimiques,  et  avaient  influencé 
la  végétation  superficielle. 

ffM.  de  Saint-Venant  conclut  de  ces  faits  que  la  nature  de  la  végétation 
peut  être  quelquefois  un  guide  précieux  dans  les  recherches  archéo- 
logiques, pour  retrouver  des  traces  d'habitations  et  d'anciennes  voies 
dans  les  pays  à  sols  argileux  ou  siliceux,  et  surtout  dans  les  bois  dont  les 
espèces  ont  un  caractère  déterminé. 

ffOn  voit,  par  cette  analyse,  l'intérêt  considérable  ipie  présentent  les 
observations  ingénieuses  de  M.  de  Saint- Venant.  Elles  apportent  aux  ex- 
plorateurs une  ressource  nouvelle  pour  constater,  sur  des  points  où  aucun 
signe  superficiel  ne  la  décèle,  la  présence  des  débris  du  passé,  et  spécia- 
lement des  voies  antiques,  dont  le  tracé  a  tant  d'importance  sous  le  rap- 
port de  la  géographie  comparée.  C'est  un  [)rocédé  original  et  d'une  pra- 


—  151   — 

lunio  cnrfaino,  que  lo  ('lomilé  «li's  lra\an\  lnslnHf|ue!^,  dmil  lYniiiioiit 
|)r('si(lciit  si(''<]i'  |)nriiM  nous,  |)()iirrnil,  ce  me  .si'iiil)lc,  iTcoinniaialt;!-  à 
l'alloiition  dos  aicln-olojyues  dos  départements. 

ffll  ne  nie  paraît  pas  inutile  d'ajouter  que  l'auteur  de  cette  de'couverte 
est  le  lils  d  un  de  nos  confrères  de  T Académie  des  sciences,  le  comte  de 
Saint- Venant,  dont  le  monde  savant  déplore  la  perle  récente. 

irje  crois  devoir  encore  rappeler  à  cctie  occasion  <pie,  dans  un  li'avail 
qui  a  ('té  lu  devant  1  "Académie  [lital  ancien  et  décadence  d'une  parlie  du 
Latiuni)  et  qui  est  inséré  dans  les  Mémoires  dits  des  Savants  étrnnffci's , 
M.  de  la  lîlanchère  a  indiqué  un  moyen  analogue  pour  reconnaître  les 
voies  romaines  dans  le  bassin  méditerranéen,  moyen  qu'il  a  lui-même 
employé  en  Italie  et  en  Afrique,  et  (pii  consiste  dans  Tobservalion  de  cer- 
tains vi'{jétaux  de  ces  pays,  qui  allectionnent  les  terres  où  la  pierre  cal- 
caire est  presque  à  Heur  de  sol,  particulièrement  l'asphodèle  {Asplto- 
delus  ramosus),  dont  iNibby  avait  fléjà  remarqué  l'abondance  sur  le  tracé 
des  voies  anciennes.  » 

M.  Georjj-es  Perrot  dépose  sur  le  bureau  le  fascicule  du  mois  de  mars 
1889  du  Bulletin  de  correspondance  hellénique  (Atbènes  et  Paris,  1889, 
ia-8"). 

M.  SciiEFER  fait  hommage  à  l'Académie,  au  nom  de  M.  Hartwig  Dercn- 
bourj;',  |)rofesseur  d'ai-abe  à  l'École  des  langues  orientales  vivantes,  du 
dernier  fascicule  du  traité  grammatical  de  Sîbawaihi  i'^î^-^^-  <^^  Le  lare 
de  Sibawailn ,  traité  de  {j-rannnaire  arabe,  par  Sîboûya,  dit  Sîbawaihi, 
texte  arabe,  publié  d'après  les  manuscrits ,  etc.,  tome  H,  a"  [)artie  (Paris, 
1889,  gr.  in-8"). 

frCe  fascicide  contient  la  Gu  de  l'ouvrage,  dont  les  derniers  chapitres 
sont  consacrés  à  la  phonétique.  Le  texte  en  a  été  établi  sur  le  manuscrit 
de  la  bibliothèque  de  Paris  et  sur  celui  de  TEscurial.  Ce  deinier  manu- 
scrit a  ét<'  surtout  le  guide  de  M.  Derenbourg,  car  il  est  entièrement  voca- 
lisé et  c'est  sur  la  vocalisation  que  l'eposeut  les  théories  exposées  par  Sî- 
bawaihi à  la  lin  de  son  ouvrage. 

tEu  présentant  à  l'Académie  les  différentes  parties  de  ce  traite-, 
que  les  grammairiens  arabes  ont  appelé  le  Livre  par  excellence,  j'ai 
déjà  eu  l'occasion  d'en  faire  ressortir  l'importance.  M.  Sil\e>-lre  de  Sacy 
et  M.  de  liosen  en  avaient  déjà  publié  des  extraits.  Nous  possédons  au- 
jourd'hui, grâce  aux  soins  de  M.  llartwig  Dereid)ourg,  une  édition  com- 
plète de  l'œuvre  du  plus  célèbre  des  grammairiens  arabes.  ■^ 

M.  ScuEFER  présente  également,  au  nom  de  M.  Aristide  Marre, 
chargé  du  cours  de  malais  et  de  javanais  à  l'Ecole  des  langues  orientales 


—   152  — 

vivantes,  le  premier  fascicule  du  texte  malais  du  code  des  successions  et 
du  mariage  :  (^j^-J  J^  çsjà  yl>>  ^^^^j  J^  (Iode  malais  des  successions  et 
du  mariage,  texte  malais,  publié,  traduit  et  annoté,  i"  fascicule  (Pa- 
ris, i889,in-8°). 

rrCe  premier  fascicule  sera  suivi  de  deux  autres,  qui  seront  consacrés 
à  la  traduction ,  avec  notes  et  observations.  » 


SEANCE  DU    1 2    AVRIL. 

Sont  offerts  : 

Annuaire  des  bibliothèques  et  des  archives  pour  i88g,  publié  sous 
les  auspices  du  Ministère  de  l'instruction  publique  [par  M.  Ulysse 
Robert,  inspecteur  général  des  bibliothèques  et  archives]  (Paris,  1889, 
in-12); 

Esquisses  morphologiques,  V:  Les  infinitifs  latins,  par  Victor  Henry, 
chargé  de  cours  à  la  Faculté  des  lettres  de  Paris  (Paris,  1889,  in-8°). 

M.  Delisle  présente  à  l'Académie  les  Lettres  de  Gerbert  {QSS-ggj), 
publiées  avec  une  introduction  et  des  notes  par  Julien  Havet  (  Paris ,  1 889 , 
1  vol.  in-8°  de  la  Collection  de  textes  pour  servir  à  l'étude  et  à  l'enseigne- 
ment de  l'histoire). 

ff  Cette  publication  est  d'une  grande  importance  pour  les  annales  du 
dernier  quart  du  x'  siècle.  Jusqu'ici  on  n'avait  pas  encore  réussi  à  mettre 
en  valeur  toute  la  substance  historique  contenue  dans  les  lettres  de  Ger- 
bert. En  beaucoup  d'endroits,  le  texte  en  était  resté  obscur  et  la  chrono- 
logie incertaine.  iM.  Julien  Havet  a  dissipé  une  partie  de  ces  obscurités 
et  de  ces  incertitudes.  U  a  le  mérite  d'avoir  singulièrement  amélioré  le 
texte,  surtout  à  l'aide  d'un  manuscrit  de  la  bibliothèque  Vallicellane ,  qui 
n'avait  pas  encore  été  employé.  De  plus,  il  a,  le  premier,  déchiffn'  des 
passages  écrits  en  caractères  sténographiques ,  dont  la  lecture  était  indis- 
pensable pour  connaître  le  sens  de  plusieurs  lettres.  Par  une  discussion 
très  ferme  et  très  fine,  il  a  établi  le  classement  des  manuscrits  et  a  dé- 
terminé les  conditions  dans  lesquelles  le  recueil  a  été  formé,  ce  qui  lui  a 
suggéré  d'ingénieuses  observations  chronologiques. 

fr L'introduction  contient  un  exposé  clair  et  complet  de  la  vie  de  Ger- 
bert, avec  une  apprc-ciatioii  du  caractère  de  ce  prélat,  qui  est,  à  coup 
sûr,  un  des  hommes  les  plus  distingués  du  \*  siècle.^ 

M.  Delisle  présente  ensuite  : 

1°  Le  tome  VH,  2'  série,  des  Souvenirs  de  la  Flandre  ivallone,  offert 
à  l'Académie  par  M.  Félix  Brassart  (Douai,  1887.  in-S"); 


—  1."):^  — 

'?."  Les  Notes  historù/ue.';  sur  Saini-Maudé,  par  M .  L  lysse  Hoberl  (Sainl- 
Mandt',  iH8(),  in-iO). 

frDans  cet  opuscule,  M.  Ulysse  Robert  a  rc^uui  avec  soin  tous  les  sou- 
venirs anciens  et  modernes  qui  constiluenl  l'hisloire  de  Saint-Mandf^  de- 
puis le  xm°  siècle." 

M.  le  marquis  d'Hervey  de  Saint-Denys  a  la  parole  pour  un  honnnafje  : 

rrj'ai  rhoiincur  doUVir  à  l'Académie,  de  la  part  de  M.  Aboi  dos  Mi- 
chels, professeur  à  l'École  des  langues  orientales,  un  volume  intitule  : 
(Ihuycii  doi  xua.  Contes  plaisants  annamites,  traduits  en  français  pour 
ta  première  fois,  avec  le  texte  original  en  appendice  (Paris,  1888, 
in-S"). 

fr^i.  Abel  (les  Michels  avait  déjà  donné  quelques-uns  de  ces  contes 
dans  une  cbrestoniatliie  cocliinchinoise  publiée  précédemment.  Cette  nou- 
velle publication  est  d'autant  |)lus  utile  qu'un  instrument  pratique  de 
cette  nature  manquait  complètement  jusqu'à  ce  jour.  Elle  sera  d'un  grand 
profil  pour  les  élèves  de  l'Kcole  des  langues  orientales  qui  voudront  étu- 
dier la  langue  usuelle  et  familière  de  l'Annam.  " 


SEANCE  DL    1 7    AVRIL. 

(Séance  avancée  au  merci edi  à  cause  du  Vendredi  saint.) 

Sont  oITerls  : 

Anniversanj  address  to  the  Numismatic  Society  of  London ,  June  a  i , 
1888,  par  M.  John  Evans,  correspondant  de  l'Institut  (Londres,  1888, 
in-8°,  extrait  du  Numismatic  Chronicle ,  vol.  VIII); 

Une  soirée  chez  les  Aïssaoua,  par  M.  Alfred  Ravet  (Rouen,  1 889 ,  in-4°, 
extrait  du  Bulletin  de  la  Société  normande  de  fféoffraphie). 

M.  DE  BvRTiiÉi.EMv  présente  à  l'Académie,  de  la  part  de  l'auteur,  un 
volume  qui  porte  pour  titre  :  l'judes  archéologiques.  Epoque  des  invasions 
barbares;  industrie  anglo-saxonne ,  par  le  baron  J.  de  Raye  (Paris,  i88tj, 
in-li"). 

rj'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  au  nom  de  M.  Joseph  do  Baye,  un 
ouvrage  rocemmonl  publié  ])ar  lui  dans  le  même  ordre  d'idc'os  ({uo  le 
livTO  du  môme  auteur  présenté  par  moi  il  y  a  quelque  temps.  Il  s'agit 
des  souvenirs  de  l'art  pendant  les  invasions  des  v°  et  vi*  siècles,  révélés 
par  les  fouilles  d'anciennes  sépultures.  M.  de  Baye,  après  s'être  occupé 
des  Lombards  et  des  Vandales,  consacre  celte  nouvelle  élude  aux  Anglo- 
Saxons.  Cotte  publication,  enrichie  de  belles  et  nombreuses  planches. 


—  15/1  — 

toujours  gravées  sur  les  dessins  de  l'auteur,  rc'unit  des  faits  dispersés  un 
peu  partout;  on  y  trouve  des  de'tails  et  des  observations  critiques  exposés 
pour  la  première  fois.  Par  le  fait,  c'est  un  recueil  qui,  tout  en  concernant 
particulièrement  l'île  de  Bretagne,  intéresse  les  ui-chéolog-ues  du  con- 
tinent; ils  V  trouveront  des  rapprochements  et  des  éléments  de  compa- 
raison. 

ffM.  de  Baye  commence  par  exposer,  avec  une  concision  qui  ne  nuit 
pas  à  l'exactitude ,  l'origine  des  barbares  qui  envahirent  la  Bretagne,  les 
Jutes,  les  Angles,  les  Saxons,  les  Frisons;  ces  différentes  tribus  ont  laissé 
dans  leurs  sépultures,  fouillées  avec  soin  depuis  longtemps,  des  armes, 
des  bijoux,  des  objets  d'usage  personnel,  des  poteries,  formant  un  tout 
représentant  pour  l'auteur  l'art  anglo-saxon.  Chacun  de  ces  objets  a  un 
chapitre  particulier.  Je  signalerai  la  partie  du  livre  relative  aux  fibules; 
dans  ce  chapitre,  on  distingue  nettement  les  types  semblables  à  ceux 
du  continent  et  ceux  qui  paraissent  exclusivement  proj)res  aux  insu- 
laires. 

ffM.  de  Baye  attribue  aux  Angles  les  fibules  cruciformes,  qui  lui  semblent 
parentes  de  celles  de  Scandinavie,  ainsi  que  certains  objets  qui  peuvent 
avoir  été  des  attaches  de  sacs  à  l'usage  des  femmes;  aux  Saxons  de  l'ouest, 
les  fibules  cupelliformes ,  que  l'on  ne  rencontre  pas  ailleurs.  Les  riches 
fibules  circulaires  enrichies  de  pierres  précieuses,  et  plus  tard  de  verre 
coloré,  fréquentes  surtout  dans  le  Kent  et  l'île  de  Wight,  fournissent  à 
l'auteur  l'occasion  de  confirmer  ses  appréciations  antérieures  sur  l'origine 
de  l'orfèvrerie  cloisonnée,  qu'il  cherche  chez  les  Goths  d'Orient,  en  laissant 
de  côté  l'inQuence  byzantine.  Cette  opmion,  du  reste,  est  partagée  aujour- 
d'hui ])ar  plusieurs  archéologues  dont  la  compétence  fait  autorité,  n 

M.  Siméon  LncE  a  la  jjarole  pour  un  hommage  : 

ffj'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  an  nom  de  l'auteur,  M.  Eugène 
Lefèvre-Pontalis,  bibliothécaire  du  Comité  des  travaux  historiques  et 
scientifiques,  un  ouvrage  intitulé  :  Monographie  de  l'église  Saint-Maclou 
de  Pantoise  {Ponloise,  1888,  in-^"). 

ffCet  ouvrage,  enrichi  d'un  très  grand  nombre  de  pièces  justificatives 
et  de  fort  belles  planches,  contient  à  la  fois  une  histoire  approfondie  et 
une  description  archéologique  détaillée  et  précise  de  l'un  des  édifices  reli- 
gieux les  plus  intéi^essanls  des  environs  de  Paris.  L'église  Saiut-iMaclou  de 
Pon toise  offre  cela  de  très  particulier  qu'à  un  transept  et  à  un  chevet 
élevés  vers  le  milieu  du  \n°  siècle  on  a  soudé  une  façade  et  une  sacristie 
de  la  seconde  moitié  du  xv°,  une  nef,  des  bas  côtés  et  des  chapelles 
latérales  du  second  quart  dn  xvi%  enfin   mi   couronnement  en  forme 


—  155  — 

tlo  dôme,  encore  inlacl  aujoui-d'liui,  doiil  le  marche'  fut  passif  le  26  sep- 
tembre i552.  Ce  couronnement  est  l'œuvre  d'un  architeclc  nomriK^  Pierre 
Lemercier,  probablement  Taïeul  du  C(^lèbre  Jacques  Lemercier  qui,  pen- 
dant la  première  moitié  du  xvii"  si/'de,  attacha  son  nom  h  rachèvcmont 
du  Louvre,  h  la  construction  de  la  Sorbonne,  du  Palais-lloyal,  de  léffiise 
Sainl-lloch  ol  tle  l'Oratoire. 

ff Beaucoup  de  personnes,  qui  n'ont  pas  étudié  d'assez  près  notre  his- 
toire au  xvni"  siècle,  s'imaginent  que  les  monuments  de  l'art  l'rançais 
n'ont  eu  à  souiïrir  de  ce  que  l'on  a  appelé  le  vandalisme  qu'à  l'époque 
révolu! ionnaire.  (l'est  une  profonde  erreur,  ainsi  que  le  montre  une  fois 
de  plus  M.  Eu{;ène  Lefèvre-Poutalis,  en  retraçant  les  annales  de  Saint- 
Maclou  de  Pontoise  sous  les  règnes  de  Louis  XV  et  de  Louis  XVL  Le 
<)  août  1789,  les  anciennes  verrières  de  cette  église  furent  eidevées  par 
l'ordre  des  marguilli(>rs.  Quelques  amiées  plus  tard,  les  tapisseries  sus- 
pendues aux  murs  furent  mises  aux  enchères.  Le  2 1  juillet  1 788 ,  l'Italien 
Pierre  Borrani,  (|ui  avait  d('j;i  déshonoiv'  les  deux  cathédrales  de  Chartres, 
de  Sonlis  et  l'église  abbatiale  de  Saint-Denis,  s'engagea  à  recouvrir  de 
badigeon  les  murs  de  Saiiit-Maclou  moyeimant  la  somme  de  900  livres. 
Enûn ,  la  mutilation  des  piliers  de  la  nef,  qui  coïncida  avec  la  pose  de  ce 
biidigeon,  coula  3oo  livres. 

r-Par  la  solidité,  par  la  plénitude  de  l'information,  par  la  rectitude  du 
jugement,  la  réserve  constante  et  la  rigueur  de  la  mi'thode  critique,  la 
Moiiofrraphie  de  l'église  Saint-Maclou  de  Pontoise  fait  le  plus  grand 
honneur,  non  seulement  à  l'auteur,  mais  encore  à  l'enseignement  de 
M,  de  Lasteyrie,  qui  l'a  formé  et  dont  il  est  un  des  meilleurs  élèves.» 

SÉANCE  DU   26    AVRIL. 

Sont  offei'ts  : 

Itinéraire  de  mon  voyage  aux  pays  Oromo  et  Sidama;  observations  sur 
le  cours  de  l'Otno  (septembre  188 5 -septembre  1888),  par  M.  Jules  Bo- 
relli  (le  Caire,  1889,  in-/»",  publication  de  la  Soci('té  khi'diviale  de  géo- 
graphie); 

La  ville  de  Rodez  à  l'époque  romaine,  par  M.  B.  Lunet  (Bodez,  1888, 
in-8°); 

Inventarium  iiber  die  Uinterlassenschaft  des  Erasmus  vom  z^.Juli  i536, 
publif'  |)ar  M.  L.  Sieber  (Hàle,  1889,  in-12). 

M.  Dklisle  jirésente,  de  la  [lart  de  l'auteur.  Le  dernier  manuscrit  de 
l'historien  Jacques  Meycr.  Recherches  sur  le  manuscrit  j3o  de  la  bibtio- 


—   156  — 

thè(]ue  de  Saint-Omer,  par  le  P.  Henri  Dussart,  nouvelle  édition,  revue  et 
corrigée  (Sainl-Omer,  1889,  in-8°). 

rrL'auteur  de  cette  notice  a  montré  l'importance  d'un  manuscrit  dont 
le  caractère  n'avait  pas  encore  été  reconnu.  11  a  prouvé  que  le  manu- 
scrit 780  de  Saint-Omer  est  un  recueil  formé  par  Jacques  Meyer,  le  célèbre 
annaliste  de  Flandre,  mort  en  i552.  Entre  autres  morceaux  précieux,  le 
P.  Dussart  y  a  distingué  de  longs  extraits  de  cette  histoire  des  rois 
Charles  VII  et  Louis  XI  qui  est  devenue  célèbre  depuis^que  J.  Quicherat 
l'a  attribuée  en  toute  certitude  à  Thomas  Basin,  évèque  de  Lisieux. 
Jacques  Meyer  cite  déjà  cet  ouvrage  sous  le  nom  de  Thomas  Basin ,  témoi- 
gnage qui  n'est  pas  à  dédaigner  pour  corroborer  l'opinion  de  Quicherat. 
Le  recueil  de  Meyer  contient  aussi  des  fragments  très  étendus  d'un 
journal  historique  du  xv°  siècle,  qui  ne  semble  pas  nous  être  parvenu. 
C'est  l'œuvre  d'un  notaire  de  Bruges  nommé  Bomboud  de  Doppere.  Le 
P.  Dussart  y  a  relevé  un  article  qui  nous  apprend  la  patrie  première  et 
la  date  jusqu'à  présent  incertaine  de  la  mort  du  peintre  Jean  Memling  : 
Die  XI  Augusti  [lâgâ],  Brugis  ohiit  magister  Joannes  Memmeli7ic ,  qttem 
prœdicabanl  perihssinmm  fuisse  et  excellentissimum  pictorcm  totius  tune 
orhis  christiani.  Oriundus  erat  Magunciaco ,  sepnltus  Brugis  ad  yEgidii.  « 

Ont  encore  été  offerts  : 

Ahhandlungen  der  historischen  Classe  der  Kôniglich  Baijenschen  Aka- 
demie  der  Wissenschaften ,  vol.  XVIII,  2"  partie  (Munich,  1888, 
in-/»"); 

Annales  du  commerce  extérieur,  année  1889,  2",  3'  et  h"  fascicules 
(Paris,  i889,gr.  in-8'); 

Annales  du  Musée  Guimet.  Revue  de  l'histoire  des  religions,  publiée  sous 
la  direction  de  M.  Jean  Béville,  9=  année,  t.  XVIII,  n"  3  (Paris,  1888, 
in-8°); 

Annuaire  statistique  de  la  France,  11"  année,  1888  (Nancy,  1888, 
gr.  in-8°); 

Atti  délia  Rcale  Accademia  dei  Lincei ,  285"  et  986"  années,  li°  série, 
Rendiconti,  vol.  IV,  fasc.  10-12;  vol.  V,  fasc.  1-2  (Bome,  1888-1889, 
m-W); 

Riblioteca  nazionale  centrale  di  Firenze.  Bollettino  délie  pubblicazioni 
italiane,  n°'  76-79  (Florence,  1889,  in-S"); 

Bibliotcca  nazionale  centrale  Vitlorio  Enianiiek  di  Borna.  Bollettino  délie 
opère  moderne  straniere  acquistate  dalle  biblioteche  pubbliche  governative 


—    157  — 

dd  re^yno  d'Uulia,  \n|.   III.  n"  0;   vol.  IV,   ii'    i    (Home,   i888-i88(j, 
10-8°); 

liihlinllihiue  de  l'Ecole  des  chartes,  l.  XLIX,  iV  livniison  (Paris,  i888. 
in-8"); 

liiilletiu  di:  la  Suciélé  des  (in(i(ptniips  de  la  Moiiiiic ,  '^Pl"  aniK'o.  nou- 
velle si'rie,  i6()''  livraison  (Sainl-Oiiior,  i88(),  in-8"); 

Liullelin  mensuel  de  la  Société  centrale  des  architectes  français ,  6"  série, 
vol.  IV.  n'^  10  el  M  (Paris,  i88(),  in-8''); 

Bulletins  de  ta  Société  des  aulir/uaires  de  l'Ouest,  fi'  trimeslre  do  i888 
(Poiti.Ts,  iS8(),  in-8"); 

Bulletins  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie,  novembrfi  fil  dé- 
cenihrf  i  888  (Amiens,  1889,  in-8"); 

Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité,  par  MM.  (^loorges  Perrol,  membre  de 
rAcadémie,  (t  Charles  Chipiez,  l.  V,  livraisons  926-236  (Paris,  1889, 
gr.  in-8"'); 

Mémoires  de  la  Société  nationale  d'agriculture ,  sciences  et  arts  d'Angers 
{ancienne  Académie  d'Angers),  h'  sërie,  t.  Il  (Angers,  1889,  in-8''); 

Proceedings  of  the  Society  of  Biblical  archœolog;/ ,  vol.  \T,  h"  el  5'  ])ar- 
lies  ( I^ondres ,  1889,  in-8'' )  ; 

Bevista  archeologica ,  pnbliée  par  M.  A.-C.  Borges  de  Figiieiredo, 
vol.  111,  n"'  :]  et  h  (I.isboime,  1889,  in-8°); 

Prévue  africaine ,  journal  des  travaux  de  la  Société  historique  algérienne , 
3a' année .'n"  189  (Alger,  1888,  in-S"); 

Berne  archéologique,  ?/  série,  1.  XIII,  janvier-février  1889  (Paris, 
i889,iii-8''); 

Bévue  de  la  Société  des  études  historiques,  U°  série,  (.  VI  (Paris,  1888, 
ui-8"); 

Bévue  des  Pi/rénées  el  de  fa  France  méridionale  (organe  de  l'Association 
pyrénéenne) ,  dm^éc  [)ar  MM.  Julien  Sacaze  el  le  docteur  F.  Ciarrigou, 
année  1889,  l.  l,  n"  2  (Toulouse,  in-8''); 

Revue  des  questions  historiques,  28°  année,  90'  livraison  (Paris,  1889, 
in-8''); 

Revue  épigraphique  du  midi  de  la  France,  dirigée  par  M.  A.  Allmei-, 
correspondant  de  Tlnstilut,  n"  5-3  (Vienne  [Isèi-e],  1889,  in-8''); 

Berur  géographique  internationale ,  dirigée  par  M.  Georges  Renaud , 
i/i"  aimée,  n"'  lôg,  ttio  (Paris,  1889,  in-'i"); 

Berne  numismatique ,  dirigée  par  MM.  Anatole  de  Hai-lhélemy,  Gustave 

XVII.  '  ' 

IMmiUPttlr.    !liTtO,tLf. 


—  158  — 

Sclilumberger,  mejnhresde  l'Académie,  et  Ernest  Babeloii.  3"  série,  t.  Vil, 
i"  trimestre  de  1889  (Paris,  1889,  iii-8°); 

Société  centrale  des  architectes  français.  Annuaire  pour  l'année  j88() 
(Paris,  1889,  in-8'); 

Viestnik  hrvatskoga  archeologihkogn  druzlva,  1  1'  année,  n"  2  (Agram, 
i889,in-8°). 


COMPTES    RENDUS  DES  SEANCES 

DE 

L'ACADÉMIE    DES    INSCRlPïlOiNS 

ET  BELLES-LETTRES 
PENDANT   L'ANNÉE  1889. 


COMPTES   RKNDUS  DES  SEAINCES. 
MAI-JUIN. 


PRÉSIDENCE   DE  M.  lîARBIEU   DK   MEYNAIUI 


SÉANCE   DU   3    MAI. 

M.  Maspero,  au  nom  de  la  Commission  du  prix  Loubat,  lit  le 
rap]>oil  suivant  : 

«La  (commission,  après  cxanion  dos  ouvrajjes  adresses  au  con- 
cours, décide  que  le  prix  sera  décerné  à  M.  Léon  de  Rosny,  pour 
son  Codex  Peresianns. 

K  Grâce  à  la  libéralité  du  fondateur,  rAcadémic  est  en  mesure 
de  disposer  exceptionnellement,  pour  cette  année,  d'une  somme 
do  mille  francs.  Cette  somme  est  attribuée  à  l\L  Rémi  Siméon,à 
titre  de  second  prix,  pour  son  ouvrage  intitulé;  Annales  de  Chi- 
nudpakin.  » 

L'Académie  donne  acte  à  la  Commission  des  conclusions  de 
son  rapport. 

M.  René  de  La  Blancliore,  directeur  du  service  dos  anticpiilés 
et  des  arts  en  Tunisie,  conimunicpie  ([uolcjuos  ronseiguoinonls 
sur  les  fouilles  lécemmoiil  exécutées.  M.  le  commandant  de  La- 
comble,  major  du  'i"  tirailleurs,  à  Sousse.  a  exploré  la  nécropolo 

XVII.  I  ;'• 

ittr.iMtatr.  itrtiii.Lr. 


—  160  — 

romaine  d'Hadrumète,  située  non  loin  de  cette  ville,  au  camp 
Sabaltier,  sur  la  route  de  Kairouan. 

Les  tonnbeaux  de  cette  nécropole  sont  généralement  groupés 
dans  des  hypogées  voisins  les  uns  des  autres.  Ils  se  composent  de 
massifs  maçonnés,  souvent  décorés  de  peintures.  Ils  appartien- 
nent en  général  au  ii""  siècle  de  notre  ère  ou  aux  époques  immé- 
diatement voisines.  Cette  nécropole  fait  donc  chronologiquement 
suite  à  celle  qui  existe  au  camp  actuel,  et  qui  a  fait  Tobjet  d'une 
communication  à  l'Académie;  elle  précède  en  date  celle  que 
M.  de  Lacomble  croit  avoir  retrouvée  plus  loin  de  la  ville,  et 
qu'on  explorera  plus  tard. 

M.  de  La  Blanchère  fait  passer  sous  les  yeux  des  membres  de 
l'Académie  une  série  de  terres  cuites,  qui  représente  la  part  du 
Musée  du  Bardo  dans  le  produit  de  la  fouille.  Ces  objets  figure- 
ront dans  les  vitrines  de  la  section  tunisienne  à  l'Exposition  uni- 
verselle. Ce  sont  :  une  Vénus  ouvrant  son  manteau,  un  Atys 
jouant  de  la  lyre,  un  lion,  un  Éros,  un  guerrier,  un  fragment 
d'une  Léda,  deux  têtes  provenant  de  recherches  antérieures  faites 
par  M.  le  D""  Vercoulre,  un  médaillon  représentant  un  Éros  dor- 
mant sur  une  peau  de  lion,  un  taureau,  un  cavalier,  une  femme 
indigène  sur  un  chameau ,  une  plaque  ronde,  enfin,  qui  représente 
une  course  de  chars  attelés  de  chameaux  dans  le  cirque. 

M.  de  La  Blanchère  reconnaît  dans  certaines  de  ces  pièces  des 
surmoulages  d'élégants  modèles  de  style  hellénistique,  dans  les 
autres  des  copies  d'originaux  romains,  dans  les  deux  dernières 
enfin  des  œuvres  d'inspiration  locale,  dont  l'une  peut  être  rap- 
prochée du  texte  de  Suétone,  paj-  lequel  on  apprend  que  Néron, 
le  premier,  fit  courir  des  quadriges  de  chameaux.  Il  rappelle 
que  la  fouille  de  M.  de  Lacomble  a  été  visitée,  sous  sa  conduite, 
par  la  délégation  ([ui  vint,  l'année  dernière,  assister  à  l'inaugu- 
ration du  musée  où  les  objets  présentés  prendront  place;  sur  la 
proposition  de  son  Secrétaire  perpétuel,  membre  de  cette  déléga- 
tion, l'Académie  avait  bien  voulu  voter,  à  titre  d'encouragement, 
un  léger  subside  à  l'auteur,  qui  est,  parmi  les  officiers  de  la 
brigade  d'occupation,  un  des  plus  zélés  et  des  plus  intelligents 
amateurs  d'archéologie. 


—    ICI    — 

M.  René  de  Maulde  communique  une  noie  inlilul('e  :  Un  projet 
iVexposhiou  inlnnalionale  en  ih'jo  ^^K 

Il  sifTnalc  des  loltios  patentes  en  date  du  aG  juillet  t'i'yi,  dont 
il  a  l'elrouv»;  le  texte  à  la  Bibliotliè(jiie  nationale  et  ([ui  nous  font 
connaître  un  projet  de  Louis  XI,  ijfnoré  de  tous  les  historiens. 
Il  s"a{|issait  d'envoyer  en  Anjjletei-re  un  rhoix  de  marchandises 
françaises,  pour  les  faire  apprécier  du  commerce  anjjlais  et  as- 
surer ainsi  un  débouché,  de  l'autre  côté  du  détroit,  aux  pro- 
duits de  notre  industrie.  Diverses  circonstances  mirent  obstacle 
à  l'exécution  de  l'entreprise. 

M.  Germain  Bapst  présente  un  nouveau  mémoire  sur  la  pro- 
venance de  l'étain  aux  temps  anciens. 

Il  expose  des  faits  d'où  il  résulte  qu'il  existe  des  mines  d'étain 
au  sud  du  lac  Bjiïkal,  en  Sibérie,  et  aux  environs  de  Méched,  en 
Perse.  Pour  plusieurs  raisons  archéolofriqnes  ou  philolojficjues, 
il  est  fort  probable  que  ces  mines  ont  dû  (Mre  les  plus  ancienne- 
ment exploitées  du  (jlobc  et  que  par  conséquent  c'est  sur  ces  deux 
points  qu'a  ét(*  extrait  l'étain  (|ui  a  servi  à  fabriquer  les  premiers 
bronzes,  dont  l'invention  a  marqué  un  des  grands  pas  du  progrès 
de  l'humanité. 

M.  Germain  Bapst  rappelle  que,  lorsqu'en  188G  il  soumit  à 
l'Académie  une  première  communication  sur  l'origine  de  l'étain, 
des  observations  lui  furent  faites  par  M.  le  marquis  d'Hervey 
de  Saint-Denys  et  par  M.  Pavet  de  Courteille.  La  solution  qu'il 
apporte  aujourd'hui  sur  ce  problème  répond,  pense-t-il,  à  ces 
observations  de  la  façon  la  plus  formelle. 

M.  B\rtBiER  DE  Mevnard  fait  observer  que  le  nom  de  l'étain, 
chez  tous  les  peuples  musulmans,  est  qalaî  {^^':^  ou  ^sAj). 
Or,  ce  nom  est  aussi  celui  que  les  voyageurs  et  les  géographes 
arabes  les  plus  anciens  donnent  à  la  presqu'île  de  Malacca.  Il 
semble  naturel  d'en  conclure  que  l'étain  aura  été  primitivement 
tiré  de  la  Malaisie  et  importé  de  là  en  Euro[)e,  pendant  le  moyen 
âge,  par  les  navigateurs  arabes  et  persans. 

MM.  Mairy  et  Opi'ert  font  observer  que  le  plomb  et  l'étain  ont 

"'  Voir  aux  Commi'mc^tions,  ifXIVlp.  183-189). 

1  a . 


—  1G2  — 

été  souvent  confondus.  C'est  un  fait  qu'il  faut  avoir  présent  à 
l'esprit  pour  éviter  de  graves  erreurs  en  cette  matière. 

M.  Pavet  de  CouRTEiLLE  peusc  que  le  mot  ^^'^  doit  être  d'ori- 
gine turque.  Les  Turcs  ont  pour  tous  les  métaux  des  noms  tirés 
de  leur  propre  langue  :  il  n'est  pas  vraisemblable  qu'ils  aient  em- 
prunté à  un  idiome  étranger  celui  de  l'étain. 

M.  le  D'  G. -A.  Costomiris,  professeur  agrégé  d'ophtalmologie 
et  d'otologie  à  Athènes,  commence  la  lecture  d'une  Etude  sur  les 
écrits  encore  inédits  des  médecins  grecs,  et  sur  ceux  dont  le  texte  grec 
est  perdu  et  dont  il  n^a  été  conservé  que  des  traductions  en  latin  ou  en 
arabe  ^^^ 


SEANCE   DU    10  MAI. 

M.  Menaînt  commence  la  lecture  d'un  mémoire  sur  les  inscrip- 
tions de  Hamath. 

Il  passe  en  revue  les  monuments  de  l'Asie  Mineure  et  de  la 
Syrie  dus  à  la  civilisation  hétéenne,  à  laquelle  se  rattachent  ces 
inscriptions;  puis  il  rappelle  les  circonstances  dans  lesquelles 
elles  ont  été  découvertes  et  les  travaux  dont  elles  ont  été  l'objet. 

L'étude  des  textes  hétéens  est  de   date  récente.  Jusqu'ici  le 

D'  Hayes  Ward,  le  D"^  Sayce  et  M.  W.  Wright  sont  les  seuls  qui 

ont  porté  leur  attention  d'une  manière  fructueuse  sur  ces  mys- 

rieux  hiéroglyphes.  La  lecture  des  inscriptions  héléennes  pro- 

t  les  plus  intéressantes  révélations  au  sujet  d'un  peuple  dont 
on  ne  soupçonnait  l'existence  que  par  quelques  passages  de  do- 
cuments assyriens  et  égyptiens.  Ceux-ci  laissaient  entrevoir  le 
rôle  considérable  des  Khétas-Khassi  depuis  le  xvf  siècle  avant 
notre  ère  jusqu'au  jour  où  Sargon,  roi  d'Assyrie,  mit  fin  à  leur 
souveraineté  sur  les  bords  de  TEuphrate  par  la  prise  de  Karkemis 
(717  ans  avant  notre  ère). 

M.  Menant  abordera,  dans  sa  prochaine  lecture,  l'analyse  des 
textes. 

M.  Gaston  Paris  lit  une  note  sur  Martin  de  Braga  et  Sénèque. 

C'   Voir  aux  Commimcations,  n°  XV  (p.  190-197). 


—  1G3  — 

M.  Hauréau  a  montré  que  la  première  partie  d'un  livre  inti- 
tulé :  De  copia  verborum,  faussement  attribuée  à  Sénèque,  était 
identique  au  Liber  de  quatuor  virtiitibus,  que  beaucoup  de  manu- 
scrits donnent  aussi  sous  le  nom  de  Sénèque,  mais  que  Martin, 
évéquc  de  Braga  en  Galice  au  vi^  siècle,  donne  formellement 
pour  son  œuvre  propre  et  qu'il  intitule  :  Foi^ula  honestœ  vitœ. 
Âfartin,  selon  M.  Hauréau,  aurait  donc  commis  un  plagiat. 
M.  Paris  s'efforce  d'élablir,  au  contraire,  que  Tévéque  Martin, 
dont  tous  les  contemporains  célèbrent  les  vertus  et  qui  est  encore 
lionoré  comme  saint,  na  pas  été  plagiaire.  Il  a  réellement  com- 
posé la  Formula  honestœ  vitœ,  qui,  sous  le  titre  de  Liber  de  quatuor 
virtutibus,  a  été  attribuée  par  les  copistes  à  Sénèque,  puis  incor- 
porée au  livre  De  copia  verborum ,  centon  de  Sénèque  composé  au 
iv^  siècle,  sans  doute  par  le  même  auteur  à  qui  nous  devons  la 
fausse  correspondance  entre  Sénèque  et  saint  Paul. 

M.  Hauréau  serait  tout  disposé  à  admettre  la  rectification  pro- 
posée par  M.  Gaston  Paris,  s'il  n'était  arrêté  par  une  dilficulté 
de  langue.  On  possède  deux  écrits  qui  sont  certainement  de 
IMartin  de  Brnga,  une  Epistola  moralis  et  une  Homilia  de  correc- 
tione  rusticorum.  Ils  sont  d'une  langue  barbare,  qui  ne  rappelle 
en  rien  la  latinité  fleurie  et  apprêtée  du  Liber  de  quatuor  virtu- 
tibus ^^h 

M.  Emile  Cartailbac,  directeur  de  la  revue  intitulée  :  Maté- 
riaux pour  r histoire  primitive  de  l'homme,  rend  compte  d'une  explo- 
ration arcliéologique  des  îles  Baléares,  Majorque  et  Minorque.  11 
a  principalement  étudié  les  monuments  primitifs  appelés  cijclo- 
péens  ou  pclasgiques. 

Il  y  a  de  véiitables  villes,  encore  munies  de  leurs  fortifications, 
composées  de  blocs  qui  ont  jusqu'à  9  mètres  cubes.  Les  ruines 
renfermées  dans  ces  murailles  comprennent  ordinairement  : 

1°  Des  habitations  établies  très  grossièrement  an  moyen  de 
blocs  bruts  soutenus  à  2  mètres  de  haut  par  des  piliers  espacés 
de  1'"  5o  à  'î  mètres;  le  visiteur  de  ces  ruines,  marchant  sur  le 
toit  de  ces  habitations,  trouve  à  chaque  pas  un  bloc  éboulé  et 

'*    Voir  ci-après  (p.  169). 


—    16/4    — 

peut  ainsi  pénétrer  dans  les  galeries,  qui  couvrent  des  centaines 
de  mètres  carrés; 

2°  Une  construclion  beaucoup  plus  grande,  avec  des  blocs 
assez  bien  dégrossis  et  occupant  dans  chaque  ville  le  point  cul- 
minant ou  principal;  la  voûte  de  ces  édifices  était  formée  par 
des  pierres  plates,  laiges  et  longues,  aboutissant  à  un  énorme 
pilier  central  monolithe,  qui  a  généralement  gardé  sa  position 
verticale  et  que  les  archéologues  d'autrefois  ont  pris  pour  un  autel; 

3°  Des  tours  rondes,  rarement  carrées,  dites  talayots,  con- 
struites au  moyen  d'assises  très  simples  de  blocs  plats  horizon- 
taux et  souvent  volumineux  (jusqu'à  3'"  5o),  pjesque  jamais 
dégrossis;  les  murs,  de  3  et  /i  mètres  de  diamètre,  protègent  une 
petite  crypte  dont  l'entrée  a  l'^'So  à  a  mètres  de  hauteur,  sur 
1  mètre  de  largeur;  la  voûte  de  la  crypte  est  formée  par  des 
dalles  à  encorbellement;  lorsque  le  diamètre  dépasse  5  mètres 
environ,  il  y  a  un  ou  deux  piliers  de  soutènement; 

h"  Des  grottes  creusées  dans  la  roche  tendre  qui  forme  le 
sol;  le  plan  de  ces  grottes  rappelle  celui  des  grottes  sépulcrales 
des  environs  d'Arles,  en  Provence. 

En  dehors  des  villes,  on  remarque  les  sépultures  appelées  nau 
ou  naveias;  ce  sont  des  tours  allongées,  dont  la  forme  figure  assez 
bien  une  barque  renversée.  i\l.  Cartailhac  y  a  recueilli  de  nom- 
breux débris  humains. 

Enfin,  le  long  des  côtes,  on  remarque,  accumulées  sur  certains 
points  en  nombre  prodigieux,  des  grottes  sépulcrales  creusées  dans 
la  roche  et  dont  les  détails  architectoniques  ont  un  grand  intérêt. 

En  fait  d'objets  recueillis  au  cours  des  fouilles,  M.  Cartailhac 
signale  des  poteries  et  des  bronzes,  dont  il  ne  connaît  nulle 
part  les  similaires.  L'âge  de  la  pierre  parait  faire  défaut  dans  les 
îles;  les  plus  anciens  objets  correspondent  à  la  fin  de  notre  âge 
du  bronze. 

M,  le  D""  G.-A.  Costomiris,  professeur  agrégé  d'ophtalmologie  et 
d'otologie  à  Athènes,  continue  la  lecture  de  son  Elude  sur  les 
écrits  des  médecins  grecs,  etc.  t^'. 

'')  Voir  aux  Communications,  n°  XV  (p.  190-197). 


—  1G5  — 

Le  Iraité  liippocratiqiie  Des  semaines  cl  un  graiitl  nombre  des 
œuvres  de  Galien  n'existent  qu'en  lalin,  et  les  six  derniers  livres 
des  Administrations  anatomiques  de  Galien  seulement  en  arabe; 
ie  texte  grec  de  ces  traites  ayant  été  perdu,  ce  serait,  dit  M.Cos- 
toniiris,  une  justice  à  rendre  à  ces  grands  médecins  de  Fanli- 
(juité  de  les  traduire  en  grec. 

Plusieurs  ouvrages  très  importants,  dont  le  texte  grec  existe, 
sont  encore  inédits.  Tels  sont  :  un  grand  nombre  des  écrits  de 
Galien  ou  pseudo-galéniques;  le  Rhizolomicon  de  Cralévas;  le 
Di/naméinn  d'.Elius  Promotus  et  ses  écrits  intitulés  :  <I>y(T<xà  Kod 
dvTinaOvTifioi  et  Ilep)  ioêôXuv  xa)  S-n\r]TiTpiwv  (papfjtdKoov  ;  le 
traité  Des  maladies  des  femmes  de  Métrodora;  six  livres  d'A(Uius 
(X  et  Xll-XVI);  les  quatre  derniers  livres  de  la  MétJiode  thérapeu- 
tique de  Jean  Acluarius;  le  Dijnaméron  de  Nicolas  Myrepsus;  une 
grande  partie  des  Hippiatriqnes;  les  Ephodes  d'Abou  J)jarar,  tra- 
duits en  grec  par  Constantin  de  Rliégium;  la  Sy)iopsis  de  Jean 
rArcliiatre;  un  traité  anonyme  très  ini|)oitant  sur  la  médecine 
et  un  grand  nombre  de  petits  traités,  dont  les  uns  portent  le 
nom  de  leurs  auteurs,  tandis  que  les  autres  sont  anonymes  ou 
pseudonymes.  (îe  serait  un  jfraiid  service  à  rendre  à  la  science, 
au  point  de  vue  bistori([ue,  pbilologique  et  même  médical,  de 
publier  le  texte  grec  de  ces  divers  ouvrages. 


SEANCE    DU    17    MAI. 

Le  Directeur  de  l'enseignement  supérieur  transmet  à  l'Aca- 
démie deux  mémoires  de  MM.  Lechat  et  Bérard,  membres  de 
l'École  française  d'Atbènes,  intitulés,  le  premier  :  Klude  sur  les 
sépultures  archaïques  de  l'Acropole,  et  le  second:  U arbitrage  inter- 
national chez  les  Grecs.  Ces  mt'moires  sont  renvoyés  à  la  Commis- 
sion des  Ecoles  françaises  d'Athènes  et  de  Piome. 

M,  F.  Hichter,  de  Vienne,  présente  à  l'Académie  deux  tableaux 
à  l'encaustique  et  une  tapisserie  de  haute  lisse  provenant  de 
l'Égvpte.  (îes  objets  datent  des  temps  compris  depuis  le  i''  siècle 
avant  J.-C.  jusqu'au  m'  siècle  de  notre  ère.  Ils  font  partie  d'une 


—  106  — 

collection  qui  appartient  à  M.  Th.  Graf  et  qui  est  actuellement 
exposée  à  Paris,  rue  de  Rennes,  IxU. 

M.  Maspero  donne  quelques  de'tails  sur  la  collection  dont  il  s'agit. 

La  trouvaille  a  e'te'  faite  à  Roubayàt  (Fayoum).  Les  panneaux, 
au  nombre  de  quatre-vingt-douze,  sont  peints  partie  à  la  cire, 
partie  à  l'œuf. 

Les  portraits  appartiennent  pour  la  plupart  à  l'époque  des 
Antonins.  Ils  proviennent  de  momies  gréco-égyptiennes.  Le  mode 
d'agencement  des  momies  changea  vers  la  fin  du  i"  siècle.  A  la 
forme  conventionnelle  que  Ton  donnait  aux  cercueils  on  sub- 
stitua une  forme  nouvelle  :  uue  caisse  oblongue  remplaça  la 
gaine  modelée  sur  les  contours  vagues  du  corps;  au  lieu  du 
masque  en  relief,  on  inséra  au-dessus  de  la  place  oii  se  trouvait 
la  tête  un  panneau  en  bois  portant  un  portrait  du  mort  ou  de  la 
morte.  Cet  usage  se  retrouve  à  Thèbes  comme  au  Fayoum  :  il 
paraît  avoir  duré  un  siècle  ou  un  siècle  et  demi  environ. 

Les  tapisseries  étaient  appliquées  sur  les  vêtements  du  mort: 
les  panneaux  carrés  dans  le  dos,  des  bandes  le  long  des  cou- 
tures, parfois  une  calotte  sur  la  lète  et  des  chaussons  en  tapis- 
serie aux  pieds.  Le  point  est  le  point  des  Gobelins.  Les  motifs 
sont  souvent  païens. 

La  collection  de  M.  Graf  est  la  plus  complète  de  ce  genre 
qu'on  ait  jamais  vue  et  il  serait  à  désirer  qu'elle  fût  acquise  par 
quelque  musée. 

M.  Ravaisson  fait  remarquer  le  caractère  historique  qu'offrent 
les  peintures  présentées  par  M.  Richter,  et  il  ajoute  qu'il  en  est 
de  même  pour  les  représentations  funéraires  chez  les  Grecs.  Aux 
hautes  époques,  les  morts,  sur  ces  monuments,  ont  une  physio- 
nomie tout  idéale;  ce  sont  des  héros  ou  demi-dieux,  ou  plutôt 
des  humains  transformés  en  héros.  Plus  tard  s'établit  peu  à  peu 
l'usage  de  les  figurer  tels  qu'ils  avaient  été  pendant  leur  vie. 
Certains  monuments  grecs  et  un  grand  nombre  de  monuments 
romains  en  témoignent.  On  voit  qu'il  en  a  été  de  même  en 
Egypte.  En  Eg\ptc  comme  en  Grèce  et  à  Rome,  on  a  passé  gra- 
duellement d'un  art  tout  idéaliste,  pour  ainsi  dire,  à  un  art  de 
caractère  réaliste  ou  historique. 


—   167  — 

M.  Aloïs  Heiss  communiciue  une  noie  sur  la  démence  de  la 
reine  Jeanne  de  Castille,  lemnie  de  Philippe  le  Beau  et  mère  de 
Charles-Quint. 

M.  Heiss  combat  la  thèse  de  M.  Bergenroth,  qui  a  cherché  à 
prouver  que  la  démence  de  Jeanne  ne  se  manifesta  que  long- 
temps après  le  décès  de  son  mari  et  qu'en  iSao  cette  princesse 
était  en  possession  de  toutes  ses  facultés.  La  folie  de  la  reine, 
dans  ce  système,  aurait  été  une  invention  de  Ferdinand  le  Ca- 
tholique  pour  s'emparer  du  gouvernement  des  Etats  de  sa  fille, 
et  Charles-Quint,  se  servant  du  même  prétexte,  aurait  maintenu 
sa  mère  en  captivité  pour  détenii'  à  son  profit  le  royaume  de 
Castille.  Enfin,  les  mauvais  traitements  infligés  à  Jeanne,  d'après 
les  ordres  donnés  à  ses  geôliers  par  son  père  et  par  son  fils, 
auraient  à  la  longue  déterminé  la  terrible  maladie  mentale  dont 
la  reine  de  Castille  ne  fut  délivrée  que  par  sa  mort,  arrivée 
en  i555. 

Contrairement  aux  assertions  de  M.  Bergenroth  et  en  se  fon- 
dant sur  des  documents  originaux  publiés  en  Espagne,  M.  Heiss 
s'attache  à  établir: 

i"  Que  la  fille  des  rois  catholiques  donna  des  symptômes  non 
équivoques  de  démence  dès  i5o3  et  que  Tannée  suivante  cette 
démence  était  déclarée  officiellement  dans  le  testament  de  la 
reine  Isabelle,  sa  mère; 

2°  Que  Jeanne  ne  fut  pas  enfermée  à  Tortesillas  dès  1506, 
comme  le  veut  M.  Bergenroth,  mais  qu'elle  ne  s'y  installa  qu'en 
1609; 

3°  Que  le  corps  de  Philippe  le  Beau  ne  fut  pas  transporté 
directement  de  la  chartreuse  de  Miraflores,  près  de  Burgos,  à 
Grenade,  mais  que  Jeanne  l'eut  constamment  auprès  d'elle  (jus- 
qu'en i592)  pendant  les  différents  séjours  qu'elle  fit  à  Torque- 
mada,  à  Hornillos  et  à  Arcos; 

k"  Que  les  violences  dont  les  gouverneurs  de  la  maison  de  la 
reine  usèrent  envers  elle  ont  été  singulièrement  exagérées  et 
n'avaient  d'autre  but  que  de  l'empêcher  de  mourir  de  faim,  en 
l'obligeant  à  prendre  une  nourriture  que,  dans  sa  folie, elle  refu- 
sait obstinément; 


—  168  — 

5°  Que,  si  Charles -Quint  a  maintenu  sa  mère  séparée  du 
monde,  c'est  parce  que  la  malheureuse  princesse  était  sujette  à 
des  crises  nerveuses  pendant  lesquelles  elle  perdait  complètement 
la  conscience  de  son  rang  et  de  sa  dignité. 

M.  le  D'  Costomiris  achève  la  lecture  de  son  Etude  sur  les  écrits 
des  anciens  médeœis  grecs  ^^\ 


SÉANCE  DU    2 4   MAI. 

Le  Président  annonce  à  TAcadémie  la  mort  de  M.  W.  Wright, 
professeur  de  langues  orientales  à  Cambridge. 

Ce  savant,  qui  était  correspondant  de  l'Académie  depuis  dix 
ans,  a  rendu  par  ses  ouvrages  et  son  enseignement  des  services 
éminents  à  l'étude  des  langues  sémitiques,  en  particulier  aux 
littératures  syriaque  et  arabe.  Sa  mort  laissera  de  profonds  re- 
grets au  monde  savant. 

M.  Geffroy,  directeur  de  l'École  française  de  Rome,  adresse 
deux  lettres  au  Président  de  l'Académie. 

Dans  la  première,  notre  confrère  donne  des  détails  sur  deux 
sarcophages  qui  viennent  d'être  trouvés  dans  le  quartier  des  Prati 
di  CasteUo,  à  Rome,  et  qui  contiennent  les  sépultures  de  deux 
personnes  de  la  gens  Crepereia.  L'un  de  ces  sarcophages  renfer- 
mait, entre  autres  objets,  une  poupée  de  bois,  articulée  aux  bras 
et  aux  jambes  et  fort  bien  conservée  f'-^. 

Dans  la  seconde  lettre,  M.  Geffroy  entretient  l'Académie  des 
résultats  des  dernières  fouilles  faites  à  Sélinonte  et  à  Ostie,  ainsi 
que  de  la  découverte  d'un  nouveau  buste  d'Auguste,  trouvé  à 
Rome  '^^. 

Le  Directeur  de  l'enseignement  supérieur  transmet  à  l'Aca- 
démie deux  mémoires  de  MM.  Cadier  et  Miclion,  membres  de 
l'École  française  de  Rome,  intitulés,  le  premier  :  Essai  sur  la 
grande  cour  royale  de  Sicile  pendant  les  règnes  de  Charles  /"  et  de 
Charles  11  d'Anjou,  et  le  second  :  Etude  sur  Aléria.  Ces  mémoires 

(')  Voir  aux  Commi mcations,  n"  XV  (p.  190-197). 
(^)   Voir  aux  Communications,  n°  XVI  (p.  198-200). 
(^)  Voir  aux  Commcnications,  n°  XVII  (p.  aoo-201). 


—   IGD  — 
sonl  renvoyés  à  la  Commission  des  Ecoles  françaises  d'Athènes  et 

de  Rome. 

Le  R.  P.  Augouard,  provicaire  apostolique  du  Con^jo  fran- 
çais, adresse  au  Secrétaire  perpétuel  une  lettre  par  la([uelle  il 
prie  l'Académie  de  vouloir  bien  admettre  les  missionnaires  catbo- 
li((ues  de  Brazzaville  aux  avantages  de  la  fondation  Benoit  Garnier. 
Cette  lettre  est  renvoyée  à  la  Commission  de  la  fondation  Garnier. 

M.  Hauréau  lit  une  note  sur  le  De  ira  attribué  à  Martin  de 
Braga. 

Dans  une  communication  précédente,  M.  Hauréau  avait  fait  à 
Martin,  évèque  de  Braga,  le  reprocbe  de  s'être  attribué  le  Liber 
de  quatuor  virtutibm ,  dont  l'auteur  véritable  serait  le  fabricateur 
des  fausses  lettres  de  Sénèque  et  de  saint  Paul.  M.  Gaston  Paris, 
tout  récemment,  a  cherché  à  défendre  l'évêque  galicien  contre 
celte  imputation (^). 

Un  autre  traité,  publié  sous  ce  titre  :  De  ira,  dans  les  œuvres 
de  Martin,  offre  pareillement  une  dédicace,  dans  laquelle  cet 
évèque  écrit  à  son  collègue  Vitimir  qu'il  vient  de  rédiger,  pour 
lui  complaire,  cet  opuscule  sur  l'art  de  tempérer  la  colère.  Or, 
ainsi  que  le  montre  M.  Hauréau,  cet  opuscule  n'est  qu'un  assem- 
blage de  i)hrases  empruntées  aux  trois  livres  de  Sénèque  De  ira 
ad  i\ovatuin.  Ainsi  Martin,  évèque  de  Braga,  aurait  été,  non  pas 
une  seule  fois,  mais  deux  fois  au  moins,  plagiaire. 

M.  Hauréau  ne  croit  pas,  d'ailleurs,  que  l'arrangement  assez 
habile  des  phrases  prises  à  Sénèque  soit  l'œuvre  de  Martin;  il 
croit  plutôt  qu'il  a  trouvé  ce  travail  tout  fait  et  quil  s'en  est  dit 
l'auteur,  comme  il  avait  fait  pour  le  Liber  de  quatuor  virtutibus. 

M.  Gaston  Paris,  en  présence  du  nouveau  fait  apporté  par 
M.  Hauréau,  ne  croit  pas  devoir  insister  pour  la  défense  de 
révê({ue  Martin  de  Biaga.  Il  reste,  toutefois,  profondément 
étonné  (juun  prélat  dont  la  piété  et  la  vertu  ont  été  vantées  par 
tous  ses  contemporains  ait  pu  se  rendre  coupable,  à  deux  re- 
prises, d  un  pareil  méfait, 

M.  Menant,  continuant  la  lecture  de  son  travail  sur  les  textes 

tO  Voir  ci-dessus  (p.  i6a). 


—  170  — 
hétëens,  aborde  l'analyse  du  système  graphique  que  l'on  recon- 
naît dans  ces  textes,  et  qui  repose  sur  le  mélange  des  deux  prin- 
cipes hie'roglyphique  et  phonétique. 

Il  prend  pour  objet  de  sa  démonstration  les  trois  inscrip- 
tions de  Hamath.  Déjà  étudiées  par  M.  Sayce,  ces  inscriptions 
présentent  un  ensemble  de  signes  et  de  groupes  dont  la  compa- 
j-aison  permet  d'établir  une  certaine  analogie  entre  elles;  mais 
M.  Menant,  après  avoir  serré  de  près  l'examen  des  signes  et  des 
groupes,  arrive  à  proposer  une  lecture  qui  s'écarte  de  celle  de 
M.  Sayce.  Sans  même  s'arrêter  à  discuter  la  question  de  savoir 
jusqu'à  quel  point  il  est  prudent  d'accepter,  comme  nom  du 
prince  rédacteur  des  inscriptions,  celui  de  Tûmes  ou  Tuves,  roi 
de  Hamath,  identifié  avec  Tou  ou  Toi,  contemporain  de  David, 
M.  Menant  repousse  l'identité  absolue  des  trois  textes,  et  signale 
des  variantes  qui,  selon  lui,  donnent  une  lecture  dilïerente  et 
un  sens  autre,  en  ce  qui  concerne  la  filiation  et  les  noms  des 
localités. 

M.  Oppert  fait  remarquer  que  l'expression  rrroi  des  roisw,  que 
M.  Menant  croit  trouver  dans  les  textes  en  question ,  n'a  pas  été 
admise  par  M.  Sayce,  parce  qu'elle  est  toute  moderne. 

M.  Menant  explique  que  le  mot  ffrois^  au  pluriel  s'applique 
aux  trois  personnes  nommées  dans  les  trois  inscriptions,  dont  il 
n'a  pas  donné  les  noms,  et  qui  ont  été  confondues  en  une  seule 
par  M.  Sayce. 

M.  Lecoy  de  la  Marche  lit  un  mémoire  duquel  il  résulte  que 
le  grand  sceau  de  nos  rois,  dit  sceau  de  majesté,  fut  inventé  à 
l'avènement  de  Robert,  en  996.  Il  appuie  cette  observation  nou- 
velle sur  la  confrontation  des  empreintes  de  cire  avec  les  for- 
mules des  actes  auxquels  elles  sont  jointes.  Les  anneaux  qui 
servaient  précédemment  de  sceau  étant  devenus  trop  petits, 
malgré  leurs  agrandissements  successifs,  pour  contenir  l'image 
du  roi  avec  ses  altribuls,  il  lailut  en  venir  au  sceau  détaché  de 
l'anneau,  au  vrai  seel,  dont  celui-ci  est  le  premier  type,  et  c'est 
ce  qui  amena  la  rénovation  de  l'art  de  la  gravure  sur  métal,  si 
développé  au  moyen  âge. 


—  171   — 


SÉANCE  DU    3l   MAI. 


Le  Direclcur  de  renseignement  supérieur  tiausmcl  à  l'Aca- 
déuiic  un  mémoire  de  M.  Jamol,  membre  de  l'Ecole  d'Athènes, 
intitulé  :  Le  portra'U  dans  ht  aculpture  grecque.  Ce  mémoire  est 
renvoyé  à  la  Commission  des  Écoles  françaises  d'Athènes  et  de 
Rome. 

M.  Calleja,  d'Alger,  adresse  à  l'Académie  une  copie  de  sa  nou- 
velle traduction  de  l'inscription  du  tombeau  d'Esmunazar.  Cette 
copie  est  renvoyée  à  la  Commission  du  Corpus  inscriptionum  serni- 
ticarum. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  le  Président  annonce  que 
la  Commission  du  prix  de  numismatique,  fondé  par  M.  Allier 
de  Hauteroche,  a  décerné  ce  prix  à  M,  Théodore  Reinach,  pour 
son  ouvrage  sur  Les  monnaies  de  trois  royaumes  d'Asie  Mineure. 

M.  Georges  Perrot  communique,  de  la  part  de  M.  Victor 
W'aille,  une  note  sur  une  inscription  latine,  découverte  à  Cher- 
cbel  le  23  mai  1889.  C'est  une  dédicace  à  Licinius  Hiérociès, 
gouverneur  de  la  Maurétanie  Césarienne,  à  la  Gn  du  iii^  siècle 
de  notre  ère^^'. 

M.  Paul  Monceaux  communique  à  l'Académie  plusieurs  frag- 
ments du  texte  et  les  principales  planches  de  la  Restauration 
d'OUpnpie ,  qn'û  prépare  en  collaboration  avec  M.  Laloux. 

M.  Monceaux  rappelle  le  rôle  important  de  la  France  dans  les 
découvertes  d'Olympie.  L'expédition  de  Morée  en  1829  avait 
commencé  le  travail  de  d('blaiement  qu'une  grande  mission 
allemande  a  terminé  avec  tant  de  persévérance  et  de  succès. 
MM.  Laloux  et  Monceaux  ont  repris,  avec  l'aide  du  Gouverne- 
ment et  l'appui  sympathique  de  nombreux  membres  de  l'In- 
stitut, l'œuvre  de  Blouct  et  de  Dubois.  Ils  ont  mis  à  profit  tous 
les  précieux  renseignements  fournis  par  les  dernières  fouilles  et 
publieront  prochainement  une  restauration  générale  des  mo- 
numents, des  sculptures  et  des  fêtes  d'Olympie. 

<"  Voir  aux  Communications,  n"  XVIll   (p.  îoi-'io'!). 


—  Î72  — 

Les  fragments  et  les  planches  que  M.  Monceaux  soumet  à 
TAcade'mie  se  rapportent  à  l'ensemble  de  l'enceinte  sacrée  et  du 
grand  temple  de  Zeus.  On  doit  signaler  surtout  les  quatre  grandes 
planches  qui  donnent  le  plan  et  la  vue  perspective  de  l'Altis  res- 
tauré; la  façade  orientale  du  grand  temple  de  Zeus;  la  restau- 
ration des  deux  frontons  et  du  célèbre  Zeus  de  Phidias;  les 
métopes;  la  Victoire  de  Péonios  et  l'Hermès  de  Praxitèle.  De 
nombreux  plans  et  fragments  de  toute  sorte  seront  reproduits 
dans  l'ouvrage  annoncé,  où  l'on  trouvera  une  reconstitution 
complète  du  plus  fameux  sanctuaire  de  l'ancienne  Grèce. 

M.  Piette  présente  à  la  Compagnie  divers  monuments  de  l'art 
des  temps  préhistoriques,  recueillis  dans  la  grotte  du  Mas  d'Azil 
(Ariège).  Ces  monuments  sont  de  trois  sortes  :  des  gravures  au 
cbamplevé,  faites  sur  des  fragments  d'os  ou  de  bois  de  renne, 
des  bois  de  renne  sculptés,  enfin  des  galets  peints  ou  pour  mieux 
dire  coloriés. 

Les  gravures  nous  renseignent  sur  l'état  de  civilisation  des 
hommes  qui  les  ont  exécutées.  Une  d'entre  elles  nous  montre 
une  femme  couchée  à  côté  d'un  renne  apprivoisé.  Sur  d'autres, 
on  voit  des  chevaux,  avec  un  mors  dans  la  bouche.  Les  popula- 
tions de  ces  temps  reculés  possédaient  donc  déjà  plusieurs  espèces 
d'animaux  domestiques. 

Les  sculptures  sont  exécutées  avec  une  habileté  remarquable; 
les  artistes  excellaient  surtout  à  rendre  les  attitudes  naturelles, 
l'allure,  le  mouvement  des  animaux.  M.  Piette  signale  particu- 
lièrement une  étude  de  jambe  d'aurochs  et  une  statuette  qui 
représente  un  aurochs  luttant,  tête  contre  tête,  ])iobablement 
contre  un  autre  animal.  On  remarque  jusqu'à  des  études  de 
squelette  et  d'écorché  :  deux  têtes  de  cheval,  en  sculpture  de 
petite  dimension,  dont  l'une  est  représentée  dépouillée  de  sa 
chair,  l'autre  de  sa  peau. 

Quant  aux  galets  coloriés,  M.  Piette  les  attribue  à  une  époque 
postérieure,  celle  où,  selon  lui,  l'humidité  croissante  et  les  inon- 
dations avaient  chassé  le  renne  de  nos  climats  et  commençaient 
à  rendre  les  cavernes  peu  habitables.  Ces  peintures  (si  l'on  peut 
leur  donner  ce  nom),  les  plus  anciennes  que  l'on  connaisse. 


—  173  — 


sont  trîs  {fvossiores.  Quekjiics-uncs  paraissent  représenter  des 
piailles,  d'autres  offrent  des  dessins  géonie'tn(|ues,  croix,  cercles 
avec  un  disque  concentrique,  etc.  Les  plus  nombreuses  ne  sont 
que  des  assemblages  de  tacbes  de  couleur,  dispose'es  syme'triijue- 
ment;  elles  font  penser  à  des  signes  de  nume'ration  ou  à  des 
marques  de  jeu. 


SÉANCE   DU    7    JUIN. 

Le  Président  donne  lecture  d'une  lettre  de  M.  le  D'  J.  Reboud, 
annonçant  la  mort  de  son  oncle,  le  médecin  major  Reboud,  cor- 
respondant de  rAcadémie. 

Le  Président  se  rend  l'interprète  des  regrets  que  cette  perle 
inspire  à  TAcadémie.  Il  rappelle  les  services  rendus  par  ce 
savant  au  recueil  des  inscriptions  sémitiques,  qu'il  a  enrichi 
de  nombreux  documents  recueillis  pondant  son  long  séjour  en 
Algérie.  M.  Reboud  s'était  occupé  surtout  de  l'épigraphic  libyco- 
berbèro  et  il  a  recueilli  dans  une  vaste  publication  un  nombre 
considérable  d'inscriptions  libyques,  dont  la  science  tirera  un 
grand  profit. 

M.  Charles  Garmer,  membre  de  l'Inslitut,  président  de  la 
Société  centrale  des  architectes,  écrit  au  Secrétaire  perpétuel  pour 
le  prier  de  lui  faire  connaître  le  nom  du  membre  de  l'Ecole 
d'Athènes  ou  de  celle  de  Rome  à  qui  devra  être  décernée  la 
médaille  que  la  Société  accorde  tous  les  ans  pour  travaux  ar- 
chéologiques. 

La  Commission  des  Écoles  d'Athènes  et  de  Rome  présentera 
un  candidat  dans  la  prochaine  séance. 

M.  Geffroy,  directeur  de  l'École  française  de  Rome,  adresse 
au  Président  une  lettre  relative  à  l'c-difice  grec  nouvellement 
découvert  à  Sélinonte  (Sicile),  ainsi  qu'aux  fouilles  de  Vulci, 
dirigées  par  M.  Gsell,  membre  de  l'École  française'''. 

M.  Léon  Gautier  ,  au  nom  de  la  Commission  du  prix  La  Grange, 
fait  le  rapport  suivant  : 

(0  Voir  aux  Communications,  n"  XIX  (p.  :io4-3o5). 


—  17i  — 

tfLa  Commission,  à  rimanimité,  décerne  le  prix  de  la  fou- 
dation  La  Grange  à  M.  Emile  Picot,  pour  ses  deux  ouvrages  inti- 
tule's ,  l'un  :  Le  monologue  dramatique  dans  V ancien  théâtre  français , 
l'autre  :  Les  moralités  politiques  dans  T ancien  théâtre  français ,  et 
pour  l'ensemble  de  ses  travaux  relatifs  à  la  poésie  française  du 
moyen  âge.w 

L'Académie  donne  acte  à  la  Commission  des  conclusions  de 
son  rapport. 

M.  Héron  de  Villefosse  lit,  au  nom  du  R.  P.  Delattre,  cha- 
pelain de  Saint-Louis  de  Carthage,  une  note  sur  la  situation  de 
la  ville  antique  de  Neferis,  qui  n'avait  pas  été  reconnue  d'une 
façon  certaine  f''. 

Cette  ville,  qui  joua  un  rôle  considérable  pendant  la  dernière 
guerre  punique,  était  peu  éloignée  de  Carthage.  Deux  dédicaces 
impériales,  se  rapportant  à  Septime  Sévère  et  à  Cai-acalla, 
découvertes  par  M.  Lançon,  administrateur  du  vaste  domaine 
du  Khangat-el-Hadjadj,  ont  été  gravées,  en  l'honneur  de  ces  deux 
princes,  au  nom  de  la  CIVITAS  NEFERITANA.  Cela  prouve 
que  la  colline  désignée  sous  le  nom  de  Henchir-Bou-Beker,  oi!i 
ces  textes  ont  été  relevés  par  le  R.  P.  Delattre,  correspond  à 
l'emplacement  de  l'antique  Neferis  et  que,  par  conséquent,  la 
plaine  voisine  a  été  pendant  la  troisième  guerre  punique  le  té- 
moin des  exploits  de  Scipion  et  le  théâtre  des  dernières  luttes 
des  Carthaginois  contre  les  Romains. 

M.  Monceaux  continue  sa  communication  parlielle  du  texte  et 
des  planches  de  la  publication  intitulée  :  Restauration  d'Olympie, 
qu'il  prépare  en  collaboration  avec  M.  Laloux. 

M.  Cagnat,  professeur  au  Collège  de  France,  lit  une  note  sur 
les  moyens  employés  à  l'époque  romaine  pour  assurer  l'alimen- 
tation de  l'armée  d'occupation  de  rAfri(|ue. 

En  temps  de  paix,  les  vivres  militaires  (blé  et  autres  denrées, 
fourrage  pour  les  bétes  de  somme)  étaient  perçus  à  titre  d'inipôt 
sur  les  habitants  de  la  province  et  versés  dans  des  magasins 
dépendant  du  procurateur  de  l'empereur,  qui  les  livrait  aux  troupes 

(''  Voir  aux  Communications,  n°  XX  (p.  9o5-2o8). 


—  17:)  — 

sur  le  vu  do  bons  de  vivres,  euiis  par  les  chefs  d<'  corps.  Les 
troupeaux  deslines  à  procurer  la  viaude  IVaîclie  étaieut  confiés  à 
des  soldats  qui  les  menaient  paître  sur  les  territoires  militaires, 
particulièrement  sur  celui  qui  e'tait  concède'  à  la  ie'gion  IH" 
Augusta,  autour  de  Lambèse.  On  récoltait  aussi  sur  ce  territoire 
du  foin  pour  les  bêtes  de  somme. 

En  temps  de  guerre,  les  vivres  nécessaires  aux  expéditions 
étaient  rassemblés,  au  moment  de  se  mettre  en  campagne,  par 
des  agents  directs  de  l'empereur  et  déposés  dans  des  magasins 
créés  pour  la  circonstance  près  du  théâtre  des  opérations.  Des 
convois  les  portaient  de  là  aux  armées.  M.  Gagnât  croit,  contrai- 
rement à  l'opinion  émise  par  certains  savants,  que  le  chameau 
a  dû  être  utilisé  de  bonne  heure  pour  le  transport  des  vivres  mili- 
taires en  Afrique. 

M.  Siméon  Luge  est  désigné  pour  lire,  à  la  prochaine  séance 
trimestrielle  de  l'Institut,  son  mémoire  sur  Jeanne  d'Arc  et  la  for- 
teresse de  Domrémij. 

SÉANCE   DU     lU    JUIN. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  le  Président  fait  connaître 
les  conclusions  prises  par  les  Commissions  du  prix  ordinaire,  du 
prix  Julien  et  des  Écoles  d'Athènes  et  de  Rome. 

Le  sujet  du  concours  pour  le  prix  ordinaire  était  une  Etude 
sur  le  théâtre  hindou.  Le  prix  est  décerné  au  mémoire  ayant  pour 
devise:  M.é(xvrj(TO  oit  t;7ro«p<T)/s,  etc.  (Epictète,  xvii). 

Le  Président  ouvre  le  pli  qui  accompagnait  ce  mémoire;  il 
y  lit  le  nom  de  M.  Sylvain  Lévi,  maître  de  conférences  à  l'École 
des  hautes  études. 

Le  prix  Stanislas. lulien  n'est  pas  décerné.  Deux  récompenses  sont 
accordées  à  titre  d'encouragement,  la  première,  de  mille  francs, 
au  R.  P.  Roucher,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  La  boussole  du  langage 
mandwin,  et  la  seconde,  de  cinq  cents  francs,  à  M.  Terrien  do 
Lacouperie,  pour  l'ensemble  de  ses  mémoires  et  notices  sur 
l'ethnographie  des  populations  méridionales  de  l'empire  chinois. 

xvu.  '«^ 


—   176  — 

L'Aciulomie  cidsignc,  sur  l'avis  do  la  Commission  des  Ecoles 
françaises  d'Athènes  et  de  Rome,  M.  Gsell,  membre  de  l'Ecole  de 
Rome,  pour  recevoir  la  médaille  de  la  Socie'té  centrale  des  archi- 
tectes. M.  Gsell  a  exécute'  cette  année  avec  succès  des  fouilles  à 

Vulci. 

M.  Auguste  Castan,  correspondant  de  l'Académie  à  Besançon, 
fait  une  communication  sur  Deux  épitaphes  romaines  de  femmes, 
trouvées  aux  environs  de  Besançon. 

Ces  épitaphes  sont  celles  de  deux  des  sarcophages  en  pierre 
qui  bordaient  un  tronçon  de  la  voie  romaine  par  laquelle  \  esontio 
(Besançon)  se  reliait  à  Lyon,  la  métropole  des  Gaules. 

Le  seul  subsistant  de  ces  sarcophages  fut  découvert  en  1828, 
dans  ie  hameau  de  Saint-Ferjeux,  qui  appartient  à  la  banlieue  de 
Besançon  :  il  avait  perdu  son  couvercle  ainsi  que  son  diîpôt  funé- 
raire. Un  dessin  de  l'épitaphe  qui  le  décorait  ayant  été  envoyé 
à  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres,  Mongez  fit  sur  ce 
texte  un  assez  long  rapport,  qui  avait  eu  malheureusement  pour 
base  une  copie  incorrecte.  Plus  tard ,  la  même  inscription    fut 
étudiée  sur  place  par  le  général  Creuly,  dont  Léon  Renier  rectifia 
la  lecture.  La  femme  inhumée  n'est  désignée  que  par  un  qualifi- 
catif amical,  Virginia,  dont  la  fin  de  l'épitaphe  développe  la  si- 
gnification en  ces  termes:  SOLO  CONTENTA  MARITO.  Son 
époux   s'appelait    Marius  Vitalis,  double  nom  qui  est    suivi   du 
mot  abrégé  LEG,  précédé  d'un  sigle  signifiant  centurio.  Sur  la 
fonction  de  centurion  légionnaire  hors  des  cadres  [centurio  legio- 
narius),  on  a  une  lettre  de  Pline,  dont  M.  Castan  s'autorise  pour 
assimiler  cet  officier  de  police  militaire  à  ce  qu'était  chez  nous 
le  commandant  d'une  place  de  guerre  avant  1871.  Le  fils  de  la 
défunte  se  nommait  Marius    Nigidianus   (et    non    Nicidianus, 
comme  portaient  les  anciennes  lectures).   Ce   double   nom    est 
suivi  du  sigle  Q  surmonté  d'une  petite  traverse.  Ce  sigle  signifie 
quœstor.  Mais  le  fils  d'un  centurion  plébéien  aurait-il  ou  qualité 
pour  elre  cjuesteur?  De  l'ordre  sénatorial,  non;  de  l'ordre  muni- 
cipal ou  colonial,  oui.  Et  M.  Castan  estime  que  le  fils  de  Virginia 
et  du  centurion  Marius  Vitalis  était  questeur  de  la  magistrature 
coloniale  de  Vesonlio. 


—  177  — 

La  seconde  (^pilaphc  élail  sur  un  magnifique  sarcopliage  dont 
nous  n\i\ons  plus  (pie  de  nonibi'euscs  descriptions  cl  quelques 
mauvais  dessins.  La  découverte  qui  en  lut  l'aile,  en  169^ ,  cul  un 
grand  retenlissement  :  ce  fut  M^'^  de  Scudéry  qui  en  fil  la  com- 
munication au  Journal  des  Savanls.  Le  sarcopliage  portait,  quatre 
lois  répétée,  l'image  de  Vascia,  symbole  de  dédicace  lumulaire 
fré(]uent  dans  la  région  lyonnaise.  Le  populaire  prit  ce  symbole 
pour  rimage  de  la  croix,  et  un  débat  judiciaire  eut  lieu  pour  savoir 
si  le  squelclle  trouvé  dans  le  sarcopliage  élail  celui  d'une  personne 
païenne  ou  d'une  personne  chrétienne.  Plusieurs  savanls,  parmi 
lesquels  élail  Mabillon,  furent  d'avis  que  le  tombeau  était  païen, 
et  dès  lors  les  700  livres  de  plomb  que  renfermait  le  sarcophage 
firent  le  profit  du  marchand  (]ui  possédait  le  terrain  où  la  trou- 
vaille avait  été  faite.  Le  sarcophage  fut  douné  aux  Visitandines, 
qui  le  convertirent  en  lavoir  et  mutilèrent  Tépitaphe  pour  ne 
plus  éprouver  Tcnnui  de  la  faire  voir  aux  curieux.  Il  ne  subsista 
de  ce  texte  que  les  mots  :  VALE  EVSEBI,  gravés  sur  Tun  des 
flancs  du  sarcophage,  circonstance  qui  valut  à  cette  cuve  l'étrange 
sobri(iuet  de  tf  Tombeau  du  valet  d'Eusèbe^i.  Ensebi,  au  vocatif, 
était  le  nom  d'amitié  auquel  répondait  Ca3sonia  Donata,  la  per- 
sonne inhumée  :  elle  était  la  femme  de  Candidus,  esclave  impé- 
rial [verna  Augusti  noslri).  Celle  qualité  est  suivie  dans  l'épilaphe 
de  la  formule  EX  TEST,  qui  se  raccorde  avec  le  verbe  POSVIT 
finissant  la  phrase.  Mais  pourquoi  celte  formule  n'esl-elle  pas, 
comme  de  coutume,  précédée  du  mol  hœres  ou  d'un  sigle  on 
tenant  lieu?  C'est  parce  que  Candidus,  esclave  impérial,  n'aurait 
pu  recevoir  un  héritage  que  pour  le  compte  du  maître  auquel  il 
appartenait,  et  Cœsonia  Donata,  tout  en  chargeant  son  mari  de 
lui  ériger  un  tombeau,  ne  tenait  pas  à  ce  que  l'empereur  héritât 
de  sa  fortune. 

L'épilaphe  se  termine  par  les  deux  mots  abrégés  LOC  •  LIB, 
que  M.  Castan  traduit  par  l'expression  lociis  Hberatus,  voulant  dire 
que  le  tombeau  était  placé  sur  un  lorrain  étranger  au  domaine 
public. 

Voici  la  locluro  et  la  traduction  ([uo  M.  Castan  flonne  do  ces 
deux  inscriptions  : 

i3. 


—   178 


I. 


i,uRGlNIAE-MARIVS-VITALIS-CONIVNX-)(ce«tMno)LEGtononM« 
ET-  MARIVS  •  NIGIDIANVS  •  FlLitis  ■~Quaeslor  ■  MATRI-E-LON 
GINQVO  ■  ADPORTATAE  •  (ET)  •  HIC  •  CONDITAE  ■  SEX  •  ET 
TRIGINTA  •  ANN(s  •  VIXIT  •  INCVLPATA  •  MARITO  •  OB 
SEQVIO      RARO    •     SOLO      CONTENTA       MARITO     D5 

ff  A  Virginia,  Marius  Vitalis,  son  époux,  centurion  légionnaire,  et  Ma- 
rins Nigidianus  fils,  questeur,  à  sa  mère,  ramenée  de  loin  pour  être  ici 
renfermée  :  elle  vécut  trente-six  ans  fidèle  à  son  mari,  soucieuse  avant 
tout  de  n'appartenir  qu'à  lui  seul." 

II. 

CAESONIAE     •     DONATAE     •     QVAE     ■     VIXSIT    •    ANNIS      53 

XXXXVII  •  Mensibus    (?)  •  Di?bm ■  XI  •  HORIS •  IIII  •  CANDIDVS     AVGusti 

Noslri   •    VERNA    •     EX    TESTamPiito   ■  CONIVGI  •  BENE  MERENTI 

POSVITg)     EVSEBI     •     HAVE     •     ET     VALE 

LOCms    ç3  LlBeratus 

AVE -EVSEBI  VALE -EVSEBI 

rh.  Caesonia  Donata,  qui  vécut  quarante-sept  années,  (tant  de)  mois, 
onze  jours  et  quatre  heures,  Gandidus,  esclave  du  domaine  de  notre 
Empereur,  érigea  à  sa  bien  méritante  épouse,  en  vertu  du  testament  de 
celle-ci,  ce  tombeau  placé  sur  un  terrain  privé.  Chère  Pieuse,  bonjour 
et  adieu.  —  Bonjour,  Pieuse  !  Adieu,  Pieuse!» 

M.  Héron  de  Villefosse  entretient  l'Académie  d'une  inscription 
latine  découverte  vers  i58o  dans  les  murs  du  castmm  de  Dijon, 
mais  malheureusement  perdue  aujourd'hui. 

Ce  texte  contient  une  mention  géographique  qui  n'a  jamais 
été  interprétée  d'une  façon  satisfaisante. 

A  la  ligne  la,  on  lit  :  PAGANDOMO  COhSISTENTES. 
Tous  les  éditeurs  ont  transcrit  :  pagan(i)  domo  consistentes.  Cette 
interprétation  n'est  pas  soutenable;  il  faut  lire  :  pag[ï)  Andomo  con- 
sistentes. Il  en  résulte  que  ce  texte  nous  fournil  le  nom  d'un  pagus 
inconnu  jusqu'ici,  mais  dont  la  situation,  sur  le  territoire  de  la 
civitas  Lingonum,  présente  un  intérêt  particulier.  En  effet,  le  chef- 
lieu  de  cette  civitas  porte  le  nom  d'Andematunum,  qui  ne  nous  est 


—   179  — 

transmis  que  dans  des  textes  peu  certains.  Tous  les  inaniiscrits 
de  Ptole'niée  contiennent  la  forme  AvSofxixrovvov,  qui  paraît  de- 
voir être  lapproche'e  du  nom  du  pagits  Andomus.  Le  nom  du 
chef-lieu  pourrait  bien  avoir  été'  formé  sur  celui  du  pagus. 

M.  Paul  Regnaud  communique  un  Mémoire  sur  T origine  et  la 
valeur  de  ïidée  de  racine  et  de  sujjixe  dans  les  langues  indo-européennes. 

Les  racines  et  les  suffixes  sont,  dit  M.  Regnaud,  le  résultat  de 
l'analyse  tout  empirique  à  laquelle  se  sont  livrés,  sur  le  sanscrit, 
les  grammairiens  hindous  et  tout  particulièrement  Pânini.  Elles 
n'ont  jamais  eu  d'indépendance  réelle.  La  théorie  de  l'aggluti- 
nation, qui  a  été  fondée  sur  l'hypothèse  de  cette  indépendance, 
doit  être  tenue  pour  suspecte. 

La  dérivation  indo-européenne  a  eu  probablement  pour  base 
les  monosyllabes  communs  à  tous  les  idiomes  de  la  famille, 
comme  pes .  vox ,  -fer,  -ger,  -dex ,  etc. ,  du  latin ,  qui  tous  à  l'origine 
étaient  des  adjectifs  verbaux.  Là  sont  les  véritables  racines,  c'est- 
à-dire  le  point  de  départ  de  la  dérivation  ou,  en  d'autres  termes, 
les  primitifs. 

Les  racines,  telles  que  les  ont  extraites  et  classées  les  gram- 
mairiens hindous,  n'en  conservent  pas  moins  une  valeur  mnémo- 
technique et  de  classement,  qui  en  rendra  toujours  l'usage  utile. 


SEANCE    DU    ai    JUIN. 


i\L  Héron  de  Villefosse  communique  des  renseignements  qui 
lui  ont  été  adressés  de  Sousse  par  M.  le  commandant  Privât,  au 
sujet  de  diverses  découvertes  faites  à  Gabès  et  à  Gafsa  ''\ 

Dans  la  première  de  ces  deux  localités,  le  savant  officier  a 
fouillé  une  sépulture  indigène  sous  tuniulus,  antérieure  à  la 
conquête  romaine  et  dont  le  mobilier  est  fort  intéressant.  11  a 
également  mis  à  jour,  près  de  Sidi  Boulbaba,  un  grand  édifice 
qui  paraît  avoir  été  anciennement  un  grenier  destiné  à  conserver 
les  céréales  nécessaires  à  l'alimentation  des  troupes. 

A  Gafsa,  un  capitaine  du  génie  a  trouvé  une  mosaïque  dont 

<"   Voir  aux  Communications,  n"  XXI  (p.  208-mt). 


—  180  — 

le  sujet  repre'sente  les  courses  de  chars  dans  TinteVieur  du  cirque. 
On  aperçoit  sous  les  arcades,  autour  de  l'arène,  les  tètes  serrées 
des  spectateurs,  qui  semblent  prendre  un  plaisir  extrême  à  l'ac- 
tion qui  se  de'roule  devant  eux. 

Sur  la  proposition  de  la  Commission  du  Corpus  inscriptionum 
semiticariim ,  TAcadéiiiie  nomme  membre  de  cette  commission 
M.  Clermont-Ganneau. 

L'Acade'mie  procède  ensuite  à  l'élection  des  deux  membres  qui 
composeront  la  Commission  chargée  de  vérifier  les  comptes  de 
recettes  et  de  dépenses  de  l'Académie  pendant  l'année  1888. 

MM.  Croiset  et  de  Barthélémy  sont  élus. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publicjue,  M.  d'Arbois  de  Jubain- 
viLLE  fait  une  communication  sur  le  duel  conventionnel,  qui, 
dans  un  état  primitif  de  civilisation,  a  précédé  le  duel  judiciaire. 

On  trouve  le  duel  conventionnel  dans  le  droit  irlandais,  l^a 
convention  qui  le  précède  a  pour  effet  de  décharger  le  vainqueur 
de  toute  responsabilité  pour  le  meurtre  de  son  adversaire. 

Un  exemple  de  ce  duel  couvimtionnel  nous  est  donné  par  Tite- 
Live,  dans  le  récit  de  la  seconde  guerre  punique.  Scipion,  en  Es- 
pagne, voulant  célébrer  des  jeux  funèbres  en  l'honneur  de  son 
père,  devait,  suivant  l'usage,  y  donner  des  combats  de  gladiateurs. 
11  put  y  parvenir  sans  bourse  délier.  Parmi  les  alliés  celtibériens 
que  lui  avait  donnés,  en  Espagne,  la  haine  de  Carihage,  il  se 
trouvait  plusieurs  individus  qui  avaient  des  contestations  entre  eux 
et  qui,  pour  les  terminer,  se  battirent  en  duel  sous  les  yeux  des 
Romains  et  de  leurs  compatriotes. 

M.  Ravaisson  annonce,  de  la  part  de  la  Société  des  amis  des 
monuments,  la  prochaine  tenue  d'un  congrès  pour  la  conserva- 
tion des  monuments.  Ce  congrès  s'ouvrira  lundi  prochain  2Z1  juin. 


SÉANCE  DU    98   JUIN. 

Le  Ministre  de  finstruction  publique  invite  l'Académie  à  s'oc- 
cuper, dans  une  de  ses  prochaines  séances,  de  la  désignation 


—   LSI   — 

(li;  (k'u\  ciiiulidats  à  la  cliairc  de  i-Iiinois,  vacaiile  à  1  Ecole  des 
lanjfues  orieulales  \ivanles,  par  suile  du  décès  de  M.  Jaiiietel. 

Il  adresse  en  même  temps  à  l'Académie  des  cxtiails  des 
procès-verbaux  :  i"  (riine  séance  de  rassemblée  des  professeurs 
de  rÉcole  ,  dans  laquelle  cette  assembl<;c  a  présenté  en  première 
lijjne  M.  Devéria,  et,  en  seconde  li^jne,  M.  Camille  Imbaull-Huarl; 
2°  d'une  séance  du  Conseil  de  perfectionnement  de  la  même 
Ecole,  qui  a  fait  les  mêmes  présentations,  dans  le  même  ordre. 

L'Académie  procédera  aux  présentations  dans  sa  procbaine 
séance. 

Le  Directeur  de  l'enseignement  supérieur  écrit  au  Secrétaire 
perpétuel  pour  le  prier  de  consulter  la  Commission  des  Ecoles 
françaises  d'Athènes  et  de  Home  au  sujet  du  désir  exprimé  par 
le  Directeur  de  l'Ecole  française  d'Athènes  de  voir  accorder  une 
quatrième  année  de  séjour  à  M.  Lechat,  membre  de  ladite 
Ecole.  Renvoi  à  la  Commission  compétente. 

M.  Guichard,  sénateur,  président  du  Comité  constitué  poui- 
élever  un  monument  à  la  mémoire  de  M.  Paul  Bert,  écrit  à  l'Aca- 
démie pour  la  prier  de  vouloir  bien  assister  à  la  cérémonie 
d'inauguration,  qui  aura  lieu,  à  Auxerre,  le  dimanche  7  juillet 
prochain, 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publi(]ue,  le  Président  annonce 
que  la  Commission  du  prix  Gobert  propose  de  décerner  le  pre- 
mier prix  à  M.  iXoël  Valois,  pour  ses  deux  ouvrages  :  Juvenlaire 
des  arrêls  du  Conseil  d^Elat  [règne  de  Henri  IV)  et  Le  Conseil  du  roi 
aux  xiv",  xy"  et  xvi'  siècles,  et  le  second  prix  à  M.  Auguste  Moli- 
nier,  pour  sa  Géographie  historique  de  la  province  de  Languedoc  au 
moyen  âge. 

Il  est  procédé  au  scrutin.  Le  premier  prix  est  décerné  à 
M.  Noël  Valois,  par  25  suffrages  sur  38  votants,  et  le  second  prix 
à  M.  Auguste  Molinier,  par  33  suffrages  sur  37  votants. 

M.  Delislk  lit  une  note  intitulée  :  La  chronique  drs  Tard-Venus. 

On  a  donni;  le  nom  de  Tard-Venus  à  des  bandes  de  routiers 
qui,  vers  les  ann«'es  i3Go  à  i3G5,  infestèrent  le  Lyonnais  et 
les   régions    avoisinantes.    Eu    1873,    un   auiateur   de    Milan, 


—   18-2  — 

M.  C.  Morbio,  annonça  qu'il  possédait  dans  su  bibliothèque  un 
manuscrit  important  pour  l'histoire  de  ces  compagnies.  C'était 
une  chronique  en  français,  rédigée  en  iSgo  et  dédiée  à  l'arche- 
vêque de  Lyon  par  un  chanoine  de  sa  cathédrale.  Cette  chro- 
nique occupait  iSa  pages  de  parchemin  grossier,  de  petit  format; 
l'écriture  présentait  un  aspect  étrange  et  paraissait,  ajoutait 
M.  Morbio,  remonter  au  xvi^  siècle  ou  peut-être  à  une  époque 
plus  ancienne. 

Après  la  mort  de  M.  Morbio,  ses  livres  furent  acquis  par 
M,  Ackermann,  libraire  à  Munich.  M.  le  comte  Riant,  qui  avait 
entretenu  des  relations  suivies  avec  M.  Morbio,  fit  alors  plusieurs 
tentatives  poui"  assurer  à  notre  Bibliothèque  nationale  la  posses- 
sion de  la  chronique  des  Tard-Venus.  Elles  restèrent  sans  succès. 

Cette  année  enfin,  un  catalogue  publié  par  MM.  List  et  Francke, 
libraires  à  Leipzig,  ayant  annoncé  pour  le  2/1  juin.  1889  la  vente 
aux  enchères  de  la  collection  Morbio,  le  moment  semblait  venu 
d'acquérir  pour  la  Bibliothèque  nationale  un  document  signalé 
comme  ayant  une  valeur  historique  exceptionnelle.  Mais  certains 
doutes,  que  la  description  de  M.  Morbio  avait  fait  naître  dans  l'es- 
prit de  M.  Delisle,  furent  accrus  parla  lecture  de  Tannoncedu  ma- 
nuscrit dans  le  catalogue  publié  par  MM.  List  et  Francke.  Pour 
savoir  décidément  à  quoi  s'en  tenir,  notre  confrère  demanda  et 
obtint  des  photographies  de  trois  pages  du  manuscrit. 

La  vue  de  ces  photographies  ne  laisse  place  à  aucune  hésita- 
tion. La  chronique  des  Tard- Venus  a  été  fabriquée  au  xix*  siècle 
(probablement  entre  i85o  et  1870),  par  un  faussaire  aussi 
maladroit  qu'ignorant.  La  Bibliothèque  nationale  doit  se  féliciter 
de  n'en  avoir  pas  poursuivi  l'acquisition. 

Deux  autres  manuscrits,  oià  Ton  reconnaît  la  main  du  même 
faussaire,  existent,  l'un  au  Musée  britannique  (manuscrits  addi- 
tionnels, n"  3oo/i9),  l'autre  à  la  Bibliothèque  nationale  (nouvelles 
acquisitions  françaises,  n°  6092).  Le  premier  est  décrit,  dans  le 
catalogue  du  Musée  britannique,  comme  r une  transcription  mo- 
derne-, faussement  datée  de  1  5i 2  ».  Le  second  fut  donné  à  la  Bi- 
bliothèque, le  20  février  1876,  par  feu  M.  Henri  Bordiei,  tr  comme 
f'rhantillon  d'imitation  moderne  des  plus  grossières n. 


—   183  — 


COMMUNICATIONS. 


N°  XIV. 

ON    ESSAI    D'EXPOSITION  INTERNATIONALE  EN    l^yO, 
PAR    M.    DE   MAULDE. 

(séance  DU   3    MAI    1889.) 

Louis  XI  a  toujours  fait,  dans  ses  préoccupations  et  dans 
ses  actes,  une  large  |)iace  aux  questions  économiques  :  par 
esprit  économique  en  même  temps  que  par  politique,  il  rêva 
l'unité  des  poids  et  mesures,  peut-être  même  l'unité  de  la  lé- 
gislation. Il  cassa  les  compagnies  permanentes  pour  se  con- 
stituer une  armée  de  mercenaires  étrangers.  Lui  qui  aimait 
les  habits  de  bure  et  les  vieux  chapeaux,  on  le  vit,  à  la  fin  de 
sa  vie,  arborer  tout  à  coup  des  étoffes  de  soie,  d'or,  dans  le 
double  but,  sans  doute,  d'encourager  l'industrie  et  de  voiler  sa 
défaillance.  Il  prit  bien  d'autres  mesures,  très  diverses,  et  plus 
ou  moins  efficaces,  pour  développer  l'industrie  française,  pour 
la  mettre  en  état  de  lutter  contre  la  concurrence  flamande  et 
italienne  :  par  exemple,  il  fit  venir  d'Italie  d'habiles  ouvriers 
pour  apprendre  aux  ouvriers  français  l'art  de  tisser  les  étoffes 
de  prix;  il  entreprit,  à  Arras,  de  ressusciter  de  toutes  pièces, 
d'un  seul  coup,  un  centre  industriel.  Dans  sa  politique  exté- 
rieure il  porta  les  mêmes  préoccupations. 

L'Angleterre  entretenait  avec  la  Flandre,  les  Pays-Bas, 
l'Italie,  des  relations  actives  et  anciennes.  Les  industries  tex- 
tiles des  bords  du  Rhin  trouvaient  chez  elle  un  débouché; 
elle  recevait  d'Italie,  notamment  de  Lombardie,  des  matières 
premières,  surtout  des  laines  brutes. 

Louis  XI  crut   rencontrer  en  ih-jo  une  occasion  propice 


—  184  — 

pour  ouvrir  les  marrhés  anglais  à  l'industrie  française,  et, 
dans  ce  but,  il  conçut  un  plan  singulier,  que  nul  historien 
n'a  indiqué.  Des  lettres  patentes  du  26  juillet  1/171  l'expo- 
sent avec  beaucoup  de  méthode  et  de  clarté.  Ces  lettres  pa- 
raissent dignes  d'attention,  car  elles  contiennent,  à  notre 
connaissance,  la  première  manifestation  d'une  idée  appelée  à 
une  extension  sur  laquelle  il  est,  sans  doute,  inutile  d'insister, 
l'idée  d'une  exposition  internationale  pour  les  produits  indus- 
triels. 

En  i/iyo,  Louis  XI  profitait  de  la  restauration  de  Henri VI 
d'Angleterre  par  Warvv'ick  pour  négocier  entre  les  deux  cou- 
ronnes un  traité  de  «trêves,  seur  estât,  abstinence  de  guerre 
et  entrecours  de  marchandise??,  d'une  durée  de  dix  années. 
Ce  traité  devait  comporter  l'établissement  entre  les  deux  pavs 
d'un  régime  de  libre-échange  absolu ,  sans  qu'aucune  taxe 
spéciale  pût  frapper  les  étrangers  ni  leurs  produits,  pas 
même  des  taxes  de  quayage  ou  autres.  C'est  sous  le  couvert 
de  l'ambassade  chargée  de  la  négociation  que  le  roi  entreprit 
de  faire  connaître  à  Londres  les  produits  français.  Il  s'en- 
tendit, et  probablement  non  sans  peine,  avec  les  chefs  de 
deux  grandes  maisons  de  commerce  de  Tours,  Jean  de  Beaune 
et  Jean  Briçonnet,  crlors  riches  et  puissans»^^*,  qui,  sur  ses 

(')  Sur  ces  deux  personnajjes  associés  et  étroitemeni  alliés  (Jean  Briçonnet 
était  gendre  de  Jean  de  Beaune),  on  peut  voir  YHistoire  généalogique  de  la  mai- 
son des  Briçonnet,  par  le  chanoine  G.  Bretonneau.  Les  Briçomiel  avaient,  du 
reste,  participé  plus  d'une  fois  aux  grandes  aflaires  du  royaume.  Deux  d'entre 
eux,  Bertrand  et  André,  étaient  ou  avaient  été  notaires-secrétaires  du  roi.  En 
i/i56,  nous  voyons  Guillaume  Bnçonnet  employé  en  mission  par  le  roi 
(ms.  fr.  90690,  p.  70). 

En  l'année  1^70  même,  Louis  XI  envoya  Jean  Briçonnet  en  mission  à  Berne 
(ms.  fr.  20685,  p.  5o3,  reçu  cité  par  M.  de  Boislisle,  Etienne  de  Vesc,  p.  30, 
n.  9).  Nous  manquons  de  détails  sur  cette  mission,  mais  il  est  fort  probable 
qu'elle  avait  mi  objet  commercial. 

Jean  de  Beamie  et  Jean  Briçonnet  étaient,  en  outre,  les  banquiers  du  roi,  et 
le  Trésor  nvail  chez  eux  une  sorte  de  compte  courant.  En  1/173,  ils  nvancèrent 
au  roi  3o,ooo  livres,  gagées  sur   le  montant  d'une   nouvelle   taille  (Vacsen, 


—  185  — 

instances  et  ses  ordres,  voulurent  bien  «condescendre»  (mot 
assez  rare  dans  la  chancellerie  de  Louis  XI)  à  former  une 
collection  de  produits  français,  épiceries,  draps  d'or  et  de 
soie,  toiles  et  autres,  d'une  valeur  de  36,000  écus,  qui 
devait  entrer  en  Angleterre  sous  la  garantie  de  l'immunité 
accordée  à  la  suite  et  aux  bagages  de  l'ambassade.  Il  fut 
expressément  défendu '^^,  sous  peine  de  rébellion  ou  lèse-ma- 
jesté, de  rien  vendre,  de  rien  distribuer,  à  moins  d'un  ordre 
spécial  du  comte  de  Warwick  :  en  revanche,  le  roi  prenait  a 
sa  charge  tous  les  risques  et  s'en  portait  garant  à  l'égard  des 
deux  négociants.  Jean  Briçonnet  et  Jean  de  Beaune  devaient 
simplement  K  eux  esvertuer  a  ce  que  les  habitans  dudit  royaume 
d'Angleterre  cogneussent  par  effect  que  les  marchans  de  France 
estoient  puissans  pour  les  fournir  comme  les  autres  nacions». 
L'envoi  eut  lieu  dans  ces  conditions  et  arriva  heureusement 
en  Angleterre.  Pourtant,  si  bien  conçu  qu'il  fût,  le  projet 
échoua  par  des  circonstances  d'ordre  majeur.  ^^  arwick  y 
porta  le  premier  coup.  Ne  pouvant,  disait-il,  k conduire», 
sans  argent,  les  secours  militaires  promis  à  Louis  XI,  il  força 
Briçonnet  à  lui  délivrer  pour  17,000  écus  de  marchandises 
et  d'argent.  On  apprit  aussi  le  retour  offensif  du  roi  Edouard  : 
Briçonnet  se  hâta  de  faire  embarquer  le  reste  des  marchan- 
dises sous  la  conduite  du  fils  de  Jean  de  Beaune,  qu'il  avait 
amené  avec  lui.  Peu  après,  les  ambassadeurs  eux-mêmes, 
surpris  par  la  rapidité  des  événements,  n'eurent  que  le  temps 
de  prendre  le  large  pendant  la  nuit. 

Cat<do<rus  du  Fonds  Bourré ,  K  90).  Aussi  étaient-ils  des  personnages  fort  impor- 
tants. Nous  trouvons  Jean  Briçonnet  sur  la  liste  des  pei-sonnes  à  qui  la  duchesse 
d'Orléans  adresse,  en  1A70,  un  don  de  vin  {Titres  originaux,  Orléans,  tome  XI, 
compte  de  1/170,  fol.  7-'i'i-7'i9). 

l'i  Celte  défense  eut  lieu  après  l'arrivée  Au  convoi  à  Londres;  elle  dut  être 
provoquée  par  des  représentations  du  Gouvernement  anglais  contre  l'extension 
de  l'immunité  diplomatique  à  des  objets  qu'où  ne  pouvait  qualifier  bagages  qu'à 
condition  de  n'en  pas  faire  le  commerce. 


—  J86  — 

Le  retour  fut  désastreux  :  des  Ostrelins  surprirent  le  convoi 
de  marchandises,  le  capturèrent,  et  le  fils  de  Jean  de  Beaune, 
fait  prisonnier,  perdit  même  la  vie*^'. 

A  la  suite  de  cette  catastrophe,  Briçonnet  et  Jean  de 
Beaune  recoururent  au  roi.  Le  Grand  Conseil,  avec  l'adjonc- 
tion des  gens  des  comptes,  reconnut  le  bien  fondé  de  leur 
réclamation  et  fixa  leur  indemnité  à  3 0,000  livres.  Pour 
épargner  cria  foulle  et  charge  du  peuple,  marchans  et  sub- 
gietz»,  le  Conseil  alloua  6  deniers  parisis  par  minot  de  sel 
vendu  dans  les  greniers  à  sel  de  Languedoc  et  Languedoil, 
jusqu'à  concurrence  de  27,000  livres,  c'est-à-dire  pendant  une 
durée  probable  de  trois  ans,  à  partir  de  l'ouverture  du  prochain 
exercice,  i^'  septembre  et  i*"^  octobre  suivant  les  cas.  On  im- 
posa sous  une  autre  forme  les  pays  ç^oii  les  greniers  n'ont 
point  de  cours»  pour  les  3,ooo  livres  restantes'-'. 

Ce  règlement  fait  l'objet  des  lettres  patentes  du  26  juillet 
1/171,  contenues  dans  deux  expéditions  authentiques  du  bail- 
liage de  Rouen,  données  le  5  septembre  suivant.  Les  familles 
Briçonnet  et  de  Beaune  trouvèrent  aussi  de  larges  compen- 
sations dans  les  effets  de  la  faveur  toujours  croissante  du  roi. 

Ainsi,  l'essai  d'une  exposition  internationale  tenté  par 
Louis  XI  aboutit  à  un  échec,  et  les  circonstances  ne  semblent 
pas  avoir  permis  au  roi  de  le  renouveler.  L  honneur  n'en 
revient  pas  moins  à  Louis  XI  d'avoir  posé  un  principe  qui 
devait,  par  la  suite,  prendre  de  si  grands  développements. 


''  C'est  ce  qui  résulte  du  texte  même  de  l'acte,  bien  qu'il  soit  question ,  dans 
un  compte,  de  la  rrrançon'i  du  iils  de  Jean  de  Beaune. 

'*'  Ces  trois  mille  livres  furent  payées  dès  l'année  suivante  (Compte  de  1Z171- 
1^73,  cité  par  M.  de  Boislisle,  op.  cit.,  p.  36,  n.  2).  En  1^72,  Louis  XI  dé- 
légua aussi  à  Jean  de  Beaune  3, 000  livres  dues  par  un  marchand,  Jean  Plouvier 
{Catalogue  Bourré,  J.  lai). 


—  187  — 


LETTRES   PATENTES   DU    9  6    JUILLET   l/j^l. 

A  lous  ceulx  qui  ces  présentes  lellres  verront,  Jehan  de  Monlespedon, 
escuier,  seigneur  de  Beauvoir  et  de  Bazoges,  conseiller  chambellan  du  Roy 
nostre  sire  et  son  bailli  de  Rouen  ,  salut.  Savoir  faisons  que  nous,  au  jour 
d  uy,  cinquiesme  jour  de  septembre ,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens  soixante 
et  unze,  avons  veues,  tenues  et  leues,  mot  après  mot,  unes  lettres  royaulx 
sellées  en  simple  queue  et  cire  jamie,  saines  et  entières  en  seel,  saingz  et 
escripture ,  desquelles  la  teneur  s'ensuit. 

Loys,  par  la  grâce  de  Dieu  Roy  de  France,  a  noz  amez  et  feaulx  les 
generaulx  conseillers  par  nous  ordonnez  sur  le  fait  et  gouvernement  de 
toutes  noz  finances,  tant  en  Languedoil  comme  en  Languedoc,  salut  et 
dilection.  Comme  la  reconsiliacion  et  aleance  d'entre  deffunctz  noz  frères 
et  cousins  le  Roy  Henry  d'Angleterre  et  le  conte  de  Warvic  ait  esté,  en 
l'année  derreniere  passée,  par  nous  pourparlée  et  consommée ,  par  l'advis 
et  deliberacion  de  plusieurs  de  nostre  sang  et  lignage  et  gens  de  nostre 
conseil,  par  le  mariage  faisant  de  feu  le  prince  de  Galles,  nostre  cousin, 
fdz  dudit  Roy  Henry,  ot  de  nostre  cousine,   la   fille   dudit  conte  de 
Warvic,  pour   le  ttes  grant  et  apparant  bien  et  paix  finale  de  nostre 
Royaume  avec  lesdits  Royaume  et  subgietz  d'Angleterre ,  lesquelz ,  tan- 
tost  aprez,  au  moyen  de  ladite  aleance,  furent  paisiblement  reduiz  en 
l'obbeissance  du  Roy   Henry,  leur  vray   Roy  et   naturel   seigneur,  et 
Edouart  de  la  \Iarcbi\  injuste  usurpateur  d'icelui,  du  tout  en  osli' et  dé- 
bouté; pour  l'entretenement  duquel  Roy  Henry  et  du  cours  de  marchan- 
dise entre  lesdits  Royaumes  a  tou'^jours  mais,  ainsi  que  pourparlé  et 
traicté  avoit  esté,  entre  autres  choses,  nous  eussions,  par  l'advis  que 
dessus,  au  bien  très  évident  de  la  chose  publique  de  nostre  Royaume, 
pays  et  subgietz,  envoyé  plusieurs  grans  et  notables  persoimages,  noz 
ambassadeurs,   ourlit  Royaume  d'Angleterre,  et   fait  induire  et   con- 
descendre nos  bien  amez,  Jehan  de  Beaune  et  Jehan Bricon net,  raarchans 
de  nostre  ville  de  Tours,  lors  riches  et  puissans,  charger  ou  faire  charger, 
transfreter  et  mener  oudit  Royaume  d'Angleterre,  soubz  la  seureté  et 
ordonnance  de  nous  et  de  nosdits  ambassadeurs ,  plusieur-;  et  très  grans 
qualitez  de   marchandises,  tant  d'espiceries,  de  drap  d'or  et  de  soye, 
toilles  et  autres  marchandises,  jusques  a  la  valeur  el  estimacion  de  vingt 
et  cinq  mil  escus  ou  environ,  ainsi  que  de  tout  avons  esté  deuement 
informez  et  advertiz.  Lesquelles  marchandises  nous  ordonnasmes  ausdits 
de  Beaune  et  Briconnet  charger  et  mener  oudit  Royautne  d'Angleterre 


—  188  — 

en  si  grant  quantité;  et,  en  ce,  eulx  esvertuer  a  ce  que  les  liabitans  dudit 
Royaume  d'Angleterre  congneussent  par  effect  que  les  marchans  de  France 
estoient  puissans  pour  les  fournir  comme  les  autres  nacions.  Et,  en  ce 
faisant,  leur  fu  ])ar  nous  promis  tpe,  se  aucune  perte  ou  inconvénient 
leur  en  avenoit,  que  nous  les  en  desdoramagerions.  Et  soit  ainsi  que, 
ledit  Briconnet  estant  en  Angleterre  avec  sadile  marchandise,  lui  fu,  a 
la  requeste  dudit  conte  de  VVarvic,  par  nosdits  ambassadeurs  et  de  par 
nous  deffendu,  pour  le  bien  et  utilité  de  noslre  Royaume,  de  ne  distribuer 
ne  vendi'e  aucunes  desdites  marchandises,  sur  paine  d'estre  réputé  a 
nous  désobéissant  et  rebelle,  sinon  au  plaisir  et  voulenté  dudil  conte  de 
Warvic;  lequel  de  Warvic,  congnoissant  que  sans  argent  \\  ne  povoit 
conduire  son  armée  qu'il  avoit  mise  sus  pour  cuider  envoyer  par  deçà 
en  nostre  service,  fist  tant  envers  lesdits  ambassadeurs  quilz  contrain- 
gnirent  ledit  Briconnet  a  lui  fournir  et  délivrer,  tant  desdites  marchan- 
dises que  argent  comptant,  jusques  a  la  somme  de  dix  sept  mille  escus, 
et  le  sourplus  desdites  marchandises,  ensemble  le  filz  dudit  Jehan  de 
Reauue,  furent  prins  et  raviz  sur  la  mer  ])ar  les  Austrelins,  en  retournant 
par  deçà  pour  les  cuider  mectre  en  seureté  et  hors  des  daiigiers  dudit 
Edouart,  qui,  tantost  aprez,  descendit  ou  Royaume  d'Angleterre,  ou- 
quel  temps  ses  faulleurs ,  noz  anciens  ennemis ,  cuiderent  cautuleusement 
surprendre  et  saisir  au  corps  noscUts  ambassadeurs,  lesquelz,  a  ceste 
cause,  furent  contrains  eulx  depaiiir  de  nuyt  dudit  Royaume,  et  autre- 
ment eussent  esté  tous  mors,  prins  ou  perdus,  comme  il  est  advenu  dudit 
filz  dudil  Jehan  de  Beaune  et  du  sourplus  desdites  marchandises.  Et, 
par  ce  moyen,  sont  lesdits  de  Beaune  et  Briconnet  demourêz  onlierement 
desnuez  et  despoinlez  de  leurs  dites  marchandises  et  substance,  et,  sub- 
sequamment,  leurs  femmes  et  enfans  et  plus  seroienl,  se  par  nous  ne 
leur  estoit  sur  ce  pourveu  de  nostre  grâce  et  provision  convenable,  ainsi 
que  remonstré  nous  a  esté.  Pour  ce  est-il  que  nous,  les  choses  dessus- 
dites considérées  et  que  les  pertes  et  dommages  que  ont  soufl'ert  jusques 
à  présent  lesdits  de  Beaune  et  Briconnet  n'ont  pas  procédé  par  leur 
coulpe,  et  que  a  esté  par  fortune  de  guerre  subséquente  nostredite  enten- 
cion  et  ordonnance,  regardans  le  bien  et  ulilité  de  la  chose  publique  de 
nostre  royaume,  voulans  a  ceste  cause  les  relever  desdits  grans  perles 
et  dommages  et  d'icelles  les  recompenser  a  la  mendre  foulle  et  charge  de 
nostre  peuple,  marchans  et  subgictz,  pour  le  bien  desquclz  et  en  nous 
obéissant  est  advenue  ladite  grant  perte,  a  iceulx  Jehan  de  Beaune  et  Bri- 
connet avons,  par  Tadvis  etdeliberacion  des  gens  de  nostredit  grant  con- 
seil, ouipiel  les  gens  de  noz  finances  estoient,  donné  et  octroyé,  donnons 


—  189  — 

el  octroyons  la  sonimo  do  tn^nlc  mil  livres  l. ,  pour  aucunement  les  récom- 
penser (losd.  vinyl  el  cinq  mil  escus  ou  environ  cpi'ilz  ont  perdus  en  la 
manière  que  dit  est,  sur  laquelle  somme  de  trente  mil  livres  t.,  par 
l'advis  et  delihoracion  que  dessus,  iiz  prendront  six  deniers  parisis  sur 
chacun  niinot  de  sel  qui  sera  vendu  el  tlistribuë  en  tous  les  greniers  de 
noslre  Royamno,  lant  on  Languodoil  que  en  Langueiloc,  en  trois  ans 
conliniiolz  el  consoquulifz ,  conniienchans,  c'est  assavoir,  en  noslj-e  pays 
de  Languodoil,  au  premier  jour  d'octobre  prochain,  et,  en  Languedoc, 
au  premier  jour  de  septembre  aussi  prochain,  jusques  a  la  sonnne  de 
vingt  et  sept  mil  livres  tourn.  ;  el,  ou  cas  qu'ilz  ne  pourroient  recouvrer 
esdilos  trois  années  lesdites  xxvn.M.  liv.  tourn.  a  cause  desdits  vî  d.  p.  pour 
minot,  nous  voulons  que  lesdits  six  deniers  par.  pour  minol  soient  piiiis 
et  levez,  el  que  lesdils  de  Beaune  et  Briconnet  les  lecouvreut  les  aimées 
après  ensuivant  ladite  troysieme  année  passée ,  jusques  a  plain  paiement 
desd.  xxvn.M.  1.  t.  Lesquelz  six  deniers  par.  pour  minot,  qui  font  trente 
solz  tournois  pour  muy,  iesdits  de  Beaune  et  Briconnet,  ou  l'un  d'eulx, 
auront  el  prendront  par  leur  simple  quittance,  ou  de  l'un  d'eulx  seulle- 
meiit,  par  les  mains  des  grenetiers  ou  de  leurs  commis,  sans  ce  qu'il 
leur  soit  besoing  avoir  autres  acquilz  el  descharges  de  nous  ou  de  vous 
que  cesdiles  présentes.  Et  les  trois  mil  livres  lournois,  pour  le  parfaict 
desdits  trente  mil  livres  tournoys,  se  prendront  ailleurs,  sur  noz  pays 
ou  les  greniers  n'ont  point  de  cours ,  par  la  forme  et  ainsi  que  par  noz 
autres  lettres  avons  ordonné.  Si  vous  mandons 

Donné  à  Amboise,  le  vingt  sisiesme  jour  de  juillet  l'an  de  grâce  mil 
quatre  cens  soixante  et  unze,  et  de  nostre  règne  le  xi°.  Ainsi  signé:  Loys. 
Par  le  Roy,  en  son  conseil,  Flameng. 

En  tesmoing  de  ce,  nous,  baili  dessus  nommé,  avons  fait  sceller  ce 
vidinms  ou  transcripl,  du  graiit  seel  aux  causes  dudit  bailliage.  Ce  fu 
fait  et  donné  a  Rouen,  en  Tan  et  jour  premiers  dessus  dits. 

Daote,  notaire  (?). 

(Ori(». ,  Bibl.  nat. ,  tns.  fr.  9571'!,  n°  i5().  —  Une  antre  expédition  semblable 
se  trouve  dans  le  même  volume,  n°  157.) 


—  190  — 
N°  XV. 

RÉSUMÉ  D'UN  MÉMOIRE  SUR  LES  ÉCRITS  ENCORE  INEDITS  DES  ANCIENS 
MÉDECINS  GRECS  ET  SDR  CEUX  DONT  LE  TEXTE,  PERDU  EN  GREC, 
EXISTE  EN  LATIN  OU  EN  ARABE,  PAR  M.  GEORGES-A.  COSTOMIRIS, 
PROFESSEUR    AGRÉGÉ    D'OPHTALMOLOGIE    ET    D'OTOLOGIE  À    ATHÈNES. 

(séances  DES  3,  10  et  17  mai  1889.) 

Dans  le  préambule  de  ce  mémoire,  l'auteur  reconnaît  hau- 
tement les  progrès  qu'a  faits  dans  notre  siècle  l'œuvre  de  la 
publication  des  anciens  médecins  grecs;  il  s'attache  en  même 
temps  à  rendre  justice  au  passé,  et  surtout  à  l'érudition  du 
xvf  siècle  et  à  l'enthousiasme  des  savants  d'alors  pour  les  an- 
tiquités médicales.  Il  signale  l'incorrection  des  éditions  de 
dalien,  d'Aétius,  de  Paul  d'Egine,  de  la  Gijnécologie  de  Mos- 
chion,  de  \ Optique  de  Damiane,  de  la  Collection  hippiatrique, 
éditions  pour  la  plupart  très  rares;  mais  il  insiste  avant  tout 
sur  la  nécessité  de  publier  les  textes  originaux  encore  inédits 
et  de  traduire  en  grec  divers  écrits  d'Hippocrate,  de  Galien,  de 
Soranus  d'Ephèse  et  de  Théodore  Priscien,  dont  le  texte  grec 
est  perdu  et  qui  n'existent  qu'en  traductions  latines  ou  arabes. 
ç^Ilest  pénible,  dit-il,  pour  les  descendants  de  ces  éminents 
génies  de  l'antiquité,  de  ne  pas  faire  revivre  dans  leur  langue 
maternelle  ces  reliques  des  traductions  latines  et  arabes;  ce 
serait  une  justice  à  rendre  à  ces  auteurs  de  les  traduire  en 
grec,  et  un  grand  service  à  rendre  aux  sciences,  de  publier 
les  ouvrages  encore  inédits  des  anciens  médecins,  qui  sont 
d'une  réelle  valeur  et  pour  la  médecine  en  particulier  et  pour 
les  sciences  en  général.  ?5  ' 

Pour  la  constitution  et  l'intarprétation  du  texte,  on  doit 
suivre  les  préceptes  de  Galien,  sur  lesquels  Daremberg  a  basé 
son  plan ,  en  remarquant  que  la  base  fondamentale  d'une  bonne 
édition  est  de  donner  avant  tout  un  texte  correct  et  critique. 


—    191    — 

Enfin,  M.  Costomiris  exprime  une  reconnaissance  pro- 
fondo  pour  tous  les  savants  qui  ont  contribué  à  édaircir  les 
œuvres  de  ses  ancêtres;  il  remercie  le  Gouvernement  français 
et  les  deux  compafjnies  savantes  qui  ont  soutenu  avec  ardeur 
les  éditions  classiques  des  médecins  grecs;  et  il  considère 
comme  un  hommage  pour  l'antiquité  et  un  devoir  sacré  pour 
les  sciences  et  pour  sa  propre  nation,  de  faire  connaître  au 
monde  érudit  et  à  ses  compatriotes  les  trésors  cachés  dans  les 
bibliothèques,  étant  persuadé  que  l'Université  d'Athènes,  le 
Gouvernement  hellénique,  la  générosité  reconnue  des  Hel- 
lènes, dont  l'amour-propre  est  intéressé  dans  cette  question, 
contribueront  à  la  publication  de  ces  œuvres  si  importantes. 

Abordant  ensuite  la  question,  M.  Costomiris  divise  la  ma- 
tière selon  l'importance  des  auleurs;  il  cite  tous  les  manuscrits 
qui  existent  dans  les  diverses  bibliothèques  pour  chaque  au- 
teur inédit;  il  signale  j)articulièrement  la  valeur  des  manu- 
scrits de  Paris,  qu'il  a  étudiés  lui-même,  et  il  mentionne  les 
opinions  des  autres  auteurs  sur  l'importance  des  manuscrits 
des  autres  bibliothèques.  -  '' 

I.  HippocRATE.  Le  traité  Des  semaines,  Depi  éêSonaScov 
v  70  zrpœTGv  Tsepi  vovcrojv  ro  fjuxpÔTepov ,  n'existe  qu'en  lalm , 
publié  dans  l'édition  Littré  (t.  VIII,  p.  63/i  et  t.  IX,  p.  /iSS). 
Il  n'en  existe  en  grec  que  quelques  fragments  publiés  par 
Littré  et  un  fragment  peut-être  inédit  dans  le  manuscrit 
T,  in,  16,  de  l'Escurial,  occupant  une  page,  fol.  1  v°. 

r 

II.  Galien.   a.   Ecrits  de  Galien  dont  le  texte  grec  est  perdu  : 

0.  Il  y  a  trois  ouvrages  en  arabe,  inédits  encore: 

1 .  Les  Administra  lions  anatomiques.  La  plus  grande  partie 
du  livre  IX  et  les  livres  X  à  XV  n'existent  qu'en  arabe  et  ils 
sont  inédits  (mss.  arabes  667  et  070  d  Oxford  et  une  copie 
de  Daremberg  dans  le  Suppl.  arabe  looa-  à  Paris). 


XVII. 


fUtalMIBiK    làriu^aLc 


—  192  — 

9.  Comnienlairos  de  Gallen  sur  le  IP  livre  des  Epidhiies 
d'Hipporrate,  en  six  livres.  Les  livres  II  et  III  seulement  exis- 
tent en  grec  et  en  latin,  tout  à  fait  mutilés.  Les  six  livres 
entiers  se  trouvent  en  arabe  dans  un  manuscrit  de  la  biblio- 
thèque Ambrosienne  à  Milan  et  une  copie  de  ce  manuscrit  à 
Paris,  n°  2002^  du  Suppl.  arabe,  fol.  1  à  ic)5. 

3.  Commentaires  de  Galien  sur  le  VP  livre  des  Epidémies 
d'Hippocrate,  en  huit  livres.  Les  six  premiers  ont  été  publiés 
en  grec;  une  partie  du  VP  livre,  le  VIP  et  le  VHP,  dont  le 
texte  primitif  est  perdu,  existent  en  arabe  dans  le  n°  2002' 
du  Suppl.  arabe,  fol.  19 5  v°  à  819,  à  Paris. 

b.  En  outre,  il  y  a  des  ouvrages  de  Galien  qui  n'existent 
qu'en  latin ,  publiés  dans  les  éditions  de  Cbartier  et  des  Juntes. 
Les  principaux  sont  les  suivants  : 

1 .  Le  traité  Hep)  tcûv  'apoxaTapxTixwv  ahiwv ,  De  cmisis 
procatarcticis ,  une  des  œuvres  de  Galien  lui-même,  n'existe 
qu'en  latin. 

2.  Hep)  TOJv  êv  rôj  YiXaTOJvos  Tifxaioj  îaipiKriûs  sipii[J-svcov 
vTro^w'^aTo.  S\  De  medîce  dictis  in  Plotoms  Ttniœo  commentani  IV. 
Livre  de  Galien  lui-même;  quelques  fragments  seulement 
existent  en  latin,  occupant  neuf  pages  de  Cbartier -^^ 

3.  YiixTteipDirjs  dycoyijs  vTTorvncoa-is^  Etnpiricœ  inshtutioms 
deformntio;  en  latin. 

h.  De  motu  thoracis  et pulmonis.  C'est  un  des  trois  livres  de 
Galien  sur  ce  sujet  ou  un  extrait. 

5.  An  omnes  parles  animalis ,  quod  procreatur,Jianl  simul. 

6.  Vocalmm  mstrumenlorum  disseclio. 
-j.   De  voce  et  anhclitu. 

Cet  écrit  et  le  précédent  sont  des  extraits  des  quatre  livres 
perdus  de  Galien  :  De  la  voix. 

<')  Tout  récemment,  M.  Coslomiris  a  retrouvé  le  texte  grec  dans  le  manuscrit 
grec  2383  de  Paris,  fol.  27  et  suivants. 


—  1*):^  — 

8.  De  analomia  virorum. 

Q.   De  motibns  manifcsds  et  ohscuvis-. 

10.  De  nnntomin  ocuhrum. 

11.  De  oculis  liber. 

Ces  quatre  derniers  ouvrages,  manifestement  apocryphes, 
mais  tirés  en  grande  partie  des  œuvres  perdues  de  Galien,  ne 
manquent  pas  d'importance.  En  outre,  il  y  a  d'autres  traités 
apocryphes  publiés  en  latin,  mais  sans  importance. 

B.   Ecrits  de  Galien  dont  le  texte  grec  est  inédit  : 

I.  TaXinvov  'csepi  IsTrlvvova-tjs  Sianrjs  xai  ^axvvovcrïjs ^  De  la 
diète  atténuante  et  engraissante,  existe  dans  le  Suppl.  grec 
n°  63/i,  fol.  i33,  à  Paris. 

9.  TaXrjvov  'zspbs  Tavpov  zfep)  tov  -nrôi?  èyc^vypvvxai  t(z  'é{JL- 
€pt;a,  Comment  les  embryons  sont  animés,  dédié  à  Gavrus.  Il  se 
trouve  dans  les  mss.  635  et  yay  du  Suppl.  grec,  à  Paris. 

3.  Trois  livres(?)  intitulés  :  i°  Hep)  fxvcov.  Des  muscles; 
2°  Ilepî  bcrlvv.  Des  os;  3"  Hep)  (pXe^ôiv,  Des  veines,  autres 
que  les  traités  publiés,  se  trouvent  en  même  temps  que  les 
derniers  dans  le  ms.  T,  m,  7,3  l'Escurial. 

II.  Hep]  TOV  oXov  voa-i{[xaT05  (?).  Ms.  de  l'Escurial  2,  i,  i5. 
5.   Tov  TaXvvov  'ssep)    àire-i^ias   trrpayf/aTe/a ,    Traité  de   la 

crudité.  Ms.  grec  2266  de  Paris. 

G.  T(xkr)vov  tsep\  Siahtis  xa)  S-spaTreiuv  ispos  KvziKévfJOpa 
Darp/xiOf ,  De  la  diète  et  des  thérapies,  dédié  à  Anticensor  Patri- 
cius.  Ms.  grec  9  2  3o  de  Paris. 

"y.  TaXrjvov  rà  èpwTv^iaia  Tris  iazpixrjs.,  Questions  médicales. 
Cod.  gr.  /»69  de  Munich, 

8.  Gakni  de  medicina  Hippocratis.  Biblioth.  de  Belgique, 
n"  ii3/i6. 

q.  Atto  rcov  ctTrAcov  tov  VaAtjvov  avva-^is  s'îs  Tiva  xsOoCkaiay 
Synopsis  des  simples  médicaments  de  Galien.  Ms.  gr.  2  2  3o  de 
Paris,  fol.  37. 

1/1. 


—  19^  — 

1  0.  Une  table  des  divisions  en  dix  iivres  de  Galien,  par  un 
auteur  anonyme  ancien.  Cod.  méd.  gr.  35  de  Vienne. 

Les  deux  premiers  traités  sont  sûrement  de  Galien  lui- 
même.  Les  jf'  3  et  /(  peut-être  sont  aussi  de  Galien,  si  ces 
écrits  ne  sont  pas  inscrits  par  erreur  dans  le  catalogue.  Les 
traités  5  à  i  o  paraissent  apocryphes. 

III.  SoRANUs  û'Ephèse,  contemporain  de  Galien,  est  l'au- 
teur le  plus  important  après  ce  dernier,  et  le  méthodiste  le 
plus  illustre.  Son  traité  Sur  les  maladies  aiguës  et  chroniques, 
en  huit  livres,  existe  en  traduction  latine  par  Cœlius  Auré- 
lianus  et  a  été  publié  plusieurs  fois  sous  le  nom  de  ce  dernier. 

IV.  Théodore  Priscien  (vers  38o).  Il  existe,  en  traduction 
latine,  cpiatre  livres  de  cet  auteur  sur  la  médecine,  publiés 
plusieurs  fois. 

V.  Cratévas.  Son  Pt^oTO[xi}i6v  fut  estimé  par  tous  les  an- 
ciens; c'est  le  traité  de  matière  médicale  le  plus  ancien  avec 
des  figures  des  plantes  en  couleur.  Il  ne  nous  reste  du  Pi^o- 
loyLiKÔv  de  Cratévas  que  quelques  fragments,  qui  sont  iné- 
dits, dans  les  manuscrits  médicaux  n°'  5  et  6  de  Vienne. 

VI.  .I^LiLs  Promotus,  d'Alexandrie.  Cet  auteur,  antérieur 
à  Galien,  a  écrit  trois  livres,  tous  inédits: 

1.  Le  Avva(jisp6v,  qui  se  trouve  dans  la  bibliothèque  de 
Saint-Marc,  à  Venise,  ms.  gr.  296,  fol.  191  v°,  et  à  l'Escu- 
rial,  cod.  0,  i,  9  .  fol.  1  36.  C'est  la  première  pharmacologie. 

9.  (^vaixà  xa)  àvxmaB-n'ïixd,  existe  dans  le  ms.  grec  de  Vos- 
sius,  n"  29,  à  Leyde,  dans  le  ms.  grec  du  Vatican,  n°  299, 
fol.  ^9-^  ,  et  dans  le  ms.  grec  S.  3,  fol.  1 1  4  de  l'Ambro- 
sienne.  C'est  le  plus  ancien  traité  De  la  superstition. 

3.   Uepl  io^éXoov  xai  3r)\-mïjp{c>)v  (papfxaKcov ,  existe  au  Vati- 


—   195  — 

can,  clans  le  ms.  grec  -J- [)()■.  i<>l.  Ay.'].  cl  dans  l'Ambiosiennc, 
S.  3 ,  fol.  (hj  v".  C'est  un  traite  anonyme,  attribué  à  /Elius  Pro- 
motus,  mais  en  tout  cas  c'est  la  toxicologie  la  plus  ancienne. 

VII.  Mktrodora.  L'époque  où  elle  vivait  est  tout  à  fait  in- 
connue. Elle  a  écrit  Sur  les  maladies  des  femmes;  ce  traité,  divisé 
en  cent  huit  chapitres,  contient  les  maladies  de  l'utérus,  des 
mamelles,  de  l'estomac  et  diverses  recettes.  Il  se  trouve  à 
Florence,  Plut.  76.  cod.  gr.  3,  fol.  li  v". 

VIII.  Traité  de  médecine  anonyme.  La  vivacité  du  style  et 
le  contenu  démontrent  rpie  c'est  un  traite;  très  ancien  et  très 
important.  A  propos  de  chaque  maladie,  il  est  question  : 
1"  des  causes;  9"  des  symptômes;  3"  du  traitement.  Il  se 
trouve  à  Paris  dans  le  ms.  grec  2 02 à,  fol.  1/16  v°  à  y 09  v"; 
dans  le  ms.  636  du  Suppl.  grec,  fol.  9  1  à  8a ,  et  dans  le  ms. 
rnéd.  grec  3 7  (o/im  /ii)  de  Vienne,  fol.  i  3. 

IX.  Aétils  (vers  5 00  après  J.-C).  Les  livres  les  plus  im- 
portants d'Aétius,  X  et  XII  à  XVI,  sont  encore  inédits;  il  y 
existe  de  nombreux  extraits  d'ouvrages  complètement  perdus 
qu'on  ne  trouve  pas  ailleurs.  Dans  les  diverses  bibliothèques, 
il  existe  quarante-sept  manuscrits  d'Aétius,  dont  dix  complets 
et  trente-sept  incomplets;  la  plupart  de  ces  derniers  contien- 
nent des  livres  inédits  d'Aétius.  Il  y  en  a  dix-sept  à  Paris,  dont 
cinq  complets.  Les  manuscrits  les  plus  importants  pour  une 
édition  d'Aétius  sont  les  n"'  2191,  ai^S,  2196,  2228  et 
Suppl.  grec  602  de  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  et 
deux  manuscrits  du  Mont-Athos,  un  à  Batopède  et  un  à  Lavra; 

X.  Jean  Actlarius  (vers  i3oo).  Philosophe  et  médecin, 
partisnnde  la  pratique  raisonnée,  Actuarius  fut  le  dernier  au^ 
teur  éminent  de  la  médecine  grecque.  Ce  n'est  pas  un  simple 
compilateur,  mais  un  vrai  auteur.  Les  quatre  derniers  livres 
de  sa  Méthode  thérapeutique  sont  inédits.  On  en  possède,  dans  les 


—  196  — 

diverses  bibliothèques,  quarante-six  manuscrits;  il  y  en  a 
treize  à  Paris  :  quatre  comiilets,  n"'  aSo/i,  2806,  aSoy  et 
2â56,  et  neuf  incomplets,  dont  quatre  contiennent  les  livres 
inédits,  n°'  2i53,  2233,  aaSB  et  ms.  Coisl.  33/i.  Les  plus 
importants  sont  les  mss.  2807  et  2266. 

XI.  Nicolas  Myrepsus  (vers  i2  5o).  11  a  écrit  le  Dynaméron 
le  plus  complet,  qui  a  dominé  en  France,  pendant  trois  cent 
trente-trois  ans  (jusqu'à  1 687  ),  et  presque  dans  toute  l'Europe, 
comme  pharmacopée  officielle.  Il  yen  a  trois  manuscrits  à  Paris, 
n°'  22/18,  2288  et  2287,  dont  le  premier  est  le  meilleur;  un 
à  Oxford,  cod.  Bar.  171  ;  un  à  l'Escurial,  2,  11,  8;  et  peut- 
être  le  ms.  méd.  grec  1  1  de  Vienne. 

XII.  Nic.EUS,  Des  maladies  des  reins.  Cet  ouvrage  existe  à 
Vienne  dans  le  ms.  méd.  grec  /ii,  fol.  Zii  v°;  il  y  en  a  aussi 
une  copie  dans  les  papiers  de  Daremberg. 

XIII.  Nicolas    Cérameus,    iatrophilosophe.    Abrégé   de   la 

partie  théorique   de  la  médecine.    Cet  écrit    très   important   se 

trouve  à  Vienne,  dans  le  ms.  grec  suppl.  Koll.  n°  82,  olim  53 

(IV,  D,  2  5),  fol.  1  ;  il  y  en  a  une  copie  dans  les  papiers  de 

Daremberg. 

XIV.  Léon  le  Philosophe,  De  la  nature  de  l'homme.  Une 
copie  se  trouve  dans  les  papiers  de  Daremberg. 

XV.  Théophaine  Nonncs.  Dans  le  ms.  76 A  du  Suppl.  grec 
de  Paris,  il  existe  une  collection  anonyme  :  Ta  evirôptcrla.. 
C'est  de  Nonnus;  outre  le  texte  imprimé,  ce  manuscrit  con- 
tient :  fol.  16  v"  à  5/j,  Synopsis  des  médicaments;  fol.  88  v"  à 
97  v°,  De  la  diète,  en  deux  livres.  Ces  trois  livres  sont  dédiés 
par  l'auteur  à  l'empereur  Constantin. 

XVI.  HippiATRiQCES.  Une  grande  partie  de  cette  collection 
est  inédite.  11  existe  à  Paris  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour 


—   197  — 

une  édition  :  n°'  199-^,  9  0(ji,  aSa^i,  aa/i/i,  22/16;  des  co- 
pies de  Bussemaker,  faites  d'après  d'autres  manuscrits,  se 
trouvent  dans  les  mss.  o-yS,  58o,  58 1,  588  du  Suppl.  grec, 
et  une  copie  des  chapitres  inédits,  avec  des  collations,  dans 
les  papiers  de  Daremberg,  à  l'Académie  de  médecine.  Il  y  a 
six  manuscrits  dans  diverses  autres  bibliothèques,  dont  les 
copies  ou  les  variantes  existent  à  Paris. 

XVII.  Les  Ephodes  d'Abou  Djafar,  traduits  en  grec  par 
(Constantin  de  Khégium.  Il  y  en  a  vingt-deux  manuscrits,  dont 
sept  à  Paris.  Les  plus  importants  sont  les  n°"  3 00  du  Vatican; 
222/1,  2289,  22/11  et  2811  de  Paris;  29  et  3o  de  Vienne, 
et  Plut.  7  5 ,  cod.  à  de  Florence. 

XVIII.  Jean,  gouverneur  de  Gonstantinople,  tils  de  Michel. 
Auteur  tout  à  fait  inconnu;  il  a  écrit  un  traité  complet  de  la 
médecine  théorique,  en  vingt  livres,  dont  il  n'existe  que  les 
livres  VI  à  X,  dans  le  ms.  638  du  Suppl.  grec  à  Paris ''\ 

XIX.  Jean  l'Archiatre,  Si/nopsis  de  tliénipeiUique.  Cet  ou- 
vrage se  trouve  dans  les  mss.  de  Paris,  n°'  222/1,  2286, 
2816  et  Suppl.  grec  686,  ainsi  que  dans  le  if  288  de 
Munich. 

XX.  En  outre,  un  grand  nombre  de  ])etils  traités,  dont  les 
uns  sont  anonymes,  les  autres  portent  un  nom  d'auteur,  res- 
tent encore  inédits. 

«^J'espère,  dit  en  terminant  M.  Costomiris,  que  l'Académie, 
dans  laquelle  ont  retenti  les  voix  de  Littré,  de  Malgaigne,  de 
Daremberg  et  celles  de  tant  d'autres  génies,  soutiendra  la 
lâche  d'un  homme  inspiré  par  un  amour  ardent  pour  l'anti- 
quité et  par  un  zèle  infatigable  pour  le  travail.  » 

<"  L'ouvrage  entier  se  trouve  dans  un  manuscrit  du  Mont-Atlios,  s'il  faut  en 
croire  le  catalogue  contenu  dans  un  manuscrit  de  Paris,  Suppl. grec  799,  fol.  20. 


—   1V)8  — 
N°  XVI. 

LETTRE    DE    M.    GEFFROV,   DIRECTEOR    DE    L'ECOLE    FRANÇAISE    DE   ROME. 

(séance    du    illl    MAI    1889.) 

Rome,  le  18  mai  1889. 

Monsieur  le  Président  et  cher  confrère, 

L'événement  archéologique  de  cette  semaine  est  déjà  connu 
sans  doute  de  l'Académie  par  la  voie  des  journaux.  Il  con- 
vient d'en  compléter  et  d'en  contrôler  de  visu  les  récits.  J'en- 
voie par  le  même  courrier  une  photographie. 

Dimanche  dernier,  dans  le  nouveau  quartier  des  Prati  di 
Castello,  là  oii  va  s'élever  un  Palais  de  justice,  ont  été  trouvés, 
à  l'énorme  profondeur  de  8  mètres,  deux  sarcophages  en 
pierre. 

L'un,  sans  aucune  décoration  extérieure,  porte  à  l'un  de 
ses  petits  côtés  cette  inscription  en  mauvais  caractères  : 

L  ^  CREPEREI  0)  çî'  EVHOD  a>  <^ 

Le  fond  du  sarcophage  présente,  pour  soutenir  la  tète  du 
mort,  une  élévation  de  quelques  centimètres.  La  tombe  ne 
contenait  qu'un  squelette. 

L'autre  sarcophage  n'a  sur  sa  façade  qu'une  double  série 
de  strigiles.  Le  petit  côté  à  gauche  de  la  façade  (pour  le  spec- 
tateur) présente,  en  un  bas-relief  grossier  mais  expressif,  la 
morte  étendue  sur  un  lit,  à  droite  un  homme  debout,  dans 
l'attitude  d'une  extrême  douleur,  et,  à  gauche,  une  femme 
assise,  tout  en  pleurs.  Sur  la  partie  extrême  du  rebord  du 
couvercle  et  vers  ce  bas-relief,  à  gauche  du  spectateur,  on  lit 
cette  inscription  en  bons  caractères  : 

CREPEREIA   TRYPHAENA 


—  199  — 

Les  médailles  de  la  gens  Crepereia  sont  bien  connues  (voir 
YOnomasticon  du  D'  l)e-Vit). 

Ce  second  sarcophage,  dont  il  a  fallu  briser  le  couvercle, 
fixé  par  des  morceaux  de  fer  plombé,  était  ])lein  d'eau  :  c'est 
peut-être  ce  qui  en  a  conservé  le  riche  contenu.  On  aperçut, 
à  mesure  qu'on  le  vidait,  un  squelette  et  de  nombreux 
objets.  L'eau  avait  déposé,  particulièrement  sur  le  crâne,  des 
fdaments  végétaux  formant  un  long  voile,  de  sorte  qu'au 
premier  aspect  les  ouvriers  s'écrièrent  que  la  morte  avait 
conservé  toute  sa  longue  chevelure. 

L'aspect  du  crâne,  des  dents  et  des  qs  indique  une  jeune 

femme. 

Les  objets  ensevelis  avec  elle  sont  les  suivants  : 

Un  très  beau  collier  en  or;  trente-cinq  des  pendeloques  de 
jaspe  subsistent  encore.  L'or  de  ce  collier  et  celui  des  autres 
bijoux  est  aussi  brillant  qu'au  premier  jour; 

Une  paire  de  boucles  d'oreille  en  or,  avec  perles; 

Une  broche,  monture  en  or  d'un  camée-améthyste,  repré- 
sentant le  combat  d'un  cerf  et  d'un  hippogriffe; 

Un  anneau  d'or  massif  ayant  au  chaton  une  cornaline 
gravée:  deux  mains  enlacées; 

Une  bague  avec  pierre  dure,  portant  gravé  ce  nom  :  FI- 
LETVS; 

Un  anneau  formé  de  deux  minces  cercles  d'or,  mobiles  à 
la  charnière; 

Une  longue  épingle  en  ambre,  taillée  en  spirale; 

Deux  petits  peignes  en  bois; 

Un  petit  miroir  d'argent; 

Parmi  les  menus  débris,  peut-être  des  restes  de  linceul, 
et  des  feuilles  probablement  de  myrte; 

Enfin  une  poupée  de  bois,  d'une  hauteur  de  o'"3o, 
articulée  aux  bras  et  aux  jambes,  d'un  travail  extrêmemeni 
soigné.  Le  détail  de  la  chevelure,  le  modelé  des  mains  et  des 


—  200  — 

doigts,  y  sont  remarquables.  Ce  bois  est  admirablement  con- 
servé; il  paraît  être  devenu  très  dur  et  comme  pétrifié.  Peut- 
être  cette  poupée  était-elle  dorée;  on  l'a  trouvée  comme  assise, 
la  jambe  gauche  relevée,  sur  l'épaule  droite  de  Crepereia,  et 
l'omoplate  droit  du  squelette  conserve  quelques  traces  dorées. 
C'était  l'usage,  de  quelque  façon  qu'on  veuille  l'expliquer, 
que  la  fiancée  offrit  une  pareille  poupée  à  Vénus  : 

Veneri  donatae  a  virgine  puppas, 

dit  Pei'se  [Sat.,  II,  70). 

Ce  curieux  objet  trouvé  dans  la  tombe  de  Crepereia  Try- 
pbaena,  les  débris  de  sa  couronne  de  myrte,  feuillage  con- 
sacré à  Vénus,  le  nom  de  FILET VS  gravé  sur  l'un  des  anneaux, 
les  deux  mains  unies  sur  une  des  bagues,  le  luxe  de  ces  riches 
présents,  tout  cela  autorise  la  conjecture  que  la  jeune  femme 
ensevelie  est  morte  au  moment  où  elle  allait  être  mariée. 

Ce  second  sarcophage,  un  peu  plus  soigné  que  le  premier, 
a  non  seulement  une  élévation  de  la  pierre  pour  soutenir  la 
tête  du  mort,  mais  encore  une  cavité  ménagée  dans  ce  sup- 
port même  pour  que  la  convexité  du  crâne  s'y  adapte.  Il  faut 
sans  doute  dater  ces  deux  sarcophages  du  commencement  du 
iif  siècle. 

Agréez,  etc. 

A.  Geffroy. 

N"  XVII. 

LETTRE   DE    M.    GEFFRO'Y,    DIRECTEUR    DE    L'ECOLE    FRANÇAISE   DE   ROME. 

(séance    du    2/1     MAI    1889.) 

Rome,  le  20  mai  1889. 

Monsieur  le  Président  et  cher  confrère. 

Un  télégramme  arrivé  hier  à  Rome  annonce  qu'on  vient 
de  découvrir  à  Séhnonle.  en  Sicile,  un  vaste  édifice  de  pur 


—  '20\   — 

style  grec.  On  ne  sait  encore  rien  de  plus.  Je  m'oni})resserai 
de  transmettre  à  l'Académie  les  informalions  nouvelles  à  ce 
sujet. 

Les  fouilles  d'Ostie  sont  closes,  La  saison  y  a  été  féconde, 
par  la  découverte  et  le  déblaiement  de  la  caserne  des  Vigiles 
et  de  l'Augusteum.  M.  le  commandeur  Lanciani,  qui  en  a 
tout  le  mérite,  va  publier  dans  les  Notizie  degli  Scavi  les  nom- 
breuses inscriptions  recueillies.  Le  prochain  fascicule  des  Mé- 
langes de  l'Ecole  française  de  Rome  donnera,  avec  quelques 
pages  de  lui  sur  ce  sujet,  un  plan  des  constructions  antiques 
qui  ont  été  mises  au  jour. 

Il  n'y  a  pas  lieu  d'insister  sur  la  découverte  faite  à  Rome 
d'un  très  beau  buste  d'Auguste  ,  parce  que  le  Bulletin  de  la 
Commission  communale  archéologique  va  en  donner  la  descrip- 
tion et  la  photographie.  \jn  trait  déjà  observé  sur  quelques 
bustes  de  cet  empereur  y  paraît  de  nouveau  et  mérite  atten- 
tion :  c'est  une  certaine  irrégularité  de  la  figure,  oii  le  côté 
gauche  est  plus  développé  que  le  côté  droit.  La  tête  est  cou- 
ronnée de  myrte,  allusion  probable  à  la  divine  descendance 
de  la  gens  Julia. 

Agréez,  etc. 

A.  Geffroy. 

N°  XVIII. 

NOTE  DE  M.  VICTOR  WAILLE ,  COMMUNIQUEE  PAR  M.  GEORGES  PERROT, 
SUR  UNE  DÉDICACE  À  LICINIUS  HIKROCLÈS,  GOUVERNEUR  DE  LA  MAU- 
RÉTANIE  CESARIENNE,   DÉCOUVERTE   À   CHERCHEL  LE    2  3   MAI    1889. 

(séance  do   .3i  mai  188g.) 

Quelques  détenus,  affectés  momentanément,  sur  ma  de- 
mande, à  l'exploration  du  coin  nord-est  de  l'Esplanade,  vien- 
nent d'exhumer  une  importante  ijiscri])tion  (douze  lignes)  sur 
deux  pierres  mesurant  ensemble  i"'  80  sur  o""  96. 


—  202  — 

Le  capitaine  CJouet,  commandant  le  pénitencier,  a  bien 
voulu  en  faire  prendre  immédiatement  l'estampage  et  me  l'en- 
voyer. 

C'est  une  dédicace  à  Licinius  Hiéroclès,  gouverneur  de  la 
province. 

En  voici  le  texte ,  copié  sur  l'estampage  : 

l-KcïNlO  ■  HIEROCLETI  -VIRO  •  EGREGIO   PROC- AVGVSTI-N 
p-AESIDI  ■  PROVINCIAE-  MAVRETANIAE-  CAESARIENSIS 
PRAESIDI  •  PROVINCIAE  •  SARDINIAE  •  PRAEFECTO  •  LEGIONS 

SECVNdAE 
PARTHICAE-SEVERIANAE  alexandrianae  VICE -LEGATI- PROC 
5      HEREDITaTIVM  •  TRIBVNO     COHORTIS  •  OCTAVAE  •  PR7ETO- 

RIAE 
PIAE  VINDICIIS-SEVERIANAE  alexandrianae ■?KPc.?0S\l0 
EQVlTVM •  ITEMQVE-  PEDITVM  IVNIORVM •  M AVRORVM-IVRE 
GLADlI-TRIBVNOS- COHORTIS -VNDECIMAE-VRB AN AE 
SEVERIANAE  alexandrianae  PRIMIPILVM  •  BIS- ET 

10       clavdiae-nervianae-conivgi-eivs-eT-  liciniIs-hie- 

rocleTi 

HIEROCLIAE-PAVLINAE  eT   AXIAE- FILIIS- EORVM  • 
M  •  AELIVS  •  SATVRN  IN  VS  •  VETERANVs  •  EXDEC  •  ALARIO     PA- 

TRONIS-DIGNISSIMIS 

L.  6.  VINDICIIS  pour  VINDICIS  existe  sur  la  pierre. 

L.  8.  Le  lapicide  avait,  dans  une  première  gravure  moins 
profonde,  écrit  TRIBVNVS;  en  gravant  définitivement  l'in- 
scription, il  s'est  aperçu  de  son  erreur  et  a  corrigé  en  TRI- 
BVNO; les  lettres  VS  sont  encore  parfaitement  lisibles.  Il  ne 
s'est  pas  aperçu,  par  contre,  de  la  faute  (pi'il  a  commise  en 
écrivant  primipilum. 

L.  19.  Le  s  final  de  VETERANVS  est  plus  petit,  parce 
que  la  pierre  était  trouée  à  la  partie  supérieure  de  la  ligne 
en  cet  endroit. 

L.  Licinius  Hiéroclès  était  gouverneur  de  la  Maurétanie  Cé- 
sarienne en  997  après  J.-C.  (Fallu  de  Lessert,  Les  gouverneurs 
de  Maurélanie  [Jhdleiin  des  nnùquités  africames.  i88,)J,  p.  1  2  A). 


—  -nys  — 

Il  était  dt'jà  connu  par  trois  inscriplions  de  (Àuii'chol  (^C.  I.  L. , 
Vill,  c)35/i,  9355,  9867). 

Sa  carrière  est  parfaitement  régulière  :  après  deux  primi- 
pilats,  il  arrive  aux  milices  équestres  et  de  là  à  des  charges  de 
la  carrière  équestre.  Deux  seulement  sont  à  noter  : 

1°  Celle  de  préfet  de  la  légion  H"  Parthique,  où  il  tient  la 
place  du  légat  :  c'est  le  premier  préfet  de  cette  légion  dont  il 
soit  fait  mention; 

Q°  Celle  de  praepositus  equitum  ilemqiœ  peditum  juniorum 
Maurorum,  jure  gladil.  La  seconde  partie  du  titre  indique 
qu'il  avait  reçu,  étant  à  la  tête  de  troupes  maures,  la  juri- 
diction capitale  sur  les  citoyens  romains  de  la  province  ou  de 
la  région  où  campaient  ces  troupes,  juridiction  qui  n'était 
accordée  d'ordinaire  qu'aux  gouverneurs  de  provinces  sénato- 
riales ou  impériales;  cette  dérogation  au  principe  trahit  des 
circonstances  exceptionnelles.  La  première  partie  est  plus  inté- 
ressante encore  et  constitue  une  nouveauté.  On  savait  déjà 
que  les  Maures  étaient  employés  comme  auxiliaires  en  Afrique 
et  ailleurs  (C.  /.  L.,  VIII,  2716,  90/16,  9067;  Eph.  epigr.,  II, 
626,  777;  C.  I.  L.,  III,  822/1,  8/i/i/i,  etc.).  Mais  jamais  on 
n'y  avait  trouvé  la  mention  de  Mauri  jumores.  Or  il  est  admis 
qu'après  Dioctétien,  lorsqu'un  corps  de  troupes,  légion  ou 
corps  auxiliaire,  était  dédoublé,  la  portion  de  création  an- 
cienne se  distinguait  de  la  nouvelle  par  l'épithète  de  seniores 
opposée  à  celle  dejuniores,  de  même  qu'antérieurement,  lors- 
({u'une  légion  était  dédoublée,  la  vieille  légion  prenait  le  nom 
de  Primigenia.  (i'est  ainsi  rju'on  a  des  Jovn  semores  et  des  Jovii 
juniorea,  des  Herculii  seniores  et  des  Herculù  jumores ,  des  Lan- 
cinrù  semores  ei  des  Lanciarù  jumores,  etc.  La  nouvelle  inscrip- 
tion de  Chcrchel  nous  prouve  que  cette  habitude,  pour  les 
corps  semi-réguliers  nommés  numeri  ou  vexiUaUones .  remonte 
à  une  époque  antérieure  à  Dioclélien.  La  l^oUce  des  dignités 
nous  cite  plusieurs  corps  de  Maun  semores  et  de  Mauri jumores 


—  20^  — 

en  Italie  [Not.  Dign.,  Occ,  V,  9o3  et  ao/i);  ies  Mauri  tonanles 
seniores  et  les  Mauri  tonanles  juniores  en  Tingitane  i^ihid,,  2a i 
et  229). 

Le  mot  Alexamlrinnae  a  été  martelé  en  deux  endroits.  La 
restitution  ne  peut  faire  l'objet  d'un  doute. 

N"  XIX. 

LETTRE  DE  M.   GEFFROY,  DIRECTEUR  DE  L'ECOLE  FRANÇAISE  DE  ROME. 

(séance  du  7  JUIN  1889.) 

Rome,  le  k  juin  1889. 

Monsieur  le  Président  et  cher  confrère, 

J'ai  écrit  dans  ma  dernière  lettre  que,  suivant  un  télé- 
gramme officiel  communiqué  à  l'Académie  royale  des  Lincei 
dans  sa  séance  du  19  mai,  on  venait  de  trouver  en  Sicile,  à 
Sélinonte,  derrière  les  Propylées  de  Gaggera,  sur  la  rive  du 
Sélinus,  «un  grand  édifice  de  pur  style  grec». 

D'après  mes  correspondances  et  d'après  le  récit  d'un  témoin 
oculaire,  il  paraît  impossible  qu'on  sache  avant  la  prochaine 
saison  de  fouilles  quelque  chose  de  certain  à  ce  sujet.  Les 
travaux  de  la  saison  actuelle  sont  interrompus  parla  chaleur; 
de  plus,  les  ruines  dont  il  s'agit  se  trouvent  dans  un  terrain 
qui  appartient  à  un  particulier  :  il  faut  donc,  avant  de  conti- 
nuer ou  de  reprendre  les  fouilles,  traiter  avec  le  propriétaire 
ou  procéder  à  une  expropriation  pour  utilité  publique. 

Les  ruines,  situées  à  quelque  distance  des  temples  déjà 
connus  de  Sélinonte,  sont  enfouies  dans  le  sable.  On  n'a  encore 
déblayé  que  la  partie  supérieure  de  ce  qui  reste  debout,  et  il 
ap])araît  tout  au  moins  que  l'édifice  antique  aurait  été  adapté 
pendant  le  moyen  âge  aux  convenances  d'une  église  byzan- 
tine. Pas  de  péristyle,  pas  de  colonnes.  Il  faut  évidemment 
attendre  de  nouveaux  travaux. 


—  205  — 

Le  saiiKidi  i"  juin,  se  sont  termint^es  aussi,  c\  cause  de  la 
chaleur  et  des  Iravaux  des  champs,  les  fouilles  (jue  M.  Gsell, 
membre  de  l'Ecole  française  de  Rome,  poursuivait  depuis 
quatre  mois  dans  la  nécropole  de  Vulci.  L'Académie  recevra 
incessamment  un  rapport  à  ce  sujet. 

Agréez,  etc. 


A.  Geffroy. 


]\°  XX. 


NOTE  SDR  L'EMPLACEMENT  DE    NEFERIS  (aFRIQUe), 
PAR  LE  R.  P.  A.-L.  DELATTRE,  COMMUNIQUÉE  PAR  M.  HERON  DE  VILLEFOSSE. 

(séance  du  7  JUIN  1889.) 

On  savait,  par  le  témoignage  des  auteurs  anciens,  que  la 
ville  de  Neferis,  qui  joua  un  rôle  si  considérable  durant  la 
dernière  guerre  punique,  était  située  à  1 80  stades  de  Garthage, 
environ  33  kilomètres.  D'après  Strabon,  pour  s'y  rendre  de 
Garthage  par  mer,  on  abordait,  après  un  trajet  de  60  stades, 
soit  11  kilomètres,  à  la  rive  opposée  du  golfe.  Du  point  de 
débarquement,  une  montée  de  120  stades  menait  à  Neferis, 
ville  bâtie  sur  un  rocher  dans  une  situation  très  forte. 

Appien  nous  apprend  en  outre  qu'un  cours  d'eau  passait 
dans  la  plaine  à  3  stades  seulement  (55o  mètres)  de  l'émi- 
nence  sur  laquelle  s'élevait  Neferis. 

Telles  étaient  les  données  que  l'on  possédait  pour  recher- 
cher l'emplacement  de  cette  ville.  Mannert  se  trompa  d'abord 
en  l'identifiant  avec  Mraïssa ,  située  \is-à-vis  même  de  Garthage 
de  l'autre  côté  du  golfe.  On  sait  aujourd'hui  que  Mraïssa  est 
l'ancienne  (îarpis.  D'autres  errèrent  davantage  encore  en  pla- 
çant Neferis  à  l'extrémité  du  cap  Bon,  à  Sidi  Daoud  en-Nebi. 
Une  inscription  du  musée  de  Saint-Louis  de  Garthage,  pro- 
venant de  cet  endroit,  prouve  que  cette  localité  correspond  à 
l'ancienne  Missua. 


—  -206  — 

Tissot  a  le  premier,  avec  pleine  raison  .  cherché  l'empla- 
cement de  Neferis  derrière  le  massif  du  Bou  Korneïn.  Mais 
la  localité  qu'il  a  adoptée,  sur  le  rapport  de  M.  le  capitaine 
Prudhomme,  quoique  très  vraisemblable,  n'était  point  encore 
le  lieu  précis  de  la  forteresse  d'Asdrubal. 

Quand  on  se  rend  en  voiture  de  Tunis  à  Grombalia ,  en 
prenant  la  route  directe  qui  naguère  n'était  qu'une  piste  arabe, 
on  arrive  en  deux  heures,  après  avoir  traversé  la  plaine  de 
Mornak,  à  des  terrains  élevés  qui  semblent  relier  le  massif 
du  Bou  Korneïn  au  Djebel  Ressas.  Au  sommet  de  la  montée 
on  aperçoit  le  Khangat-el-Hadjadj ,  vallée  de  forme  elliptique, 
large  de  3  à  4  kilomètres,  longue  de  12  à  i3,  entourée  de 
montagnes  absolument  disposées  en  fer  à  cheval,  dont  la 
partie  ouverte  regarde  Grombalia,  que  l'on  aperçoit  au  loin, 
ainsi  que  le  village  de  Beli  et  la  montagne  de  Nebel. 

Dans  la  plaine,  que  l'on  pourrait  comparer  à  l'arène  d'un 
immense  amphithéâtre,  serpente  un  oued,  qui  la  parcourt 
dans  toute  sa  longueur. 

A  peu  de  distance  de  Voued,  au  fond  du  fer  à  cheval,  vers 
le  Djebel  Ressas  qui  disparaît  complètement,  on  voit  plusieurs 
collines  qui  se  détachent  de  la  montagne.  L'une  d'elles,  que 
l'on  m'a  désignée  sous  le  nom  de  Henchir-Bou-Beker,  avait  son 
plateau  autrefois  protégé  par  des  murailles  qui  enveloppent 
encore  de  nombreuses  citernes.  Vers  la  plaine,  les  flancs  de 
cette  colline  sont  escarpés,  et  du  côté  opposé,  celui  par  lequel 
on  avait  accès  au  plateau  supérieur,  les  restes  d'une  grande 
construction  circulaire  m'ont  paru  être  la  basi^  d'une  tour. 

Mais  de  hautes  herbes  et  surtout  des  lentisques  ont  com- 
plètement envahi  les  ruines  et  en  rendent  aujourd'hui  l'étude 
détaillée  fort  difficile,  et  mémo  impossible  tant  que  le  terrain 
n'aura  pas  été  défriché. 

C'est  sur  le  sommet  de  cette  colline  que  M.  Lançon,  ad- 
ministrateur et  en  grande  parli(>   proj)riétnire  du    vaste  do- 


—  207   — 

inaine  du  KliaDgal-el-Hadjadj ,  rcnuinjua  plusieurs  bloci  de 
jjierre  porlanl  une  inscription.  Ces  jjierres  gisaienl  sur  le  sol. 

Sur  l'invitation  de  M.  Lançon,  je  suis  allé,  le  a/i  mai, 
prendre  connaissance,  copie  et  estampage  de  ces  textes,  qui 
fixent  désormais  l'emplacement  de  Neferis,  de  cette  ville  car- 
thaginoise où,  pendant  la  dernière  guerre  punique,  Asdrubal 
avait  établi  son  camp  et  que  Scipion  résolut  de  réduire  avant 
d'assiéger  (J  art  h  âge. 

Voici  les  deux  dédicaces  impériales  qui  renferment  le  nom 
de  Neferis,  avec  sa  véritable  orthographe,  civitas  Neferitana. 

Sur  la  face  d'un  piédestal  de  pierre,  dont  la  corniche  su- 
périeure est  ornée  d'oves  et  de  denticules,  dans  un  encadre- 
ment haut  de  o"'8o  et  large  de  o"'  /i85;  hauteur  des  lettres, 

I. 

IMP  •  CAES  •  M  •  AVRELIO 
ANTONINO  •  PIO  •  AVG  ■  P  •  M  ■ 
TRIB  •  POT  •  VI  •  COS  •  P  •  I  •  ??^ 
IMP  •  CAES  •  L  •  SEPTIMI  •  SEVE 
r.  RI-PII-PERTIN^CIS -AVG -ARA 
BICI  •  ADIABENICI  •  PART  •  MAX- 
FIL^DIVI  •  M  ■  ANTONINI  •  PII  • 
GERMANICI  •  SARMATICI 
NEPOTI    •    DIVI    •    ANTONINI 

10  PII  •  PRONEPOTI  ■  DIVI  •  HA 
DRIANI  •  ABNEPOTI  ■  DIVI 
TRAI  ANI  •  PA  R  THI  C  I 
DIVI  •  NERVAE  •  ADNEPOTI 
CIVITAS    ^    NEFERITANA 

i5  D  ^  D  P  P  Ç& 

La  seconde  inscription,  qui  donne  également  le  nom  de 

*''  [A  la  ligne  '.i ,  \pi  lettres  P-I-  signifient />nnctp»  juventutis.  On  sait  que 
Caracniia  fut  le  premier  Auguste  qui  porta  re  titre.  A  la  lin  rie  la  ligne  12,  il 
faut  suppléer  et.  —  A  .  H  .  de  V.] 

ivii.  i5 


(■riiup.kiB   xiTiit^iti;. 


—  208  — 

Neferis,  est  gravée  sur  la  face  d'un  piédestal  haut  de  i"'  5o  et 
large  de  o'"70.  Une  moulure  encadre  l'inscription,  qui  oc- 
cupe o"'86  en  hauteur  et  o™58  en  largeur;  hauteur  des 
lettres,  o™  o/i5  : 

II. 

I  MP     CAES     divi  m    Atito 

N  I  N  I    PII     g-  E  RM       sarm. 

FIL    DIV  I    COM  Modi     fr 

AT  RI    DIVI       Antonini    pii 

5     NEP    DIVI   H  ADR  mm     pro 

NEP  DIVI  TRAIANI     ah 

NEP  DIVI  NERVAE  ADNEP  • 

SEPTIMIO  SEVERO  PIO  PER 

TINACI  AVG  ARABICO 

10     ADIABEN^O  PMTRBPOT 

IIII  IMP  VIII  COs  iiWMmWM 

CIVITAS        NEFERITANA 

D     D  P     P 

Ces  deux  inscriptions  et  les  détails  topographiques  donnés 
plus  haut  prouvent,  on  le  voit,  que  la  colline  désignée  sous  le 
nom  de  Henchir-Bou-Beker  est  bien  l'emplacement  de  l'an- 
cienne Neferis  et  que,  par  conséquent,  la  plaine  du  Khangat- 
el-Hadjadj  a  été,  pendant  la  troisième  guerre  punique,  le 
témoin  des  exploits  de  Scipion  et  le  théâtre  des  dernières  luttes 
des  Carthaginois  contre  les  Romains  unis  aux  Numides,  avant 
la  dfîstruction  complète  de  la  métropole  de  l'Afrique. 


N°  XXI. 

NOTE    SUR    DES    DECOUVERTES    FAITES    À    GABÈS   ET    À    GAFSA  ( TUNISIE ), 
PAR  M.    HÉRON    DE   VILLEFOSSE. 

(séance  DD  îîi  jum  1889.) 
J'ai  reçu  du  commandant  Privât,  à  la  date  du  ig  février 


—  -209  — 

dernier,  (l'intéressants   détails  sur   des    découvertes  faites  à 
Gabès  (l'antique  Tacape)  et  à  Gafsa  [Cnpsa). 

Sur  reni[)laceinent  de  la  première  localité  se  trouvait  un 
petit  monticule  isolé.  Pour  l'explorer  complètement,  le  com- 
mandant Privât  fit  faire  une  tranchée  de  2  mètres  de  largeur 
et,  au  centre,  à  environ  3  mètres  de  profondeur,  il  constata 
l'existence  d'une  auge  longue  de  i'"90  et  large  de  o"'8o, 
creusée  dans  un  tuf  terreux  sans  consistance.  Cette  auge, 
orientée  du  sud  au  nord,  contenait  quelques  débris  d'osse- 
ments humains  au  milieu  desquels  il  recueillit  une  pièce  de 
monnaie  en  bronze,  un  vase  en  terre  grise,  une  petite  coupe 
en  terre  noire  et  un  dé  à  jouer  en  os.  Aucune  pierre,  aucune 
brique  n'avait  été  employée  dans  cette  sépulture. 

La  pièce  de  monnaie  et  le  dé  à  jouer  étaient  placés  au 
centre;  la  coupe  et  le  vase  se  trouvaient  en  arrière  de  la  tête. 
La  monnaie  est  une  pièce  de  bronze  à  l'efligie  d'un  roi  numide, 
probablement  Micipsa ,  avec  le  cheval  au  galop  au  revers.  Le 
dé  à  jouer  porte  des  nombres  sur  deux  de  ses  faces;  sur 
l'une  le  nombre  3 ,  sur  l'autre  le  nombre  6  ;  chaque  unité  est 
représentée  par  deux  petits  cercles  concentriques.  La  coupe  est 
en  terre  noire  vernissée.  Le  vase,  haut  de  0™  i5,  a  la  forme 
d'une  amphore  grecque  d'une  époque  basse. 

Cette  trouvaille  est  intéressante,  puisqu'elle  nous  fournit 
des  détails  sur  la  disposition  et  le  mobilier  d'une  sépulture 
indigène  sous  tumulus,   antérieure   à  la  conquête  romaine. 

Le  commandant  Privât  a  déblayé  également ,  près  de  Sidi 
Boulbaba,  une  vaste  construction  dont  la  destination  est  diffi- 
cile à  reconnaître  d'une  manière  certaine; mais  il  en  envoie  le 
plan,  ainsi  que  les  vues  intérieures  et  extérieures  de  deux 
des  faces. 

La  forme  générale  du  monument  est  celle  d'un  long  rec- 
tangle qui  rappelle  la  forme  des  basilifjues;  cependant  l'examen 
des   dispositions    intérieures   ne    permet    pas  de  s'arrêter   à 


J!). 


—  i>10  — 

cette  |)remière  supposition.  Les  quatre  faces  sont  pourvues 
de  niches  cimentées.  Aucune  fenêtre,  aucune  ouverture  ne 
donne  de  jour  sur  une  vaste  salle  de  1 6  mètres  de  long  sur 
3  mètres  de  large.  Un  premier  étage  devait  s'élever  au-dessus 
des  piliers  et  des  murs  encore  debout.  Les  gros  piliers,  les 
contreforts  et  les  murs  sont  construits  en  pisé  fabriqué  avec  du 
marbre  et  des  cailloux.  Le  sol,  dans  les  parties  mises  à  jour, 
est  formé  par  un  béton  assez  grossier,  où  le  marbre  entre  dans 
une  notable  proportion.  Les  niches  sont  recouvertes  d'un  ci- 
ment de  mauvaise  qualité,  ne  ressemblant  en  rien  à  celui  qui 
a  été  employé  pour  la  construction  des  nombreuses  citernes 
qui  couvrent  toute  cette  partie  du  plateau  de  Boulbaba. 

Il  est  probable  qu'il  ne  faut  pas  songer  à  reconnaître  dans 
cette  construction  un  réservoir  d'eau,  mais  plutôt  un  édifice 
destiné  h  renfermer  les  provisions  de  céréales  pour  les  troupes, 
un  de  ces  greniers  (^liorrea^  dont  les  inscriptions  nous  ont 
permis  de  constater  l'existence  sur  divers  points  du  territoire 
de  l'Afrique.  Pendant  le  déblaiement  on  a  découvert  au  pied 
d'un  des  piliers  une  double  tête  de  Jupiter  et  de  Bacchus. 
Les  nombreux  fragments  de  plaques  en  marbre  blanc  retrouvés 
dans  les  décombres  semblent  appartenir  à  un  revêtement  in- 
térieur. 

Un  capitaine  du  génie  a  découvert  à  Gafsa  une  mosaïque 
assez  délabrée,  mais  curieuse  par  la  scène  représentée  et  par 
la  naïveté  du  dessin.  M.  le  commandant  Privât  en  adresse  un 
croquis.  On  y  voit  une  course  de  chars  dans  le  cirque.  La 
partie  qui  subsiste  contient  encore  deux  chars  à  quatre 
chevaux  conduits  par  des  auriges  et  tournant  autour  de  la 
spina,  au  milieu  de  laquelle  se  dresse  un  obélis(pie.  Plusieurs 
hommes  à  pied,  tenant  des  palmes,  regardent  la  course,  pen- 
dant qu'un  cavalier  semble  s'exercer  dans  une  autre  partie  de 
l'arène.  Sous  les  arcades  qui  limitent  le  grand  côté  du  cirque 
sont  placés  les  spectateurs,  dont  les  têtes  serrées  et  attentives 


—  211   — 

semblent  prendre  un  grand  plaisir  à  l'action  qui  se  dërouie 
devant  eux.  Cette  mosaïque  a  été  découverte  au  mois  d'oc- 
tobre 1888. 

M.  le  commandant  Privât,  qui  me  transmet  ces  renseigne- 
ments, appartient  au  à"  régiment  de  tirailleurs  indigènes. 
C'est  un  des  officiers  qui  ont  le  plus  activement  contribué  à 
la  découverte  des  belles  mosaïques  d'Hadrumète.  On  voit  que 
son  zèle  ne  se  ralentit  pas  et  nous  pouvons  espérer  qu'il  ren- 
dra encore  de  nouveaux  services  à  la  cause  de  l'archéologie 
africaine. 


LIVRES  OFFERTS. 


SÉANCE   DU    3    MAI. 

Sont  oii'erls  : 

Sludien  ûber  die  Enlstehiing  der  nordischen  Gôtter-  uiid  Heldensagen ,  pai" 
M.  Sophus  Bugge,  professeur  à  l'Université  de  Christiania;  traduction 
allemande  par  M.  Oscar  Brenner,  3'  fascicule  (Munich,  1889,  in-8°); 

Les  anciennes  forêts  du  littoral  et  la  spontanéité  du  pin  maritime  dans  les 
dunes  de  Gascogne,  par  M.  E.  Durègne  (Bordeaux,  in-8°,  extrait  du 
Journal  d'histoire  naturelle  de  Bordeaux  et  du  Sud-Ouest). 

Le  Secrétaire  perpétuel  présente,  de  la  part  de  l'auteur,  Le  comte  de 
Chamhrun,  ses  études  politiques  et  littéraires,  par  l'auteur  de  La  comtesse 
Jeanne  (M"^  Clarisse  Bader),  2'  édition  (Paris,  1889,  in-8°). 

L'auteur,  en  adressant  cet  ouvrage  à  M.  Wallon,  y  avait  joint  une 
lettre  oii  on  remarque  ce  passage  : 

rrJe  me  suis  appliquée  ici  avec  un  soin  pieux  à  grouper  les  meilleures 
pages  du  philosophe  aveugle,  en  les  rattachant  à  la  grande  pensée  qui 
les  a  inspirées.  De  ces  pages,  les  unes  ont  déjà  été  publiées,  les  autres 
sont  inédites;  toutes  expriment  l'idée  fondamentale  du  psychologue  qui, 
en  étudiant  les  diverses  manifestations  de  la  vie  intellectuelle  des  peuples, 
histoire,  art,  poésie,  y  cherche  l'âme  de  l'humanité,  i'âme  de  l'humanité 
constituant  à  travers  les  siècles  l'œuvre  de  la  civilisation  chrétienne.  Chris- 
tianisme et  civilisation,  tel  est  le  dernier  mot  du  comie  de  Chamhrun. 

«■En  considérant  les  diverses  manières  d'écrire  l'histoire,  le  philosophe 
a  reconnu  combien  l'étude  des  sources,  la  paléographie,  l'archéologie,  la 
numismatique,  avaient  renouvelé  le  caractère  de  l'histoire.  A  ce  titre,  je 
désirerais  qu'un  exemplaire  de  mon  travail  fût  ollert  à  l'Académie  des 
inscriptions.  » 

M.  Wallon  ajoute  :  rrL'ouvrage  est  plus  de  la  compétence  de  l'Aca- 
démie des  sciences  morales  et  politiques  que  de  la  nôtre;  il  nous  touche 
pourtant  par  le  côté  que  vient  d'indiquer  l'auteur,  indépendamment  de 
l'intérêt  qui  s'attache  ;i  l'œuvre  du  penseur  aveugle  et  à  la  manière  tout 
à  fait  distinguée  dont  l'auteur  de  La  comtesse  Jeanne  l'a  résumée." 

M.  VioLLET  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ffJ'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  au  nom  de  M.  Marignan,  un 
ouvrage  intitulé  :  Etudes  sur  l'état  économique  de  la  France  pendant  la 


première  partie  du  moyen  âge,  par  M.  Lampreclit;  traduction  de  l'ouvrage 
alleuiand,  par  iM.  A.  Mari^;i)an  (Paris,  1889,  in-S"). 

(fM.  Lamprocht  a  lait  paraître  en  1878  une  étude  sur  l'e'tat  écono- 
mique de  la  France  au  xi'  siècle.  Cet  essai,  qui  fut  remarque  lors  de  sa 
publication,  vient  d'être  traduit  en  français  par  M.  iMarijjnan,  qui  y  a  joint 
quelques  cha[)itres  extraits  du  grand  ouvrage  de  M.  Lamprecht  sur  l'his- 
toire de  l'état  écononii(ju('  do  l'Allemagne  au  moyen  Age. 

frCes  études,  d  une  lecture  attachante,  sont  aussi  (-loignécs  que  possible 
de  tout  esprit  de  système  :  elles  constituent  le  commentaire  et  la  glose, 
au  point  de  vue  de  l'histoire  économique,  de  quelques  fragments  des  lois 
barbares,  d'un  grand  nombre  de  diplômes  et  de  chartes.  xM.  Marignan  a 
ajouté  des  notes  fort  uliles;  sa  traduction  est  intentionnellement  calquée 
sur  le  texte  allemand  :  fidélité  qui  n'est  peut-être  pas  toujours  très  con- 
forme au  génie  de  notre  langue,  -n 

SÉANCE   DU    10    MAI. 

Le  Secrktaire  perpétcel  dépose  sur  le  bureau  le  6"^  fascicule  des 
Comptes  rciuliis  des  séances  de  l'Académie  pour  l'année  1888,  novembre- 
décembre  (Pari-;,  1889,  in-8°). 

M.  Delisle  présente  deux  ouvrages  de  la  part  des  auteurs  : 

1°  Catalogue  général  des  inanuscrits  des  bibliothèques  publiques  de  France. 
Catalogue  des  manuscrits  de  la  bibliothèque  de  l'Arsenal,  par  M.  Henry 
Martin,  tome  IV  (Paris,  1888,  in-8°); 

9."  La  prise  de  Jeanne  d'Arc  devant  Compiègne  et  l'histoire  des  sièges  de 
la  même  ville  sous  Charles  VI  et  Charles  VII,  d'après  des  documents 
inédits,  par  M.  Alexandre  Sorel  (Paris  et  Orléans,  1889,  in-8°). 

rr L'étude  de  la  topographie  et  un  di'pouillement  minutieux  des  archives 
municipales  de  Compiègne  ont  permis,  dit  AL  Delisle,  à  M.  Sorel  d'ex- 
poser en  di'tail  et  avec  des  renseignements  nouveaux  tous  les  événements 
qui  se  sont  accomplis  à  Compiègne  et  aux  environs  depuis  i4i3 
jusqu'en  t/i3o.  Son  livre  est  très  utile  à  consulter  j)our  l'histoire  de  la 
(in  du  règne  de  Charles  VI  et  du  commencement  du  règne  de  Charles  VIL" 

M.  DE  PioziÈRE  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ffj'ai  l'honneur  d'oflrir  à  l'Académie,  de  la  part  de  M.  le  comte  de 
Beauchanq),  ancien  élève  de  l'École  polytechnique,  aujourd'hui  capitaine 
d'artillerie  et  professeur  à  l'Lcole  d'application  de  Fontainebleau,  un 
volume  publié  sous  les  auspices  de  la  Société  des  antiquaires  de  l'Ouest: 
Château-Guillaume  en  Poitou ,  histoire ,  mœurs  et  coutumes,  restauration  du 


—  2l/i  — 

château  (Paris,    1888,   iii-fol.,  extrait  des  Paysages  et  monnmenls  du. 
Poitou,  photographiés  par  M.  Jules  Robuchon,  livraisons  99-95). 

frCe  vohime  est  relatif  au  Château-Guillaume,  situe  dans  la  conunune 
de  Lignac,  canton  de  Délabre,  arrondissement  du  Blanc,  département 
de  l'Indre. 

ff  La  construction  du  Château-Guillaume  remontait  aux  premières  années 
du  xu'  siècle.  C'était  un  des  monuments  les  plus  importants  et  les  plus 
complets  de  l'époque  féodale,  comparable  pour  l'ampleur  au  château  de 
Pierrelbnds. 

frDu  xii'  siècle  à  la  fin  du  xvni',  ce  château  avait  à  plusieurs  reprises 
changé  de  possesseur.  A  l'époque  de  la  Révolution,  il  fut  confisqué  sur  le 
comte  de  la  Faire,  comme  bien  d'émigré,  mis  en  vente,  et  adjngé  à  des 
acquéreurs  qui,  en  1802,  le  rétrocédèrent  à  la  famille  de  l'ancien  pro- 
priétaire. 

ffiMais  à  cette  époque  il  était  dans  un  état  de  délabrement  complet,  et 
c'est  seulement  en  i8i6,  lorsqu'il  devint  la  propriété  de  la  famille  de 
Beaucbanij),  que  cette  honorable  famille  entreprit  courageusement 
et  à  grands  frais  de  le  restituer  et  de  le  reconstruire  conformément 
au  plan  qu'on  en  possédait.  La  reconstruction  est  aujourd'hui  pres(|ue 
complètement  achevée. 

ffLes  dessins,  les  vues,  les  plans,  les  blasons,  qui  accompagnent  le 
volume  que  j'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  et  qui  présentent  pour 
l'histoire  du  Château-Guillaume  un  très  grand  intérêt,  sembleraient  de 
nature  à  faire  classer  l'ouvrage  de  M.  de  Beauchamp  au  nombre  des 
albums  plutôt  que  des  ouvrages  d'histoire  proprement  dite.  Mais  il  suflfil 
de  lire  les  premières  lignes  du  texte  qui  acconqiagne  ces  illustrations 
pour  se  convaincre  que  ce  texte  a  été  établi  sur  les  fondements  les  plus 
solides  et  les  plus  scientifiques.  11  existait  en  effet  au  Château-Guillaume 
un  précieux  chartrier,  dont  M.  de  Beauchamp  a  entrepris  le  classement 
et  le  dépouillement,  en  même  temps  qu'il  relevait  les  vieilles  tours.  C'est 
avec  Cl'  chartrier  qu'il  a  pu  rétablir  d'une  façon  certaine  la  liste  des  pro- 
priétaires successifs  du  château.  Sous  ce  rapport  comme  sous  celui  de  la 
restitution  matérielle,  ro[)éraliou  touche  à  sa  fin,  et  tout  permet  d'espérer 
que  M.  de  Beauchamp,  qui  a  été  assez  heureux  pour  rencontrer  parmi  ses 
parents  et  ses  amis  d'utiles  collaboi-ateurs,  ne  tardera  pas  à  nous  donner 
une  monographie  complète  et  détaillée  de  la  vieille  forteresse  féodale." 

Al.  DE  B01S1.ISLE  offre,  au  nom  de  l'auteur,  Le  Père  Grasset,  chroniqueur 
céleslin  du  xvir  siècle,  par  M.  \.  Alazon  (Lyon,  1889,  in-8°,  extrait  de 
la  Renie  du  Li/onnais). 


—  215  — 

"M.  Mazon,  dont  j'ai  déjà  eu  Thonneur  de  pn%enler  plusieurs  écrits  à 
l'Académie,  m'a  chargi-  aujoui-dliui  d'oflVir  ceUe  notice  sur  une  chro- 
nique inédile  du  P.  Grasset,  relij'ieux  céiestin  et  prieur  du  monastère  de 
Notre-Dame  de  Colombier,  en  Vivarais,  qui  mourut  vers  1661.  La  chro- 
nique a  pour  titre  :  Dtscows  génva/ogique  de  la  noble  maison  des  Bertrand 
et  de  leur  alliance  avec  celle  des  Colombier.  Non  seulement  elle  traite  des 
événements  relatifs  à  Tordre  des  Célestins  et  au  monastère  que  l'auteur 
dirigeait,  mais  elle  renferme  aussi  des  renseignements  nouveaux  sur 
divers  personnages  historiques  des  xiv%  xv',  xvi'  et  xvii"  siècles,  tels  que 
les  deux  cardinaux  Pierre  Bertrand ,  d'Annonay,  et  Pierre  Bertrand ,  neveu , 
de  Colombier;  Aymard  de  Uoussillon,  sire  d'Aimonay;  Jean  de  Monluc, 
évêque  de  Valence;  le  diplomate  François  Belle,  agent  du  cardinal 
Bertiand  en  Italie;  l'abbé  Jean  Veriumi,  qui  s'attacha  à  l'empereur 
Frédéric  III  et  périt  à  la  bataille  d'Andrinople,  etc.  A  en  juger  par 
la  notice  de  M.  Mazon,  il  serait  désirable  (jue  l'on  publiât  intégralement 
cette  chronique,  dont  un  historien  local  a  seulement  donné  quelques 
extraits  il  y  a  cinquante  ans.  Elle  ne  laisserait  pas  de  rendre  quelques 
services  ^  surtout  pour  l'histoire  du  xiv'  siècle,  n 

SÉANCE   DU    17    M.VI. 

Est  offert  :  Contributions  à  l' élude  de  la  chirurgie.  La  méthode  antiseptique 
chez  les  anciens,  par  M.  A.  Anagnostakis  (Athènes,  1889,  in-4°). 

Le  Président  présente,  de  la  part  de  notre  confrère  le  général  Faidherbe, 
un  ouvrage  intitulé  :  Le  Sénégal,  la  France  dans  l' Afrique  occidentale 
(Paris,  1889.  in-8"). 

rDans  cet  important  travail,  l'auteur  traite  des  deux  grandes  questions 
h  l'ordre  du  jour  :  la  jonction  du  Niger  à  la  partie  navigable  du  Sénégal 
et  l'émancipaliou  de  la  race  nègre.  Il  ap[)orte  dans  l'examen  de  ces  ques- 
tions une  connaissance  approfondie  du  pays  dont  il  a  été  longtemps  le 
gouverneur  et  un  vif  sentiment  des  intérêts  véritables  de  la  France  dans 
les  régions  occidentales  de  l'AIVique.  v 

Le  Secrktauie  perpétuel  présente,  de  la  part  de  M.  Léon  Aucoc, 
membre  de  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques,  l'ouvrage  qu'il 
vient  de  publier  sous  ce  litre  :  L'Institut  de  France  (Paris,  1889,  in-8°). 

M,  ScHEFER  fait  hommage  h  l'Académie  de  l'ouvrage  que  vient  de  faire 
paraître  M.  G.  Bapst,  sous  le  titre  d'Histoire  des  joijau.r  de  la  couronne  de 
France  (Paris,  1889,  iii-8'). 

f  Ce  volume  renferme  l'histoire  des  pierreries  et  des  bijoux  précieux 


—  216  — 

conserves  dans  le  tre'sor  de  la  couronne,  depuis  sa  création  par  Fran- 
çois 1",  en  i53o,  jusqu'à  nos  jours. 

ffDans  le  cours  de  la  seconde  moitié  du  xvi'  siècle,  pendant  les  guerres 
de  religion ,  au  moment  de  l'avènement  de  Henri  111  au  trône  de  Pologne, 
les  joyaux  de  la  couronne  ont  servi  de  gage  pour  les  emprunts  que  le 
délabi'ement  des  finances  forçait  à  contracter  à  Venise,  à  Florence  et  à 
Ferrare.  Lem*  valeur  a  permis  de  recueillir  la  somme  de  six  millions  de 
livres  exigée  par  le  comte  Palatin  Jean-Casimir  pour  l'évacuation  du 
territoij-e  irançais.  La  période  qui  s'étend  depuis  le  commencement  du 
xvif  siècle  jusqu'au  dernier  quart  du  xvin"  siècle  n'est  marquée  que  par 
les  acquisitions  faites  par  les  souverains  qui  se  sont  succédé  sur  le  trône. 
Les  ordonnances  et  les  inventaires  dressés  à  difféi^entes  époques  figurent 
dans  ce  volume,  quelques-uns  pour  la  première  fois,  et  ils  ajoutent  un 
réel  intérêt  au  récit  de  M.  Bapst.  ■« 

SÉANCE    DU    9/1    MAI. 

M.  Alfred  Maury  offre,  de  la  part  de  l'auteur,  une  notice  intitulée  : 
Les  cryptes  de  Jouarre ,  par  M.  G.  Rethoré,  de  la  Société  d'archéologie 
lie  Seine-et-Marne  (Paris,  1889,  in-S"). 

crLes  cryptes  de  Jouarre,  qui  étaient  une  annexe  de  la  célèbre  abbaye 
de  Notre-Dame,  existant  jadis  dans  ce  bourg  de  la  Brie,  ont  attiré  de 
bonne  heure  l'attention  et  les  recherches  des  historiens  et  des  antiquaires. 
Frappé  de  leur  importance  archéologique,  le  Gouvernement  a  fait  classer 
ces  cj-yptes  au  nombre  des  monuments  historiques  de  notre  pays,  à  la 
conservation  et  à  l'entretien  desquels  il  pourvoit.  Elles  ont  été,  à  plusieurs 
reprises,  l'objet  de  l'estaurations,  en  i8^3,  en  18O9  et  en  188/1.  Ces 
travaux  amenèrent  des  fouilles  dont  les  résultats  ont  été  intéressants,  et 
l'examen  auquel  ont  donné  lieu,  à  différentes  dates,  ces  sortes  d'hypogées 
permet  d'écrire  aujourd'hui,  avec  plus  de  précision  qu'on  ne  le  faisait 
autrefois,  leur  histoire  et  de  suivre  leurs  transformations. 

ff Cette  histoire,  M.  G.  Relhoré,  de  la  Société  d'archéolop,ie  de  Seine- 
et-Marne,  l'a  entreprise  dans  la  notice  ici  présentée.  En  résumant  et  en 
condensant  ce  qui  avait  été  écrit  avant  lui ,  en  vous  entretenant  des  fouilles 
opérées  par  M.  l'abbé  Thiercelin  et  auxquelles  il  a  pris  part,  il  émet  ses 
vues  personnelles,  qui  ne  sont  pas  toujours  d'accord  avec  celles  de  ses 
devanciers.  Malheureusement  la  ])énurie  de  témoignages  anciens  et  de 
docuujcnts  d'une  époque  reculée  relatifs  aux  cryptes  de  Jouane  laisse 
régner  beaucoup  d'obscurités  et  d'incertitudes  sur  ce  qui  les  coiicerne,  et 
M.  Rethoré  a  dû  souvent  se  contenter  d'hypothèses. 


—  '211  — 

ff Après  avoir  décrit  IV'laL  actuel  de  cos  curieux  monuments,  l'auteur 
(iludie  sc^parénit-nl  chacune  des  deux  cryptes,  la  crypte  Saint-Paul  et  la 
crypte  Saiut-Éhrégisile.  On  sail  que  le  monastère  de  Jouarre  l'ut  fondé  au 
milieu  du  vn°  siècle  (63o-63/i)  par  Adon,  trésorier  du  roi  Dag-obert  I", 
qui  en  devint  abbé.  L'église  primitive  de  ce  monastère,  placée  sous  le 
vocable  de  saint  Pierre  et  de  saint  Paul,  a  disparu  depuis  des  siècles, 
mais  les  iouilles  exécutées  en  1870  en  ont  fait  retrouver  remplacement 
et  ont  permis  d'en  déterminer  l'étendue.  Le  sanctuaire  se  trouvait  situé 
au-dessus  de  la  crypte  Saint-Paul,  telle  qu'elle  s'offre  actuellement.  Les 
bâtiments  qu'habitaient  dans  le  principe  les  religieux  (l'abbaye  de  Jouarre 
comprenait  alors  deux  communautés,  l'une  d'hommes  et  l'autre  de  femmes) 
ont  été  reconnus  comme  ayant  existé  là  oii  fut  édifiée  plus  tard,  vers  le 
milieu  du  ix'  siècle,  l'église  de  l'abbaye  royale  Notre-Dame  de  Jouarre; 
c'est  à  l'époque  de  ces  bâtiments  que  remonte,  selon  toute  vraisemblance, 
la  plus  ancienne  desdeux  cryptes,  celle  de  Saint-Paul.  Quant  à  la  crypte  de 
Saint-Ébrégisile,  M.  Rethoré  combat  l'opinion  soutenue  par  M.  d'Espinay  et 
d'après  laquellecetlegrotte  sépulcrale  n'aurait  été  tout  d'abord  qu'une  simple 
addition  à  la  crypte  voisine,  destinée  à  recevoir  le  cercueil  de  saint  Ébrégi- 
sile,  évéque  de  Meaux ,  et  il  ne  fait  pas  remonter  plus  haut  que  l'année  Sho 
ou  85o  la  fondation  de  la  seconde  crypte,  qui  serait  dès  lors  contempo- 
raine de  la  construction  de  l'église  de  l'abbaye  royale  de  Notre-Dame. 

(tTohs  les  détails  que  M.  Rethoré  donne  touchant  l'histoire  des  deux 
cryptes  et  les  indications  archéologiques  qui  les  accompagnent  sont 
dignes  de  fixer  l'attention  des  amis  de  nos  antiquités  nationales.  Des 
planches  aident  à  suivre  les  descriptions  et  la  discussion  des  faits 
examinés.  Elles  ont  été  exécutées  par  la  phototypie,  d'après  les  clichés  de 
M.  E.  Billion.  « 

M.  Alexandre  Bertrand  a  la  parole  pour  un  honmiage  : 

ffDans  une  précédente  séance,  j'ai  eu  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie, 
au  nom  de  l'auteur,  M.  L.  Baitzer,  les  douze  premières  livraisons  d'un 
important  ouvrage  sur  les  G/yphcs  des  rochers  du  Bohuslàn  [Suède). 

r-M.  Baitzer  envoie  aujourd'hui  la  treizième  livraison,  exécutée  avec  le 
même  soin  que  les  premières  (Gothcmbourg,  1888,  in-fol.). 

frJe  pense  que  l'Académie  m'autoi-isera  à  adresser  des  remerciements 
à  M.  Baitzer.  T) 

M.  l'abbé  DuciiESXE  a  la  parole  : 

ffj'ai  riionneur  d'offrir  à  l'Académie  un  volume  que  je  viens  de  faire 
paraître.  Il  porte  pour  litre  :  Les  origines  du  culte  chrétien;  pour  sous-litre 
et  vrai  litre  :  Elude  sur  la  liturgie  latine  avant  Charlemagne  (i*aris,  1889. 


—  218  — 

in-S").  J'ai  essayé  d'y  présenter  une  classificalion  des  manuscrits  litur- 
giques et  des  rites  en  usage  dans  les  pays  latins  avant  que,  sous  Charle- 
niagne,  les  deux  rites  romain  et  gallican  ne  se  fondissent  ensemble.  J'ai 
passé  en  revue,  non  seulement  la  liturgie  ordinaire,  celle  de  la  messe, 
mais  aussi  les  principales  cérémonies  du  culte  catholique,  l'initiation 
chrétienne  (baptême  et  confirmation),  l'ordination,  à  propos  de  laquelle 
il  a  été  traité  du  costume  liturgique,  la  dédicace  des  églises,  le 
mariage,  la  consécration  des  vierges,  la  réconciliation  des  pénitents, 
enfin  l'office  divin.  Ce  livre  pourra  servir  à  orienter  les  commençants 
dans  les  études  liturgiques,  et  à  renseigner  sur  les  détails  du  culte  les 
personnes  qui  ont  affaire  à  la  littérature  ecclésiastique  antérieure  au 
ix"  siècle." 

M.  Georges  Perrot  présente,  de  la  part  de  l'auteur,  M.  P.  Monceaux, 
La  légende  et  l'hisloire  en  Thessalie  (Paris,  1888,  in-8°,  extrait  de  la 
Revue  des  études  grecques),  et  les  Fastes  éponymiques  de  la  ligne  thessa- 
lienne  (Paris,  1889,  in-8"',  extrait  de  la  Reinie  archéologique). 

(tM.  Paul  Monceaux,  ancien  membre  de  l'Ecole  d'Athènes,  quia  visité 
la  Thessalie  pendant  son  séjour  en  Grèce,  n'a  pas  cessé  de  s'occuper  de 
l'histoire  de  ce  pays,  à  laquelle  il  vient  de  consacrer  deux  intéressantes 
études. 

ffDans  l'une  d'elles,  il  étudie  les  légendes  thessaliennes  et  en  fait  la  cri- 
tique et  le  départ  avec  beaucoup  de  tact  et  de  pénétration;  il  constate 
qu'elles  se  répartissent  en  trois  groupes  bien  distincts  :  le  cycle  des 
i'élages,  les  cycles  des  quatre  grandes  tribus  helléniques,  enfin  le  cycle 
des  Thessaliotes.  L'histoire  du  pays  et  l'étude  de  ses  institutions  conduisent 
aussi  à  distinguer  dans  la  Thessalie  de  l'époque  classique  trois  races,  trois 
classes  d'hommes  devant  la  loi.  Chacune  de  ces  races ,  et  dans  le  groupe 
hellénique  chaque  tribu ,  a  dans  ses  chants  héroïques  raconté  ses  ambitions 
et  ses  revers,  son  épouvante,  ses  victoires  ou  son  exil.  Ainsi  se  constitue 
le  trésor  de  la  mythologie  thessalienne,  dont  les  Hellènes  ont  emporté 
une  partie  dans  leurs  migrations  et  où  depuis  trois  mille  ans  ont  puisé 
tant  de  poètes  et  d'artistes. 

ffDans  le  second  de  ces  essais,  M.  Monceaux  se  place  sur  le  terrain  de 
l'histoire  proprement  dite  et  de  la  chronologie.  A  l'aide  des  textes  des 
auteurs,  des  inscriptions  et  des  monnaies,  il  reconstitue  les  fastes  épony- 
miques de  la  ligue  thessalienne,  depuis  les  rayai.,  magistrats  fédéraux 
à  vie,  qui  en  sont  les  chefs  entre  le  vu'  et  le  iv'  siècle  avant  notre  ère, 
jusqu'aux  stratèges,  qui  continuent  d'êlre  placés  à  sa  tête  sous  l'empire 
roinahi   et   dont   le  dernier  est   du    temps  d'Hadrien.   Ce  travail  peut 


parailre  aride  et  ne  se  prèle  |);is  ù  une  lecture  courante;  mais  il  est 
appelf^  à  rendre  de  {grands  services;!  tous  ceux  (pii  s'occuperont  désormais 
de  cette  province  et  il  lixe  bien  des  points  restds  jusqu'à  présent  obscurs 
et  douteux.  On  ne  peut  (jue  lui  savoir  grand  gré  d'avoir  piis  la  peine  de 
discuter  et  de  résoudre  nombre  de  problèmes  ditlicilos,  dont  aucun  n'a 
par  lui-même  une  très  grande  importance ,  mais  dont  les  solutions  réunies 
constituent  la  trame  des  annales  thessaliennes.  » 

M.  DK  Rozii:nE  offre  à  l'Académie,  au  nom  de  M.  Edouard  Bonvalol, 
un  travail  intitulé:  Les féaulés  en  Lorraine  (Paris,  1889,  in-8",  extrait 
de  la  Nouvelle  reme  historique  de  droit). 

fOn  donnait  en  Lorraine  le  nom  àe  féautcH  à  des  groupes  de  popu- 
lation, généralement  à  des  paroisses,  dont  les  habitants  constituaient  un 
tribunal  spécial  statuant  entre  voisins  sur  les  contestations  relatives  à  la 
propriété  foncière,  aux  limites  des  héritages  et  à  l'abornement  des 
chemins. 

"Dans  l'intéressante  brochure  que  j'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie, 
M.  Bon  valut,  ancien  conseiller  aux  cours  de  Golmar  et  de  Dijon,  a  cherché 
à  démêler  l'origine  et  l'organisation  de  ce  tribunal,  absolument  indé- 
pendant des  autres  juridictions  locales,  et  dont  le  véritable  caractère 
n'avait  pas  encore  été  nettement  défini. 

ff  A  la  suite  de  son  exposé,  M.  Bonvalot  a  donné  le  texte  de  trois  docu- 
ments des  xv%  \vi^  et  xvn°  siècles,  relatifs  aux  féaulés  d'un  certain  notidire 
de  localités  lorraines.?» 

SÉANCE    DU    3l    MAI. 

Sont  offerts  : 

Christophe  Colomb ,  Français,  Corse  et  Calvais.  Etude  historique  sur  la 
patrie  du  Grand  Amiral  de  l'Océan,  par  l'abbé  J.  Peretti  (Paris  et  Bastia, 

1888,  in-8''); 

Nederlandsch-chineesch  woordenboek,  etc.,  par  M.  G.  Schlegel,  t.  IV, 
2°  livraison  (Leyde,  1889,  gr.  in-8°); 

Ubcr  den  zweiten ,  grammntischen,  Pdrasîprakâça  des  Krishnadâsa ,  par 
M.  A.  Weber  (Berlin,  1889,  m-h" ,  extrait  des  Abhandlungen  de  l'Aca- 
démie royale). 

Le  Secrétaire  perpétuel  présente,  de  la  part  de  M.  K.  Revillout  : 

1°  Le  nouveau  papyrus  d'Hypéride  (Paris,  1889,  in-8",  extrait  de  la 
Hevue  des  études  grecques)  ; 

2°  La  morale  êgxjptiennr ,  leçon  professée  à  l'école  du  Louvre  (Paris, 

1889.  in-/i"). 


—  220  — 

M.  BoissiER  présente  à  l'Académie  trois  opuscules  de  M.  Gagnât,  qui 
concernent  tous  l'épigraphie  romaine. 

ffLe  premier  est  intitulé:  L'année  épigraphiqiie  (Paris,  1889,  in-8°). 
Depuis  quelque  temps  les  journaux  savants  se  sont  beaucoup  multipliés 
et,  si  cette  abondance  est  une  preuve  d'activité  scientifique,  elle  présente 
aussi  quelques  inconvénients.  Ceux  qui  veulent  être  informés  des  décou- 
vertes qui  se  font  dans  les  diverses  contrées  ont  besoin  de  lectures  plus 
étendues  et  il  leur  est  plus  difficile  de  se  tenir  au  courant.  M.  Gagnât 
s'est  donné  la  tâche  de  réunir  ce  qui  païaît  de  plus  important  sur  l'épi- 
grapliie  latine  dans  les  recueils  qui  se  publient  partout.  Il  rend  ainsi  un 
très  grand  service  à  tous  les  savants,  à  qui  il  évite  des  recheiches  pénibles. 

rfLes  deux  autres  mémoires  de  M.  Gagnât  traitent,  l'un,  Le  camp  el  le 
pracloriiim  de  la  IH  légion  Aiigusta  à  Lambhe  (Paris,  1889,  in-S",  ex- 
trait de  la  Revue  archéologique)^  des  ruines  de  Lambèse,  qui  viennent 
d'être  l'objet  de  fouilles  importantes;  l'autre.  Sur  les  manuels  profes- 
sionnels des  graveurs  d'inscriptions  romaines  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait 
de  la  Revue  de  philologie)^  de  ces  manuels  où  puisaient  les  graveurs 
d'inscriptions,  pour  y  trouver  des  formules  toutes  faites.  M.  Gagnât 
montre,  surtout  à  l'aide  fies  inscriptions  de  l'Afrique,  qu'ils  s'en  ser- 
vaient un  peu  au  hasard  et  sans  beaucoup  de  discernement.  Dans  une 
épitaphe,  qu'il  a  trouvée  et  (pi'il  publie  pour  la  première  fois,  à  propos 
d'un  vieillard  qui  est  mort  à  quatre-vingt-deux  ans,  le  gi'aveur  a  copié 
des  vers  faits  pour  un  jeune  garçon,  et  dans  lesquels  on  déplore  qu'il  ait 
si  peu  vécu." 

M.  Menant  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ffj'ai  l'honneur  de  présentera  l'Académie  une  brochure  de  M.  de  Mély, 
intitulée:  Le  poisson  dans  les  pierres  gravées  (^Varis,  1889,  in-8°,  extrait 
de  la  Revue  archéologique). 

cf  L'auteur,  en  étudiant  les  symboles  ([u'on  trouve  sur  les  pierres  gravées 
de  l'antiquité,  s'est  arrêté  ))arliculièremeat  au  poisson  et  aux  légendes 
dans  lesquelles  il  ligure,  sans  se  préoccuper  du  caractère  religieux  qui 
lui  a  été  attribué  dans  tous  les  dogmes.  M.  de  Mély  a  relevé  les  dift'érentes 
espèces  de  poisson  mentionnées  dans  lesGyranides,  qui  nous  sont  connues 
par  la  traduction  de  lîivinus;  il  a  pu  signaler  ainsi,  et  présenter  dans  un 
ordre  alphabétique,  un  certain  nombre  de  poissons,  auxquels  sont  atta- 
chées des  propriétés  talismaniques ,  pour  la  guérison  des  maladies ,  lorsque 
leur  image  est  gravée  sur  une  pierre  précieuse  ou  sur  le  chaton  d'une 
bague. 

ff C'est  un  intéressant  travail,  dont  vous  avez,  du  reste,  déjà  entendu 


—  '2-2\   — 

la  lecture  (séance  du  9  mars  1888),  et  (|iii  a  été  publie  dans  la  Revue 
archèoloiriqne ,  en  1889  (t.  Xll,  3'  série). n 

M.  i)R  BoisLisi.E  l'ail  homniasp  à  l'Académie  d'un  volume  qu'il  vient 
de  publier,  pour  la  Socit'té  de  l'histoire  de  Paris ,  sur  La  place  des  Victoires 
et  la  place  de  Vendôme,  ainsi  que  sur  les  autres  monuments  élevf's  à  la 
gloire  de  Louis  XIV,  de  iG85  à  171 5  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait  des 
Mémoires  de  ladite  Société). 

Il  fait  liomma,o^e  aussi  d'une  brochure  de  Lettres  de  Saint-Simon  au 
cardinal  Guallcrio,  publiées  pour  la  Société  de  l'histoire  de  France, 
d'après  les  originaux  appartenant  à  M.  Alfred  Morrison,  de  Londres 
(Paris,  1889,  in-8'',  extrait  de  V Annuaire-Bulletin  de  cette  Société). 

M.  Paul  Meyeu  présente  à  l'Académii',  de  la  part  de  M.  F.  de  Mély, 
deux  opuscules  : 

(t]J\\n,  Le  cardinal  Etienne  de  Frt«czrt  (Paris,  1889,  in-/i°,  extrait  de 
la  Revue  de  l'art  chrétien),  a  été  lu  à  l'Académie  dans  sa  séance  du  8  fé- 
vrier dernier. 

rf L'autre.  La  table  d'or  de  don  Pedro  de  Castille  (Paris,  1889,  in-8°), 
a  pour  objet  de  déterminer  la  forme  et  le  caractère  d'une  table  d'or 
pouvant  se  plier  en  croix,  h  l'aide  de  charnières,  enrichie  de  pierres  pré- 
cieuses, au  nombre  desquelles  se  trouvait  une  escarboucle  lumineuse,  et 
ornée  de  dessins  représentant  les  douze  pairs.  La  description  de  ce  pré- 
cieux oltjot  nous  a  été  donnée  par  Cuvelierdans  son  poème  sur  Du  Gues- 
clin.  Selon  Ctivelier,  cette  table,  dont  la  trace  est  perdue,  aurait  été 
donnée  par  don  Pèdre  au  prince  de  Galles.  A  ce  proj)os,  M.  de  Mély  pré- 
sente d'intéressantes  recherches  sur  la  croyance,  si  répandue  pendant  le 
moyen  âge,  à  l'existence  de  pierres  ayant  par  elles-mêmes  un  pouvoir 
éclairant.» 

M.  Delisle  présente  : 

1°  Delà  part  de  M.  Brassart,  archiviste  de  la  ville  de  Douai,  les  Sou- 
venirs de  la  Flandre  wallonne,  -2°  série,  t.  VIII  (Douai,  1889,  in-8°). 

(tCest  la  continuation  d'un  recueil  qui  renferme  beaucoup  de  docu- 
ments et  de  notices  se  rapportant  à  l'histoire  du  nord  de  la  France.  Ce 
volume  est  en  grande  partie  rempli  par  des  actes  relatifs  à  la  famille  de 
Lalaing,  depuis  le  xn'  siècle. 

2°  De  la  part  de  M.  Ai-thur  de  la  Borderie,  l'un  de  nos  correspon- 
dants ,  une  Elude  bibliographique  sur  les  Chroniques  de  Bretagne  d'Alain 
Bouchart {i^i à~i 5ài)  [Rennes,  1889,  in-/i"]. 

cr Le  livre  d'Alain  Bouchart,qni  a  eu  cinq  éditions,  depuis  i5i^»  jus- 
qu'en ifi/ii,  i-eprésente  (idèlemeiil  filer  qu'on  se  faisait  des  annales 


—  222  — 

hreloniips  au  commencement  du  xvi°  siècle,  alors  que  la  crilique  la  plus 
ële'raentaire  n'avail  pas  essaye  d'en  dissiper  les  obscurités.  La  Société  des 
bibliophiles  bretons  a  re'solu  de  le  remettre  en  lumière,  et  le  président 
de  cette  société,  M.  de  la  Borderie,  a  profité  de  l'occasion  pour  étudier 
les  diflérences  que  présentent  les  diverses  éditions  des  Chroniques  de 
Bretagne.  La  comparaison  minutieuse  qu'il  en  a  faite  l'a  conduit  à  des 
résultats  assez  importants.  Il  n'y  a  en  réalité  que  deux  éditions  des  Chro- 
niques qu'on  puisse  attribuer  à  l'auteur  ou  à  ses  représentants  autorisés: 
celle  de  i5i/i  et  celle  de  i53i.  Les  autres  ne  sont  que  des  entreprises 
mercantiles,  que  des  sortes  de  contrefaçons;  il  s'y  trouve,  à  la  vérité ,  quel- 
ques additions,  mais  ce  n'est  pas  Alain  Bouchart  qui  les  a  rédigées.  L'édi- 
tion de  i5/n  se  réduit  même  à  un  rajeunissement  de  l'édition  de  i532  : 
le  libraire,  pour  écouler  la  lin  de  l'édition  de  i532,  a  fait  imprimer  un 
nouveau  titre  et  deux  cahiers  complémentaires  qui  furent  assez  maladroi- 
tement soudés  à  la  fin  du  volume. 

rr C'est  ainsi  que  M.  de  la  Borderie  a  rigoureusement  déterminé  la  va- 
leur historique  et  littéraire  de  chacune  des  éditions  de  l'œuvre  d'Alain 
Bouchart,  et  qu'il  a  expliqué  et  justifié  le  plan  adopté  parla  Société  des 
bibliophiles  bretons  pour  la  réimpression." 

SÉANCE  DU  -y  JUIN. 

Le  Secrétaire  perpétuel  dépose  sur  le  bureau  le  i"  fascicule  des  Comptes 
rendus  des  séances  de  l'Académie,  pendant  l'anné^  1889,  janvier-février 
(Paris,  1889,  iu-8"). 

Sont  offerts  : 

Histoire  cl  description  des  musées  de  la  ville  de  Besançon,  par  M.  Au- 
guste Castan,  correspondant  de  l'Institut  (Paris,  1889,  gr.  in-8'',  ex- 
trait de  V Inventaire  des  richesses  d'art  de  la  France); 

L'ancienne  école  de  peinture  et  de  sculpture  de  Besançon,  lyôS-ijgi. 
Histoire,  notices,  annales,  rédigées  et  publiées  par  le  même  (Besançon, 
1889,  in-8°,  extraits  des  Mémoires  de  la  Société  d'émulation  du  Doubs)  ; 

La  phusionomie  primitive  du  retable  de  fra  Bartolommeo  à  la  cathédrale 
de  Besançon,  par  le  même  (Besançon,  1889,  in-8°); 

Address  qf  John  Evans,  esq.,  etc. ,  président  of  the  Society  qf  antiquaries 
of  London,  délirer ed  at  iheir  annioersary  meeting,  April  3o ,  i8Sg 
(Londres,  1889,  in-8"); 

Charte  d'acensetnent  du  xin"  siècle  en  langue  d'oc ,  publiée  par  M.  Ed. 
Bondurand  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait  des  Mémoires  de  l'Académie  de 
Nîmes); 


—  2n  — 

Iloiiiniagc  en  lun/pte  d'oc  à  l'évèquc  dr  Memlc ,  iS-i->..  par  le  mt^ine 
(^  Paris,  1889,111-8°,  extrait  (le  la  inènie  publicalion); 

Mémoires  présentés  et  lus  à  l'Institut  K(>ijplien  ,  piihljt's  sous  les  auspices 
(le  S.  A.  MélK^niet  Tliewiik  paciia,  kliédive  d'I'^gyple.  I.  II,  1"  et 
â' partie  (le  Caire.  1889,  in-Zj"); 

llrralski  spomcnici  u  kninskoj  okolici  i:  ostale  suvremene  dalmntinske 
i:  dobe  nnrndne  hrvalske  dinastije ,  par  l'r.  Bulic,  I(AgTam,  1  888  ,  in-6"); 

Djcla  Pctra  Zoranica,  Anluna  Sasina,  Savkn  Gucelic'a ,  Bendevisevic'n 
(Agram,  1888,  in-8",  formant  le  (orne  XVI  des  Stari  pisci  lirvalski); 

Ljetopis  jii/joslrirenske  Aradeniijc  znanosti  i  innjcinnsti  (  \grani.  1888. 
in-8"). 

SKANCI-;   DU    1  fl    JMN. 

M.  Alfred  Maurv  otTre  à  rAoade'mie,  au  nom  de  M.  Alexandre  Bruel, 
sous-chel'  (le  seclion  aux  Archives  nationales,  le  tome  IV  de  l'ouvrage 
inlilulé  :  llecueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  CAuny  (Paris,  1888,  in-6"), 
lormt'  par  feu  Auguste  Bernard,  et  que  le  savant  archiviste  complète, 
revise  et  publie. 

ffCet  ouvrage  fait  partie  de  la  grande  Collection  de  documents  inédits 
sur  l'histoire  de  France,  que  nous  devons  au  Ministère  fie  rinstruclion 
pnhli([uc. 

-'Le  tome  IV,  ici  présente,  se  com|)ose d'une  suite  de  documents  allant 
de  lannée  1027  à  raimoe  1090.  Une  partie  dudit  volume  repond  donc 
au  temps  du  pontificat  de  Grégoire  VU,  et  Ton  y  trouvera  reproduites 
ou  analysées  plusieurs  lettres  et  huiles  de  ce  pape,  qui  avait  appartenu 
à  Tordre  de  Gluny  ot  e'iudié  dans  son  monastère  métropolitain,  à  l'illus- 
tration duquel  il  a  tant  conlrihué.  Les  pièces  que  nous  donne  M.  Bruel 
dans  le  tome  IV  sont  imprimées  avec  le  même  soin  et  la  même  intelli- 
gence pali'ographiquc  que  celles  des  voknnes  antérieurs.  Il  s'est  attaché 
;i  constituer  sévèrement  le  texte  et  a  souvent  corrigé  des  transcriptions 
fjui  avaient  été  déjà  publiées.  Des  notes  explicatives  sont  placées  au  bas 
des  pages.  Des  errata  et  des  additions  terminent  le  volume;  ils  se 
rapportent  aux  pièces  que  renferment  les  tomes  précédents. 

•'L  œuvre  de  M.  Bruel  a  droit  aux  encouragements  de  notre  Omipagnie, 
qui  avait  naguère  marqué  l'estime  qu'elle  a  pour  elle,  à  l'apparilifin  des 
premiers  volumes. 

•'Une  table  des  noms  de  personnes  et  de  lieux  ne  se  trouve  pas  dans 
ce  l(mie  IV.  parce  (pi'uiie  telle  table  doit  être  mise  à  la  (in  du  dernier 
volume  e(  endjrasser  tout  leusemble  de  la  |)ul)liciition. 

wii.  ai 


iatlivraiB   lâtiosiir. 


—  -m  — 

^L'intérêt  des  pièces  que  M.  Bruel  a  réunies,  sur  les  pas  de  feu 
M.  Auguste  Bernard,  nous  est  un  siir  garant  des  services  qu'une  sem- 
blable publication  fendra  à  l'histoire  de  la  France  au  moyen  âge,  parti- 
culièrement à  riiistoire  de  l'Eglise,  où  l'abbaye  de  Gluny  a,  pendant  des 
siècles,  occupe' une  place  considérable. « 

M.  Pavet  de  Courteille  présente  Le  traité  de  Catean-Cainhrésh ,  a  et 
3  avril  i55g ,  par  le  baron  Alphonse  de  Rnble  (Paris,  1889.  in-8°). 

ffDans  ce  volume,  fort  bien  écrit  et  rédigé  à  l'aide  des  documents  ori- 
ginaux les  plus  sérieux,  l'auteur  s  entrepris  de  prouver  que  le  traité  de 
Cateau-Gambrésis,  bien  loin  d'être  désavantageux  à  la  France,  comme 
on  l'a  cru  jusqu'ici,  avait  été  au  contraire  le  point  de  départ  de  son 
unité  et  d'une  cohésion  poUtique  que  les  plus  formidables  bouleversements 
n'ont  pu  ébranler.  On  y  trouve  en  outre  des  détails  très  piquants,  puisés 
aux  sources,  sur  Elisabeth  de  Valois,  seconde  femme  de  Philippe  II,  et 
sur  la  vie  de  cette  princesse  à  la  cour  d'Espagne,  n 

M.  Delisle  présente,  au  nom  de  M.  Ch.  de  Robillard  de  Beaurepaire, 
notre  correspondant,  le  tome  II  des  Cahiers  des  Etats  de  Normandie  sous 
le  règne  de  Henri  III.  Documents  relatifs  à  ces  assemblées,  1 58-2-1 588 
(Rouen,  1888,  in-8"). 

M.  Croiset  olïi'e  à  la  Compagnie  deux  opuscules  de  M.  Ch.-Ém. 
Ruelle  : 

1°  Le  chant  des  sept  voyelles  grecques ,  d'après  Démétvins  et  les papynis 
de  Leyde  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait  de  la  Eemie  des  études  grecques). 

ff Divers  papyrus  mentionnent  des  chants  composés  d'une  suite  de 
voyelles.  Démétrius  en  parle  aussi  dans  le  Traité  de  l'tAoculion  :  on  les 
exécutait  en  Egypte  en  l'honneur  des  dieux.  Un  papyrus  de  Leyde  donne 
des  échantillons  assez  nombreux  de  ces  chants ,  où  l'on  voit  les  sept 
voyelles  grecques  diversement  groupées.  M.  Ruelle  a  essayé  de  déterminer 
à  quelles  noies  musicales  elles  conespondaient.  Ce  problème  avait  déjà 
occupé  l'abbé  Barthélémy,  qui  avait  indiqué  en  partie  la  méthode  à 
suivre  pour  le  résoudre;  M.  Ruelle,  en  possession  de  documents  plus 
complets,  a  pu  l'étudier  à  son  tour  avec  plus  de  précision  et  arriver  à  des 
iésultats  qui  ont  déjà  reçu  en  partie  la  confirmation  de  l'exécution  musi- 
cale, et  qui  semblent  vrais.  Il  a  montré  dans  ce  travail  une  curiosité  pa- 
tiente et  ingénieuse,  r 

2°  Sur  un  quatrième  manmcrit  grec  exécuté  par  le  copiste  du  Platon  de 
Paris  n"  i8oj  (Paris,  1888,  in-8°,  extrait  de  la  même  Revue). 

ffCe  quatrième  (ou  plutôt  ce  cinquième)  manuscrit,  —  car  c'est  bien 
au  chiffre  cinq  qu'on  arrive.  —  serait,  d'après  M.  Ruelle,  le  Lauren- 


—  2L>r)  — 

tianus,  lAXX,  9.  Le  ropisle,  encore  méconnu,  à  qui  l'on  devrait  ces 
divers  mainiscrits,  aurait  v<^cu  au  x°  siècle,  ou  peut-être  au  ix*.  1 

M.  A.  DE  Barthéi.emv  fait  lioniniapjp  du  Congrès  bibliographique  inteima- 
tional  tenu  à  Paris,  du  3  au  7  avril  1888  (Paris,  1889,  in-8''). 

frLa  Société  bibliographique,  qui  a  commencé  il  y  a  près  d'un  demi- 
siècle,  a  conquis  une  place  considérable,  grâce  au  zèle  et  au  dévouement 
du  marquis  de  Beaucourl,  son  fondateur  et  son  président.  En  présence 
des  services  importants  que  la  bibliographie  peut  rendre  à  tous  les  tra- 
vailleurs, le  conseil  de  la  Société  a  tenté  de  réunir,  en  1878,  un  congrès 
international  dont  la  mission  était  de  passer  en  revue  le  mouvement  scien- 
tifique et  littéraire,  dans  le  monde  érudit,  pendant  les  dix  années  précé- 
dentes. Celte  tentative  eut  un  si  bon  résultat  que  Tan  dernier  la  Société 
convoqua  un  nouveau  congrès,  qui  réunit  un  nombre  encore  plus  consi- 
dérable d'adhérents.  Des  communications  fort  intéressantes,  des  rapports 
détaillés  ont  été  présentf's  sur  cette  nouvelle  période  décennale.  Les  tra- 
vaux sont  publiés  dans  un  volume  de  près  de  900  pages,  et  le  marquis 
de  Beaucourt  m'a  chargé  d'en  faire  hommage  à  l'Académie,  en  son  nom 
et  au  nom  de  la  Société  bibliographique. 

ffDans  ce  volume,  on  trouve  des  renseignements  précieux  sur  le  mou- 
vement scientifique  et  littéraire  en  général;  les  sciences,  l'économie  poli- 
tique y  tiennent  une  large  place;  je  n'ai  à  signaler  que  ce  qui  se  rattache 
plus  intimement  à  nos  études.  Je  citerai  particulièrement  les  pages  con- 
sacrées aux  recherches  géographiques,  aux  antiquités  chrétiennes,  aux 
sources  de  l'histoire  de  France,  aux  études  franques,  à  la  paléographie 
et  à  la  diplomatique.  Ces  comptes  rendus  ne  sont  pas  de  simples  énu- 
mérations;  rédigés  par  des  hommes  compétents,  ils  contiennent  des  ap- 
préciations sommaires,  mais  précises;  je  me  hâte  d'ajouter  que  ces  appré- 
ciations sont  faites  avec  une  mesure  qui  fait  honneur  à  l'impartialité  de 
la  Société  bibliographique,  qui  professe  le  culte  de  la  vérité  historique, 
en  même  temps  que  des  sentiments  orthodoxes  que  personne  n'ignore. 
A  l'occasion  de  ce  congrès,  nos  confrères  MM.  L.  Delisle  et  L.  Gautier 
ont  fait  aux  savants  étrangers  les  honneurs  de  la  Bibliothèque  nationale  et 
des  Archives.'' 

M.  Alexandre  Bertrand  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

fj'ai  l'honneur  de  présenter  à  l'Académie,  au  nom  du  directeur, 
M.  Charles  Normand,  le  n"  7  (t.  Il)  de  L'Ami  des  monuments  (Paris, 
1889,  in-S"). 

'•  Ce  numéro  contient ,  comme  les  précédents ,  plusieurs  notes  et  articles 
d'un  grand  intérêt.  Je  citerai  : 


—  2-26  — 

(fi°  La  restauration  des  sculptures ,  noie,  par  iiolie  savant  confrère 
M.  Félix  Ravaisson; 

<t2°  Le  château  de  Madaillan,  par  Benouville  et  Ch.  Tholin; 

«•3°  Le  château  de  Saint-Germain ,  par  Salomon  Reiuach; 

fth"  Néris  d'après  les  monuments ,  par  Albert  Lenoir. 

ft  Je  joins  à  ce  fascicule  un  certain  nombre  d'exemplaires  de  la  liste 
des  fondateurs  et  membres  du  comité  de  la  revue,  pour  être  distri- 
bués aux  membres  de  la  Compagnie  qui  s'intéressent  à  cette  œuvre 
utile,  n 

Est  offert  : 

Les  représentants  du  peuple  en  mission  et  la  justice  révolutionnaire  dans 
les  départements  en  l'an  u  [lygS-t'jgâ) ,  t.  III  :  Le  Sud-Est,  l'Est  et  la 
région  de  Paris,  par  M.  Henri  Wallon,  membre  de  l'Institut  (Paris, 
1889,  in-8°). 

SÉANCE  DU   2  1   JUIN. 

M. le  marquis  dHervey  de  Saint-Denys  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ffj'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  de  la  part  de  M.  G.  Appert, 
d'abord  une  Cai^te  du  Japon  de  l'époque  féodale,  pour  l'intelligence  des 
anciennes  relations  concernant  l'histoire  de  ce  pays,  et  ensuite  un  vo- 
lume intitulé  :  Ancien  Japon ,  par  G.  A|)pert,  professeur  à  la  faculté  de 
droit  de  Tokio,  avec  la  collaboration  de  M.  H.  Kinoshila,  bibHothécaire  en 
chef  de  l'université  impériale  du  Japon  (Tokio,  1888,  in-16),  ouvrage 
dans  lequel  se  trouvent  réunis,  sous  une  forme  concise  et  pratique, 
quantité  de  renseignements  importants,  pour  la  plupart  inconnus  en 
Europe  jusqu'à  ce  jour,  ou  tout  au  moins  qui  n'avaient  jamais  été  ras- 
semblés encore  et  présentés  d'une  aianière  méthodique. 

ff  Après  un  exposé  des  procédés  qu'emploient  les  Japonais  pour  écrire 
les  dates,  l'ouvrage  contient  la  liste  des  empereurs  du  Japon,  celle  des 
Shogoun,  et  celle  des  ères  japonaises,  ou  Nen-go.  L'ordre  alphabétique 
adopté  facilite  éminemment  les  recherches. 

"Dans  la  chronologie  qui  suit,  l'auteur  s'est  attaché  à  faire  ressortir, 
à  côté  des  faits  saillanis  des  annales  japonaises,  le  trait  dominant  de 
chaque  période. 

irLa  seconde  partie  du  travail  est  une  sorte  d'armorial  de  la  noblesse 
japonaise,  très  précieux  pour  reconnaître  la  source  de  beaucoup  d'objets 
d'art  et  de  haute  curiosité  oii  des  armoiries  sont  lîgurées.  Près  du  nom 
de  chaque  famille,  l'auteur  signale  le  rang  qu'elle  occupait,  ses  origines  , 
sa  résidence,  les  châteaux  et  les  richesses  (|u'elle  possédait. 


'■2-21  

fLa  troisième  partie  se  compose  principalement  d  un  dictionnaire 
consacré  aux  coutumes,  aux  institutions,  aux  choses  caractéristiques  de 
l'ancien  Japon  et  aux  biog^rapliies  de  ses  hommes  célèbres. 

ff  D'abondantes  indications  bibiiojjraphiques  renvoient  le  lecteur  aux 
études,  déjà  pubhées  et  plus  étendues,  qu'il  pourra  consulter,  s'il  veut 
ajjprofondir  quokpie  sujet. 

f  Ajoutons  qu'une  ])liice  spéciale  est  faite  à  l'art  japonais,  (jni  la 
mérite  bien.  L'auteur  donne  les  titres  des  ouvrages  illustrés  les  plus  re- 
marquables, ainsi  que  les  noms  des  peintres  célèbres  et  le  fac-similé  d'en- 
viron deux  cents  de  leurs  signatures  et  cachets. 

ffEn  somme,  ['Ancien  Japon  est  un  excellent  compendiumqui  sera  de 
la  plus  grande  utilité,  r^ 

.M.  llicRON  DE  ViLLEFOSSE  préscnlc  à  l'Académie  un  travail  de  M.  Wil- 
liam-N.  Groll",  intitulé  :  Les  deux  versions  démotiques  du  décvetde  Canope; 
textes,  étude  comparative,  traduction,  commentaires  historiques  et  philolo- 
giques (Paris,  1888,  gr.  in-8°,  thèse  soutenue  à  l'École  du  Louvre). 

rrLe  décret  de  Canope  fut  promulgué  en  l'an  9  d'Evergète  1"  (988), 
au  moment  de  la  plus  grande  puissance  des  Lagides.  Les  prêtres  réunis 
en  concile  à  (^anope.  après  avoir  rappelé  les  bienfaits  dont  le  roi  et  la 
reine  avaient  comblé  l'Egypte,  décrétèrent  de  nouveaux  honneurs  aux 
frdieux  Évergètesn.  On  décida  d'intercaler  un  jour  tous  les  quatre  ans 
dans  l'année  de  365  jours,  afin  de  niainlenii-  l'ordre  des  saisons  confor- 
mément au  ciel,  et  on  fit  placer  dans  les  temples  ce  décret,  rédigé  en 
langue  sacrée  (hiéroglyphes),  en  démotique  et  en  grec. 

rrlln  exemplaire  découvert  en  1866  contient  les  textes  grec  et  hiéro- 
glyphique; ils  occupent  la  face  principale  de  la  pierre.  La  version  en 
langue  vulgaire  qui  se  lit  sur  le  côté  semble  avoir  été  gravée  postérieu- 
rement, sans  doute  à  la  suite  d'une  réclamation  du  peuple.  Dans  un 
exemplaire  découvert  plus  réremnieut,  les  textes  grec  et  hiéroglyphique 
correspondent  très  exactement  aux  textes  analogues  de  l'exemplaire  trouvé 
en  1866,  ce  qui  parait  indiquer  que  ces  deux  textes  ont  été  promulgués 
dès  le  principe  par  les  prêtres  égyptiens.  Entre  les  textes  démotiques, 
au  contraire,  on  remarque  de  nombreuses  variantes,  au  point  de  vue 
paléographique  et  au  point  de  vue  linguistique.  La  construction  gram- 
maticale est  didérente,  plus  correcte  et  plus  complète  dans  le  nouvel 
exemplaire;  plusieurs  phrases  du  texte  grec  négligées  par  les  rédacteurs 
de  l'ancienne  version  s'y  trouvent  traduites. 

"Pour  faire  ressortir  ces  variantes,  M.  Groiïa  placé  les  deux  versions  dé- 
motiques, en  mot  à  mot.  l'une  à  côté  de  l'autre,  sur  deux  colonnes.  11  a 


—  t>l>8  — 

accompagné  son  travail  d'un  commentaire  où  les  variantes  des  textes  sont 
étudiées  :  cette  partie  autographiée  est  précédée  d'une  introduction  im- 
primée, dans  laquelle  les  circonstances  de  la  promulgation  du  décret 
sont  discutées  au  double  point  de  vue  de  l'histoire  et  de  la  langue.  Dans 
une  lettre-préface  écrite  h  l'auteur,  M.  Eug.  Revillout  apporte  aussi  de 
nouveaux  éclaircissements  sur  les  questions  étudiées  dans  cet  intéressant 
mémoire,  n 

M.  Héron  de  Villefosse  offre  ensuite  à  l'Académie,  de  la  part  de  l'au- 
teur, M.  R.  Mowat,  une  publication  intitulée  .:  Rapport  sur  les  papiers  et 
documents  épigraphiques  réunis  par  feu  Léon  Renier  en  vue  d'un  recueil  des 
inscriptions  romaines  de  la  Gftw/e  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait  du  Bulletin 
archéologique  du  Comité  des  travaux  historiques  et  scientifiques ,  année 
1888). 

(fLe  II  septembre  i885,  moins  de  trois  mois  après  la  mort  de  Léon 
Renier,  M.  Ernest  Desjardins  annonçait  à  l'Académie  que  l'État  avait  pris 
possession  des  papiers  du  déiunt  et  que  ces  papiers  avaient  été  déposés  à 
la  bibliothèque  des  Sociétés  savantes ,  près  la  bibliothèque  Mazarine.  Deux 
ans  plus  tard,  le  16  avril  1887,  le  Ministre  de  l'instruction  publique 
confiait  à  M.  R.  Mowat  le  soin  d'examiner  les  documents  relatifs  à  la 
Gaule  et  d'en  rédiger  l'inventaire.  Ces  documents  avaient  été  réunis  de- 
puis près  de  cinquante  ans  en  vue  d'un  Recueil  des  inscriptions  romaines 
de  notre  pays.  Personne  ne  pouvait  en  faire  ressortir  l'intérêt  avec  plus 
de  compétence  et  d'autorité  que  M.  R.  Mowat. 

ffSon  rapport  débute  par  un  exposé  très  clair  et  très  net  des  variations, 
hélas!  trop  nombreuses,  subies  par  le  projet  français  de  publication  otli- 
cielle  des  inscriptions  romaines  de  la  Gaule.  L'idée  première  de  ce  re- 
cueil appartient  incontestablement  h  Philippe  Le  Ras,  mais  d'autres  sa- 
vants finançais,  parmi  lesquels  il  faut  citer  Mérimée,  Letronne,  Egger  et 
L.  Renier,  prirent  une  part  très  active  à  ce  projet,  qui,  malheureusement, 
et  malgré  tant  defî'orls,  ne  devait  se  réaliser  qu'en  partie.  Grâce  à  notre 
savant  confrère  M.  Edmond  Le  Riant,  nous  possédons  au  moins  aujour- 
d'hui toute  la  série  des  inscriptions  chrétiennes  des  premiers  siècles,  dont 
la  publication  lui  avait  été  confiée  en  1  856. 

"Une  excellente  bibliographie  des  projets  de  recueils  généraux 
d'inscriptions  latines  précède  l'inventaire  sommaire  des  papiers  de  Léon 
Renier.  Il  y  a  lieu  de  distinguer  dans  ces  papiers,  d'une  part,  les  fiches 
épigraphiques,  schedœ,  qui  avec  quelques  notes  et  brouillons  de  lettres 
représentent  le  travail  personnel  du  maître,  d'autre  part,  les  documents 
qui  lui  ont  été  fournis  par  diverses  personnes,  tels  que  lettres,  mémoires. 


—  229  — 

noies,  dessins  autographes,  estampages,  enipreiutes  ou  frottis,  calques, 
phologiophies et  gravures.  Lîn  catalogue  très  complet  de  ces  divers  docu- 
ments a  été  dressé  par  M.  R.  Mowat.  Tout  ce  qui  est  relatif  à  des  pays 
autres  que  la  Gaule,  tels  que  l'Afrique.  lArménie,  la  Bilhynie,  la  Corse, 
la  Dalmatie,  TEgypte.  l'Espagne,  la  Grèce,  l'Italie,  la  Macédoine,  les  deux 
Mésies,  la  Syrie  et  la  Tlirace,  a  été  inventorié  dans  un  paragraphe  spécial. 

ffLa  sixième  division  a  pour  titre  :  Correspondance  inédile  de  Léon  Re- 
nier. On  y  remarque  quatre  dissertations  intéressantes  :  la  première  sur 
l'inscription  de  Sens  consacrée  à  C.  Amafius  Paternimis,  la  seconde 
sur  le  rétablissement  des  noms  de  Philippe  et  d'Olacille  marlolés  dans 
ime  inscription  de  P»onie,  la  troisième  sur  mie  inscription  du  musée  de 
Colmar,  la  quatrième  sur  un  cachet  d'oculiste.  Un  choix  d'inscriptions 
inédites  ou  imparfaitement  publiées,  retrouvées  par  M.  Mowat  au  mi- 
lieu des  papiers  de  L.  Renier,  tennine  ce  substantiel  rapport. 

trDès  h  présent,  tous  les  documents  cités  sont  à  la  disposition  des  épi- 
graphistes.  En  les  classant  avec  un  soin  parfait,  en  signalant  leur  valeur 
et  leur  intérêt  avec  une  judicieuse  critique,  M.  R.  Mowat  a  rendu  un 
nouveau  service  aux  études  d'épigraphie  latine  et  à  la  cause  de  nos  anti- 
quités nationales,  qu'il  sert  depuis  longtemps  avec  un  succès  qui  ne  s'est 
jamais  démenti.  55 

M.  Renan  présente,  de  la  part  de  M.  Patinot,  directeur  du  Journal  des 
Débats,  un  exemplaire  sur  papier  de  choix,  réservé  expressément  à  la 
Compagnie,  du  volume  publié  par  le  journal  à  propos  du  centenaire  de 
sa  fondation  :  Le  livre  du  centenaire  du  Journal  des  Débats  (Paris,  1889, 
gr.  in-8°). 

ff L'Académie,  ajoute  M.  Renan  ,  trouvera  dans  ce  beau  livre  le  souvenir 
de  plusieiu's  membres  qui  lui  furent  chers:  MM.  Laboulaye,  Boissonade 
et  beaucoup  d'autres.  '■ 

M.  DK  RoziÈRE  offre,  au  nom  de  M.  Tamizey  de  Larroque,  notre  cor- 
respondant, le  fascicule  xvi  des  Correspondants  de  Peiresc  :  François 
Luillier,  Lettres  inédites  écrites  de  Paris  à  Peiresc,  i63o-i636  (Paris, 
1889,  in-8^). 

SÉANCE  DU    28   JUIN. 

Sont  offerts  : 

TIteodori  Prodromi  Commenturios  in  carmina  sacra  melodorum  Cosmœ 
Hierosohjinitani  et  Joannis  Damasceni  adjidem  codd.  inss.  priinum  edidit  et 
varietatc  lectionis  instruxit  in  quinffnagesimum  sncerdotii  natalem  Leo- 
nis  XII f  Pont.  Majc.  H.  M.  Stevenson  (Rome,  1888,  \n-li"); 


—  230  — 

Codices  mcmusciipli  grœci  reginœ  Sueconun  et  PU  PP.  Il  hibliothecœ 
Vaiicanœ,  par  H.  Stevenson  senior  (Rome,  1888,  in-/»°); 

H  Neà  A.iadyJKy].  Novum  testamentum  e  codice  Vaticano  lùoq  nativi 
grœci  primo  omnium  pJiototijpice  reprœsentatum ,  auspice  Leone  XIII  Pont. 
Max.,  curante  Joseplio  Cotza-Luci ,  etc.  (Rome,  1889,  in-l'ol.j; 

Tlie  old  new  world,  an  account  ofthe  explorations  of  the  Hemenway  south 
western  archœological  expédition,  etc.,  par  M.  Sylvester  Baxter  (Salem 
[Mass.],  1888,  in-8°); 

Essai  comparatif  sur  l'origine  et  l'histoire  des  rythmes,  par  M.  Maximi- 
lien  Kawczynski  (Paris,  1889,  in-8°); 

Poésies  languedociennes  de  Louis -Diogène  Guiraldenc  {i8âo-i86o), 
publiées,  etc.,  par  A.  Roque-Ferrier  (Montpellier,  1888,  in-S"). 

M.Henri  Weil  offre  à  la  Qom\)Cign\e  Philonis  Alexandrini  lihellus  de 
opificio  mundi,  e'dité  d'après  les  nieilleurs  manuscrits  par  M.  Ijëopold  Gohn 
(Breslau,  1889,  in-8''). 

rrCet  ouvrage  comprend  une  introduction,  des  rapprochements  entre 
des  passages  parallèles  de  Philon  et  d  autres  auteurs  grecs,  qui  jettent  du 
jour  sur  le  texte  publié.  C'est  un  travail  excellent,  qiii  à  e'té  couronné  par 
l'Académie  de  Berlin,  et  qui  s'annonce  comme  un  spécimen  d'une  édition 
complète  des  œuvres  de  Pbilon.» 

M.  Héron  de  Villefosse  présente  à  l'Académie,  de  la  part  de  l'auteur, 
M.  F.  Thiollier,  un  ouvrage  intitulé  :  Le  Forez,  pittoresque  et  monumental , 
histoire  et  description  du  département  de  la  Loire  et  de  ses  confins ,  ouvrage 
illustré  de  g8o  gravures  ou  eaux-fortes ,  publié  sous  les  auspices  de  la 
Diana,  société  historique  et  archéologique  du  Foret  (Lyon,  1889,  a  vol. 
in-fol.). 

rrCes  deux  volumes  sont  le  fruit  d'un  labeur  de  vingt  années,  pendant 
lesquelles  lauteur  n'a  épargné  ni  son  temps  ni  sa  peine;  il  a  réussi  à 
faire  une  œuvre  absolument  originale  et  intéressante.  Le  texte  est  établi 
sur  un  plan  simple  et  commode,  la  division  par  cantons  et  par  com- 
munes. Chaque  page  contient  trois  ou  quatre  vignettes  qui  placent  im- 
médiatement sous  les  yeux  du  lecteur  le  monumeni  ou  l'objet  décrit.  Ces 
vignettes  sont  d'une  exactitude  absolue,  ayant  toujours  été  exécutées, 
quand  il  s'agit  d'un  monument  encore  existant,  d'après  une  photo- 
graphie. 

ff  L'auteur  de  cet  ouvrage  a  fait  faire  un  grand  pas  à  l'archéologie  et  à 
l'histoire  du  Forez  en  condensant,  d'une  part,  tout  ce  qui,  depuis  Théo- 
dore Ogier,  a  été  publié  isolément  sur  quelques  localités  déterminées, 
et,  d'autre  part,  en  piovoquant  et  eu  conduisant  avec  méthode  un  im- 


—  L>;n  — 

iiiense  travail  île  nnisioii  liisloriiinc  el  iiioimiiieiilalc  poiii'  cliacjut'  com- 
niuiic  (In  (léparteinoiit.  travail  (|iii  Ta  amené  à  inetlie  en  lumière  une 
foule  (le  faits  ignorés  ou  coniplètenii'iit  nouveaux.  La  préparation  d'une 
œuvre  aussi  considérable  a  été  longue  et  laborieuse,  soit  au  point  de  vue 
de  la  rechercbe  des  sources  imprimées  ou  manuscrites,  soit  h  celui  des 
pérégrinations  el  des  constatations  eu  pleine  campagne,  chaque  commune 
ayant  été  visitée  plusieurs  fois. 

f-Un  autre  mérite  de  fouviage  est  d'être  tout  à  fait  forézien,  aussi 
bien  par  l'esprit  qui  l'a  conçu  que  par  les  collaborateurs,  artistes  ou  au- 
teurs, qui  sont  presque  tous  du  Forez.  Un  des  principaux  est  M.  Vincent 
Durand,  h  qui  le  livre  est  dédié;  c'est  le  savant  et  infatigable  secrétaire 
de  la  Diana. 

ff.le  ne  veux  point  parler  du  désintéressement  de  M.  F.  Tbiollier,  qui 
a  publié  ces  deux  volumes  à  ses  frais  et  qui  a  ainsi  l'honneur  d'avoir 
doté  sa  province  d'un  monument  impérissable.  .Mais  je  tiens  à  dire  que 
ce  Mécène  est  doublé  d'un  artiste  consciencieux  et  habile,  dont  le  mérite 
est  facile  à  constater.  Il  suffit  de  parcourir  son  ouvrage  pour  être  édifié. 
M.  F.  Tbiollier  a  l'amour  de  sa  province:  il  Ta  visitée  en  tous  sens;  il  en 
a  contemplé  et  reproduit  tous  les  aspects.  Il  a  pris  le  soin  de  rechercher 
et  il  est  parvenu  à  retrouver,  quelquefois  très  loin  de  leur  pays  natal, 
bien  des  œuvres  exécutées  en  Forez  et  qui  sont  aujourd'hui  l'ornement 
des  galeries  publiques  ou  des  collections  privées.  Monuments  et  paysages 
se  sont  accumulés  dans  ses  porlefeuilles;  il  a  su  mettre  en  œuvre  tant 
de  documents  recueillis  avec  une  longue  patience.  Le  second  volume  con- 
tient à  lui  seul  i55  planches,  la  plupart  reproduites  pitr  le  procédé  de 
l'héliogravure;  on  ne  peut  rien  souhaiter  de  plus  exact  et  de  plus  sûr.  Si 
chacune  de  nos  anciennes  provinces  possédait  un  pareil  recueil,  l'inven- 
taire des  richesses  d'art  de  la  France  serait  complèlemenl  terminé  et  de 
la  façon  la  plus  utile  el  la  plus  pratique.  i 

M.  Gaston  Paris  fait  hommage  d'ini  volume  qui  porte  pour  titre  :  La 
légende  syriaque  de  saint  Alexis ,  l'Iiomme  de  Dieu,  par  Arthur  Amiaud 
(Paris,  1889,  in-8°,  79"  fascicule  de  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  hautes 
éttides). 

ffCette  belle  publication,  à  la  suite  d'un  événement  aussi  funeste 
qu'imprévu ,  n'est  oiïerle  à  l'Académie  qu'après  la  mort  de  son  auteur,  bien 
qu'elle  eùl  paru  quelipies  jours  auparavant.  Des  juges  compétents  garan- 
tissent l'excellence  de  l'édition  du  texte  syriaque,  faite  d'après  les  mé- 
thodes critiques  les  plus  rigoureuses  et  avec  la  connaissance  la  plus  fine 
et  la  plus  exacte   de  la  langue,  .le  ne  puis  parler  que  de  l'introduction 


—  ni  — 

liisloriquft,  où  l'auleur  recherche  les  origines  et  ëludie  le  développement 
de  la  légende  de  saint  Alexis  jusqu'au  moment  où  elle  fut  introduite  à 
Rome,  et  de  là  dans  tout  l'Occident ,  à  la  fin  du  \°  siècle.  J'ai  moi-même 
esquissé  autrefois  ce  curieux  chapitre  d'histoire  littéraire  et  hagiogra- 
phique, dont  M.  l'ahbé  Duchesne,  dans  un  mémoire  malheureusement 
resté  inédit,  a  éclairci  les  dernières  phases.  M.  Amiaud  complète  et  rec- 
tifie sur  beaucoup  de  points  ce  que  j'avais  dit,  et  son  travail  peut  être 
considéré  comme  à  peu  près  définitif.  Cet  ouvrage  donne  quelque  idée 
de  la  perte  qu'ont  faite  les  études  syriaques  par  la  mort  du  jeune  maître; 
d'autres  écrits ,  trop  peu  nombreux ,  permettent  de  mesurer  ce  qu'ont 
perdu  en  lui  les  études  assyriologiqiies ,  auxquelles  il  s'était  adonné  avec 
ardeur  dans  les  derniers  temps  de  sa  vie,  et  qui  sont  frappées  par  sa 
mort  aussi  cruellement  qu'elles  l'ont  été  par  celle  de  Stanislas  Guyard, 
son  prédécesseur  à  l'École  des  haules  études. - 

Sont  encore  offerts  : 

Annales  du  commerce  extérieur,  année  1889  ,  5°  et  6'  fascicules  (Paris, 
i889,gr.  in-S"); 

Annuaire  de  l'Université  catholifjue  de  Louvain  ,  1889  ,  53'  année  (Lou- 
vain,  in- 16)  ; 

Archiv  fur  ôsterreichiscke  Geschichte,  vol.  LXXII,  1"  partie,  et 
vol.  LXXIII,  1"  et  2'  parties  (Vienne,  1888,  in-8°); 

Atti  délia  Heale  Accademia  dei  Lincei ,  286*^  année,  h'  série,  Rendiconti, 
vol.  V,  fasc.  3-5  (Rome,  1889,  in-/i°); 

Biblioteca  nationale  centrale  di  Firenze  Bollettino  délie  pubblicazioni 
italiane  ricevute per  diritto  di  stimpa,  n"  8o-83  (Florence,  1  889,  in-8°); 

Biblioteca  nationale  centrale  Vittorio  Emanuele  di  Roma.  Bollettino  délie 
opère  moderne  straniere  acquistate  dalle  pubbliche  biblioteche  governative 
del  regno  d'Italia ,  vol.  IV,  n'  a  (Rome,  1889,  in-8°); 

Bibliothèque  de  l'École  des  chartes ,  t.  L,  1"  et  2'  livraisons  (Paris, 
1889,  in-8"); 

Bulletin  de  correspondance  hellénique,  1  3'  année,  avril  1889  (Athènes 
et  Paris,  in-8"); 

Bulletin  mensuel  de  la  Société  centrale  des  architectes  français ,  6'  série, 
vol.  VI,  n"  1-3  (Paris,  1889,  in-8°); 

Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité ,  par  MM.  Georges  Perrot,  membre 
de  l'Institut,  et  Charles  Chipiez,  t.  V,  livr.iisoiis  9 35-2 /i 3  (Paris,  1889, 
gr.  in-8"); 

Journal  asiatique ,  8' série,  t.  XIII,  n"  a  (Paris,  1889,  in-8°); 


—  233  — 

Jounuil  of  proceedi)ig.s  ofthe  Royal  Imtilule  qf  Brilish  architecls ,  vol.  V 
(le  la  nouvelle  sërie,   ii°'  i/j-iO  ( Londres,  1889,  in-A°); 

Procccdi/iffs  of  the  Societi/  qf  Bihlical  avchœology,  vol.  XI,  n"  6,  7 
(Londres,  1889,  in-B"); 

Publications  de  la  section  historique  de  l'înstilut  royal  grand-ducal  de 
Luxembourg ,  vol.  XL  (Luxembourg,  188g,  in-S"); 

Revue  africaine ,  journal  des  travaux  de  la  Société  historique  algérienne, 
39°annf^e.  n"'  190,  191  (Alger,  1888,  in-8"); 

Revue  archéologique ,  3"  série,  t.  XII  (Paris,  1889,  in-8°); 

Revue  de  Coinminges ,  t.  IV,  1888,  li'  trimestre  (Saint-Gaudens,  1888, 
i"-8°); 

Revue  des  Pyrénées  et  de  la  France  méridionale ,  organe  de  l'Association 
pyrénéenne,  publication  trimestrielle  dirige'e  par  Julien  Sacaze  et  le 
D'  F.  Garrigou,  1. 1,  annëe  1889,  1"  trimestre  (Toulouse,  in-8°); 

Revue  géographique  internationale ,  i!x'  année,  n"  16a  (Paris,  1889, 
in-li"); 

Revue  numismatique,  3"  série,  t.  VII,  9"  trimestre  de  188 y  (Paris, 
in-8°); 

Sitzungsberichte  der  kaiserlichen  Akademie  der  Wissenschaflen ,  philoso- 
phisch-historische  Classe,  vol.  CXVI  (Vienne.  1888,  in-8"); 

Sitzungsberichte  der  philosophisch-philologischen  und  historischen  Classe 
der  A.  B.  Akademie  der  Wissenschaften  tu  Mùnchen,  1889,  fascicule  1 
(Munich,  ia-S"); 

Société  de  géographie  commerciale  de  Bordeaux  :  Bulletin,  i:i' année, 
2°  série,  n"  12  (Bordeaux,  1889,  in-B"). 


I 


4 


COMPTES    RENDUS   DES  SÉANCES 


DE 


L'ACADEMIE    DES    INSCRIPTIONS 

ET  BELLES-LETTRES 
PENDANT  L'ANNÉE  1889. 

COMPTKS  RENDUS  DES  SÉANCES. 
JUILLET-AOÛT. 

PRÉSIDENCE   DE  M.  BARBIER  DE  MEYNARD. 


SK.VNGE   DU    f)   JLILLET. 

M.  le  Ministre  de  l'inslriiclion  publique  nulorise  rAcade'mic  à 
pre'lever  sur  ses  fonds  disponil)les  une  somme  de  5oo  francs, 
pour  r<'dtribution  d'une  quatrième  me'daille  dans  \g  concours  des 
Antiquités  de  la  France  de  cotte  année. 

Le  Secrétaire  peri-étuel  annonce  que  dou\  cartes  d'invitalion 
ont  été  adressées  à  l'Académie  pour  l'inauguration  de  la  statue 
de  M.  Paul  Bert,qui  doit  avoir  lieu  à  Auxerrc. 

Le  Président  du  Comité  formé  pour  élever  une  statue  à  Lazare 
Carnot,sur  une  des  places  du  village  de  Carnot  (Algérie),  adresse 
à  l'Académie  une  invitation  à  souscrire.  La  liste  destinée  à  re- 
cueillir les  souscriptions  sera  déposée  an  secrétariat  de  l'Institut. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  le  Président  annonce  (|ue 
l'Académie  va  procéder  à  la  désignation  de  deux  candidats  pour 
la  chaire  de  langue  chinoise  vacante  à  l'Ecole  des  langues  orien- 
tales vivantes. 

XVII.  ,- 


i«rai«iRii    »«(i.>i(ir. 


—  236  — 

Pour  la  présentation  en  première  ligne,  M.  Deve'ria  obtient 
l'unanimité'  des  suffrages. 

Pour  la  présentation  en  seconde  ligne,  M.  Imbaull-Huart  ob- 
tient également  l'unanimité  des  suffrages. 

En  conséquence,  M.  Devéria  sera  présenté  en  première  ligne 
et  M.  Imbault-Huart  en  seconde  ligne. 

M.  Héron  de  Villefosse  fait  connaître,  ainsi  qu'il  suit,  les 
résultats  du  concours  des  Antiquités  de  la  France  pour  1889: 

ff  La  Commission  des  Antiquités  de  la  France  a  décidé  que  les 
médailles  et  mentions,  pour  le  concours  de  1889,  seront  attri- 
buées dans  l'ordre  suivant  : 

1''*' MÉDAILLE. —  M.  E.  Jarry,  La  vie  politique  de  Louis  de  France , 
duc  d'Orléans  [1 3 j 2-1  ûoj).  Paris  et  Orléans,  1889,  in-8°. 

2^  MÉDAILLE.  —  M.  Paul  Guériu,  Recueil  des  documents  concer- 
nant le  Poitou  contenus  dans  les  registres  de  la  Chancellerie  de  France, 
t.  IV  {i369-i3j6).  Poitiers,  1888,  in-8°. 

3*  MÉDAILLE.  —  M.  Clément  Pallu  de  Lessert,  Les  fastes  de  la 
Numidie  sous  la  domination  romaine.  Constantine  et  Paris,  1888, 

in-8''. 

U"  MÉDAILLE,  autorisée  pour  cette  année  par  une  décision  mi- 
nistérielle. —  MiM.  Camille  Favre  et  Léon  Lecestre,Le  Jouvencel, 
par  Jean  de  Bueil ,  suivi  du  commentaire  de  Guillaume  Tringant, 
publié  pour  la  Société  de  l'histoire  de  France.  Introduction  bio- 
graphique et  littéraire  par  Camille  Favre;  texte  établi  et  annoté 
par  Léon  Lecestre,  t.  I  et  II.  Paris,  1887-1888,  in-8°. 

i'"  MENTION.  —  M.  le  duc  de  la  Trémoille,  Archives  d'un  servi- 
teur de  Louis  XL  Documents  et  lettres  [iâ5i-iâ8i),  publiés  d'après  les 
originaux.  Nantes,  1888,  in-4°. 

2*  MENTION.  —  M.  Ch.  Morel,  Genève  et  la  colonie  de  Vienne. 
Elude  sur  une  organisation  municipale  à  l'époque  romaine.  Genève  et 
Paris,  1888,  in-8''. 

3*  MENTION.  —  MM.  les  docteurs  Bleicher  et  Faudel,  Maté- 
riaux pour  une  étude  préhistorique  de  VAlsace.  Colmar,  1878-1888, 
5  fascicules  in-8°. 

U^  MENTION.  —  M.  Prndhomme,  Histoire  de  Grenoble.  Grenoble, 
1888,  in-8°. 


—  -237  — 

5"  MKNTiON.  —  M.  Henri  Siciii,  Olivier  de  la  Mavchc,  hislorien, 
poète  et  diplumate  bourguignon.  Paris,  1888,  in-/i°. 

6°  MF.MiON.  —  M.  G.  d'Espinay,  La  coutume  de  Touraine  au 
Av'  siècle.  Tours,  1888,  in-8°. 

M.  BoissiER  lit  un  mémoire  sur  le  christianisme  do  Boèce. 

Il  examine  Topinion  des  savants  qui  ont  pense'  que  Boèce  était 
païen.  Celle  opinion  parait  peu  vraisemblable,  quand  on  sait 
de  quelle  famille  Boèce  était  issu,  son  union  intime  avec  Sym- 
maque,  dont  il  épousa  la  fille  et  qui  était  très  dévoué  au  chris- 
tianisme. Il  suffît,  du  reste,  pour  affirmer  qu'elle  est  fausse,  de 
savoir  que  les  traités  de  théologie  que  les  manuscrits  lui  attri- 
buent, et  dont  on  a  souvent  contesté  l'atli-ibution,  sont  bien  de 
lui.  C'est  ce  qu'a  mis  hors  de  doute  la  découverte  faite  par 
Holder  de  l'extrait  d'un  ouvrage  aujourd'hui  perdu  de  Cassio- 
dore,qui  attribue  ces  traités  à  Boèce.  Evidemment,  un  homme 
qui  avait  pris  la  plume  pour  défendre  le  christianisme  était 
chrétien. 

Mais  alors,  comment  peut-on  s'expliquer  qu'un  chrétien  soit 
l'auteur  de  la  Consolation  philosophique ,  qui  a  paru  être  un  ou- 
vrage païen?  Pour  l'expliquer,  i\I.  Boissier  commence  par  établir 
qu'il  n'est  pas  tout  à  fait  vrai  de  prétendre  que  la  Consolation  soit 
un  livre  païen.  Boèce  l'a  tirée  sans  doute  des  ouvrages  des  anciens 
philosophes  de  la  Grèce  et  de  Rome,  mais  il  n'a  pris  chez  eux 
que  ce  qui  était  conforme  à  la  doctrine  de  l'Eglise,  en  sorte  que 
l'ouvrage  est  païen  et  chrétien  à  la  fois.  M.  Boissier  fait  voir 
ensuite  que  plusieurs  Pères  de  l'Eglise  ont  fait  comme  Boèce, 
qu'ils  ont  traité  les  matières  philosophiques,  sans  y  faire  inter- 
venir les  Ecritures,  et  avec  les  seuls  arguments  que  fournit  la 
raison.  Il  le  montre  surtout  par  l'exemple  de  saint  Augustin  et 
de  ses  Dialogues  philosophiques.  Dans  ces  traités,  qu'il  a  coui[)Osés 
au  moment  où  il  se  préparait  à  recevoir  le  baptême,  après  les 
grandes  crises  qu'il  a  racontées  dans  ses  Confessions,  il  n'est  pas 
question  du  Chiisl  ni  des  livres  saints,  et  tout  est  tiré  de  Platon 
et  de  Cicéron.  Quand  on  les  a  lus,  on  comprend  comment  un 
chrétien  pouvait  écrire  la  Consolation  philosophique. 


«7' 


—  238  — 


SEANCE    DU    1 2  JUILLET. 


L'Académie  se  ('orme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  le  Président  annonce 
que  la  Commission  chargée  de  juger  ie  concours  ouvert  pour  le 
prix  Bordin,  dont  le  sujet  était  :  Etudier  les  sources  qui  ont  servi 
à  Tacite  pour  composer  ses  Annales  et  ses  Histoires,  n'a  pas  décerné 
le  prix  et  qu'elle  a  prorogé  le  concours,  en  maintenant  la  même 
question,  à  l'année  1891. 

Les  mémoires  seront  reçus  au  secrétariat  de  l'Institut  jusqu'au 
3i  décembre  1890. 

M.  i'abbé  Dughesne  communique  une  étude  sur  un  recueil  de 
Vies  des  papes,  conservé  dans  un  manuscrit  de  Saint-Gilles.  Il 
s'attache  à  montrer  que,  pour  la  partie  qui  correspond  à  la  fin 
du  xi^  siècle  et  au  commencement  du  xif  siècle,  le  texte  de  ces 
notices  pontificales  (remanié  çà  et  là  par  Pierre  Guillaume,  bi- 
bliothécaire de  Saint-Gilles),  est  de  la  main  du  cardinal  Pan- 
dolphe,  l'un  des  partisans  de  l'antipape  Anaclet  II.  Jusqu'à  pré- 
sent, on  attribuait  cette  première  partie  du  recueil  au  cardinal 
ï'ierre  de  Pise. 

M.  Hérox  de  Villefosse  offre  à  l'Académie,  de  la  part  de 
M.  Ad.  Démy,  la  photogravure  d'un  document  épigraphique  de 
la  plus  haute  importance,  dont  il  a  déjà  entretenu  la  Compagnie 
il  y  a  plus  d'un  an.  Ce  document  est  malheureusement  incom- 
plet, mais,  même  dans  cet  état,  il  doit  être  considéré  comme 
un  des  monuments  les  plus  précieux  que  nous  possédions  pour 
riiistoire  des  institutions  romaines. 

Gravé  sur  une  plaque  de  bronze  doré,  il  a  été  découvert  à 
Narbonne,  au  mois  de  janvier  1888,  au  milieu  des  ruines  d'un 
bain  antique,  dans  un  champ  appartenant  à  M.  Dolprat,  sur  la 
route  d'Armissan.  C'est  un  fragment  d'une  loi  relative  aux  fonc- 
tions du  flamine  d'Auguste  à  Narbonne  et  aux  honneurs  qui 
devaient  lui  être  rendus.  Cette  loi  (au  moins  ce  qui  en  subsiste) 
tranche  également  certaines  questions  du  règlement  de  l'As- 
semblée provinciale  de  la  Narbonnaise,  doni  le  flamine  avait  la 
présidence.   Elle   a   dû  être    faite   par   l'empereur  Auguste    lui- 


—  L>39  — 

inrinc,  on  l'a»  27  avant  Tère  chrétienne,  au  nioniont  où  il  tint 
à  \arbonne  la  célèbre  asseiiibléiî  d'où  sortit  toute  l'organisation 
des  provinces  de  la  Gaule. 

M.  Ad.  De'my,  très  habilement  secondé  par  M.  J.  Letaille, 
élève  de  l'Ecole  pratique  des  hautes  études,  est  parvenu  à  se 
rendre  acquéreur  de  ce  texte  important,  et,  avec  une  générosité 
({ui  l'honore,  il  en  a  fait  don  au  Musée  du  Louvre.  En  attendant 
le  moment  où  elle  sera  remise  à  cet  établissement,  la  plaque  de 
Narbonneest  exposée  au  Champ-de-.Mars,  dans  l'une  des  galeries 
de  rilistoire  du  travail.  Cette  circonstance  a  permis  à  M.  Héron 
de  Villefosse  de  mettre  sous  les  yeux  de  l'Académie  le  monument 
original  lui-même,  que  M.  Ad.  Démy  a  bien  voulu  lui  confier, 
dans  l'espoir  que  cet  examen  intéresserait  la  Compagnie. 

M.  Maspkro  annonce  à  la  Compagnie  qu'au  nombre  des  per- 
sonnes qui  assislenl  à  la  séance,  on  compte  un  des  explorateurs 
de  1  Egypte,  ù  qui  l'on  doit  des  découvertes  importantes, 
M.  Edouard  rsavillc. 

Le  Président  invile  M.  Naville  à  prendre  la  parole. 

M.  Edouard  .\aville  fait  une  description  sommaire  de  ses 
fouilles  dans  le  grand  temple  de  Bubaste.  Ce  qui  reste  de  l'édi- 
licc  a  été  déblayé  en  entier,  sur  une  longueur  de  près  de 
300  mètres.  Les  inscriptions  qui  y  ont  été  retrouvées  permettent  de 
suivre  l'histoire  de  l'édifice  pendant  plus  de  trois  mille  ans,  de- 
puis la  construction  des  pyramides  de  Chéops  et  de  Cliefsct  jusqu'à 
Ptolémée  Epiphane.  Les  monuments  les  plus  importants  qui  ont 
été  découverts  à  Bubaste  sont  deux  grandes  statues  dans  le  slylc 
qu'on  a  allribué  aux  Hyksos,  la  statue  du  roi  inconnu  lanra  ou 
Baian,  qu'il  faut  placer  à  la  même  époque,  ainsi  qu'une  inscrip- 
tion du  roi  Apepi. 


SÉA.NCE    DU  IJ)   JUILLET. 

Le  SECRÉTAinE  PERPÉTUEL  communique  à  l'Académie  deux  lettres 
que  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique  et  des  beaux-arts  a 
adressées  au  Président  de  llnstitut. 

Dans  la  première,  le  Ministre  annonce  que  la  distribution  des 


—  uo  — 

prix  du  concours  général  entre  les  lycées  et  coHèges  de  la  Seine 
et  de  Versailles  aura  lieu  sous  sa  présidence,  à  la  Sorbonne,  le 
29  juillet,  à  midi,  et  il  prie  les  membres  de  l'Institut  de  vouloir 
bien  assister  à  cette  solennité. 

Dans  la  seconde  lettre,  le  Ministre  invite  les  cinq  Académies  à 
se  faire  représenter  à  Tinauguration  des  bâtiments  de  la  nouvelle 
Sorbonne,  qui  aura  lieu  le  5  août,  à  trois  heures  de  l'après-midi. 

M.  Sicoré,  beau-fils  de  M.  Charles  Nisard,  adresse  au  Secré- 
taire perpétuel  la  lettre  suivante  : 

Paris,  16  juiilet  1889. 

Monsieur  le  Secrétaire  perpétuel, 

J'ai  la  profonde  douleur  de  vous  annoncer  la  mort  de  mon  beau-père , 
M.  Charles  Nisard,  l'un  des  membres  de  TAcadémie  des  inscriptions, 
arrivée  aujourd'hui  à  deux  heures  et  demie. 

Conformément  à  ses  instructions,  j'ai  l'honneur  de  vous  prier  de 
vouloir  bien  communiquer  à  l'Académie  le  passage  suivant  de  ses  dispo- 
sitions testamentaires  : 

ffJe  désire  qu'il  n'y  ait  aucun  appareil  officiel  à  mes  obsèques, 
qu'aucun  discours  n'y  soit  prononcé,  et  qu'on  n'y  entende  d'autres 
voix  que  celle  du  prêtre ,  d'autres  paroles  que  les  prières  des  morts.  Je 
veux  sortir  du  monde  aussi  obscurément  que  j'y  suis  entré.  Je  prie 
mes  chers  confrères  de  fAcadémie  des  inscriptions  de  trouver  bon  que 
je  leur  épargne  la  fatigue  d'honorer  en  moi  le  plus  petit  d'entre  eux. 

rrJe  les  remercie  des  égai'ds,  des  attentions  qu'ils  m'ont  toujours 
témoignés  pendant  que  j'ai  fait  partie  de  leur  savante  Compagnie, 
et  quoique  mon  passage  y  ait  eu  peu  d'éclat.  Mais  ce  temps  ayant  été 
le  plus  honorable,  le  plus  glorieux  de  ma  vie,  j'ai  le  besoin  et  le  devoir 
d'en  montrer  toute  ma  reconnaissance  h  ceux  qui  ont  bien  voulu  m'en 
assurer  la  possession. 

"Paris,  le  20  septembre  iSSS.» 

Veuillez  recevoir,  Monsiem-  le  Secrétaù'e  perpétuel,  l'hommage  de 
mes  sentiments  très  respectueux. 

G.  SiCORÉ. 

Après  la  lecture  de  cette  letti^,  le  Président  prononce  l'aHo- 
cution  suivante  : 


, 


•2:11       — 


ff  Messieurs, 


ffNciulredi  dernier,  i\I.  Nisard  veiuiit  encore  s'asseoir  parmi 
nous;  oominc  toujours,  il  nous  donnait  l'exemple  de  Tassiduilé; 
comme  toujours,  il  avait  eu  pour  chacun  de  nous  un  bon  sou- 
rire et  une  cordiale  poignée  de  main.  Hier,  la  nouvelle  de  sa 
mort  subite  est  venue  jeter  la  tristesse  dans  nos  cœurs  et  nous 
rappeler  Tincerlilude  du  lendemain  et  la  fragilité  de  nos  espe'- 
rances.  En  le  frappant  d'un  seul  coup,  la  mort  a  été  clémente 
pour  lui,  cruelle  seulement  pour  sa  famille  et  ses  amis  :  elle  l'a 
renversé  sur  le  champ  d'honneur,  dans  son  cabinet  de  travail, 
le  front  penché  sur  quelque  lexte  rare  dont  il  nous  réservait  la 
primeur. 

cr  Modeste  comme  il  l'était  et  ennemi  de  tout  apparat  ofHciel,  le 
confrère  que  nous  ne  reverrons  plus  avait  depuis  longtemps  re- 
commandé (jue  nul  discours  ne  fût  prononcé  sur  sa  tombe  :  il 
n'y  voulait,  disait-il,  que  des  prières.  Sa  volonté  a  été  respectée: 
nous  l'avons  accompagné  à  sa  dernière  demeure,  et  là,  du  fond 
du  cœur,  au  nom  de  l'Académie  tout  entière,  nous  lui  avons 
adressé  un  suprême  adieu.  Mais  ce  n'est  pas  trahir  les  vœux 
d'un  mourant  (|ue  de  lui  rendre  ici  l'hommage  qui  lui  est  du. 
IN'est-ce  pas  après  tout  la  meilleure  consolation  de  ceux  qui  res- 
tent ?  L'Académie  est  une  famille,  elle  a  le  droit  et  le  pieux 
devoir  d'évoquer  le  souvenir  de  ceux  qu'elle  a  perdus.  Permettez- 
moi,  Messieurs,  de  le  faiie  en  votre  nom  et  de  rappeler  en  quel- 
ques mots  seulement  ce  qu'a  été  l'homme  et  le  lettré.  Je  n'ai 
nullement  la  prétention  de  retracer  un  tableau  complet  de  son 
œuvre  qui  est  considérable:  le  temps  me  fait  défaut  et,  plus 
encore  que  le  temps,  la  compétence  nécessaire  pour  l'apprécier 
dignement. 

tf  Marie-Léonard-Charles  Nisard  est  né  à  Cbâtillon-sur-Seine, 
en  1808.  Comme  la  plupart  d'entre  nous,  il  n'a  pas  d'histoire, 
ce  qui  fera  dire  de  nous  (jue  nous  avons  été  parmi  lus  heureux 
de  ce  monde;  et,  en  le  disant,  on  ne  se  trompera  guère,  car  si 
un  peu  de  bonheur  est  compatible  avec  la  destinée  humaine,  c'est 
dans  le  sanctuaire  des  lettres  qu'il  faut  le  chercher.  Nisard  leur 


appartenait  tout  entier.  Après  avoir  termine  ses  études  avec 
succès,  il  fut  dirigé  vers  le  commerce  par  la  volonté  de  sa 
famille.  Un  sentiment  de  déférence  filiale  l'y  retint  pendant  deux 
ou  trois  ans,  mais  la  curiosité  et  la  délicatesse  de  son  esprit, 
son  excellente  préparation  classique,  sans  doute  aussi  la  réputa- 
tion naissante  de  son  frère  aîné,  décidèrent  bientôt  de  sa  voca- 
tion. Le  romantisme  était  alors  en  plein  épanouissement.  Nisard 
s'y  jeta  avec  l'indépendance  et  Feuthousiasme  du  néophyte.  Il 
s'en  déclara  le  partisan  ardent  dans  une  épilre  en  vers,  ou, pour 
mieux  dire,  dans  une  satire  contre  les  adversaires  de  la  nou- 
velle école.  Je  ne  parle  que  par  ouï-dire  de  cette  improvisation, 
dont  on  retrouverait  difficilement  la  trace  :  l'auteur  lui-même  la 
désavoua  et  chercha  à  en  faire  disparaître  les  exemplaires. 

ffCe  fut,  je  crois,  la  seule  fois  qu'il  essaya  de  parler  la  langue 
des  dieux.  Une  révolution  plus  sérieuse  venait  d'éclater.  i83o  le 
trouva  à  côté  de  Désiré  Nisard  dans  les  rangs  de  ceux  qui  défen- 
dirent les  libertés  menacées.  Après  la  victoire,  il  entra  dans  la 
maison  du  roi  Louis-Philippe  en  qualité  de  secrétaire.  Ce  fut  la 
période  militante  de  sa  vie,  si  cette  expression  peut  s'appliquer 
à  une  existence  exclusivement  consacrée  au  culte  des  lettres,  il 
écrivit  alors  dans  les  journaux  conservateurs  et  ne  cessa  d'y  sou- 
tenir la  cause  de  la  monarchie  parlementaire,  l'alliance  de  la 
liberté  avec  Tordre  et  le  respect  des  lois.  Plus  soucieux  de  la  dé- 
fense de  ces  principes  salutaires  que  de  la  forme  même  du  gou- 
vernement, il  ne  refusa  pas  ses  services  à  l'Empire  et  celui-ci  sut 
lui  donner  des  fonctions  en  rapport  avec  ses  aptitudes. 

tf Notre  confrère  fut,  pendant  dix  années  environ,  bibliothé- 
caire du  Ministère  de  l'intérieur,  ce  qui  lui  donna  accès  à  la 
commission  du  colportage  de  la  librairie.  Il  écrivit  à  cette  occa- 
sion son  Histoire  des  livres  populaires,  esquisse  incomplète  au 
point  de  vue  bibliographique,  mais  pleine  de  considérations 
sages  et  pratiques  sur  le  genre  d'ouvrages  qu'il  est  utile  de  ré- 
pandre dans  les  classes  laborieuses.  On  doit  rattachera  la  même 
époque  un  curieux  mémoire  sur  les  Chansons  populaires  chez  les 
Anciens  et  chez  les  Français,  suivi  d'une  Etude  sur  les  chansons  des  rues 
contemporaines.  Dans  cet  ouvrage,  tout  en  remontant  jusqu  à  l'an- 


—  -2/13  — 

lu|uilc  classique,  laulcur  dierche  moins  à  laiie  étalage  dVnutii- 
lioii  qu'à  suivre  les  traces  du  génie  populaire  qui,  à  travers  les 
âges  et  les  civilisations,  se  manifeste  par  des  productions  spon- 
tane'es,  marquées  d'un  air  de  famille  toujours  reconnaissable. 

ffTout  ce  qui  se  rattachait  aux  formes  vulgaires  du  langage, 
tout  jusqu'à  Targot,  avait  de  l'attrait  pour  notre  e'minent  con- 
frère. H  en  a  donné  la  preuve  dans  une  brochure  intitulée  :  Le 
Parisiatmme  populaire,  et,  avec  plus  de  développement,  dans  une 
Etude  sur  le  patois  de  Paris  et  de  la  banlieue.  Cette  dernière  n'est 
qu'un  fragment  d'un  travail  fort  étendu  dont  le  manuscrit,  des- 
tiné à  Y  Histoire  de  Paris,  a  péri  dans  l'incendie  de  l'Hùtel  de 
Ville  pendant  la  Commune.  L'auteur  n'était  pas  philologue  de 
profession,  il  ne  se  tenait  pas  au  jour  le  jour  au  courant  des 
progrès  accomplis  par  la  linguistique  dans  ces  dernières  années: 
de  là  les  erreurs  inévitables  qui  se  sont  glissées  dans  ces  deux 
essais,  dont  la  lecture  est  loin  cependant  d'être  sans  valeur  pour 
fhistoire  de  notre  langue  et  de  notre  civilisation. 

aMais  les  ouvrages  dont  je  viens  d'énumérer  les  titres  ne  sont, 
à  vrai  dire,  que  des  écrits  de  circonstance,  auxquels  il  attachait 
sans  doute  le  moindre  prix.  Vous  connaissez,  Messieurs,  et  vous 
avez  pu  apprécier  à  leur  véritable  valeur  ceux  qui  ont  fondé  sa 
réputation  d'érudit  et  d'écrivain.  Vous  savez  la  part  importante 
qu'il  a  prise  à  la  Collection  des  auteurs  latins,  qui  est  en  quelque 
sorte  un  patrimoine  de  sa  famille  et  qui  a  coniribué  à  en 
populariser  le  nom.  H  a  donné  à  ce  grand  recueil  la  traduclion 
de  Valérius  Flaccus,  de  Martial,  des  fragments  d'Ovide,  de  Titc- 
Live  et  de  Cicéron.  Bien  qu'elles  datent  d'une  époque  où  la  cri- 
tique des  textes  s'exerçait  avec  moins  de  sévérité  qu'aujourd'hui, 
ses  traductions  se  recommandent  par  la  fidélité,  l'élégance  et  la 
justesse  de  l'expression;  elles  ne  versent  jamais  ni  dons  la  péri- 
phrase pompeuse  de  l'école  de  La  Harpe  et  de  Delille,  ni  dans 
la  sécheresse  des  exercices  de  classe.  On  y  retrouve  partout  le 
bon  latiniste  et  l'écrivain  d'un  goût  exercé.  Mais  ce  travail  d'adap- 
tation ne  pouvait  suffire  à  factivité  littéraire  de  Nisard.  Sa  curio- 
sité toujours  en  éveil  s'est  tournée  vers  les  sujets  les  plus  variés; 
il  semble  qu'elle  ait  de  préférence  recherché  les  recoins  obscurs 


de  la  bibliographie,  les  terres  morles  de  riiistoire  littéraire,  pour 
y  porter  la  lumière  et  la  vie.  Je  citerai  dans  cet  ordre  de  recher- 
ches ses  éditions  des  Mémoires  du  P.  Garasse,  de  la  Compagnie  de 
Jésus,  des  Mémoires  de  Huet,  évèque  d' Avra^iches ,  et,  en  pi'emière 
ligne,  de  la  Cotrespondance  du  comte  de  Caylus  avec  le  P.  Paciaudi, 
dont  il  retrouva  la  copie  originale  dans  la  Bibliothèque  de 
Parme  (1877).  ^^  ftvait  déjà  publié,  en  1862,  quelques-unes 
de  ces  lettres,  mais  une  foule  de  passages  étaient  restés  obscurs: 
la  découverte  de  la  correspondance  complète  en  donne  l'explica- 
tion véritable  et  les  annotations  que  le  nouvel  éditeur  y  ajoute 
achèvent  d'y  porter  la  lumière.  Caylus,  on  le  sait,  avait  fait 
entrer  l'archéologie  dans  une  voie  nouvelle.  Il  avait  été  un  des 
premiers  à  lui  demander  la  révélation  de  la  vie  ancienne,  de  la 
religion,  des  mœurs  et  des  usages  de  la  Grèce  et  de  Rome,  C'est 
donc  à  l'archéologie  surtout  que  Nisard  a  rendu,  par  cette  publi- 
cation, un  service  éminent.  Je  voudrais  pouvoir  citer  aussi  les 
nombreux  articles  qu'il  a  donnés  au  Dictionnaire  de  la  conversation, 
AU  Journal  de  F  Instruction  publique,  à  YAthenœum,  articles  pleins 
de  trouvailles  heureuses  dans  le  domaine  des  lettres  et  de  l'éru- 
dition et  présentés  avec  la  verve  humoristique  et  l'enthousiasme 
qui  étaient  une  des  caractéristiques  de  son  talent. 

'fLes  grandes  querelles  des  érudits  de  la  Renaissance  et  du 
siècle  suivant  furent  un  de  ses  sujets  favoris.  Dans  ses  deux  mé- 
moires intitulés  :  Les  Gladiateurs  de  la  république  des  lettres,  du 
.w"  au  AVii"  siècle,  et  Les  Triumvirs  littéraires.  Juste  Lipse ,  Scaliger 
et  Casaubon,  il  raconte  avec  la  fidélité  de  l'historien  et  juge  avec 
l'impartialité  de  la  critique  moderne  les  polémiques  acerbes, 
souvent  cyniques,  qui  ont  terni  la  réputation  de  ces  grands  éru- 
dits. C'est  en  signalant,  en  1876,  ces  deux  publications  h  votre 
Compagnie  qui  allait  admettre  Charles  Nisard  dans  ses  rangs, 
qu'un  de  nos  plus  illustres  prédécesseurs,  M.  de  Longpérier, 
louait  chez  le  candidat  l'élévation  des  id(^'es,  l'habileté  avec  la- 
quelle il  sait  intéresser  à  un  sujet  et  en  placer  sous  le  meilleur 
jour  les  côtés  les  plus  saillants,  tf Pressentes  par  lui,  ajoutait  M. de 
fr  Longpérier,  ses  Gladiateurs  des  lettres  cessent  de  rebuter  le  lec- 
'tteur  :  cela  tient  à  cette  élévation  de  pensée  011  M.  Nisard  sait 


—  'lllh  — 

'fse  maintenir.  C'est  conimo  lorsqu'on  pravil  une  montagne,  à 
tfune  certaine  hauteur  les  aspe'rites  disparaissent  et  le  paysage 
f: présente  un  aspect  harmonieux,  w 

trLes  atteintes  de  Tàge  n'ont  pas  ralenti  son  ardeur;  il  semble 
quil  ait  cherche'  dans  ces  derniers  temps,  par  des  communica- 
tions plus  fre'quentcs,  un  dédommagement  à  Tobsiacle  physique 
qui  l'empêchait  de  prendre  une  part  immédiate  à  nos  séances. 
Qui  de  nous  a  oublié  ses  dernières  lectures  sur  le  poète  Fortunat 
et  sur  sainte  Radegonde?  Qui  ne  se  rappelle  avec  quelle  fermeté 
d'accent  et  de  débit,  avec  quelle  chaleur  communicative  il  reven- 
diquait pour  la  sainte  patronne  de  Poitiers  les  deux  poèmes  qu'on 
avait  à  la  légère  attribués  à  Fortunat?  Noire  bon  et  regretté  con- 
frère nous  ménageait  encore  de  nouvelles  et  curieuses  révélations, 
lorsque  la  mort  est  venue  le  condamner  à  Téternel  silence.  La 
mémoire  de  Charles  Nisard  restera  parmi  nous  chère  et  vénérée  : 
pendant  tout  ie  cours  de  sa  longue  existence,  il  a  soutenu  vail- 
lamment l'honneur  de  son  nom,  d'un  nom  qui  ne  réveille  que 
de  glorieux  souvenirs,  qui  ne  rappelle  et  n'enseigne  que  le  culte 
désintéressé  des  lettres,  l'amour  du  beau  et  du  bien,  la  dignité 
dans  la  vie  et  dans  le  travail,  tî 

Ce  discours  sera  imprimé  et  distribué. 

Le  Secrétaire  perpétuel  donne  lecture  de  son  rapport  sur  les 
travaux  dos  Commissions  de  publication  de  l'Académie  pendant 
le  premier  semestre  de  1889^^^. 

M.  l'abbé  Duchesxe  est  désigné  pour  faire  une  lecture,  au  nom 
de  l'Académie,  à  la  séance  publique  annuelle  que  tiendra  l'Li- 
stitut,  le  95  octobre  prochain. 

M.  C.  Carapanos,  député  au  Parlement  hellénique,  corres- 
pondant de  l'Académie,  fait  connaître  les  résultats  des  fouilles 
qu'il  vient  de  faire  faire  sur  un  terrain  qui  lui  appartient,  dans 
l'ile  de  Corfou,  l'ancienne  Corcyre.  Sur  la  désignation  de  M.  Fou- 
cart,  directeur  de  l'École  française  d'Athènes,  la  conduite  de 
ces  fouilles  avait  été  confiée  à  un  mcuibre  de  l'Ecole  française, 
M.  Lechat.  Elles  ont  amené  la  découverte  d'environ  un  millier 

"'  Voir  rAppEM'icE  n    111  (p.  269-370). 


—  2/i6  — 

de  staluetles  de  terre  cuite,  qui  toutes  représentent  une  déesse, 
tenant  un  arc  et  jouant  avec  une  biche.  Ce  sont  évidemment  des 
images  d'Artémis  (Diane);  elles  avaient  été  déposées  à  titre  d'of- 
frandes au  pied  d'une  colonne,  qui  subsiste  encore  en  partie  et 
qui  servait  sans  douie  de  piédestal  à  une  statue  de  la  déesse. 
C'est  la  collection  de  terres  cuites  archaïques  la  plus  importante 
qui  ail  été  découverte  jusqu'ici  sur  le  sol  hellénique. 

M.  J.  Halévy  commence  la  lecture  d'un  mémoire  sur  le 
psaume  lxviii,  qui  commence,  dans  la  Vulgate  latine,  par  les 
mots  :  Exsurgat  Deus. 

M.  Salomon  Reinach  fait  une  communication  sur  les  résultats 
scientifiques  des  voyages  du  général  Callier  en  Asie  Mineure. 

M.  S.  Reinach  a  découvert  dans  les  papiers  du  général  Anl.- 
Camille  Callier,  qui  parcourut  l'Asie  Mineure  de  i83o  à  i834, 
un  grand  nombre  de  copies  d'inscriptions  grecques  et  latines, 
dont  plusieurs,  encore  inédites,  sont  intéressantes  pour  la  géo- 
graphie comparée. 

L'une  d'elles,  découverte  à  Kirgol ,  dans  la  vallée  du  Rhyndacus, 
fait  connaître  le  bourg  d'Alia,  probablement  distinct  d'une  cité 
homonyme  dont  on  possède  des  monnaies. 

D'autres  établissent  pour  la  première  fois  que  la  ville  mo- 
derne d'Oushak,  centre  d'une  importante  fabrication  de  tapis, 
occupe  l'emplacement  de  l'ancienne  Tcmenothyrœ,  qui,  sous 
l'Empire,  ajouta  à  son  nom  celui  de  Flaviopolis.  Un  peu  plus  à 
l'est  était  la  ville  de  Grymenothyrœ,  qui  prit  le  nom  de  Traja- 
nopolis  sous  Hadrien.  Les  géographes  avaient  jusqu'à  présent 
placé  Temenothyrœ  fort  à  l'ouest  de  sa  situation  véritable,  à 
proximité  du  mont  Temnos,  dans  la  pensée  que  le  nom  grec  de 
la  ville  signifiait  rcles  passages  w  ou  'cles  portes w  du  Temnos. 
M.  Reinach  fait  observer  qu'il  existe  en  Lydie  une  ville  nommée 
Teira  et  une  autre,  bien  connue,  nommée  Thyateira;  il  en  con- 
clut que  teira  est  un  mot  lydien  signifiant  «  villes  ou  r  forte- 
resse-^ et  que  le  vrai  nom  de  Temenothyrae  devrait  être  Temeno- 
teira.  D'autre  part,  nous  savons  par  des  monnaies  de  Temenothyrœ 
qu'il  y  avait  un  héros  éponyme  nommé  Temenos,  qu'on  regardait 
comme  le  fondateur  de  la  ville.  Par  suite,  Temenoteira  est  frla 


—  2'j7  — 

l'ortcrosse  do  ïonienosw  el.sison  nom  lui  Iransi'oniio,  à  ré[)oqu<' 
ororquc,  en  celui  de  Temenolliyra),  c'est  qu'on  cherclia  à  lui  don- 
ner une  sifrnitication  en  langue  hellénique.  Il  y  a  donc  là  un 
phénomène  d'étymologie  populaire,  analogue  à  celui  qui  a  lait 
appeler  rHvniette  Monte  Matto  par  les  navigateurs  italiens  du 
moyen  âge:  Mnnle  Mntto  signifie  ffla  montagne  folles,  d'oii  les 
Grecs  ont  fait  à  leur  tour,  par  une  traduction  littérale,  Trelo 
Vouno,  nom  sous  lequel  cette  montagne  est  désignée  aujourd'hui. 
Les  copies  manuscrites  de  M.  Callier  ont  été  données  à  la 
bibliothèque  de  l'Institut  par  sa  veuve.  M""  la  générale  Callier, 
qui  a  offert  à  la  Société  de  géographie  les  relevés  topographiques 
exécutés  par  son  mari  en  Asie  Mineure. 


SÉANCE  DU  26   JUILLET. 

M.  le  duc  d'xUmale,  par  une  lettre  adressée  au  Secrétaire 
perpétuel,  informe  l'Académie  que  les  galeries  du  château  de 
Chantilly  seront  ouvertes  au\  membres  de  l'Institut  et  à  leurs 
familles,  les  mercredis  3 1  juillet,  7,  lietai  août,  de  deux  heures 
à  quatre  heures. 

Sur  la  proposition  du  PnKsiDEM,  l'Académie  des  inscriptions, 
informée  de  l'attentat  auquel  vient  d'échapper  S.  M.  dom  Pedro, 
empereur  du  Brésil,  associé  étranger  de  l'Institut,  exprime  la 
satisfaction  qu'elle  éprouve  de  la  protection  providentielle  qui  a 
sauvé  les  jours  de  Sa  Majesté.  Elle  désire  que  cette  manifestation 
de  ses  sentiments  soit  jointe  à  celle  des  autres  Académies. 

Le  Président,  annonçant  ensuite  à  l'Académie  une  nouvelle 
perte  qu'elle  vient  de  faire,  s'exprime  en  ces  termes  : 

ff  J'ai  encore  aujourd'hui  une  douloureuse  nouvelle  à  commu- 
niquer à  l'Académie.  L'un  de  ses  associés  étrangers,  M.  Michel 
Amari,  vient  de  mourir  à  Florence  dans  un  âge  avancé. 

ff  M.  Amari  a  été  à  la  fois  un  grand  citoyen,  tout  dévoué  à  l'af- 
franchissement et  à  l'unité  de  l'Italie,  et  un  orientaliste  du  mérite 
le  plus  distingué.  On  peut  même  aflirmerque  c'est  l'amour  de  la 
patrie  qui,  après  l'avoir  fait  proscrire,  la  dirigé  vers  l'élude  de 
la  langue  et  de  l'histoire  des  Arabes,  Pendant  son  long  exil,  ré- 


—  us  — 

l'ugié  dans  notre  pays,  quil  aimait  comme  une  seconde  patrie, 
il  s'est  occupé  de  recueillir  tous  les  documents  arabes  qui  se  rap- 
portent à  VHistoire  des  musulmans  de  Sicile.  Cet  ouvrage  et  son 
histoire  des  Vêpres  siciliennes  sont  les  deux  œuvres  maîtresses  qui 
ont  rendu  son  nom  populaire  en  Italie  et  lui  ont  valu  Testime  du 
monde  savant. 

«•Après  son  retour  en  Italie,  il  devint  ministre  de  Tinstruction 
publique,  puis  sénateur  du  royaume.  iMais  ses  fonctions  poli- 
tiques ne  font  jamais  détourné  de  la  grande  entreprise  liisto- 
rique  à  laquelle  il  avait  consacré  sa  vie.  Même  dans  sa  vieillesse, 
il  na  cessé  de  recueillir  et  de  traduire  les  traités,  les  chartes, 
les  documents  de  toute  espèce  qui  se  rapportent  aux  relations 
politiques  et  commerciales  de  l'Italie  avec  la  Syrie,  TÉgypte  et 
l'Afrique  du  Nord. 

cfM.  Amari  était  notre  associé  étranger  depuis  1871.  Il  a  tou- 
jours gardé  une  reconnaissance  profonde  à  la  France  pour  l'hos- 
pitalité et  aussi  pour  l'enseignement  scientifique  qu'elle  lui  avait 
largement  accordés. 

tr  L'Académie  s'associera  aux  regrets  que  nous  inspire  la  perte 
de  cet  homme  de  grand  cœur  et  de  haute  intelligence,  qui  était 
le  doyen  vénéré  des  études  orientales  en  Europe.  « 

L'Académie  exprime,  à  l'unanimité,  la  douleur  que  lui  cause 
cet  événement. 

MM.  BoissiER  et  Gaston  Paris  rappellent  les  sentiments  d'at- 
tachement pour  la  France  que  M.  Amari  leur  avait  plusieurs  fois 
exprimés.  Il  avait  coutume  de  dire  que  rtout  savant  avait  une 
seconde  patrie,  c'était  la  France w. 

MM.  Barbier  de  Meynard  et  Wallon  sont  désignés  pour  repré- 
senter l'Académie  à  l'inauguration  des  bâtiments  de  la  nouvelle 
Sorbonne,  qui  doit  avoir  lieu  le  5  août  prochain. 

Le  Président  annonce  que  la  Commission  des  Ecoles  fran- 
çaises d'Athènes  et  de  Rome  a  émis  un  avis  favorable  sur  la  pro- 
longation d'une  année  de  séjour  à  l'École  d'Athènes,  qui  a  été 
demandée,  pour  M.  Lechat,  par  M.  le  Directeur  de  cette  école. 

L'Académie  adopte  les  propositions  de  la  Commission. 

M.  ilalévy  termine  la  lecture  de  son  mémoire  sur  le  psaume 


—  ^2M)  — 


uwiii,   (|iii   c(»minenc(>,  dans   la   Vulgale  ialine,  par   les  mois 


Exsurgat  Deiis 


Ce  psaume  ne  pre'senle,  dans  le  texle  acluel,  dit  M.  Hale'vy, 
qu'une  agglomération  de  versets  sans  suite.  L'auteur  de  la  com- 
munication s'elVorce  de  rétablir  Tordre  primitif.  Le  sujet  du  poème 
en  ressort  aussitôt,  dit-il,  avec  toute  la  clarté'  de'sirable. 

Le  psaume  date  des  dernières  anne'es  du  règne  de  Sédécias. 
La  Palestine  s'attendait  alors  à  être  envahie  par  les  arme'es  baby- 
loniennes commande'es  par  Nabuchodonosor;  elle  e'tait,  par  sur- 
croît de  mallieur,  affligée  d'une  grande  se'cheresse  et  par  suite 
menacée  d'une  lamine  prochaine.  D"aulre  part,  on  espérait  le 
secours  de  Néchao,  roi  d'Egypte  et  d'Élhiopie.  Pendant  ces  temps 
troublés,  une  grave  scission  s'était  fait  jour  dans  l'école  prophé- 
tique, au  sujet  de  la  politique  étrangère.  L'école  présidée  par 
le  prophète  Jérémie  avait  des  sympathies  pour  la  Babylonie 
et  se  méfiait  des  promesses  faites  par  l'Egypte.  L'école  adverse, 
dirigée  par  le  prophète  Ananias,  fils  d'Azur,  penchait  pour  l'al- 
liance avec  l'Egypte  et  détestait  la  Babylonie.  L'autour  du 
psaume  lxvhi  appartenait,  pense  M.  Halévy,  à  ce  dernier  parti. 
Il  prédit  la  chute  de  l'empire  babylonien  et  le  retour  des  captifs. 
Cette  grave  scission  de  l'école  prophétique  hâta  la  ruine  de 
Jérusalem. 

Le  psaume  eu  question  rappelle,  en  le  remaniant,  le  récit  du 
Pentateuque,  au  sujet  de  la  loi  donnée  sur  le  Siuaï,  ainsi  que 
celui  de  la  bataille  du  mont  Hermon,  que  Josué,  d'après  le  livre 
qui  porte  son  nom,  livra  aux  Chananéens  du  Nord.  Cela  prouve, 
dit  M.  Halévy,  que  ces  écrits  existaient  avant  la  destruction  de 
Jérusalem  et  qu'on  doit  rejeter  recette  théorie  critique,  qui  fait 
verser  dans  la  pseudépigraphie  les  livres  les  plus  authentiques 
de  la  Bible  ?i. 

Est  adressé  à  l'Académie,  pour  le  prochain  concours  des  Anti- 
quités de  la  France  : 

Le  livre  juraloire  de  Beaumonl-de-Lomagne ,  cartulaire  d'une  bas- 
tide de  Gascogne,  transcrit  et  annoté  par  ^L  Gustave  Babinet  de 
Bencogne,  publié  sous  la  direction  de  iM.  François  \Ioulen(| 
(Montauban,  1888,  iu-S"). 


—  250  — 
Al.  Tabbc'  Uaboisson  commence  la  lecliire  cruiio  Eiude  géogru- 
phùpie  de  l" Assyrie,  d'Accad,  etc.,  au  temps  de  Smmi  Rammân  IV. 


SÉANCE  DU    2    AOUT. 

Le  Secrétaire  perpétuel  donne  lecture  de  la  lettre  suivante, 
qu'il  a  reçue  de  M.  J.  de  Wilte  : 

Lundi  soir. 
Monsieur, 

J'ai  la  profonde  douleur  de  vous  annoncer  que  mon  pauvre  père  vient 
de  succomber  après  tant  de  mois  de  souffrance.  J'étais  malheureusement 
à  la  campagne  et  le  dénouement  a  été  tellement  prompt  que  je  suis  arrivé 
ici  deux  heures  après  que  tout  était  fini.  Ma  mère  se  trouvait  seule  au- 
près de  mon  père  en  ce  moment. 

Je  vous  prie,  Monsieur,  de  vouloir  bien  faire  part  de  cette  triste 
nouvelle  à  l'Inslilut.  Le  jour  du  service  n'est  pas  encore  (ixé  :  ce  sera 
probablemeut  jeudi. 

Veuillez  agréer,  Monsieur,  l'hommage  de  ma  haute  et  respectueuse 

considération. 

Jehan  de  Witte. 

Le  Secrétaire  perpétuel  rappelle  que  la  (Compagnie,  par  Tor- 
gane  de  son  Président,  a  rendu  hier  un  dernier  hommage  à 
rassocie'  si  éminent  qu'elle  vient  de  perdre. 

Le  Président  ajoute  : 

K  Notre  Académie  est  cruellement  éprouve'e  depuis  quelque 
temps.  C'est  la  troisième  fois  en  moins  d'un  mois  que  je  me 
lève  pour  constater  un  nouveau  vide  dans  nos  rangs.  Coup  sur 
coup,  nous  venons  de  perdre  deux  de  nos  plus  anciens  associés 
étrangers  :  hier,  Michel  Amari,  le  célèbre  orientaliste  italien;  au- 
jourd'hui, M.  le  baron  de  Witte,  qui,  par  ses  travaux  et  par  ses 
libéralités,  a  si  largement  contribué  aux  progrès  de  l'archéo- 
logic  et  de  la  numismatique. 

ffEn  l'accompagnant  hier  à  sa  dernière  demeure  et  en  lui  adres- 
sant les  derniers  adieux  de  l'Académie,  j'ai  rendu  hommage  à 
cette  vie  toute  de  travail  et  de  dévouement  scientifiques. 

ffJe  n'ai  pas  besoin,  Messieurs,  de  vous  rappeler  les  titres  qui 


—  -251   — 

assurent  à  M.  do  Wille  une  j)la('o  dislinjjuc'C  dfins  les  ran<|s  do 
l'érudition  IVan^Mise;  je  dis  IVançaise,  parce  que  noire  confrère 
considérait  la  France  comme  sa  patrie  d'adoption.  Collaborateur 
et  ami  de  Charles  Lenormant,  il  a,  dans  ses  Monuments  céramo- 
graplnques,  donné  à  l'étude  de  l'archéologie  une  méthode  plus  ri- 
goureuse et  substitué  à  la  simple  description  des  monuments  une 
interprétation  plus  large  et  plus  rigoui'euse.  La  Gazette  archéolo- 
gique, qu'il  fonda,  en  1876,  avec  François  Lenormant,  si  préma- 
turément enlevé  à  notre  Compagnie  et  à  l'érudition,  manjue  un 
nouveau  progrès  dans  cette  voie.  Le  plan  suivi  fidèlement  par  les 
deux  coUaboraleuis  consistait  à  réunir,  en  un  seul  corps,  les 
monuments  de  l'antiquité  figurée  grecque  et  romaine,  en  choi- 
sissant de  préférence  ceux  qui  présentent  la  plus  haute  expres- 
sion des  formes  plastiques.  Collaborateur  assidu  des  principales 
revues  de  numismatique,  M.  de  Wille  a  écrit  aussi  ï Histoire  des 
empereurs  romains  en  Gaule  au  m"  siècle,  livre  qui  est  une  utile  con- 
tribution à  Fbisloire  des  monnaies  romaines.  Mais  pour  donner 
une  juste  idée  de  son  activité  et  de  son  labour  infatigable,  il 
faudrait  citer  toutes  les  revues,  tous  les  recueils  périodiques  de 
France  et  de  l'étranger  oi'i  il  signalait  et  étudiait  les  découvertes 
les  plus  récentes. 

tf  C'est  à  nous,  d'ailleurs,  qu'il  on  réservait  la  primeur.  Vous  sa- 
vez avec  quelle  assiduité  il  assistait  à  nos  séances,  et  de  combien 
de  communications  intéressantes  nos  comptes  rendus  lui  sont 
redevables  !  Vous  vous  rappelez  aussi  les  dons  généreux  dont  il  en- 
richit à  plusieurs  reprises  le  Cabinet  des  médailles.  Le  baron  de 
Witte  était  de  la  race  des  grands  seigneurs  érudits  d'autrefois  :  sa 
libéralité  était  sans  limites,  son  bonheur  était  de  se  mettre  au 
service  de  la  science  et  des  savants.  Notre  Compagnie  ressentira 
vivement  le  nouveau  deuil  qui  l'atteint,  elle  conservera  le  meil- 
leur souvenir  du  confrère  bon  et  obligeant,  dont  la  modestie 
égalait  le  sa\oir,  et  qui,  pendant  un  quart  de  siècle,  a  pris  une 
part  si  active  à  nos  travaux.  ■« 

Le  Présidknt  annonce  que  l'insolation  dont  notre  confrère 
M.  Maury  a  été  frappé,  aux  funérailles  de  M.  le  baron  de  Witle, 
ne  paraît  pas  avoir  de  suites  graves. 

XVII.  ,g 


lurciuLBir    SATIoXLr. 


—  252  — 

Il  dit  aussi  que  le  bruit  accueilli  par  les  journaux,  sur  la  sauté 
du  général  Faidlierbe,  est  tout  à  fait  exagéré.  Le  général  avait 
repris  hier  ses  travaux. 

M.  Menant  lit  une  notice  sur  Un  cijUndre  du  Musée  britan- 
nique. 

L'objet  de  cette  communication  est  d'exposer  les  doutes  que 
notre  confrère  a  conçus  sur  l'authenticité  du  monument  dont  il 
s'agit. 

Ce  cylindre  était  connu  depuis  longtemps  par  un  dessin  de 
Rich,  exécuté  vers  1818,  d'après  un  original  qui  appartenait  au 
D"^  Jobn  Hine,  assistant  politique  de  l'Angleterre  à  Bagdad.  Cette 
copie  parvint  à  Grotefend,  et  celui-ci,  en  1819,  en  fit  l'objet 
d'une  communication  que  Dorow  inséra  dans  son  mémoire  sur  les 
écritures  cunéiformes,  publié  à  Wiesbaden  en  1820.  C'est  sur 
cette  copie  que  les  savants  ont  pu  d'abord  étudier  ce  curieux  mo- 
nument, ornement,  amulette  ou  cachet  d'un  des  plus  anciens  rois 
de  Chaldée,  connu  sous  le  nom  d'Urkham.  Ce  prince  régnait  à 
Ur,  la  pairie  d'Abraham,  environ  trente  siècles  avant  notre  ère. 
L'inscription  est  très  importante  et  le  sujet  du  plus  haut  intérêt; 
il  se  rapporte  à  une  cérémonie  religieuse  encore  inexpliquée  :  un 
pontife  présente,  en  le  conduisant  par  la  main,  un  néophyte  à 
un  Dieu  assis  sur  un  trône  élevé  de  quelques  degrés;  derrière 
lui,  un  second  personnage  se  tient  debout  dans  la  pose  de  l'ado- 
ration. La  scène,  le  costume  et  la  pose  des  personnages  sem- 
blent faits  d'après  un  type  consacré  qui  se  retrouve  sur  tous  les 
monuments  analogues. 

Aucun  détail  n'est  indifférent.  M.  Menant,  qui  a  particulière- 
ment étudié  les  monuments  de  la  glyptique  chaldéenne,  fait  re- 
marquer que  le  dessin  de  Rich  présente  précisément  un  détail  qui 
ne  se  retrouve  nulle  part  ailleurs  :  un  des  pieds  du  trône  sur 
lequel  repose  la  divinité  est  orné  d'un  pied  de  biche.  Les  monu- 
ments de  cette  époque  ont  été  pendant  quelque  temps  assez  rares, 
et  ce  détail  passa  inaperçu  ;  mais  il  arriva  que  les  monuments 
analogues  devinrent  nombreux,  et  que  le  fameux  cylindre  qui  de- 
vait avoir  servi  de  modèle  à  Rich  fut  un  jour  retrouvé  entre  les 
mains  de  M.  Cobham ,  commissioner  à  Larnaka.  Celui-ci  en  fit  gêné- 


—  253  — 

reusemonl  don  au  Musée  l)rilanni([ne.  ol  il  fiffure  aujourd'hui 
dans  les  vilriues  do  la  Koi/ninuljik  Gallerij. 

M.  Menant  s'attache  à  donionircr  que  ie  dessin  de  Ricli  n'est 
pas  conl'onne  au  type  que  les  autres  cylindres  de  ia  basse  Chal- 
dée  nous  font  connaître  et  qu'il  donne  aux  supports  du  trône 
sur  lequel  repose  la  divinité'  une  forme  qui  n'existe  sur  aucun 
des  monuments  de  cette  e'poque.  M.  Menant  cite  à  l'appui  plus 
de  soixante  cylindres  de  la  basse  Chalde'e  ;  il  en  conclut  que  ie 
dessin  de  Rich  est  inexact,  et,  comme  le  cylindre  du  Muse'e 
britannique  reproduit  les  mêmes  défauts  que  ce  dessin,  ainsi  que 
le  détail  caractéristique  qui  ne  se  trouve  nulle  part  ailleurs,  il 
s'ensuit  que  ce  cylindre,  au  lieu  d'être  un  original,  n'est  que  la 
copie  du  dessin  de  llich. 

M.  Bréal  commence  la  lecture  d'un  mémoire  intitulé  :  Deux 
prétendus  cas  d'analogie. 

Dans  cette  première  partie  de  sa  communication,  notre  con- 
frère traite  de  la  première  personne  du  pluriel  dans  les  verbes 
français. 

Selon  la  théorie  aujourd'hui  admise  par  la  majorité  des  lin- 
guistes, la  désinence  de  cette  personne,  -ons,  ne  peut  venir  de 
la  désinence  latine  -amus,  car  l'a  latin  n'aurait  pu  devenir  o  en 
français.  On  préfère  expliquer  cette  désinence  par  un  emprunt  que 
les  diverses  conjugaisons  auraient  fait  au  verbe  être,  dans  lequel  la 
première  personne  du  pluriel  a  été  autrefois  nom  sons,  du  latin 


sumus. 


M.  Bréal  oppose  à  cette  théorie  diverses  objections.  L'analogie, 
d'ordinaire,  porte  du  régulier  sur  l'irrégulier;  on  comprendrait 
que  la  première  conjugaison  latine,  à  laquelle  appartient  le  grand 
nombre  des  verbes  latins,  eut  exercé  une  influence  sur  la  conju- 
gaison capricieuse  et  exceptionnelle  du  verbe  sum,  mais  non  in- 
versement. On  ne  voit  pas  non  plus  pourquoi  ce  verbe  aurait 
prêté  aux  autres  une  seule  forme,  celle  de  la  première  personne 
du  pluriel,  plutôt  que  celle  de  la  seconde  ou  de  la  troisième 
personne.  On  peut,  enfin,  s'étonner  que  cet  emprunt  ait  eu  lieu 
seulement  en  français  et  que  les  autres  langues  lomanes  n'of- 
frent aucun  exemple  d'un  phénomène  semblable. 


18. 


—  25/4  — 

i\I.  Bréal  persiste  à  croire,  malgré  les  plionétistes,  que  la  de'- 
sinence  -ons  vient  de  -amus;  il  faut  voir  là  une  preuve  de  la 
possibilité'  de  la  transformation  d'à  latin  en  o  français. 

M.  Gaston  Paris  refuse  d'admettre  celte  possibilité'.  Puisque 
famem  a  donné  la  faim,  puisque  ramos  a  donné  (en  vieux  langage) 
des  rains,  le  latin  cantamus  n'aurait  pu  donner  en  français  autre 
chose  que  nous  chantains.  Il  faut  donc  chercher  dans  l'analogie, 
dans  un  emprunt  fait  à  quelque  autre  verbe,  l'origine  de  la  dési- 
nence -ons.  C'est  un  procédé  d'autant  plus  légitime,  que  l'ana- 
logie a  joué  un  rôle  très  considérable  dans  toutes  les  parties  de 
la  conjugaison  française. 

M.  l'abbé  Raboisson  continue  sa  lecture  sur  la  détermination 
des  éléments  géographiques  contenus  dans  l'inscription  de  Samsi 
Rammân  IV. 

Dans  la  première  partie  de  cette  communication,  l'auteur  a 
exposé  les  procédés  de  sa  méthode  d'identification,  qu'il  a  appe- 
lée wla  méthode  des  coordonnées  archéologiques  v.  Elle  consiste  à 
comparer  entre  elles  toutes  les  données  de  relations  topogra- 
phiques extraites  des  textes,  à  les  noter  par  des  tracés  graphiques 
et  à  relever  ensuite  les  identités  phonétiques  des  noms  anciens 
et  des  noms  actuels  qui  peuvent  se  trouver  sur  ces  tracés. 

Sur  les  quatre-vingt-dix-neuf  noms  géographiques  contenus 
dans  l'inscription  de  Samsi  Rammân  IV,  sept  seulement  étaient 
connus.  M,  Raboisson,  au  moyen  de  sa  méthode,  croit  pouvoir 
en  déterminer  quatre-vingt-dix  autres. 

Une  des  localités  dont  il  avait  déjà  parlé  lui  semble  mériter 
une  attention  spéciale  :  c'est  la  fameuse  Karkemis,  que  l'on  avait 
cherchée  jusqu'à  ce  jour  sur  la  rive  droite  de  l'Euphrate.  M.  Ra- 
boisson s'attache  à  démontrer,  avec  plus  de  développement  qu'il 
ne  l'avait  fait  encore,  que  cette  ville  était  certainement  sur  la  rive 
gauche  et  à  une  certaine  distance  du  fleuve.  Il  cite  à  l'appui  de 
cette  opinion,  outre  deux  textes  assyriens,  un  passage  de  l'histo- 
rien Josèphe,  qui  est,  dit-il,  des  plus  explicites. 


255 


SÉANCE   DU  9    AOUT. 

M.  le  Miiiislro  de  rinstriiction  pul)lique  adresse  au  Sf^crélaire 
perpétuel,  qui  en  donne  lecture,  rampliationd'un  décret  autorisant 
TAcadémie  des  inscriptions  et  belles-lettres  à  accepter  les  legs 
que  lui  a  (ails  M.  le  D""  Joseph  Saintoux,  par  son  testament  en 
date  du  iG  novembre  1887. 

L'Académie  prononce  l'acceptation  de  ces  legs  et  délègue  son 
Secrétaire  perpétuel  dans  les  formes  ordinaires,  à  l'efTet  de  rece- 
voir de  qui  il  appartiendra  les  sommes  provenant  desdits  legs. 

M.  le  Directeur  de  renseignement  supérieur  transmet  à  l'Aca- 
démie la  copie  du  rapport  que  vient  de  lui  adresser  M.  le  Direc- 
teur de  l'École  IVançaise  de  Rome,  sur  l'étal  actuel  des  travaux 
exécutés  par  les  membres  de  cet  établissement. 

Ce  rapport  sera  communiqué  à  la  Commission  compétente. 

M.  Lecocq,  professeur  de  dessin,  adresse  à  l'Académie  un  pli 
cacheté,  qui  ne  sera  ouvert  que  sur  sa  demande. 

M.  VioLLET  donne  lecture  d'un  mémoire  sur  Les  premiers  rois 
qui  aient  pris  le  titre  de  rois  par  la  grâce  de  Dieu. 

La  formule  gi-alia  Dei  rex  a  été  mise  eu  usage  pour  la  première 
fois  chez  nous  sous  le  règne  de  Charlemagne. 

Cette  formule  n'avait  pas,  quand  elle  fut  introduite,  lo  sens 
qu'on  lui  a  donné  de  nos  jours.  Loin  de  l'appeler  le  droit  hérédi- 
taire, le  droit  divin,  tel  que  nous  entendons  vulgairement  ce  mot, 
elle  en  était  précisément  la  pieuse  antithèse,  ff  Aucun  roi,  lisons- 
nous  dans  un  concile  de  Paris,  de  l'an  899,  ne  doit  dire  qu'il 
tient  son  royaume  de  ses  ancêtres,  mais  il  doit  croire  humble- 
ment qu'il  le  tient  en  vérité  de  Dieu,  qui  a  dit  :  rrPar  moi  régnent 
tries  rois;  par  moi  les  princes  gouvernent  et  les  puissants  rendent 
rrla  justice..  .  T>  Quant  à  ceux  qui  croient  que  les  royaumes  de  ce 
monde  leur  viennent  de  leurs  ancêtres  et  non  pas  de  Dieu,  ils 
sont  semblables  à  ceux  que  Dieu  réprouve  en  ces  termes  par  la 
voix  du  prophète  :  tr Ils  ont  régné  par  eux-mêmes  et  non  par  moi; 
ff  ils  ont  été  princes  et  je  ne  l'ai  point  su.w 

Pour  venir  de  Dieu,  le  pouvoir  royal  n'en  est  ni  plus  im- 
muable, ni  moins  contrôlé.  Dîeu  ne  manifeste  pas  sa  volonté  di- 


—  25G  — 

rectement,  mais  par  rintermédiaire  des  hommes,  qui  restent  ses 
instruments  ordinaires;  l'élection  est  le  moyen  par  lequel  Dieu 
manifeste  sa  volonté  (Hincraar).  La  grâce  de  Dieu  n'implique, 
on  le  voit,  en  aucune  manière  le  droit  héréditaire  :  Louis  le  Bègue 
s'intitule  (comme,  mille  ans  plus  tard.  Napoléon  III):  rtMiseri- 
oordia  domini  Dei  nostri  et  electione  populi  rex  constitutus.^i 
M.  Bréal  termine  sa  lecture  sur  Deux  prétendus  cas  d'à» alogie. 
Dans  un  travail  récent  sur  l'origine  du  genre  dans  les  langues 
indo-européennes,  M.  Brugmann  a  émis  une  supposition  d'une 
singulière  hardiesse.  La  distinction  du  féminin  et  du  masculin 
dans  ces  langues,  selon  lui,  ne  serait  pas  un  fait  ancien  et  fon- 
damental; il  prétend  l'expliquer  par  un  simple  fait  d'analogie,  ou, 
pour  parler  plus  exactement,  par  une  erreur  du  langage.  Il  y 
avait  dans   notre   famille  de  langues  quelques  noms,  tels  que 
mâmà,  frmèreii,  gnâ,  rr  femme r»,  qui  étaient  formés  à  l'aide  d'un 
suffixe  â,  suffixe  absolument  indifférent  par  lui-même  à  la  no- 
tion du  genre.  A  partir  d'une  certaine  époque,  l'idée  féminine 
impliquée  dans  ces  noms  a  paru  exprimée  par  le  suffixe  à,  et  l'on 
a  cru  que  ce  suffixe  avait  pour  objet  propre  la  distinction  du 
genre.  Telle  est  l'hypothèse  de  M.  Brugmann  ;  M.  Bréal  s'attache 
à  établir  qu'elle  est  dénuée  de  tout  fondement  sérieux  et  de  toute 
vraisemblance. 

M.  Bréal  propose  ensuite  quelques  étymologies,  telles  que 
celles  des  mots  rabies,  cœliim,  etc. 

Rabies  se  rattache  à  un  verbe  rabere,  dont  le  sens  demande  à 
être  précisé.  Or,  parmi  les  symptômes  de  la  rage,  l'un  des  plus 
constants  est  le  suivant  :  les  animaux  atteints  de  celte  maladie, 
sous  l'empire  d'une  inquiétude  extrême,  courent  et  errent  au  ha- 
sard. C'est  précisément  le  sens  du  verbe  grec  psfx^co,  qui  veut 
dire  tf errer,  tournoyer w.  M.  Bréal  pense  que  rabere  a  le  même 
sens  et  que  c'est  un  mot  venu  du  grec  par  une  transmission 
demi-savante.  Il  fait  remarquer,  incidemment,  que  le  français 
rêver  a  eu  aussi  à  l'origine  le  sens  de  rr  vaguer,  vagabonder n  et 
qu'il  pourrait  bien  venir  de  rabies,  par  l'intermédiaire  d'un  sub- 
stantif bas-latin  rabia  et  d'un  substantif  français  raive. 

Cmlum  (telle  est  la  vraie  orthographe  latine,  et  non  cœhm)  a 


—  257  — 

été  d'abord  un  terme  d'architecture.  H  a  signifié  rame  voûte w, 
et  il  na  passé  au  sens  de  rrcielr)  que  par  une  métaphore,  ana- 
logue à  celle  par  laquelle  nous  disons  la  voûte  des  deux.  M.  Bréal 
pense  que  ce  mot  a  été  formé  de  cœdere,  comme  pilum  de  pinsere, 
vélum  de  veliere,  prehim  de  premere. 

M.  Paul  Meyer,  en  réponse  à  un  passage  de  cette  lecture,  ob- 
jecte que  ni  le  sens  ni  la  forme  du  mot  français  rêver  ne  convien- 
nent, selon  lui,  à  fétymologie  proposée  par  M.  Bréal. 


SÉANCK  DU    iG   AOÛT. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  redevient  publique. 

Le  Président  annonce  à  TAcadémie  qu'il  a  reçu  de  bonnes 
nouvelles  de  la  santé  de  M.  Maury. 

M.  fabbé  Raboisson  continue  sa  lecture  sur  la  géographie  de 
l'Assyrie,  etc.  Il  identifie  quarante-huit  noms  appartenant  à  Naïri 
(l'Arménie)  et  suit  pas  à  pas  l'expédition  de  Samsi  Raminàn;  il 
voit  dans  Sagbila,  capitale  des  Matai,  l'Ecbatane  du  Nord  de 
Rawlinson.  Il  détermine  ensuite  les  villes  de  la  dernière  expédi- 
tion du  monarque  assyrien  et  particulièrement  Dm-  Pap  Siikal, 
qu'il  trouve  à  Chouster. 

M.  Offert,  tout  en  rendant  hommage  à  la  sagacité  et  au  sa- 
voir du  savant  ecclésiastique,  croit  devoir  contester  f assimilation 
de  certains  noms  de  lieux  antiques.  Il  adopte  fopinion  selon  la- 
quelle le  théâtre  de  la  première  campagne  du  roi  assyrien  n'est 
pas  l'Azerbeidjan,  mais  bien  le  nord  de  l'Arménie.  Il  donne  en- 
suite quelques  éclaircissements  sur  le  lieu  de  la  quatrième  cam- 
pagne, qui  se  dénoua,  dit-il,  non  pas  en  Susiane,  mais  au  cœur 
même  de  la  Mésopotamie. 

M.  Salomon  Reinach  adresse  à  l'Académie,  pour  le  prochain 
concours  des  Antiquités  de  la  France,  son  volume  intitulé  :  Anti- 
quités nationales.  Description  raisonnée  du  musée  de  Saint-Cermain-en- 
Laije.  I.  Epoque  des  alluvions  et  des  cavernes  (Paris,  in-8"). 

M.  Salomon  Reinach  présente  des  observations  sur  une  in- 
scription de  file  de  Chypre. 


—  258  — 

Dans  le  catalogue  de  la  collection  de  M.  de  Banimeville,  vendue 
à  Paris  en  1881,  M.  S.  Reinach  a  rencontre'  la  transcription  fau- 
tive d'une  inscription  grecque,  donnée  sans  indication  de  prove- 
nance. Grâce  à  des  de'couvertes  récentes  faites  dans  l'île  de 
Chypre,  M.  Reinach  restitue  le  texte  de  cette  inscription  et  de'- 
montre  qu  elle  provient  des  environs  de  Paphos.  C'est  une  de'di- 
cace  à  Opaon  Me'lanthios,  divinité  que  d'autres  inscriptions  de 
même  provenance  permettent  d'assimiler  à  Apollon.  Or,  Opaon, 
c'est-à-dire  gardien  (des  troupeaux),  est,  dans  Pindare,  une  épi- 
thète  d'Aristée,  forme  primitive  de  l'Apollon  arcadien.  D'autre 
part,  il  ne  manque  pas  d'indices  qui  établissent  l'existence  d'an- 
ciennes relations  entre  l'Arcadie  et  Chypre;  en  particulier,  la  ville 
de  Paphos  avait  été  fondée  par  i'Arcadien  Agapénor.  Le  second 
nom,  Mélanthios,  est  plus  difficile  à  expliquer.  M.  Reinach  le 
rapproche  de  celui  d'un  héros  attique  qui  était  l'éponyme  du 
hourg  de  Mélainai;  or,  une  très  ancienne  ville  du  même  nom 
existait  en  Arcadie.  Mélanthios  pourrait  donc  être,  comme  Opaon, 
le  nom  d'une  vieille  divinité  arcadienne  dont  le  culte  fut  trans- 
féré à  Chypre  et  confondu  avec  celui  d'Apollon. 

M.  Clermont-Ganneau  fait  remarquer  que  l'inscription  commu- 
niquée par  M.  Reinach  n'est  pas  inconnue  ;  une  copie  très  exacte 
en  a  été  publiée,  il  y  a  plusieurs  années,  dans  un  volume  pos- 
thume de  M.  Colonna-Ceccaldi,  Monuments  antiques  de  Chypre. 
Ce  jeune  et  regretté  savant  a  rendu  à  l'archéologie  cypriote  de 
grands  services;  M.  Clermont-Ganneau  tient  à  les  rappeler  au 
souvenir  de  la  Compagnie.  Le  même  volume  contient  aussi  une 
autre  inscription  dédiée  au  même  Opaon  Mélanthios.  Colonna- 
Ceccaldi  avait  pressenti  la  vraie  nature  de  ce  personnage  divin, 
aujourd'hui  mise  en  pleine  lumière  par  M.  S.  Reinach.  Il  pro- 
posait d'y  voir  un  héros  grec,  dorien,  colonisateur  de  Chypre. 


SÉANCE  DU    28    AOUT. 

M.  .Tohn  Evans,  président  de  la  Société  des  antiquaires  de  Lon- 
dres, correspondant  de  l'Académie,  étant  présent  à  la  séance,  le 
Président  lui  souhaite  la  bienvenue. 


—  2:)9  — 

M.  Wallon,  seci-elaiie  perpéluol ,  par  une  lelUe  quil  adresse 
au  Président,  inlormc  TAcademie  qu'il  va  prendre  un  congé  de 
(quelques  semaines,  durant  lequel  il  sera  suppléé  parMM.  Delisle 
et  Deloche. 

Il  est  donne  lecture  d'une  lettre  de  M.  Douay,  de  Nice,  qui 
offre  à  l'Académie  une  note  qu'il  a  rédigée  sur  La  philologie  améri- 
caine et  riiisloire  précolombienne. 

Le  Président  rappelle  que  depuis  la  mort  de  M.  Charles  Nisard, 
membre  libre,  il  s'est  écoulé  plus  d'un  mois.  L'Académie,  dit-il, 
doit  être,  aux  termes  de  son  règlement,  consultée  sur  la  question 
de  savoir  s'il  y  a  lieu  de  remplacer  notre  regretté  confrère. 

Il  est  procédé  au  scrutin  sur  cette  question,  qui  est  résolue  par 
l'alfirmative,  à  la  majorité  des  membres  présents. 

Quant  à  la  date  à  laquelle  il  sera  procédé  à  la  nomination  du 
successeur  de  M.  Ch.  Nisard,  il  est  décidé  qu'elle  sera  fixée  ulté- 
rieurement. 

M.  Le  Blant  lit  une  note  intitulée  :  Les  songes  et  les  visions  des 
martyrs. 

Le  monde  ancien,  dit  notre  confrère,  croyait  à  la  valeur  des 
visions  de  la  nuit;  on  s'ingéniait  à  en  chercher  le  sens.  Le 
triomphe  du  christianisme  ne  changea  rien  à  cette  part  des 
vieilles  croyances.  Comme  la  littérature  païenne,  la  littérature 
chrétienne  des  premiers  siècles  est  pleine  de  récits  de  songes  et 
d'apparitions  nocturnes.  Dans  l'une  comme  dans  l'autre,  ces  ré- 
cits présentent  les  mêmes  traits  caractéristiques.  Qu'un  dieu  de 
la  fable  se  montre,  à  la  faveur  des  illusions  du  sommeil,  à  un 
païen,  ou  le  Christ  à  un  chrétien,  la  figure  divine  est  toujours  de 
taille  gigantesque;  toujours  elle  est  environnée  d'une  lumière 
éclatante.  M.  Le  Blant  développe  ce  parallèle  et  cite,  à  l'appui 
des  idées  qu'il  met  en  lumière,  un  grand  nombre  de  passages 
empruntés   aux   actes  des   martyrs   et   aux  écrits  des  Pères   de 

l'Église. 

M.  Clermont-Ganneau  propose  des  identifications  géographiques 
pour  diverses  localités  de  la  Palestine,  qui  figurent  dans  des  do- 
cuments de  l'époque  des  croisades  et  dont  l'emplacement  n'avait 
pu  être  déterminé  jusqu'ici,  ou  ne  l'avait  été  que  d'une  façon 


—  260  — 

contestable.  Ces  localités  appartiennent  à  la  seigneurie  d'Arsur 
ou  Arsoûf,  ville  importante  de  la  côte,  située  au  nord  de  Jaffa. 

Par  un  acte  en  date  du  mois  de  juin  12/n  ,  Jean  d'ibelin,  sei- 
gneur d'Arsur,  cède  au  grand  maître  de  THôpital  de  Saint-Jean 
de  Jérusalem  des  moulins  et  des  terrains,  situés  dans  une  cfile75, 
insula,  au  lieu  appelé  Très  Pontes,  près  de  deux  ruisseaux  qui 
descendent  de  Jorjilia  (variante  :  Jorjilra)  et  devant  une  colline 
connue  sous  le  nom  de  toro  Jilie  de  Comar.  Cette  «  île  v ,  pense 
M.  Clermont-Ganneau,  n'est  autre  que  la  presqu'île  située  au 
confluent  de  trois  cours  d'eau  dont  la  réunion  forme  le  Nahr 
el-'Audja,  et  dont  la  traversée  successive  exigeait  la  présence  de 
trois  ponts.  L'un  de  ces  ponts  existe  encore  sur  le  cours  d'eau 
central,  ainsi  qu'une  partie  des  moulins.  Jorjilia  (la  leqonJorjib-a 
doit  être  rejetée  comme  fautive)  est  un  village  qui  porte  encore 
aujourd'hui  le  nom  de  Djildjoûlia  ( Lî^:^^::^ )  et  d'où  descendent 
à  la  fois  l'un  des  cours  d'eau  en  question  et  un  de  ses  affluents. 
Quant  au  toro  fuie  de  Comar,  on  doit  voir  dans  ce  nom  une  alté- 
ration de  celui  du  Tell  el-Mokhmâr  (^l.«^iJo),  colline  qui  do- 
mine la  presqu'île  et  au  pied  de  laquelle  passe,  en  effet,  le 
cours  d'eau  venant  de  Djildjoûlia.  D'après  les  habitudes  de  tran- 
scription constatées  dans  les  chartes  de  la  Terre  Sainte,  le  nom 
de  Tell  cl-Mokhmâr  a  dû  être  rendu  primitivement  par  tj^H^l- 
tttOCmar,  fdmOCOmar,  ou  quelque  forme  de  ce  genre,  d'oii 
une  fausse  lecture  aura  fait  ftU^^CCOtttât. 

Dans  un  autre  acte,  en  lanoue  française ,  daté  de  1 26 1  et  relatif 
également  aux  dépendances  de  la  seigneurie  d'Arsur,  il  est  question 
d'un  cflac  de  Catorie^i. 

M.  Rey  a  pensé  qu'il  s'agissait  de  la  Birket  Ramadhan  et 
M.  Rohricht  de  la  Birket  'Ata,  deux  étangs  situés,  l'un  et  l'autre, 
beaucoup  trop  loin  d'Arsoûf,  daus  la  direction  du  nord,  ce  dernier 
surtout,  qui  appartient  certainement  à  l'ancien  territoire  du  comté 
de  Césarée. 

M.  Clermont-Ganneau  signale  l'existence,  tout  près  d'Arsoûf, 
sur  la  côte,  d'un  vaste  marais,  jadis  relié  à  la  mer  par  un  ancien 
canal  souterrain,  de  i65  mètres  de  longueur,  creusé  dans  le  roc; 


—  2G1   — 

c'est  la  Bahrel  Qaloûriè  (aj;^  »j^)-  ^^  ^^i^  remarquer  que 
cfCatorier'  est  ia  transcri])tioii  litléraie  de  Qatoûriè,  iù^^ki,  de 
même  que  kIacv  est  la  tratluction  exacte  de  iL>?.  Uidentifioation 
ne  peut  donc  laisser  place  à  aucun  doute.  La  Bahrct  Qatoûriè 
paraît  tirer  son  nom  de  celui  d'une  localité'  situe'e  tout  près  du 
lac  et  appelée  Qantoûr  (jj^jkAi);  la  suppression  ou  l'assimilation  de 
la  nasale  est,  en  eflet,  un  phénomène  bien  connu  dans  les  langues 
sémitiques. 

M.  Clermont-Ganneau  croit  reconnaître  à  ce  nom  de  Qantoûr 
une  physionomie  grecque  ou  latine;  il  s'appuie  sur  l'analogie 
de  i-kjLi,  qantara,  rrpont^,  qui  vient  de  tiévTpov,  et  il  se  demande 
s'il  lauch-ait  \oir  dans  Qantoûr  une  délormation  du  latin  cantarus, 
pour  ca7itharns'^\  régout,  conduit  pourTeaui^,  désignant  le  canal 
d'écoulement;  ou  bien  une  transcription,  qui  serait  très  exacte,  de 
centurio,  xevrouptcov,  réminiscence  de  l'origine  et  de  la  qualité  du 
personnage  chargé  peut-être  d'exécuter  ce  travail  d'art.  Une  in- 
scription delaNabatène'^^  mentionne  unprw»p/?flnMs  comme  con- 
structeur d'un  réservoir.  Une  inscription  bilingue  latine  et  palmy- 
rénienne  d'Afrique  ^^^  nous  montre  le  mot  centaria  transcrit  Nnt]p, 
ce  qui  tend  à  justifier  l'équivalence  admise  par  M.  Clermont- 
Ganneau  entre  Qantoûr  et  Qatoûriè  et  à  rattacher  celte  double 
forme  au  mot  centurio.  Le  nom  d'el-Qantoûr  se  retrouve  dans  la 
toponymie  de  l'Algérie,  où  ia  domination  romaine  a  laissé  tant 
de  Iraces;  c'est  celui  d'une  localité  située  au  nord  et  non  loin 
de  Constanline. 

M.  Ch.-Éni.  Ruelle  commence  la  lecture  d'un  mémoire  sur 
Damascius,  son  traité  des  premiers  principes. 


SÉANCE  DU   3o   AOÛT. 

M.  Pavet  de  Courteille  lit,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Paul  Kiraly, 

(')  L'existence  de  celle  forme  hypothétique  cantarus  serait  nécessaire  pour  jus- 
tilicr  l'orthographe  -jt^:».  le  b  étant  le  représentant  normal  du  t  ou  du  (,  et  le 
^  celui  du  0  ou  du  ih.  Cf.  d'ailleurs  canlcrius  et  cantherius. 

'•■->   Waddinijlon,  Inscr.  gr.  et  lai.,  n"  1968. 

W   L.  Renier,  Inscr.  rom.  de  l'Algérie,  n"  1689. 


—  262  — 

prolesseui'  à  TEcole  normale  supérieure  de  Budapest,  un  frag- 
ment intitulé  :  L'écriture  hunno-scythique. 

Ce  mémoire  est  accompagné  du  fac-similé  et  de  la  transcription 
de  la  Aingt-huitième  page  du  manuscrit  connu  sous  le  nom  de 
codex  Karacsay. 

Le  savant  professeur  commence  par  établir  que  l'écriture  hon- 
groise proprement  dite,  employée  dans  le  manuscrit  en  question, 
a  été  remplacée  dès  le  règne  de  saint  Etienne  par  l'écriture  la- 
tine, qui  l'a  complètement  supplantée.  Il  s'ell'orce  ensuite  de  com- 
battre l'opinion  de  ceux  qui  nient  l'authenticité  An  codex  Karacsay . 
Il  fait  appel  aux  savants  français,  dont  il  invoque  le  jugement 
dans  cette  question  dilïîcile. 

M.  Geffroy  dépose  sur  le  bureau  de  l'Académie  le  rapport  ré- 
digé par  M.  Gselî,  membre  de  l'École  française  de  Rome,  de 
troisième  année,  à  la  suite  des  fouilles  quïl  a  dirigées  pendant 
ces  derniers  mois  à  Vulcit^'. 

On  sait  que  ces  fouilles  ont  valu  à  M.  Gsell,  sur  la  propo- 
sition de  l'Académie,  la  médaille  de  la  Société  centrale  des  ar- 
chitectes de  France.  M.  GelTroy  saisit  cette  occasion  d'exprimer  les 
remerciements  de  l'Ecole  française  de  Rome  envers  S.  Exe.  le  prince 
Torlonia,  qui  a  bien  voulu  confier  à  l'École  la  conduite  des 
fouilles  dans  sa  propriété  de  Musignano,  de  laquelle  dépend 
la  nécropole  étrusque  de  Vulci.  M.  Gsell  décrit  en  détail 
i5o  lombes  explorées  par  lui;  il  étudie  la  construction  de  cha- 
cune d'elles,  les  diverses  sortes  de  fabrication  des  fragments  con- 
servés. C'est  à  l'aide  de  pareils  catalogues  que  l'on  parviendra  à 
constituer  dans  l'étude  des  antiquités  étrusques  une  chronologie 
relative. 

M.  Ch.-Em.  Ruelle  continue  la  lecture  de  son  mémoire  intitulé  : 
Damascius ,  son  traité  des  premiers  pnncipes. 

Les  écoles  néoplatoniciennes  d'Alexandrie  et  d'Athènes  ont 
produit  plusieurs  travaux  sur  le  Parménide  de  Platon  et  sur  la 
question  des  premiers  principes  (l'un,  l'un-être,  l'intellect,  etc.) 
qui  en  est  le  sujet.  Une  nous  reste  que  trois  de  ces  écrits  :  iecom- 

(')  Voir  aux  Communications,  n"  XXII  (p.  265-369). 


—  -if)  3  — 

lucnlaire  dcProclus,  lo  complément  anonyme  de  ce  commentaire, 
que  M.  Ruelle  propose  d'attribuer  à  Olympiodore  le  jeune,  et  le 
texte  qui,  dans  le  manuscrit  prototype  [Marcianus  a^G,  à  Venise, 
du  w"  ou  du  x*'  siècle),  porte  en  suscription  :  Danmscius,  Doutes  et 
solutions  sur  les  premiers  principes  {zrep)  àpywv),  et  en  souscription 
finale  :  Doutes  et  solutions  sur  le  Parménide  de  Platon.  Ce  prototype 
est  affecté  vers  le  milieu,  comme  Ta  dû  être  son  orifjinal ,  d'une 
lacune  indiquée  par  plusieurs  feuillets  blancs.  Delà  deux  opinions 
divergentes  sur  la  composition  du  texte  :  Tune,  dont  le  dernier 
représentant  est  I\l.  Emile  Heitz  et  d'après  laquelle  le  prototype 
contient  deux  ouvrages  distincts,  mutilés  à  leur  point  de  jonction; 
l'autre,  soutenue  par  l'auteur  de  la  communication,  qui  conclut  à 
l'unificalion  du  texte,  lequel  aurait  déjà  été  dédoublé  dans  l'ori- 
ginal du  prototype.  Il  se  fonde  sur  la  corrélation  constante  qu'il 
croit  voir  et  (ju'il  montre  entre  le  texte  intégral  contenu  dans  les 
manuscrits  et  le  dialogue  du  Parménide,  dont  il  retrouve  l'inter- 
prétation, page  par  page,  d'ua  bout  à  l'autre  de  ce  texte. 

M.  Ruelle  donne  une  notice  des  vingt-neuf  manuscrits  dullepi 
àpywv,  suivie  de  leur  stemma.  Il  fait  ensuite  une  analyse  succincte 
du  traité,  il  en  indique  l'importance  pour  l'histoire  de  la  philo- 
sophie et  de  la  mvtliologie,  les  rapports  avec  le  commentaire  de 
Proclus  sur  le  Parménide,  la  Théologie  platonique  du  même,  et 
avec  les  écrits  conservés  ou  perdus  de  Platon,  de  Porphyre  et  de 
Jamblique.  Un  grand  nombre  de  passages  de  Damascius,  où  sont 
visés  ces  auteurs  et  plusieurs  autres,  fourniraient  un  nouveau 
contingent  assez  important  aux  Fragmenta  philosophorum  grœco- 
ncm  de  Mullarh. 

M.  Ruelle  fera  paraître,  dans  quelques  jours,  la  partie  restée 
inédiie  du  Ilspï  àp)(ôjv. 

M.  J.  de  Morgan  signale  à  l'Académie  l'existence,  au  Caucase 
et  dans  l'Arménie,  d anneaux-monnaies  présentant  les  poids  des 
mesures  assyriennes,  dont  l'étalon  est,  suivant  M.  Oppert,  le  sicle 
de  8  gr.  417. 

Dans  les  nombreuses  nécropoles  préhistoriques  que  M,  de  Mor- 
gan a  eu  l'occasion  de  fouiller  dans  l'Arménie  russe,  les  tombes 
renfermaient  des  îinneaux  en  grand  nombre.  Ces  bracelets  pré- 


—  'W-x  — 

sentent  tous  des  multiples  du  sicle  assyrien,  y  compris  la  mine  de 
60  sicles  {hok  gr.),  qui  jouait  dans  rantiquité  le  rôle  de  la  livre 
encore  usitée  de  nos  jours. 

M.  Alexandre  Bertrand  et  M.  de  Morgan  ont  fait  des  pese'es  sur 
les  bracelets  du  muse'e  de  Saint-Germain.  Ils  ont  retrouvé  les 
mêmes  caractères  dans  ceux  qui  ont  été  rapportés  du  Caucase 
par  M.  E.  Chantre,  mais  ils  n'ont  rien  trouvé  de  semblable  dans 
les  bracelets  de  bronze  européens  antérieurs  à  Tère  historique. 

L'usage  de  compter  des  objets  d'un  poids  déterminé,  au  lieu 
de  peser  chaque  fois  les  lingots,  était  donc  en  vigueur  dans 
l'Asie  antérieure,  dit  M.  de  ^Morgan,  bien  avant  l'invention  des 
monnaies  lydiennes.  En  Europe,  au  contraire,  il  ne  semble  pas 
avoir  existé  aux  époques  préhistoriques. 


-JG-)  — 


(<OMMUMCVTIOîV. 


N°  XXII. 


NOTE  SUR   LES  FOUILLES    DE   VULCI,   PRESENTEE    PAR  M.   GEFFROY, 

DIRECTEUR  DE  L'ECOLE  FRANÇAISE    DE    ROME. 

(séance  du  3o  août  1889.) 

J'ai  riionneur  de  déposer  sur  le  bureau  de  l'Académie  un 
rapport  étendu  de  M.  Gsell,  membre  de  l'Ecole  française  de 
Rome,  sur  les  fouilles  qu'il  vient  de  diriger  dans  la  nécropole 
étrusque  de  Vulci,  et  qui  lui  ont  valu  déjà,  sur  la  proposition 
de  l'Académie,  la  médaille  de  la  Société  centrale  des  archi- 
tectes de  France.  Ce  travail  se  recommande  doublement,  par 
les  circonstances  auxquelles  il  se  rapporte,  et  par  la  méthode 
dont  il  témoigne. 

Au  mois  de  février  dernier,  Son  Excellence  le  prince  Tor- 
lonia ,  désireux  de  tenter  de  nouvelles  fouilles  dans  son  do- 
maine de  Musignano,  d'où  dépend  la  nécropole  de  Vulci, 
voulut  bien  confier  ce  travail  à  l'Ecole  française  de  Rome ,  qui 
lui  en  est  demeurée  très  reconnaissante.  Il  offrait  de  supporter 
toutes  les  dépenses,  les  objets  trouvés  devant  lui  appartenir. 
L'École  se  réservait  la  faculté  de  publier  dans  ses  Mélanges  la 
relation  et  le  commentaire  critique. 

Aux  termes  de  l'édit  Pacca,  du  7  avril  1820,  seul  texte 
législatif  pour  ce  qui  concerne  les  fouilles  à  Rome  et  dans  les 
anciennes  provinces  pontificales,  le  Prince  demanda  l'autori- 
sation du  Gouvernement  italien,  en  déclarant  la  particq)ation 
de  l'École  française  de  Rome.  Aux  termes  des  règlements  admi- 
nistratifs, la  Surintendance  des  fouilles  désigna  deux  gardes 
qui  durent  résider  à  Musignano  pendant  toute  la  durée  des 


—  :266  — 

travaux.  On  fit  plus.  La  doctrine  de  l'administration  italienne 
paraît  être  désormais  que  nulle  fouille  ne  se  puisse  faire  en 
aucun  lieu  d'Italie  sans  qu'à  l'autorisation  et  à  la  surveillance 
oflicielle  ne  s'ajoute  aussi  la  direction  ofTective ,  exercée  par 
un  agent  immédiat  du  Gouvernement.  Il  est  très  vrai  que, 
dans  le  passé,  les  fouilles  ont  été  pratiquées  trop  souvent  en 
Italie  sans  autres  mobiles  que  la  cupidité  ou  une  curiosité  peu 
soucieuse  des  intérêts  de  la  science.  On  comprend  que  des 
efforts  soient  tentés  pour  mettre  un  terme  à  ce  qui  était  de- 
venu parfois  un  véritable  pillage.  La  Surintendance  entend 
qu'aussitôt  un  projet  de  fouille  déclaré,  un  de  ses  inspecteurs 
se  rende  sur  les  lieux,  examine,  décide  comment  on  devra 
procéder,  et  commence  même  les  travaux.  Les  requérants 
seront  ensuite  admis  per  studiare.  On  a  agi  de  la  sorte,  peu 
avant  la  demande  du  prince  Torlonia,  avec  l'Institut  alle- 
mand de  correspondance  archéologique  de  Rome,  qui  souhai- 
tait de  faire  des  fouilles  à  Anagni  :  un  inspecteur  y  fut  envoyé 
tout  d'abord;  il  mit  la  première  main  aux  travaux,  et  l'on 
donna  ensuite  aux  archéologues  allemands  l'autorisation  de 
venir  studiare. 

Conformément  à  ces  résolutions,  la  Surintendance  envoya 
immédiatement  à  Vulci  M.  le  comte  Cozza ,  architecte  et  des- 
sinateur habile,  bien  connu  pour  la  part  qu'il  a  prise  récem- 
ment aux  belles  fouilles  de  Cività  Castellana ,  en  suite  desquelles 
M.  le  professeur  Barnabei  a  si  savamment  disposé  le  nouveau 
musée  de  la  lulla  di  Papa  Giulio.  M.  le  comte  Cozza  resta  une 
quinzaine  de  jours  à  Vulci,  laissant  à  M.  Gsell  la  responsabi- 
lité entière.  M.  Gsell  dut  envoyer  à  M.  le  commandeur 
Fiorelli  (l'édit  Pacca  contenait  déjà  cette  prescription)  un 
rapport  hebdomadaire,  ou  mensuel  tout  au  moins,  lequel 
était  résumé  dans  les  Notizie  degli  Scnvi  publiées  par  le  Gou- 
vernement. 

iM.  Gsell  a  été  secondé  pendant  (oufe  la  compagne  par  le 


—  "267  — 

sieur  Marcolliani,  le  mémo  saivatore  fort  expérimente  que  feu 
le  prince  dom  Alessandro  Torlonia  avait  employé  dans  toutes 
ses  dernières  fouilles.  Les  travaux,  commencés  aux  premiers 
jours  de  lévrier,  ont  duré  sans  interruption  notable,  avec 
une  vingtaine  d'ouvriers,  jus(pi'au  i""  juin,  c'est-à-dire  pen- 
dant quatre  mois,  au  cours  desquels  M.  Gsell  a  témoigné 
d'une  réelle  habileté  scientifique  et  pratique,  d'une  persévé- 
rance et  d'une  fermeté  à  l'épreuve  de  bien  des  difficultés  et 
de  bien  des  obstacles. 

L'Académie  comprendra  facilement  que  son  rapport,  bien 
qu'il  compte  déjà  3oo  pages  et  une  cinquantaine  de  petits  des- 
sins ou  plans  dressés  par  lui-même,  ne  puisse  pas  encore  être 
complet.  En  elTet,  ce  rapport  contient  la  description  des 
i5o  tombes  explorées;  mais  il  faut  attendre  que  les  fragments 
des  principaux  vases  découverts  soient  réunis  suivant  les  in- 
structions laissées  par  M.  Gsell  au  sieur  Marceliianl;  il  faut 
attendre  que  ces  vases,  a[)portés  à  Rome  dans  le  musée  Tor- 
lonia, soient  rendus  à  l'étude,  et  que  nous  ayons  eu  le  temps 
de  les  faire  dessiner,  afin  de  joindre  au  commentaire  critique 
des  représentations  figurées,  tout  à  fait  nécessaires. 

La  nécropole  de  Vulci  a  été  bien  souvent  exploitée  et  dé- 
pouillée. En  1828,  Lucien  Bonaparte  en  a  tiré  cette  vaste 
moisson  de  vases  magnifiques  dont  se  sont  enrichis  plusieurs 
grands  musées  de  l'Europe.  Noël  Desvergers  et  Alessandro 
François  y  ont  trouvé  en  1  858-1 8.5t)  les  célèbres  peintures 
murales  représentant,  entre  autres  scènes,  l'histoire  de  Mas- 
tarna.  Enfin  le  prince  dom  Alessandro  Torlonia,  de  1880 
à  1880,  y  a  pratiqué  des  fouilles  qui  lui  ont  livré  encore 
beaucoup  (ro])jets. 

Il  n'est  donc  pas  étonnant  que  les  dernières  recherches 
n'aient  pas  obtenu  en  très  grand  nonibre  les  morceaux  de  pre- 
mier ordre.  Mais  une  science  attentive  (>t  éclairée  sait  niain- 
tenant  allachci  un  grand  prix   à  certains  traits  qu'on  d<'(lai- 

wii.  iç) 


—  268  — 

giiait  trop  naguère.  Tels  sont,  à  Vnlci,  les  divers  systèmes  de 
construrtion  des  sé[)ultures  et  les  divers  degrés  de  fabrication 
des  fragments  conservés  dans  ces  sépultures.  Les  archéologues 
qui  ont  étudié  dans  ces  derniers  temps  les  antiquités  étrusques 
sont  parvenus,  comme  on  sait,  à  distinguer  les  tombes  n  pozzo, 
qui  sont  les  j)li]s  anciennes  et  attestent  l'incinération,  les 
tombes  n  fossa,  où  les  corps  ont  été  ensevelis,  les  tombes  a 
caméra,  les  tombes  a  cassone,  les  tombes  a  strada,  etc.  De 
plus,  il  est  telle  nécropole  étrusque  pour  laquelle  il  a  été 
déjà  possible  de  comparer  des  séries  assez  complètes  de  frag- 
ments empruntés  à  chacune  de  ces  sortes  de  tombes;  on  a  pu 
constater  un  développement  continu  dans  la  fabrication  des 
vases  même  les  plus  humbles,  dans  ce  qu'on  peut  appeler  cet 
art  primitif.  Une  chronologie  relative  a  pu  commencer  ainsi 
de  s'établir. 

Il  Y  avait  donc  lieu  de  penser  qu'en  dressant  un  catalogue 
détaillé,  patient,  exact,  du  principal  contenu  de  chacune  des 
i5o  tombes  explorées  à  Vulci,  on  donnerait  à  la  science  les 
éléments  d'une  étude  sur  cette  nécropole  qui  viendrait  à  l'appui 
de  l'étude  commencée  par  M.  Helbig  sur  la  nécropole  de  Cor- 
neto.  C'est  ce  qu'a  voulu  faire  M.  Gsell.  Il  dit  avec  un  soin 
minutieux  les  conditions  de  construction,  la  disposition  des 
chambres  sépulcrales,  les  mesures  des  portes  et  des  parois;  il 
accompagne  ces  indications  de  très  nombreux  plans  figurés.  Il 
décrit,  également  avec  dessins  à  l'appui,  les  diverses  sortes 
de  fibules,  les  ustensiles  et  les  ornements.  Il  énumère  quelles 
diverses  espèces  de  vases  les  fragments  retrouvés  lui  révèlent. 
Il  donne,  en  un  mol,  comme  la  photographie  de  chaque 
tombe, sans  négliger,  bien  entendu,  la  description  spéciale  des 
beaux  vases  qu'il  faut  maintenant  reconstruire.  Si  l'œuvre 
s'achève,  les  fouilles  de  Vulci  auront  donné  à  S.  E.  le  prince 
Torlonia  une  série  considérable  d'objets  étrusques  scientifi- 
quement disposés  et  commentés. 


—  •2(\\)  — 


En  attendant,  le  rapport  de  M.  Gsell  est  un  vaste  catalo{,Mio 
critique  et  descriptif,  ex(^rut6  avec  rigueur.  L'Académie  jugera 
de  la  valeur  et  de  la  portée  de  ce  sérieux  effort. 


APPKNDICl^  A    m. 


rapport  du  secretaire  perpetuel  de  l'academie  des  inscriptions  et  relles- 
lettres,  sur  les  travaux  des  cobimissions  de  publication  de  cette  aca- 
demie pexdant  le  premier  semestre  de  1889,  lu  lk  i9  juillet  1889. 

Messieirs, 

Notre  pi-dcionsc  collection  des  Inscriptions  sémitiques  s'est  enrichie  au 
commencement  (lu  dernier  semestre  d'un  fascicule  nouveau:  le  i"  de  la 
h'  partie,  Inscriptions  hinujarites.  Il  embrasse  soixante -neuf  grands 
textes,  dont  plusieurs  historiques,  trouvés  à  Sàna  et  aux  environs,  et 
provenant  en  {i[i-ande  partie  des  missions  dont  TAcade'mie  avait  chargé, 
soit  M.  Joseph  ILiie'vy,  soit  M.  Giaser. 

De  la  i""  j)artie  (Inscriptions  phéniciennes) ,  le  i"  fascicule  du  tome  II 
est  en  voie  de  publication.  Les  feuilles  i  à  3  sont  en  pages:  le  reste  du 
manuscrit  est  prêt  à  être  envoyé  à  l'impression.  La  Commission  espèrç 
pouvoir  présenter  ce  nouveau  fascicule  à  l'Académie  avant  la  fin  de 
Tannée. 

Quant  à  la  -3"  partie  {Inscriptions  araméennes),  les  feuilles  i  à  i5, 
qui  formeraient  à  elles  seules  plus  d'un  fascicule  ordinaire,  sont  en  bon 
à  tirer.  La  fin  du  fascicule  est  tout  entière  en  placards.  La  Commission 
compte  également  donner  avant  la  fin  de  l'année  ce  fascicule,  qui  for- 
mera presque  un  demi-volume  et  sera  d'un  rare  intérêt.  Il  comprendra 
toutes  les  inscriptions  araméennes  anciennes,  depuis  les  pierres  gravées 
et  les  inscriptions  que  Ion  trouve  en  Assyrie,  soit  sur  des  tablettes  de 
terre  cuite,  soit  sur  des  poids  en  forme  de  lions,  jusqu'aux  papyrus  ara- 
méens  d'Egypte  qui  correspondent  a  l'époque  persane. 

Sur  la  proposition  de  la  Commission  des  inscriptions  sémiti(]iies,  notre 
savant  confi'ère  M.  Clermont-Ganneau  apportera  désormais  son  concours 
aux  travaux  de  la  Commission. 

Historiens  des  Croisades.  M.  de  Mas  Latrie,  (pii  a  repris  de  M.  Hiaiil. 

'9- 


—  270  — 

pour  l'achever,  ie  tome  V  des  Historiens  occidcntmix ,  a  donné  imc  forte 
im|nilsion  à  cette  œuvre  si  longtemps  retardée  par  la  maladie  de  noire 
regrctlé  confrère;  cinquante  feuilles  de  ce  volume  sont  aujourd'hui  tirdcs, 
dix  en  bon  à  tirer  et  toute  la  fin  du  volume  en  placards. 

M.  de  Mas  Latrie  poursuit  en  même  temps,  avec  notre  confrère 
M.  Schefer,  la  publication  du  tome  II  des  Historiens  arméniens  des  Croi- 
sades. Le  Directorium  de  Brochard  est  à  peu  près  imprimé,  texte  latin 
et  texte  français;  toute  la  copie  qui  doit  achever  le  volume  est  mise  en 
état  pour  Fimpi'ession. 

Le  tome  XXIV  des  Historiens  de  France  suit  une  marche  régulière  : 
feuilles  i-oi  tirées,  82-/12  en  bon  à  tirer  et  une  cinquantaine  do  placards 
en  correction. 

Dans  la  suiti^  de  nos  Mémoires,  la  lacune  accusée  par  la  publication 
anticipée  du  tome  XXXIII,  1"  partie,  est  à  la  veille  de  se  combler.  Le 
tome  XXXII,  2"  partie,  contient  déjà  sept  mémoires,  mais  on  en  attend 
un  ou  deux  autres  pour  le  coni})léter. 

Le  recueil  ouvert  aux  mémoires  des  savants  étrangers  à  l'Académie  ne 
compte  toujours  que  ti'ois  mémoires,  mais  ils  forment  plus  de  la  moitié 
d'un  volume. 

Notices  et  extraits  des  manuscrits.  La  section  réservée  exclusivement 
aux  études  orientales  avant  le  tome  XXX  se  complétera  incessamiuent. 
M.  Barth  vient  de  reprendre,  sous  la  direction  de  notre  confrère  M.  Se- 
nart,  la  j)ublication  des  Inscriptions  khmer  de  Campa,  interronqiue  par  la 
mort  si  cruelle  de  notre  confière  M.  Bergaigne.  Les  placards  1  à  5i  du 
tome  XXVII,  1"  partie,  ont  été  envoyés  à  l'imprimerie  pour  être  mis 
en  pages. 

Le  tome  XXIX,  1"  partie,  qui  commence  avec  les  Documents  épigra- 
phirjues  recueillis  dans  le  Nord  de  l'Arabie  par  M.  Doughty,  s'achèvera 
avec  une  notice  de  M.  Amélineau,  dont  huit  feuilles  sont  déjà  tirées, 

La  section  nouvelle  qui,  à  partir  du  tome  XXXI,  ne  distingue  plus 
entre  les  genres  d'études,  s'accroît  rapidement.  Nous  en  sonnues  au 
tome  XXXIII,  i"^'  partie,  qui  comprend  cinq  articles  et  dont  trente 
feuilles  sont  tirées. 

pjidn  notre  Histoire  littéraire  de  la  France  ne  nous  a  pas  plus  tôt  donné 
iu\  volume  qu'elle  nous  en  promet  un  nouveau  :  ce  sera  le  tome  XXXI, 
dont  treize  feuilles  sont  tirées,  cinq  bonnes  à  tii'cr,  et  la  copie  préparée 
pour  le  reste  du  volume, 

H.  WALLON, 

Secrétaire  perpcluel. 


—  21\   — 
LIVRES  OFFEUTS. 


SÉANCE   DU   5  JUILLET. 

M.  Mk.nvnt  il  la  parole  pour  un  hommage: 

ffj'ai  riionneiir  de  présenter  à  rAcaddmie  un  livre  de  M.  Saycc,  inli- 
lulé  :  The  Hiltilcs ,  ihe  story  of  a  forgoUcii  empire  (  Londres ,  1888,  in- 1 G , 
n°  XII  des  By-paths  of  Bible  knoivledgc). 

ffJe  vous  ai  parlé  dernièromcnl  de  cet  empire  oublié,  des  documents 
dont  on  dispose  pour  en  reconstituer  riiisloiio,  des  travaux  accomplis 
pour  d(:cbiirrer  les  inscriptions  qui  le  feront  connaître,  et  enfin  des  essais 
d'interprétation  auxquels  je  me  suis  livré.  Je  n'ai  donc  pas  à  vous  rap- 
peler quel  est  ce  peuple,  dont  on  trouve  les  traces  dans  toute  l'Asie 
Mineure,  depuis  les  bords  de  l'Oronte  jusqu'au  Pont-Euxin,  depuis 
Karkemis  jusqu'à  la  mer  Egée.  Au  nond)rc  des  savants  qui  se  sont 
occupés  des  études  provorpées  par  l'écriture  et  la  langue  encore  inconnue 
des  Ilétéens,  M.  Sayce  est  celui  qui  aura  le  mérite  incontestable  d'avoir 
présenté  le  premier  ime  tentative  d'interprétation  vraiment  scientilîquc. 
Pour  lui  rendre  pleinement  justice,  je  citerai  ses  propres  paroles  lors- 
qu'il se  fait  juge  de  ses  travaux  :  rrlls  ne  mènent  pas  bien  loin,  dit-il, 
rmais  il  n'y  a  pas  lieu  de  s'en  étonner,  lorsqu'on  considère  le  petit 
rrnombre  d'inscriptions  dont  on  dispose  et  leur  état  de  mutilation;  d'ail- 
ffleurs,  un  commencement  de  déchiffren)ent  vaut  mieux  que  l'absence 
ffde  tout  déchiffrement '''.«  M.  Sayce  a  raison;  mais  je  répondrai  à  cet 
aveu  trop  modeste  que  son  commencement  de  déchiffrement  sera  le 
point  de  départ  d.'  tous  les  travaux  sérieux  qu'on  pourra  désormais 
entreprendre. 

fr  Le  livre  qne  je  vous  présente  n'a  point  la  prétention  de  s'adresser 
au  monde  savant.  C'est  dans  les  Transactions  de  la  Société  d'archéologie 
biblique  et  dans  les  Appendices  du  volume  publié  par  le  regretté  William 
Wright  qu'il  faut  étudier  la  méthode  de  M.  Sayce  et  recueillir  les  résul- 
tats qu'il  a  oblenus.  C(!  livre  a  une  forme  essentiellement  populaii-e:  il  a 
('té  publié  aux  liais  d'une  société  de  propagande  religieuse,  et  il  est  des- 
tiné h.  ap[)eler  l'attention  d'un  grand  j)ublic  sur  une  nouvelle  branche  de 
Ihistoire  de  l'Orient,  qui,  comme  celle  de  IKgypIe  et  de  l'Assyrie,  se 

("   Voir  W.  Wright,  Thn  Empire  nf  llm  Ililtitcx.  p.  179. 


—  '212  — 

relie  aux  études  bibliques.  En  Angleterre,  l'importance  qu'on  accorde  à 
ces  dernières  études  apporte  aux  travaux  des  savants  orientalistes  une 
popularité  qui  permet  de  répandre  et  de  faire  accepter  des  notions  justes 
et  précises  sur  les  découvertes  de  la  philologie  moderne.  C'est  ce  dont 
M.  Savce  a  su  profiter;  aussi  \\  s'est  dispensé  des  notes  et  des  citations 
techniques,  qui  auraient  pu  rebuter  ses  lecteurs,  et  il  a  donné  à  son  ré- 
cit une  forme  à  la  fois  élégante  et  claire,  qui  fera  goûter  tout  l'intérêt 
qui  s'attache  aux  révélations  scientifiques  les  pkis  inattendues,  -n 

M.  E.  Levassedr  présente  à  l'Académie  le  premier  volume  de  son  o\i- 
\rage  sur  La  population  française ,  etc.  (Paris,  1889,  in-8°). 

Cet  ouvrage  relève  de  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques, 
parce  que  la  démographie  est  une  science  sociale,  et  de  l'Académie  des 
sciences,  parce  que  la  statistique  procède  par  des  nombres  et  des  calculs. 
Il  appartient  à  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  par  sa  partie 
historique,  dont  les  treize  chapitres  sont  consacrés  à  l'étude  du  nombre 
et  de  la  répartition  des  habitants  et  de  leur  condition  matérielle,  depuis 
les  populations  primitives  de  la  Gaule  jusqu'en  1789.  M.  Levasseur  a 
communiijué  deux  chapitres  de  cette  partie  à  l'Académie,  et  il  renou- 
velle l'expression  de  ses  remerciements  pour  le  concours  que  plusieurs 
membres  lui  ont  fourni  par  leurs  observations,  faites  ici  en  séance,  ou 
aux  Archives.  Il  ajoute  qu'il  doit  aussi  aux  Archives  nationales,  grâce  aux 
recherches  de  M.  Rocquain,  la  connaissance  de  précieux  documents  qui 
lui  ont  permis  d'établir,  sous  le  règne  de  Louis  XVI,  l'état  des  nais- 
sances, décès  et  mariages  par  bailliages. 

Le  chapitre  xiii  résume  les  hypothèses  par  lesquelles  l'auteur  a  pu 
déterminer  la  population  à  neuf  époques,  sur  le  territoire  actuel  de  la 
France  (528,4oo  kilomètres  carrés).  La  Gaule  barbare  à  l'époque  de 
César  renfermait  environ  6,700,000  habitants;  au  \\"  siècle,  après  la 
mort  de  Charlemagne,  ce  nombre  était  peut-être  de  8  raillions;  au 
XI v'  siècle,  avant  la  guerre  de  Cent  ans,  il  s'était  élevé  jusqu'à  une 
vingtaine  de  millions.  La  guerre  de  Cent  ans  dépeupla  le  territoire;  la 
population  répara  ses  pertes  vers  la  fin  du  règne  de  Charles  VII  et  du- 
rant la  première  moitié  du  xvi'  siècle;  les  guerres  de  religion  lui  furent 
de  nouveau  funestes  et,  une  fois  encore,  elle  se  releva  au  xvii"  siècle 
jusqu'au  temps  de  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes  et  de  la  guerre  de  la 
succession  d'Espagne ,  qui  réduisirent  vraisemblablement  à  1 8  millions  le 
nombre  des  habitants.  Sous  Louis  XV  et  Louis  XVI ,  deux  règnes  relati- 
vement pacifiques,  elle  augmenta  et  M.  Levasseur  estime  qu'en  1789  le 
ombre  était  d'à  peu  près  96  millions. 


—  -21  :\  — 

M,  Levasseiir  l'ail  voir,  à  l'aide  d'une  ligure  de  slalistique  qui  est 
reproduite  en  petit  dans  son  ouvrage,  qu'au  xvin'  siècle  (d'après  Kxpillv. 
1769;  Moheau  et  Lavoisier,  1778  et  1790),  la  proportion  des  enfants 
était  sensiblement  plus  forte  et  celle  des  adultes  sensiblement  moindre 
qu'aujourd'hui  (d'après  les  derniers  recensements). 

M.  Georges  Pekrot  présente  la  publication  intitulée  :  Ecole  française  de 
Rome.  Mélanges  d'archéologie  cl  d'histoire,  9*  année,  fascicules  1  el  9, 
juin  1889  (Rome,  in-8°). 

irLe  premier  fascicule  de  la  neuvième  année  des  Mélanges  d'archéo- 
logie et  d'histoire  a  été  préparé  par  M.  (iefTroy,  qui  a  fondé  ce  recueil 
pendant  son  premier  diroctorat;  l'intérêt  et  la  variétf'  des  articles  qu'il 
renferme  suflisent  à  prouver  que,  malgré  toutes  les  dillicullés  que  ren- 
contre l'impression  à  l'étranger  d'une  revue  comme  celle-ci,  notre  savant 
confrère  est  bien  décidé  à  poursuivre  la  publication  des  Mélanges  et  à 
chercher  tous  les  moyens  d'en  augmenter  la  valeur  scientifique.  Toutes 
les  branches  d'étude  que  cultive  notre  Ecole  de  Rome  sont  représentées 
dans  ce  cahier,  par  des  dissertations  dont  chacune  a  son  mérite  et  apporte 
des  faits  nouveaux.  M.  Wolfgang  Helbig  y  décrit  avec  sa  science  élé- 
gante et  sûre  une  coupe  attique  trouvée  en  Etrurie;  MM.  Audollent  et 
R.  Lanciani  s'y  occupent  de  l'archéologie  romaine,  l'un  du  temple  de 
Jupiter  Capitolin  et  l'autre  du  port  d'Oslie. 

ff  Reprenant  une  tradition  qu'il  avait  inaugurée  jadis,  M.  Gelfroy,  pour 
mieux  faire  connaître  ces  monuments  de  Rome  dont  toutes  les  descrip- 
tions purement  littéraires  ne  donnent  qu'une  idée  si  imparfaite,  fait  appel 
au  concours  de  nos  architectes  de  l'Académie  de  France;  il  saisit  toutes 
les  occasions  de  reproduire  et  de  publier  ces  levés  et  ces  restaurations,  qui 
vont  d'ordinaire  s'ensevelir  dans  les  cartons  des  artistes  ou  dans  ceux  de  la 
bibliothèque  de  l'Ecole  des  beaux-arts,  sans  que  les  archéologues  puissent 
profiter  de  ces  précieux  documents  ou  même  en  soupçonner  l'exist^'iice. 
C'est  ainsi  que,  dans  ce  numéro,  après  un  article  de  M.  Rodolphe  Lan- 
ciani sur  Les  récentes  fouilles  d'Ostie,  la  caserne  des  Vigiles  el  l'Augus- 
teum,  il  donne  une  note  de  M.  Pierre  André,  un  des  pensionnaires  de  la 
Villa  Médicis,  accompagnée  d'un  plan  levé  par  cet  architecte  à  Ostie.  Un 
long  et  curieux  nK-moire  de  M.  H.  Deglane,  ancien  jiensionnaire,  est 
consacré  au  Stade  du  Palatin  et  accompagné  de  nombreux  croquis  dans 
le  texte  et  de  trois  planches  qui  en  montrent  Yétat  actuel ,  la  restaura- 
tion et  les  élévations.  Nous  ne  pouvons  qu'applaudir  à  cet  effort  tenté 
pour  établir  un  lien  entre  l'Ecole  française  et  l'Acadf'inie  de  France  ;  les 
archéologues  tireront    um   grand   profil  de   la  pivimple    publicité  ainsi 


—  27/1  — 

assurée  à  quelques-uns  des  meilleurs  travaux  de  nos  jeunes  archi- 
tectes. 

rr  C'est  à  l'histoire  ancienne  et  à  i'épigraphie  que  se  l'attache  le  mé- 
moire de  M.  Gseli ,  intitulé  :  Chronologie  des  expéditions  de  Domitien  pen- 
dant /'rt?mee  (Ç^.  Les  philologues  et  paléographes  consulteront  les  notes 
de  MM.  Macé  et  Batiffol  sur  Les  fragments  d'Asper  d'après  le  palimpseste 
de  Corbie  el  sm'  Les  manuscrits  grecs  de  Lollino ,  évéque  de  Bellune.  Les 
historiens  du  moyen  âge  et  de  la  Renaissance  ne  seront  pas  moins  heu- 
reux de  trouver  ici  la  suite  des  études  de  M.  Mùntz  sur  Les  arts  à  la  cour 
des  papes;  ils  rencontreront  plus  d'un  renseignement  tout  h  fait  neuf  dans 
la  monographie  dont  le  sujet  a  été  fourni  à  M.  Léon  Gadier  par  Le  loin- 
beau  du  pape  Paul  III  Farnesc.  Enlin ,  avec  M.  Jordan ,  nous  avons  quel- 
ques pages  d'un  livre  sur  l'histoire  politique  du  Milanais  sou?  les  Sforza, 
que  prépare  le  jeune  savant;  il  résume  très  clairement  les  négociations 
auxquelles  la  succession  lombarde  donna  lieu  entre  Florence,  Milan  et 
François  Sforza,  de  \hk^  à  \kho.  Nous  aimons  à  croire  que  le  second 
des  fascicules  annuels  suivra  de  près  le  premier  et  n'offrira  pas  un  moins 
remarquable  choix  d'articles.  i? 

M.  Siméon  Lcce  a  la  parole  : 

ff  J'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Charles 
Joret,  notre  correspondant  à  Aix,  une  brochure  intitulée:  Le  voyageur 
Tavernier {i Sjo-iÔSf)) ,  etc.  (Paris,  1889,  in-8°,  extrait  delà  Retuc  de 
géographie). 

rr  Cette  brochure  complète  heiu-eusement ,  et  même  rectifie,  sur  cer- 
tains points,  l'ouvrage  que  j"ai  eu  l'honneur  de  présenter  naguère  à  la 
Compagnie.  La  découverte  faite  à  la  bibliothèque  de  Hanovre  du  début 
de  la  Défense  de  Chappuzeau,  l'arrangeur  des  Relations  des  six  voyages, 
a  permis  à  l'auteur  de  cette  brochure  d'établir  que  le  célèbre  voyageur 
et  le  coreligionnaire  qui  lui  devait  prêter  le  secouis  de  sa  plume  s'étaient 
connus  beaucoup  pins  tôt  qu'on  ne  le  croit  généralement,  en  même  temps 
que  l'élude  d'un  manuscrit  appartenant  à  notre  savant  confrère  AL  Schel'er 
donnait  à  M.  Joret  la  conviction  que  Tavernier  avait  rédigé  lui-même  de 
véritables  mémoires,  dont  Chappuzeau  s'était  souvent  borné  à  modifier 
l'ordonnance  et  à  revoir  le  slyle.  L'appoint  le  plus  considérable  apporté 
à  la  biographie  de  Tavernier,  dans  la  dissertation  dont  je  fais  hommage  à 
l'Académie,  se  rapporte  au  lieu  de  la  mort  de  cet  infatigable  voyageur. 
Ce  lieu  n'est  ni  Moscou  ni  Copenhague,  suivant  les  deux  opinions  qui 
avaient  eu  cours  jusqu'à  présent,  mais  Smolensk,où  Tavernier  rendit  le 
dernier  soupir  dans  le  courant  de  février  1689,  au  moment  oii  il  s(!  pré- 


'275 


p.-irail  il  eiilrcjUTiulro  un  nouveau  voyage  en  Perse  par  la  Moscovie.  Gela 
résulte  «l'une  lellro  ilun  résilient  suédois  h  Moscou,  datée  du  8  mars 

suivant,  n 

M.  le  marquis  d'Hkrvey  Saint-Denvs  présente,  de  la  part  de  l'au- 
teur, M.  Abcl  des  Michels,  le  i"  fascicule  d'un  ouvrage  intitulé:  Les  an- 
nales impériales  de  l'Annam,  traduites  en  entier  pour  la  première  fois  du 
icxle  chinois  (Paris,  1889,  gr.  in-8°). 

M.  Gaston  Paris  fait  hommage  du  Roman  d'Arles,  texte  provençal, 
publié  en  entier  pour  la  première  J'ois ,  d'après  le  manuscrit  de  M.  Paul 
Arbaud,  par  M.  Gamille  Ghnbaneau,  correspondant  de  l'Institut  (Pai-is, 

i88y.  in-8°). 

M.  L.  Delisle  offre,  au  nom  des  auteui's,  les  deux  publications  sui- 
vantes : 

1°  Cartulaire  de  Mulhouse,  par  M.  X.Mossmann,  tome  V  (Strasbourg 
et  Golmar,  1889,  iu-4°); 

•2°  Parts  en  ij8g,  par  M.  Albert  Cabeau,  correspondant  de  l'institut 
(Paris,  1889,  in-8°). 

M.  ScuEFER  présente  le  a'  fascicule  du  Code  malais  des  successions  et 
du  mariage,  texte  malais,  publié,  traduit  et  annoté  par  M.  Aristide 
Marre  (Paris,  1889,  in-S"). 

M.  Paul  Meyeu  offre  Le  Ma/jré  Dardeqé,  dictionnaire  hcbrcu-ilalien  de  la 
fin  du  xiv"  siècle,  reconstitué  et  transcrit  par  M.  Moïse  Schwab  (Paris, 
'1889,  in-8"). 

SÉANCE   DU    1  9    JUILLET, 

Est  offert  : 

Cultulcabirilorin  Dacia,  par  Tenhari  Antonescu  (Bucarest,  i889,in-8°). 

M.  Boissuvu  présente  le  1"  fascicule  des  Annales  de  l'enseignement 
supérieur  de  Grenoble  (iWcnohU'i,  1889,  in-8"'). 

frGe  recueil  est  pubhé  à  la  lois  par  les  facultés  de  droit,  des  sciences 
et  des  lettres,  et  par  l'école  de  médecine  de  cette  ville;  à  ce  propos 
on  remarquera  que  ces  divers  établissements  d'enseignement  supi-rieur, 
qui,  depuis  le  commencement  du  siècle,  vivaient  séparés  et  à  1  écart 
les  uns  des  autres,  ont  aujourd'hui  une  tendance  manif(>sle  à  se  réu- 
nir et  à  vivre  d'une  vie  commune,  ce  qui  est  un  grand  bien.  Le  fasci- 
cule (pu  est  offert  à  rAca<lémie  est  presque  entièrement  occupé  par  les 
sciences  et  la  médecine,  mais  les  lettres  et  l'érudition  y  occu|)ent  une 
place,  et  il  faut  csi)érer  que  cette  place  deviendra,  dans  la  suite,  plus 
considérable.- 


—  276  — 

M.  Jules  GiRAHD  olFre,  de  la  part  de  M.  Paul  Girard,  maître  de  confé- 
rences à  la  Faculté  des  lettres  de  Paris,  L'éducation  athénienne  au  v'  et  au 
iv'  siècle  avant  J.-C. ,  ouvrage  couronné  par  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  (Paris,  1889,  gr.  in-8°). 

ff L'Académie  a  couronné  en  1886  le  mémoire  qui  est  devenu  l'excel- 
lent livre  que  j'ai  l'honneur  de  lui  présenter  au  nom  de  l'auteur.  La 
commission  chargée  de  juger  le  concours  avait  déjà  apprécié  les  qualités 
distinguées  qui  recommandaient  le  mémoire  à  ses  suffrages;  la  simplicité 
et  la  netteté  du  plan,  le  bon  usage  des  textes,  des  inscriptions  et  de  l'ar- 
chéologie figurée,  l'intelligence  et  l'amour  du  génie  athénien.  Ces  qua- 
lités, bien  entendu,  se  retrouvent  foutes  et  entières  dans  le  travail  de 
M.  Paul  Girard  sous  la  nouvelle  forme  qu'il  lui  a  donnée.  Tout  en  restant 
fidèle  à  son  plan  primitif,  il  a  cru  devoir  ajouter  deux  parties  :  l'une  sur 
la  gymnastique,  qui,  d'après  le  programme  de  l'Académie,  avait  du  être 
mise  à  peu  près  de  côté;  l'autre  sur  l'éphébie,  qui  était  en  dehors  des 
limites  du  même  programme.  Ses  lecteurs  ne  se  plaindront  pas  d'avoir, 
grâce  à  ces  deux  additions,  un  tableau  complet  de  l'éducation  athé- 
nienne. Du  reste,  l'auteur  s'est  borné,  pour  la  gymnastique,  à  un  ré- 
sumé assez  rapide.  Il  ne  s'est  pas  non  plus  longuement  étendu  sur 
l'éphébie.  Quelques  textes  épigrnphiques  récemment  découverts  lui  ont 
permis  d'ajouter  quelque  chose  aux  travaux  de  MM.  Albert  Dumont  et 
Dittenberger.  Un  chapitre  seulement  pourra  sembler  disproportionné. 
A  propos  des  études  des  éphèbes  au  iv"  siècle ,  il  nous  donne  un  travail 
sur  Isocrate  et  sur  son  enseignement,  auquel  on  reprocherai!  davantage 
de  s'écarter  du  sujet,  si  la  lecture  en  était  moins  intéressante. 

rrJe  recommanderai  particulièrement  à  l'attention  de  l'Académie  l'in- 
troduction et  toute  la  première  partie,  intitulée  :  L'éducation  athénienne  et 
l'État.  L'auteur  y  fait  tout  de  suite  apprécier  l'esprit  large  et  juste  qui 
préside  à  tout  son  travail.  Il  expose  très  nettement,  en  montrant  bien  ce 
qu'il  y  a  de  vrai  ou  de  systémati(}ue  chez  les  philosophes,  surtout  chez 
Platon  et  Aristote,  et  en  s'appuyant  sur  les  faits  connus,  quelles  étaient 
les  idées  des  Grecs  sur  l'éducation,  le  but  qu'ils  lui  assignaient  dans 
l'intérêt  delà  cité,  et  l'importance  particulière  qui  lui  était  attribuée  k 
Athènes,  et  cependant  la  liberté  que  la  même  ville  laissait  aux  m:iitres, 
aux  parents  et  aux  enfants,  au  moins  jusqu'à  lâge  de  l'éphébie,  pendant 
la  période  de  la  puissance  athénienne. 

ffCes  considéi-ations  garderont  leur  place  au  milieu  des  détails  où 
M.  Paul  Girard  doit  s'engager  pour  exposer  avec  précision  en  quoi  con- 
sistait l'éducation  athénienne  dans  la  famille,  chez  le  grammatiste.  le 


—  277  — 

citharisle,  le  pc-tlotribe  et  chez  les  maîtres  de  l'éphébie.  Les  changements 
apportés  par  le  temps,  par  le  mouvement  des  mœurs  et  par  Taffaiblisse- 
ment  de  lespril  militaire  et  patriotique,  sont  marqués  avec  netteté  et 
rapportés  autant  que  possible  à  leur  date.  L'étude  des  monuments  archéo- 
logiques, en  particulier  du  vase  de  Douris  et  des  deux  amphores  qui 
sont  à  Londres,  (juil  a  eu  soin  de  faire  reproduire  dans  le  texte  avec  un 
certain  nombre  d'autres  pehitures  de  vases,  me  parait  avoir  été  poussée 
aussi  loin  que  possible. 

ffJe  répète,  en  terminant,  que  le  résultat  de  toutes  ces  recherches  et 
de  tout  ce  travail  est  excellent.  Il  a  le  mérite  de  nous  mettre  sous  les 
yeux,  dans  une  image  assez  fidèle,  à  ce  qu'il  me  semble,  la  vie  de  la 
jeunesse  athénienne,  et,  en  même  temps,  il  nous  montre  une  lois  de 
plus  à  quel  point  nous  dillérons  des  Grecs,  n 

M.  Ravaisson  lait  hommage,  au  nom  de  son  (ils,  M.  Charles  Ravaisson- 
Mollien,  du  quati'ième  volume  de  sa  publication  des  Manuscrits  de  Léo- 
nard de  Lmce  (Paris,  1889,  in-fol.),  qui  doit  être  complète  en  six  vo- 
lumes. 

rrCe  volume  renferme  des  études  très  variées,  accompagnant  nombre 
de  dessins,  sur  la  géométrie,  la  physique,  les  fossiles,  [hydraulique, 
l'optique  et  la  peinture.  Parmi  les  dessins  se  rencontre  un  petit  portrait 
de  Léonard  dessiné  par  lui-même,  n 

M.  G.  Perrot  |)résente  le  5°  fascicule  (mai  1889)  du  Bulletin  de  cor- 
respondance hellénique  (Athènes  et  Paris,  in-8"). 

M.  HiiuzEY  fait  hommage,  au  nom  de  M""  veuve  Albert  Dumont,  du 
"]'  fascicule  de  la  seconde  partie  de  la  publiciition  intitulée  :  Les  céra- 
miques de  la  Grèce  propre,  par  j\lM.  Albert  Dumont  et  Jules  Chaplain, 
membres  de  l'Institut  (Paris,  1889,  gr.  in-/i°). 

Le  Prksidkxt  offre  Les  correspondants  de  Peiresc ,  fasc.  xv  :  Tlionias 
d'Arcos,  par  M.  Tamizey  de  Larroque,  correspondant  de  l'Académie 
(Alger,  1889,  in-8"). 

ffiM.  Tamizey  de  Larroque,  qui  publie,  l'Académie  sait  avec  quels 
soins,  la  volumineuse  correspondance  de  Peiresc,  a  fait  paraître  dans  la 
Revue  africaine  une  série  de  lettres  adressées  à  ce  savant  par  un  certain 
Thomas  d'Arcos.  C'est  im  personnage  d'une  physionomie  fort  originale, 
que  léditeur  a  tiré  de  l'oubli  en  compulsant  avec  sa  curiosité  toujours 
heureuse  les  collections  bibliographiques  de  Paris  et  de  Provence  et,  en 
premier  lieu,  celles  de  Carpenlras.  Ce  d'Arcos,  possédé  de  la  passion  des 
voyages  et  de  l'archéologie,  quitta  le  service  du  cardinal  de  Joyeuse  pour 
courir  le  monde.  Au  cours  d'une  de  ses  navigations  dans  la  Méditerranée, 


il  tomba  aiL\  mains  des  corsaires  barbaresques.  fut  conduit  à  Tunis,  se 
fît  musulman  et  prit  le  nom  dOsman.  Il  se  plut  tellement  dans  sa  nou- 
velle condition  qu'il  resta  en  Tunisie  même  après  avoir  recou\Té  sa 
liberté. 

!-D'Arcos  a  été  un  des  correspondants  les  plus  zélés  de  Peiresc.  Il  lui 
adresse,  soit  par  l'entremise  d'un  sieur  Aycard  dont  M.  Tamizey  de  Lar- 
roque  nous  donne  quelques  lettres,  soit  dii'ectement,  des  antiquités 
romaines  et  phéniciennes ,  des  manuscrits  arabes ,  des  caméléons  et  les 
ossements  d'un  fameux  géant  qui  n'étaient  sans  doute  qu'un  fragment  de 
squelette  d'élépbant.  A  ces  curiosités  exotiques  il  joint  des  ouvrages  de 
sa  composition,  entre  autres  une  Histoire  de  la  création  du  monde,  une 
Me  d'Ale-randre  le  Grand,  une  Histoire  d'Afrique,  un  Traité  de  lois,  etc. 
De  tous  ces  écrits,  que  l'auteur  jugeait  avec  modestie  -n'être  pas  viande 
-pour  l'estomach»  de  Peiresc,  il  ne  reste  aucune  trace  et  il  est  permis  de 
douter  que  la  perte  en  soit  regrettable.  En  revanche  ses  lettres  méritaient 
d'être  publiées,  non  seulement  à  cause  de  l'illustre  savant  à  qui  elles 
sont  adressées,  mais  aussi  comme  un  document  de  plus  pour  l'histoire 
de  la  colonie  franc{ue  de  Tunisie  au  xvu'  siècle.  M.  Tamizey  de  Larroque 
les  a  tirées  de  la  Bibliothèque  nationale,  en  les  illustrant  de  tous  les  ren- 
seignements bibliographiques  et  anecdotiques  que  son  intarissable  érudi- 
tion pouvait  lui  fournir.  Pour  ce  qui  est  des  noms  arabes  et  des  détails 
particulière  de  l'histoire  de  l'Afrique  musulmane ,  il  a  consulté  avec  profit 
M.  de  Grammont.  auteur  d'ime  Histoire  d'Alger  fart  estimée.  Tout  cela 
se  lit  avec  profit  et  plaisir,  et  prouve  avec  quelle  scrupuleuse  sollicitude 
M.  Tamizey  de  Larroque  pom-suit  la  grande  tâche  dont  il  s'est  chargé.  » 

SÉANCE  DU    1 9   JUILLET. 

Est  offert  : 

Notice  sur  l'emploi  des  hachettes  celtiques  comme  amulettes  et  talismans, 
par  M.  Henry  Corot  (Dijon,  1889,  in-12). 

M.  Heuzey  présente  h  l'Académie,  de  la  part  de  M.  HomolIe,une 
série  de  planches,  qui  sont  comme  les  prémices  de  l'important  ouvrage 
qu'il  imprime  sur  ses  fouilles  dans  l'île  de  Délos.  D'autres  membres  de 
l'École  d'Athènes.  MM.  Lebègue,  Hauvetle.  Salotnon  Pieinach.  ont 
exploré  différents  points  de  ce  champ  de  fouilles;  à  M.  Homolle  revient 
particulièrement  l'honneur  d'avoir  étudié  à  fond  le  grand  sanctuaire 
de  l'ile,  le  temple  et  le  téménos  d'Apollon  Déhen.  Les  planches  olTertes  à 
l'Académie  comprennent  les  plans  et  les  essais  de  restauration ,  des  études 
comparées  sur  Ifs  différents  ordres  d'archiiecturo.   M.  Heuzey  appelle 


—  279  — 

suiloiit  raltenlion  sur  une  suilc  de  chapileaux,  qui  donnent  comme  une 
histoire  de  l'ordre  ionique  en  Grèce  depuis  les  temps  les  plus  anciens. 
Les  premiers  de  ces  chapiteaux  sont  remarquables  j)ar  leurs  proportions 
e'troiles  et  très  allong'ées,  qui  raj)pelloiit  visihiement  les  dispositions  des 
constructions  en  bois.  L'un  des  plus  priiuilifs  devait  porter  une  scid[)ture 
du  vieux  mitUrc  AvUieriiios ,  filsde  l///./.mf/p.s,  dont  M.  Homolleareliouvé, 
diiulrc  part,  une  ligure  avec  son  inscripliou  archaïque.  C'est  un  syn- 
chronisme des  jdus  instructifs  entre  1  histoire  de  l'architecture  et  celle  de 
la  sculpture. 

M.  Saglio  présente  à  l'Académie  le  i3'  fascicule  (Dil-Don)  du  Diction- 
naire des  antiquités  grecques  et  romaines,  publié  sous  sa  direction  (Paris, 
1889,  gr.  in-/."). 

Il  signale  un  certain  nombre  d'articles  de  ses  collaborateurs ,  notam- 
ment ceux  de  M.  Jules  Girard  sur  les  fêtes  dionysiaques  et  de  M.  Foucart 
sur  les  artistes  dionysiaques  (dionysiaci  artifices);  un  long  article  de 
M.  Bouché-Leclercq,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres,  sur  Thistoire  et 
les  procédés  de  la  divination;  im  article  de  M.  HomoUe,  professeur 
suppléant  au  Collège  de  France,  sur  les  oITrandes  (donaria);  d'autres  de 
M.  Caillemor,  doyen  de  la  Faculté  de  droit  de  Lyon,  sur  plusieurs  sujets 
appartenant  à  l'histoire  du  droit  et  des  institutions  grecques,  de  MiM.  Sa- 
lomon  lleinach ,  P.  Monceaux,  Bloch,  C.  JuUian.  Gagnât,  anciens  membres 
des  écoles  d'Athènes  et  de  Rome ,  enûn  de  M.  Pottier,  qui  a  rédigé  pour 
ce  fascicule  plusieurs  articles  importants,  indépendamment  des  soins 
journaliers  quil  donne  à  la  publication. 

SÉANCE    DU   2  G   JUILLET. 

Le  Gouvernement  austro-hongrois  offre  à  l'Académie,  par  l'entremise 
du  Ministre  de  l'instruction  publique,  le  1"'  fascicule  d'un  ouvrage  de 
M.  le  professeur  Otto  Benndorf  et  un  cahier  illustn-,  intitulés  :  Dus  Ileroon 
von  Gjôliaschi-Tnjsa  (Vienne,  1889,  in-fol.). 

Le  Secrétaire  perpétcel  rappelle  avec  quel  zèle  et  quille  sûreté  de 
jugement  M.  Humbert,  vice-président  du  Sénat  et  ancien  garde  des 
sceaux,  dirige  la  traduction  du  Manuel  des  antiquités  romaines,  de 
M^L  Mommsen  et  Marquardt.  M.  Humbert  l'a  chargé  doflrir  à  l'Aca- 
démie deux  nouveaux  volumes  de  cette  publication,  où  Ion  retrouve  les 
mêmes  qualités  d  exactitude  et  de  clailé  :  L.e  droit  public  romain,  par 
M.  Tht'odore  Mitmmsen ,  traduit  par  M.  Paul-Frédi-ric  Girard,  professeur 
agrégé  à  la  Facidlé  de  droit  «h-  Paris,  tome  VL  2'  partie  (Paris.  1889, 


—  280  — 

in-8°),  el  Le  culte  chez  les  Romains,  par  M.  Joachim  Marquardt,  traduit 
de  l'allemand  par  M.  Brissaud,  professeur  à  la  Facullë  de  droit  de  Tou- 
louse, tome  I  (Paris,  1889,  in-S"). 

Sont  encore  offerts  : 

Le  peintre  Claude  Rately,  en  religion  frère  Prothade  de  Besançon,  de 
l'ordre  des  Capucins,  et  sa  <:r  Vierge  aux  Saints n ,  datée  de  1606,  par 
M,  Auguste  Gastan,  cori'espondant  de  Tlnslitiit  (Besançon,  1889,  in-8°, 
extrait  du  Bulletin  de  la  Société  d'émulation  du  Doubs  )  ; 

Bibliographie  sommaire ,  par  M.  N.  Maillant  (Paris  et  Epinal,  1889, 
in-8°,  extrait  de  l'ouvrage  :  Le  département  des  Vosges,  publié  par  M.  Léon 
Louis). 

M.  Simëon  Luce  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ff  J'ai  l'honneur  de  présenter  à  l'Académie,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Paul 
Marin,  capitaine  d'artillerie,  un  ouvrage  intitulé:  L'art  militaire  dans  la 
première  moitié  du  xv'  siècle.  Jeanne  Darc  tacticien  et  stratégiste;  cam- 
pagne de  l'Oise  [lâSo);  siège  de  Compiègne  (Paris,  1889,  10-8°). 

frLes  talents  militaires  de  Jeanne  d'Arc  ont  été  attestés,  dès  le  xv°  siècle, 
par  un  témoin  compétent,  qui  l'avait  vue  à  l'œuvre,  le  duc  d'Alenoon; 
mais  les  adversaires  de  la  Pucelle  avaient  prétendu  que  son  génie  l'avait 
abandonnée  vers  la  fin  de  sa  carrière,  dans  sa  campagne  sur  l'Oise 
en  i63o  et  au  siège  de  Compiègne.  M.  Marin,  qui  est  un  artilleur  de 
profession,  a  soumis  ces  deux  opérations  h  un  examen  rigoureusement 
technique  et  démontre  que  l'opinion  accréditée  par  les  ennemis  de  la 
Pucelle  n'est  nullement  fondée.  La  conclusion  de  son  savant  travail, 
c'est  que  la  libératrice  d'Orléans  n'a  pas  montré  moins  de  supériorité, 
au  point  de  vue  de  la  tactique  et  de  la  stratégie,  dans  la  chevauchée  de 
l'Oise  et  la  défense  de  Compiègne  que  dans  ses  opérations  antérieures,  n 

SÉANCE    DU  9    AOIJT. 

M.  Gaviii  Hamillon  offre  à  l'Académie  l'ouvrage  qu'il  vient  de  faire 
paraître  sous  ce  litre  :  The  moods  qf  ihe  English  Bible,  the  same  as  in  Latin 
andGreek,  contnisted  with  their  treatment  bij  Priscian's  German  folloxvers 
(Edimbourg,  1  889  ,  in-/i°). 

M.  Hamilton  a  joint  à  son  envoi  une  lettre  en  latin,  adressée  au  Secré- 
taire perpétuel,  dans  laquelle  il  rappelle  les  témoignages  d'estime  el  de 
sympathie  que  lui  a  donnés  autrefois  notre  regretté  confrère  M.  Egger, 
et  il  insiste  sur  l'adhésion  que  ses  vues  ont  rencontrée  parmi  les  philo- 
logues de  la  Grande-Bretagne  et  des  Etats-Unis. 


—  281    — 

Sont  encore  oflerls  : 

La  capselln  argonlea  ajncana  ojjirla  al  soimiio  ponkjice  Leone  XIII 
dall'Eîiw  sig.  card.  Lnvigerie,  arcivescovo  di  Cartagine ,  par  le  coninian- 
rleiir  J.-B.  de  Rossi  (Rome,  1889,  in-folio); 

Biographie  de  M.  Lecoiutrc- Dupont,  par  M.  J.-L.  de  la  Marsonnière 
(Poitiers,  1889,  in-8")- 

Le  Pkéside.nt  présente  à  i'Acade'mie,  de  la  part  de  M.  E.  Fagnan,  un 
volume  inlitulé  :  JwJ.i^  c5>>>-ïa«  ja.'  J^  J-JoJI  iUJI  Concordances  du  manuel 
de  droit  de  Sidi  Khalil,  dressées  d'après  l'ordre  des  racines  sur  l'édition  de 
Prtns  (Alger,  1889,  in-8"). 

ff.M.  Fagnan,  chargé  d'un  cours  d'arabe  à  l'Ecole  des  lettres  d'Alger, 
rend  par  la  publication  de  cette  table  un  véritable  service  aux  interprètes 
civils  et  militaires  de  notre  colonie  algérienne.  Le  traité  juridique  de  droit 
malékite  rédigé  par  Sidi  Khalil  jouit  d'une  autorité  absolue  dans  tout  le 
nord  de  TAfricpie;  il  est  entre  les  mains  de  tous  les  cadis  et  sert  de  base 
à  leurs  jugements.  Le  travail  méritoire  de  AL  Fagnan  rendra  désormais 
plus  facile  la  recherche  à  faire  dans  ce  manuel,  rédigé  en  style  algé- 
brique, et  qui  a  donné  naissance  à  un  grand  nombre  de  commentaires 
constituant  en  quelque  sorte  la  jurisprudence  des  tribunaux  algériens. 
Ces  concordances  sont  dressées  d'après  l'édition  du  texte  arabe  publiée 
par  la  Société  asiatique  et  sur  le  plan  adopté  par  Fluegel  pour  le  texte 
du  Coran,  v 

SÉAXCE   DU   f)    AGIT. 

Sont  ofî'erts  : 

A  Uun-Magi/ar  iras  es  annak  Jennmaradt  emlékei,  par  M.  K.-A.  Fischer 
(Budapest,  1889,  in-/i°); 

Les  moines  égyptiens,  pai-  E.  Amélineau  :  Vie  de  Schnotidi  (Paris,  1 889, 
in-16). 

Le  Secrétaiue  i'erpétuel  dépose  sm"  le  bureau  le  a'  fascicule  des 
Comptes  rendus  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres,  pendant 
l'année  1889,  mars-avril  (Paris,  1889,  in-8°). 

M.  le  marquis  d'Hervey  Saint-Denys  a  la  pai'ole  pour  une  double  pré- 
sentation : 

ffj'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  de  la  part  de  l'antenr,  M.  Terrien 
de  Lacouperie,  un  fascicule  du  travail  quil  poursuit  sur  lethnographie 
des  populations  chinoises,  The  Djurlclien  of  Mandsluiria  :  thcir  names , 
langnage ,  and  lilerature  (in-8°,  extrait  du  Journal  of  ihe  Royal  Asiatic 
Society,  vol.  XXI,  avril  1889).  Ce  fascicule  contient  des  recherches  sur 
l'origine  et  les   différents  noms  de   la  peuplade  généralement  connue 


—  282  — 

sons  celui  de  Niu-tchi.  Ce  travail  etlinographique  de  M.  Terrien  de  La- 
couperie  lui  ayant  valu  un  encouragement  dans  le  dernier  concours 
Stanislas  Julien,  je  rappellerai  en  le  pre'sentant  que  TAcadémie  Ta  jugé 
digne  dintérêt. 

rrJ'offre  également  à  TAcadémie  un  volume  que  je  viens  de  i)ublier 
sous  ce  titre  :  La  tunique  de  perles,  un  serviteur  méritant  et  Tang  le 
Kiaï-youen,  trois  nouvelles  traduites  pour  la  première  fois  du  chinois  (Paris, 
1889,  in-12).  Ce  livre  fait  suite  à  un  autre  volume,  que  j'ai  eu  l'hon- 
neur d'offrir  précédemment  et  qui  renfermait  aussi  trois  nouvelles ,  toutes 
tirées  d'un  recueil  imprimé  en  Chine  vers  le  milieu  de  notre  xvi"  siècle 
et  où  les  mœurs  de  la  vieille  société  chinoise  sont  prises  sur  le  vif.  Après 
avoir  montré  les  Chinois  désabusés  de  la  pierre  philosophale,  alors  que 
sa  recherche  était  le  plus  en  faveur  parmi  nous ,  après  avoir  pris  une 
idée  de  leurs  croyances  touchant  la  transmigration  des  âmes  et  de  leurs 
sentiments  sur  le  mariage,  nous  voyons  maintenant  le  riche  marchand, 
personnage  important  du  monde  oriental,  dans  sa  vie  intime  et  galante, 
l'état  des  individus  de  la  classe  servile,  le  romantisme  sentimental,  tel 
que  l'entendent  les  déUcats  de  l'empire  du  Milieu. 

ffOn  est  surpris,  dans  ces  i-écits,  par  la  manière  d'envisager  et  de 
peser  les  choses  de  la  vie ,  par  l'importance  accordée  h  certains  détails , 
par  la  disproportion  entre  certaines  causes  et  certains  effets  selon  nos 
appréciations  occidentales.  Il  estcmieux  de  constater  l'influence  si  grande 
du  miheu  social  sm-  les  jugements  de  l'esprit  humain.  Peut-être  cela  pa- 
raîtra-t-il  intéressant,  et  c'est  ce  qui  me  détermine  à  déposer  sur  le  bureau 
de  l'Académie  une  œuvre  dont  le  tissu,  par  lui-même,  semblerait  bien 
léger  pour  mériter  cet  honneur,  r, 

SÉANCE  DU    16   AOÛT. 

Est  offert  : 

Histoire  documentaire  de  l'Académie  de  peinture  et  de  sculpture  de  Mar- 
seille, par  M.  Etienne  Parrocel  (Paris,  1889,  in-S"). 

M.  Oppert  présente  de  la  part  de  l'auteur,  le  R.  P.  Slrassmaier,  le 
second  et  dernier  fascicule  des  textes  juridiques  et  commerciaux  du  règne 
de  Nabuchodonosor  :  Bahylonische  Texte,  F/ (Leipzig,  1889,  in-8°). 

rrLinfatigable  auteur  livj-e  au  public  savant  quatre  cent  soixante  in- 
scriptions, qui  s'étendent  sur  les  quarante-trois  années  du  règne  du 
destructeur  de  Jérusalem.  Ces  documents  sont  d'une  très  grande  im- 
portance pour  l'archéologie  et  le  droit  des  Chaldéens,  et  compléteront 
les  l'enseignenu'nts,  si  amples  déjà,  (]u'on  possédait   sur  le  lemj)s  dos 


—  L>S8  — 

successeurs  de  Nabucliodonosor.  Pour  accomplir  un  travail  pareil  ù  celui 
du  H.  P.  Slrassuiaier.  il  no  faut  pas  seulement  pouvoir  lire  les  si<yncs,  ce 
qui  est  dt^jà  très  dilllcile,  mais  il  est  indispensable  de  se  rendre  rouiplo 
du  sens,  car  souvent  le  mauvais  état  de  l'écriture  oblige  le  copiste  à  sa- 
voir ce  qui  peut  avoir  été  écrit.  M.  Strassmaier  s'est  acquitt»^  de  celte 
tâche  avec  une  supériorité  marquée,  qui  lui  vaut  la  reconnaissance  des 
érudils  spéciaux.  Après  ce  travail,  les  textes  sont  abordables  môme  pour 
les  commençants  en  assyriologie,  ce  qui  devrait  le  préserver  des  plagiais , 
<lont  ses  ouvrages  si  laborieusement  achevés  ont  quelquefois  été  victimes. 
Espérons  que  le  savant  jésuite  meltra  à  exécution  son  dessein  de  publier 
les  milliers  de  documents  qui  nous  restent  des  règnes  de  Gyrus,  de  Cam- 
byse,  de  Darius  et  d'Artaxerxès.  r 

M.  A.  Bertrand  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ffj'ai  l'honneur  de  présenter,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Emile  Cartailhac, 
un  volume  intitulé  :  La  France  'préJmloriqnc ,  d'après  les  sépultures  et  les 
vwniimcnts  (Varh,  1889,  in-8°). 

rrM.  Carlailliac  a  eu  autrefois  quelques  faiblesses  pour  le  roman  pré- 
hislori(pie.  Je  suis  heureux  de  constater  que  dans  ce  nouveau  travail,  ré- 
sumé de  deux  ans  d'études ,  aucune  trace  ne  reste  de  ces  premières  erreurs. 

crLa  France  préhistorique  est  un  résumé  clair  et  précis  des  faits  con- 
statés, sans  aucun  mélange  de  conjectures  hasardées.  Les  problèmes 
non  encore  résolus,  et  il  y  en  a  beaucoup,  sont  nettement  formulés.  Les 
solutions  proposées  sont  exposées  avec  im[)artialité.  C'est  un  très  bon 
livre,  (jui  peut  rendre  de  grands  services. 

ff  1 G2  gravures  dans  le  texte ,  d'une  scrujiuleuse  exactitude ,  ajoutent  h 
la  valeur  de  l'œuvre  en  rendant  les  explications  plus  lumineuses.» 

M,  Léon  Gautier  oflfre  la  Paléographie  musicale ,  fac-similés  photofjra- 
pliiques  des  principaux  manuscrits  du  chant  grégorien  ,amhrosien ,  mozarabe, 
gallic>in,  publiés  par  les  Bénédictins  de  Solesmes,  1'°  année  (Paris  cl 
Leipzig,  i88(),  m-lx"). 

ff  Eloignés  de  leur  monastère  en  des  circonstances  qu'il  ne  m'appartient 
pas  de  rappeler,  les  Bénédictins  de  Solesmes  n'ont  pas  cru  qu'un  tel  exil 
leur  donnât  droit  au  repos.  Ils  se  sont  rerais  vaillamment  à  l'œuvre,  et, 
dans  ce  j)f'til  village  de  Solesmes  auquel  leur  nom  restera  toujours  at- 
taché, ont  fondé  une  imprimerie  qui  peut  dès  aujourd'hui  passer  pour 
une  des  meilleures  de  la  province.  A  ces  presses  nouvelles  ils  confient 
surtout  leurs  propres  œuvres,  et  c'est  de  l'imprimerie  Saint-Pierre  que 
sort  en  ell'et  cette  Paléographie  musicale  (ju'au  nom  des  Bénédictins  d*- 
Solesmes  j  ai  rhonn>'iii-  ilc  déposer  sui"  le  bureau  de  l'Académie. 

XVII.  20 


—  28/i  — 

ff L'œuvre,  qui  est  périodique,  paraît  sous  la  forme  de  fascicules  tri- 
luestriels.  Elle  se  compose  de  deux  éléments  :  un  lexlc  typographique  et 
des  lac-similés  qui  sont  dus  au  procédé  de  la  ])liolotypie. 

'fDans  Y  Introduction  générale ,  qui  n'est  pas  signée,  la  question  des 
études  sur  la  musique  ecclésiastique  du  moyen  âge,  cette  question,  jus- 
quici  obscure,  est  nettement  posée.  Rien  n'est  plus  clair  ni  plus  consolant 
que  ces  pages,  qui  attestent  véritablement  un  grand  progrès.  Les  neuraes 
(cette  notation  musicale  qui  est  antérieure  à  la  notation  guidonienue) 
étaient  encore  si  mal  connus  à  la  fin  du  dernier  siècle  qu'un  des  plus 
grands  liturgistes  de  cette  époque,  Martin  Gerbert,  les  traitait  comme 
une  quantité  négligeable  et  n'essayait  même  pas  d'en  faire  estime  :  Notu- 
las  veteres  omittimus.  C'est  le  retour  à  la  liturgie  romaine  qui  a  mis  réelle- 
ment les  esprits  en  éveil  et  les  érudits  en  mouvement,  cl  qui  a  donné 
à  quelques  téméraires  l'idée  de  reproduire  en  fac-similé  cette  graphie 
d'une  étude  si  pratique,  mais  d'un  abord  si  difficile.  En  1801,  le  P.  Lara- 
billotte,  plus  hardi  que  tous  les  autres  (et  l'on  ne  lui  a  peut-être  pas 
assez  tenu  compte  de  cette  intelligente  initiative)  publia  le  fac-similé  com- 
plet du  beau  manuscrit  SSg  de  la  Bibliothèque  de  Saint-Gall.  Je  vous 
étonnerai  peiit-êlre  en  ajoutant  que  le  livre  eut  deux  éditions;  mais  ce 
qui  ne  sera  pas  de  natiu-e  à  vous  satisfaire  au  même  degré,  c'est  quun 
aussi  noble  exeinjde  ne  fut  pas  suivi.  Depuis  le  P.  Lambillolte  jusqu'à  la 
Paléographie  musicale,  depuis  1 80 1  jusqu'à  1 889,  personne  n"a  osé  entre- 
pr.-ndre  la  reproduction  intégrale  d'un  seul  manuscrit  neumalique,  et 
certes  vous  estimerez  comme  moi  que  les  Bénédictins  de  Solesmes  ont 
peut-être  quelque  mérite  à  tenter  aujourd'hui  l'aventuie. 

ffll  faut  tout  dire  :  ils  se  sont  eux-mêmes  frayé  la  voie  et  se  sont  rendu 
leur  lâche  plus  facile  en  donnant  au  monde  savant,  il  y  a  quelques  an- 
nées, un  juaître  livre  d'un  de  leurs  frères,  de  dom  Pothier  :  Les  mélodies 
grcgoriouies  d'après  la  tradition,  œuvre  dont  il  est  permis  de  discuter 
(|uel(jiu^s  parties,  mais  qui  reste  encore  le  meilleur  guide  et,  pour  ainsi 
])arlor,  le  bréviaire  d'une  science  encore  si  nouvelle. 

fcLes  auteiu's  de  la  Paléographie  musicale  se  sont  rendu  un  conq)te 
exact  des  sources  auxquelles  peuvent  remonter  les  historiens  de  la  mu- 
sique ecclésiastique,  et  ils  ont  fait  preuve  d'un  rare  esprit  critique  en 
[ilarant  la  reproduction  des  textes  musicaux  bien  au-dessus  de  tous  les 
conuuentaires  des  Pères  et  de  tous  les  traités  techniques  du  moyen 
âge.  Rien  ne  vaut  un  fait,  et  rien,  si  ce  n'est  le  manuscrit  lui-même,  ne 
vaut  un  fac-similé  phologra[)hique.  Telle  est  la  voie  oîi  ils  se  jettent  un 
peu  à  corps  perdu,  mais  avec  une  confiance  qui  ne  déplaît  pas:  'fA  l'aide 


—  285  — 

rrcl'uno  critiqiio  sévère,  disoiil-ils,  examinons  les  lexles,  tels  qne  les  ma- 
ffunscrils  nous  les  donnent;  eliidions-les  en  dehors  de  (oulesprit  de  parti, 
«en  nous  gardant  de  les  adapter  à  une  théorie  toute  faite,  «  On  ne  sau- 
rait mieux  dire,  et  c'est  la  première  loi  de  toute  érudition  sincère. 

ff  Ce  qu'il  faut  donc  admirer  le  plus  dans  le  livre  que  je  place  sous  vos 
yeux,  ce  n'est  pas  cette  hitrodiirfion  gènhale  où  il  y  a  tant  de  clartés 
de  tout,  ni  la  Dissertation  sur  le  manuscrit  889  de  Saint-Gali;  mais 
c'est  la  reproduction  de  ce  manuscrit  lui-même,  de  ce  manuscrit  tout 
entier,  et  il  convient  ici  de  se  rappeler  ces  paroles  de  M.  Léopold  Delisle  : 
ffLa  plioto{|raphie  a  modifié  de  fond  en  comble  les  anciennes  conditions 
ffde  la  reproduction  d(  s  textes.  Un  nouveau  genre  d'('ditions  a  paru  né- 
ffcessaire."  Les  Bénédictins  de  Solesmes,  qui  citent  ces  paroles,  les  ont 
mises  à  profit. 

ff  Avec  une  modestie  toute  béiic'dictine ,  ils  ont  caché  leurs  noms ,  et  ils  ont 
cru  nécessaire  de  s'excuser  sur  la  grande  liberté  qu'ils  ont  prise  quelque- 
fois de  n'être  pas  sui-  la  matière  du  même  avis  que  les  techniciens  du 
moyen  âge;  mais  ils  se  sont  enhardis  à  la  lecture  de  cette  charmante 
page  d'un  de  nos  confrères  :  rrll  y  a  de  la  hardiesse  sans  doute  à  mieux 
«juger  du  grec  et  du  latin  que  Denys  et  que  Cicéron;  mais  il  n'y  en  a 
ff  peut-être  pas  autant  qu'on  pourrait  le  croire.  Il  arrive  tous  les  jours  que 
ffceux  qui  possèdent  le  plus  parfaitement  un  certain  art,  qui  en  ont  le 
ffsentiment  le  plus  vif  et  le  plus  juste,  exposent  les  procédés  de  cet  art 
ff  d'une  manière  moins  satisfaisante  que  ceux  qui  cherchent  à  s'en  rendre 
ff  maîtres  par  l'étude,  n  A  Solesmes  on  connaît  M.  Weil. 

ff  L'œuvre,  dédiée  au  pape  Léon  XIII,  est  toute  pleine  du  souvenir 
encore  vivant  de  dom  Guéranger,  qui  a  guidé  mes  premiers  pas  dans 
l'étude  de  la  liturgie  et  dont  je  ne  saurais  prononcer  le  nom  siins  quelque 
émotion.  Elle  sera  d'une  double  utilité.  Au  point  de  vue  strictement 
théorique,  elle  permettra  d'établir  les  thèses  définitives  sur  les  dévelop- 
pements de  l'art  nmsical  au  sein  de  l'Eglise;  au  point  de  vue  pratique, 
elle  fournira  de  précieux  éléments  h  cette  revision  du  chant  sacn;  que 
nous  attendons  avec  tant  d'impatience. 

ffLes  Bénédictins  de  Solesmes  ont  voulu  vous  faire  honnnage,  avant 
Ions  autres,  de  ces  résultats  de  leur  labeur.  Ce  qu'ils  ont  en  effet  de 
plus  cher  après  Dieu,  ce  sont  les  consolations  que  donne  le  d-avail  et  les 
encouragements  d'une  Compagnie  telle  que  la  votre. 'i 

M.  Senart  présente,  de  la  part  de  i\l.  le  D'  J.  Gerson  da  Cunha,  les 
ouvrages  suivants  : 

Memoiv  ou  llie  hinlonf  oftlie  loolh  relie  f)fCei//on  (  Londres ,  1 876 ,  in-8")  : 

90. 


—  286  — 

Noces  on  llie  histonj  and  antù/uilies  of  Clinul  ami  Bassein  (Bombay, 
i87(),in-8°); 

Conlrihulions  ta  the  sludy  of  Indo-Portvguese  numismatics  (Bombay, 
i883,  in-8°); 

The  Konhani  language  and  literature  (Bombay,  1881,  in-8°); 

Catalogue  of  the  coins  in  the  numismatic  cabinet  belonging  tù  J.  Gerson 
da  Cmha  (Bombay,  1888-1889,  m-8°). 

fi- J'ai  Thomieur  d'olTrir  à  TAcadémie,  dit  notre  confrère,  une  sërie  de 
publications ,  dont  l'auteur,  à  l'exemple  de  beaucoup  (!e  fonctionnaires 
anglo-indiens,  a  su  conque'rir  sur  des  occupations  très  absorbantes  des 
loisirs  studieux;  il  les  a  consacrés  spécialement  à  l'étude  de  l'Inde  por- 
tugaise. C'est  particulièrement  comme  numismate  que  M.  Gerson  da 
Gunba  s'est  fait  connaître.  Sa  collection  unique  de  monnaies  portugaises 
de  l'Inde  figure  en  ce  moment  même  à  lExpoi^tion.  Mais,  comme  sa 
collection  de  médailles,  sa  curiosité  éclairée  s'est  étendue  ii  tout  le  domaine 
de  l'Inrle  ancienne.  Les  titres  qui  précèdent  en  font  foi.  Qu'il  étudie  les 
curieuses  vicissitudes  qu'a  traversées  la  célèbre  relique  de  la  pré- 
tendue dent  du  Bouddha  conservée  à  Candy,  ou  qu'il  examine  les  restes 
des  vieux  établissements  de  Ghaul  et  de  Bassein,  ou  qu'il  étudie  l'ensemble 
des  questions  qui  se  rattachent  à  la  langue  et  à  la  littérature  du  Konkana , 
on  le  trouve  toujcurs  à  la  hauteur  de  sa  tâche,  armé  d'une  érudition 
exacte  et  vivante.  G'est  pour  moi  un  véritable  plaisir  d'être,  auprès  de 
l'Académie,  l'intermédiaire  du  précieux  envoi  que  je  signale  à  sa  bien- 
veillante attention.» 

Le  Priîsidicxt  offre  Le  Yih-King ,  texte  primitif,  rétabli ,  traduit  et  com- 
menté,  par  M.  Gb.  de  Harlez  (Bruxelles,  1889,  in-4°,  extrait  des  Mé- 
moires de  l'Académie  royale  de  Belgique). 

ff  Parmi  les  livres  sacrés  de  la  Ghine,  le  Yih-King  est  peut-être  le  plus 
vénéré,  parce  que  les  Chinois  le  considèrent  comme  le  principe  de  toute 
sagesse,  la  base  de  toute  doctrine,  le  fondement  de  toute  science.  Ce 
texte  vingt  fois  séculaire  n'a  encore  rien  perdu  de  son  prestige,  h  ce  point 
qu'ils  affirment  qu'il  n'y  a  pas  une  seule  des  grandes  découvertes  modernes , 
la  vapeur,  l'électricité,  etc.,  qui  ne  s'y  trouve  décrite  ou  tout  au  moins 
annoncée.  Il  va  sans  dire  que  c'est  en  même  temps  un  des  livres  les  plus 
obscurs  de  la  littérature  cliinoise;  aussi  a-t-il  donné  naissance  à  plus  de 
quatorze  cents  commentaires. 

fr  Jusqu'à  ce  jour,  tous  les  commentateurs  indigènes  ou  européens  s'ac- 
cordaient à  voir  dans  le  Yih-King  un  livre  de  bonne  aventui-e,  un  recueil 
d'oracles  que  l'on  consulte  pour  ])révoir  l'issue  heureuse  ou  malheureuse 


—  l>87  — 

(le  telle  ou  lelle  entreprise.  Tel  est  le  caraclèn;  (|iii  n'a  cessé  tie  lui  (Hic 
atlribuc,  eu  Europe,  depuis  le  P.  R('{jis  jusqu'à  M.  Pliilastre,  le  tiernier 
Iraduclour  de  ce  singulier  ouvrage.  M.  de  Harlez  vient  de  rompre  en 
visière  avec  celte  opinion  comme  avec  Tanlique  tradition  des  Chinois. 
Pour  lui,  le  YHi-kiiig  est  un  recueil  de  sentencc^s  pliilosopliiqut^s,  morales 
et  m(îme  lexicograpliiquos,  classi-cs  sous  0/j  litres.  11  rojrlte  tous  les  pas- 
sages ayant  un  sens  divinatoire,  (pii  lui  paraissent  avoir  élé  aj(»utés  au 
texte  primitif,  environ  i,-2oo  ans  avant  l'ère  chrétienne,  et  il  se  borne  à 
donner  à  chaque  mot  de  c:^  texte  son  acception  ordinaire,  usuelle.  De  là 
une  interprétation  (jui  se  poursuit  d'un  bout  à  l'autre  du  mystérieux 
livre,  avec  une  logi(]MC  et  un  accord  si  j)aiiails  (pi'on  ne  peut  se  défendre 
dune  certaine  impiiétude  et  qu  on  se  (h^maiule  comment  un  résidtat  aussi 
simple  avait  échappé  à  la  sagacité  des  sinologues.  C'est  aux  spécialistes 
de  dire  ce  que  vaut  la  thèse  du  savant  académicien  de  Belgique.  Je  me 
borne,  pour  ma  part,  à  la  signalera  l'Académie,  en  lui  rappelant  (jue 
M.  de  Harlez,  par  son  activité  d'esprit  cl  [)ar  la  diversité  de  ses  connais- 
sancr's  philologiques,  a  rendu  depuis  longtemps  d'éminenls  services  à 
rtîi'utUtioa  orientale." 

SÉANCE  DU    2  0    AOUT. 

Sont  oflerts  : 

Relations  politiques  des  Pays-Bas  et  de  l'Angleterre  sous  le  règne  de 
Philippe  II ,  \)ii\Mi'es  [)ar  M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove,  président 
de  la  Commission  royale  dhistoirede  iAcadémie  des  sciences,  des  lettres 
et  des  beaux-arts  de  Belgique:  tome  VI,  Gourernemcnl  du  duc  d'Albe; 
t.  VII,  Gouvernement  de  llequesens  (Bruxelles,  i  888  ,  m-k" ,  -i  volumes  de 
la  Collection  de  chroniques  belges  inédites)  ; 

Correspondance  du  cardinal  de  Granvelle ,  j  565-1 083 ,  [)ubliée  |)ar 
M.  (îh.  Piot,  membre  de  la  même  Conmiission  (Bruxelles,  2887,  in-'i", 
même  Collection); 

^  Etude  de  la  formation  des  mesures  assyriennes  de  capacité,  par  M.  A. 
Aurès  (Paris,  1889,  i"-^")- 

M.  Léon  G.vuTiEu  a  la  parole  pour  une  présentation  : 

r:Au  nom  de  l'auleur,  M.  \.  Jenne[)in,  jai  Ihonneur  de  déposer  sur  le 
bureau  de  l'Académie  le  premiei-  voUnut."  d'ime  Histoire  de  la  ville  de 
Maubeuge ,  depuis  sa  fondation  Jusqu'en  i'JQO,  tome  l  (Maubenge,  i88(), 
iu-8"). 

"Les  monographies  qui  ont  pour  objet  l'histoire  de  nos  villes  et  celle 
même  de  nos  villages  se  multiplient  de  jour  en  jour,  et  il  serait  intéres- 
sant d'en  coimaitre  aujourd'hui  la  statisli(pje  exacte.  Je  m'assure  que  leur 


—  288  — 

seule  nomenclature,  depuis  cinquante  ans,  tonnerait  déjà  la  matière  d'un 
volume  considérable.  Il  convient,  d'ailleurs,  de  se  féliciter  d'un  tel  pro- 
grès, et  notre  grande  histoire  nationale  ne  pourra  être  e'tablie  sur  des 
bases  vraiment  solides  que  lorsque  toutes  ces  histoires  locales  auront  été 
scientifiquement  menées  à  bonne  fin, 

ff  L'œuvre  de  M.  Jennepin  est  de  celles  qui  vont  activer  un  aussi  heu- 
reux mouvement,  et  l'on  ne  saurait  guère  adresser  h  l'auteur  de  Y  His- 
toire de  Maubeuge  qu'un  seul  reproche,  qui  se  rapporte  h  l'agencement 
général  et  à  la  composition  de  son  livre.  Il  eût  été  à  souhaiter  qu'au  lieu 
de  couper  son  sujet  en  tronçons  qui  cherchent  péniblement  à  se  rejoindre, 
il  eût  adopté  franchement  l'ordre  chronologique,  qui  est  encore  celui 
dont  le  lecteur  aura  toujours  le  inoins  à  se  plaindre. 

rf  Cette  réserve  une  fois  faite,  on  ne  peut  que  s'intéresser  vivement  à 
ce  long  récit,  que  l'auteur  a  partagé  sagement  en  deux  grandes  parties  : 
rrl.  Avant  la  période  française;  II.  Période  française,  n  M.  Jennepin  a  vu 
clair  dans  l'histoire  de  cette  fière  petite  ville  du  Hainaut,  qui  a  joué  son 
rôle  dans  notre  histoire  et  n'y  fait  pas  mauvaise  ilgnre. 

rrLes  tableaux  se  succèdent  dans  ce  livre  vivant  et  coloré,  et  la  plupart 
sont  saisissants.  C'est  d'abord,  en  l'an  67,  la  grande  et  mortelle  bataille 
de  César  contre  les  Nerviens.  dont  le  théâtre  n'a  pas  encore  été  nettement 
déterminé  et  que  M.  Jeimepin  serait  tenté  de  placer  à  Hautmont,  au  sud- 
ouest  de  Maubeuge.  Puis ,  aux  temps  féodaux ,  —  en  faisant  un  large  bond 
au-dessus  de  l'empire  romain  et  de  la  période  mérovingienne,  — c'est 
l'antique  ville  de  Maubeuge  aux  mains  du  comte  de  Hainaut,  qui  est  le 
puissant  avoué  de  l'abbaye  et  des  chanoinesses  de  Sainte-Aldegonde.  C'est 
encore  cette  administration  des  pi'évôts ,  au  sujet  de  laquelle  M.  Jennepin 
est  entré  en  des  détails  véritablement  excessifs.  C'est  la  commune  de 
Maubeuge,  dont  on  trouve  la  première  mention  dans  un  acte  de  1178 
et  qui  est  administrée  par  un  mayeur  et  sept  échevins.  C'est  surtout 
l'étonnant  développement,  à  Maubeuge,  de  celte  fabrication  des  draps 
qui  n'occupe  pas,  au  xiu°  siècle,  moins  de  deux  mille  rr métiers  bat- 
tants^; c'est  cette  foule  de  marchands  espagnols,  lombards,  portugais, 
flamands,  allemands  et  romains  qui  viennent  aux  halles  de  Maubeuge 
acheter  cette  bonne  marchandise  du  Hainaut.  Pourquoi  faut-il  qu'une 
malencontreuse  émeute  ait  mis  fin,  pour  longtemps,  à  une  aussi  longue 
prospérité?  En  1298,  une  bande  d'émeuliers  menace  Jean  d'Avesnes  et 
pénètre,  l'arme  au  poing,  dans  son  château.  Il  est  vrai  que  les  habitants 
de  Maubeuge  se  repentirent  bien  vite  de  cette  échauffourée  ;  mais  elle  n'en 
fut  pas  moins  fatale  au  commerce  de  la  draperie,  qui  fut  dès  lors  frappé 


—  i)80  — 

tlo  charges  iînornies,fl  à  la  richesse  d'uiio  villo  jadis  si  o[Kilt'iil(>.  Toul  dé- 
clina. La  j;uerre  de  Cent  ans  nV'lait  pas  laite  pour  relever  les  affaires  de 
MauheUjO'e,  et  voici  ces  terribles  anarchies  et  ces  barbaries  du  xv'  siècle; 
voici  cette  justice  cruelle  et  ces  atroces  pénalités  contre  lesquelles  M.  Jenne- 
pin  n'a  que  trop  raison  de  s'indigner.  11  faut  encore  ici  fairo  une  enjambée 
énorme  et  se  reporter,  pour  notre  consolation,  à  cet  article onzf  du  traité 
deNimègue,qui.le  17  septembre  1G78  ,  céda  MaubeugeauroidcFrance. 
Le  grand  Vauban ,  avec  le  regard  du  génie,  comprit  rapidement  l'impor- 
tance de  cette  place  et  l'entoura  de  ces  forlilications  auxquelles  l'art  du 
temps  savait  donner  un  aspect  gracieux;  témoin  ces  deux  belles  portes  de 
Mons  et  d'Avesnes,  qui  Font  penser  à  nos  deux  portes  Saint-Denis  et 
Saint-Martin.  C'est  le  même  arl,  im  peu  guindé,  uiais  noble,  et  rappe- 
lant de  grands  souvenirs.  Il  ne  reste  plus  guère  qu'à  évoquer  les  dates 
illustres  du  i3  juin  1793  et  de  septembre  1794.  Les  Autrichiens  furent 
battus  en  1792  et  durent,  eu  179^,  lever  le  siège  de  la  ville  après  la 
bataille  de  Wattignies.  Vhigt  ans  plus  tard,  Maubeuge  faisait  une  dé- 
fense héroïque  contre  les  armées  alliées.  Il  nous  semble  que  cette  brave 
petite  ville  a  de  belles  inscriptions  à  graver  sur  ses  tables  de  marbre,  et 
quelle  méritait  vraiment  d'avoir  son  historien. 

ffCe  sont  là  les  grandes  lignes  du  livre  de  U.  Jennepin;  mais  les  char- 
mants détails  y  abondent,  et  Jious  sommes  de  ceux  qui  leur  trou- 
vent plus  de  savem-  qu'aux  grands  événements.  11  faut  féliciter  l'auteur 
de  cette  Histoire  de  nous  en  avoir  fourni  toute  une  gerbe.  Que  diront 
les  fr antimicrobiens n  de  notre  temps  lorsqu'ils  apprendront  que, 
dans  un  rapjjort  oiliciel  de  1788,  il  est  constati?  que  tries  brasseurs  pré- 
(tfèrent,  pour  la  confection  de  leui-s  bières,  l'eau  croupie  à  celle  qui  est 
ffclaire  et  limpide,  et  que  ce  préjugé  est  presque  général  dans  toute  la 
<t Flandre".  Michelet  a  dit  quelque  part  qu'on  n'avait  pas  en  France  frpris 
rrun  seul  bain  durant  mille  ans  :i  :  Michelet  s'est  trompé,  et  voici  qu'à  Mau- 
beuge nous  trouvons  de  nombreuses  étuves  qui,  s'il  faut  tout  dire, 
devinrent  aux  xv'  et  xvi"  siècles  d'assez  mauvais  lieux  utilement  surveillés 
par  la  police.  Les  amateurs  de  chasse  n'apprendront  pas  sans  quelque 
plaisir  que  le  comte  de  Hainaut  entretenait  à  Maubeuge  mie  partie  de 
sa  meute;  mais  les  historiens  de  la  charité,  qui  sont  très  supérieurs  à 
ceux  de  la  cynégétique,  constateront,  de  leur  côté,  qu'il  y  avait  dans 
Maubeuge,  à  la  chapelle  Saint-Antoine,  un  hôpital  pour  les  pauvres  pè- 
lerins passagers  et  infirmes.  L'histoire  des  pèlerinages  est,  d'ailleurs,  bien 
loin  d'être  achevée  ;  mais  nous  savions  déjà  et  nous  ne  sommes  pas  étonnés 
de  voir  qu'à  Maubeuge  comme  ailleurs,  jusqu'à  la  lin  du  xvi*  siècle,  les 


—  290  — 

pèlerinages  ont  constilué  une  véritable  pe'nalitë.  Les  principaux  pèleri- 
nages où  l'on  adi'esse  les  coupables  sont  ici  ceux  de  la  Sainte-Larme  à 
Vendôme,  de  Saint-Nicolas-du-Port,  de  Saint-Antoine  en  Viennois,  et, 
chose  plus  rare  peut-être ,  de  Saint-Ambroise  de  Milan  et  de  Saint-Marc 
de  Venise.  11  s'en  faut  d'ailleurs  que  toutes  les  pénalite's  aient  été  aussi 
douces,  et  rien  n'est  sauvage  comme  la  procédure  contre  les  sorciers  et 
sorcières.  Les  suicides  sont  i-ares  à  Maubeuge,  mais  c'est  qu'on  avait 
pris  soin  d'y  entourer  ce  crime  dune  suprême  horreur,  et  c]ue  le  cada\Te 
du  suicidé,  objet  du  mépris  universel,  était  ti-aîné  sur  une  claie,  pendu 
à  une  fourche,  jeté  à  la  voirie.  La  moralité  publique ,  sans  cesse  menacée, 
est  plus  ou  moins  ingénieusement  défendue,  et  il  nous  faut  ici  assister 
au  supphce  de  la  corhilette  ou  de  la  manderlcttc ,  qui  était  réservé  aux 
folles  filles  et  aux  blasphémateurs.  On  mettait  la  femme  dans  im  vaste 
panier  très  haut  perché  qu'à  l'aide  de  poulies  et  de  trucs  divers  l'on 
faisait  descendre  jusque  dans  la  rivière.  . .  mclusivement  et  à  plusieurs 
reprises.  Nous  ignorons  si  ce  rafraicliissement  a  été  favorable  aux  bonnes 
mœurs.  Mais  il  ne  faudrait  pas,  d'ailleurs,  rester  sur  ce  spectacle.  Il  en 
est  d'autres  qui  nous  dédommagent  de  tant  de  rudesses ,  et  c'est  avec 
quelque  attendrissement  (le  cas  est  connu)  que  nous  voyons  une  jeune 
iille,  Mikelette  du  Colombier,  racheter,  en  16/12,  mi  condamné  à  mort  en 
l'épousant.  Voilà  qui  vaut  mieux  que  la  corbilelte. 

rrLe  livre  de  M.  Jennepin  est  plein  de  faits,  plein  d'épisodes,  plein 
d'anecdotes.  Il  ne  sera  pas  goûté  uniquement  par  les  habitants  de  Mau- 
beuge et  inspirera  quelque  chose  de  plus  grand  et  de  plus  vif  (jue  le 
patriotisme  de  clocher." 

M.  Léon  Gautier  offre  ensuite,  de  la  part  de  M.  Gustave  Saige,  une 
bi'ochure  intitulée  :  Sceaux  extraits  du  trésor  des  chartes  du  comté  de  Re- 
thel.  Catalogue  des  moulages  exposes  au  pavillon  de  Monaco ,  à  l' Exposi- 
tion universelle  (Monaco ,  i88(),  in-S"). 

!\I.  Léon  Gautier  l'ait  ressortir  l'intérêt  de  la  collection  dont  il  s'agit. 
II  insiste  sur  les  services  que  M.  Saige  a  rendus  à  la  science  historique, 
en  faisant  connaître  les  trésors  recelés  dans  les  tu-chives  de  la  princi- 
pauté de  Monaco.  Il  signale  enlhi  ia  perfection  à  laquelle  ont  été  amenés, 
depuis  quelque  temps,  les  procédés  employés  pour  la  reproduction  exacte 
des  anciens  sceaux. 

SÉANCE  DU    3o   AOÛT. 

Sont  offerts  : 

Sculptures  et  inscriptions  de  Palmyre  h  la  gUiptothhquc  de  Ntj  Carlsberg, 
décrites  et  expliquées  par  M.  Simoiisen.  rabbin,  avec  8  planches  zin- 


—  :>1M   — 

co^nraphiées,  dessinées  par  M.  le  D'  J.  Eiitin»,  prolesscur  à  l'Universild 
(1(1  Slrasbourg,  et  18  photo^iravures  (Copenhajjue,  1889,  in-8°); 

Epifrophia  Indica  and  record  of  the  archfpo/offical  mrvny  of  Indin ,  rfcueil 
publié  pur  M.  J.  liiirgess,  3'  partie,  avril  1889  (Calcutta,  1889,  in-/»"). 

M.  Jules  (îiRAKD  présente,  de  la  part  de  M.  Lebaicrue,  une  brochure 
intitulée  :  La  réforme  orthoQrapliifjHC  et  l' Académie  française  (Pai'is,  1889, 

in-8"). 

Le  PuiîsiDENT  oITre,  au  nom  de  l'auteui-,  Si  Mobanuned  es-Senoussy, 
un  volume  intitulé  :  c^;!;^!  ij-*-^  Le  lever  des  planètes,  traité  juridique 
de  la  propriété  foncière. 

rLa  loi  beylicalc  du  1"  juillet  i885  a  eu  pour  objet  d'appliquer  le 
régime  dit  de  YAct  Torrens  à  la  propriété  foncière  en  Tunisie.  Bien  (jue 
ce  réfjime  soit  facultatif,  le  Gouvernement  tunisien  a  jugé  bon  d'en  faire 
connaître  à  ses  sujets  tous  les  avantages  et  aussi  de  leur  montrer  qu'il 
n'était  point  en  contradiction  avec  les  principes  les  plus  rigoureux  de  la 
législation  musulmane.  Si  Mohammed  es-Senoussy,  cjui  a  été  chargé  de 
celte  double  tâche,  s'en  est  acquitté  avec  le  plus  rare  bonheur.  Non  seide- 
ment  ce  savant  jurisconsulte  musulman  s'est  ellbrcé  de  faire  ressortir  tous 
les  avantages  du  nouveau  système  de  constitution  de  la  propriété  foncière , 
mais  encore  il  a  pris  soin  de  rechercher  dans  les  législations  anciennes , 
hébraïque,  grecque  et  romaine,  aussi  bien  que  dans  la  loi  musulmane, 
tous  les  arguments  qui  pouvaient  militer  en  faveur  de  la  thèse  qu'il  avait 
mission  de  soutenir.  Son  ouvrage,  dont  le  litre  est  Le  lever  des  planètes ,  est 
écrit  avec  une  correction  et  une  méthode  qui  ne  sont  ordinairement  pas 
en  usage  parmi  les  auteurs  juridiques  orientaux;  c'est,  en  effet,  une 
chose  admise  chez  les  musulmans  que  la  science  du  droit  s'allie  rarement 
à  un  talent  littéraire.  Mais  Si  Mohammed  es-Senoussy  est  un  fin  lettré,  qui 
manie  le  vers  avec  facilité,  et  il  appartient  à  cette  classe  de  magistrats 
littérateurs  dont  la  France,  en  particulier,  a  eu  de  si  nombreux  et  si 
illustres  représentants,  n 

Ont  encore  été  offerts  : 

Académie  d'IIippone.  Comptes  rendns  des  réunions.  Bulletin  n"  -3/1 
(Bônc,  1889,  in-8'); 

Académie  des  sciences  et  Ivllrcs  de  Montpellier.  Mémoires  de  la  section 
des  lettres,  t.  VIII,  3°  fascicule  (Montpellier,  1889,  in-Zi"); 

Académie  roijale  de  Belgique.  Compte  rendu  des  séances  de  la  Commis- 
sion royale  d'histoire,  ou  Recueil  de  ses  bulletins,  t.  \IV,  XV  et  XVI 
(Bruxelles,  1  887-1 H89.  in-8'"); 


—  292  — 

Académie  royale  des  sciences,  des  lettres  et  des  heaux-arts  de  Belgique. 
Introduction  au  tome  VU  de  la  Table  chronologique  des  chartes  et  diplômes 
imprimés  concernant  l'histoire  de  la  Belgique  (Bruxelles,  1888,  in-Zi°); 

Annales  du  commerce  extérieur,  année  1889,  7'  et  8'  fascicules  (Paris, 
i889,in-8°); 

Annales  du  musée  Guimet.  Bévue  de  l'histoire  des  religions,  publiée 
sous  la  direction  de  M.  Jean  Réville,  10'  année,  t.  XIX,  11°'  i-3  (Paris, 
1889,  in-S"); 

Atti  délia  Beale  Accademia  dei Lincei ,  286'  année.  A'  série,  Bendiconti , 
vol.  V,  fasc.  6-12  ,  etc.  (Rome,  1889,  in-4°); 

Biblioteca  nazionale  centrale  di  Firenzc.  Bolleltino  délie  pubblicazioni 
italiane  ricevute  per  diritto  di  stampa,  n°'  8/1-87  (Florence,  1889,  in-S"); 

Bibliothèque  de  l'École  des  chartes,  tome  L,  3'  livraison  (Paris,  1889, 

in-8"); 

Biographie  nationale,  publiée  par  l'Académie  royale  des  sciences,  des 
lettres  et  des  beaux-arts  de  Belgique,  l.  IX,  3'  fasc,  et  t.  X,  i"fasc. 
(Bruxelles,  1886-1887,  in-8°); 

Bulletin  de  la  Société  archéologique  et  historique  de  la  Charente,  t.  X, 
année  1888  (Angoulême,  1889,  in-8°); 

Bulletin  de  la  Société  archéologique ,  scientifique  et  littéraire  de  Béziers 
{Hérault),  û'  série,  t.  XIV,  2'  livraison  (Béziers,  1889,  in-8°); 

Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie,  année  1889,  n°  1 
(Amiens,  in- 8"); 

Bulletin  historique  de  la  Société  des  antiquaires  de  la  Morinic ,  38' année, 
i5o°  livraison  (Saint-Omer,  1889,  in-8°); 

Bulletins  de  la  Société  des  antiquaires  de  l'Ouest,  1"  trimestre  de  1889 

(Poitiers,  in-8''); 

Commission  royale  pour  la  publication  des  anciennes  lois  et  ordonnances 
de  la  Belgique.  Procès-verbaux  des  séances,  VIP  volume,  2'  cahier 
(Rruxelles,  1889,  in-8"); 

École  française  de  Bome.  Mélanges  d'archéologie  et  d'histoire,  9'  année, 
fasc.  i-ii  (Paris,  1889,  in-8"); 

Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité,  par  IMM.  Georges  Perrot,  membre 
de  rinstitul,  et  Charles  Chipiez,  t.  V,  livraisons  ^kk-ûbi  (Paris,  1889, 

gr.in-8°); 

Journal  asiatique ,  n°  3,  avril-juin  1889  (Paris,  in-8''); 

Mémoires  couronnés  et  autres  mémoires  publics  par  l'Académie  royale 
des  sciences,  des  lettres  et  des  beaux-arts  de  Belgique,  t.  XL,  XLI  el 
XLII  (Bnixelles,  1887-1  889  .  in-8°); 


—  '2\rs  — 

Mémoires  couronnes  cl  mémoires  des  savants  ctranffcrs ,  publics  par 
l'Académie  royale  des  sciences ,  des  lettres  et  des  beaux-arts  de  Bclgi'iue , 
l.  \1J\  (lîruxelles,  1888,  in-/i°); 

Mémoires  de  l'Académie  de  Stanislas,  1888  (Nancy,  1889,  in-8"'); 

Mémoires  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie ,  3'  série,  t.  X  (Paris, 
iS8(),  in-S"); 

Proceedin^s  nf  tlte  Society  of  antiquanes  of  London,  2'  série,  vol.  XII, 
n"3  (Londres,  1889,  in-8°); 

Recueil  des  notices  et  mémoires  de  la  Société  archéologique  du  départe- 
ment de  Constanlinc,  1888-1889  (Conslanline,  Alger  et  Paris,  in-8''); 

Jlcvue  africaine,  o3%innée,  11°  192  (Alger,  1889,  in-8°); 

Pïcvuc  arcltéolofrique,  3*  série,  t.  XIII,  mai-juin  1889  (Paris,  in-8°); 

Revue  des  études  juives ,  t.  XVIII,  n°  36  (Paris,  1889,  in-8°); 

Revue  des  Pyrénées,  etc.,  t.  I,  1889,  3°  trimestre  (Toulouse,  in-S"); 

Revue  des  questions  historiques,  ^k'  année,  91'  livraison  (Paris,  1 889  , 
in-8^); 

Revue  épigraphique  du  midi  de  la  France ,  n"  53  (\  ienne  [Isère],  1889, 
in-8»); 

Rivista  archeoloffica ,  j)ubliée  par  M.  A. -G.  Borges  de  Figueiredo, 
vol.  III,  n""  5-7  (Lisbonne,  1889,  in-S"); 

Viestnik  hrvatshoffa  arkeologickoga  druzlva,  11'  année,  n°  3  (Agram, 
1889,  in-8'). 


COMPTES    REÎVDUS  DES  SÉANCES 

DE 

L'ACADÉMIE    DES    INSCRIPTIONS 

ET  BELLES-LETTRES 
PENDANT  L'ANNÉE  1889. 


COMPTES  RENDUS  DES  SEANCES. 
SEPTEMBRE-OCTOBRE. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  BARBIER  DE  MEYNARD. 


SÉANCE    DU     G   SEPTEMBRE. 

Le  Secrétaire  perpétuel  communique  à  i'Acadëmie  une  lettre 
de  faire  part  qui  annonce  la  mort  de  notre  correspondant  à 
Heidelber<j,  M.  Gustave  Weil,  décédé  le  99  août  dernier. 

Le  Président  rappelle  que  M.  Gustave  Weil,  dont  la  mort  est 
annoncée  à  l'Académie,  était  depuis  longtemps  professeur  de 
langues  orientales  à  l'Université  de  Heidelberg.  Il  a  écrit  plusieurs 
ouvrages  estimés  des  orientalistes,  entre  autres  une  histoire  des 
califes,  rédigée  d'après  des  documents  arabes  qui  étaient  inédits 
lorsqu'il  publia  cet  important  ouvrage.  M.  Weil  a  aussi  collaboré 
à  plusieurs  revues  d'érudition,  où  il  exerçait  avec  une  impartialité 
(|uelquofois  un  peu  sévère  les  droits  de  la  critique. 

Le  Président  rappelle  qu'un  mois  s'est  écoulé  depuis  la  mort 
de  M.  Amnri  et  de  M.  le  baron  de  Wifte,  associés  étrangers  de 
l'Académie. 

L'Académie,  consultée,  décide,  par  un  vote,  qu'il  y  a  lieu  de 
procéder  à  leur  remplacement.  Elle  nommera  dans  le  cours  du 

XVII.  21 


—  296  — 

mois  prochain  la  Commission  qui  sera  chargée  de  dresser  une 
liste  de  candidats  pour  chacune  des  deux  places  vacantes. 

M.  L.  Delisle  communique  une  note  intitulée  :  Fragments  d'un 
registre  des  enquêteurs  de  saint  Louis  f'^. 

Notre  confrère  rappelle  combien  de  débris  des  premiers  mo- 
numents de  la  typographie,  combien  de  fragments  littéraires  latins 
et  français,  combien  de  chartes  ou  de  diplômes  anciens  ont  été 
retrouvés  dans  le  parchemin  des  reliures.  C'est  une  nouvelle  dé- 
couverte de  ce  genre,  d'une  grande  importance  historique,  qui 
vient  d'être  faite.  Elle  est  due  à  M.  Alfred  Richard,  archiviste  du 
département  de  la  Vienne. 

Dans  les  cartonnages  de  trois  exemplaires  d'une  Chrestomathie 
grecque  avec  lexique  grec-français ,  qui  est  l'œuvre  de  notre  ancien 
et  regretté  confrère  Joseph-Victor  Le  Clerc  et  qui  parut  à  la  librairie 
Delalain  en  1828,  M.  Alfred  Richard  a  trouvé  six  feuillets  de 
parchemin,  couverts  d'une  écriture  du  xiii*  siècle.  Ce  sont  des 
fragments  des  procès-verbaux  dressés  par  quelques-uns  de  ces 
commissaires  que  saint  Louis  avait  chargés  de  faire  une  enquête 
détaillée  et  approfondie  sur  l'administration  des  officiers  royaux 
et  sur  les  plaintes  auxquelles  elle  donnait  lieu.  Ces  fragments  sont 
de  12^7  ou  12^8  et  concernent  spécialement  la  Picardie  (pré- 
vôtés de  Béthisy,  de  Compiègne,  de  Péronue,  de  Pont-Sainte- 
Maxence,  de  Saint-Quentin,  de  Senlis,  etc.). 

M.  Delisle  fait  ressortir  la  valeur  des  mentions  contenues  dans 
les  feuillets  découverts  par  M.  Richard.  Quelques-unes  se  rappor- 
tent à  des  familles  dont  le  nom  intéresse  l'histoire,  telles  que 
celle  de  Robert  de  Clari,  l'historien  de  la  conquête  de  Constan- 
tinople  en  i2oi,  et  celle  de  Gérard  La  Truie,  chevalier  lorrain, 
un  des  héros  de  la  journée  de  Bouvines.  D'autres  attestent,  une 
fois  de  plus,  l'étendue  des  scrupules  de  saint  Louis,  qui  se  croyait 
responsable  des  abus  commis  dans  ses  Etats,  non  seulement  par 
ses  agents,  mais  encore  par  ceux  de  son  père  Louis  VIII  et  de  son 
aïeul  Philippe  Auguste.  C'est  ainsi  qu'on  remarque,  parmi  les 
griefs  soumis  aux  enquêteurs,  des  plaintes  qui  remontent  à  une 

'')  Voir  aux  Communicatio.ns,  n°  XXIIl  (p.  3i  5-336). 


—  297  — 

date  liés  ancienne  et  dont  les  auteurs  ne  pouvaient  plus  invoquer 
d'autres  le'nioins  que  la  notoriété'  pul)Ii(|ue  :  testis  fama  pairie. 
Enlin,  notre  confrère  signale  une  série  darticlcs  relatifs  aux  juifs 
de  Saint-Quentin.  On  y  voit  que  ces  juifs  avaient  e'té  expulses 
vers  i2/i5  et  leurs  biens  confisqués;  des  chrétiens,  qui  se  plai- 
gnaient d  avoir  été  autrefois  victimes  de  leurs  procédés  usuraires, 
demandèrent  aux  enquêteurs  la  restitution  de  ce  qu  ils  avaient 
perdu.  M.  Delisle  a  relevé  dans  cette  partie  du  rapport  les  nom^ 
d'une  cinquantaine  de  personnages  juifs  des  deux  sexes,  qui  habi- 
taient Saint-Quentin  dans  la  première  moitié  du  xiii^  siècle. 

et  Les  librairies  et  les  bibliothèques  pourvues  de  livres  qui  ser- 
vaient aux  écoliers  du  temps  de  la  Restauration,  dit  en  terminant 
M.  Delisle,  renferment  peut-être  des  volumes  couverts  de  frag- 
ments analogues  à  ceux  que  je  viens  de  faire  connaître.  Je  ne 
regretterais  pas  d'en  avoir  fait  la  remarque,  si  des  recherches 
dirigées  de  ce  côté  amenaient  un  jour  la  découverte  de  nouveaux 
feuillets  des  procès-verbaux  des  enquêteurs  de  saint  Louis.-» 

M.  Ch.-Ém.  Ruelle  termine  la  lecture  de  son  mémoire  inlitulé: 
Dnmascim;  soti  traité  (ks  premiers  principes  ^^\ 


SBANCE   DU    l3    SEPTEMBRE. 

Le  Pkésidenï  annonce  qu'il  met  à  l'ordre  du  jour  de  la  séance 
du  2  0  septembre  la  désignation  d'une  lecture  à  faire  à  la  pro- 
chaine séance  trimestrielle  des  cinq  Académies. 

M.  Joachim  Menant  donne  la  première  lecture  d'un  mémoire 
sur  la  ville  antique  de  Karkemis,  en  Asie  Mineure. 

Votre  confrère  s'atlaclie  à  établir  que  cette  ville  occupait  rem- 
placement où  se  trouve  aujourd'hui  un  /«him/hs  connu  sous  le  nom 
de  Kalaat  Jérablus,  sur  la  live  droite  de  l'Euphrate,  à  six  heures 
de  marche  de  la  forteresse  de  Biredjek.  A  l'appui  de  cette  opinion, 
il  donne  un  nouveau  commcnlaire  géographique  des  inscriptions 
où  Teglat-Pal-Asar  et  Assur-Nasir-Habal  ont  raconte  le  détail  de 
leurs  expéditions. 

'')   Voii' uiix  CojiMiM(MTio\s.  n"  WIV  Cf».  .■{••(l-N.'^/i), 

ni  . 


—  298  — 

M,  Aloïss  Heiss  présente  à  rAcadéinie  la  pliotograpliie  d'une 
lettre  autographe  et  ine'dite  de  don  Carlos,  fds  de  Philippe  II, 
adressée,  le  i8  février  1567,  à  son  ambassadeur  à  Rome. 

Dans  cette  lettre,  l'héritier  présomptif  de  Philippe  11  demande, 
entre  autres  choses,  deux  reliques  du  Christ  conservées  à  Piome, 
et  insiste  pour  que  chaque  jour,  à  son  intention,  on  célèbre  des 
messes,  depuis  10  heures  du  matin  jusqu'au  coucher  du  soleil. 

D'après  de  volumineuses  correspondances  privées  et  de  nom- 
breux rapports  secrets  des  ambassadeurs  et  chargés  d'affaires  alle- 
mands, anglais,  espagnols,  français,  vénitiens,  etc.,  M.  Heiss  se 
croit  autorisé  à  préciser  le  sens  de  ces  demandes.  tfLe  prince, 
dit-il,  ayant  été  une  première  fois  rendu  miraculeusement  à  la 
santé  par  le  contact  du  corps  de  saint  Diego,  espérait,  en  écrivant 
à  Rome,  obtenir  du  ciel,  grâce  à  la  présence  des  saintes  reliques 
de  Notre  Seigneur  et  à  l'efficacité  des  messes  journellement  célé- 
brées, le  nouveau  miracle  qu'il  attendait  au  moment  d'épouser 
sa  cousine  Anne  d'Autriche,  n 

M.  Heiss  met  ensuite  sous  les  yeux  des  membres  de  l'Académie  : 

1°  Un  portrait  de  don  Carlos  à  l'âge  de  onze  ans,  photographié 
d'après  le  tableau  original  de  Coello,  au  musée  de  Madrid; 

9°  Une  médaille  de  bronze  de  Pompeo  Leoni,  à  l'effigie  du 
même  prince  et  datée  de  1567  ; 

3°  La  photographie  du  dernier  portrait  de  don  Carlos,  appar- 
tenant au  comte  d'Onate.  Cette  peinture  est  datée  de  1667,  c'est- 
à-dire  de  l'année  même  oi*i  fut  écrite  la  lettre  qui  fait  l'objet  de 
la  communication  de  M.  Heiss. 

M.  Casati  fait  une  nouvelle  communication  sur  l'archéologie 
étrusque. 

Dans  plusieurs  lectures  antérieures,  M.  Casati  a  signalé  la  per- 
fection oij  avait  été  porté,  chez  les  Etrusques,  l'art  de  travailler 
les  métaux,  le  bronze,  l'or  et  l'argent.  Il  présente  aujourd'hui  à 
l'Académie  plusieurs  spécimens  qui  proviennent  des  dernières 
fouilles  faites  à  Orvieto,  àChiusi  et  à  Pérouse.  Ce  sont  d'abord  des 
bijoux,  qui  se  font  remarquer  par  ces  granulations  d'une  ténuité 
extrême  que  l'art  moderne  réussit  à  peine  à  imiter,  des  boucles 
d'oreilles,  des  spirales,  des  anneaux  d'or,  des  têtes  de  broches; 


—  299  — 

puis  j)lusieiiis  objets  de  bronze  fiiioinciit  ciselés,  une  tète  de 
statuette,  Tanse  d'une  situla,  deux  œs  rude,  monnaie  primitive 
provenant  d'Orvieto.  M.  Casati  y  joint  deux  monnaies  d'argent  de 
Populonia,  dans  lesquelles  il  voit  le  modèle  du  denier  et  du  ses- 
terce romain.  Le  denier,  qui  représente  une  tête  de  femme,  porte 
la  marque  X,  c'est-à-dire  dix  as,  ce  qui  est  aussi  la  valeur  du 
denier  romain. 

En  terminant,  M.  Casati  transcrit  sur  le  tableau  une  inscrip- 
tion étrusque  découverte  tout  récemment  dans  les  fouilles  faites 
à  Véies  pour  le  compte  de  S.  M.  dom  Pedro,  empereur  du  Brésil, 
et  il  en  propose  une  interprétation. 

M.  Théodore  Reinach  communique  quelques  observations  nou- 
velles sur  une  inscription  latine  et  hébraïque,  d'ailleurs  connue 
et  publiée  depuis  longtemps,  qui  est  conservée  au  musée  de  Nar- 
bonne  et  qui  doit  provenir  de  cette  ville  ou  des  environs.  Ce 
texte,  qui  commence  par  la  figure  grossière  du  chandelier  à  sept 
branches,  se  lit  ainsi  : 

le  requiescunt  in  pace  benememori  très  fili  dni  Paragori  de  filio 
condam  dni  Sapimdi,  id  est  Justus,  Matrona  et  Dulciorella,  qui 
vixserunt  Justus  annos.iAj^,  Matrona  anns  xx,  Diikiorela  annos  vnii. 
'7N"!2/'['']  b^  Wib'^-  Obuerunr  anno  secundo  dmi  Egicani  régis. 

rici  reposent  en  paix  les  trois  enfants  d'heureuse  mémoire  du 
seigneur  Paragorus,  fils  du  défunt  seigneur  Sapaudus,  à  savoir 
Justus,  Matrona  et  Dulciorella,  qui  ont  vécu,  Justus  trente  ans, 
Matrona  vingt  ans,  Dulciorella  neuf  ans.  Paix  sur  Israël!  Ils  sont 
décédés  dans  la  deuxième  année  du  seigneur  Égica,  roi.ii 

La  forme  des  lettres  est  aussi  barbare  ([ue  la  langue  et  Tortho- 
grapho;  on  ne  saurait  s'en  étonner,  si  l'on  considère  la  date  de 
l'inscription,  l'an  ii  du  roi  goth  Egica  ou  Egiza,  c'est-à-dire 
l'an  688  ou  689  de  notre  ère. 

L'intérêt  principal  de  ce  texte  réside  dans  les  noms  propres  des 
cinq  personnages  (juil  mentionne.  Ce  sont  certainement  des  juifs, 
et  plusieurs  portaient  probablement  des  noms  hébreux.  Paragorus 
(et  non  Parator  ou  Paratorius,  comme  on  a  lu  à  tort),  pour  Pa- 
regorus,  Ilapr/yopos,  représente  riiébrcu  Menahem  (oniD), 'con- 


—  300  — 

solaleui"".  JusUis  est,  soit  une  traduction  de  Gaddiq  (pn2i),  soit 
une  transcription  par  i\  peu  près  d'un  nom  tel  que  Joseph.  Dul- 
ciorella  ou  Dulciorela  est  une  des  formes  par  lesquelles  on  a 
cherche'  à  rendre  en  latin  le  nom  de  Noémi  ("iDVJ).  Au  contraire, 
Sapaudus  ctMatrona  sont,  à  ce  qu'il  semble,  des  noms  purement 
romains;  le  premier  est  peut-être  à  Torigine  un  ethnique  de'signant 
un  personnage  originaire  de  la  Savoie,  Sapaiulia. 


SEANCE  DU    2  0    SEPTEMBRE. 

M.  Joachim  Menant  lit  une  nouvelle  note'''  sur  un  cylindre 
du  Muse'e  britannique,  qui  a  fait  Tobjet  d'une  première  observa- 
tion présentée  par  lui  à  la  séance  du  2  août  dernier  C-l 

Ce  cylindre,  gravé  au  nom  d'Urkham,  roi  chaldéen  qui  ré- 
gnait au  moins  vingt  siècles  avant  notre  ère,  n  a  été  connu  d'abord 
que  par  des  dessins  exécutés  vers  1820  et  reproduisant  un  original 
appartenant  alors  à  M.  John  Hine.  En  1880,  cet  original  fut 
donné  au  Musée  britannique  par  M.  C.-D.  Cobham,  cominissioner 
à  Larnaca.  Notre  confrère,  remarquant  dans  la  gravure  un  détail 
qui  ne  peut,  dit-il,  appartenir  à  l'époque  d'Urkham  (le  pied  d'un 
trône  taillé  en  forme  de  pied  de  biche),  en  avait  conclu  que  le 
monument  était  apocryphe.  Il  avait,  en  outre,  émis  incidemment 
l'hypothèse  que  le  cylindre  de  M.  Cobham  pouvait  avoir  été  1j\- 
briqué  en  notre  siècle,  d'après  les  dessins  de  1820,  dessins  qui 
eux-mêmes  auraient  reproduit  inexactement  un  original  authen- 
tique, aujourd'hui  perdu. 

Cette  dernière  hypothèse  parait  devoir  être  abandonnée  :  par 
une  lettre  adressée  à  l'Académie,  M.  Cobham  a  fait  savoir  que  le 
cylindre  donné  par  lui  au  Musée  britannique  lui  était  venu  di- 
rectement de  la  succession  du  premier  possesseur,  M.  John  Hine. 
M.  Menant  en  conclut  que  la  fabrication  peut  avoir  eu  lieu  à  une 
date  plus  reculée  qu'il  ne  l'avait  pensé  d'abord;  mais  il  maintient 
(|ue  le  monument  est,  dans  tous  les  cas,  apocryphe. 


''^  Voir  ;iiix  (IommlivicatioiNs,  ii"XXV  (ji.  3o/i-338). 
<-)   Voir  ci-(le^siiR  (p.  -^J^'i). 


—  301   — 

L'Académie  désigne  M.  Bréal  pour  donner  lecture,  à  la  pro- 
chaine séance  trimestrielle  des  cinq  classes  de  l'Institut,  de  son 
mémoire  intitulé:  Deux  prétendus  cas  (V  analogie. 

M.  Terrien  de  Lacoupcrie,  de  Londres,  fait  une  communica- 
tion sur  Une  monnaie  hactro-chinoisc  bilingue  du  i"  siècle  avant 
notre  ère'^h 

Ce  spécimen,  unique  jusqu'ici,  représente  un  monnayage  émis 
par  le  roi  grec  de  Bactriane,  Herniœus,  et  le  roi  des  Yueh-ti, 
lorsque  les  deux  peuples  vinrenten  contact,  vers  les  années  6o-3o 
avant  notre  ère.  L'inscription  en  caractères  indo-bactriens  est 
vérifiée  par  celles  des  autres  monnayages  du  même  roi,  tandis 
que  l'inscription  chinoise  rappelle  celles  de  certaines  monnaies 
chinoises  du  \\f  siècle  avant  notre  ère,  dont  les  Yueh-ti  eurent 
connaissance  et  qu'ils  imitèrent  alors  qu'ils  étaient  établis  vers 
les  frontières  nord-ouest  de  l'empire  du  Milieu. 

M.  Oppert  rend  compte  d'un  petit  baril,  contenant  une  in- 
scription métrologique,  qui  confirme,  dit-il,  ses  découvertes  re- 
latives aux  signes  numériques  des  volumes  de  capacité  dans  les 
textes  cunéiformes.  Ce  monument  nous  fait  connaître,  d'ailleurs, 
un  système  métrologique  nouveau  dans  ces  textes,  le  système 
centésimal ,  au  lieu  du  système  sexagésimal ,  suivi  dans  les  textes 
juridiques  de  la  Chaldée. 


SÉANCE   DU   27   SEPTEMBRE. 

Le  Ministre  de  l'instruction  publique  transmet  à  l'Académie 
les  propositions  de  M.  le  Directeur  de  l'École  française  de  Rome, 
tendant  à  accorder  une  prolongation  de  séjour  d'une  année  à 
M.M.  Audolient,  Jordan  et  Gsell,  membres  de  l'Ecole. 

Renvoi  à  la  Commission  compétente. 

Par  une  autre  lettre,  le  Ministre  de  finstruction  publique 
communique,  de  la  part  du  Ministre  des  affaires  étrangères,  di- 
verses inscriptions  grecques  recueillies  à  Maronée  pai'  M.  Degrand , 
consul  de  France  à  Andrinople. 

<"   Voir  aux  Communications,  n°  XXVI  (p.  338-368). 


—  30-2  — 

(Jes  inscriptions  sont  soumises  séance  tenante  à  l'examen  de 
M.  Weil. 

M.  Sime'on  Luce  lit  une  notice  sur  Les  jeux  -populaires  en  France 
au  XIV'  siècle,  d'après  une  ordonnance  de  Charles  V. 

M.  Weil  rend  compte  sommairement  des  inscriplions  recueillies 
par  le  Consul  de  France  à  Andrinople'^'. 

M.  Menant  commence  la  seconde  lecture  de  son  me'moire  sur 
la  ville  antique  de  Karkemis. 


SÉANCE  DU   h  OCTOBRE. 

Le  Président  prend  la  parole  en  ces  termes  : 

tf Messieurs,  vous  connaissez  tous  la  perte  cruelle  qui  vient 
encore,  et  pour  la  troisième  fois  en  moins  de  trois  mois,  affliger 
l'Académie.  La  mort  du  général  Faidherbe  est  un  deuil  national. 

cfj'ai  rempli,  mardi  dernier,  l'honorable  mais  triste  devoir 
d'adresser,  en  votre  nom  d'abord  et  au  nom  de  l'Institut  tout 
entier,  un  adieu  suprême  devant  le  cercueil  de  ce  soldat  illustre 
qui  a  été  aussi  un  vaillant  soldat  de  la  science.  D'après  les  usages 
de  l'Académie,  l'hommage  que  j'ai  adressé  à  sa  mémoire  sera 
bientôt  publié  :  je  me  bornerai  donc  à  rappeler  en  quelques  mots 
les  titres  scientifiques  qui  ont  valu  à  notre  regretté  confrère  l'hon- 
neur d'entrer  dans  notre  Compagnie. 

tfDans  une  courte  notice  rédigée  par  le  général  quand  il 
sollicitait  vos  suffrages,  il  avait  inscrit  en  tête  les  trois  mots  : 
linguistique,  ethnographie,  épigraphie;  ces  mots  déterminent 
d'une  façon  précise  la  part  qu'il  a  prise  aux  progrès  des  études 
africaines, 

ff  C'est  à  Faidherbe  que  revient  l'honneur  d'avoir  abordé  le 
premier  l'étude  raisonnée  d'un  dialecte  berbère  et  du  plus  impor- 
tant peut-être  parmi  ces  dialectes,  le  zenaga.  On  donne  ce  nom 
à  une  tribu  qui,  au  xii"  siècle  de  notre  ère,  sortit  des  rives  du 
Sénégal  pour  faire  la  conquête  des  Etats  barbarcsques  et  fonder 
la  puissante  dynastie  des  Almoravidcs.  Vous  avez  couronné,  en 


(1) 


Voir  aux  Commukications,  n"  XXVII  (p,  3/i8-35o). 


—  303  — 

iSbh  ,  l'essai  liii{>;uisti(|U('  que  noire  confrère  publia  sui'  celte 
obscure  question.  Cet  ouvrage,  qu'il  a  par  la  suile  considérable- 
ment amélioré  et  enrichi,  est  remarquable  par  l'ordre,  la  raélhode, 
la  clarté  de  l'exposition,  la  sûreté  avec  laquelle  les  faits  phoné- 
tiques sont  observés  et  ramenés  à  leurs  lois  naturelles.  Un  excel- 
lent juge,  notre  confièrc  M.  Bréal,  a  constaté  que  la  puhlication 
de  ce  livre  était  un  service  rendu  à  la  science  du  langage. 

r  C'est  une  chose  vraiment  digne  d'admiration  que,  pendant  les 
six  années  de  son  gouvernement,  aux  prises  avec  des  dillicultés 
et  des  périls  de  toute  sorte,  insurrections  à  réprimer,  établisse- 
ment militaire  et  colonial  à  fonder,  lutte  contre  le  climat  et  les 
hommes,  le  générai  ait  pu  apprendre  à  fond  les  quatre  langues 
principales  de  ces  régions,  eu  rédiger  la  grammaire  et  préparer 
les  mat(M"iaux  de  son  beau  travail  sur  le  Sénégal,  son  dernier  et 
son  meilleur  travail.  Ce  livre  est,  à  vrai  dire,  l'histoire  de  l'éta- 
blissement de  la  France  dans  l'Afrique  occidentale  depuis  le 
xvii"  siècle  jusqu'à  nos  jours.  C'est  aussi  une  sorte  de  testament 
politi(|ue  dicté  par  le  sage  gouverneur  et  de  l'observation  duquel 
dépendent  peut-être  l'avenir  et  la  prospérité  de  notre  colonie. 
Vous  savez  aussi,  Messieurs,  le  goût  que  notre  confrère  avait  pour 
l'épigraphie  africaine.  C'est  à  ses  persévérantes  recherches  et  à 
ses  encouragements  que  nous  devons  la  collection  complète  des 
inscriptions  numidiques,  recueil  de  matériaux  précieux  pour  le 
déchilfrement  de  ces  textes  dilTiciles.  Mais  ce  que  l'on  doit  dire 
avant  tout  de  ses  travaux  considérés  dans  leur  ensemble,  c'est 
qu'un  patriotisme  ardent  les  inspirait  et  les  dirigeait  :  il  a  servi 
son  pays  par  la  plume  et  par  l'épée  et  c'est  ce  qui  doit  rendre  sa 
mémoire  plus  respectée  et  plus  chère.  Nous  avons  vu,  hélas!  notre 
confrère  bien  rarement  parmi  nous  ;  une  glorieuse  infirmité  le 
condamnait,  depuis  longues  années,  à  un  repos  presque  absolu, 
mais  du  fond  de  son  cabinet  et  sur  son  lit  de  douleur  il  suivait 
avec  intérêt  nos  délibérations  et  nos  travaux. 

fr L'Académie  conservera  un  pieux  et  durable  souvenir  de  ce 
soldat  héroïque,  de  ce  travailleur  infatigable  dont  la  glorieuse  vie 
peut  se  résumer  en  ces  mots  :  amour  de  la  [)atrie,  dévouement  à 
la  science! 71 


—  30/i  — 

L'Académie  fixe  au  vendredi  22  novembre  ie  jour  de  sa  séance 
publique. 

M.  VioLLET  prend  la  parole  pour  compléler  brièvement  une 
communication  faite  par  lui  à  une  séance  précédente '^^. 

La  notion  de  la  loi,  lex,  au  sens  antique  de  décision  prise  par 
le  peuple,  a  persisté,  dit  notre  confrère,  dans  les  écrits  de  cer- 
tains jurisconsultes  sous  l'empire  romain  :  on  la  trouve  même 
dans  le  Digeste,  promulgué  en  533.  Voici  les  textes  : 

Capilo,  au  commencement  de  Tempire,  disait:  tfLex  est  gé- 
nérale jussum  populi  aut  plebis,  rogante  magistralu.i:  (Aulu- 
Gelle,  X,  90.) 

Julianus  :  ripsae  leges  nulla  alla  ex  causa  nos  teneant,  quam 
quod  judicio  populi  receptœ  sunt. a  (Digeste,  I,  m,  De  legibus, 
32,  îx.) 

M.  Deloche  fait  observer  que  ces  textes  constatent  tout  au  plus 
un  souvenir  et  n'impliquent  point  que  les  hommes  du  temps  de 
l'empire  eussent  la  notion  de  la  participation  effective  du  peuple 
à  la  confection  des  lois. 

M.  VioLLET  dit  qu'il  n'entend  pas,  en  effet,  tirer  de  ces  textes 
la  preuve  que  l'antique  notion  de  la  loi  fût,  à  cette  époque,  dans 
l'esprit  des  Romains,  une  réalité  vivante;  il  a  voulu  prouvei- seule- 
ment que  cette  notion  persistait  dans  les  œuvres  de  certains  juris- 
consultes. Dans  sa  communication  précédente,  il  avait  déjà  appelé 
l'attention  de  ses  savants  confrères  sur  ce  point  :  un  membre  de 
l'Académie  lui  avait  fait  observer  que  les  textes  allégués  ne  par- 
laient quedu^îw  et  non  de  la  lex.  Les  citations  qui  précèdent  prou- 
vent que  l'antique  notion,  non  seulement  du  jus,  mais  de  la  Jex, 
persiste  dans  certaines  parties  delà  littérature  juridique  impériale. 

Il  faut  joindre  à  ces  textes  un  passage  important  d'Isidore  de 
Séville  {Etym.,  V,  10). 

M.  Menant  achève  la  seconde  lecture  de  son  mémoire  sur  la 
ville  antique  de  Karkemis. 

M.  René  de  la  Blanclière,  directeur  du  service  des  antiquités 
et  des  arts  dans  la  régence  de  Tunis,  communique  le  résultat 

^1    Voir  ci-dessiis  (p.  109). 


—  ;5o:)  — 

(les  lotiilli's  ('iilic[)iisL's  par  ce  service  dans  la  néci()])()le  de  Inilla 
Hegia  (llanmiain  Deiradji),  aux  environs  de  Souk-cl-Arba. 

Ces  Ibiiilles,  qui  ont  dure  près  d'un  an,  ont  e'té  conduites  par 
M.  le  D*"  Carton,  médecin  militaire.  Elles  ont  fourni,  outre  des 
notions  beaucoup  plus  pre'cises  sur  la  topographie  de  Bulla,  ses 
nécropoles  et  son  histoire,  un  grand  nombre  d'objets,- déposés 
aujourd'hui  au  musée  Alaoui,au  Bardo,  et  dont  une  série  figure 
à  l'Exposition  universelle  dans  le  Pavillon  tunisien.  Le  produit 
total  de  la  fouille  comprend  environ  six  cents  lampes,  doni  plus 
de  deux  cents  à  sujets,  et  près  de  cent  à  marques  de  fabri([uc; 
quarante  ou  cinquante  miroirs  de  bronze,  dont  quatre  à  couvercle 
décoré  de  sujets  en  relief,  plusieurs  centaines  de  vases,  dont  un 
assez  grand  nombre  sont  curieux  par  leur  forme,  des  pierres 
gravées,  des  plombs,  des  terres  cuites  et  tout  un  mobilier  funé- 
raire très  varié,  en  tout  plus  d'un  millier  de  pièces  des  trois  pre- 
miers siècles  de  notre  ère.  M.  de  la  Blanchère  fait  passer  sous  les 
veux  des  membres  présents  différents  spécimens  des  trouvailles 
de  Bulla  Regia. 

RI.  Leitner,  directeur  de  l'Institut  oriental  deWoking  (Grande- 
Bretagne),  fait  une  communication  sur  la  langue,  la  religion  et 
les  mœurs  des  habitants  du  llounza,  territoire  situé  sur  un  ver- 
sant du  Pamir  (^>. 

SÉANCE    DU    1  1    OCTOBRK. 

Le  Président  fait  connaître  à  l'Académie  que  la  Commission 
des  Écoles  d'Athènes  et  de  Rome  a  été  d'avis  d'accorder  une  pro- 
longation de  séjour  d'une  année  à  MM.  Audollent,  Jordan  et  Gsell, 
membres  de  l'Ecole  française  de  Rome. 

L'Académie  adopte  cet  avis.  Le  Ministre  de  l'instruction  pu- 
blique en  sera  informé. 

L'Académie  se  forme  en  Comité  secret  pour  entendre  la  lecture 
du  rapport  de  la  Commission  des  Antiquités  de  la  France  sur  le? 
ouvrages  envoyés  au  concours  de  cette  année'-'. 

f)   Voir  .uix  CoMML.MCATioNt-,  n"  WVIII  (p.  350-3.56). 
;=)   Voir  apijciulice  n"  IV. 


—  306  — 

La  séance  étant  redevenue  publique,  M.  Anatole  de  Barthé- 
lémy lit  une  note  intitulée:  Les  cités  alliées  et  libres  de  la  Gaule, 
diaprés  les  monnaies  ^^K 

La  liste  des  cités  de  la  Gaule  auxquelles  Rome  reconnaissait, 
soit  le  titre  de  libres,  soit  celui  d'alliées  ou  fédérées,  a  été  donnée 
par  Pline.  L'épigraphie  a  déjà  fourni  le  moyen  de  compléter  cette 
liste  par  l'addition  de  quelques  noms;  la  numismatique,  dit  notre 
confrère,  permet  d'en  ajouter  encore  d'autres. En  effet,  il  semble 
que  le  droit  de  battre  monnaie  ait  été  attaché  au  titre  de  cité 
libre  ou  fédérée.  M.  de  Barthélémy  appuie  cette  opinion  sur  l'ana- 
logie des  faits  constatés  dans  la  numismatique  grecque  et  ajoute 
des  remarques  relatives  aux  cités  alliées  ou  libres  de  la  Gaule  dont 
les  monnaies  nous  sont  parvenues. 

Est  adressé  à  l'Académie,  pour  le  prochain  concours  des  Anti- 
quités de  la  France  : 

Archives  de  Bretagne.  Recueil  d'actes,  de  chroniques  et  de  documents 
historiques  rares  ou  inédits,  publié  par  la  Société  des  bibliophiles 
bretons,  etc.,  tome  IV  :  Lettres  et  mandements  de  Jean  V,  duc  de 
Bretagne,  de  iâo-2  à  iâo6,  publiés  avec  notes  et  introduction 
par  M.  René  Blanchard  (Nantes,  1889,  in-li°). 

M.  Théodore  Reinach  communique  à  l'Académie  liois  balles  de 
fronde  grecques,  appartenant,  l'une  à  M.  Gustave  Schlumberger, 
les  deux  autres  au  musée  de  Saînt-Germain-en-Laye. 

M.  de  Longpérier  avait  lu  la  légende  de  la  première  balle 
BABYP2A  et  avait  reconnu  dans  ce  mot  le  nom  d'une  forteresse 
arménienne:  la  balle,  trouvée  à  Rhodes,  aurait  été  tirée  par  des 
frondeurs  arméniens  au  service  de  Milhridate,  en  88  avant  notre 
ère.  M.  Théodore  Reinach  montre,  par  la  comparaison  des  exem- 
plaires de  Saint-Germain-en-Laye,  que  la  légende  doit  être  lue 
BABYPTA,  génitif  dorien  du  nom  propre  Ba^tipras;  c'est  un 
général  rhodien  d'ailleurs  inconnu.  Ce  même  nom  Baé'upTas, 
qui  se  trouve  chez  Polybe  et  chez  Hésychius,  doit  être  rétabli  sur 
plusieurs  inscriptions  où  sa  présence  a  été  méconnue  jusqu'ici. 

Enfin,  M.  Reinach  saisit  l'occasion  du  mémoire  de  Long[)érier 

f)   Voir  aux  Commimcatio.ns,  n"  XXIX  (p.  35/i-36o). 


—  307  — 

pour  comballrc  la  Id^jondc  truuc  pidlendiio  ville  do  Cartilage  en 
Arménie  :  les  textes  allègues  par  Longpérier  pour  prouver  l'exis- 
tence de  celte  ville  ne  résistent  pas,  dit-il,  à  un  examen  critique. 


SÉANCE   DU   18   OCTOBRE. 

T/Acade'mie  décide  ([u'en  raison  de  la  sdance  publique  annuelle 
de  1  Institut  et  de  la  lèle  de  la  Toussaint,  qui  tombent,  cette  année, 
le  vendredi,  ses  deux  procbaines  séances  seront  avancées,  la  pre- 
mière au  mercredi  28,  la  seconde  au  mercredi  3o  de  ce  mois. 

L'Académie  procède  à  la  nomination  de  deux  commissions  qui 
seront  cbargées  de  proposer  des  sujets  de  prix  dans  Tordre  des 
éludes  relatives  au  moyen  âge  et  à  l'antiquité  classique. 

Sont  désignés  : 

Pour  la  Commission  du  moyen  âge  (prix  ordinaire  et  prix 
Delalande-Guérineau):  MM.  Delisle,  Hauréau,  Luce  et  P.  xMeyer; 

Pour  la  Commission  de  l'antiquité  (prix  Bordin)  :  MM.  Girard, 
Heuzey,  Weil  et  Héron  de  Villelossc. 

M.  Simt>on  Luce  est  désigné  comme  lecteur  à  la  prochaine 
séance  publique  annuelle  de  l'Académie. 

M.  J.  Evans  adresse,  pour  le  concours  de  numismatique  (Allier 
de  Hauteroche)  de  1891,  son  ouvrage  intitulé:  The  rhorsemenv  of 
Tarentum.  A  contribution  towards  the  numismatic  history  of  Great 
Greece  (Londres,  1889,  in-8°,  extrait  du  Numismatic  chronicle) . 

M.  Georges  PERROîlitune  sixième  noteC'  de  M.  Victor  Waille, 
professeur  à  l'École  des  lettres  d'Alger,  sur  les  fouilles  qu'il  dirige 
depuis  plusieurs  années  à  Chcrcliell  [Julia  Cœsarea). 

L'auteur  de  ce  rapport  comnience  par  rappeler  les  travaux  qui 
ont  été  exécutés,  depuis  18/12,  parmi  les  ruines  de  l'ancienne 
ville  et  les  principales  découvertes  qui  y  ont  été  faites.  Il  montre 
comment  on  a  été  conduit  à  faire  porter  les  reclierclies  surtout 
sur  cet  énorme  massif  auquel,  dès  le  débul  de  l'occupation,  on 
avait  proposé  de  donner  le  nom  de  palais  des  thermes;  les  dé- 
couvertes ultérieures  ont  confirmé  la  justesse  de  cette  conjecture. 
Le  déblaiement  de  ce  vaste  édifice  est  aujourd'hui   achevé.  Deux 

<*'  Voir  aux  Communications,  n"  XXX  (p.  36o-368). 


—  308  — 

uouvelles  salles  ont  été  dublayées  depuis  le  moment  où  M.  Waille 
avait  entretenu  rAcadéraie  de  Te'lat  des  fouilles;  elles  sont  à 
Fouest  de  la  grande  salle  centrale  et  pre'sentent  quelques  parti- 
cularités intéressantes.  Dans  Tune  d'elles  on  a  trouvé  une  belle 
statue  de  marbre,  qui  est  peut-être  une  Cérès.  11  y  a  aussi  une 
tête  casquée  qui  fait  songer  aux  têtes  d'amazone.  Les  fragments 
d'une  inscription  en  grandes  lettres  contiennent  le  nom  de  Trajan; 
mais  on  n  a  pu  rétablir  encore  l'ensemble  du  texte.  Tous  ces  mo- 
numents vont  prendre  place  dans  le  musée  de  Cherchell,  qui 
renferme  déjà  un  grand  nombre  de  pièces  intéressantes  et  ([ui 
s'enrichit  d'année  en  année. 

Les  fouilles  vont  être  reprises  prochainement.  M.  Waille  en 
attribue  les  résultats  et  le  succès  au  concours  du  conseil  mu- 
nicipal et  de  l'autorité  militaire  ;  il  rend  hommage  au  zèle  qu'ont 
déployé  les  capitaines  qui  ont  été  successivement  placés  à  la 
tête  du  pénitencier;  il  exprime  le  désir  que  le  monument  soit 
désormais  entouré  d'une  grille  et  efficacement  protégé.  11  est  déjà 
en  butte  à  ces  dilapidations  quotidiennes  qui  ont  à  notre  grand 
regret,  on  pourrait  presque  dire  à  notre  honte,  fait  disparaître 
plusieurs  beaux  monuments  de  l'antiquité,  qui  existaient  encore 
sur  le  sol  de  fAlgérie  quand  nous  nous  y  sommes  élablis. 

M.  Georges  Bénédite  rend  compte  d'une  mission  épigraphique 
au  Sinaï,  dont  il  a  été  chargé  par  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres. 

L'explorateur  a  suivi  d'abord  la  route  du  Nord  ou  itinéraire  de 
Niebuhr,  jusqu'au  massif  des  montagnes  sacrées;  il  est  revenu 
par  le  Feiran.  Il  a  rapporté  neuf  cent  cinquante  textes,  dont  le 
plus  grand  nombre  inédits.  Sur  ce  nombre,  la  région  du  Nord, 
assez  pauvre,  ne  figure  que  pour  cent  cinquante.  Les  régions  les 
plus  riches  sont  le  Feiran  et  le  Mukatteb. 

Quelques  observations  sur  l'emplacement  de  ces  textes,  qu'on 
trouve  plus  fréquemment  sur  les  routes,  aux  endroits  de  halte 
ou  de  campement,  que  sur  les  sommets,  tondent  à  faire  élargir 
la  signification  qu'on  leur  prêtait.  Ils  peuvent  avoir  été  placés  en 
ces  endroits,  non  seulement,  comme  on  le  supposait,  à  l'occasion 
de  pèlerinages,  mais  en  toute  autre  occasion. 


—  300  — 

M.  Benédile  ajoute  cVaiilrcs  delails,  d'une  nature  purement 
e'pigrapliique,  qui  peuvent  servir  à  fixer  le  classement  de  ces 
inscriptions  par  e'poques. 

Il  fait  remarquer,  enfin,  que  les  symboles  chre'tiens,  qu'on 
rattachait  par  erreur  à  quelques-unes  de  ces  inscriptions,  en 
sont  nettement  distincts;  ces  marques  sont  dVpoque  et  de  main, 
sinon  posle'rieures,  du  moins  diffe'rentes. 

M.  J.  Halévy  commence  la  lecture  d'un  me'moire  intitule'  : 
L'époque  d: Abraham,  d'après  les  documents  égyptiens  et  babyloniens. 


SÉANCE  DU  2  3   OCTOBRE. 

(  Séance  avancée  au  mercredi ,  à  cause  de  la  séance  publique  annuelle  de  l'Institut , 
qui  a  lieu  le  vendredi  aS  octobre.) 

M.  Emile  Cliënon,  professeur  à  la  Faculté  de  droit  de  Rennes, 
adresse  à  TAcade'mie,  pour  le  prochain  concours  des  Antiquite's 
de  la  France,  deux  ouvrages  dont  il  est  fauteur,  intituie's,  le 
premier  :  Étude  sur  lldstoirc  des  alleux  en  France  (Paris,  1888, 
in-8"),  et  le  second  :  Histoire  de  Sainte- Sévère- en- Berr y  (Paris, 
1889,  in-S"). 

Il  est  proce'de'  à  la  nomination  d'une  Commission  qui  sera 
charge'e  de  préparer  le  programme  du  prix  Loubat  à  décerner 
en  1899. 

Sont  élus:  MM.  Maury,  d'Hervey  Saint-Denys,  Oppert,  Mas- 
pero. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret  pour  entendre  la  lecture 
des  rapports  des  Commissions  chargées  de  proposer  des  sujets  de 
prix  pour  les  concours  de  1892. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  le  Président  annonce  que 
l'Académie  a  choisi  les  sujets  suivants  : 

t"  Pour  le  prix  ordinaire  à  décerner  en  1892  :  Etude  sur  les 
ouvrages  composés  en  France  et  en  Angleterre  qui  sont  généralement 
connus  sous  le  nom  cdArs  diclaminisr>; 

2°  Pour  le  prix  Bordin  à  décerner  en  1892  :  Rechercher  ce  que 
Catulle  doit  aux  poètes  alexandrins  et  ce  qu'il  doit  aux  vieux  lyriques 
grecs. 


—  811)  — 

L'Academip  a,  en  oulro,  décidé  que  le  prix  Delalandc-Guéri- 
iieaii  de  1899  serait  décerne'  au  meilleur  ouvrage  de  critique  sur  des 
documents  imprimés  ou  manuscrits  relatifs  à  l'histoire  ecclésiastique  ou 
à  ïhistoire  civile  du  moyen  âge. 

Les  mémoires  sur  chacune  de  ces  trois  questions  devront  être 
déposés  au  secrétariat  de  Tlnstilut  avant  le  1"  janvier  1899. 

M.  Hauréau  lit  un  mémoire  sur  un  des  ouvrages  les  plus  sou- 
vent copiés  au  moyen  âge,  le  Moralium  dogma  philosophorum , 
attribué  par  divers  scribes  et  par  divers  bibliographes  à  un  assez 
grand  nombre  d'auteurs  différents.  L'objet  du  mémoire  de  M.  Hau- 
réau est  de  prouver  que  cette  curieuse  compilation  Tut  faite,  à  la 
demande  de  Henri  II  Plantagenet,  roi  d'Angleterre,  par  son 
ancien  précepteur  Guillaume  de  Couches. 

M.  Joseph  Halévy  termine  la  lecture  de  son  mémoire  sur  la 
date  à  laquelle  doit  être  placée,  selon  lui, l'existence  d'Abraham, 
d'après  les  indications  fournies  par  la  chronologie  égypto-baby- 
lonienne. 

Divers  auteurs  bibliques  fournissent  des  dates  partielles,  dont 
la  somme  totale  fait  remonter  l'immigration  d'Abraham,  en  Pa- 
lestine, aux  environs  de  l'an  2100  avant  notre  ère.  La  Genèse 
fournit,  en  outre,  un  synchronisme  important  en  racontant  le 
succès  remporté  par  Abraham  sur  l'armée  élamito-babylonienne, 
commandée  par  Kodorlogomor,  roi  d'Élam  ou  de  Susiane,  et  par 
les  princes  ses  vassaux,  Amraphel,  de  Sennaar  ou  Babylone, 
Arioch,  d'Ellasar  ou  Larsa,  et  Tidal,  d'une  nation  indéterminée. 
D'autre  part,  on  sait  par  les  inscriptions  cunéiformes  qu'un  prince 
élamile  de  Babylonie,  du  nom  de  Kudur-Lagamari,  eut  un  fils 
nommé  Eri-Akou,  qui  régna  à  Larsa,  et  un  vassal  babylonien  ap- 
pelé Amrapalt  ou  Hammurabi.  M.  Halévy,  à  l'exemple  de  plusieurs 
assyriologues,  a  déjà  soutenu,  dans  deux  mémoires  soumis  à  l'Aca- 
démie, l'identité  de  ces  princes  avec  ceux  dont  parle  la  Genèse. 

Il  reste  à  démontrer  que  Hammurabi  a  réellement  vécu  au 
temps  d'Abraham,  et  non,  comme  on  l'a  soutenu  récemment, 
deux  cents  ans  avant  ce  patriarche.  A  l'appui  de  cette  dernière 
opinion,  on  a  allégué,  entre  autres  documents,  un  fragment  ba- 
bylonien trouvé  à  Tell  Armana  (Egypte).  M.  Halévy  combat  les 


conoliisions  qui  oui  clé  tirées  des  (ioniK'Osdc  cclVagmonl.  Il  pense 
que,  dans  l'iiilcrpretation  de  ces  données,  il  faut  prendre  pour 
point  de  départ  la  dale  aslronomiqueinent  fixée  de  Tlioulmès  III 
(1503-1/469),  ce  qui  l'ait  rapporler  ravènement  d'Aniénophis  lil 
à  Tan  1619  et  celui  d'Aniénophis  IV,  correspondant  de  Burna- 
Luriash,  loi  de  Babylone,  à  la  fin  du  xiv"  siècle  avant  notre  ère. 
Or,  comme,  d'après  une  indication  de  Nabonide,  le  règne  de  Ham- 
murabi  est  antérieur  de  sept  cents  ans  à  celui  de  Burnaburiash, 
il  en  résulte  que  Hammurabi  est  contemporain  d'Abraham,  comme 
le  veut  le  système  défendu  par  M.  Halévy. 

M.  Oppert  refuse  absolument  d'admettre  la  thèse  de  M.  Halévy 
et  y  répond  en  quelques  mois. 

L'assimilation  que  l'auteur  de  la  communication  a  voulu  faire 
entre  le  roi  cissien  (non  cosséen)  de  Babylone,  Hammurabi,  et 
le  roi  de  Sennaar,  nommé  Amrapbel  dans  la  Genèse,  a  déjà  été 
repoussée  par  notre  confrère,  et  c'est  pour  la  détruire  qu'il  a 
présenté  une  série  de  déductions  clironologiques,  dont  M.  Halévy 
cherche  en  vain,  dit-il,  à  atténuer  la  valeur. 

Le  système  chronologique  de  M.  Oppert  a  pour  lui  l'opinion 
des  savants  les  plus  autorisés,  MM.  Schrader,  Tiele,  Hommel, 
Amiaud,  etc.  D'ailleurs,  il  s'appuie,  en  dehors  du  document 
contesté  par  M.  Halévy,  sur  un  calcul  mathématique  très  précis. 

Hammurabi,  en  effet,  d'après  un  texte  non  contesté,  fut  le 
sixième  roi  d'une  dynastie  de  onze  rois,  laquelle  régna  doU  ans. 

La  dynastie  suivante,  composée  également  de  onze  rois,  régna 
368  ans. 

Et  une  troisième,  dont  la  liste  ne  nous  est  pas  parvenue  com- 
plète, 677  ans. 

Le  total  des  trois  dynasties  est  donc  de  1,2/49  ans. 

Or,  Hammurabi  parvint  au  trône  112  ans  après  le  conmien- 
cement  de  la  première  de  ces  dynasties;  et  un  roi  nonuné  Saga- 
saltiyas  régna,  dans  la  troisième,  9/4  ans  avant  la  fin.  Le  nombre 
des  années  qui  s'écoulèrent  depuis  l'avènement  de  Hammurabi 
jusqu'à  celui  de  Sagasaltiyas  doit  donc  s'obtenir  en  retranchant 
de  la  durée  totale  des  ti"ois  dynasties  un  chiffre  de  iia-j-Q^^ 
soit  9oO  ans,  ce  qui  donne  1,06 3  ans. 

XVII.  32 


lUI  ail       XATtoMLI 


—  312  — 

Mais,  d'aulre  part,  un  témoignage  précis  du  roi  Nabonide 
(555-538  avant  notre  ère)  atteste  que  ce  prince  régna  huitsiècles 
après  Sagasaltiyas.  Il  régna  donc  plus  de  dix-huit  siècles  après 
Hammurabi,  et  celui-ci  ne  peut  avoir  vécu  plus  tard  que  le 
xxiv*'  siècle  avant  notre  ère,  c'est-à-dire  deux  siècles  au  moins 
avant  Abraham. 

M.  Renax,  à  propos  de  l'allusion  qui  a  été  faite  aux  tablettes 
cunéiformes  de  Tell  Armana,  demande  s'il  ne  serait  pas  à  propos 
de  soumettre  ces  monuments  à  un  examen  critique  rigoureux.  Il 
est  étrange  de  voii",  longtemps  avant  l'établissement  de  la  puis- 
sance de  Babylone,  les  villes  de  Phénicie  écrire  et  expédier  des 
documents  rédigés  en  langue  babylonienne.  On  sait  d'ailleurs 
combien  les  faux  d'un  caractère  scientifique  se  sont  multipliés  en 
Orient  depuis  un  petit  nombre  d'années. 


SÉANCE  DU   3o  OCTOBRE. 
(Séance  avancée  au  mercredi,  à  cause  de  la  fèlo  de  la  Toussaint.) 

Le  Président  rappelle  qu'un  mois  s'est  écoulé  depuis  la  mort 
du  général  Faidherbe,  et  il  consulte  l'Académie  pour  savoir  s'il 
y  a  lieu  de  le  remplacer. 

L'Académie  décide,  au  scrutin,  qu'il  y  a  lieu. 

Le  Président  rappelle  ensuite  que  l'Académie  avait  déjà  décidé 
quelle  fixerait,  lorsqu'elle  serait  plus  nombreuse,  la  date  de 
l'élection  du  successeur  de  M.  Ch.  Nisard.  11  demande  à  l'Aca- 
démie s'il  y  a  lieu  de  fixer  au  même  jour  la  date  de  ces  deux 
élections. 

La  question  étant  résolue  par  la  négative,  l'Académie  fixe  au 
29  novembre  1889,  pour  le  fauteuil  de  M.  Ch.  INisard,  et  au 
17  janvier  1890,  pour  celui  du  général  Faidherbe,  l'examen  des 
titres  des  candidats. 

L'Académie  procède  à  la  nomination  d'une  Commission  de 
six  membres,  qui  sera  chargée  de  présenter  deux  listes  de  can- 
didats aux  places  d'associés  étrangers,  laissées  vacantes  par  la 
mort  de  M.  Amari  et  de  M.  le  baron  de  Witte. 


SonI  (îliis:  MM.  lieiinn,  Dclisle,  (i.  Paris,  Bréal,  iMas|toro  et 
I)()issior. 

L'Acadôinio  se  forme  on  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  puljli(|ue,  le  Prksidenï  annonce  que 
l'Académie  a  rédige  dans  les  termes  suivants  le  programme  du 
concours  pour  le  prix  Loubat  à  décerner  en  1892  : 

ff  Le  prix  sera  décerné  au  meilleur  ouvrage  imprimé  concernant 
riiistoire,  la  géographie,  Tarcbéologie,  l'ethnographie,  la  linguis- 
tique, la  Jiumismatiquc  de  TAmérique  du  Nord. 

cr  L'Académie  fixe,  comme  limite  de  temps  et  extrême  des  ma- 
tières traitées  dans  les  ouvrages  soumis  au  concours,  la  date  de 
177G. 

t' Seront  admis  au  concours  les  ouvrages  publiés  en  langue 
latine,  française,  anglaise,  espagnole  et  italienne  depuis  le 
1"  janvier  1889.^ 

M.  Georges  Peruot  commence  la  lecture  d'une  étude  qui  doit 
former  le  dernier  chapitre  du  tome  V  de  VHistoire  de  l'art  dans 
rantiquité,  publiée  par  lui  en  collaboration  avec  M.  Chipiez.  Ce 
chapitre  est  consacré  à  l'analyse  et  à  l'appréciation  des  caractères 
généraux  de  l'art  de  la  Perse. 

M.  J.  Menant  appelle  l'attention  de  M.  Perrot  sur  un  objet  qui 
figure,  dans  une  des  mains  de  Cyrus,  sur  le  bas-relief  de  Mour- 
ghab,  ce  qui  peut  faire  supposer  que  c'est  un  symbole  hétéen. 

M.  Perrot  répond  que  robjcl  en  question  est  trop  indistinct 
pour  qu'on  puisse  asseoir  une  conjecture  à  ce  sujet. 

M.  Jivaiidji  Jamshedji  Modi,  grand  |)rètre  parsi  de  Bombay,  lit 
une  note  intitulée  :  Quelques  observations  sur  les  ossuaires  rapportés 
de  Perse  par  M.  Dieulafoij  et  déposés  au  musée  du  Louvre^^K 

U  résulte  des  recherches  de  M.  Modi  que  les  anciens  Perses 
avaient  la  coutume  de  conserver,  dans  un  réceptacle  distinct  et 
isolé,  les  ossements  des  morts,  après  cjne  la  chair  avait  été  dévorée 
par  les  oiseaux  de  proie.  Le  chapitre  vi  du  Vendidàd  traite  de  deux 
opérations  dilférentes  auxquelles  on  devait  soumettre  les  corps 
morts,  l'une  consistant  à  déposer  le  corps  sur  le  sommet  d'une 

<"    Vi)ir  ;ui\  (loMMUMCATioNs,  irXWI  ([».  ;sr)-)-.'}7'i  ). 


—  31A  — 

montagne  exposée  aux  rayons  du  soleil,  l'autre  à  recueillir  les 
ossements  après  que  la  chair  avait  disparu.  L'ouvrage  pehlevi  in- 
titulé Dadistan-i-dini  contient  des  dispositions  spéciales  sur  la  con- 
struction des  ossuaires,  appelés  astodans,  et  la  desciiption  quil 
en  donne  les  montre  parfaitement  semblables  à  ceux  qui  ont  été 
rapportés  par  M.  Dieulafoy.  Si  l'on  conservait  ainsi  les  ossements, 
c'était  en  vue  de  l'époque  de  la  résurrection  future,  époque  oià, 
selon  la  doctrine  des  Parsis,  il  est  dit  que  les  morts  ce  se  relèveront 
de  leurs  o^v. 


I 


315  — 


COMMUNICATIONS. 


N"  XXIII. 

FRAGMENT  D'UN  REGISTRE  DES  ENQUETEURS  DE  SAINT  LOUIS, 
PAR  M.  L.  DELISLE. 

(séance  do   6   SEPTEMBRE  tSSg.) 

Souvent  on  s'est  indigné  contre  la  barbarie  des  libraires  et 
des  relieurs  qui  ont  sacrifie  des  documents  précieux  pour  for- 
mer des  cartons  et  couvrir  des  volumes  plus  ou  moins  vul- 
gaires. Quelque  légitime  que  soit  en  apparence  cette  indigna- 
tion, il  faut  reconnaître  que,  dans  beaucoup  de  cas,  l'industrie 
des  relieurs  a  sauvé  des  morceaux  de  la  plus  haute  importance 
pour  l'histoire  et  la  littérature,  morceaux  qui,  sans  cette  cir- 
constance, ne  nous  seraient  point  parvenus. 

C'est  par  centaines  que  l'on  compte  les  anciens  monuments 
typographiques  qui,  depuis  plus  d'un  siècle,  ont  été  décou- 
verts dans  des  reliures  anciennes  et  dont  beaucoup  sont  jour- 
nellement cités  dans  les  discussions  relatives  aux  origines  de 
l'art  typographique. 

Les  fragments  de  chartes  et  de  manuscrits  employés  par  les 
relieurs  n'ont  pas  fourni  matière  à  de  moins  utiles  travaux.  De 
combien  de  textes  de  l'antiquité  et  du  moyen  âge  ne  leur 
sommes-nous  pas  redevables?  De  quelle  ressource  n'ont-ils 
pas  été  pour  la  critique  et  le  classement  des  anciennes  copies 
des  ouvrages  classiques,  en  prose  et  en  vers,  des  premières 
versions  latines  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament  et  des 
écrits  des  pères  de  l'Eglise?  Dans  un  autre  ordre  d'études, 
quel  parti  n'ont  pas  tiré  des  vieilles  couvertures  de  certains  re- 
gistres ceux  de  nos  confrères  qui  se  sont  donné  pour  mission 


—  316  — 

d'arracher  à  l'oubli  et  de  remettre  en  honneur  ces  vieux 
poèmes  français  dont  la  célébrité  a  jadis  fait  le  tour  de  l'Eu- 
rope ? 

La  diplomatique  a  été  tout  aussi  favorisée  que  l'histoire  lit- 
téraire, et,  pour  rappeler  un  seul  exemple,  l'Académie  n'a  pas 
oublié  que  c'est  sur  des  registres  de  l'état  civil  de  diverses 
communes  du  département  d'Indre-et-Loire  qu'on  a  retrouvé, 
dans  ces  dernières  années,  une  notable  partie  des  chartes  car- 
lovingicnnes  de  la  Touraine. 

On  comprend  donc  aisément  avec  quel  soin  les  bibliothé- 
caires examinent  le  dos  et  les  plats  des  volumes  recouverts  de 
parchemin.  On  ne  doit  pas  s'étonner  du  scrupule  avec  lequel 
ils  surveillent  les  déchets  des  ateliers  de  reliure.  Le  plus  sou- 
vent les  fragments  qu'ds  ont  à  passer  en  revue  sont  absolument 
dénués  de  valeur,  et  méritent  d'être  impitoyablement  mis  au 
rebut.  Mais  au  cours  de  cette  besogne,  souvent  fastidieuse,  on 
e&t,  de  temps  à  autre,  amplement  dédommagé  de  sa  peine. 

Pour  ma  part,  je  n'ai  jamais  regretté  le  temps  consacré  au 
triage  des  débris  de  toute  nature  (jui  me  sont  comnuiniqués 
de  différents  côtés,  notamment  par  le  chef  et  les  ouvriers  de 
l'atelier  de  la  Bibliothèque  nationale. 

La  plus  récente  de  ces  trouvailles  est  assez  intéressante 
pour  être  communiquée  à  l'Académie. 

Il  y  a  peu  de  semaines,  M.  Alfred  Richard,  archiviste  du 
département  de  la  Vienne,  connu  par  de  grands  services 
rendus  à  l'histoire  du  Poitou,  voulut  bien  m'annoncer  qu'il 
était  tombé  entre  ses  mains  des  cartonnages  de  livres  clas- 
siques couverts  de  parchemins  sur  lesquels  il  avait  reconnu 
des  fragments  d'enquêtes  écrites  en  caractères  du  xui"  siècle. 
Il  m'offrit  gracieusement  de  les  mettre  à  la  disposition  de  la 
Bibliothèque  nationale.  J'acceptai  cette  généreuse  proposition, 
sans  soupçonner  l'agréable  surprise  qui  m'était  ménagée. 

Aussitôt  revenu  à  Poitiers,  M.  Richard  m'expédiait  les  cou- 


—  317  — 

vorlures  ilc  Irois  exemplaires  d'un  volume  portant  sur  le  clos 
une  éti(juclle  ainsi  disposée  : 

CHRESTOMATHIE    GRECQUE, 
AVEC   LEXIQUE   GREC-FRANÇAIS. 

M.  Fixon,  le  chef  de  noire  atelier  de  reliure,  en  dégagea, 
avec  l'habileté  dont  il  a  donné  tant  de  preuves,  les  trois  doubles 
feuillets  de  parchemin  que  j'ai  l'honneur  de  mettre  sous  les 
yeux  de  l'Académie.  iM.  Alfred  Richard,  qui  n'en  avait  pu  en- 
trevoir que  la  moindre  partie,  en  avait  très  justement  apprécié 
la  nature.  C'étaient  bien,  en  effet,  des  fragments  d'une  enquête 
administrative  du  xiii"  siècle. 

Il  me  sulht  d'en  lire  quelques  lignes  pour  y  reconnaître  des 
formules  qui  étaient  restées  gravées  dans  ma  mémoire  depuis 
que  j'avais  copié,  il  y  a  déjà  longtemps,  tout  ce  qui  subsiste, 
à  la  Bibliothèque  et  aux  Archives  nationales,  des  enquêtes  or- 
données par  saint  Louis  sur  l'administration  des  officiers 
royaux.  Les  douze  granchis  pages  que  nous  devons  à  la  libéra- 
lité de  M.  Alfred  Richard  appartiennent  bien  à  cette  catégorie 
de  documents,  qui  sont  appelés  à  jeter  un  grand  jour  sur  l'his- 
toire du  xiii"  siècle  et  dont  le  texte,  je  l'espère,  ne  tardera 
pas  à  être  publié  par  l'Académie  dans  le  tome  XXIV  du  Recueil 
(les  lufitoviens  de  la  France. 

Il  ne  nous  est  malheureusement  parvenu  qu'une  minime 
partie  des  registres  ou  cahiers  dans  lesquels  les  commissaires 
rojaux  avaient  recueilli  les  plaintes  des  sujets  de  saint  Louis 
et  noté  les  réparations  quil  leur  paraissait  équitable  d'accor- 
der pour  mettre  en  repos  la  conscience  d'un  roi  qui  se  croyait 
responsable  des  abus  commis  dans  ses  Etats,  non  seulement 
par  ses  agents,  mais  encore  par  ceux  de  son  père  et  de  son 
aïeul,  Louis  VIII  et  Philippe  Auguste.  La  Bibliothèque  et  les 
Archives  nationales  nous  ont  fourni  des  procès-verbaux  d'en- 
(piétes  relatives  à   la  Normandie,  au   Maine,  à  l'Anjou,  à  la 


—  318  — 

Touraine,  au  Poitou,  à  la  Saintonge,  à  l'Artois,  au  Verman- 
dois  et  au  Languedoc.  Le  fragment  dont,  grâce  à  M.  Alfred 
Richard,  notre  recueil  va  pouvoir  s'enrichir  concerne  la  Pi- 
cardie. 11  contient  principalement  les  plaintes  auxquelles  avait 
donné  lieu  l'administration  des  prévois  d'Arouaise,  d'Athies, 
de  Béthisi,  de  Chépi,  de  Gompiègne,  de  Crespi,  de  la  Ferté- 
Milon,  dePéronne,  de  Pierrepont,  de  Pont-Sainte-Maxence, 
de  Saint-Quentin  et  de  Senlis. 

Il  convient  avant  tout  de  déterminer  la  date  de  l'enquête. 

Au  paragraphe  1 6  un  chevalier,  Pierre  de  Vermand,  se  plaint 
du  préjudice  que  lui  avaient  causé,  environ  quatre  ans  aupa- 
ravant, Mathieu  Torel,  prévôt  d'Athies,  et  GeofFroi  deMilli, 
hailli  d'Amiens,  à  l'occasion  d'un  prétendu  déht  de  chasse. 

Un  peu  ])lus  loin,  au  paragraphe  3/i,  une  dame  déclare 
que,  dix  ans  auparavant,  le  bailli  Geoffroi  de  Milli  et  les  pré- 
vôts de  Péronne  l'avaient  contrainte  sans  droit  et  sans  juge- 
ment à  leur  payer  7  livres  parisis. 

De  ces  deux  articles  il  résulte  que  Geolfroi  de  iMilli  était  bailli 
d'Amiens  environ  quatre  ans  et  dix  ans  avant  l'époque  où  se 
faisait  l'enquête  dont  nous  voulons  déterminer  la  date.  Nous 
sommes  donc  amenés  à  rechercher  les  limites  chronologiques 
do  l'administration  de  GeofTroi  de  Milli.  A  cet  effet,  j'ai  recouru 
au  catalogue  historique  des  baillis  du  xiii^  siècle  que  je  compte 
faire  entrer  dans  l'introduction  du  tome  XXIV  du  Recueil  des 
historiens.  On  y  trouve  sur  GeolTroi  de  Milli  les  détails  sui- 
vants : 

^r GeofTroi  deMilli  est  indiqué  parBrussel"'  comme  ayant 
rendu  compte  en  1201  des  revenus  du  bailliage  d'Amiens. 
L'année  suivante,  il  prit  possession,  au  nom  du  roi,  de  la 
maison  et  de  la  forteresse  de  Mouchi,  qui  venaient  d'être  ven- 
dues au  roi  par  Eudes  de  Mouchi,  chevalier;  le  titre  de  bailli 

f')    Usage  des  fief 8,  i.  I,  p.  /187. 


—  3iy  — 

irAiniens  est  expressément  incliqué  dans  l'acte  de  vente  et  de 
])rise  de  possession  :  Et  Gaujridus  de  Mdliaco,  bnllwus  domini 
repris  Amhùutcnsis. .  .  ^^\  Gcoffroi  figure  sur  les  comptes  de  ifi'dh, 
de  laoG  et  de  i  237^-1  11  acquit  en  1287,  pour  le  roi,  les 
droits  que  Pavic,  femme  de  Bernard  de  Moreuil,  avait  eus  sur 
un  vivier  de  DouUens,  et  il  en  fit  reconnaître  la  prise  de  pos- 
session par  l'évequc  d'Amiens'"*^.  A  l'Ascension  de  l'année  1288, 
Geoft'roi  de  Milli  rendit  compte  du  produit  des  viviers  d'Athies, 
de  Doullens  et  de  Péronne^'l  II  figurait  encore  sur  les  comptes 
de  l'année  1289^^^  et  même  de  l'année  12/18,  s'il  faut  s'en 
rapporter  à  une  note  de  Dufourny  insérée  dans  la  collection 
de  Clairambault '"^^  A  une  date  qui  ne  peut  pas  être  exacte- 
ment déterminée,  Etienne,  clerc  de  Geoffroi  de  Milli,  bailli 
d'Amiens,  fut  chargé  avec  maître  Robert,  clerc  du  roi,  et  sire 
Imbert  de  Templeux,  chevalier,  de  procéder  à  une  enquête 
pour  savoir  si  un  certain  Bernard  Double,  que  le  bailli  avait 
arrêté,  était  un  homme  du  prieur  de  Lihons  ou  un  bourgeois 
de  Péronne''^.  » 

L'administration  de  GeofTroi  de  Milli  correspond  donc  à  la 
période  conqjrise  entre  les  années  1281  et  12/18. 

On  a  vu  que  l'enquête  dont  nous  nous  occupons  mentionne 
deux  actes  du  bailli  GeolTroi  de  Milli,  remontant,  l'un  à  dix 
ans,  l'autre  à  quatre  ans  ou  environ.  L'enquête  doit  donc  être 
un  peu  postérieure  à  l'année  12/18.  Or  nous  savons  que  les 
enquêteurs  royaux  parcoururent  les  différentes  parties  du  do- 
maine de  la  couronne  en  12/17  et  1  2/18,  avant  le  départ  de 
saint  Louis  pour  la  croisade.  Le  registre  dont  nous  venons  de 

f'^  Teulel,  Layelles  du  Trésor  des  chartes,  t.  II,  p.  aSi. 

W  Briissel,  Usa<je  des  fiefs ,  t.  I,  p.  /187. 

'^)  Tciilct,  Layettes  du  Trésor  des  chartes,  l.  II,  p.  o'iG. 

(*'  Recueil  des  historiens,  t.  XXI,  p.  aâs. 

f^'  Brussel,  Usage  des  fiefs,  I.  I.  p.  /187. 

<"'  Vol.  3o6,  p.  ^37. 

"  IViik'l.  Lnyetlex  du  Trésor  des  chartes,  I.  Il,  p.  \><'\. 


—  320  — 

recouvrer  douze  pages  devait  contenir  le  procès-verbal  d'une 
partie  des  enquêtes  faites  à  cette  époque  dans  les  bailliages 
d'Amiens  et  de  Vermandois.  Je  n'hésite  pas  à  lui  assigner  la 
date  de  12/17  ^^  12/18. 

Cette  date  est  confirmée  par  ce  que  dit  un  plaijjnant  d'une 
arrestation  arbitraire  reprochée  à  Pierre  Le  Fèvre,  prévôt  de 
Péronne  :  Conqucritur  Waiihes  de  Gainnemot  qiiod,  circiter  xvi 
(innis  clapsis,  Petrus  Faber,  tmic  preposttus  Perone. .  .  cepit  cum 
et  misit  in  prisoniam,  et  sic  exiorsit  ah  eo  injuste  xlyii  hhras 
par'mmsmm. .  .  Au  moment  où  se  faisait  l'enquête,  il  y  avait 
donc  seize  ans  ou  environ  que  Pierre  Le  Fèvre  remplissait  les 
fonctions  de  prévôt  de  Péronne.  Si  'la  date  que  j'ai  assignée  à 
l'enquête  est  exacte,  Pierre  Le  Fèvre  devait  être  prévôt  de  Pé- 
ronne en  1282  ou  1  2  33.  Or  nous  avons  en  original  au  Trésor 
des  chartes  un  acte  du  mois  d'avril  1282  dans  lequel  inter- 
vient Peints  Faber,  preposiius  Peronensis^^\ 

Je  n'analyserai  pas  les  plaintes  consignées  dans  le  registre 
dont  la  date  vient  d'être  déterminée.  Elles  portent  à  peu  près 
sur  tous  les  genres  d'abus  que  nous  ont  fait  connaître  les 
autres  registres  des  enquêtes  de  12/17  ^^  1  2/18  :  dénis  de  jus- 
tice, saisies  d'immeubles,  extorsions  de  sommes  d'argent,  de 
denrées,  de  meubles  et  d'animaux  sous  les  prétextes  les  plus 
divers  et  les  plus  futiles. 

Les  griefs  qu'on  exposait  aux  conmiissaires  enquêteurs 
étaient  [)arfois  très  anciens.  C'est  ainsi  qu'une  femme  se  plai- 
gnait d'avoir  été  dé[)ouillée  de  100  livres  parisis  qui  avaient 
été  touchées  pour  le  compte  de  Philippe  Auguste;  elle  justifiait 
sa  réclamation  en  invoc[uant  le  bruit  public  du  pays  :  tesUsfama 
pairie  (§  69). 

Les  procès-verbaux  des  enquêteurs  sont  surtout  précieux 
par  les  renseignements  qu'ils  fournissent  sur  les  événements 

^'^  Tculi.'l,  Laijvlles  (la  Trésor  des  ckarlcs ,  I.  ll,|j.  a3i. 


—  :}i>i  — 

publics,  sur  le  droit  féodal,  sur  radministralion  et  sur  une 
l'oule  de  détails  de  la  vie  j)rivée  dans  les  villes  et  les  caiii|)agnes 
au  cours  du  xuf  siècle.  Il  est  encore  nécessaire  d'y  recourir 
i)Our  riiisloire  des  familles  et  des  personnages  qui  ont  joué  un 
rôle  dans  les  annales  de  cette  époque.  Les  fragments  que 
M.  Alfred  llichard  nous  a  fait  recouvrer  renferment  plus  d'un 
nom  qui  mérite  d'être  relevé.  J'en  citerai  seulement  deux 
exemples  : 

Depuis  les  travaux  de  notre  savant  et  regretté  confrère 
M.  le  comte  Paul  Uiant,  Robert  de  Clari,  l'auteur  de  la  rela- 
tion de  la  conquête  de  Constantinople  en  lao/i,  occupe  une 
place  d'honneur  parmi  les  historiens  français  du  xni"  siècle.  Il 
importe  de  recueillir  tout  ce  qui  le  concerne,  lui  ou  sa  famille. 
A  ce  titre,  nous  avons  à  signaler  le  paragraphe  21  de  nos 
fragments,  qui  doit  se  rapporter,  sinon  au  chroniqueur,  du 
moins  à  son  héritier.  En  voici  la  substance. 

En  12/17  ou  en  12/18,  Robert  de  Clari  se  plaignait  de 
Pierre  Le  Fèvre,  jadis  prévôt  de  Péronne,  qui,  environ  onze 
ans  auparavant,  l'avait  injustement  troublé  dans  la  jouissance 
d'un  bois  acheté  de  Jean  de  Maurepas  et  tenu  de  Mathieu  de 
Hardecourt.  Pierre  Le  Fèvre  avait  prétendu  que  ledit  bois 
devait  être  tenu  du  roi,  et,  quoiqu'une  enquête  eût  établi  le 
contraire,  il  avait  exigé  le  payement  d'une  somme  de  20  livres 
parisis  pour  en  rendre  la  saisine  à  Robert  de  Clari,  à  qui 
cette  afl'aire  avait,  en  outre,  occasionné  des  frais  s'élevant  à 
ao  livres  parisis.  Deux  autres  membres  de  la  même  famille 
figurent  comme  témoins  :  Monard  de  Clari,  dans  les  para- 
graphes 21  et  20,  et  une  femme  «Oda  de  Clari»,  dans  le 
paragraphe  22. 

Parmi  les  personnes  dont  le  témoignage  est  invo(jué  à  l'ap- 
pui de  plaintes  dirigées  contre  les  prévôts  d'Alhies  et  de  Chepi, 
on  remarque  Simon  La  Truie  (S  16),  Colard  La  Truie  et  Vw- 
naud,  frère  de  celui-ci  (^29).  Il  convient,  je  crois,  de  relever 


—  322  — 

ces  noms;  ils  pourraient  bien ,  en  effet,  s'appliquer  à  des  mem- 
bres de  la  famille  d'un  chevalier  lorrain  qui  s'est  illustré  par 
ses  exploits  et  par  son  dévouement  à  Philippe  Auguste.  M.  le 
comte  de  Pange,  dans  un  récent  travail,  a  très  habilement 
et  très  exactement  résumé  les  hauts  faits  de  Gérard  La  Truie, 
un  des  héros  de  la  journée  de  Bouvines*'^. 

Philippe  Auguste  avait  récompensé  les  services  de  Gérard 
en  lui  donnant  une  terre  située  en  Normandie,  et  plus  tard  le 
château  de  Seraucourt,  aux  environs  de  Saint-Quentin.  Mais 
le  roi  Louis  VIII  profita  d'un  voyage  de  Gérard  La  Truie  à  (]ons- 
tantinople  pour  lui  reprendre  le  château  de  Seraucourt,  dont 
la  restitution  fut  énergiquement  réclamée  en  12/18  par  le  fils 
du  chevalier  dépouillé,  appelé  comme  son  père  Gérard  La 
Truie  ^'l 

On  peut  se  demandersi  Colard,  Renaud  et  Simon  La  Truie, 
mentionnés  dans  nos  fragments,  n'appartenaient  pas  à  la 
môme  famille. 

Les  quarante-huit  derniers  articles  de  nos  fragments  ont 
trait  aux  réclamations  que  différents  habitants  de  la  ville  et 
des  environs  de  Saint-Quentin  en  Vermandois  se  croyaient  au- 
torisés à  émettre  contre  les  juifs  qui  leur  avaient  prêté  de 
l'argent.  Dans  la  plupart  des  cas,  il  n'est  question  que  de 
sommes  «usurairement  extorquées  5;  ;  trois  fois  seulement 
(S  107,  120,  i3i)  on  parle  de  la  perte  des  objets  engagés 
chez  les  prêteurs. 

Le  nombre  des  juifs  mis  en  cause  est  considérable.  Il  v  en 
a  au  moins  une  cinquantaine;  presque  tous  devaient  avoir  eu 
leur  établissement  dans  la  ville  de  Saint-Quenlin. 

(')  Le  patriotisme  français  en  Lorraine  antérieurement  à  Jeanne  d'Arc  (Paris, 
1889,  petit  in-8°),  p.  Sg  et  suivantes.  Une  reproduction  du  sceau  de  Gi- 
rard: SlGILLUiM  GiRARDI  SuiS,  se  trouve  en  tète  du  volume  de  M.  de 
Pnnp,c. 

^'*  Lu  plaint'.'  Je  Gérard  sera  dans  le  liccucU  des  Instoricns ,  t..  \XIV,  p.  258. 


—  323  — 
Il  peut  y  avoir  quelque  intérêt  à  en  relever  les  noms 


3i. 


Agnes,  87,  88,  9/1,    107,    109, 

110,     11-2,      llG,     117,     191, 

12^,  iq6,   129,    i3o,    i3i, 

182. 

Alla  Agnes,  109. 

Agnes  de  Perona ,  1 06. 

Agnetis  marifus,  110. 

Agnetis  soror,  112,  127, 

Agnetis  frater,  116. 
Arnulpbus  deRoie,  11 5. 
Aunee  de  Lelor,  106. 
Bienvenus,    85,   86,    96,    101, 

128. 

Soi'or  uxoris  ejus  ,101. 
Bonecbose,  96,  io5. 
Bonelille,   Boene   fdie,    98,    99. 


100. 


99- 


Ejus  iixor 
Bonete,  98. 
Bone\ne,   87,    ii3.    ii5,    120, 

127. 

Ejus  uxor.  1 13. 
Croissans,  111. 
Daniel,  88,  98,  102,  10^,  110, 

11/i,   118,    119,    120,   127, 

128. 
David,  120. 
Dieudonés,  9A,  12^. 
Donatus,  107. 
Durea,  Durée,  89,  90 ,  92,  119, 

i3o. 

Durée  marilus,  89. 
Elias,  Helias,  118  ,  122. 
Emmelina,  i3o. 


Fioria ,  io4,  129. 
Founière,  i3o. 
Helias,  Elias,  118,  122. 
Hixas  ,90. 
Honorata,  i3o. 
Jacob,  85,  92,98,  i3o. 
Joseps  de  Capi,  127. 
Josses,  10/i. 
Juete,  i3o. 
Liones,  106. 
Manasseriis,  97,  119. 
Margha,  126. 

Margœ  maritus  ,127. 
Margbareta,  101. 
Matheus,  98,  120. 
MeJia,  106. 
Meliola,  Meliole,  102,  loû,  107, 

117,  128,  125,  198,  i3o. 
Onorata,  180. 
Précieuse  ,119. 
Precieuseus,  i3o. 
Rebeuse,  97. 
Samuel,  ii5.  122,128,  127. 

Samuel  is  fîlia,  121. 
Sanso,  106. 
Sones ,  1 1 5 ,  129. 
Vivans,  Vivanus.  gi.  io5,  loC), 

1 17,  128. 
Vivani  uxor,  91. 

Ysaac,  88,  98,  io3,  11/1,116, 

118,  128,  127. 
Ejus  mater,  116. 

Yvo  (]o  Rnie,  q5. 


Les  plus  anciens  actes  incriminés  remontaient  à  neuf  ou 
dix  ans;  les  plus  récents  à  trois  ou  quatre  seulement.  Ces  der- 


—  32/i  — 

niers  avaient  coïncidé  avec  une  expulsion  des  juifs  :  A  tribus 
(innis,  Agnes  et  soror  ejus,  jucha,  delulenint  vadia  sua  quamlo  fu- 
frati  fucrunt  a  villa  (S  i3i).  Si  mes  conjectures  sur  la  date  de 
l'enquête  sont  fondées,  la  mesure  dont  les  juifs  de  Saint- 
Quentin  furent  victimes  devrait  se  placer  vers  l'année  i  2  45. 

Dans  les  autres  registres  des  enquêteurs  royaux,  je  n'avais 
point  rencontré  de  séries  de  plaintes  relatives  aux  prêts  usu- 
raires  des  juifs.  Il  est  cependant  facile  de  s'expliquer  comment 
des  plaintes  de  ce  genre  ont  dû  être  recueillies  au  cours  des 
enquêtes  ordonnées  par  saint  Louis.  Lorsque  les  juifs  furent 
expulsés  de  Saint-Quentin,  tout  ou  partie  de  leur  avoir  dut 
être  confisqué  et  vendu  au  profit  du  trésor  royal.  Saint  Louis 
se  croyait  sans  doute  autorisé  à  recueillir  la  fortune  des  juifs; 
mais  il  aurait  eu  scrupule  de  retenir  ce  qui,  dans  cette  for- 
tune, provenait  de  gains  illicitement  obtenus  au  détriment 
des  chrétiens.  C'est  là  une  observation  importante  qui  peut  se 
déduire  des  fragments  mis  sous  les  yeux  de  l'Académie.  J'en  ai 
tiré  une  autre  conséquence.  C'est  qu'il  faut  rattacher  aux 
procès-verbaux  des  enquêteurs  de  saint  Lonis  un  double 
feuillet  qui  sert  de  garde  à  un  manuscrit  de  la  Sorbonne.  au- 
jourd'hui n"  16/171  du  fonds  latin  à  la  Bibliothèque  natio- 
nale. 

Sur  ce  double  feuillet,  dont  l'écriture  rappelle  assez  bien 
celle  de  plusieurs  registres  des  années  12/17  ^^  12/18,  on 
trouve  une  cinquantaine  de  réclamations  tendant  à  faire  rera- 
bourser  des  sommes  qu'avaient  touchées  à  titre  d'usure  ou 
d'intérêts  un  homme  et  une  femme  désignés  par  les  initiales 
J.  et  H.,  très  vraisemblablement  deux  juifs,  dont  les  biens 
avaient  été  confisqués  par  les  gens  du  roi.  Les  emprunteurs  se 
croyaient  parfaitement  fondés  à  réclamer  la  restitution  des 
intérêts  qu'ils  avaient  pavés;  plusieurs  d'entre  eux  avaient 
même  déjà  reçu  un  commencement  de  satisfaction.  C'est  ce  qui 
se  déduit  très  clairement  de  l'article  1  5  du  fragment:  Odiha 


—  325  — 

d4i  Caviunclc,  jurata,  non  hahens  testem,  thcit  se  et  mar'iliim  suum, 
nJio  tempore,  quanào  fiehal  rcslilucio  pro  dicUs  J.  et  H. ,  petwisse  l 
solidos  parisiensium.  Rehabutt  autem  a  sohdos  olb[orum\.  Petit 
autem  residuum  sibi  reddi  (§  i  5). 

Je  n'ai  plus  qu'une  observation  à  présenter  sur  les  frag- 
ments découverts  par  M.  Richard,  qui  formeront  désormais  à 
la  Bibliothèque  nationale  le  n°  h'j  i  du  fonds  latin  des  nouvelles 
acquisitions.  Les  feuillets  dont  il  est  question  ont  été  employés, 
comme  on  l'a  vu,  à  recouvrir  trois  exemplaires  d'une  c^Chres- 
tomathie  grecque,  avec  lexique  grec-français w.  Je  crois  être 
certain  que  cette  chrestomathie  est  l'ouvrage  classique  qui 
parut  en  1828  à  la  librairie  d'Auguste  Delalain  sous  le  titre 
suivant  :  Clirestomathia  ex  linguœ  grœcœ  scriptoribiis.  Secunda 
edkio  (Paris,  Delalain,  1828,  in-8'').  Le  livre  ainsi  intitulé 
est  l'un  des  premiers  ouvrages  de  notre  ancien  et  respecté 
confrère  M.  Joseph-Victor  Le  Clerc;  il  en  existe  quatre  édi- 
tions, datées  de  1812,1818,  1828  et  1827.  La  première  et 
la  dernière  contiennent  le  texte  et  la  traduction;  les  deux 
autres  ne  renferment  que  le  texte  grec.  C'est  après  coup  qu'on 
paraît  avoir  ajouté  dans  la  troisième  édition,  celle  de  1828, 
un  Lexique  grec-français  de  tous  les  mots  contenus  dans  la  Chres- 
tomathie, par  MM/m**""  et  J5**"  (in-8°  de  88  pages).  La 
Bibliothèque  nationale  possède  de  cette  troisième  édition  deux 
exemplaires  brochés ,  dont  le  premier  ne  contient  pas  le  lexique  ; 
l'un  et  l'autre  portent  au  dos  une  étiquette  imprimée,  ainsi 
disposée  : 

CHRESTOMATHIE  GRECQUE. 

SECONDE    Édition"',    1823. 

Telle  était,  parait-il,  l'étiquette  des  premiers  exemplaires 
sortis  en  1828  de  la  librairie  de  M.  Delalain.  On  dut   faire 

f"  C'est-à-dire  seconde  édition  de  la  Chresloraafliii>  ne  renfermanl  que  le 
texte  «jrec. 


—  3-2(1  — 

imprimer  un  peu  plus  lard,  pour  les  exemplaires  restés  en 
magasin,  une  autre  étiquette,  celle  qui  était  au  dos  des  car- 
tonnages trouvés  à  Poitiers. 

C'est  donc  vers  l'année  1828  ou  182/1  qu'un  registre  des 
enquêteurs  de  saint  Louis  fut  abandonné  à  des  relieurs  char- 
gés de  cartonner  les  ouvrages  classiques  de  la  maison  Dela- 
lain.  Assurément  les  trois  volumes  dont  M.  Richard  a  trouvé 
les  couvertures  à  Poitiers  ne  doivent  pas  être  les  seuls  exem- 
plaires de  la  Chrestomathie  de  1828  qu'on  ait  revêtus  de 
feuilles  de  parchemin  avant  appartenu  au  précieux  registre 
dont  ils  nous  ont  révélé  l'existence. 

Les  librairies  et  les  bibliothèques  pourvues  des  livres  qui 
servaient  aux  écoliers  du  temps  de  la  Restauration  renfer- 
ment peut-être  des  volumes  couverts  de  fragments  analogues 
à  ceux  que  je  viens  de  faire  connaître.  Je  ne  regretterai  pas 
d'en  avoir  fait  la  remarque,  si  des  recherches  dirigées  de  ce 
côté  amènent  un  jour  la  découverte  de  nouveaux  feuillets 
des  procès-verbaux  des  enquêteurs  de  saint  Louis. 


N-'  XXIV. 

RÉSUMÉ   ANALYTIQUE 
D'UN  MÉMOIRE  SUR  DAMASCIUS  ET  SON  TRAITÉ  DES  PREMIERS  PRINCIPES, 

PAR  M.  CH.-ÉM.  RUELLE. 

(séances  des  33,    30  AOÛT   ET   6  SEPTEMBRE    1889.) 

Les  écoles  néoplatoniciennes  d'Alexandrie  et  d'Athènes  ont 
produit  un  grand  nombre  de  travaux  sur  le  Parménuk  et  sur 
la  question  des  premiers  principes,  qui  en  est  le  sujet.  On  peut 
citer  entre  autres  ceux  de  Porphyre,  Jamblique,  Longin,  Plu- 
tarquo  d'Athènes,  Proclus,  Marinus,  Damascius,  et  un  ano- 
nyme dans  lequel  nous  croyons  reconnaître  Olympiodore  le 
Jeune.  Les  deux  principaux  de  ces  ouvrages  parvenus  jusquà 


—  3-27  — 

nous  sont  le  commentaire  de  Proclus  et  le  traité  de  Damascius 
intitulé  Anopicit  xai  Xvasis  -srepJ  tôjv  ^prjjcov  àpy^ôjv ,  Doutes  et 
solutions  sur  les  premiers  principes,  texte  dédoublé  dans  plu- 
sieurs manuscrits,  notamment  dans  le  prototype  ''^,  où  la  se- 
conde moitié  reçoit  un  nouveau  titre  :  Doutes  et  solutions  sur  le 
Parménide  de  Platon. 

La  première  partie  de  la  présente  communication  est  consa- 
crée a  la  description  des  trente  manuscrits  contenant  le  texte 
de  Damascius.  On  la  trouvera  dans  la  préface  de  l'édition  de 
ce  texte,  actuellement  sous  presse.  La  seconde  traite  do  la 
composition  du  'aep)  àp)(^cov,  dont  nous  essaierons  de  démontrer 
l'unité,  contrairement  à  l'opinion  de  plusieurs  bibliographes, 
soutenue  récenmient  par  M.  Emile  Heitz,  professeur  à  l'Univer- 
sité de  Strasbourg  t-'l  Nous  reprenons  une  dernière  fois  cette 
question,  discutée  déjà  en  1 8  6 1  dans  notre  Notice  sur  le  philosophe 
Damascius,  et  en  1 88^  au  cours  de  la  Note  sur  le  Marcianus  aâG 
insérée  dans  les  Mélanges  Graux.  Nous  croyons  apporter  de 
nouveaux  arguments  en  soumettant  le  litige  au  jugement  de 
l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  '^^ 

La  troisième  partie  a  pour  objet  de  mettre  en  relief  l'im- 
portance du  -zsepi  à.pywv.  Enfin  la  quatrième  et  dernière  en 
expose  le  contenu  et  les  rapports  avec  les  autres  ouvrages 
de  l'Ecole  relatifs  au  même  sujet. 


<!'   Bibliotliùque  de  Saint-Marc,  à  Venise,  u"  9/16. 

W  Der  Philosoph  Damascius  {Strasshurger  Abhandhingen  :ur  Philosophie, 
i884). 

<^'  L'Académie,  soit  ofTiciellement,  soit  dans  la  personne  d'un  grand  nombre 
de  ses  membres,  a  prêté  son  appui  et  son  concours  effectif  à  notre  publication 
du  texte  intégral  de  Damascius.  Voir  les  comptes  rendus  des  séances  tenues  les 
i5  février  1878,  10  juin  et  8  juillet  1881.  Je  dois  ajouter  que  cette  publica- 
tion a  trouvé  aussi  d'encourageantes  sympatliios  dans  le  sein  de  l'Académie  des 
sciences  morales  et  politiques. 


xvn.  33 


;tirciurnit   xtTioÂitK 


—  328  — 

1,    NOTICE  DES  MANUSCRITS. 

Nous  nous  bornerons  dans  cette  analyse  à  une  simple  no- 
menclature. 

1.  A.  (R  dans  la  notice  de  i86i).  Venise,  Marcianns  2^6.  ix'oux'  s. 

2.  A\  Paris,  n°  922  du  snpple'ment  jjrec.  Copie  du  précédent,  xix'  s. 

3.  B.  (Ci-devant  S).  Venise,  Marcismus  2/17.  w'  s. 
Ix.  G.  (Ci-devant  Q).  Venise,  Marcianns  2/i5.  xv°  s. 
5.  D.  Milan,  Ambrosianus  G.  58  sup.  xv°  s. 

Tous  les  manuscrits  qui  vont  suivre  dérivent  plus  ou  moins 
directement  des  manuscrits  A,  B,  C,  D. 

G.  A.  Paris,  Bibliothèque  nationale,  n°'  1987  et  1988.  Commen- 
cement du  xvii^  siècle. 

7.  B.  Paris,  Bibliothèque  nationale,  n"  1989.  xvi'  s. 

8.  c.  Paris,  Bibliothèque  nationale,  n°  1990.  xvii°  s. 

9.  D.  Strasbourg,  Bibliothèque  du  séminaire  protestant  C.  VI.  3i. 
(Brûlé  en  1870  lors  du  bombardement  de  cette  ville.)  xvi^  s. 

10.  E.  Munich,  Bibliothèque  royale,  n"  5.  xvi'  s. 

11.  F.  Hambourg,  Bibliothèque  pubhque,  fonds  philos,  gr.  in-fol. 
11°  1.  xvi'  s. 

1  2.  G.  Cabinet  de  Sir  Thomas  Pliillipps  à  Cheltenham  (ms.  acquis  ré- 
cemment, croyons-nous,  par  la  Bibliothèque  de  Berlin),  xvi'  s. 

i3.  H.  Oxford,  Bibliothèque  bodléienne,  fonds  du  collège  Corpus 
Ciiristi  n°  i58.  xvi'  s.  (xv'  selon  Coxe). 

t/i.  i.  Oxford,  Bibliothèque  bo.lléienne,  fonds  de  John  Fell.  xviu*  s. 
Copié  sur  le  précédent. 

i5.  j.  Madrid,  Biblioteca  nacional  0.  à.  xvi"  s. 

16.  K.  Escurial,  S.  II.  2  (n°  77  du  catalogue  de  Miller),  xvi'  s. 

17.  L.  Escurial,  T.  1.  i/j  (n°  i3i  de  Miller),  daté  de  i5Zn. 

18.  M.  Escurial,  <I>.  I.  19  (n°  194  de  Miller).  xvi°  s. 

19.  N'\  Milan,  Bibliothèque  ambrosienne,  C.  269  inf.  xvi"  s. 
90.  N**.  Milan,  Bibliothèque  ambrosienne,  T.  ii3  sup.  xvi' s.  j 
2d.  0.  Rome,  Bibliothèque  valicane,  n"  i2o3.  xvi'  s.  '* 
22.  o\  Rome,  Bibliothèque  vaticane,  n"  iliho.  xvi*  s. 

20.  o"*  et  o\  Rome,  Bibliothèque  vaticane,  n°'  1765  et  1791.  Ces 
deux  volumes  réunis  contiennent  le  texte  entier  de  Damascius.  xvi'  s. 


—  329  — 

a/i.  o\  Rome,  Bibliollièque  barberino,  I.  60,  o/àw  622,daté  de  i584. 
95.  p.  Florence,  Bibliothèque  laiireiilienne,  86,  5.  xvi'  s. 

26.  p\  Florence,  Bibliothèque  riccai-dienne,  n°  5i  (olini  K.  1 1,  29). 
XV"  et  xvi'  s. 

27.  s°.  Padoue,  Bibliothèque  de  l'Université',  n"  22A7.  Commence- 
ment du  xvii'  s. 

a8.  s\  Naples,  Bibliothèque  royale,  III.  D.  11.  xv'  ou  xvi'  s. 

29.  T.  Bàle,  Bibliothèque  de  TUniversitë,  F.  II.  i\  date  de  i5/i6. 

30.  V.  Upsal,  Bibliothèque  de  l'Université',  ms.  gr.  6/i.  xvi°  s. 

Des  données  que  nous  avons  pu  recueillir  sur  ces  divers 
manuscrits  re'sulte  le  stemma  suivant  : 


VI   s. 


■ a  texte  original. 

via*  s.  (?),  en  e'criture  onciale  (?) /3  antigraphe  de  A. 

ix'  ou  x'  s.— A 


XV    s. 


xvr  s. 


D- 


1 


B 


(i5^i) 


o"  (i58A)  M 
o' 

XV1*-XVII°  s.  s'  H- 

C(l6l0?)   A 

xviii°  s. 
XI  x'  s. 


T(i5/J6) 


II.    DNITÉ  DD  TEXTE. 

Le  prototype  A  (Marcmnus  2/16),  sa  copie  directe  G  et  ies 
manuscrits  e,  j,  o*''  présentent,  vers  le  milieu  du  texte,  une 


33. 


—  330  — 

lacune  que  les  copistes  ont  indiquée  en  laissant  plusieurs  feuil- 
lets blancs  entre  les  mots  èitei  xatà  akrjOzictv  ovSè  avec  lesquels 
se  termine  l'édition  donnée  en  1826  par  Joseph  Kopp,  et  les 
mots  Ta?  àyLeOintovs  laîç  iieOtmous ^  etc.,  qui  forment  le  début 
de  la  partie  restée  inédite  jusqu'à  notre  publication.  Le  pro- 
totype, à  la  fin  de  cette  dernière  partie,  porte  la  souscription 
suivante,  qui  est  de  première  main  :  La^aamou  SiaS6)(^ov  els 
rov  UXaTCovos  Tla.pixsviSriv  ànopi'at  Jia)  "'XvŒSts  (sic)  dvTiTrapa- 
r£iv6[xsvai  toïs  els  avrov  vTioiLvyj^aaiv  tov  (pi'Xocroipov.  TéXos. 
Cet  état  de  choses  fait  voir  que ,  dès  le  temps  oii  le  Marcianus  A 
fut  exécuté,  les  deux  parties  séparées  par  la  lacune  étaient 
considérées  comme  formant  chacune  un  ouvrage  distinct.  11  est 
probable  que  son  antigraphe  admettait  cette  distinction,  c'est-à- 
dire  l'existence  d'un  traité  des  premiers  principes  et  d'un 
commentaire  sur  le  Parménide  qui  aurait  été  en  même  temps 
un  examen  critique  du  commentaire  composé  par  Proclus  sur 
ce  dialogue.  L'état  du  prototype  est  le  principal  argument  de 
M.  Em.  Heitz  en  faveur  de  cette  distinction.  Il  s'étonne  que 
J.  Kopp  et  moi  (il  aurait  pu  impliquer  Victor  Cousin  dans  la 
même  critique),  nous  ayons  admis  l'unité  du  texte  et  la  conti- 
nuité des  deux  parties  qui  le  composent.  Il  tend  à  démontrer 
en  outre  l'existence  de  deux  ouvrages  en  alléguant  :  1°  que 
Proclus  est  nommé  dans  le  premier,  tandis  que  dans  l'autre  ce 
philosophe  est  désigné  seulement  par  le  mot  a:;TO?;  2°  que 
dans  le  premier  ouvrage  aucune  des  questions  traitées  n'a  reçu 
un  titre,  tandis  que  le  second  en  présente  plusieurs. 

Quant  à  l'état  des  manuscrits,  il  faudrait,  pour  s'en  faire 
un  argument,  oublier  que  les  copistes  ont  souvent  dénaturé 
la  disposition  des  textes,  modifié  les  titres,  changé  même  les 
noms  des  auteurs.  En  second  lieu,  Proclus  n'est  visé  que  trois 
fois  avec  mention  expresse  de  son  nom  dans  la  première  partie, 
et  dans  la  seconde  le  mot  avTos  désigne  tantôt  Proclus,  tantôt 
l'auteur  du  Parménide.  Pour  T<'pondro  au  troisième  argument 


—  331   — 

de  M.  Heitz,  il  sudit  d'observer  que  la  première  partie  com- 
portait une  seule  division,  irrep}  (xeOé^ews,  «sur  la  partici- 
pation», et  que  les  rubriques  reconnues  dans  la  seconde  ont 
pu  fort  bien  être  ajoutées  par  les  copistes,  d'autant  plus 
que  dans  le  prototype  elles  figurent  toujours  en  marge  du 
texte. 

Voici  maintenant  nos  raisons  pour  établir  l'unité  de  l'ou- 
vrage, admise  par  la  généralité  des  philologues  qui  ont  parlé 
de  Damascius,  notamment  Thomas  Hydc,  Th.  Gale,  H.  Dod- 
well,  Lucas  Holstenius,  Clavier,  Thomson,  Victor  Cousin- et 
notre  excellent  maître  Emile  Egger. 

Damascius  semble  avoir  aflirmé  cette  unité  :  Ka<  ha  (jd) 
àiroalôjyisv  tov  rsep)  àç)-)(f2v  Xéyeiv  ...  et  Et,  pour  ne  pas  nous 
écarter  de  notre  sujet,  les  principes*?.  .  .  ,  dit-il,  à  la  fin  de 
la  seconde  partie  (Marcianus  A,  fol.  /j3o  r",  p.  3i  A  de  notre 
édition). 

De  plus,  la  question  de  la  c^ participation 33  commence  dans 
la  première  partie  et  se  termine  au  début  de  la  seconde,  ce 
qui  marque  la  continuité  du  texte. 

M.  Heitz,  en  faisant  commencer  le  commentaire  de  Da- 
mascius sur  le  Parménide  avec  la  seconde  partie  du  texte, 
semble  n'avoir  pas  remarqué  que  cette  exégèse  lient  déjà  une 
grande  place  dans  la  première;  qu'en  effet  les  pages  i6y, 
967,  009,  335,  386  de  Kopp  visent  respectivement  les 
pages  i39,  i3/i,  i3'7,  i38  et  i/i3  du  Parménide  (édition 
d'H.  Eslienne).  A  vrai  dire,  le  texte  de  Damascius  est  tout  en- 
semble un  traité  des  premiers  principes  et  un  commentaire  sur 
le  Parménide.  Sur  les  neuf  hypothèses  examinées  dans  ce  dia- 
logue, les  deux  premières  sont  discutées  dans  la  première  moitié 
de  ce  texte.  Chez  notre  philosophe,  comme  chez  Proclus,  la  pre- 
mière hypothèse  c^  Si  l'un  existe  33  occupe  une  place  hors  de  toute 
proportion  avec  le  reste.  D'autre  part,  Proclus  lui-même  a  fait 
observer  que  le  dialogue  a  pour  objet  la  connaissance   des 


—  332  — 

premiers  principes  '^l  II  se  range  parmi  ceux  qui  le  qualifient 
SidXoyos  Tsspi  àpyôûv'^^^  et  plus  loin  il  ajoute  :  ^Disserter  sur 
l'un-tout,  c'est  en  quelque  sorte  écrire  un  traité  des  prin- 
cipes w  :  ô  'a£p\  Tov  évos  'csavcos  SioXeyoïxevos  •zffsp)  àp)(/ov  âv 
'zsoio7to  tov  "koyov^^^  Victor  Cousin,  en  annotant  cette  phrase 
dans  sa  seconde  édition  de  Proclus  (p.  io/i8),  a  fait  une  ré- 
flexion que  nous  livrons  aux  méditations  de  notre  contradicteur  : 
«Haec  tenenda  sunt,  si  quis  intelligere  velit  cur  Damascii  com- 
mentarius  in  Parmenidem  inscriptus  sit  ^sp)  àpyjSv.  55  11  rap- 
pelle en  outre  le  passage  de  Proclus  situé  plus  bas  (p.  1008), 
cil  Plutarque  d'Athènes  est  cité  comme  ayant  émis  fopi.nion 
que  le  dialogue  du  Parménide  n'est  autre  chose  que  •srspî 
àpyS)v  'sspcty^ict.iziaS''^^. 

Damascius  semble  avoir  établi  lui-même  la  connexité  des 
deux  parties  dont  on  voudrait  faire  deux  ouvrages  distincts. 
Nous  avons  cru  reconnaître  cette  intention  en  rapprochant  di- 
vers passages  de  l'édilion  Kopp  et  ceux  du  texte  nouvellement 
édité  où,  suivant  nous,  les  mêmes  passages  sont  visés.  Les 
citations  sont  reproduites  dans  notre  mémoire. 

Partie  nouveliement  éditée.  Partie  éditée  par  Kopp. 

Marciamis  A,  fol.  200  r"  f.  (fine).  Page  i5i. 

Marcianus,  foi.  269  v"  m.  (medio).  Page  i55. 

Marciams ,  fol.  286  v°  m.  Page  i5o. 

Marcianus,  fol.  /108  r°  f.  Page  20. 

Réciproquement,  notre  auteur,  au  début  du  'zssp)  oLpyfiv, 
voulant  citer  une  assertion  de  Platon  énoncée  à  la  fin  du 
Parménide,  l'indique  par  le  mot  ts.Xevtwv,  sans  nommer  le 
dialogue;  nous  en  concluons  que  le  Trepi  àpywv  est,  dans  son 
intention,  un  commentaire  sur  le  Parménide. 

'•'  Théologie  platonique ,  p.  19. 

(')  In  Parmenidem ,  t.  VI,  p.  8  Cousin.  * 

*)  Ibid.,  p.  1/1. 

(')  Ihii.,  p.  27. 


—  333  — 

III.  IMPORTANCE  DR  L'OUVRAGE. 

Le  nlillosopbc  Daniascius,  suivant  une  remarque  de  M.  Er- 
nest Renan  ''\  tient  une  place  dans  la  transition  des  doctrines 
néoplatoniciennes  à  celles  des  Arabes  et  de  la  scolastique. 
Aussi  le  'zsep)  dpx^cov  est  un  des  textes  philosophiques  qui  a  été 
transcrit  le  plus  fréquemment.  Neuf  savants,  depuis  Dodwell 
jusqu'à  Ottfried  Millier  et  M.  Egger,  ont  exprimé  les  uns  l'in- 
tention de  le  publier,  les  autres  le  désir  de  voir  exécuter  cette 
publication.  M.  Guigniaut,  par  son  initiative  si  autorisée, 
nous  a  déterminé  à  la  compléter.  C'est  que  Damascius,  dans 
ce  vaste  ouvrage,  nous  a  conservé  le  souvenir,  sinon  la  repro- 
duction textuelle,  des  opinions  consignées  dans  des  traités  qui, 
pour  la  plupart,  ne  nous  sont  pas  parvenus,  notamment  dans 
la  seconde  moitié  du  commentaire  de  Proclus  sur  le  Parmé- 
nide.  11  cite  tour  à  tour  Porphyre,  Jamblique,  Eudème  le 
Péripatéticien,  Amélius,  Syrianus,  Phérécyde  de  Syra,  Phi- 
lolaùs,  Plutarque  d'Athènes,  Protagoras,  Speusippe,  Straton, 
Syrianus,  etc.,  les  philosophes  chaldéens,  babyloniens,  phé- 
niciens, égyptiens,  héliopolitains,  pythagoriciens,  helléniques, 
phrygiens,  perses  et  les  mages.  On  trouve  chez  lui  une  multi- 
tude de  notions  sur  la  théogonie  orphique  et  chaldéenne. 

IV.  CONTENU  DD  'S!£pi  àpywv , 

SES  RAPPOnTS  AVEC  D'ADTRES  OUVRAGES  ANALOGCES. 

Le  mémoire  analysé  ici  donne  le  sommaire  des  questions 
traitées  pnr  Damascius,  auquel  il  faut  joindre  à  titre  de  com- 
plément Xlndcx  copitum  par  lequel  se  termine  notre  édition. 
L'auteur  a  visé  plus  d'une  fois  le  commentaire  de  Proclus  sur 
le  Parménide ,  son  Inslilulion  tk'ologique,  et  surtout  sa  Tliéologie 
platonique,  dont  nous  avons  jugé  utile  de  donner  une  analyse 

(')  Averroès  el  l'Avm'oisinc,  3'  éd.,  «867,  p.  q-.î. 


—  33/1  — 

succincte,  au  moins  quant  aux  parties  où  l'auteur  commente 
le  Parménide.  On  remarquera  que  Damascius  a  suivi  presque 
de  point  en  point  le  plan  adopté  par  Proclus,  en  grande  partie 
d'après  son  maître  Syrianus. 

Nous  terminons  en  recommandant,  à  ceux  qui  voudront 
s'initier  aux  matières  traitées  par  Damascius,  la  lecture  des 
Ennéades  de  Plotin  (la  traduction  de  M.  Bouillet  en  a  singu- 
lièrement facilité  l'accès  aux  personnes  qu'un  ouvrage  aussi 
étendupourrait  effrayer),  et  surtout  celle  de  deux  ouvrages  de 
M.  Jules  Simon,  son  livre  intitulé  Du  commentaire  de  Proclus  sur 
le  Timée  de  Platon  et  sa  thèse  doctorale  :  Etudes  sur  la  Tliéodicée 
de  Platon  et  d'Aristote.  Il  faut  bien  reconnaître  que  la  littérature 
néoplatonicienne  offre  au  premier  abord  des  difficultés  re- 
butantes, mais  on  devra  nous  accorder  aussi  que  tout  esprit 
curieux  de  suivre  le  chemin  parcouru  de  Platon  à  Damascius  et 
Olympiodore  commercera  volontiers  et  non  sans  charme  avec 
ces  philosophes  de  la  k Chaîne  d'orjj  qui,  à  force  de  décom- 
poser les  idées  abstraites  et  de  varier  les  combinaisons  de  la 
pensée,  ont  porté  la  métaphysique  et  la  théodicée  jusqu'au 
raffinement  le  plus  invraisemblable. 


N°  XXV. 

NOTE  SUR  UN  CYLINDRE   CHALDEEN   APOCRYPHE   DU   MUSE'E  BRITANNIQUE, 

PAR  M.  JOACHIM  MENANT. 

(séance  du    20   SEPTEMBRE    l88g.) 

Vous  voulez  bien  vous  rappeler  que  dans  une  de  nos  séances 
précédentes  (2  août)  j'ai  eu  l'honneur  de  vous  exposer  les 
considérations  qui  m'ont  porté  à  douter  de  l'authenticité  d'un 
cylindre  en  pierre  dure,  gravé  au  nom  d'Urkham,  un  des 
plus  vieux  souverains  de  la  Chaldée.  Ce  cylindre,  qui  appar- 
tenait au  commencement  du  siècle  au  D'  John  Hine,  à  Bag- 


—  335  — 

dad,  a  été  connu  d'abord,  vers  1820,  par  les  dessins  de 
Ricli  et  de  Ker-Porter,  et  a  été  donné,  en  1880,  au  Musée 
britannique  par  M.  Cobham,  commissioner  à  Larnaca.  Mes 
observations  ne  pouvaient  passer  inaperçues,  à  cause  du  haut 
intérêt  qui  s'attache  à  ce  monument;  aussi  je  n'ai  pas  été 
surpris  de  la  teneur  d'une  lettre  qui  m'a  été  communiquée 
par  le  secrétariat,  dans  laquelle  M.  Cobham  prétend  détruire 
la  portée  de  mes  observations,  en  affirmant  qu'il  a  recueilli 
ce  cylindre  dans  la  succession  du  D"^  John  Hine,  son  premier 
possesseur,  et  qu'il  n'est  pas  sorti  de  ses  mains  depuis  cette 
époque,  jusqu'au  moment  où  il  en  a  fait  don  au  Musée  bri- 
tannique. 

Celte  lettre  est  ainsi  conçue  : 

Larnaca  de  Chypre,  28  août  1889. 
Monsieur  le  Secrétaire , 

Les  journaux  le  Temps,  h  août,  et  le  Journal  officiel,  7  août,  parlent 
d'une  notice  lue  dans  votre  se'ance  du  2  août  par  M.  Joachim  Menant,  sur 
un  cylindre  chaldëendu  Musée  britannique  dont  l'authenlicité  lui  inspire 
des  doutes.  Sur  un  point  relevé  par  M.  Menant,  c'est  moi,  et  moi  seul, 
qui  peux  [et  dois]  rassurer  le  savant  auteur  et  ses  illustres  collègues  de 
l'Académie. 

Le  D'  John  Hine,  ci-devant  du  département  médical  du  Gouvernement 
de  Bombay,  et  pendant  de  longues  années  attaché  à  la  résidence  de  Sa 
Majesté  Britannique  h  Bagdad,  mourut  le  18  mars  1869  à  Leeford, 
Exmouth,  Devonshire,  où  depuis  au  moins  vingt  ans  il  avait  sa  demeure. 
Peu  de  jours  après  ses  funérailles,  ledit  cylindre  me  fut  remis  (j'étais 
voisin  et  légataire  du  défunt)  par  un  des  exécuteurs  de  son  testament; 
et  jusqu'au  moment  où  j'en  fis  don  au  Musée  britannique,  c'est-à-dire 
au  mois  de  septembre  1880 ,  ce  petit  monument  ne  m'a  jamais  quitté. 

Veuillez  agréer,  etc. 

G.  Delasal  Gobham. 

Pour  bien  comprendre  le  peu  de  portée  que  ce  cerlijical  doit 
avoir  dans  un  débat  sérieux  qui  pourrait  s'élever,  si  on  vou- 
lait établir  l'authenticité  du  monument,  je  rappellerai,  en 


—  336  — 
quelques  mots,  le  sujet  du  cylindre  et  la  nature  de  mes  obser- 
vations. 

Le  sujet  représente  un  personnage  divin  assis  sur  un  trône  ; 
devant  lui,  un  pontife  présente  à  la  divinité  un  initié  qu'il 
conduit  par  la  main;  derrière  l'initié  un  second  pontife  élève 
les  mains  dans  la  pose  de  l'adoration  ou  de  la  prière  ;  enfin, 
une  inscription  fait  connaître  le  nom  du  souverain  pour  lequel 
ce  monument  a  été  gravé.  C'est  le  type  ordinaire  des  cylindres 
de  cette  époque. 

Mes  observations  portent  sur  deux  points  :  i"  sur  l'authen- 
ticité du  sujet,  tel  qu'il  a  été  présenté  pour  la  première  fois 
par  Dorow,  en  1820;  2°  sur  le  cylindre  lui-même,  que  j'ai 
étudié  au  Musée  britannique,  et  qui  est  conforme  à  la  gra- 
vure publiée  par  Dorow. 

Quant  au  premier  point,  je  me  bornerai  à  rappeler  aujour- 
d'hui un  certain  détail  très  caractéristique.    Le    trône,   sur 
lequel  repose  la  divinité,  a  pour  support  un  pied  de  biche;  or 
je  n'ai  rencontré  cette  forme  sur  aucun  monument  de  l'époque 
ou  de  la  localité  à  laquelle  le  cylindre  doit  appartenir,  d'après 
les  indications  de  l'inscription.  Je  passe  sur  les  considérations 
accessoires;    cette   remarque  est   suffisante  pour  préciser  le 
point  capital  du  débat.  Mon  affirmation  est  du  domaine  de 
l'archéologie  pure,    et  repose  sur   l'observation   de  plus   de 
1,5 00  cylindres  assyro-chaldéens  de  toutes  les  époques  que 
j'ai  étudiés,  soit  directement,  soit  sur  des  moulages.  Cette 
affirmation  ne  pourra  donc  être  détruite  que  par  une  preuve 
de  la  même   nature,  en  étabHssant,  par  la  production   de 
monuments  que  j'ignore,  que  ce  détail  du  trône  de  la  divi- 
nité n'est  pas   insolite  en  Chaldéc  sous  les  rois  du  premier 
empire. 

Quant  au  second  point,  je  me  suis  borné  à  constater  que 
le  cylindre  était  conforme  au  dessin  de  Rich;  et,  dès  lors, 
j'ai  supposé  qu'il  pouvait  en  être  la  copie.  J'ai  ajouté,  il  est 


—  337  — 

vrai,  que  la  facture  des  personnages  accuse  une  confection  ré- 
cente :  je  vais  m'expiiquer,  et,  en  cela,  je  remercie  M.  Gobham 
de  m'en  fournir  l'occasion.  On  ne  peut  nier  que  le  sujet  du 
cylindre  ne  soit  de  tout  point  identique  au  sujet  de  la  gra- 
vure; mais  je  conviens  qu'on  peut  me  demander  ce  que  j'en- 
tends par  une  confection  récente.  Cette  confection  récente  est 
très  relative,  je  n'y  ai  point  assigné  de  date;  aussi  j'admets  vo- 
lontiers que  M.  Gobham  a  recueilli  ce  monument,  tel  qu'il  est 
aujourd'hui,  dans  la  succession  de  John  Hine;  je  n'ai  aucune 
raison  de  douter  de  sa  déclaration  loyale  et  sincère.  J'irai  plus 
loin,  j'admets  même  que  c'est  peut-être  le  cylindre  sur  lequel 
Rich  a  fait  son  dessin  ;  tant  je  suis  désireux  de  rendre  hom- 
mage à  la  bonne  foi  des  possesseurs  de  ce  curieux  objet.  Je 
n'aurai  ainsi  reculé  que  de  quelques  années  l'époque  de  sa 
confection,  car  on  a  fabri([ué  à  tous  les  âges,  pour  une  raison 
ou  pour  une  autre,  de  fausses  antiquités.  Que  signifie  un 
siècle,  ou  plusieurs  si  l'on  veut,  en  présence  de  la  date  (au 
moins  vingt  siècles  avant  notre  ère)  à  laquelle  nous  reporte  le 
nom  gravé  sur  ce  cylindre?  et,  dès  lors,  en  quoi  la  lettre  de 
M.  Gobham  vient-elle  détruire  les  preuves  archéologiques  que 
j'ai  présentées  pour  établir  que  ce  cylindre  est  apocryphe? 
Cependant  ce  monument  a  sa  raison  d'être  ;  ce  n'est  pas  une 
œuvre  de  fantaisie.  Il  est  certain,  pour  moi,  qu'il  a  dû  exister 
un  c\]indrc  authentique  d'Urkham  dont  celui  du  Musée  bri- 
tannique est  la  copie  plus  ou  moins  fidèle  et  qui  se  retrouvera 
peut-être.  Ce  n'est  pas  le  premier  monument  de  ce  genre  qui 
aurait  été  copié  dans  l'antique  Chaldée  à  une  époque  récente, 
par  exemple  sous  les  rois  du  second  empire.  Au  vi"  siècle 
avant  notre  ère,  le  goût  de  l'archaïsme  poussait  les  gra- 
veurs à  copier  d'autres  monuments  qui  sont  parvenus  jusqu'à 
nous;  cette  remarque  a  été  déjà  produite,  avec  une  grande 
sagacité,  par  F.  Lenormant.  Ces  copies  ont  été  faites  avec  plus 
ou  moins  de  soin;  ici,  le  graveur  n'a  pas  suivi  scrupuleuse- 


—  338  — 
ment  son  modèle  et  il  y  a  ajouté  un  détail  de  fantaisie  qui 
avait  cours  alors,  mais  qui  décèle  son  origine. 

La  seule  conclusion  à  laquelle  on  peut  arriver,  tant  que  la 
preuve  archéologique  que  j'ai  apportée  ne  sera  pas  détruite, 
c'est  que  John  Hine,  Rich  et  Ker-Porter  ont  été  trompés. 
Personne  ne  leur  en  fera  aujourd'hui  un  reproche;  car  ils 
n'avaient  aucun  moyen  de  contrôle,  et  nul  ne  pouvait  les 
éclairer  ni  sur  l'authenticité  du  sujet  ni  sur  les  incorrections 
qu'il  présente. 

N"  XXVI. 

UNE  MONNAIE  BAGTRO-CHINOISE  BILINGUE  DU  PREMIER  SIECLE  AVANT 
NOTRE  ÈRE^'^,  PAR  M.  TERRIEN  DE  LACOUPERIE,  DOCTEUR  ES  LETTRES 
ET  EN  PHILOSOPHIE. 

(séance   du    20   SEPTEMBRE   1889.) 


La  rencontre  sur  un  même  monnayage  d'une  légende  en 
caractères  indo-baclriens  à  base  araméenne^-'  et  d'une  autre 
légende  en  symboles  chinois  est  un  fait  intéressant  à  plusieurs 
points  de  vue,  et  qui  mérite  quelques  instants  d'examen. 

(')  Pour  la  transcription  des  noms  étrangers  :  a,  e,i,  o  comme  en  italien  ; 
i«=oîi;  il  =  Vu  français;  sh  =^  sch allemand  =  di  français;  tch  =  ch  anglais  =  isch 
allemand. 

(^)  Dans  nn  article  intitulé  Did  Cyrus  iniroduce  writing  into  Iiulia?  publié 
dans  le  Babylonian  and  Oriental  Record,  de  février  1887,  vol.  I,  p.  58-6^, 
j'ai  indicpié  quelques  traditions  d'après  lesquelles  l'alphabet  indo-haclrien  serait 
une  dérivation  d'une  écriture  introduite  en  Orient  par  Cyrus  et  dont  il  resterait 
quelques  traces. 


—  339  — 

Le  spécimen  de  co  genre,  unique  jusqu'ici,  qui  fait  l'objet 
de  ces  remarques  a  été  rapporté  de  Khoten,  en  Kashgarie  ou 
Turkestan  chinois,  bassin  du  Tarym,  par  Sir  Douglas  For- 
syth '1',  chef  de  l'expédition  envoyée  à  Yarkand  par  le  Gou- 
vernement de  Sa  Majesté  Britannique  en  iSyS. 

L'original ,  qui  est  en  bronze  et  non  en  fer  comme  on  l'avait 
cru  tout  d'abord,  m'avait  été  prêté  en  1879  par  feu  M.  Ed- 
ward Thomas,  de  Londres,  correspondant  de  l'Académie,  et 
nous  l'avons  maintes  fois  examiné  ensemble  afin  d'en  amé- 
liorer peu  à  peu  le  déchiffrement.  Après  la  mort  de  ce  numis- 
mate distingué,  il  me  fut  prêté  par  Sir  Douglas  Forsyth,  qui 
lui-même  est  mort  depuis,  et  j'ai  pu  en  faire  faire,  au  British 
Muséum,  l'électro-type  parfaitement  semblable  à  l'original  que 
je  présente  aujourd'hui  à  l'Académie  '-'.  Le  regretté  diplomate 
et  voyageur  avait  rapporté,  du  même  endroit,  un  autre  spé- 
cimen également  unique,  de  plus  petite  dimension,  d'un 
monnayage  du  même  genre  mais  moins  bien  conservé.  Sur  la 
face  des  deux  pièces,  au  centre,  un  cheval,  la  tête  à  droite. 
En  exergue  sur  la  plus  grande,  une  inscription  indo-bactrienne 
en  partie  déchiffrable,  tandis  que  sur  la  plus  petite  toute 
trace  de  légende  a  disparu.  Au  revers,  inscriptions  chinoises 
sur  les  deux  pièces  ^^'. 

(''  Cf.  Journal  nf  the  Royal  Gpo^raphical  Society,  London,  1876,  vol.  XLVIf, 
p.  12.  Dans  le  volumi^  Autolnnjryaphy  and  Rontninœnces  of  Sir  Douglas  Forsyth, 
edited  by  his  daiiyhlci-  Ktlici  Forsyth,  Londoii,  1887,  je  traduis  Verbatim  les 
passages  suivants  :  «J'ai  plusieurs  monnaies  grecques  et  byzantines  qui  ont  été 
trouvées  dans  les  ruines  d'une  \ille  près  de  Kiria  (à  dnq  étapes  de  Khoten)-?, 
p.  218.  tfUn  antre  individu,  Ram  Chund,  que  j'avais  envoyé  visiter  Khoten, 

m'apporta plusieurs   monnaies,  dont  la   plus  remarquable  est  une 

pièce  en  fer,  apparemment  d'IIermaeus,  le  dernier  roi  grec  de  Bactrianc,  au 
i"  siècle  avant  le  Christn,  p.  983. 

'"-'  Les  légendes  de  cet  unique  spécimen  sont  tellement  usées  et  effacées  que 
des  comparaisons  répétées  avec  des  légendes  du  môme  genre  sur  des  monnayages 
différents  ont  été  le  seul  moyen  par  lequel  j'ai  pu  déchiffrer  avec  quelque  certitude 
presque  tonte  la  légende  chinoise  et  reconstituer  la  légende  indo-bactrienne. 

'^)   Ces  pièces  ont  été  décrites  sommairement  pour  la  première  fois  dans  le 


—  340  — 
En  outre  de  ces  deux  curieux  spécimens,  le  même  voya- 
geur avait  rapporté  du  même  endroit  deux  autres  pièces  de 
types  bien  connus  d'Antimachus  II  et  de  Ménander,  deux  rois 
grecs  de  Bactriane,  à  légende  bilingue,  grecque  et  indo-bac- 
trienne  ^^l 

Nous  savons  que  les  Chinois  avaient  étendu  leur  domina- 
tion politique,  non  seulement  dans  le  bassin  du  Tarym,  mais 
aussi  à  l'ouest  du  massif  des  montagnes  Tsung-ling,  et  qu'un 
certain  nombre  de  petits  États  s'y  trouvaient  sous  leur  protec- 
torat, vers  le  commencement  du   premier  siècle  avant  notre 
ère.  Malgré  les  exagérations  et  l'enthousiasme  patriotique  des 
historiens  chinois,  cette  domination  plus  apparente  que  réelle 
ne  paraît  pas  avoir  été  jamais  suffisamment  importante  pour 
justifier  l'émission  d'un  monnayage  bilingue  où  leur  écriture 
compliquée  eût  joué  un  rôle.  Et  quand  même  cette  influence 
et  cette  domination  eussent  été  suffisamment  puissantes  pour 
établir  une  circulation  monétaire  spéciale,  les  résidents  chi- 
nois n'auraient  pu  introduire  aucun  autre  type  de  monnaie  que 
celui  qui  avait  cours  à  cette  époque  dans  le  royaume  du  Milieu. 
Or  la   dynastie  des   Han,  qui   régnait  alors,  avait  introduit 
depuis  l'an  1 18  avant  notre  ère  un  type  unique  ^^^  de  monnaie 
ronde,  d'un  pouce  (-ij*  ts'un)  de  diamètre,  percé  au  centre 
d'un  trou  carré,  et  portant  la  légende  3£  H  wu  tchu,  «cinq 
tchusj?.  Cette  légende  avait  remplacé  celle  de  ^  '^  p'anliang, 
t^  demi-once  w,  qui  avait  été  employée  sur  des  pièces  d'une  di- 
mension successivement  réduite  depuis  l'époque  de  la  dynastie 
des  Ts'in,  221-206  avant  notre  ère^^^ 

Niimismalic  chronicle,  1879,  nouvelle  série,  vol.  XIX,  p.  276-281  :  Coins  from 
Kashgar,  pr  le  professeur  Percy  Gardner,  rvilh  a  noie  on  the  Geography  of 
Kashgar,  par  H.  H.  Howorlh. 

(')  Eiies  ont  été  publiées  dans  le  mémoire  ci-dessus ,  Coimfrom  Kashgar,  p.  2  70. 

(*)   Cf.  T.  de  L.,  Historical  catalogue  of  Chinese  money,  vol.  I,  p.  36o. 

(3)  Tbid.,  p.  336-339.  Sous  les  Han,  la  légende  p'an  liang  fut  maintenue  en 
186,  175  et  i36  avant  notre  ère.  —  Cf.  ibid.,f.  3/13-351,  355-357. 


—  Ul  — 

Mais  les  inscriptions  chinoises  des  deux  spécimens  que  nous 
décrivons  ici  n'ont  rien  à  faire  avec  l'une  ou  l'autre  de  ces 
deux  légendes. 

Celle  de  la  plus  petite  des  deux  pièces  est  écrite  en  carac- 
tères chinois  fort  corrompus  et  imités  d'une  manière  barbare 
de  la  légende  ^  :^.  Le  second  de  ces  deux  caractères  repré- 
sente le  mot  écrit  depuis  ^ff  par  l'addition  du  signe  Jy  kin, 
afin  d'éviter  toute  ambiguïté  dans  sa  signification  de  «livre  »  ou 
poids ^^'.  Fan  kin  «demi-livre»  est  une  inscription  qui  nous 
est  familière  par  plusieurs  émissions  monétaires  faites  dans  la 
Chine  septentrionale,  vers  3oo  avant  notre  ère,  décrites  dans 
mon  «Catalogue  historique  des  monnaies  de  la  Chine  an- 
cienne ^'-^^  »,  que  j'ai  préparé  pour  le  British  Muséum  et  qui  est 
maintenant  sous  presse. 

La  légende  chinoise  de  l'autre  monnaie  est  beaucoup  plus 
compliquée.  Au  centre,  on  reconnaît  une  forme  ornementale 
et  archaïque  du  symbole  chinois  ^  pei  «précieux»,  qui  re- 
présentait autrefois  les  coquilles  ou  cauris  qui  servirent  par- 
tiellement aux  échanges  jusqu'à  l'introduction  de  la  monnaie 
métallique  au  vif  siècle  avant  notre  ère^^^  L'exergue  est  si 
usée  qu'il  est  difficile  de  reconnaître  plusieurs  caractères.  Il 
m'a  semblé  pouvoir  lire  : 

(ii)?   n    n  m    n    sM 

Tsien  ?    Ichung     erh  liang     sze      tchu. 
Monnaie  ?  posant  deux  onces  quatre  tchus. 

'•'  Voir  pour  ce  symbole  le  même  ouvrage  aux  pages  26-27,  3o  et  827,  et 
aux  numéros  12A,  127-180  et  187  pour  l'emploi  du  signe  simple. 

(*)  Ibid.,  p.  19  et  28.  —  Voir  par  exemple  aux  numéros  117,  180  ,  182  ,  etc. 

'>•''  Sur  cette  question  et  la  transition  des  cauries  à  la  monnaie  métallique, 
on  trouvera  les  indications  historiques  dans  un  article  sur  The  metallic  cauries  of 
Ancient  China  (600  B.  C),  que  j'ai  publié  dans  le  Journal  of  tbe  Royal  Asialtc 
Society  of  Great  Britain  and  Jreland,  1888,  vol.  XX,  p.  /j28-i89.  J'ai  donné 
«ne  esquisse  historique  de  la  monnaie  en  Chine  et  au  Japon  aux  pages  190-286 


—  342  — 

Les  cinq  derniers  symboles  ne  sont  pas  douteux,  mais  le 
second  est  presque  complètement  oblitéré  ^^^;  quant  au  pre- 
mier, il  n'est  pas  très  sûr  ;  le  premier  de  ses  deux  composants 
est  seul  reconnaissable  sans  hésitation.  |g  ts'ien  est  le  terme 
employé  comme  désignation  des  pièces  de  monnaie  à  cette 
époque;  sa  signification  propre  était  celle  d'un  petit  outil 
d'agriculture  en  bronze  que  l'on  avait  trouvé  commode  autre- 
fois pour  les  échanges  et  dont  la  forme  avait  été  longtemps 
conservée  après  l'établissement  d'un  monnayage  régulier.  Il 
avait  remplacé  un  mot  plus  ancien  ^  tsiuen  «sources,  son 
homonyme  d'alors,  tous  deux  ayant  phonétiquement  divergé 
depuis.  Tsiuen  servait  à  dénommer  d'une  manière  générale 
tout  ce  qui  servait  de  monnaie''^'. 

Nous  voyons  par  le  premier  symbole  ts'ien  de  la  légende,  si 
notre  déchiffrement  est  exact  sur  ce  point,  que  les  deux  pre- 
miers signes  n'étaient  pas  l'indication  d'un  nom  propre,  mais 
simplement  le  nom  de  la  pièce  de  monnaie.  Les  cinq  carac- 
tères suivants,  qui  ne  sont  autres  que  le  poids  k pesant  deux 
onces  et  quatre  tchus??,  correspondent  à  un  type  de  monnaie 
bien  connu  ^^',  qui  avait  cours  également  au  m"  siècle  avant 
notre  ère,  principalement  dans  l'Etat  le  plus  nord-ouest  de 
l'heptarchie  chinoise,  l'État  de  Ts'in,  alors  en  lutte  contre 
les  six  autres  Etats,  afin  d'obtenir  la  suprématie  à  laquelle  il 

de  Coins  and  Medals.  Their  place  in  history  and  art,  by  the  Aulhors  of  tbe  Bri- 
tish  Muséum  oflicial  Catalogues.  London,  Elliot  Stock,  1880. 

")  C'est  peut-être  ^^  hmg  trcuivren. 

(^'  Aucun  de  ces  deux  termes  ne  figure  avec  cette  acception  dans  le  Shu-King, 
dont  le  chapitre  le  plus  récent  se  rapporte  à  i'an  69 5  avant  Jésus-Christ  ou  en- 
viron. 

(^)  Ce  système  de  poids-monnaies  eu  l'orme  d'anneaux  plats  appelés  |^  liwan 
était  connu  en  Chine  dès  le  milieu  du  x^  siècle  avant  notre  ère  et  se  trouve 
mentionné  dans  le  Shu-King,  part.  V,  liv.  XXVII ,  pour  le  payement  des  amendes. 
Cf.  mon  Ilisloriccd  Catalogue,  p.  819.  J'ai  fait  remarcpior  dans  le  Bahylonian 
and  Oriental  Record,  avril  1889,  p.  1  o3,  que  ce  fait  correspond  avec  l'apparition 
d'inilucnces  étrangères  on  Chine. 


—  3^3  — 

devait  arriver  peu  après.  Ce  monnayage  chinois  différait  tou- 
tefois de  celui  que  nous  décrivons  ici,  en  ce  qu'il  avait  la 
forme  d'un  anneau  plat  d'environ  deux  pouces  de  diamètre  et 
n'ayant  do  légende,  laquelle  décrivait  le  poids,  que  d'un  seul 
côté('l 

Le  monnayage  représenté  par  les  deux  spécimens  qui  font 
l'objet  de  cette  communication  appartient  donc,  en  tant  que 
copies  de  légendes  monétaires  chinoises,  à  une  époque  anté- 
rieure à  celle  où  les  armées  des  Han  ont  pénétré  dans  l'Asie 
centrale.  Ces  légendes  ont  dû  être  empruntées  par  un  peuple 
voisin  de  la  frontière  qui,  par  ses  relations  avec  les  Chinois, 
aurait  reçu  l'inlluence  de  leur  civilisation,  et  appris  quelque 
chose  de  leur  écriture  et  de  leurs  monnaies,  à  l'époque  où  les 
légendes  monétaires  Tchimg  .  ,  .  luing  .  .  .  tchu  et  Pan  km, 
lesquelles  furent  officiellement  abolies  en  22  i  avant  notre  ère , 
étaient  encore  usitées. 

Or,  ce  peuple  ne  pouvait  être  que  celui  des  Yueh-ti'-'  ou 
Gwetù^^\  qui  selon  les  annales  de  la  dynastie  des  Han  étaient 

(')  Des  spécimens  de  plusieurs  dimensions  et  poids  ont  été  retrouvés.  Ainsi 
dans  mon  Hisloricnl  Catalogue  précité,  les  numéros  1601-1609  représentent  un 
anneau  avec  la  légende  Tchtuig  yh  liang  sJnh  s:e  Ichu,  «pesant  un  lianjr  quatorze 
ichu7)\  le  numéro  i6o3  :  Tckung yh  liang  shih  erh  Ichu,  «pesant  un  li(i)ig  douze 
tchu-n;\e  numéro  i6o5  :  Tchitng shih  erh  tchu,  «pesant  douze  tchttn,  c'est-à-dire 
un  demi-limig.  L'anneau-poids-monnaie  de  1  Uavg  1  '1  tchu  du  Rrilisli  Muséum  pèse 
170  grains  ou  11  gr.  oiO.  Le  spécimen  baclro-cliinois  ou  plutôt  lueh-ti,  décrit 
dans  cette  notice,  pèse  220  grains  ou  \h  gr.  956,  pour  a  liang,  U  Ichu,  ou 
59  tchu;  tes  deux  poids  correspondent  assez  bien,  car  it  faut  tenir  compte  de 
l'état  respectif  des  deux  spécimens;  l'un  est  encrassé,  l'autre  est  usé  d'un 
côté. 

'^)  Sur  t'Iiistoire  de  ce  peuple  d'après  les  sources  chinoises,  cf.  le  mémoire  de 
M.  Ed.  Sppclitdans  le  Journal  asialifjne,  VIII°  série,  vol.  II,  et  mon  article  sur 
The  Ytteh-li  and  the  early  Buddhist  niissionarles  in  China,  1888  (réimprimé  do 
The  Academy ,  3i  décembre  1887). 

'^^  Ce  nom  des  Gwel-li  est  écrit  dans  les  textes  chinois  ^  ^  et  ^  ^ 
qui  se  prononcent  respectivement  aujourd'hui  ïueh-tchi  et  Yueh-ti  en  langue 
mandarine.  A  l'époque  des  Ilan,  le  nom  devait  se  prononcer  Gwet-ti  selon  la 
Iranscriplion  cliinoise,  mais  nous  ignorons  sa  forme  originale,  puisque  c'est  un 

xvn.  36 


lV;-.-.IUI  hll-.    .S.tllU\tLK. 


—  3/i/j  — 

très  florissants  au  uf  siècle  avant  notre  ère,  dans  la  région 
sise  au  nord-ouest  de  l'Etat  de  Ts'in,  immédiatement  au  delà 
des  frontières  dans  le  Kaiisuli  actuel ^'^  Les  Yueh-ti  étaient, 
selon  les  Chinois,  un  peuple  au  teint  blanc  et  rose  et,  selon 
leurs  monnaies  gréco-bactriennes,  leur  nez  était  généralement 
de  forte  dimension.  Après  quelque  quarante  années  de  guerres 
incessantes,  ils  furent  cliassés  vers  l'ouest  par  leurs  ennemis 
acharnés  les  Turcs  Hiung-nu,  dont  le  chef  ou  Shen-iju^^  s'était 
fait  du  crâne  de  leur  roi  une  coupe  à  boire.  Ils  se  firent  route 
vers  l'ouest  jusqu'au  Ferghana,  dans  le  voisinage  duquel  ils 
s'établirent.  Vers  iZi3  avant  notre  ère,  leurs  anciens  voisins 
les  Wu-sun,  aux  cheveux  blonds  et  aux  yeux  bleus,  d'accord 
avec  les  Hiung-nu,  les  attaquèrent  par  derrière  et  les  forcèrent 
à  fuir  plus  loin.  En  199  avant  notre  ère,  le  ministre  chinois 
Tchang-kien,  qui  avait  été  envoyé  après  eux  pour  obtenir 
leur    alHance    contre  les  Hiung-nu,  alors    en  lutte   avec  le 

nom  propre  étranger  transcrit  par  à  peu  prùs  à  l'aide  des  sons  attachés  aux  signes 
idéographiques  du  Royaume  du  Milieu.  L'ancienne  forme  chinoise  nous  est 
connue  à  l'aide  du  phonétisnie  archaïque  de  plusieurs  dialectes  chinois,  tels  que 
le  sino-annamite,  ceux  d'Eriiouy  et  de  Canton.  Ainsi  Yuch  ^  est  encore  E. 
pwat  Qi  S.  A.  ngoal  ou  ngiujet.  Le  She-iuing,  un  dictionnaire  du  ii^  siècle  de 
notre  ère,  donne  comme  homonyme  ^  qui  est  S.  A.  kuyet,  C.  hût  et  E,  kw'at. 
Les  prononciations  ajoutées  d'ancienne  date  au  Shwoh-Wen  donnent  comme  ho- 
monyme E^  qui  est  S.  A.  kwyet ,  C.  hul  et  E.  kival.  Dans  les  dictionnaires  to- 
niques de  date  moins  ancienne,  tels  cjue  le  Tang  yiïn  (7^0  après  J.-C),  dans 
lequel  étaient  données  d'anciennes  prononciations  à  l'aide  de  la  méthode  fan- 
tsieh  indiquant  le  commencement  et  la  finale  des  mots,  cette  prononciation  est  in- 
diquée par  deux  caractères  formant  S.  A.  vgu-àt,  E.  gw-at,  etc.,  et  l'homonyme 
indiqué  est  ff  S.  A.  ngàl,  E.  gival,  etc.  I^e  son  de  la  seconde  syllaho  ti  est 
rendu  certain  par  la  vaiiante  chinoise  qui  est  li  et  nulle  autre.  La  restauration 
de  l'ancienne  forme  de  Yue-tchi,  Yueh-ti  en  Gwetti  rend  impossible  plusieurs 
assimilations  jusqu'ici  proposées,  et  permet  de  diriger  les  recherches  dans  une 
autre  direction. 

(''  Correspondant  à  la  région  comprise  aujourd'hui  entre  les  préfectures  de 
An-si  et  de  Si-ning  dans  la  province  de  Kansuh. 

'■'  Le  titre  com])lot  était  T(n>g-li  Kxvn-tu  Shen-yu.  Cf.  mon  article  Khan, 
hliakan  and  olhev  Tarlar  tilles,  note  ^i  (7'/u'  Uabylonian  ami  Oriental  Becord, 
1888,  vol.  II,  p.  277). 


Il'l.-) 


Rovaume  du  Milieu,  les  trouva  établis  au  nord  de  FOxus.  Plus 
lard.kilolo,  leur  chef,  s'avançant  vers  le  sud,  passa  l'Hindu- 
kuslî  vers  l'est,  conquit  les  cinq  royaumes  de  Gandhara,  la 
région  de  Pcshâuer,  et  établit  un  poste  avancé  dans  la  ville 
même  de  Peshâwer.  Leur  domaine  grandit  ainsi  et  forma  cinq 
principautés,  qui  furent  réunies  sous  un  seul  sceptre,  vers 
lio  ans  avant  notre  ère,  par  K'iu-tsiu-kioh,  chef  de  l'une 
d'elles,  celle  des  Kuei-sbwang,  les  Kushan  des  Persans.  Ce 
roi,  le  Kujula  Kasasa  ou  kadphises  I  des  monnaies  gréco- 
scytbiques,  annihila  Puk-ta  ou  Bactres  et  Ki-pin  ou  Kophêne, 
puis  il  envahit  le  pays  à'Ans{k'^^\  la  Parthie,  après  l'an  ho 
et  avant  l'an  3o  avant  notre  ère^'-l  Les  Yueli-ti  vinrent  ainsi 
en  contact  avec  les  Grecs,  et  Hermœus,  le  dernier  des  rois 
grecs  de  Cabul,  devint  l'allié  de  Kadphises  I  avant  de  devenir 
son  vassal.  Ils  frappèrent  en  commun  un  monnayage  bilingue 
de  fabrication  grecque,  à  légendes  grecque  et  indo-bactrienne, 
qui  a  été  publié  par  divers  savants,  notamment  et  en  dernier 
lieu  par  mon  ami  le  professeur  Percy  Gardner,  d'Oxford, 
dans  son  ^Catalogue  des  monnaies  des  rois  grecs  et  scythes  de 
Bactres  et  de  l'Inde?',  d'après  les  collections  du  British  Mu- 
séum et  autres  ^^l  La  légende  du  roi  Kushan  est  celle  écrite  en 
caractères  indo-bactriens. 

(''  Hou  lldu  xlui.  —  Ynen  kien  hi  liaii,  Iviv.  a'J-,  fol.  /i3.  Pukta  ne  pouvait 
pire  uno  Iranscription  tlu  nom  de  la  Parlhio,  comme  on  l'a  suggéré  à  lort  en- 
core récemment,  parce  qu'à  l'époque  des  Han,  selon  le  système  d'équivalence 
alors  en  usage,  ce  nom  eût  fait  *Panla  ou  *Punla.  11  a  été  trouvé  du  reste  sous  la 
forme  P'an-tou  dans  le  Tsim  Han  Sliu.  Arsak  fuit  An-siJ:.  J'ai  expliqué  les  cinq 
procédés  employés  successivement  par  les  Chinois  pour  rendre  le  r  des  noms 
étrangers,  p.  Aia-â'iS  de  mon  mémoire  sur  The  Djurtchen  of  Mandshuria,  their 
naine,  language  and  literalure,  dans  io  Journal  o/the  Royal  Asiatic  Society,  1889, 
yOl.  X\I.  Voir  aussi  sur  trois  do  ces  procédés  et  nolnminont  sur  l'équivalence 
n  =  »",  l'article  du  D'  F.  Hirlh,  Chinese  équivalents  ofthe  letter  Rinforeign  names 
(^Journal  China  Branch  Roy.  Asiat.  Soc,  vol.  XXI,  p.  21  A-aaS). 

'*)  Vers  Tan  3i  avant  noire  ère,  Pliraates  chassa  Tiridates  du  gouvernement 
de  la  Parthie  avec  l'appui  d'une  année  scyllie. 

'■''    Colaloifue  ofcnini  of  thc  Grp  k niul Srylhic  kin;^s of  Baclria  andlmlitt ,  p.  120, 


—  3/iG  — 

Ces  remarques  nous  ramènent  h  l'examen  final  des  deux 
spécimens  uniques  du  monnayage  qui  fait  l'objet  de  cette 
communication.  Sur  le  spécimen  bilingue  le  déchiffrement  de 
ia  légende  indo-bactrienne  nous  fournirait,  s'il  pouvait  être 
complet,  la  solution  de  la  question  d'histoire  et  de  géographie 
qu'il  comporte.  Malheureusement,  l'état  de  conservation  de  ce 
spécimen,  jusqu'ici  unique,  laisse  beaucoup  à  désirer;  il  est 
fortement  corrodé  sur  la  droite  où  la  légende  se  trouve  presque 
effacée  et  il  nous  faut  suppléer  par  conjecture  à  plusieurs  ca- 
ractères, en  partie  disparus  ou  illisibles;  en  outre,  et  comme 
par  fatalité,  la  fraction  de  l'inscription  qui  est  incomplète  est 
celle  où  se  trouvait  le  commencement  du  nom  du  roi  cjui  l'avait 
émise. 

Cinq  caractères  sont  illisibles  sur  les  vingt  qui  forment  l'in- 
scription. Elle  se  lit  de  droite  à  gauche  et  commence  en  haut, 
à  gauche,  au-dessus  de  la  croupe  du  cheval. 

Les  onze  premiers  caractères  se  laissent  lire  sans  trop  de 
peine  Mahârajasa  rajadirajasn ;  puis  viennent  trois  signes  illi- 
sibles, ensuite  sa,  deux  caractères  effacés  et  enfin  mayasa  en 
trois  lettres  bien  reconnaissables. 

>>A^('7l))>(^i^))>:/'7^:/^)>:/^i^ 

La  comparaison  de  cette  inscri[)lion  avec  celles  des  mon- 
naies des  rois  grecs  delà  Bactriane,  qui  contiennent  les  mêmes 
mots  ott  les  mêmes  caractères,  permet  de  restaurer  avec  une 
grande  probabilité  les  lettres  indéchiffrables. 

Les  trois  dernières  lettres  ma  ya  sa  rappellent  le  nom  du 
roi  grec  Hermœus,  écrit  Hrramnyasa  sur  les  légendes  indo- 
bactriennes  de  ses  monnaies  bilingues  déjà  publiées.  Les  deux 
derniers  caractères  illisibles  semblent  devoir  être  Hara..  .  Le 

191,  et  pi.  XXV,  1  et  n.  On  consultera  avec  avantage  sur  leur  histoire  le  mé- 
moire récent  de  IVI.  Ed.  Drouin,  Chronolo[>io  et  Numismatique  des  rois  intlo- 
scylhes,  Paris,  Leroux,  i8(S8,  in-S"  (  extrait  de  la  Revue  de  numismatique). 


—  3/1 7  — 

signe  lisible  sa  élail  évideinmenl  une  lenninnison,  et  nous 
pouvons  deviner,  (rn[)rès  les  traces  des  lettres  effacées,  que 
cette  finale  était  celle  du  mot  mahalasa,  que  nous  lisons  éga- 
lement sur  les  monnaies  d'Herma3US.  Celles-ci  portent  sur  la 
face  une  inscription  grecque  BAZIAEQZ  ZQTHPOZ  EPMAIOY, 
ou  queKiuefols  BAZIAEQZ  ZTHPOZ  ZV  EPMAIOY  et  sur  le 
revers,  en  caractères  indo-bactrlens  :  Mahamjasa  tradalasa  He- 
ramnynsa,  ou  bien  Mahnvajnsn  mahnUisn  Hcrammjam ,  ou  encore 
Mahnrajasa  rajarajasa  mahalasa  IJeravunjasa,  c'est-à-dire  à  très 
peu  de  chose  près  la  légende  que  nous  lisons  sur  le  spécimen 
rapporté  de  Khotan,  la  seule  différence  consistant  en  ce  que 
sur  ce  dernier  nous  lisons,  au  lieu  de  rajarajasa,  la  forme  ra- 
jadirajasa,  qui  est  fréquente  sur  les  monnaies  des  autres  sou- 
verains de  cette  classe. 

Lorsque  le  roi  des  Yueh-tl''',  Kujula  Kasasa  Kushana,  se 
fut  allié  à  Hermx'us,  Us  frappèrent  le  monnayage  spécial  à  lé- 
gende grecque  sur  l'avers  pour  Hcnnœus  et  à  légende  liulo- 
bactrienne  sur  le  revers  pour  Kujiila,  dont  nous  avons  parlé. 

L'ensemble  de  ces  considérations  nous  permet  de  conclure 
que  le  monnayage,  représenté  principalement  par  le  spécimen 
bilingue  que  j'ai  décrit,  fut  émis  conjointement  par  le  roi  grec 
de  Bactrlane  Hcrnifeus  et  celui  des  Yueh-ti,  lors  de  leurs  pre- 
miers rapports,  en  vue  de  faciliter  le  commerce  des  Gréco- 
Bactrlens  avec  les  nouveaux  venus,  alors  que  ceux-ci  n'avaient 
pas  encore  oublié  l'écriture  chinoise  pour  adopter  l'indo-bac- 
trien.  La  date  serait  donc  entre  les  années  Ao-3o  avant  notre 
ère,  et  le  monnayage  devrait  être  appelé  Gréco-Yueh-ti.  Quant 
au  plus  petit  spécimen  à  légende  chinoise  sur  le  revers,  s'il  ne 

(')  La  migration  occidentale  des  Yueh-ti  no  parait  pas  avoir  été  sans  influence 
snr  la  civilisation  de  l'Asie  occidcntide.  Ainsi ,  c'<'sl  piobaltleinent  à  eux  ([ii'il  fant 
attribuer  l'apport  rie  rahricol  en  Perse.  Cf.  The  Btihtjloman  und  Oricnlal  liecoid, 
1889,  vol.  111,  p.  i33;  et  aussi  les  inlluences  sur  la  littérature  mentionnées 
par  M.  J.  Darmesteter  dans  son  article  sur  La  Jlèche  de  Nemrod  en  Perae  et  ai 
Clunc,  paru  d;ins  \q  Journal  asiatique,  i885,  vul.  V,  p.  -jac-aaS. 


3/i8 


portait  pas  d'inscription  indo-bactrienne  sur  l'avers,  il  repré- 
senterait un  monnayage  des  Yueh-ti,  antérieur  à  l'époque  où 
ils  se  sont  trouvés  en  contact  avec  les  Grecs  de  Bactriane. 


N"  XXVH. 

INSCRIPTIONS  TROUVÉES  À  MARONEE 

PAR   M.    DEGRAND,  CONSUL    DE    FRANCE    À    ANDRINOPLE. 

COMMUNICATION    DE  M.  H.  WEIL. 

(séance  DU    27    SEPTEMBRE    1889.) 

M.  Degrand  adresse  à  l'Académie  la  copie  de  douze  inscrip- 
tions trouvées  par  lui  à  Maronée  en  Tlirace.  Sur  ce  nombre, 
cinq,  que  nous  allons  donner,  sont  inédites,  entièrement,  ou 
en  partie. 

I. 

Marbre  sur  le  côté  de  la  fontaine  de  Jani  Tcbirini. 

TAION   OYAAEPI 
ON   xeVHPON   HPQ  A 
lAlA   rAPZOY   HPQIE 
0   AHMOZ 

Les  deux  mots,  b  SH^xos,  n'avaient  pas  été  remarqués  par 
M.  S.  Reinach,  qui  a  publié  cette  inscription  en  188/1.  (Voir 
ci-dessous.)  Mais  il  résulte  de  l'estampage  dont  ce  jeune  savant 
s'est  servi  que  la  troisième  ligne  porte  :  USs7a  Tdpcxov  vpcois. 

II. 

Marbre  sur  la  fontaine  du  sieur  Bouyoukli. 

APXOX  AIONYZOS 
POY   HPQS 


Faut-il  lire.  .  .  app^os  ânowa-oScopov  npcos'i 


3/i9 


m. 


Sur  11!   rivage,   près  de  la  cabane  du   gardien   Pliilippe, 
marbre  ([iiadrangulaire. 


BPOYTTIOZ  Eni 
NEIKOS  E  QNEnOI 
EIEAYTQ  KAI  TH 
EYMBIQ  BPOYTH 
AHMHTPIA  TO  MNH 
MA. 

EQN  csl  évideninicnt  une  erreur  pour  ^ôJi;. 

IV. 

Monogramme  de  o  m.  70  de  bauteur;  sur  une  pierre  en- 
castrée dans  la  seconde  muraille  intérieure  de  l'enceinte  de 
Deraotica. 


Plus  loin  sur  la  droite  on  trouve  un  fragment  de  pierre  sur 
lequel  on  lit  distinctement  : 

KOMN 
HNOY. 

Les  autres  inscriptions  copiées  par  M.    Degrand    avaient 
déjà  été  [)ubliées  par  M.  S.  Reinacb  dans  le  Bulletin  de  corres- 


—  350  — 

pondance  hellénique  ( 1 8 8 1 ,  p.  9 2  et  suiv.  ;  1 8 8  /i ,  p.  5 1  et  suiv. ). 
Les  copies  de  M.  Reinach  sont  en  partie  plus  complètes  et 
plus  exactes,  grâce  à  des  estampages  dont  il  a  pu  se  servir. 
Signalons  un  texte  épigraphique  des  plus  curieux,  dont  l'es- 
tampage est  aujourd'hui  déposé  au  musée  de  Saint-Germain- 
en-Laye.  Ce  sont  des  considérations  sur  les  incertitudes  du 
lendemain  et  les  vicissitudes  de  la  vie  humaine;  et,  chose  assez 
étrange,  ces  considérations,  rédigées  dans  un  style  quelque 
peu  recherché,  forment  le  déhut  d'un  décret.  Nous  transcri- 
vons ce  texte  en  modifiant  légèrement,  vers  la  fin,  les  supplé- 
ments de  l'éditeur  : 

[n](/pxr7S  Ylôpjieoj  sIttsv'  ineiH  'Bolctiv  [xàv  àv[d]pcv'7rois 
àStÎAov  rf}s  èçjyâi-ïYii  tov  ^lov  t£[X]£:>tJ7S  ovaris,  xa)  'uspos  àald- 
^ov$  Koi  <pepo\ié[v\ous  â\AOT£  àAX[oi;]5  ttjs  tv^V?  x(xi[po]v5  oi- 
?io[v]ofj.ovvT[o5  t]ov  [^-sov  tÀ  dvdp^^TTSioi.  -cTpayf/aTa  ^?'] 

Voici  enfin  l'indication,  donnée  par  M.  Degrand,  d'un 
autre  monument  épigraphique.  Avis  aux  archéologues  voya- 
geurs : 

«A  l'endroit  nommé  S'maxiu,  à  deux  heures  de  distance  de 
l'ancienne  Maronea,  sur  la  montagne  d'Aghios  Gheorgios,  où 
se  trouve  la  chapelle  de  ce  nom,  se  voit  aussi  un  grand  marbre 
avec  inscription,  n 

W  XXVIII. 

LA  LAXGDE,  LA  RELIGION  ET  LES  MOEURS  DES  HABITANTS  DU  HOUNZA , 
PAR  M.  LE  d'  LEITNER,  DIRECTEUR  DE  L'INSTITUT  ORIENTAL  DE 
WOKING  (GRANDE-BRETAGNE ). 

(séance   du   Ix   OCTOBRE    1889.) 

En  1878,30  présentai  au  premier  congrès  des  sciences 
ethnographiques  un  vocabulaire  de  dix  langues  de  lUimalaya 
et  de  l'Hindoukousch.  La  commission,  jugeant  que  cette  com- 


—  351   — 

nuinicalion  était  de  la  plus  haute  importance,  la  publia  sans 
attendre  que  je  comblasse  les  nombreuses  lacunes  qui  s'y  trou- 
vaient; le  manuscrit  des  épreuves  corrigées  et  augmentées  fut 
perdu.  Après  onze  ans  de  travaux  trop  souvent  interrompus, 
je  suis  en  état,  non  seulement  de  combler  les  lacunes  primi- 
tives, mais  encore  d'ajouter  d'autres  langues  et  d'en  établir 
l'étude  sur  une  base  ethnographique. 

C'est  surtout  le  cas  de  la  langue  du  Hounza,  du  Nagyr  et 
d'une  partie  du  Yasin  dont  le  Radjah  Nizam-ul-Mulk  m'a  écrit 
au  sujet  des  hardis  explorateurs,  vos  compatriotes,  MM.  Bon- 
valot  et  ses  amis,  qu'il  avait  d'abord  pris  pour  des  Russes. 

Le  Hounza  n'a  jamais  été  exploré.  Le  lieutenant  Younghus- 
band,  quand  il  s'y  rendit,  fut  obligé  de  changer  de  campe- 
ment chaque  nuit  de  peur  de  surprise,  et  môme  l'expédition 
anglaise  du  colonel  Lockhart  dut  se  borner  à  traverser  le  pays. 
Les  Hounza  se  croient  sous  la  protection  de  la  Chine.  Ce  sont 
d'intrépides  voleurs  d'hommes;  ils  emploient  souvent  leurs 
captifs  à  l'amélioration  de  la  race.  Le  tham  ou  chef  se  croit 
d'origine  céleste,  s'enivre  et  danse  dans  la  mosquée;  les 
Hounza,  en  effet,  sont  musulmans  de  nom,  mais  en  réalité 
Mulais.  Cette  singulière  religion  se  rattache  à  celle  des  Druses 
du  Liban,  sur  qui  votre  illustre  confrère,  Silvestre  de  Sacy,  a 
fait  de  si  exactes  révélations.  Mais  c'est  au  chef  actuel,  incar- 
nation de  la  divinité  en  ce  monde,  Hakim  (le  fou  calife  fati- 
mite  du  Caire),  Son  Altesse  Aga  Khan  de  Bombay,  que  je  dois 
quelques  versets  du  Kelam-i-Pir,  le  livre  mystérieux  (ju'ils  vé- 
nèrent au  lieu  du  Koran.  Je  serai  bien  aise  de  communiquer 
dans  une  autre  séance  ces  versets  et  de  les  comparer  avec  le 
Mithàq  ou  contrat  des  «initiés»  des  Druses  qu'un  hasard  heu- 
reux a  mis  aussi  à  ma  disposition.  J'avais  emmené  avec  moi 
en  Angleterre  un  Hounza,  pensant  pouvoir  l'envoyer  à  votre 
Exposition,  mais  il  s'est  montré  trop  récalcitrant.  Je  l'ai  en- 
voyé faire  un  pèlerinage  à  Kerbela,  car  je   tachais  de  faire 


*?!;•)   

de  lui  un  pieux  musulman  sliiite,  ce  ([ui  était,  pour  cet 
ex-voleur  d'hommes,  la  religion  la  plus  intelligible.  Je  fais 
circuler  des  photographies  qui  vous  montreront  les  guerriers 
du  Hounza,  du  hrave  et  aimable  Nagyr,  du  Yasin ,  ainsi  c|ue 
les  troubadours  du  Badakhshan  et  du  Chitràl,  et  mes  suivants 
du  Gilgit.  Un  de  ces  derniers,  brave  homme  du  reste,  voulait 
trancher  la  tête  de  sa  mère  pour  empêcher  celle-ci  de  mourir 
de  tristesse  parce  C[u'il  partait  avec  moi  pour  l'Inde.  Sur  tous 
ces  peuples ,  ainsi  que  la  plus  grande  partie  des  tribus  de 
l'Hindoukousch,  je  possède,  en  même  temps  que  des  photo- 
graphies, des  renseignements  du  plus  haut  intérêt  pour  la 
mythologie  et  l'ethnographie  comparées.  Mais  ce  qui  m'amène 
ici  aujourd'hui  est  le  désir  de  vous  donner  une  faible  esquisse 
préliminaire  de  la  base  ethnographique  sur  laquelle  repose 
mon  ouvrage  sur  la  langue  hounza,  ouvrage  dont  je  mets  à 
votre  disposition  la  première  partie,  imprimée  par  les  soins  du 
gouvernement  do  l'Inde  hritannique.  Dans  cette  langue,  qui 
est  certainement  le  reste  d'une  langue  préhistorique,  tous  les 
noms,  verbes  ou  adverbes  se  rapportant  à  une  personne  sont 
tellement  entremêlés  avec  le  pronom  personnel  ([u'il  est  im- 
possible de  les  en  détacher;  par  exemple,  as  signifie  «ma 
femme?),  gûs,  <^ta  femme w,  et  si  l'on  détache  â  et  gû  il  ne 
reste  que  s,  qui  par  lui-même  ne  signifie  rien.  En  général, 
j)armi  les  tribus  du  Dardistan  et  ailleurs,  on  peut  éliciter 
l'impératif  d'une  langue  inconnue  en  dirigeant  le  doigt  vers 
un  objet,  puis  l'indicatif  présent  ou  un  affirmatif  et  d'autres 
renseignements  grammaticaux  à  l'aide  de  certains  gestes.  En 
hounza,  au  contraire,  on  est  toujours  dérouté;  car  si,  par 
exemple,  vous  pointez  le  doigt  vers  un  objet  que  vous  désirez, 
chacun  vous  répondra  avec  la  personne  convenant  à  son  propre 
point  de  vue.  Je  tâche  d'expliquer  ce  singulier  caractère  dans 
la  petite  brochure  que  je  soumets  à  votre  appréciation  et  qui 
suggère  une  méthode  qui  n'est  pas  sans  importance  pour  la 


—  :^5:î  — 

pliilologie  en  g(5nér;il.  Va\  ellet,  si,  j)Our  me  servir  d'un 
exemple  tiré  de  la  langue  française,  vous  aviez  le  mot  mère, 
la  consonne  m  représenterait  non  seulement  le  féminin  mais 
la  femme  et  le  pluriel  fait  avec  son  aide;  la  voyelle  è  serait 
Vcgo  et  tout  ce  (pii  touche  au  nouveau-né  dans  les  premières 
relations  de  vie,  par  exemple,  le  père,  la  mère,  le  frère,  la 
sœur,  etc.;  la  consonne  r  signifierait  la  tribu  ou  toute  la  pa- 
renté; en  d'autres  termes,  mère  ou  plutôt  mèr  désignerait  «la 
femme  qui  m'a  engendré  et  qui  appartient  à  ma  tribu»,  indi- 
quant ainsi  un  état  primitif  de  communauté  dans  lequel  tous 
les  mâles  adultes  de  la  tribu  seraient  les  pères  et  toutes  les 
femelles  adultes  les  mères.  D'ailleurs,  en  français,  les  «pa- 
rents 5?  sont  non  seulement  le  père  et  la  mère,  mais  aussi  des 
ragnats?5  et  des  «cognats»;  la  afdle»  n'est  pas  seulement  la 
Duhitri,  qui  trait  le  lait  pour  la  famille,  mais,  en  général,  la 
jeune  personne  du  sexe  féminin,  surveillée  ou  non;  «petit- 
lils,  beau-père,  beau-frère??,  etc.,  sont  aussi  des  noms  peu 
distinctifs. 

En  hounza,  ce  n'est  que  par  les  seules  coutumes  du  peuple 
qu'on  peut  arriver  à  connaître  les  termes  grammaticaux;  ce 
n'est  que  par  un  progrès  maintenant  explicable,  mais  qui 
m'avait  tout  d'abord  confondu,  que  ilsh'itshihai ,  «il  donne??,  se 
rattache  à  yù,  «donne??.  J'aiïîrme  que,  à  mon  humble  avis, 
non  seulement  l'exemple  de  la  langue  hounza,  mais  aussi 
beaucoup  de  ces  mots  indiqueront  Thistoire  primitive  des 
langues  aryennes,  les  langues  que  nous  parlons.  C'est  donc, 
comme  on  dit  en  anglais,  un  départ  nouveau  pour  la  philo- 
logie que  de  lui  donner  dans  tous  les  détails  une  base  ethno- 
graphique, de  n'accepter  aucune  règle  de  grammaire  sans  la 
coutume,  sans  l'histoire  du  peuple,  (jui  l'explique.  Dorénavant 
même  si  ma  découverte  n'a  pas  la  portée  que  je  lui  donne 
pour  les  études  linguistiques  en  Europe,  elle  introduira  un 
élément  de  vie  dans  des  recherches  qui  sont  faites  maintenant 


—  354  — 

avec  une  sécheresse  de  règles  et  une  multitude  d'exceptions  à 
ces  règles  qui  confondent  l'esprit.  Ce  que  j'espère,  c'est  qu'il 
arrivera  bientôt  un  jour  où  apprendre  une  nouvelle  langue 
causera  au  linguiste  un  plaisir  semblable  à  celui  que  la  dé- 
couverte d'un  nouveau  pays  fait  à  l'explorateur,  et  que  nous 
découvrirons  ainsi  non  seulement  les  causes  des  nuances,  mais 
aussi  les  sources  de  la  pensée  liumaine  et  son  ancienne  histoire. 
En  soumettant  mes  travaux  à  l'appréciation  de  la  France, 
j'espère  rendre  un  service  aussi  grand  qu'en  aidant,  loyale- 
ment sinon  royalement,  les  voyageurs  scientifiques  et  les  com- 
merçants de  votre  pays  qui  sont  venus  dans  le  Pandjab,  un 
service  qui  complète  l'œuvre  du  Congrès  ethnographique  de 
1878.  En  linguistique  comme  en  ethnographie,  c'est  une  des 
nombreuses  continuités  sans  lesquelles  le  vrai  progrès  serait 
impossible  et  qui  rattachent  l'Exposition  de  1878  à  l'Exposi- 
tion si  immensément  plus  grandiose  de  1889. 


N°  XXIX. 

LES  CITKS  ALLTKES    HT  LIBRES  DE  LA  GAULE,  D'APRES  LES  MONNAIES, 
PAR  M.   ANATOLE  DE  BARTHELEMY. 

(séance  du   1  1   OCTOBRE    1  889.) 

J'espère  que  l'Acadéjnie  me  permettra  de  l'entretenir  quel- 
ques instants  de  numismatique  gauloise.  Je  crois  avoir  con- 
staté un  fait  donnant  le  moyen  de  classer  une  série  de  ces 
nombreuses  monnaies  qui  sont  les  plus  anciens  monuments 
figurés  de  notre  histoire  nationale. 

Depuis  plus  de  cinquante  ans,  on  a  beaucoup  disserh;  sur 
les  monnaies  gauloises,  sur  leurs  dates,  leurs  attributions  géo- 
graphiques, les  noms  d'hommes  gravés  dans  leurs  légendes. 
On  a  fait  de  nombreuses  conjectures,  et  les  efforts  multipliés 
n'ont  pas  jusqu'ici  donné  de  résultats  bien  sérieux. 


—  355  — 

En  ce  qui  louche  aux  dates,  je  crois  que  l'on  peut,  aujour- 
d'hui, arriver  à  déterminer  avec  une  certaine  précision  les 
origines  de  la  monnaie  gauloise  et  son  apparition  sur  les  dif- 
férents points  du  territoire.  J'essaierai  de  le  faire  dans  un  tra- 
vail spécial. 

Pour  les  attributions  géographiques,  les  règles  de  la  critique 
n'ont  pas  toujours  été  observées.  Après  avoir  déchiffré  une  lé- 
gende, on  cherchait  dans  une  liste  générale  des  peuples  gau- 
lois, relevée  dans  tous  les  auteurs,  quel  était  le  nom  qui  pré- 
sentait le  plus  d'analogie.  iMais  on  ne  songeait  pas  que  cette 
énumération  devait  au  préalable  être  soumise  à  un  contrôle 
minutieux.  Suivant  les  époques,  certains  peuples  avaient  dis- 
paru, repoussés  par  des  envahisseurs,  d'autres  avaient  été  ab- 
sorbés; la  première  opération  à  faire  consistait  à  établir  quels 
étaient  les  peuples  qui  existaient  lors  de  l'apparition  de  la 
monnaie  en  Gaule.  Pour  ce  qui  concerne  la  Gaule  indépen- 
dante, par  exemple,  il  est  inutile  de  chercher  parmi  les 
populations  dont  l'existence  n'est  plus  constatée  au  milieu  du 
m'  siècle  avant  l'ère  chrétienne. 

Quant  aux  noms  d'hommes  mentionnés  par  les  légendes 
monétaires ,  on  s'est  trop  souvent  laissé  entraîner  par  le  désir 
d'y  lire  ceux  des  personnages  cités  par  les  auteurs  classiques; 
avec  un  peu  de  bonne  volonté  on  aurait  retrouvé  les  monnaies 
de  tous  les  chefs  gaulois  qui  figurent  dans  les  Commentaires 
de  César.  On  oubliait  qu'il  était  prudent  de  faire  une  part  à 
l'iiomonymie;  que  le  même  nom  pouvait  avoir  été  porté  à  de 
longs  intervalles  par  des  individus  n'ayant  aucun  rapport  entre 
eux.  Dans  l'état  de  la  science  en  ce  moment, les  noms  deVer- 
cingetorix,  de  Tasgetius,  de  Duratius,  de  Vergasillaunus  et 
d'Adietuanus  sont  peut-être  les  seuls  à  peu  près  indiscu- 
tables. 

Ces  réserves  posées,  je  passe  au  fait  (pii  est  l'objet  do  ma 
communication. 


—  35G  — 

H  y  a  deux  observations  qu'il  ne  faut  jamais  perdre  de  vue  : 
l'emploi  des  caractères  grecs  ou  latins  dans  les  légendes;  la 
présence  des  ethniques. 

Les  légendes  en  caractère  latin  indiquent  naturellement 
une  époque  qui  ne  peut  être  antérieure  à  la  présence  des  Ro- 
mains dans  les  Gaules.  Cette  date,  pour  le  sud-est  et  ce  qui 
devint  plus  tard  la  Province,  ne  peut  remonter  au  delà  de  la 
seconde  moitié  du  ii^  siècle  avant  J.-C;  pour  le  reste  de  la 
Gaule,  il  faut  descendre  jusqu'aux  campagnes  de  César,  c'est- 
à-dire  au  milieu  du  i"  siècle. 

En  dehors  de  la  région  qui  subit  l'influence  de  Marseille, 
les  ethniques  sont  assez  rares  et  ne  semblent  avoir  paru  que 
dans  la  seconde  période  dont  je  viens  de  parler.  Cette  rareté 
m'a  fait  penser  assez  longtemps  que  les  noms  de  peuples,  dans 
la  Gaule  indépendante,  n'étaient  que  des  exceptions;  que 
TVRONOS,  SANTONOS,  n'étaient  pas  des  ethniques,  mais 
des  noms  d'hommes  empruntés  peut-être  au  lieu  d'origine. 

Une  étude  attentive  m'a  fait  modifier  cette  opinion  trop  ex- 
clusive. 

Et  d'abord,  examinons  rapidement  quel  était  l'état  des 
peuples  gaulois  entre  la  date  de  la  soumission  à  César  et  celle 
de  l'Assemblée  de  Narbonne,  où  Auguste  régla  l'administra- 
tion des  Gaules;  c'est  une  période  de  quarante  années. 

Dans  le  VIIl'  livre  de  la  guerre  des  Gaules,  Hirtius  rappelle 
brièvement  avec  quelle  sollicitude  César  s'attacha  à  pacifier  sa 
nouvelle  conquête  de  manière  à  ne  pas  avoir  à  craindre  de 
soulèvement  pendant  ([u'il  porterait  la  guerre  ailleurs:  aCaesar 
in  Belgio  cum  hiemaret  unum  illud  propositum  habebat  con- 
tinere  in  amicitia  civitalcs,  nulli  spem  aut  causam  dare  armo- 

rum Itaque  honorifice  civitates  appellando,  principes 

maximispraemiisadficiendo,  nuUa  onerainjungendo  defessam 
lot  adversisproeliis  Galliam. .  .  facile  in  pace  continuit.  »  Sué- 
tone, parlant  de  l'organisation  de  la  province  (c.  26),  indicpie 


—  337  — 

clairenienl  le  sens  de  la  formule  ItonorIJicr  cirilntcs  appellaiulo 
employée  par  Hirtius  :  «Gessit  auteni  novem  annis  quibus  in 
imperio  fuit  haec  fere  :  omnem  Galliam  quac  a  saltu  Pyrenaeo 
Alpibusque  et  monte  Gebenna,  Huminibus  Rheno  et  Rbodano 
continetur,  patelque  circuitu  ad  bis  et  tricies  cenlum  millia 
passuum.  ])raeler  socias  ac  bcnc  méritas  civiiates,  in  provinciae 
formam  redegit  eique  quadringeuties  in  singulos  annos  sti- 
pendii  nomine  imposait.  » 

Les  cités  alliées  et  ayant  bien  mérité  étaient  évidemment 
du  nombre  de  celles  qui  honorijice  appellahantur. 

En  Narbonnaise,  les  mitâtes  focderatac  étaient  les  Massa- 
liètes  et  les  Voconces. 

Dans  la  Gaule  chevelue,  le  nombre  des  cités  favorisées  par 
les  Romains  était  très  considérable  :  César  avait  le  plus  grand 
intérêt  à  ce  que  cette  nombreuse  confédération  ne  lui  donnât 
aucun  souci.  Pline  nous  en  a  fait  connaître,  mais  son  énumé- 
ration  est  loin  d'être  complète;  il  écrivait  sous  le  règne  de  Ves- 
pasien,  et,  à  celte  époque,  plusieurs  cités  gauloises  avaient 
pu,  par  suite  de  séditions  et  de  méfaits,  être  privées  du 
titre  de  liberae.  Et,  en  effet,  l'épigraphie  nous  en  révèle  qui 
ne  sont  pas  dans  Pline,  et  je  crois  que  la  numismatique  en 
augmentera  encore  le  nombre. 

Voici  la  liste  de  Pline  (livre  IV)  qui  nous  fait  connaître  les 
cités  alliées  et  libres  de  la  Gaule  à  la  lin  du  i"  siècle  de  l'ère 
chrétienne  : 

Cités  alliées  :  Carnutes ,  Haediii,  Lingones,  Rémi. 

Cités  libres  :  Arverni,  Biturigcs  Cnbi,  Bituriges  Vivisci,  Lcuci, 
Melch ,  Ncrvii ,  Santones ,  Segusiavi,  Treveri,  Silvanectes,  Suessioncs. 

A  cette  énumération ,  il  faut  joindre  : 

Les  Lexovii,  dont  les  monnaies  portent  la  légende  LIXO- 
VIATIS; 

Les  Pelroconi  {Revue  épigrapliique  du  midi  de  la  France,  t.  1. 
p.  i/i)' 


—  358  — 

Les  Sequani,  SEQVANOITVOS; 

Les  Turones,  dont  le  titre  est  conservé  par  deux  inscriptions, 
et  les  monnaies  à  la  légende  TVRONOS; 

Les  Fe//offlsses,  VELIOCA0I; 

Les  Viducasses ,  mentionnés  dans  l'inscription  de  Torigny. 

Maintenant  je  dois  établir  comment  je  suis  amené  à  consi- 
dérer comme  peuples  libres  ceux  qui,  sans  figurer  dans  Pline, 
ont  leurs  noms  sur  des  monnaies. 

Si  on  jette  les  yeux  sur  les  monnaies  frappées  par  les  villes 
grecques,  sous  la  domination  romaine,  on  remarque  le  soin 
avec  lequel  les  peuples  aWiés ,  foedcrali ,  aviJtixaxoi,  et  les  peu- 
ples libres,  liberi,  iksvdepoi,  inscrivaient  sur  leur  numéraire 
le  titre  constatant  l'autonomie  qui  leur  avait  été  conservée. 
Pour  ne  citer  que  quelques  exemples,  nous  rappellerons  Ami- 
sus  de  Pont,  Chersonnesus  deTauride,  Rhodus,  Sebaste,  Se- 
leucia  et  Tarsus  de  Cilicie,  Thessalonica  de  Macédoine  qui 
mettaient  e'Aeu^epo? ;  Hippo  deZeugitanus,  LIBERA;  Sagalassus 
de  Pisidie  est  la  seule  cité  qui  se  qualifiait  (plXtiç  koù  av[iyLot.-)(pv. 
Vingt  et  une  autres  villes  mettaient  avTov6[xov,  qui  paraît  avoir 
été  synonyme  de  èXevôepos  au  point  de  vue  qui  nous  occupe. 

La  liberté  dojinait  aux  cités  qui  en  étaient  gratifiées  le  droit 
d'user  de  leurs  propres  lois,  de  s'administrer  elles-mêmes;  de 
posséder  des  terres;  j'ajouterai  l'exemption  de  l'impôt,  ainsi  que 
l'a  établi  M.  Viollet. 

L'alliance  conférait  tous  les  droits  de  la  liberté  et  liait  la 
cité  à  Rome  par  un  traité  d'alliance.  L'empereur  pouvait,  à 
son  gré,  enlever  ces  titres  lorsque  les  cités  qui  en  avaient  été 
honorées  avaient  démérité.  En  Gaule,  c'est  ce  qui  arriva  pour 
les  Trévirs,  que  Pline  qualifie  libert  antea;  ils  avaient  été 
privés  de  la  liberté  à  la  suite  de  quelque  insurrrection.  Cette 
observation  n'a  pas  échappé  à  M.  Viollet,  qui  est  porté  à  attri- 
buer ce  fait  à  la  sédition  de  l'an  70;  j'avoue  que  je  pencherai 
[)lutôl  pour  celle  de  l'an  a  1  ;  je  ne  serais  pas  éloigné  de  croire 


—  350  — 

qu'à  parlir  de  cette  date  les  Tnrons,  les  Trévirs,  les  Eduens 
et  lesSéqiianes,  qui  avaient  été  à  la  tetc  du  mouvement,  n'eu- 
rent plus  de  monnaies.  Rome  aurait  saisi  celte  occasion  pour 
supprimer  la  liberté  de  quelques  peuples  gaulois  ou  pour  n'en 
plus  faire,  dans  les  cités  les  moins  frappées,  qu'un  tilre  ho- 
norifique. 

Aujourd'hui  nous  connaissons  vingt-trois  peuples,  dans  les 
Gaules,  qui  étaient  aUiés  ou  libres;  les  efforts  des  numismates 
doivent  donc  se  porter  sur  l'étude  des  monnaies  qui  leur  ap- 
partiennent. Il  n'y  en  a  guère  que  neuf,  dans  la  Gaule  che- 
velue, dont  les  ethniques  paraissent  sur  les  légendes.  Parmi 
les  autres  attributions,  plusieurs  sont  admises  par  suite  de  la 
présence  continue  de  certains  types  dans  une  région  ;  je  citerai 
les  Lcuci,  les  Suessiones,  les  Carnutes,  les  Arverni,  les  Bitu- 
riges  Cuh'i  et  Vivisci. 

Dans  cette  recherche,  il  y  a  lieu  d'observer  que  les  mon- 
naies d'argent,  avec  mention  de  noms  de  peuple  ou  de  noms 
d'hommes,  sont  les  plus  voisines  de  la  date  de  la  soumission 
de  la  Gaule.  A  mesure  que  l'on  s'éloigne  de  l'an  5o,  l'argent 
disparaît  devant  le  bronze. 

Ensuite,  il  paraît  résulter  de  l'étude  des  noms  d'hommes 
qu'à  un  certain  moment  les  ethniques  furent  remplacés  par  la 
mention  des  principes  placés  à  la  tête  de  leurs  concitoyens 
avec  l'agrément  des  Romains.  Nous  en  avons  un  exemple  dans 
ces  trois  bronzes,  portant  chacun  un  nom  gaulois  et  celui 
d'Aulus  Hirtius,  légat  impérial  dans  la  Belgique  orientale 
entre  3i  et  29.  Nous  en  avons  aussi  des  exemples  dans  la 
monnaie  signée  de  G.  Julius  Agedomapatis,  dont  les  récentes 
découvertes  faites  à  Saintes  nous  ont  fait  connaître  la  famille 
et  la  nationalité;  dans  celle  de  Lucterius  chez  les  Cadurci,  si  le 
nom  de  ce  personnage  a  été  bien  lu.  Ces  noms  d'hommes  ne 
peuveni  désigner  que  les  administrateurs  de  la  cité,  puisque, 
à  Lisieux.  nous  les  voyons  acconq)agnés  sur  la  monnaie  du 


ivriiMrkir    lA. 


_  3G.0  — 

lilre  de  Vergobret,  qui  était  pout-ctro  employé  aussi  à  Saintes 
aussi  bien  qu'ià  Autun.  Plusieurs  de  ces  principes  s'étaient  em- 
pressés de  [)rcndre  le  praenomen  de  Julius.  La  numismatique 
nous  révèle  Julius  Duratius,  peut-être  le  même  que  celui  qui 
fi(}ure  dans  les  Commentaires,  ou  son  fils;  Julius  Docirix  ;  Ju- 
lius Agedomapatis.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  César  fit  en  sorte 
de  maintenir  dans  la  Gaule  une  agglomération  composée  d'un 
certain  nombre  de  peuples  indépendants  les  uns  des  autres, 
de  manière  à  lui  éviter  le  danger  d'une  grande  ligue  confé- 
dérée. Sur  ce  point  les  monnaies  contemporaines  sont  un  ar- 
gument de  plus  en  faveur  de  l'opinion  proposée  jadis  par  notre 
regretté  confrère  Desjardins. 


N'  XXX. 

SIXIÈME  IVOTE  SUR  LES  FOUILLES  DE  OHERCIIELL  (EXPLORATION  DU  PA- 
LAIS DES  thermes),  par  M.  VICTOR  WAILLE,  PROFESSEUR  À  L'ÉCOLK 
SUPÉRIEURE  DES  LETTRES  D'ALGER,  COMMUNIQUEE  PAR  M.  GEORGES 
PERROT. 

(séance  ni!  iS  OCTOBRE  18S9.) 

L'exploration  du  palais  des  thermes  de  Cliercbcll,  pour- 
suivie sans  relâche  depuis  le  mois  de  mai  1886  jusqu'à  cette 
année  1889,  ^^^  enlin  terminée. 

On  peut  dire  qu'elle  a  commencé  en  réalité  en  i8/ia,  lors 
de  la  construction  de  la  manutention  militaire,  qui  amena  la 
découverte  fortuite  d'un  |)ortique  de  marbre,  de  plusieurs 
colonnes  de  diorite  vert,  et  de  cinq  statues  mutilées.  Aussi 
iiavoisié,  dans  son  plan  des  ruines  de  Cherchell  publié  en 
i8/iA''l  donne-t-i!  déjà,  par  une  indication  heureuse,  à  ces 
vestiges  grandioses  épars  sur  le  sol  et  non  encore  déterminés, 

<''   Exphifatiiiit  s.it'iilijl(iu('  (le  l'Al.fcrie,  aliiiiiii  sans  lexle. 


—  3G1   — 

lo  nom  de  Palais  des  Thermes,  que  des  fouilles  nkentes  ont 
démontré  leur  convenir  exactement. 

Une  seconde  exploration  partielle  eut  lieu  en  i  850 ,  à  l'aide 
de  subsides  fournis  par  le  maréchal  Handon.  Des  sondages 
prali(|ués  dans  le  terrain  adjacent  à  la  manutention  mirent  au 
jour  une  copie  de  la  Vénus  de  Médicis,  un  faune,  un  herma- 
phrodite, un  Neptune  colossal. 

Puis  les  recherches  furent  suspendues,  peut-être  à  la  suite 
d'un  éboulement  qui  fit  des  victimes.  Je  les  ai  reprises  en 
1886,  lors  d'une  mission  qui  me  fut  confiée  par  M.  le  Gou- 
verneur général  de  l'Algérie,  en  attachant  à  mon  tour  ce 
formidable  massif  de  ruines,  manifestement  connexe  avec  les 
précédents  et  qui  s'est  trouvé  être  la  partie  principale  de 
l'édifice,  celle  qui  nous  a  révélé  la  belle  ordonnance  et  la  sy- 
métrie du  plan  d'ensemble. 

Dès  1870,  MM.  Verneuil  et  Bugnot,  dans  leurs  Esquisses 
sur  la  Maurétnnic  césarienne,  exprimaient  le  regret  que  les 
fouilles  en  cet  endroit  n'aient  pas  été  conduites  avec  méthode. 
Elles  l'ont  été  durant  ces  trois  dernières  années,  grâce  au 
précieux  concours  et  à  l'esprit  de  suite  de  l'autorité  militaire. 

Cette  troisième  exploration  a  été  plus  complète  et  plus  fé- 
conde que  les  deux  autres.  Une  vingtaine  de  chambres,  pavées 
en  mosaïque,  dallées  de  marbre  blanc  ou  d'onyx,  ont  été  la- 
borieusement désobstruées.  Des  conduits  souterrains  en  ma- 
çonnerie, hauts  de  2  mètres,  ont  été  débouchés  jusqu'à  la 
mer.  Les  statues  qu'on  a  découvertes,  pour  n'égaler  pas  les 
chefs-d'œuvre  trouvés  dans  les  Thermes  de  Titus  ou  de  Cara- 
calla,  n'en  attestent  pas  moins  la  magnificence  des  thermes 
monumentaux  de  l'antique  Césarée  de  Maurétanie. 

Maintenant  que  cet  imposant  massif  de  ruines  est  admira- 
blement dégagé,  peut-être  importerait-il  de  le  mettre  à  l'abri 
des  dégradations  et  des  profanations,  car  les  enfants  ne  se 
bornent  pas  à  s'v  ('battre  le  soir,  ni  les  indigènes  à  s'v  réfugier 

35. 


—  362  — 

la  nuit.  On  dérobe  les  briques,  on  fait  sauter  les  cubes  des 
belles  et  fines  mosaïques,  on  désagrège  les  piliers  des  bypo- 
caustes,  on  déchausse  les  plaques  de  marbre  qui  bordent  le  bas 
des  murs  ou  qui  revêtent  le  parquet  et  les  escaliers  des  pis- 
cines ;  on  en  charge  même  des  bourricots.  Au  rebours  du  pro- 
verbe, chacun  emporte  sa  pierre  de  l'édifice.  Si  l'on  n'y  prend 
garde,  malgré  l'épaisseur  des  murs  de  cette  construction  gi- 
gantesque, en  quelques  années  tout  cela  aura  fondu,  disparu, 
puisqu'il  est  vrai  que,  si  le  temps  est  un  destructeur,  l'homme 
est  un  agent  de  destruction  bien  autrement  efficace,  surtout 
lorsqu'il  a  besoin  de  matériaux. 

Qu'on  se  rappelle  ce  qui  s'est  passé  déjà  à  Cherchell  même, 
à  propos  du  théâtre,  qui  était  intact  en  i8/io.  Les  gradins  ont 
été  arrachés  et  employés  comme  pierre  de  taille.  Restait  un 
mouvement  de  terrain ,  dont  la  courbe  dessinait  l'emplacement 
où  se  tenaient  les  spectateurs,  faisant  face  à  la  mer.  On  en  a 
fait  une  carrière  de  tuf.  Le  '  théâtre  antique  n'est  plus  qu'un 
trou  béant.  La  rue  qui  y  mène  porte  encore  le  nom  de  rue 
du  Théâtre,  mais  les  habitants  n'en  savent  plus  la  raison.  Le 
monument  a  disparu,  le  souvenir  même  du  monument  s'est 
éteint. 

Il  est  à  souhaiter  que  le  palais  des  Thermes  n'ait  pas  le 
même  sort.  La  ville,  comprenant  que  ce  sont  là  ses  plus  glo- 
rieuses archives,  aura  sans  doute  à  cœur  de  veiller  à  la  con- 
servation de  ces  belles  ruines,  dont  le  déblaiement  est  main- 
tenant achevé. 

Deux  nouvelles  chambres  ont  été  mises  au  jour  [)endant  la 
période  finale  des  fouilles.  Elles  sont  contiguës  à  cette  seconde 
grande  salle  pavée  en  mosaïque  (ou  xyste)  qui  se  trouve  à 
l'extrémité  sud  de  l'édifice,  et  qui  rappelle  la  première  par 
ses  dimensions  (3g"'X  i^"),  comme  par  le  dessin  symétrique 
et  varié  de  ses  rosaces,  et  par  sa  bordure  de  grecques.  Si  le 
plan  total  de  l'édifice   a  été  restauré  par  MM.  Dauphin   et 


Dupf'zard,  architectes  de  Paris^",  le  dessin  de  celle  mosaïque 
a  t't/'  ro|)roduit  en  couleur  par  M.  Munkel'-'.  J'y  remarque,  à 
côté  de  rosaces  encadrant  des  étoiles  à  huit  pointes,  deux 
détails  nouveaux  dans  la  décoration  :  i"  un  trapèze  dont  les 
côtés  renforcés  de  torsades  enferment  deux  volutes  symétri- 
ques s'épanouissant  intérieurement  en  une  feuille  hieue  et 
rouge;  9°  autour  de  quelques  rosaces  sont  distribués  huit  carrés 
tangents  par  un  angle,  le  tout  d'une  variété  de  tons  assez 
riche. 

C'est  donc  à  l'ouest  de  cette  grande  salle  qu'ont  été  ren- 
contrées les  deux  nouvelles  pièces.  Toutes  les  deux  reposent 
sur  un  hypocauste  et  servaient  pour  les  bains  de  vapeur.  Elles 
sont  pavées  l'une  de  marbre  blanc,  l'autre  de  mosaïque  et 
d'onvx. 

La  première  est  presque  carrée  (i  i'"  90  X  1 1"  70).  Une 
cloison,  flanquée  d'une  marche  d'un  côté  et  de  deux  marches 
de  l'autre,  la  divise  en  deux  chambres  de  bain  inégales,  la 
plus  petite  ayant  2™  60  de  largeur  et  1  mèlre  de  profondeur 
seulement.  Tout  autour  de  la  salle,  de  grandes  briques  carrées 
forment  avec  la  paroi  visiblement  brûlée  et  maculée  de  cendres 
un  compartiment  large  comme  la  main,  autrefois  léché  par 
les  flammes,  et  analogue  aux  caniaux  des  bains  maures.  La 
chaleur  pénétrait  dans  ce  sudatonum  à  la  fois  par  en  bas  et  par 
les  côtés. 

Je  signalerai  en  passant,  dans  la  constitution  des  murs, 
des  traces  de  clefs  (terre  cuite),  servant  à  fixer  aux  briques  le 
revêtement,  et  des  plaquettes  d'ardoise  où  la  règle  à  niveler 
du  maçon  venait  s'appuver. 

La  pièce  dont  je  viens  d'indiquer  les  dimensions  est  tout  à 
fait  symétrique  avec  une  de  celles  qui  sont  adjacentes  à  la  pre- 
mière grande  salle  pavée  en  mosaïque,  et  où  a  été  découverte 

i')   Salon  do  1889. 

<*'  Exposiliori  universelle,  p.nillon  aiclii'()lo^n'(|iio  lîola  socdoii  alfjériennc. 


—  36/i   — 

il  y  a  de^A  ans  une  statue  d'Hercule  haute  de  a  mètres.  Dans 
celle-ci  l'on  vient  (également  de  recueillir  une  statue  de  beau 
marbre  blanc,  ayant  les  mêmes  proportions.  C'est  une  statue 
de  femme,  finement  drapée,  dont  les  deux  morceaux,  faciles 
à  juxtaposer,  mesurent  ensemble  i"  7^,  non  compris  la  tête. 

Celte  femme  (une  Cérès?)  est  debout,  le  genou  gauche  lé- 
gèrement ployé.  Elle  est  vêtue  d'une  tunique  talaire  dont  le 
statuaire  a  délicatement  ondulé  les  plis  nombreux,  collante 
aux  seins,  et  relevée  en  diploïsàla  ceinture.  Les  manches  pa- 
raissent brodées  parce  que,  à  la  manière  grecque,  elles  sont 
closes  par  une  série  de  boutons,  et  que  les  crevés  intermédiaires 
entre  les  agrafes  forment  une  chaîne  de  boucles  ovales. 

En  outre,  elle  est  couverte  d'un  manteau,  lequel  enveloppe 
complètement  le  corps  et  les  jambes  à  partir  de  la  ceinture, 
passe  sous  le  bras  droit,  et  retombe  en  avant  et  en  arrière  de 
l'épaule  gauche.  Le  pied  droit,  chaussé  de  la  sandale  à  courroie, 
reste  à  découvert.  Le  bras  droit  descend  le  long  du  corps,  la 
main  manque.  Le  bras  gauche  manque  aussi.  Quatre  cavités, 
garnies  de  goupilles,  disposées  sur  les  hanches,  laissent  voir 
comment  il  s'y  adaptait. 

Entre  les  épaules,  à  la  naissance  du  cou ,  une  surface  plane, 
avec  une  cavité  où  la  tête,  qui  manque,  s'emboîtait. 

Cette  statue  est,  avec  un  élégant  torse  d'homme  que  j'ai 
signalé  précédemment,  le  morceau  de  sculpture  le  plus  déli- 
catement fouillé  que  nous  ayons  trouvé  dans  les  thermes. 

Dans  le  mur  de  la  même  chambre  (côté  est)  a  été  pratiquée 
une  niche  rectangulaire,  large  de  a'"3o,  et  décorée  d'un 
marbre  veiné  de  noir,  oii  la  statue;  se  dressait.  On  y  a  placé 
une  base  de  colonne  de  marbre  blanc  (0™  80  de  diamètre) 
intacte ,  formée  d'une  plinthe  carrée  et  de  deux  tores  circu- 
laires séparés  par  une  moulure  creuse,  qui  a  pu  servir  aussi 
de  so(l(!. 

Parmi  les  objets  découverts  dans  la   même   salle,   il  iaut 


—  365  — 

menlionner  une  t'iiîjjaiito  lete  de  morhre  {hauteur  o'"  'j5) 
n'ayanl  aurun  rapport  avec  la  slalue  procédenle.  La  figure, 
jeuue  cl  imberbe,  esl  encadrée  dans  une  chevelure  assez  abon- 
dante qui  ondule  sur  les  tempes  et  descend  jusque  sur  le  cou. 
Le  personnage  est  coillé  d'un  casque  mince,  posé  à  plat  sur  la 
télé  comme  un  voile,  fait  d'une  peau  de  lion,  dont  on  dislin- 
gue à  l'avant  le  mulUe  et  les  yeux.  Ce  casque  d'amazone  est 
percé  de  trois  cavités  cylindriques  distribuées  l'une  à  la  partie 
antérieure,  l'autre  au  sommet  de  la  lole,  la  dernière  à  l'occi- 
put, pour  recevoir  un  ornement  mobile,  sans  doute  une 
aigrette.  A  la  liste  de  ces  fragments  de  sculpture  il  convient 
d'ajouter  une  patte  de  lion  (marbre,  o""  33 xo'"  18)  dans  la- 
quelle on  peut  voir  le  pied  d'une  table,  ou  l'un  des  supports 
d'une  vasque.  Les  doigts  sont  hérissés  de  poils  et  pourvus  de 
griffes  puissantes;  ils  reposent  sur  une  semelle  de  marbre  rec- 
tangulaire. 

Quant  aux  menus  objets  entraînés  par  les  eaux  dans  les 
louduils  souterrains,  ou  recueillis  çàetlà  par  le  premier  venu 
dans  les  terres  des  corridors  et  vite  é[)arpillés,  il  est  malaisé 
d'en  donner  une  nomenclature  exacte.  Je  me  bornerai  à  si- 
gnaler une  monnaie  punique,  avec  la  tête  de  Moloch,  un 
anneau  de  fer  avec  chaton  vide,  un  camée  d'onyx  figurant  unn 
tête  de  femme,  une  cornaline  orientale  gravée  en  creux  repré- 
sentant Hermès  debout,  nu ,  coiffe  d'ailettes,  tenant  un  caducée 
dans  la  main  droite,  et  dans  la  gauche,  tendue  en  avant,  une 
bourse;  un  fragment  de  masse  d'armes  vandale;  des  monnaies 
byzantines;  un  cachet  de  marbre  lose  de  la  grosseur  d'un  sou 
(g'"  006  d'épaisseur)  et  mentionnant  l'empereur Juslin  ([)i8- 
527),  etc. 

Tous  ces  objets  charriés  par  les  terres  accumulées,  ayant 
appartenu  à  des  marchands  phéniciens,  à  des  dames  romaines 
ou  à  des  barbares,  évoquent  devant  les  yeux  le  souvenir  de 
cinq  ou  six  siècles. 


—  366  — 

De  plus,  on  a  rencontré  des  inscriptions  en  beaux  carac- 
tères sur  des  plaques  de  marbre  superbes.  Malheureusement 
elles  sont  mutilées.  L'un  des  fragments  mentionne  l'empereur 
Trajan,  sous  le  règne  duquel  ces  thermes,  quoique  appelés 
par  quelques-uns  Thermes  de  Juba,  ont  peut-être  été  bâtis 
(marbre,  o'"  /i5xo"'  28;  hauteur  des  lettres,  0'"  07)  : 

P-  CAES                [Im]i}{erator)  Cœs[ar]. 
'^RAIANV             [T]mjam[s]. 
TDD  

Un  autre  tronçon  semble  faire  allusion  au  titre  de  colonie 
octroyé  à  la  ville  de  Cœsarea  par  l'empereur  Claude  (marbre, 
g'"  20  X  0"  1  5  ;  hauteur  des  lettres,  o'"  o())  : 

N 
ONI  \Coï\om[œ  Cœsariensmri]  (?). 

Troisième  fragment  (marbre;  hauteur  de  la  lettre,  o"'o6)  : 

M  (Thermus?) 

Quatrième  fragment  (marbre,  o'"  1  kx  o'"  08;  hauteur  des 
lettres,  0"  o5)  : 

IT 
GR 
TI 

Cinquième  fragment  : 

Qvr 

TAT 
OT 

Sixième  fragment  : 

RI 
TT 

En  essayant  de  souder  ensemble  tant  de  fragments ,  succès- 


—  3G7  — 

sivcraent  (l(5couverts  et  dissémines ,  on  arriverait  peut-être  à 
en  tirer  une  signilication,  et  aies  l'aire  parler. 

Les  mêmes  essais  de  restauration  patiente  pourraient  s'ap- 
pliquer aux  fragments  de  sculpture,  aux  corps  sans  tête  et  aux 
têtes  sans  corps  qui  gisent  au  musée  de  Chercheil,  comme 
perdus  dans  un  fouillis  de  chapiteaux  et  de  corniches. 

Ainsi,  par  exemj)le,  dans  ma  première  note,  j'ai  signalé  la 
découverte  d'une  statuette  mutilée,  que  j'appelais  par  con- 
jecture une  Vénus  au  bain.  Quelques  mois  plus  tard,  on  ren- 
contra la  partie  inférieure  d'une  statue,  avec  socle  portant 
un  dauphin  et  l'inscription  EX  OFICINA  MVRISIAEW,  qui 
indiquait  de  quel  atelier  ou  de  quel  magasin  sortait  cette 
Vénus  marine.  Or.  j'ai  constaté  dernièrement  que  ces  deux 
morceaux,  disjectœ  mcmbra  Venerns,  se  superposent  très  exacte- 
ment. 

De  même,  |)lusieurs  têtes  isolées  |)ourraient  s'adapter,  je 
crois,  à  certains  bustes  d'une  façon  plus  qu'ingénieuse,  les 
lignes  de  cassure  de  la  draperie  ou  des  veines  coïncidant  avec 
une  convenance  parfaite.  On  obtiendra  de  cette  manière  des 
statues  presque  entières,  ce  qui  doublera  la  valeur  des  objets 
que  le  musée  de  Chercheil  renferme. 

Ce  musée,  l'exploration  du  palais  des  Thermes  n'aura  pas 
peu  contribué  à  l'enrichir.  Si  ces  recherches,  entreprises  dans 
des  conditions  exceptionnellement  économiques,  ont  pu  être 
poursuivies   avec  fruit,  j'en  reporte  le  principal  honneur  à 


C'  Je  persiste  dans  la  lecture  EX  OFICINA  MVRISIAE  (do  Talelier  de 
Myrisias,  si  c'est  Tartiste,  ou  de  la  boutique  do  Muiisia,  s'il  s'ajjil  siinplouieiil  de 
la  vendeuse).  L'ingénieuse  conjecture  de  M.  Robert  Mowat  {Revue  archéologique , 
1888),  après  un  nouvel  et  attentif  examen  do  la  pierre,  ne  me  parait  pas  ad- 
missible. Je  crois  qu'il  faut  lejcloiriiypotliùsede  Mijrisiuus  :  1"  parce  (|ue  l'E  linal 
est  reconnaissable;  a"  parce  que  le  premier  jambage  de  l'M  initial  est  extrême- 
ment pencbé,  et  que  i'I  est  droit  et  ne  saurait  appartenir  à  la  lettre  M  du  même 
style.  Le  nom  de  Murisia  n'est  pas  connu,  soit.  Mais  la  liste  des  noms  propres 
trouvés  à  Chercheil  et  qu'on  n'a  pas  relrouvc's  ailleurs  est  déjà  longue. 


—  368  — 

M.  le  général  Poizat,  commandant  la  division  d'Alger,  et  au 
conseil  municipal  de  Gherchell,  qui  les  ont  eiïicacement  sou- 
tenues. M.  le  Directeur  de  l'enseignement  supérieur  a  droit 
également  à  notre  gratitude  pour  les  marques  d'encouragement 
qu'il  lui  a  plu  de  nous  donner.  Je  rappellerai  en  terminant  que 
les  détenus  affectés  à  l'achèvement  des  fouilles  ont  été  succes- 
sivement placés  sous  les  ordres  de  MM.  les  capitaines  Boutron- 
Damazy,  Chaudron  et  Clouet,  commandants  du  pénitencier, 
au  zèle  intelligent  et  désintéressé  desquels  il  serait  injuste  de 
ne  pas  rendre  hommage. Le  premier  a  exhumé  plusieurs  salles; 
le  second  a  exploré  les  corridors  et  le  sous-sol  ;  le  troisième  a 
nivelé  les  ahords,  préparé  un  chemin  de  ronde,  et  pratiqué 
dans  le  voisinage  quelques  tranchées  qui  font  mieux  com- 
prendre la  relation  du  fameux  voyageur  anglais  Shaw  (i  789), 
lequel  parle  de  terrasses  étagées  et  d'eaux  qui  tomhaient  d'une 
piscine  dans  l'autre  pour  se  déverser  ensuite  dans  le  cotlutn  ou 
port  artificiel. 

Maintenant  qu'on  a  procédé  à  la  toilette  finale  de  ces 
grands  thermes,  exhumés  grâce  au  hon  vouloir  de  tous  el 
mieux  conservés  que  ceux  de  Garacalla  à  Rome,  il  appartient 
à  l'administration  de  les  protéger  et  de  les  entourer  d'une 
grille. 

Je  suis  heureux  d'ajouter  que  les  fouilles  terminées  sur  ce 
point  vont  reprendre  sur  un  autre,  et  qu'il  y  a  lieu  d'espérer 
qu'elles  ne  seront  pas  moins  fécondes  pour  la  science  et  pour 
le  musée  local. 


—  3(39  — 
N'  XXXI. 

QUELQUES  OBSERVATIONS  SUR  LES  OSSUAIRES  RAPPORTES  DE  PERSE  PAR 
M.  DIEDLAFOY  ET  DEPOSES  AU  MUSEE  DU  LOUVRE,  PAR  M.  JIVAISDJI 
JAMSHEDJI  MODI. 

(SIÎANCE   Di;    30  OCTOBRE    1889.) 

Monsieur  le  Président  et  Messieurs, 

Je  suis  un  étranger  en  France  et  pour  votre  Académie  éru- 
ditc,  mais  votre  pays  et  vos  savants  ne  me  sont  pas  étrangers, 
non  plus  qu'à  mes  coreligionnaires,  les  Parsis.  C'est  un  Fran- 
çais, Anquelil  du  Perron,  qui  le  premier  fit  connaître  la  lit- 
térature des  Parsis  à  l'Europe.  C'est  un  autre  Français,  Eugène 
Burnouf,  qui  fonda  la  philologie  scientifique  de  l'Avesta.  C'est 
un  Français,  M.  Mohl,  qui  donna  la  première  traduction  com- 
j)lèle  de  notre  grande  épopée  persane,  le  Shabnamcli.  C'est 
encore  un  Français,  le  professeur  Darmesteter,  qui  a  traduit 
pour  la  première  fois  de  l'original  même  la  plus  grande  partie 
de  l'Avesta  en  langue  anglaise. 

C'est  par  un  sentiment  de  reconnaissance  pour  les  ouvrages 
de  vos  savants,  que  l'honorable  sir  Dinshaw  Manakji  Petit, 
un  des  membres  les  plus  généreux  de  notre  communauté,  a 
fondé  la  Bibliothèque  française  du  Cercle  littéraire  de  Bombay, 
qui  porte  son  nom.  Monsieur  le  Président,  permettez-moi  de 
présenter  avec  la  même  reconnaissance  mes  respects  à  votre 
Académie,  et  aux  savants  érudits  de  France,  et  de  soumettre 
à  l'Académie  quel(|ues  observations  sur  les  ossuaires  rapportés 
de  Perse  [)ar  M.  Dieulufoy,  et  déposés  dans  son  intéressante 
collection  du  Louvre. 

Ce  sont  des  jarres  de  terre  qui  contiennent  des  ossements. 
Des  jarres  de  ce  genre  avaient  été  déjà  envoyées  en  181  3  à 
Bombay  [)ar  M.  Bruce,  de  Boucliire  ".  M.  Bruce,  en  les  en- 

'')    Tlie  TravsacUons  of  (lie  Lillerary  SocieUj  qf  Bombay,  1819. 


—  370  — 

voyant,  disait  :  ç^Ce  mode  de  sépulture  doit  être  très  ancien 
et  antérieur  à  Zoroastre,  car  je  ne  crois  pas  que  ses  secta- 
teurs aient  altéré  leur  mode  de  sépulture  juscju'à  ce  jour.» 
L'endroit  où  ces  jarres  ont  été  prises  contenait  cinq  vases, 
dont  un  petit  (je  pense  qu'il  était  pour  un  enfant).  Ces  cinq 
vases  appartenaient  sans  doute  à  une  seule  et  même  famille. 
Ils  étaient  enterrés  en  ligne  droite,  allant  de  l'est  à  l'ouest,  la 
petite  extrémité  dirigée  vers  l'est.  Ces  vases  sont  généralement 
au  nombre  de  six,  huit,  dix,  douze  et  ainsi  de  suite,  placés 
en  ligne  droite  de  l'est  à  l'ouest,  et  se  trouvent  toujours  près 
de  ruines  où  il  y  avait  auparavant  des  habitations. 

On  trouve  aussi  des  ossuaires  faits  de  pierre,  à  peu  près 
carrés,  mais  ils  sont  très  rares.  L'an  dernier,  M.  Joseph  Mal- 
colm,  de  Bouchire,  en  a  envoyé  un  à  Bombay '^l  II  est  fait 
d'une  sorte  de  pierre  blanche  et  n'est  pas  rond  comme  les 
jarres.  Il  est  d'une  seule  pierre  et  couvert  d'un  couvercle  de 
la  même  matière  et  qui  est  aussi  d'une  seule  pierre.  Il  a 
28  pouces  de  longueur,  i/i  de  largeur  et  10  de  profondeur. 
L'épaisseur  est  de  près  d'un  pouce.  H  y  a  quatre  trous,  chacun 
d'un  quart  de  pouce  en  diamètre,  sur  les  quatre  côtés,  juste 
à  l'extrémité  supérieure.  Le  couvercle  aussi  a  quatre  trous 
correspondants. 

Tels  étant  les  faits,  je  voudrais  examiner,  si.  selon  les  livres 
Parsis,  les  Perses  anciens  ont  connu  cette  coutume.  Actuelle- 
ment elle  n'existe  ni  chez  les  Parsis  de  l'Inde,  ni  chez  leurs 
coreligionnaires  de  la  Perse  même,  et  l'on  ne  garde  point  les 
os  des  morts  dans  un  réceptacle  séparé.  Les  tuteurs  de  silence» 
contiennent  une  disposition  pour  recevoir  les  os,  après  que  la 
chair  a  été  dévorée  par  les  oiseaux.  Mais  il  parait  que  les 
Perses  très  anciens  connaissaient  la  coutume  en  question  ou 
une  coutume  analogue. 

('>   hocccdings  of  the  Bombay  Anlhropolof^ical  Society,  2<)"'  Aiiyust    1888. 


—  37i   — 

Tout  d'abord,  observons  qu'un  passage  très  ancien  duVen- 
didad  distingue  très  clairement  ce  qu'il  y  a  à  faire  du  cadavre 
el  ce  qu'il  y  a  à  faire  des  ossements  quand  la  chair  du  cadavre 
a  été  enlevée.  Voici  le  passage  : 

0  saint  Créateur  du  monde  raatéx'iel ,  oii  porterons-nous  les  corps  des 
morts?  0  Ahura  Mazda,  où  les  placerons-nous? 

En  réponse,  il  est  dit  que  les  corps  seront  portés  sur  le 
sommet  des  collines,  et  là,  exposés  à  l'air  et  au  soleil,  pour 
être  dévorés  par  les  oiseaux. 

La  deuxième  question,  qui  est  très  importante  pour  notre 
sujet,  est  celle-ci  : 

*  tç}*^\i\'i  *  ^*»»C*»  •  )0^  *  6{|**^«l5>  •  {**»^-»6  •  ]?^>^*>  '  (Ç^^6  ♦  (p-"*** 

0  saint  Crcaleui-  du  monde  matériel,  où  porterons-nous  les  os  des 
morts?  0  Ahura  Mazda,  où  les  placerons-nous? 

Ahura  Mazda  ré[)ondit  :  On  doit  préparer  un  édifice  hors  de  latleinte 
du  chien,  hors  de  latleinte  du  renard,  liors  de  l'atteinte  du  loup,  inac- 
cessible h  l'eau  do  pluie  d'en  haut. 

Si  les  Mazdayasniens  en  ont  les  moyens,  (ils  placeront  les  os)  dans 
(im  n'ce|ilacle  de)  |)ierre  ou  de  mortier  ou  d'une  matière  inférieure.  Si 


—  372  — 

les  Mazdayasniens  n'en  ont  pas  ies  moyens,  ils  les  placeront  sur  leurs  lits, 
et  les  exposeront  sur  la  terre  aux  rayons  du  soleil.  (Vend.,  VI,  /i4-5i, 
Westergaard.  ) 

Comme  vous  voyez,  il  y  a  deux  questions  difTérentes  : 

i""  Où  mettra-t-on  le  corps  du  mort? 

2°  Une  fois  le  cprps  dépouillé  de  sa  chair  et  réduit  aux  os, 
où  mettra-t-on  les  os? 

La  réponse  à  la  première  question  est  qu'on  expose  le  corps 
aux  oiseaux.  La  réponse  à  la  seconde  est  qu'on  recueille  les 
os  dans  un  édifice.  Cet  édifice  est  appelé  dans  la  traduction 
pelîlvie  astodâri,  c'est-à-dire  et  réceptacle  d'os  5?.  Le  Vendidad 
ne  donne  aucun  éclaircissement  sur  la  forme  de  cet  aslodân. 
Mais  nous  trouvons  dans  le  Dadistani-Dini ,  dans  un  passage 
correspondant,  les  lignes  suivantes  (question  XVII)  : 

))fo-Ç^)  -K3T0^  -Vfiy  ^fOOO  -"^  ^^N^l^i"^  -<^r  -VO^  lil)^^ 

iif^-»iy-â3e)  ipy-<5-"'^  -'ï^y^^-w^rO  ^-^-^  ')Hy  fi  ')J}-Çf^ 

Lorsque  le  corps  est  bieti  dévoré,  les  os  doivent  être  placés  dans  un 
aslodân,  qui  sora  élevé  au-dessus  du  sol  et  muni  d'un  foil  de  lelle  laçon 
que  la  pluie  ne  puisse  pas  tomber  sur  la  suhslance  morlello  et  que  l'eau 
ne  puisse  pas  rester  dessus,  d'en  haut,  et  qu'aucune  goutte  ne  puisse 
tomber  dessus  d'en  haut  et  qu'un  cbien  ou  un  renard  n'y  puisse  avoir 


—  373  — 
accès  el  (|iie  tics  Irons  soient  fails  dedans  [)our  l'admission  de  la  iiunière. 


Il  est  do  plus  ordonne  que  Yaslodân  sera  prépare  d'une  seule  pierre  et 
que  son  couvercle  sera  lait  d'une  seule  pierre,  bien  préparc-e  et  porfori^e, 
et  qu'il  sera  conslruil  avec  de  la  pierre  et  du  mortier  tout  autour. 

Dans  ce  passage  le  mot  astodân  s'applique  à  deux  récep- 
tacles très  dilTcrcnts.  Dans  la  première  partie,  il  s'agit  d'un 
monument,  d'une  sorte  de  voûte  funéraire,  analogue  peut- 
être  aux  caveaux  achéménides.  Dans  la  seconde  partie,  il  s'agit 
d'un  réceptacle  fait  d'une  seule  pierre,  dont  le  couvercle  est 
aussi  fait  d'une  seule  pierre;  il  ne  peut  évidemment  s'agir 
d'un  monument  s'élevant  du  sol.  L'idée  s'offre  naturellement 
d'un  réceptacle  semblable  à  ces  jarres  de  pierre  envoyées  à 
Bombay.  Il  paraît  donc  que  les  Perses  anciens  connaissaient 
aussi  la  coutume  d'ossuaires  analogues  à  ceux  de  M.  Dieulafoy. 
J'ajouterai  que,  d'après  M.  Malcolm,  l'ossuaire  qu'il  a  envoyé 
passe,  parmi  la  population  actuelle,  pour  avoir  appartenu  aux 
Perses  anciens. 

Ici  se  pose  une  question  :  pourquoi  les  os  étaient-ils  gardés 
dans  les  astodâns  ?  Pourquoi  croyait-on  nécessaire  d'amasser  et 
de  garder  les  os? 

On  les  gardait  en  vue  de  la  résurrection.  La  doctrine  de  la 
résurrection  était  une  vieille  croyance  persane.  On  lit  dans  le 
Zamijàd  Yashl  (par.  89)  : 

Celle  splendeur  saltachera  elle-même  au  victorieux  Saoshyant  el  à  ses 
compagnons.  Alors  il  fera  le  monde  frais,  sans  dépérissement,  impéris- 


—  37â  — 

sable,  libre  de  putréfaction  et  de  corruption,  toujours  vivant,  toujours 
jjrogressant,  puissant;  alors  les  morts  se  lèveront  encore,  Timmortalité 
sera  le  lot  des  vivants  et  le  dësir  pour  la  fraîcheur  sera  accordé  au 
monde. 

Il  semble  d'après  ce  passage  que  Saoshyant  produira  la  ré- 
surrection du  monde  et  fera  relever  les  morts.  Mais  com- 
ment fera-t-il  relever  les  morts  ?  Il  les  fera  se  lever  de  leurs 
os  (ast,  ^3i»>)  qui  sont  gardés  dans  Vastodâii.  Pour  cette  raison, 
il  est  appelé  Astvat-Ereta ,  c'est-à-dire,  «celui  qui  relève  les 
osw.  Nous  trouvons  le  passage  suivant  dans  le  Farvarclm  YasJu 

(129): 

Nous  honorons  le  Fravashi  du  saint  Astval-Erela,  qui  est  par  son 
nom  le  victorieux  Saoshyant  et  par  son  nom  Astvat-Ereta.  (Il  est  par  son 
nom)  Saoshyant  (c'est-à-dire  le  bienfaisant),  parce  qu'il  fera  du  bien  à 
tout  le  monde  matériel;  et  Astvat-Ereta,  parce  qu'il  fera  relever  les  créa- 
tures mortes  corporelles  à  l'état  de  créatures  vivantes. 

Voilà  pourquoi  on  gardait  les  os  dans  les  aslodàns;  ils  de- 
vaient être  utiles  dans  le  futur,  au  temps  de  la  résurrection, 
quand  le  Saoshvant  fera  que  Ifïs  morts  «se  lèvent  de  leurs  osr. 


—  :nr,  — 

APPENDICE  N°  TV. 


RAPPORT 

FAIT   AL    NOM   DE   LA  COMMISSION  DES  ANTIQUITES  DE  LA  FRANCK, 

SCR  LES  OUVRAGES  ENVOYÉS  AU  CONCOURS  DE  L'ANNEE    1  88(), 

PAR   M.   ANT.   HÉRON  DE  VILLEFOSSE, 

LO  DANS  LA  SEANCE  DD  1  1   OOTOBItE  l88f). 

Messieurs, 

Le  concours  des  antiquités  nationales  est  cette  année  d'une 
importance  exceptionnelle.  C'est  certainement  un  des  plus 
brillants  que  votre  Commission  ait  eu  à  juger  depuis  qu'elle 
est  instituée.  La  valeur  des  ouvrages,  leur  nombre,  la  variété 
des  sujets  traités,  tout  a  contribué  à  donner  nu  concours  de 
1889  un  éclat  particulier. 

Dans  la  liste  des  mémoires  qui  vous  ont  été  adressés,  les 
travaux  relatifs  au  xv°  siècle  occupent  une  place  notable.  Il  est 
évident  que  les  historiens  et  les  curieux  dirigent  leurs  recher- 
ches avec  une  prédilection  marquée  vers  les  temps  qui  ont 
précédé  la  Renaissance  française  :  les  œuvres  littéraires  de 
cette  époque,  la  vie  des  personnages  qui  l'ont  illustrée  sont 
l'objet  d'une  faveur  j)articulière  de  la  part  des  érudits. 

Première  médaUlc.  —  L'ouvrage  de  M.  E.  Jarry  qui  a  mé- 
rité la  première  médaille  est  intitulé  :  La  Vie  politique  de  TjOuis 
de  France,  duc  d'Orléans  (ï  .^72-1407),  Paris-Orléans,  1889, 
in-S". 

Pendant  longtemps  l'histoire  n'a  voulu  reconnaître  dans  le 
second  lils  du  sage  roi  Charles  V  qu'un  ])rince  élégant  et  spi- 
rituel, artiste,  il  est  \rai.  mais  léger,  inconstant  et  prodigue, 
incapable  de  s'occiipci-  ;iv<'c  stiilc  (h^s  chnscs  rlu  gouvornomenl. 

xvii.  2O 


iwriiivi  Bie   ittTiiiviLii 


—  376  — 

Louis  d'Orléans  aimait  avec  passion  les  œuvres  de  l'esprit; 
son  influence  dans  le  domaine  des  lettres  et  des  arts  a  été 
féconde  et  les  traces  en  sont  restées  ineffaçables.  Tout  le 
monde  est  d'accord  sur  ce  point.  Mais  sa  politique  extérieure 
et  son  administration  ont  été  l'objet  de  sévères  appréciations 
et,  avant  la  publication  des  travaux  de  M.  le  comte  de  Cir- 
court,  elles  passaient  pour  avoir  donné  des  résultats  déplora- 
bles. Les  témoignages  prépondérants  des  écrivains  bourgui- 
gnons avaient  contribué  à  établir  et  à  consolider  cette  mauvaise 
réputation. 

Il  a  semblé  à  l'auteur  de  ce  livre  que  les  bistoriens  avaient 
manqué  d'impartialité  5  l'égard  de  la  victime  de  Jean  sans 
Peur  et,  poussé  par  le  désir  de  réhabiliter  complètement  cette 
curieuse  et  sympathique  figure,  il  a  recherché  dans  la  vie 
privée  de  Louis  d'Orléans  tout  ce  qui  ])Ouvait  servir  à  éclairer 
sa  vie  politique.  Le  rôle  du  duc  fut  conforme  aux  vrais  inté- 
rêts de  la  France  :  (elle  est  la  conviction  de  M.  E.  Jarry;  il  a 
tout  mis  en  œuvre  pour  la  faire  partager  au  lecteur. 

Il  nous  montre  le  duc  d'Orléans  travaillant  sans  cesse  pour 
le  bien  du  pays.  Tantôt  il  concourt  sans  réserve  à  l'œuvre 
royale,  enlevant  à  l'ennemi  ses  alliés  les  plus  puissants  et  clier- 
cbant  le  point  sensible  où  ses  coups  porteront  les  plus  graves 
blessures;  tantôt  il  gagne  à  la  France  de  nouvelles  sympa- 
thies, ouvrant  la  voie  à  l'influence  française,  soit  en  Italie, 
soit  en  Allemagne.  L'ardeur  entreprenante  du  jeune  prince 
contrecarrait  les  dessoins  de  la  maison  de  Bourgogne  et  ses 
succès  provoquaient  de  sourdes  jalousies.  Ses  qualités  exté- 
rieures avaient  charmé  ses  contemporains;  elles  inspirèrent  à 
Jean  sans  Peur,  qui  en  était  dépourvu,  une  haine  poussée 
jusqu'au  crime. 

Dans  la  biographie  du  frère  de  Charles  VI,  telle  (ju'il  nous 
l'a  présentée,  M.  Jarry  n'a  voulu  envisager  que  le  rôle  poli- 
ti(|ue  de  son  héros  et,  laissant  intentionnellcmenf  dans  l'ombre 


—  Til  — 

les  côtes  aimables  du  caractère  de  Louis  d'Orléans,  il  a  cherché 
à  marquer  nettement  sa  place  dans  l'histoire  comme  négocia- 
teur et  comme  homme  d'Etat.  C'est  en  contrôlant  les  chro- 
niques au  moyen  des  documents  originaux  de  toute  sorte,  en 
exposant  les  faits  avec  autant  d'impartialité  que  de  précision, 
sans  crainte  de  multiplier  les  dates  et  les  détails  utiles  à  sa 
thèse,  qu'il  a  retracé,  à  ce  point  de  vue  spécial,  la  vie  courte 
mais  si  bien  remplie  d'un  prince  séduisant  qui  fut  en  France 
l'un  des  précurseurs  de  la  Renaissance. 

Ce  livre  n'est  autre  chose  que  la  thèse  présentée  par  M.  Jarry 
à  l'Ecole  des  chartes  pour  obtenir  le  diplôme  d'archiviste  pa- 
léographe. Il  est  fait  de  main  de  maître  et  composé  entière- 
ment sur  des  documents  inédits.  Les  recherches  de  l'auteur 
ont  été  conduites  d'une  façon  excellente;  il  a  exploré  les  plus 
importants  dépôts  d'archives  de  la  France  et  de  l'étranger,  et 
c'est  avec  un  talent  incontestable  qu'il  a  mis  en  œuvre  les 
innombrables  matériaux  recueillis  par  lui  à  Londres,  à  Milan, 
à  Turin,  à  Asti,  à  Florence,  à  Venise  et  à  Paris.  Son  travail 
fait  grand  honneur  à  l'érudition  française;  il  est  rempli  de 
faits  nouveaux,  d'aperçus  ingénieux  et  personnels  et  d'appré- 
ciations intéressantes  sur  les  hommes  et  sur  les  événements. 

Deuxième  médaille.  —  La  seconde  médaille  est  attribuée  à 
M.  Paul  Guérin  pour  son  Recueil  des  documents  concernant  le 
Poitou  contenus  dans  les  registres  de  la  Chancellerie  de  France, 
t.  IV  (iSCjQ-iS'jG),  Poitiers,  1888,  in-8''. 

Ce  grand  recueil  est  publié  sous  les  auspices  de  la  Société 
des  archives  historiques  du  Poitou  et  doit  contenir  tous  les 
actes  relatifs  au  Poitou  renfermés  dans  les  registres  du  Trésor 
des  Chartes.  L'enlre[)rise  est  immense;  mais  elle  est  pour- 
suivie avec  une  méthode  et  une  persévérance  qui  permettent 
d'en  espérer  l'heureux  achèvement. 

L'éditeur  ne  s'est   pas  borné  à   donner  iine  édilion  fidèle 

26. 


—  378  — 

des  documents-,  il  y  a  joint  des  notes,  quelquefois  fort  déve- 
loppées, dont  il  a  demandé  la  matière  à  des  témoignages  tou- 
jours originaux,  souvent  inédits. 

Les  introductions  sont  de  remarquables  morceaux  de  cri- 
tique. L'auteur  y  retrace  en  détail  les  épisodes  importants  sur 
lesquels  les  actes  du  Trésor  des  Charles,  combinés  avec  les 
autres  documents,  permettent  de  projeter  une  lumière  nou- 
velle. Ce  qui  donne  un  prix  particulier  à  l'introduction  du 
dernier  volume,  c'est  le  soin  mis  à  faire  connaître  les  efforts 
du  gouvernement  de  Charles  V,  pour  soustraire  le  Poitou  à 
la  domination  anglaise  après  la  rupture  du  traité  de  Bré- 
tigny. 

Le  texte,  les  notes,  les  tables  et  les  introductions,  tout 
mérite  d'être  loué  dans  ce  recueil  dont  les  quatre  premiers 
volumes  ont  été  successivement  adressés  aux  concours  de 
l'Académie.  L'auteur,  paléographe  exercé  et  chercheur  con- 
sciencieux, a  tenu  compte  des  observations  auxquelles  ses 
précédents  envois  avaient  donné  lieu.  Son  ouvrage  constitue 
aujourd'hui  une  collection  très  riche  et  presque  achevée. 
Votre  Commission  devait  le  récompenser,  non  seulement 
pour  distinguer  son  travail  qui  est  de  tout  point  excellent, 
mais  encore  pour  reconnaître  et  signaler  le  service  excep- 
tionnel qu'une  telle  publication  est  appelée  à  rendre  à  l'éru- 
dition historique.  Si  nos  différentes  provinces  faisaient 
exécuter  des  recueils  analogues  à  celui  dont  M.  Guérin  a 
doté  le  Poitou,  la  tâche  des  écrivains  qui  s'occupent  des  an- 
nales de  la  France  au  xiv"  et  au  xv"  siècle  serait  bien  sim- 
plifiée et  la  conservation  de  textes  infiniment  précieux  serait 
à  jamais  assurée. 

Troisième  médaille.  —  M.  A.  Clément  Pallu  de  Lessert,  qui 
a  obtenu  la  troisième  médaille,  vous  a  envoyé  un  ouvrage  sur 
les  Fastes  de  la  Niimidie  sons  la  domination  romaine,  Constan- 


—  379  — 

Unc-Paris,  1888.  in-8".  Ce  livro  nous  tninsporto  dans  un 
niilicu  tout  à  fait  diflV'rcnt. 

La  Nmnidio  était  une  des  plus  riches  provinces  de  l'Em- 
pire. Depuis  l'époque  où  elle  avait  été  séparée  de  la  province 
proconsulaire  d'Afrique  pour  devenir  une  province  impériale, 
son  importance  s'était  accrue  d'une  façon  notable.  Le  légat  de 
Numidie  avait,  en  effet,  dans  ses  attributions  non  seulement 
l'administration  de  sa  province,  mais  aussi  le  commandement 
de  l'armée  d'Afrique  qui  y  était  cantonnée.  Cette  armée  se 
com[)osait,  en  temps  ordinaire,  d'une  légion,  la  IV  légion 
Auguste,  et  de  nombreuses  (roupes  auxiliaires  chargées  de 
maintiMiir  l'ordre  et  la  tranquillité,  d'assurer  la  sécurité  des 
colons  au  milieu  des  populations  nomades,  de  veiller  à  la 
sûreté  des  routes  et  de  protéger  d'une  manière  efficace  les 
caravanes  qui  se  rendaient  aux  points  extrêmes  de  l'occupa- 
tion romaine  dans  le  sud.  Le  légat  impérial  de  Numidie  avait, 
en  outre,  pour  mission  spéciale  de  surveiller  le  proconsul 
d'Afrique,  personnage  considérable  tout  à  la  dévotion  du 
Sénat,  et  de  se  porter  au  besoin  sur  (Jarthage  avec  ses  troupes 
pour  y  faire  respecter  le  nom  et  l'autorité  de  l'Empereur.  Les 
événements  s'étaient  chargés  d'apprendre  aux  successeurs 
d'Auguste  la  nécessité  de  cette  surveillance. 

Une  pareille  situation  exigeait  des  hommes  dévoués,  éner- 
giques, d'une  capacité  exceptionnelle  et  d'un  dévouement  à 
toute  épreuve.  Aussi  la  liste  de  ces  gouverneurs  contient-elle 
surtout  des  noms  dont  l'histoire  a  gardé  le  souvenir.  A  l'aide 
des  nombreux  matériaux  transmis  par  les  écrivains  grecs  et 
latins  de  l'époque  romaine  et  grâce  aux  documents  épigra- 
|>lii(pies  que  la  terre  d'Afrique  nous  a  conservés  et  nous  rend 
chaque  jour  avec  une  générosité  sans  pareille,  M.  Pallu  de 
Lessert  a  écrit  la  vie  de  chacun  d'eux.  Il  a  discuté  les  textes 
et  les  inscriptions  relatifs  à  chaque  gouverneur;  il  en  est  ré- 
sulté une  série  de  petites  biographies,  disposées  par  ordre 


—  380  — 

chronologique,  remplies  d'intérêt  non  seulement  pour  l'his- 
toire provinciale  de  la  Numidie,  mais  aussi  pour  l'histoire  gé- 
nérale de  l'Empire  romain. 

Cette  manière  de  procéder  pouvait  cependant  [irésenter  un 
inconvénient  auquel  l'auteur  a  dû  remédier.  Cette  liste  n'est 
pas  complète;  il  manque  bien  des  noms;  d'autres  sont  incer- 
tains, faute  d'une  indication  permettant  de  les  dater.  Fallait-il, 
pour  cela,  exclure  la  mention  des  événements  importants  qui 
se  plaçaient  dans  ces  intervalles?  11  ne  l'a  pas  pensé  et  il  y  a 
suppléé  par  des  notes  intercalées  entre  certaines  notices.  Sa 
chronologie  devient  ainsi  à  peu  près  complète. 

Les  événements  qui  se  passèrent  en  Afrique  au  moment  de 
l'avènement  des  Gordiens  sont  environnés  d'une  certaine 
obscurité,  surtout  en  ce  qui  concerne  l'intervention  de  Ca- 
pellien.  Les  textes  d'Hérodien  et  de  Capitolin  sont  inconci- 
liables et  les  historiens  modernes  ont  été  assez  embarrassés 
pour  déterminer  le  motif  du  rôle  important  joué  par  ce  per- 
sonnage. Avec  Léon  Renier,  M,  Fallu  de  Lessert  n'hésite  pas 
à  faire  de  Capellien  un  gouverneur  de  Numidie  et  dans  la 
dissertation  (ju'il  lui  consacre,  au  milieu  de  renseignements 
très  contradictoires,  il  a  su  trouver  d'excellentes  raisons  pour 
soutenir  cette  opinion.  Parmi  les  gouverneurs  dont  il  a  fixé 
la  date  de  la  façon  la  ])lus  sûre,  il  faut  citer  L.  Vespronius 
Candidus  que  Tissot,  suivant  en  cela  l'opinion  générale  et 
trompé  d'ailleurs  par  un  passage  mal  conq)ris  de  Tertullien, 
avait  classé  à  tort  parmi  les  proconsuls  d'Afrique. 

Les  travaux  de  ce  genre  sont  de  ceux  qui  demandent  une 
grande  sonmie  d'études  et  beaucoup  de  réflexion;  ils  sont 
appelés  à  rendre  de  véritables  services.  L'auteur,  ancien  élève 
de  l'Ecole  pratique  des  hautes  éludes,  s'y  était  préparé  par 
plusieurs  voyages  en  Afrique  et  par  des  publications  relatives 
à  l'histoire  et  aux  antiquités  de  cette  région.  Son  mémoire 
sur  les  Gouverneurs  des  Mnurétaaies  a  été  comme  le  prélude 


—  381   — 

de  LL'lui  (jue  iioils  réroiiijjoiison.s  aiijoiirtl'lmi.  Jjc  travail  de 
notre  savant  coidièro  M.  AV.-II.  \\addin(jton,  Faslc.s  des  pro- 
vinces asiatiques  de  l Empire  romain,  a  servi  de  modèle  à  cet 
ouvrage;  il  était  impossible  d'en  choisir  un  meilleur. 

Quatrième  médaille.  —  L'importance  tout  à  fait  exception- 
nelle du  concours  a  déterminé  la  Commission  à  demander, 
pour  cette  année,  une  quatrième  médaille.  Elle  a  été  décernée 
à  l'ouvrage  suivant  :  Le  Jouvenccl,  par  Jean  de  Biieil,  suivi  du 
Commentaire  de  Guillaume  Tringant,  publié  pour  la  Société  de 
riiistoire  de  France;  introduction  biograpiiicpic  et  littéraire 
par  Camille  Favre;  texte  établi  et  annoté  |)ar  Léon  Leccstrc, 
Paris,  1887-1888,  2  voL  in-S". 

La  publication  de  MM.  Favre  et  Lecestre  est  digne  de 
grands  élogfts.  Une  édition  nouvelle,  critique  et  commentée, 
du  Jouvenccl  était  vraiment  à  souhaiter. 

Le  maréchal  de  Bueil,  un  des  compagnons  de  la  Puceilc 
et  l'un  des  plus  vaillants  auxiliaires  de  Charles  VII  dans  la 
grande  œuvre  de  la  reconstitution  de  la  France,  se  plut,  sur 
ses  vieux  jours,  t\  retracer  les  souvenirs  de  sa  vie  militaire  et 
à  faire  ressortir  les  enseignements  qu'on  ])Ouvait,  selon  lui, 
en  tirer,  dans  une  sorte  de  roman  biographique,  de  Cyropé- 
die,  où  les  noms  de  personnes  et  de  lieux  sont  cachés  sous  des 
dénominations  fictives  qui  désignent  souvent  plusieurs  indivi- 
dus ou  objets  divers  afin  de  mieux  dérouter  une  curiosité  trop 
précise.  Le  voile  est  assez  épais  pour  que  la  critique  ait  eu 
beaucoup  de  peine  à  le  lever  sans  le  secours  que  lui  a  fourni 
l'honnête  Guillaume  Tringant,  secrétaire  du  maréchal,  qui, 
après  la  mort  de  son  muilre,  ne  vit  aucun  inconvénient  à  dis- 
siper l'obscurité  dont  celui-ci,  par  modestie  ou  plutôt  par 
prudence,  avait  enveloppé  ses  récits. 

Grâce  à  ses  commentaires  que  la  nouvelle  édition  donne 
pour  la  [)remière  fois  conqjlèlemeiil ,  on   peut  suivre  à   tra- 


—  38^2  — 

vers  la  fiction,  d'ailleurs  fort  peu  compliquée,  du  roman, 
l'histoire  vraie  cju'il  contient  et  si  les  renseignements  qu'on 
obtient  ainsi  sont  d'une  faible  valeur  pour  la  connaissance  des 
faits  en  eux-mêmes,  la  constatation  du  vrai  sens  de  l'ouvrage 
et  des  conditions  dans  lescjuelles  il  est  né  lui  donne  un  prix 
considérable  comme  reflétant  les  idées  et  les  sentiments  d'une 
époque  fort  intéressante  et  d'un  des  personnages  qui  y 
jouèrent  le  premier  rôle.  Le  livre,  d'ailleurs,  trop  prolixe  et 
trop  abondant,  à  notre  goût,  en  moralités  et  en  dissertations, 
ne  manque  pas  par  lui-même  d'intérêt;  le  style  ferme  et  vif, 
presque  toujours  soutenu,  contrairement  à  l'usage  de  la  plu- 
part des  écrivains  du  temps,  s'élève  parfois  jusqu'à  l'éloquence 
et  ne  tombe  jamais  dans  la  platitude. 

Tous  ces  mérites  faisaient  souhaiter  d'avoir  une  bonne  édi- 
tion d'un  ouvrage  célèbre  que  Sainte-Palaye  appelait  à  bon 
droit  cde  testament  mihtaire  d'un  grand  homme  de  guerre  r, 
et  qui,  imprimé  plusieurs  fois  aux  xv*  et  xvi''  siècles,  ne  l'avait 
plus  été  depuis  ibaç).  La  j^résente  édition  donne  satisfaction 
complète  à  ce  désir. 

Des  deux  érudils  qui  se  sont  partagé  la  tache,  le  premier, 
M.  Camille  Favrc,  a  écrit  la  très  longue  notice  biographique 
sur  Jean  de  Bueil  et  la  notice  littéraire.  La  première  est  de 
tout  point  excellente;  la  notice  littéraire  est  aussi  fort  esti- 
mable. L'auteur  a  recherché  les  ouvrages  antérieurs  sur  l'art 
de  la  guerre  que  Jean  de  Bueil  avait  pu  connaître  et  il  a  mon- 
tré combien  le  sien  leur  était  supérieur.  Une  question  qui 
aurait  pu  être  serrée  de  plus  près  est  celle  de  la  part  réelle 
qne  le  vieux  maréchal  prit  à  la  rédaction  de  l'œuvre;  il  pa- 
raît bien  résulter  des  notes  de  Tringant  qu'il  se  contenta  de 
l'inspirer  et  que  trois  de  ses  calomestiques"  en  furent  les  au- 
teurs au  sens  propre  du  mot.  Quelques  petites  inadvertances 
montrent  que  M.  Favre  est  plus  familier  avec  l'histoire  du 
xv^  siècle  qu'avec  sa  littérature,  mais  la  notice  littéraire  n'en 


—  383  — 

téinoigno  pas  moins  d'un  savoir  très  solide  et  d'un  excellent 
jugement.  Il  en  est  de  même  de  la  notice  sur  les  manuscrits 
et  les  éditions,  due  également  à  M.  Favre. 

M.  Lecestre,  son  collaborateur,  a  borné  sa  tâche  à  l'édition 
du  texte  et  des  pièces  justificatives;  sa  part  n'en  est  pas  moins 
importante  dans  le  labeur  qu'a  nécessité  cette  publication.  Il 
a  suivi  fidèlement  un  manuscrit  qu'il  a  jugé,  par  de  bonnes 
raisons,  très  voisin  de  l'original.  Malgré  quelques  petits  dé- 
fauts, d'ailleurs  peu  nombreux  et  peu  graves,  le  texte  est 
bien  constitué,  bien  ponctué  et  partant  bien  compris.  Les 
notes  explicatives  sont  rares  et  auraient  pu  avec  avantage  être 
multipliées. 

Cette  œuvre  commune  fournira  aux  érudits  qui  s'occupent 
plus  spécialement  du  xv*  siècle  des  informations  d'un  grand 
intérêt,  pour  la  plupart  inédites  et  puisées  aux  meilleures 
sources. 

Première  mention  honorable.  —  L'ouvrage  qui  a  obtenu 
la  première  mention  honorable  ne  nous  éloigne  pas  du 
XV*  siècle.  Il  a  pour  titre  :  Archives  d'un  serviteur  de  Louis  XI; 
documents  et  lettres,  iâ5i-iâ8i,  publiés  d'après  les  originaux 
par  Louis  de  la  TrémoïUe,  Nantes,  1888,  \n-k°. 

Le  serviteur  de  Louis  XI  auquel  est  consacrée  la  nouvelle 
piibhcation  de  M.  le  duc  de  la  Trémoïlle  est  Georges  de  la 
Trémoïlle ,  seigneur  de  Graon ,  qui  a  été  mêlé  à  plusieurs  des 
événements  les  plus  considérables  du  règne  de  son  maître, 
depuis  1668  jusqu'en  i^li"!"/-  H  a  notamment  rempli  les  mis- 
sions les  plus  délicates  et  les  plus  importantes  après  la  mort 
de  Gharles  le  Téméraire  pour  préparer  le  retour  de  la  Bour- 
gogne à  la  couronne  de  France. 

G'est  du  célèbre  chartrier  de  Thouars  que  M.  le  duc  de  la 
Trémoïlle  a  tiré  la  plupart  des  documents  qui  permettent 
de  connaître  et  d'apprécier  le  rôle  politique  du  seigneur  de 


—  38A  — 

Craon.  Il  les  a  complétés  par  de  judicieux  emprunts  faits  à  la 
Bibliothèf|ue  nationale,  au  Trésor  des  Chartes,  aux  registres 
du  Parlement  et  aux  archives  de  la  Côte-d'Or.  Le  recueil 
qu'il  a  ainsi  formé  prendra  place  parmi  les  ouvrages  indis- 
pensables à  consulter  pour  l'histoire  de  Louis  XL 

Le  mérite  de  l'auteur  ne  se  borne  pas  à  avoir  recherché, 
classé  et  publié  les  documents.  Il  y  a  joint  une  table  alpha- 
bétif|ue  dont  beaucoup  d'articles  renferment,  sur  différents 
personnages,  des  renseignements  précis  et  abondants,  le  jjIus 
souvent  fournis  par  des  textes  inédits. 

En  nous  donnant  ce  livre  intéressant,  j\I.  le  duc  de  la  Tré- 
moïUe  a  rendu  à  l'histoire  générale  de  France  au  xv*  siècle  un 
nouveau  service  c|ue  l'Académie  devait  signaler  et  récompen- 
ser. Le  possesseur  du  chartrier  de  Thouars  a  entre  les  mains 
des  trésors  historiques  de  premier  ordre;  il  est  impossible 
d'en  faire  un  plus  noble  et  un  plus  généreux  usage.  L'intelli- 
gente activité  qu'il  déploie  pour  les  publier  et  pour  les  mettre 
entre  les  mains  du  public,  par  ses  travaux  personnels,  est  un 
gage  certain  de  son  dévouement  à  la  science;  chaque  année 
de  nouvelles  publications  viennent  nous  montrer  combien  ce 
dévouement  est  profond  et  sincère. 

Deuxième  mention  honorable.  —  La  deuxième  mention  ho- 
norable est  décernée  à  M.  Ch.  Morel  pour  son  ouvrage  inti- 
tulé :  Genève  et  la  colonie  de  Vienne;  étude  sur  une  organisation 
municipale  à  Vépoque  romaine,  Genève,  1888,  in-8''.  Votre 
Commission  a  regretté  de  ne  pouvoir  récompenser  plus  com- 
plètement un  savant  aucjuel  sont  dus  d'importants  mémoires 
de  critique  et  d'archéologie  et  qui  a  été  l'un  des  collabora- 
teurs de  L.  Renier  pour  la  publication  des  OEiwres  de  Bor- 
ghesi. 

Ce  mémoire  présente  un  intérêt  partic!ili(>r  pour  l'histoire 
de  l'administration  romaine  en  Gaule.  Il  est  relatif  à  l'orga- 


—  385  — 

iiisation  municipale  de  la  colonie  de  Vienne,  colonie  qui  fut, 
sous  la  domination  romaine,  dans  une  position  exceptionnel- 
lement privilégiée. 

Le  bel  ouvrage  de  M.  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne, 
a  servi  de  base  à  ce  travail.  Une  publication  faite  en  1876 
par  un  professeur  de  Zurich,  M.  S.-S.  MûUer,  en  a  été  la 
cause  réelle.  Dans  une  dissertation  sur  INyon  à  l'époque  ro- 
maine, Nyon  zur  Rômerzeit,  ce  jeune  savant  s'était  efforcé 
d'établir  qu'il  y  avait  eu,  sous  les  Romains,  deux  Genève, 
l'une  sur  la  rive  gauche  du  Rhône,  viennoise  et  allobroge, 
l'autre  sur  la  rive  droite  appartenant  aux  Equestres.  Partant 
de  là,  il  posait  en  principe  que  les  inscriptions  trouvées  sur 
la  rive  droite  devaient  se  rapporter  nécessairement  à  des  per- 
sonnages habitant  le  territoire  de  Nyon  et  aux  fonctions  pu- 
bliques de  cette  colonie.  Il  avait  été  ainsi  conduit  à  établir 
une  regrettable  confusion  entre  les  institutions  municipales 
de  la  colonie  de  Vienne  dont  relevait  le  viens  de  Genève  et 

r 

celles  de  la  colonie  Equestre. 

M.  Ch.  Morel  a  prouvé  la  fausseté  de  ce  système.  L'histoire 
des  célèbres  inscriptions  de  Julius  Brocchus,  sur  lesquelles 
M.  MùUer  s'était  appuyé,  lui  a  fourni  une  nouvelle  occasioji 
de  montrer  la  sûreté  de  son  jugement  et  d'exercer  la  rigueur 
de  sa  critique. 

De  l'étude  des  documents  épigraphiques,  il  résulte  pour 
M.  Ch.  Morel  que  Vienne  a  eu  successivement  deux  constitu- 
tions différentes.  D'après  la  première,  qui  remonte  à  l'époque 
d'Auguste  et  qui  a  duré  au  moins  jusqu'au  commencement 
du  règne  de  Tibère,  les  magistrats  suprêmes  de  la  cité  ont 
le  titre  de  quattuorviri  juri  dicundo,  titre  propre  aux  magistrats 
des  municipes.  D'après  la  seconde  constitution,  (jui  existait  du 
temps  de  ïrajan  et  qui  présente  des  particularités  très  remar- 
quables, les  magistrats  suprêmes  portent,  comme  dans  les 
colonies,  le  titre  de  duovin  juri  dicundo. 


—  386  — 

Les  derniers  chapitres  sont  plus  spécialement  consacrés  à 
l'histoire  de  Genève  à  l'époque  romaine;  l'auteur  y  a  démon- 
tré définitivement  que  le  prétendu  viens  Genavcnsis  situé  sur 
la  rive  droite  du  Rhône  n'avait  jamais  existé  et  qu'on  n'en 
avait  trouvé  aucune  trace. 

L'ouvrage  de  M.  Ch.  Morel  fait  ressortir  une  fois  de  plus 
l'importance  des  inscriptions  romaines  pour  l'étude  de  l'his- 
toire, de  la  géographie  et  de  l'administration.  L'auteur  a  su 
en  tirer  un  bon  parti.  Son  livre  contribuera  à  jeter  quelque 
lumière  sur  les  questions  encore  si  compliquées  qui  se  rat- 
tachent à  l'étude  des  organisations  municipales  romaines. 

Troisième  mention  honorable.  —  La  troisième  mention  hono- 
rable est  accordée  à  MM.  les  docteurs  Bleichcr  et  Faudel, 
auteurs  du  recueil  intitulé  :  Matériaux  pour  une  étude  préhis- 
torique de  V Alsace,  5  fascicules  de  Sgô  pages  et  88  planches, 
Colmar,  1878  a  1888,  in-8''. 

On  ne  pouvait  trouver  deux  savants  plus  compétents  pour 
traiter  le  sujet  dont  ils  ont  entrepris  l'étude.  Le  docteur  Fau- 
del est  un  anthropologiste  qui  a  fait  depuis  longtemps  ses 
preuves;  le  docteur  Bleicher  est  un  naturaliste  des  plus  dis- 
tingués. Tous  deux,  Alsaciens  et  ardents  patriotes,  ont  eu 
pour  but  d'élever  un  monument  national  à  leur  chère  pro- 
vince ou  du  moins  d'en  établir  les  bases  sur  des  documents 
incontestables  et  scientifiquement  contrôlés.  Ce  but  est  at- 
teint. 

Leurs  recherches  ont  été  poursuivies  avec  une  rare  persé- 
vérance pendant  plus  de  dix  années.  De  tous  ces  efforts  est 
résulté,  non  pas  un  livre,  mais  une  statistique  complète  et 
raisonnée  des  richesses  préhistoriques  de  l'Alsace.  Un  livre 
dogmatique  aurait  pu  produire  plus  d'elle!.  11  faut  les  féliciter 
d'avoir  résisté  à  celte  tentation.  Us  ont  été  retenus  par  un 
sentiment  de  respect  pour  la  science,  c'est-à-dire  pour  la  vé- 


—  887  — 

rite.  Celte  réserve  est  méritoire.  La  nature  du  sujet  traité  ne 
leur  permettait  pas  d'atteindre  à  plus  de  perfection;  il  leur 
commandait  la  prudence. 

Ils  ont  recueilli  les  matériaux  d'une  histoini  de  l'Alsace 
aux  temps  primitifs;  consciencieusement  ils  ne  pouvaient 
faire  autre  chose.  Mais  sur  combien  de  détails  n'ont-ils  pas 
porté  la  lumière?  La  statistique  qui  remplit  ces  cinq  fasci- 
cules est,  en  effet,  mêlée  de  nombreuses  dissertations  sur  la 
nature  et  la  provenance  des  roches,  sur  la  distribution  de 
leurs  gisements,  sur  la  composition  des  minéraux  ou  des  vé- 
gétaux employés  comme  matière  première  par  nos  ancêtres 
préhistoriques.  Les  auteurs  ont  donné  une  description  fort 
complète  et  très  exacte  des  enceintes  fortifiées  qui  existent 
entre  les  Vosges  et  le  Rhin,  une  savante  étude  sur  la  céra- 
mique pré-romaine,  sur  la  préparation  de  la  terre  et  sa  cuis- 
son; ils  ont  publié  des  remarques  très  judicieuses  sur  l'ambre 
et  le  corail  et  surtout  ils  se  sont  livrés  à  un  examen  n)inuticux 
des  bracelets  en  lignite,  jayet,  bois  d'if,  etc.,  où  le  caractère 
de  ces  anneaux  est  enfin  définitivement  établi  grâce  à  des 
analyses  chimiques  habilement  conduites,  aidées  d'observa- 
tions au  microscope. 

La  supériorité  de  ce  travail  sur  tous  ceux  du  même  genre 
qui  ont  été  présentés  à  nos  concours  est  incontestable. 
MiVr.  les  docteurs  Blcicher  et  Faudel  ont  donné  un  exemple 
remarquable  de  suite  dans  les  idées,  de  patience,  de  préci- 
sion dans  les  observations ,  de  réserve  dans  les  conclusions. 

Quatrième  mention  honorable.  —  M.  yV.  Prudhomme,  archi- 
viste du  dé|)artement  de  l'Isère,  auteur  d'une  Histoire  de  Gre- 
noble, Grenoble,  1888  ,  in-8°,  a  été  jugé  digne  de  la  quatrième 
mention  honorable. 

La  ville  de  Grenoble  a  joué  un  rôle  assez  im|)ortant  pour 
mériter  d'avoir  une  histoire  spéciale.  Les  matériaux  ne  man- 


—  388  — 

quaient  pas  pour  l'écrire.  M.  A.  Prudhomme  a  su  extraire  des 
nombreuses  sources  auxquelles  il  a  puisé  tous  les  éléments  de 
nature  à  éclairer  son  sujet.  Il  y  a  ajouté  beaucoup  d'indica- 
tions fournies  par  des  pièces  manuscrites  qu'il  a  rencontrées 
surtout  dans  les  archives  de  l'Isère.  Ces  indications  ne  se 
rapportent  pas  toujours,  il  est  vrai,  à  des  événements  curieux, 
mais  elles  n'en  complètent  pas  moins  avantageusement  l'ex- 
posé des  vicissitudes  de  la  fortune  de  cette  ancienne  ville  qui 
devint  la  capitale  d'une  province  française  donnée  en  apanage 
à  l'aîné  des  fds  de  nos  rois. 

Sur  divers  points,  l'œuvre  de  l'historien  était  déjà  fort 
avancée,  notamment  pour  tout  ce  qui  touche  à  l'histoire  de 
Ja  réunion  du  Dauphiné  à  la  couronne  de  France,  au  gouver- 
nement de  Louis  XI,  en  tant  cpe  Dauphin,  et  aux  guerres 
de  religion  dont  cette  partie  de  la  France  fut  le  théâtre. 
M.  Jules  Guiffrey,  en  particulier,  avait  fait  plus  que  déblayer 
le  terrain  et  laissé  la  tâche  presque  achevée. 

L'œuvre  de  M.  A.  Prudhomme  n'en  est  pas  moins  très  esti- 
mable. Il  ne  s'est  pas  perdu  dans  les  digressions,  il  a  raconté 
les  événements  et  relaté  tout  ce  qui  peut  servir  à  l'histoire  de 
la  capitale  du  Dauphiné  avec  sobriété,  clarté  et  précision.  Le 
labeur  que  ce  livre  dénote  est  considérable;  l'ouvrage  nous 
offre  assez  de  données  nouvelles,  d'informations  inédites  ou 
non  encore  utilisées  par  les  historiens  pour  nous  intéresser  et 
mériter  les  encouragements  de  l'Académie.  Les  jugements  for- 
mulés dans  ce  livre  sont  toujours  justifiés  par  l'exposé  des 
faits,  dont  le  récit  est  bien  enchaîné.  L'auteur  a  vécu  depuis 
plusieurs  années  dans  la  ville  dont  il  retrace  l'histoire;  il  en 
connaît  à  fond  les  archives;  il  en  a  étudié  les  monuments  et 
il  y  a  recueilli  sur  place  bien  des  traditions.  Nul  n'était  en 
meilleure  situation  pour  écrire  cet  ouvrage  qui  prendra  rang 
parmi  nos  bonnes  histoires  locales. 


389 


C'mnuihrc  mention  honorable.  —  AL  Henri  Stoin  a  obtonu  la 
cinquirnic  mention  lionoral)le  ])our  son  livre  sur  Olivier  de  h 
Marche,  historien,  poète  et  diplomate  hourfrui^non,  Paris,  1888, 


m-h\ 


La  |)artie  la  plus  importante  de  ce  travail  est  historique, 
soit  que  M.  Sfein  étudie  les  mémoires  d'Olivier  de  la  Marche, 
leur  valeur  et  leurs  sources  et  indique  les  meilleures  bases 
d'une  édition  vraiment  critique,  soit  qu'il  retrace  à  l'aide  de 
documents  d'archives  la  vie  longue  et  agitée  du  secrétaire 
de  Charles  le  Téméraire,  du  maître  d'hôtel  de  Maximilien,  du 
précepteur  de  Philippe  le  Beau.  Cette  partie  historique  est 
excellente  et  ne  mérite  que  des  éloges.  On  y  trouve  un  opus- 
cule d'Olivier  qui,  bien  qu'imprimé  au  xvii^  siècle,  était  resté 
à  peu  près  inconnu  et  qui  offre  un  grand  intérêt.  C'est  XAvis 
nu  roi  des  Romains  touchant  la  manière  qu'on  se  doit  comporter  a 
l'occasion  de  rupture  avec  la  France. 

L'autre  partie  du  livre  de  M.  Stein  est  littéraire  et  jusqu'à 
un  certain  point  phdologique.  Il  est  évident  que  l'auteur  a 
considéré  cette  partie  de  son  ouvrage  comme  secondaire.  On 
s'en  aperçoit  en  voyant,  dès  les  premières  pages,  le  roman 
d'Amadis  signalé  parmi  ceux  qu'on  lisait  au  xv^  siècle  à  la  cour 
de  Bourgogne  ou  en  trouvant  parmi  les  morceaux  inédits, 
imprimés  à  l'appendice,  un  rondeau  qui  figure  ordinairement 
dans  le  recueil  des  œuvres  de  Charles  d'Orléans  et  qui  n'est 
pas  compréhensible  si  on  le  détache  de  la  série  à  laquelle  il 
appartient.  En  outre,  l'édition  donnée  dans  cet  appendice  de 
quelques  poésies  d'Olivier  est  sur  certains  points  défectueuse. 
(Jela  a  eu  parfois  des  conséquences,  même  pour  l'étude  histo- 
rique. Si,  par  exemple,  M.  Stein  avait  hifMi  saisi  ccrtams 
vers  (de  la  page  128),  il  aurait  vu  (pie  la  Doctrine  pour 
madame  Aliénor  avait  été  écrite  quand  la  fille  (1(>  Philippe  le 
Beau  avait  un  an,  et,  en  outre,  qu'Olivier,  malgré  son  grand 
âge,  avait  été  nonuné  gouverneur  de  cette  enfant.  A  ])ropos 


—  390  — 

du  Parkînent  des  dames,  il  y  aurait  aussi  quelques  observa- 
tions à  faire  sur  certains  manuscrits  que  l'auteur  a  négligé  de 
consulter. 

Malgré  ces  imperfections,  le  jeune  érudit  a  su  diriger  si 
habilement  ses  recherches,  qu'il  ne  reste  plus  grand'chose  à 
glaner  après  lui.  On  peut  ne  pas  partager  complètement  toutes 
ses  opinions  et  apprécier  d'une  façon  différente  le  caractère 
d'Olivier  de  la  Marche,  mais  il  est  impossible  de  réunir  plus 
de  renseignements  et  de  détails  sur  les  événements  auxquels 
il  a  été  mêlé ,  de  les  présenter  d'une  façon  plus  claire  et  plus 
intéressante. 

Sixième  mention  honorable.  —  La  sixième  mention  honorable 
a  été  décernée  à  M.  d'Espinay,  ancien  conseiller  à  la  Cour 
d'appel  d'Angers,  pour  son  livre  sur  la  Coutume  de  Touraine  au 
XY'  siècle,  Tours,  1888,  in-8°. 

Au  point  de  vue  historique,  il  existe  au  moyen  âge  une 
union  si  étroite  entre  l'Anjou  et  la  Touraine  qu'il  n'y  a  pas 
lieu  de  s'étonner  que  ces  deux  provinces  aient  été' régies  par 
les  mêmes  coutumes  et  soumises  aux  mêmes  juridictions.  C'est 
un  fait  qui  a  été  mis  en  pleine  lumière  par  M.  Beautemps- 
Beaupré  dans  son  vaste  recueil  des  Coutumes  et  institutions  de 
l'Anjou  et  par  notre  savant  confrère  M.  VioUet  dans  sa  belle 
édition  des  Etablissements  de  saint  Louis. 

Il  vint  cependant  un  moment  où  les  deux  coutumes  se  sé- 
parèrent et,  pour  mieux  dire,  prirent  une  forme  distincte  et 
plus  individuelle.  La  rédaction  officielle  de  la  Coutume  d'Anjou 
eut  lieu  en  1/111,  précédant  ainsi  de  quarante  ans  l'ordon- 
nance de  Montils-lez-Tours  qui  a  prescrit  la  rédaction  des 
Coutumes  de  France.  La  Coutume  de  Touraine  a  été  rédigée, 
au  contraire,  en  i/i6i,  en  vertu  de  cette  même  ordonnance. 
Cette  première  rédaction,  faite  sous  la  direction  de  Baudet 
Berthelot,  lieutenant  général  du  bailli  de  Touraine,  fut  con- 


—  391    — 
firniéo  en  iMia,  puis  rclonnén  sucressivcmenl  en   iBo^  et 
1559.   ^^^  ^^''"^  réformalions  enlevèrent  naturellement  au 
texte  de  1Z161  tout  intérêt  pratique;  les  exemplaires  tant  im- 
primés que  manuscrits  en  devinrent  rapidement  rares. 

M.  d'Espinav  n'a  pu  en  retrouver  que  deux,  l'un  manuscrit, 
à  Rouen,  l'autre  imprimé,  à  Tours,  et  provenant  du  cabinet 
de  M.  Taschcreau.  Il  s'est  occupé  de  son  rôle  d'éditeur  avec 
distinction.  La  connaissance  qu'il  possède  des  anciens  textes 
angevins  du  xni'  et  du  xiv"  siècle  lui  a  permis  de  faire  d'heu- 
reux rapprochements  et  d'intéressantes  comparaisons.  Sa  nou- 
velle publication  sera  fort  utile  aux  érudits  qui  étudient  l'ancien 
droit  de  nos  provinces  de  l'Ouest.  Ceux  mêmes  qui  n'ont  pas 
l'habitude  de  la  langue  juridique  y  trouveront  un  document 
important  et  utile  à  signaler.  C'est  un  Glossaire  des  anciens 
termes  de  droit  usités  dans  la  coutume  et  le  stille  de  Tourraine  où 
sont  expliqués  en  langage  courant  les  termes  juridiques  dont 
le  sens  précis  est  quelquefois  difficile  à  saisir. 

Mais  ce  qui  constitue  le  véritable  mérite  de  cette  publica- 
tion, c'est  l'introduclion  qui  en  forme  plus  de  la  moitié  et 
dans  laquelle  l'auteur  a  exposé  dogmatiquement,  en  suivant 
autant  que  possible  l'ordre  de  la  coutume  et  du  stille,  les  prin- 
cipes de  droit  et  les  règles  de  procédure  que  renferment  ces 
deux  documents.  Il  a  su  déployer  des  qualités  de  jurisconsulte 
et  d'historien  ([ui  assurent  à  son  livre  une  place  des  plus 
honorables. 

La  Commission  tient  à  signaler,  en  outre,  à  votre  atten- 
tion certains  ouvrages  auxquels  elle  a  regretté  de  ne  pouvoir 
attribuer  de  récompenses. 

Au  premier  rang  se  ])lace  le  livre  de  M.  Ernest  Petit, 
lUncraires  de  Philippe  le  Hardi  et  de  Jean  sans  Peur,  ducs  de 
IJourgogne,  d'après  les  comptes  de  dépenses  de  leur  hôtel  (i363- 
lâig),  Paris,    1888,  in-/i".  C'est  un  recueil  de  documents 

XVII.  9-7 


iMmiurKif 


—  392  — 

fort  précieux  pour  les  biographies  particulières  du  xiv''  siècle 
ou  du  commencement  du  xv".  Ce  travail  très  important  pré- 
sente aussi  une  utilité  incontestable  pour  fixer  la  chronologie 
de  nombreux  détails  historiques  rapportés  souvent  d'une  ma- 
nière très  vague  par  les  chroniqueurs. 

L'auteur  de  la  vaste  et  luxueuse  publication  sur  Jean  de 
Reilhac,  secrétaire  maître  des  comptes,  général  des  finances  et  am- 
bassadeur des  rois  Charles  VII ,  Louis  XI  et  Charles  VIII,  docu- 
ments pour  servir  à  l'histoire  de  ces  règnes,  de  iâ55  à  làgg, 
Paris,  1886-1888,  3  vol.  in-A",  a  fait  connaître  un  grand 
nombre  de  pièces  d'archives  qui  offrent  un  réel  intérêt  pour 
l'histoire  générale  de  la  France  pendant  la  seconde  moitié  du 
XV*  siècle. 

M.  Joubert,  en  publiant  V Histoire  de  la  baronnie  de  Craon, 
de  i38a  à  1626,  Angers-Paris,  1888,  in-8%  et  M.  A.  de 
Rochemonteix,  en  écrivant  un  volume  intitulé  La  maison  de 
Graule,  étude  sur  la  vie  et  les  œuvres  des  convers  de  Cîteaux  en 
Auvergne  au  moyen  âge,  Paris,  1888,  in-8'',  nous  ont  donné 
deux  bons  livres,  faits  avec  soin  et  agréables  à  lire. 


Bertrand  de  Broussillon  et  Paul  de  Farcy  se  sont 
associés  pour  composer  la  Sigillographie  des  seigneurs  de  Laval 
(^1  og5-i6o5^,  Mamers,  1888,  in-8",  étude  consciencieuse 
et  complète  des  sceaux  de  ces  seigneurs,  accompagnée  de  bons 
commentaires  historiques. 

M.  P.  du  Châtcllier  a  fait  une  œuvre  utile:  Les  Epoques  pré- 
historique et  gauloise  dans  le  Finistère,  inventaire  des  monuments 
de  ce  département,  Paris,  1889,  in-S".  La  statistique  qu'il  a 
donnée  est  très  complète;  elle  serait  irréprochable  si  tous  les 
monuments  y  étaient  décrits  en  détail. 

VEtude  historique  et  archéologique  sur  la  cathédrale  et  le  palais 


—  393  — 

cpiscopal  (le  Pans  du  vi'  au  xii'  siècle,  Paris,  1888,  in-8°,  par 
M.  V.  Mortel,  est  un  mémoire  sagement  conçu  dans  lequel 
les  textes  relatifs  au  sujet  traité  sont  soigneusement  relevés, 
bien  commentés  et,  en  général,  ingénieusement  appliqués 
aux  témoignages  archéologiques,  fournis  par  les  construc- 
tions. 

Un  archéologue  qui  connaît  à  fond  notre  architecture  du 
moyen  âge,  M.  Anthyme  Saint-Paul,  a  écrit  une  Histoire  mo- 
numentale de  la  France,  Paris,  1888,  111-8°.  C'est  un  très  bon 
livre  de  vulgarisation. 

Un  ouvrage  de  longue  haleine,  ^Histoire  de  l'Afrique  septen^ 
trionale  (^Berhérie)  ^  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  la  con- 
quête française  [i83o),  t.  I  et  II,  Paris,  1888,  in-8%  dont 
les  premiers  volumes  ont  paru,  a  été  renvoyé,  malgré  son 
mérite  incontesté,  à  un  concours  ultérieur.  Cette  œuvre,  vrai- 
ment nationale,  se  recommande  par  des  qualités  de  fond  et 
de  forme.  La  même  décision  s'applique  à  l'intéressant  recueil 
de  M.  le  lieutenant  Emile  Espérandieu,  Epigraphie  romaine  du 
Poitou  et  de  la  Saintonge,  Melle,  1888,  in-8°,  dont  un  seul 
volume  a  été  publié.  Votre  Commission  a  estimé  qu'il  fallait , 
avant  de  récompenser  ces  deux  ouvrages,  en  attendre  l'achè- 
vement. 

Un  de  nos  meilleurs  travailleurs  de  province,  M.  René 
Fage,  a  envoyé  un  volume  très  estimable,  Le  Vieux  Tulle, 
Tulle,  1888,  in-8''.  Malheureusement  la  plupart  des  docu- 
ments inédits  cités  dans  cet  ouvrage  se  rapportent  à  une 
époque  dont  l'étude  est  en  dehors  des  limites  tracées  par  le 
programme  du  concours. 

Le  Parlement  de  Bretagne  après  la  Ligue  [i5g8-i6io),  par 
M.  Henri  Carré,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Poi- 
tiers, Paris,  1888,  in-8°,  est  un  livre  excellent;  il  concerne 


—  39/i  — 

également  une  période  trop  moderne.  S'il  avait  pu  rentrer 
dans  les  conditions  du  concours  des  Antiquités  nationales, 
il  aurait  été  certainement  jugé  digne  d'une  de  nos  récom- 
penses. 

Les  membres  de  h  Commission  des  Antiquités  de  la  France, 

A.  Madry,  Léop.  Delisle,  Barthélémy  Hadréau,  Eug. 
DE  RoziÈRE,  G.  Paris,  Alexandre  Bertrand,  Gustave 
Sghlumberger,  Ant,  Héron  de  Villefosse,  rapporteur. 

L'Académie,  après  avoir  entendu  la  lecture  de  ce  rapport, 

en  a  adopté  les  conclusions. 

Certiûé  conforme  : 

Le  Secrétaire  perpétuel, 

H.   WALLO^. 


—  395  — 
LIVRES  OFFERTS. 


SÉANCE  DU   6  SEPTEMBRE. 

Sont  offerts  : 

Romanei  provcrbi  cl  nci  viodi  di  dire,  par  M,  Marco  Besso  (Rome, 
1889,  in-S"); 

Les  subdiiisioiis  de  l'époque  magdalénienne  el  de  l'époque  néolithique, 
par  M.  Éd.  Pielle  (Angers,  1889 ,  in-S"); 

Nomenclature  de  l'ère  anthropique  primitive,  par  le  même  (Angers, 
i889,in-8°). 

SÉANCE  DU  l3  SEPTEMBRE. 

Sont  offerts  : 

CpncKa  Kpa.bCBCKa  AKa^ciinja.  F-iac.  XVI.  O  HaTOHcy  ua  rjpKBn  Xepqera 
CTo*ana  y  FopajKAy ,  pai*  I-  Ruvarac  (Belgrade,  1889,  ^-8°); 

3aniicKii  KocTOMHaro  OTA^jeHia  IIiraepaxopcKaro  pyccKaro  apxeojorHiec- 
Karo  OômecTBa,  publie's  sous  la  direction  du  baron  V.-R.  Rosen,  t.  III, 
livraison  4  (Saint-PëtersLourg,  1889,  gr.  in-8°); 

Documents  rares  ou  inédits  de  l'histoire  des  Vosges,  publiés  au  nom 
du  Comité  dliistoirc  vosgienne,  par  i\lM.  J.-G.  Cbapellier,  Paul  Cbe- 
vreux  ol  G.  Gley,  t.  IX  (Paris,  1889,  in-8°). 

M.  Anatole  de  Barthélémy  présente,  delà  part  de  l'auteur,  un  ouvrage 
intitulé  :  La  îwère  des  Guises;  Antoinette  de  Bourbon,  iâ(jà-iôS3,  par 
le  marquis  de  Pimodan  (Paris,  1889,  in-8''). 

ffLe  marquis  de  Pimodan  vient  de  publier  une  étude  sur  Antoinette 
de  Bourbon ,  lille  de  François ,  comte  de  Vendôme ,  et  de  Marie  de  Luxem- 
bourg. Elle  épousa  Claude  de  Lorraine,  fils  du  duc  René  II,  d'abord 
comte  de  Guise;  mariée  en  1 5i3 ,  elle  mourut  en  1 583 ,  âgée  de  quatre- 
vingt-neuf  ans ,  et  pendant  sa  longue  existence  elle  tint  une  place  con- 
sidérable dans  riiistoii-e  mouvementée  de  son  mari ,  de  son  fils  François 
et  de  son  pelil-liis,  Henri. 

rrEn  retraçant  la  vie  de  cette  princesse  énergique,  qui  eut  une  grande 
influence  sur  son  entourage,  M.  de  Pimodan  a  saisi  l'occasion  de  résumer 
le  rôle  joué,  au  xvi'  siècle,  par  ces  ducs  de  Guise  à  qui  une  ambition 
héréditaire  et  sans  bornes  fit  rêver  de  devenir  les  maîtres  de  la  France. 
L'auteur  est  partisan  des  Guises;  il  fait  tous  ses  efforts  pour  se  montrer 
impartial,  mais  il  n'y  réussit  pas  toujours.  Il  est  ligueur,  avouons-le,  et 


—  396  — 

je  ne  puis  personnellement  lui  en  faire  un  gros  reproche,  car  il  me 
senible  qu'à  cette  époque  j'aurais  penclié  du  côte'  de  la  Ligue. 

rf  Aujourd'hui  nous  ne  pouvons  juger  de  ce  qui  se  passa  au  xvi*  siècle 
qu'en  mettant  de  côté  les  idées  modernes.  On  ignorait  alors  ce  que  nous 
appelons  le  patriotisme;  on  était  singuHèrement  personnel.  Dans  les 
hautes  classes  et  parmi  les  gens  éclairés,  on  était  catholique  ou  protes- 
tant suivant  que  cela  pouvait  servir  aux  intérêts.  De  part  et  d'autre 
l'égoïsme  et  l'ambition  faisaient  commettre  des  énormités  qui  nous  éton- 
nent douloureusement;  en  tout  temps  ces  deux  grands  défauts  produisent 
les  mêmes  résultais. 

ffLe  livre  que  M.  de  Piraodan  m'a  chargé  d'offrir  à  l'Académie,  d'une 
lecture  attachante,  est  très  intéressant  au  point  de  vue  de  l'histoire  géné- 
rale et  de  l'histoire  de  Joinville,  résidence  d'Antoinette  de  Bourbon.  Il 
est  accompagné  de  vingt-huit  lettres  inédites  de  cette  princesse ,  de  qua- 
rante-cinq lettres,  également  inédites,  à  elle  adressées  par  différents 
personnages,  enfin  de  pièces  justificatives.?) 

SÉANCE  DU    20   SEPTEMBRE. 

Est  offert  à  l'Académie  : 

Notanda  et  Corrigenda,  par  M.  Barclay  V.  Head  (Londres,  1889, 
in-8%  extrait  du  Nnmismatic  chrnntck,  3°  série,  vol.  IX). 

M.  BoissiER  présente,  au  nom  de  l'auteur,  M.  R.  de  la  Blanchère,  une 
brochure  intitulée  :  Exposition  universelle  de  188g.  Pillais  tunisien. 
Groupe  I.  Exposition  du  service  des  antiquités  et  des  arts  de  la  Bêgence 
de  Tunis  (Paris,  i889,in-i6). 

ff C'est  une  petite  plaquette  de  quelques  pages,  qui  non  seulement 
sera  utile  à  ceux  qui  visitent  l'exposition  tunisienne  pour  s'y  reconnaître, 
mais  qui  leur  montrera  que  de  richesses  ce  sol  renferme,  et,  en  indi- 
quant ce  qu'on  en  a  tiré  en  quelques  années,  pour  la  connaissance  de 
l'antiquité  punique  ou  romaine,  fait  prévoir  ce  qu'on  en  pourra  tirer 
plus  tard.» 

M.  ViOLLET  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

rfJe  suis  chargé  d'offrir  à  l'Académie,  au  nom  de  M.  le  D'  Victorin 
Laval,  un  volume  que  ce  savant  auteur  vient  de  publier  sous  ce  titre  : 
Histoire  de  la  Faculté  de  médecine  d'Avignon,  ses  origines,  son  organisation 
et  son  enseignement,  1. 1  (Avignon  et  Paris,  1889,  in-8°). 

fCe  premier  volume  est  consacré  aux  origines  et  à  l'organisation; 
l'auteur  réserve  pour  le  tome  II  une  étude  générale  sur  l'enseignement 


—  397  — 

à  la  Facull»' de  iiK'doriiio  (rAvijyiion.  M.  Laval  relève  avec  soin  les  lexles 
anciens  relatil's  à  reiiseijjneiueiit  à  Avignon  ;  il  conslate  qn'au  xiii'  siècle 
la  médecine  elail  enseignde  dans  cette  ville  et  que  cet  enseip^nonient  y 
était  libre.  L'Univei\si(é  fnt  londe'e  par  Bonii'acc  VIIl  en  i3o3;  mais  la 
Faculté  de  médecine  ne  se  dessine  nellement  qu'au  xv'  siècle.  M.  le 
D'  Laval,  s'a|)[)uyant  coiislanunont  sur  des  textes,  suit  les  vicissitudes  de 
la  Faculté  de  médecine  d'Avignon  jusqu'aux  dcniiei'S  jours  de  l'Univer- 
sité (^i7Ç)i-i7()o).i 

M.  ViOLLET  oll're  ensuite  un  volume  dont  il  est  l'auteur  cl  (|ui  vient 
de  paraître  sous  ce  (itre  :  Histoire  des  institittions  politiques  et  administva- 
tives  de  la  France,  t.  1  (Paris.  1889,  in-8"). 

SÉANCE   DU    27    SEPTEJICRE. 

Est  offert  : 

Bibliographie  vosffienne  de  l'année  1886  et  Supplément  aux  années  i883 
à  188  5  ou  Catalogue  métliodi([ue  et  raisonné  des  publications  sur  les  Vosges, 
d'auteurs  vosgicns  ou  faites  dans  les  Vosges,  par  M.  N.  Haillant  (Paris  et 
Épinal,  1889,  in-8°). 

SÉANCE   DU    /l   OCTOBliE. 

Sont  olîerts  : 

La  bibliothèque  de  l'abbai/e  de  Saint-Claude  du  Jura,  esquisse  de  son 
histoire,  par  M.  Aug.  Castau,  correspondant  de  l'Institut  (lîesançon, 
1889,  in-8''); 

Nouvelles  similitudes  françaises-arabes  (c:jl4jUi.il  jj>-^'),  par  iM.  Paul 
Radiot  (Paris,  1889,  in-12). 

M.  VioLLET  ofl're  à  l'Académie,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Cli.  Joret, 
une  étude  intilulée:  Le  P.  Guevarrc  et  les  bureaux  de  charité  au  xr  11' siècle 
(Toulouse,  1889,  in-8"). 

rrLes  fondations  d'établissements  de  charité  destinés  à  accueillir  les 
indigents  ne  sont  pas  rares  au  xvi°  et  au  xvii'  siècle.  Une  ordonnance  de 
1662  prescrit  même  de  créer  dans  toutes  les  villes  des  asiles  oii  seront 
renfermés  et  nourris  les  pauvres  mendiants  invalides.  Toute  une  série  de 
mesures  contre  la  mendicité  fait  pendant  à  ces  créations.  Mais  ffla  guerre 
ttdécliU"ée  par  Louis  \iV  à  la  mendicité  serait  restée  en  partie  sans 
ffrésultat,  écrit  M.  Joret,  si  ce  prince  n'avait  rencontré  le  concours  le 
ff  plus  actif  de  la  part  de  plusieurs  membres  de  la  Société  de  Jésus  n,  en 
particulier  du  P.  Guevarre,  à  qui  est  consacrée  cette  étude.  Le  P.  Gue- 
varre  a  contribué  à   la  fouilation  d'un  grand  nond)re  d'établissements 


—  398  — 

liospilaliers  dans  le  midi  de  la  France,  Il  fil  à  la  mendicité  une  guerre 
énergique,  lutta  contre  ceux  qui  de'claraient  hautement  que  c'est  un 
droit  natm'el  aux  pauvres  de  demander  Taumône  et  une  œuvre  me'ri- 
toire  aux  gens  aises  de  la  leur  donner.  Il  alla  plus  loin  :  il  obtint  de  l'ar- 
chevêque d'Aix  une  ordonnance  cpii  enjoignait  aux  confesseurs  de  dé- 
tendre de  donner  l'aumône  aux  mendiants  publics. 

i-rLa  biographie  du  P.  Guevarre  et  le  récit  de  son  œuvre,  puisés  à  des 
sources  manuscrites,  pleins  de  faits  nouveaux,  intéresseront  vivement 
tous  ceux  qui  s'occupent  de  i'Iiistoire  du  paupérisme  en  France,  soit 
qu'ils  approuvent  purement  et  simplement  les  procédés  et  les  idées  de 
Louis  XIV  et  des  Pères  Jésuites  qui  l'aidèrent  dans  son  œuvre,  soit 
qu'ils  se  rangent,  avec  certaines  précautions  et  réserves,  du  côté  des 
pauvres  mendiants  qui  ne  veulent  pas  être  enfermés,  et  qu'ils  acceptent 
en  principe  la  doctrine  des  recteurs  de  la  Chai'ité  d'Aix  et  des  autres 
mécontents  qui  croyaient  au  ffdroit  des  pauvres». 

ffLe  travail  de  M.  Joret  a  paru  dans  une  excellente  revue  d'érudition 
de  fondation  récente,  les  Annales  du  Midi. y 

M.  Le  Blaxt  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ffM.  l'abbé  Batiflfol,  à  qui  l'Académie  a  décerné,  il  y  a  deux  ans,  le 
prix  ordinaire  pour  son  mémoire  sur  la  Bibliothèque  de  Photius,  pour- 
suit, dans  les  manuscrits  grecs,  ses  utiles  recherches.  Il  vient  de  publier, 
sous  le  titre  de  Studia  patristicn ,  un  premier  fascicule  d'un  recueil  qu'il 
a  l'honneur  d'offrir  h  l'Académie  (Paris,  1889,  in-8°). 

ffCe  fascicule  contient,  d'après  des  manuscrits  du  Vatican,  le  texte  grec 
entier  du  Livre  de  la  prière  d'Aseneth.  Connu  d'abord  par  des  fragments 
traduits  en  latin  qu'eu  a  donnés  entre  autres,  et  le  premier,  Vincent  de 
Beauvais,  ce  document  est  im  développement  apocryphe  et  légendaire 
du  verset  de  la  Genèse  :  rrPharaon  donna  pour  femme  à  Joseph  Ase- 
rrneth,  fille  de  Putiphar,  prêtre  de  On.ii  Aseneth  est  une  vierge  jeune  et 
belle ,  élevée  dans  la  religion  de  l'Egypte.  Son  père  la  destine  à  Joseph. 
Comme  le  veut  la  loi  du  peuple  juif,  celui-ci  refuse  d'abord  de  s'unù-  à 
une  femme  étrangère;  mais  Putiphar  lui  dit  :  rr Aseneth  n'est  pas  une 
ffétrangère;  elle  est  fa  sœur.»  Et  sur  cette  parole  mystérieuse,  Joseph 
la  prend  pour  épouse.  Quelques  années  après,  le  fils  de  Pharaon  s'éprend 
d'elle:  il  veut  l'enlever;  mais  Benjamin  le  tue  d'une  pierre  au  front, 
comme  David  a  tué  Goliath,  et,  après  la  mort  de  Pharaon,  Joseph  de- 
vient roi  d'Egypte.  Dans  ce  petit  roman  se  dégage  une  partie  mystique. 
Si  Joseph  épouse  Aseneth,  c'est  que  Dieu  a  envoyé  un  ange  à  la  jeune 
idolâtre  pour  lui  faire  manger  le  pain  de  vie,  boire  le  calice  de  bénédic- 


I 


—  399   — 

lion.  Coinnic  los  iiiilios  clircUcns,  elle  a  groûlé  au  niiol  célesle  dont  le 
paifuiu  est  comme  au  souffle  de  vie,  et  l'ange  lui  a  dit:  ffTa  jeunesse 
ffsera  éternelle,  ta  beauté  déliera  les  atteintes  du  temps  et  tu  seras  comme 
(fune  ville  rorte.i  Joseph  et  Aseneth  sont,  à  coup  sûr,  de  pures  abstrac- 
tions. 

n-La  jeune  vierge  n'esl-elle  pas  TEglise  et  Joseph  n'est-il  point  une 
ligure  du  Christ?  Telle  est  la  question  que  se  pose  le  savant  ecclésias- 
tique et  qu'il  me  paraît  avoir  résolue.  Nous  retrouvons  ici  l'union  si 
souvent  proclamée  par  les  anciens,  celle  du  Seigneur  et  de  l'Eglise.  L'un 
des  docteurs  qui  la  célèbrent,  saint  Pierre  Chrysologue,  insiste  en  même 
temps  (sermon  xi.vi)  sur  le  sens  symbolique  de  la  figure  de  Joseph 
vendu,  sortant  de  la  citerne,  nourrissant  le  peuple,  comme  le  Christ  a 
miraculeusement  nourri  les  foules,  a  été  vendu  par  Judas,  et  est  sorti 
vivant  de  son  tombeau.  Telle  paraît  être  une  des  raisons  qui  dans  l'an- 
tique iconographie  chrétienne  ont  donné  à  l'histoire  de  Joseph  une  place 
de  quelque  inqDortance.  Le  travad  de  M.  Batiffol  fait  honneur  à  son  éru- 
dition .  comme  h  son  habileté  d'helléniste.» 

M.  Breal  présente,  de  la  part  de  l'éditeur- traducteur,  D.  M.  Ausonii 
Mosella,  la  Moselle  d'Ausone,  édition  critique  et  traduction  française, 
précédées  d'une  introduction ,  suivies  d'un  commentaire  explicatif,  etc. , 
par  M.  H.  de  la  Ville  de  Mirmont,  maître  de  conférences  à  la  Faculté 
des  lettres  de  Bordeaux  (Bordeaux,  1889,  petit  in-i"). 

rr C'est,  dit  noire  confière,  une  édition  très  savante,  très  complète, 
avec  une  introduction  de  plus  de  deux  cents  pages ,  où  l'éditeur  examine 
les  différents  manuscrits,  ainsi  que  l'usage  qui  en  a  été  fait  depuis  Ugolet, 
en  1A99,  jusqu'à  Peiper,  en  1886.  Une  carte  donne  ie  tracé  géogra- 
jdnque  de  ia  Moselle,  avec  les  noms  modernes  en  regard  des  anciens. 
La  traduction  est  lidèle  et  élégante  :  le  texte  est  établi  avec  une  sûreté 
qui  fait  honneur  au  jeune  maître  de  conférences  qui  enseigne  le  lalin  dans 
la  patrie  d'Ausone.» 

i\L  Se?;art  offre ,  au  nom  de  l'auteur.  Le  Riif-Véda  et  les  origines  de  la 
mythologie  indo-européenne ,  par  M.  Paul  Begnaud  (Paris,  1889,  in-8°, 
extrait  de  la  Revue  de  l'histoire  des  religions). 

ffCe  travail  contient  plusieurs  vues  intéressantes  et  digues  d'attention. 
Je  ne  puis,  pour  ma  part,  qu'approuver  d'une  façon  générale  la  manière 
dont  l'auteur  présente  son  sentiment  sur  les  diverses  théories  en  présence 
relativement  aux  origines  mythe )l()gi([ues.  Je  lui  sais  gré  de  se  montrer 
modéré  et  circonspect  à  l'égard  des  inler[in'latioMs  mcti'orologitpies  ou 
lumineuses,  auxquelles  bien  des  excès  ont  pu  justenienl  faire  tort,  mais 


—  ZiOO  — 

qu'il  faut  prendre  garde  de  coiidannier  avec  précipilation  et  d'une  ma- 
nière absolue. 

ff  Je  remarque  surtout  deux  thèses  auxquelles  M.  Regnaud  pai'aît  atta- 
cher un  prix  pai'ticulier.  D'une  part,  pour  concilier  sa  haute  opinion  de 
l'antiquité  à  laquelle  remontent  les  hymnes  védiques  avec  les  théories  de 
Bergaigne  sur  leur  origine  sacerdotale,  M.  Regnaud  cherche  à  y  montrer 
des  éléments  très  anciens,  des  formules  très  archaïques,  qui  auraient  été 
mis  en  œuvre  à  une  époque  beaucoup  plus  récente.  D'autre  part,  il  re- 
conunande  pour  l'interprétation  verbale  des  textes  védiques  une  méthode 
étymologique,  reconstituant  le  sens  des  mots  douteux  à  la  lumière  rrdes 
rf règles  bien  constatées  de  la  sémantique-".  Malgré  la  précaution  que 
prend  M.  Regnaud  de  décourager  la  critique  en  la  prévoyant,  non  sans 
quelque  amertume,  je  suis  bien  obligé  de  faire  ici  mes  réserves.  J'ajoute 
que  la  précision  que  prêteraient  à  ces  théories  un  développrement  plus 
complet  et  des  applications  détaillées  serait  sans  doute  de  nature  à 
écarter  une  partie  au  moins  de  ces  scrupules.  A  cet  égard ,  le  cadre  parti- 
culier d'un  discours  inaugiu'al  créait  à  l'auteur  des  diÛicultés  dont  il 
faut  tenir  compte.  Je  ne  doute  pas  que,  en  donnant  une  suite  tiès  sou- 
haitable à  cette  première  étude,  M.  Regnaud  ne  marque  avec  justesse 
les  nuances  et  la  portée  exactes  de  ses  théories. 

ffDès  maintenant,  le  présent  travail  est  digne  de  sérieuse  attention. 
Sous  sa  forme  nécessairement  un  peu  générale,  il  ouvre  des  perspeclives 
intéressantes,  il  suggère  des  idées  <[ui  auront  certainement  leur  part 
d'utilité.  Je  suis  heureux  d'avoir  à  l'ollrir  à  l'Académie,  n 

SÉANCE  DU    1 1   OCTOBRE. 

Le  Secrétaire  i>erpétuel  dépose  sur  le  bureau  le  3^  fascicule  des 
Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  pour  iSSy,  mai-juin  (Paris, 
1889,  in-8"). 

Est  offert  : 

Mitteilungen  ans  der  historischcn  Litleratuv  herausgegehen  von  der  histo- 
rischeu  Gcsetlschafl  in  Berlin,  in  deren  Auftrage  redigiert  von D''  Ferdinand 
Hirsch,  17'' année,  h'  fascicule  (Berlin,  1889,  in-8°). 

M.  Alexandre  Bertr  vnd  a  la  parole  pour  deux  présentations  : 

ffj'ai  l'honneur  d'ofïi'ir  à  l'Académie,  au  nom  de  l'auteur,  M.  Buhot 
de  Kersers,  les  17"  et  18"  fascicules  de  sou  Histoire  et  statistique  monu- 
mentale du  département  du  Cher  (Bourges,  1888-1889,  in-A°). 

tfL'éloge  de  celte  publication  n'est  plus  à  faire  devant  l'Académie,  qui 


—  /.Ol  — 

a  accorde  aux  seize  premiers  fascicules  une  de  ses  médailles  d'or  (con- 
cours des  Anliquilés  de  la  France).  Le  17°  fascicule  contienl  le  canton 
d'Henricliemont,  illustré  d'une  carte  et  de  neuf  planches  gravées  à  Teau- 
forte;  le  18°  fascicule,  le  canton  de  Léré,  illustré  d'une  carte,  d'une 
planche  héliographique  et  de  quatorze  planches  gravées  à  i'eau-forte.  Les 
dessins  comme  le  texte  sont  de  M.  Buhot  de  Kersers. 

rrC'ost  assez  dire  que  le  zèle  de  l'auteur,  encouragé  par  l'Académie, 
ne  s'est  pas  ralenti. 

crM.  Buhot  de  Kersers  justifie  de  plus  en  plus  la  distinction  dont  il  a 
été  honoré. 

rr  J'ai  l'honneur  de  déposer  aussi  sur  le  bureau  de  l'Académie  xme  bro- 
chure intitulée  :  La  grotte  de  Teijjat,  gravures  magdaléniennes,  par 
M.  Perrier  du  Carne  (Paris,  1889,  in-8''). 

ffTout  ce  qui  touche  à  cette  phase  curieuse  de  notre  histoire  primitive 
est  de  nature  à  intéresser  l'Académie.  Cette  brochure  sera  bien  placée 
dans  la  bibliothèque  de  flnstitut.  ri 

M.  Jules  GnuuD présente,  de  la  part  de  M.  Ch.-Em. Ruelle,  Aaf/ao-K/oy 
^laZàypv  àiTOpiai  xolI  X'ûasis  'zsspi  tôov  'ZspwTCov  àp-^wv  sis  tov  UXiTOJvos 
UoLpp.svihy]i\  Damascii  Succcssoris  dubitaliones  et  sohitiones  de  primis  prtn- 
cipiis,  in  Platonis  Parmenidem ,  partira  secundis  curis  recensuit,  pai-- 
tim  nunc  primum  edidit  Car.  Aem.  Ruelle,  2°  partie  (Paris,  1889, 
in-8"). 

ff L'Académie  avait  des  droits  particuliers  à  l'hommage  qui  lui  est 
adressé  par  M.  Ruelle,  car  c'est  elle  qui  lui  a  fait  obtenu-  les  deux  mis- 
sions qui  ont  rendu  possible  cette  publication.  M.  Ruelle  avait  commencé 
son  travail  dès  1 866  sur  le  conseil  de  M.  Guigniaut,  à  la  mémoire  de  qui 
ce  livre  est  dédié.  Dans  sa  première  mission  à  Venise,  en  1878,  il  a  col- 
lationné  la  partie  inédite  du  Commentaire  de  Damascius  sur  le  Parménide 
de  Platon.  11  y  est  retourné  en  1882  pour  faire  le  même  travail  sur  la 
partie  qui  avait  été  publiée  par  Joseph  Kopp  en  1826.  Une  étude  atten- 
tive lui  aura  sans  doute  permis  d'améliorer  notablement,  comme  il 
l'espère,  le  texte  de  cette  première  partie. 

ffLe  volume  que  M,  Ruelle  offre  aujourd'hui  à  l'Académie  contient  la 
seconde  partie  du  De  principiis ,  celle  dont  il  est  le  premier  éditeur.  H 
s'est  hâté  de  publier  celte  partie  avant  l'autre,  afin  de  prendre  date.  La 
première  contiendra  sans  doute  une  introduction  qui  permettra  mieux 
d'apprécier  le 'travail  de  M.  Ruelle.  Dès  maintenant,  on  est  sûr,  grâce  à 
ses  longs  efforts,  d'avoir  une  édition  complète  qui  réalise  le  vœu  exprimé 
par  Otfried  Millier  en  1829  et,  en  i836,  par  M.  Eg^er.« 


—  /i02  — 

Le  Président  offre,  au  nom  de  l'auteur,  La  religion  de  Bab,  réforma- 
teur persan  du  xix'  siècle,  par  M.  Clément  Huart  (Paris,  1889,  1  vol. 
in-19  de  la  Bibliothèque  orientale  ekévirienne), 

irLe  babisme  est  une  des  manifestations  religieuses  les  plus  intéres- 
santes qui  se  soient  produites,  de  nos  jours,  dans  l'Orient  musulman  et, 
par  cela  même  que  c'est  un  événement  contemporain ,  il  est  possible  de 
l'étudier  avec  plus  de  sûreté  dans  ses  origines ,  son  développement  et  ses 
doctrines. 

r  L'opuscule  publié  par  M.  Huart  offre  un  résumé  clair  et  bien  con- 
duit de  cette  réforme  bardie  qui  a  menacé,  pendant  quelques  années,  la 
Perse  schiite  et  même  l'ortbodoxie  musulmane.  Quoique  momentanément 
étouffée,  il  me  semble  difficile  d'admettre  avec  M.  Huart  que  la  nouvelle 
religion  ait  cessé  d'exister.  Bien  au  contraire,  des  ciu-ieux  renseignements 
recueillis  sur  place,  il  y  a  deux  ou  trois  ans,  par  un  orientaliste  anglais, 
M.  Edward  Browne,  il  résulte  que  la  secte  recrute  encore  de  nombreux 
adbérents  en  Perse  et  en  Syrie.  11  est  vrai  qu'un  scliisme  latent  s'est  ma- 
nifesté entre  les  Babi  proprement  dits  el  les  Ezeli,  adorateurs  de  Mirza 
Yabva,  surnommé /f«zre;e  czel,  c'est-à-dire  rrla  majesté  éternelle  ";  mais 
il  serait  téméraii'e  de  conclure  de  ce  fait  que  la  doctrine  prêcbée  par  le 
Bab  est  menacée  d'une  mort  procbaine. 

ffAu  surplus,  M.  Huart  ne  s'occupe  pas  de  ce  que  sera  la  secte,  mais 
surtout  de  ce  qu'elle  a  été  dans  sa  période  d'éclosion.  Son  travail  est  di- 
visé en  deux  parties.  Dans  la  première,  il  retrace  Tbistoire  du  Bab,  sa 
prédication,  son  supplice  et  les  troubles  qui  ensanglantèrent  la  Perse 
jusqu'à  l'année  1862.  Pour  ce  résumé  bistorique,  il  s'est  borné  à  repro- 
duire, en  l'abrégeant,  le  récit  si  émouvant  donné  par  le  comte  de  Gobi- 
neau. Mais,  grâce  à  un  basard  favorable,  M.  Huart  est  devenu  possesseur 
d'un  certain  nombre  de  documents  babi  qu'il  a  insérés  dans  la  seconde 
partie  de  son  livre.  11  en  traduit  quelques  fragments  et  signale  l'analogie 
qu'ils  présentent,  par  la  forme  extériem'e  et  le  style,  avec  le  Coran  de 
Mabomet  et,  pour  le  fond,  avec  les  doctrines  des  Ismaéliens  et  desDiiizes 
el  aussi  avec  les  rêveries  des  Soulis.  Il  y  a  là,  en  effet,  tout  un  fonds  de 
vieilles  idées  mazdéennes  et  gnostiques  rajeunies  au  contact  de  la  civili- 
sation moderne,  (jui  offriraient  un  sujet  de  recbercbes  des  plus  intéres- 
santes. Létude  en  seiait  d'ailleurs  facilitée  par  la  lecture  de  documents 
émanant  du  Bab,  que  ses  partisans  dérobent  aux  yeux  des  profanes  et 
qui  sont  venus  depuis  peu  enricbir  la  Bibliollièque  nation&le  et  le  Musée 
britannique.  L'essai  de  M.  Huart  aura  eu  au  moins  le  mérite  d'attirer 
l'attention  sur  ce  problème  si  curieux  et  d'en  signaler  le  haut  intérêt. 


—  ^03  — 

non  senlemont  pour  riiisloire  de  la  civilisalion  en  Orient,  mais  aussi 
pour  rétude  des  (pieslions  religieuses.^ 

Le  Pkksident  dépose  ensuite  sur  le  bureau  une  comédie  en  dialecte 
turc  azéri,  intitulée;  L'ours  cl  le  voleur  (Paris,  1889,  gr.  in-S"),  dtmt 
il  a  publié  le  texte  dans  le  volume  de  Mélanges,  oU'ert  par  TÉcole 
des  langues  orientales  au  Congrès  des  orientalistes  réunis,  cette  année,  à 
Stockholm,  (^est  un  spécimen  du  dialecte  parlé  par  les  tribus  tartares  du 
Caucase. 

SÉANCE  DU    18   OCTOBIIE. 

Est  offert  : 

Notice  biographique  de  Charles  Tardieu  ,  licencié  en  droit ,  ingénieur  des 
mines,  agriculteur,  géologue  et  chimiste  {18 io-jS8g)  [le  Puy,  1889, 
in-i  2]. 

!\I.  G.-W.  Leitner,  directeur  de  l'Institut  oriental  de  Woking  (Grande- 
Bretagne),  fait  hommage  à  l'Académie  d'une  collection  de  ses  publica- 
tions, savoir: 

Histon/  of  indigenous  éducation  in.  tlic  Panjah  since  anncxation  and 
in  188^  (Calcutta,  1889,  in-6°); 

Sélection  from  the  records  oj  thc  Puujah  govcrnment.  Section  1.  Of 
ihe  linguislic  fragments  discovcrcd  in  18'jo ,  18 y  ri  and  18'jr)  hy  G.  W. 
Leitner,  LL.  D. ,  relating  to  the  dialect  of  thc  Macadds  and  other  xvander- 
ing  tribes ,  thc  argots  ofthicves,  the  secret  trade  dialects  and  si/.slcnis  of 
native  cnjptography  in  Kalml ,  Kashmir  and  the  Punjab ,  etc.  (Lahore, 
i882,in-tbl.); 

A  detailed  anahjsis  of  Abdul  Ghafur's  dictionary  of  thc  ternis  vsed  bij 
criminal  tribes  in  the  Panjah  (Lahore,  1880,  in-fol.); 

A  sketch  of  the  Changars  and  of  their  dialect  (Lahore,  t88o,  in-fol.); 

Appendix  to  n  Changars -n  and  nLinguistic  fragments  n.  Words  and 
phrases  illustrating  the  dialects  of  the  Samé  and  Me,  as  also  of  dancers, 
mirnsis  and  dâms  (Lahore,  1  88'^  ,  in-fol.); 

l'Ile  llunza  and  Nagyr  handbook;  being  an  introduction  to  a  Icnoirledge 
qf  the  languages,  races,  and  countries  of  Hunza,  Nagyr,  and  a  part  of 
Yasin,  1"  partie  (Calcutta,  1889,  in-''»"); 

Plus  des  journaux  critiques,  en  sanscrit  et  en.arabe,  publiés  par  Tln- 

slilul  oriental  de  Woking,  et  des  photographies  repi «'sentant  les  Tribus 

de  rilinduLush  et  les  Sculptures  gréco-bouddhiques  trouvées  au  delà  de  la 

frontière  du  Pendjab  par  le  IV  Leitner  et  tictuellement  déposées  au  Musée 

oriental  de  Woking. 


—  àOli  — 

Le  Président  offre,  au  nom  de  l'auteur,  un  Précis  d'histoire  juive ,  de- 
puis les  origines  jusqu'à  l'époque  persane  (v''  siècle  aimnt  J.-C),  par 
M.  Maurice  Vernes  (Paris,  1889,  in-8°). 

ffDans  ce  livre,  M.  Vernes  rejette  les  principaux  résultats  ge'nérale- 
ment  acceptés  par  les  e'coles  critiques  qui  ont  l'ait  de  l'exégèse  biblique 
le  but  de  leurs  recherches.  11  s'est  tracé  un  plan  particulier  en  ce  qui 
concerne  l'origine  des  textes  bibliques  et  l'emploi  qu'il  faut  faire  de  ces 
textes  pour  reconstituer  l'histoire  juive  ancienne. 

ff Rompant  en  visière  avec  ses  devanciers  les  plus  autorisés,  tels  que 
MM.  Pœuss,  Kuenen  et  Welhausen,  l'auteur  ne  vent  plus  de  la  division 
de  cette  histoire  en  trois  grandes  périodes  :  époque  ancienne,  caractérisée 
parle  polythéisme  matérialiste  ;  époque  moyenne,  où  l'idée  religieuse  et 
libérale  domine  avec  les  prophètes;  époque  moderne  (du  \'  au  n"  siècle 
avant  J.-C),  oii  le  ritualisme  sacerdotal  triomphe  du  prophétisme, 

ff  A  cette  division  si  clairement  démontrée  par  l'ensemble  de  l'histoire 
juive,  M.  Vernes  oppose  tout  un  système  qui  lui  est  propre  et  qui  peut 
se  résumer  ainsi  :  pour  trouver  l'époque  do  la  composition  d'une  des 
grandes  œuvres  de  la  littérature  biblique,  il  faut  partir  de  la  date  rela- 
tivement moderne  où  l'existence  de  ces  œuvres  est  incontestable,  et 
remonter  ensuite  le  cours  des  siècles  en  recherchant  les  circonstances 
propres  à  la  rédaction  de  chaque  écrit  en  particulier.  En  second  lieu , 
sans  méconnaître  absohunent  les  interpolations  qui  s'y  sont  introduites, 
M.  Vernes  s'efforce  de  prouver  que  les  grandes  sections  de  l'Ancien  Tes- 
tament se  rehent  entre  elles  par  un  caractère  commun ,  qui  est  l'unité  de 
composition  et  l'unité  de  date,  et  qu'elles  doivent  être  considérées  comme 
l'œuvre  des  écoles  théologiques  juives  cpii  florissaieut  entre  le  v"  et  le 
ni°  siècle  avant  notre  ère.  11  faut  y  reconnaître  aussi  l'idée  juaîtresse  qui 
est  celle  du  monothéisme  pur  et  de  la  suprématie  religieuse  et  morale 
d'Israël.  EnGn,  là  où  l'exégèse  moderne  retrouve  des  faits  réels  cachés 
sous  le  voile  de  la  légende  ou  du  mythe,  l'auteur  du  Précis  voit  une 
œuvre  d'imagination  d'une  haute  portée  spirituaiisle,  mais  presque  tou- 
jours sans  fondement  historique.  11  ne  dépasse  pas  d'ailleurs  l'époque 
persane,  c'est-à-dire  celle  où  s'arrête  le  canon  des  livi-es  hébreux. 

ffEn  résumé,  cet  ouvrage,  qui  a  trop  souvent  le  caractère  d'une  thèse 
|)lulùt  que  celui  d'un  livre  d'histoire,  soulèvera,  je  le  crois,  de  formi- 
«lablcs  objections,  sans  affaiblir  sensiblement  l'autorité  des  travaux  qui 
l'ont  préc('dé.  Je  n'ai  pas  qualité  pour  prendre  position  dans  le  débat  et 
j'ai  dû  me  borner  à  exposer,  en  quelques  mots,  le  système  très  ingé- 
nieux et  très  pcrsoimel  de  M.  Vernes,  sans  me  porter  garant  de  sa  soli- 


—  ^Of)  — 

(li(«^.  Je  ne  dniile  pas,  d'iiilleurs,  que  ses  adversaires  eux-m<îmes  ne  s'ac- 
cordent à  y  reconnaître  un  travail  soutenu,  l'examen  coiisciencioux  des 
sources  et  la  recherche  perscivërante  et  sincère  de  la  véritd.  n 

SÉAINCE   DU   23   OCTOBRE. 

(Séance  avancée  au  inorcrodi,  à  cause  de  la  séance  publique  annuelle 
de  r Institut,  fixée  au  9  5  octobre.) 

Est  offert  : 

Compte  rendu  sommaire  d'une  transcription  phonétique ,  offert  aux  mem- 
bres du  viii'  congrès  des  orientalistes  (Stockholm,  1889,  in-8°). 

M.  Delisle  offre  un  volume  intitulé  :  Voltaire,  bibliographie  de  ses 
œuvres,  par  M.  Georges  Bongosco,  tome  111  (Paris,  1889,  in-8°). 

rfM.  Bengesco  a  déjà  publié  snr  la  bibliographie  voltairienne  deux 
volumes  qui  lui  ont  assuré  une  place  distinguée  parmi  les  bibhographes 
de  notre  temps.  Le  nouveau  volume  qu'il  offre  aujourd'hui  à  l'Académie 
est  uniquement  consacré  à  la  correspondance  imprimée  de  Voltaire.  Il  a 
soumis  à  un  examen  critique  les  dix  mille  pièces  dont  elle  se  compose 
aujourd'hui.  Il  a  i-endu  un  compte  détaillé  de  la  façon  dont  les  différents 
éditeurs  ont  accompli  leur  tâche ,  et  a  présenté  sous  une  forme  très  claire 
une  foule  d'observations  qui  rendront  très  facile  la  préparation  de  l'édition 
définitive  d'un  recueil  si  important  pour  l'histoire  et  la  littérature  du 
xvni°  siècle. 

ffCe  volume  est  le  complément  indispensable  de  toutes  les  éditions  de 
la  correspondance  de  Voltaire." 

SÉANCE   DU   3o   OCTOBRE. 
(Séance  avancée  au  mercredi,  à  cause  de  la  fêle  de  la  Toussaint.) 

M.  Doniol,  directeur  de  l'huprimerie  nationale,  adresse  en  hommage 
à  l'Académie  un  volume  que  l'Imprimerie  vient  de  publier  comme  im- 
pression gratuite,  avec  des  soins  particuliers  d'édition  :  Catalogues  des 
manuscrits  grecs  de  Fontainebleau  sous  François  /""  et  Henri  II ,  publiés 
et  annotés  par  M.  Henri  Omont  (Paris,  1889,  gr.  in-A"). 

M.  Delisle,  présentant,  au  nom  de  l'auteur,  le  même  volume,  dit: 
frLe  volume  que  j'ai  i'hoimeur  d'offrir  à  l'Académie  est  un  chef-d'œuvre 
typographique  qu'on  a  pu  admirer  h  l'Exposition  universelle  et  que  l'Im- 
primerie nationale,  justement  jalouse  de  sa  vieille  n'putalion,  a  exécuté 
en  grande  partie  avec  les  types  que  Claude  Garamond  grava  au  xvi*  siècle 
sous  la  direction  de  Rob'rt  Estienne.  Mais  l'exécution  matérielle  est,  h 


—  âOG  — 

nos  veux ,  le  moindre  rae'rite  du  volume  que  M.  Omonl  vient  de  faire  el 
qu'il  a  intitulé  :  Catalogues  des  manuscrits  grecs  de  Foniainehleau  sons 
François  1"  et  Henri  IL  On  trouvera  dans  ce  livre  splendide  une  édition 
correcte  des  catalogues  des  manuscrits  grecs  que  les  rois  François  I"  et 
Henri  II  avaient  réunis  dans  lem*  palais  de  Fontainebleau,  au  nombre  de 
cinq  cent  soixante.  Ces  catalogues,  œuvres  de  Constantin  Pala?ocappa  et 
d'Ange  Vergèce,  nous  sont  parvenus  sous  des  formes  différentes  dans 
des  manuscrits  qui  ne  sont  pas  tous  à  la  Bibliotbèque  nationale, puisque 
l'éditeur  a  dû  recourir,  et  non  sans  profit,  à  des  exemplaires  conservés 
aujourd'hui  à  Leyde,  à  Vérone  et  à  Venise.  Au  texte  des  deux  catalogues 
principaux,  M.  Omont  a  joint  des  textes  de  moindre  impoi'tance,  el  un 
catalogue  des  manuscrits  grecs  qu'avait  recueillis  Guillaume  Pélicier  pen- 
dant son  ambassade  à  Venise  (i539-i5^2)  et  dont  la  plupart  sont 
aujourd'hui  hors  de  France.  Tous  ces  documents  sont  de  la  plus  grande 
utilité  poiu-  l'histoire  de  Thellénisme  en  France  pendant  la  première 
moitié  du  xvi'  siècle;  mais  ce  qui  doit  avant  tout  être  signalé  à  1  Aca- 
démie, c'est  la  précision  avec  laquelle  l'auteur  a  retracé  les  origines  de 
notre  fonds  grec;  c'est  le  soin  et  la  perspicacité  dont  il  a  fait  preuve  en 
identifiant  de  la  façon  la  plus  rigoureuse  chacun  des  volumes  décrits 
dans  les  catalogues  de  Palaeocappa  et  de  Vergèce.  Il  les  a  tous  reconnus 
d'après  des  indices  variés,  qui  ne  laissent  jamais  place  au  moindi-e 
doute.  Le  résultat  de  ce  travail  très  délicat  est  de  nature  à  satisfaire  les 
bibliopbiles  qui  s'intéressent  aux  collections  de  la  Bibliothèque  natio- 
nale. M.  Omont  a  retrouvé  tous  les  manuscrits  grecs  dont  la  réunion 
était  un  des  ornements  du  palais  de  François  I"  et  de  Henri  II.  Les  cinq 
cent  soixante  manuscrits  grecs,  enregistrés  dans  les  catalogues  de  Pa- 
laeocappa et  de  Vergèce,  se  sont  tous  retrouvés  sur  les  rayons  de  la 
Bibliothèque  nationale;  un  seul  a  manqué  à  l'appel  de  M.  Omont,  cjui  a 
fini  par  le  découvrir  à  l'Université  de  Cambridge.» 

M.  J.  Gay-Lussac  adresse  à  l'Académie,  par  les  soins  de  M.  Maspero, 
une  Carte  élémentaire  de  l' Egypte,  dressée  sous  sa  direction  par  M.  J.-A. 
Perrichon. 

Sont  offerts  : 

Epigraphische  Denkmàler  aus  Arahien  [nacli  Abklalschen  und  Copien 
des  llerrn  Professor  D'  Julius  Euting  in  Slrassburg),  par  M.  le  docteur 
D.-H.  Millier,  professeur  à  l'Université  de  Vienne  (Vienne,  1889,  iu-/»°, 
extrait  des  Denkschriften  de  l'Académie  impériale  de  Vienne); 

Glossen  zum  Corpus  inscriplionum  semiticarum,  par  le  même  auteur 
(sans  lieu  ni  date,  in-8°); 


—  407  — 

Le  berceau  de  Christophe  Colomb  et  la  Corse,  par  M.  l'abbé  Casablanca 
(Paris,  1889,  in-8°,  extrait  de  la  Revue  du  monde  catholique). 

M.  Sime'on  Luce  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

ff  J'ai  rhonneur  d'oiïrir  à  l'Académie,  au  nom  de  M.  Armand  Gasté, 
professeur  à  la  Facidté  des  lettres  de  Caen ,  une  brochure  intitulée  :  Les 
insurrections  populaires  en  hiisse  Normandie  au  \v"  siècle ,  pendant  l'occu- 
pation anglaise,  et  la  question  d'Olicier  Basselin  ((îaen,  1889,  in-8°). 

rr Cette  étude  comprend  deux  parties.  Dans  la  première,  qui  a  été  lue 
en  séance  de  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques,  l'auteur  n'a 
pas  de  peine  à  prouver,  par  le  témoignage  des  chroniqueurs  du  xv'  siècle 
et  aussi  par  des  mentions  contenues  dans  des  pièces  d'archives ,  que  l'oc- 
cupation de  la  Normandie  par  les  Anglais  a  provoqué  deux  grands  mou- 
vements insurrectionnels,  d'abord  des  paysans  du  Bessin  et  du  pays  de 
Caux,  en  i434,  ensuite  des  habitants  du  Val  de  Vire,  du  Cotentin,  du 
Bessin  et  du  Bocage,  sous  la  direction  de  Boschier,  en  i/i36,  sans 
compter  une  foule  de  prises  d'armes  locales  de  moindre  importance.  I^a 
démonstration  de  M.  Gasté ,  dirigée  surtout  coiitre  un  érudit  de  pro- 
vince qui  avait  soutenu  la  thèse  contraire  avec  beaucoup  de  légèreté, 
nous  semble  tout  à  fait  péremptoire.  Dans  la  seconde  pai'tie  de  son 
étude,  consacrée  à  Olivier  Basselin,  le  savant  professeur,  sans  marcher 
sur  un  terrain  aussi  solide  que  dans  la  première  partie,  n'en  établit  pas 
moins  par  de  sérieux  arguments  que  nous  avons  tout  lieu  de  croire  à  la 
réalité  historique  du  gai  chanteur  célébré  dans  la  fameuse  complainte 
des  Compagnons  du  Val  de  Vire,  et  il  montre  très  bien  comment  s'est 
formée  graduellement,  par  l'intermédiaire  du  Hecueil  de  chansons  d'Alain 
Lotrian,  oîi  cette  complainte  a  été  reproduite  en  i5i3  avec  addition  d'un 
couplet,  et  surtout  de  la  chanson  bachique  dite  de  Farin  Z)«^a* ,  attribuée 
à  Jean  le  Houx,  la  légende  d'un  Basselin  uniquement  occupé,  non 
point  de  faire  la  guerre  aux  Anglais,  mais  de  boire  et  de  rire. n 

Ont  encore  été  offerts  : 

Annales  du  commerce  extérieur,  année  1889,  9' et  10°  fascicules  (Pans, 
1889,  in-8'); 

Atti  délia  Reale  Accculemia  dei  Lincei ,  vol.  \,  fasc.  7  (Home,  1889, 
gr.  in-8'); 

Biblioteca  naùonale  centrale  di  Firente.  Bollettino  délie  pubblicationi 
itatiane,  n"'  88-91  (Florence,  i889,in-8°); 

Biblioteca  nationale  centrale  Vittorio  Emamiele  di  Borna.  Bollettino  dellc 

xvH.  a8 


—  /J08  — 

opet-c  moderne  straniere,  <  te,  vol.  111,  1888,  index;  vol.  IV,  1889,  n"  3 
(Rome,  1889,  in-8°.); 

Bibliothèque  de  V École  des  chartes,  t.  L,  k'  et  5'  livraisons  (Paris, 
1889,  in-8°); 

Bulletin  de  l'Académie  d'Hippone ,  n°  28  (Rome,  1889,  in-8''); 

Bulletin  de  l'Institut  êgjiptien,  'i'  série,  n"  9,  année  1888  (le  Caire, 
1889,  in-8"); 

Bulletin  de  la  Société  archéologique  et  historique  de  l'Orléanais,  tome  1\ , 
11°  1 38  (Orléans,  1889,  in-8°); 

Bulletins  de  la  Société  des  antiquaires  de  l'Ouest,  2'  et  3'  trimestres 
(le  1889  (Poitiers,  in-S"); 

Cochinchine  française.  Excursions  et  reconnaissances,  t.  XIV,  a"  3i 
(Saigon,  1889,  in-8"); 

Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité ,  par  MM.  Georges  Perrot,  membre 
(le  rinsliliit,  et  Charles  Chipiez,  livraisons  253-26i  (Paris,  1889, 
gr.  in-8"); 

Rcvista  archeoluffica ,,\)uh\iée  par  A.-C.  Rorges  de  Figueiredo,  vol.  Ul , 
h"  8  (Lisbonne,  1889,  in-8"); 

Revue  africaine,  n°  198  (Alger,  1889,  in-8'); 

Revue  archéologique ,  juillet-aoiit  1889  (Paris,  in-8°); 

Revue  des  questions  historiques,  •ik'  aimée,  92'  livraison  (Paris,  1889, 
in-8°); 

Bévue  épigraphique  du  midi  de  la  France,  n°  5 A  (Vienne  [Isère], 
1889,  in-8°); 

Bévue  numismatique ,  dirigée  par  MM.  Anatole  de  Rarthélemy,  Gus- 
tave SclJumberger,  membres  de  l'Institut,  et  Ernest  Rabelon,  3°  série, 
tome  VII,  3"  trimestre  de  1889  (Paris,  in-8''); 

Sitzungsberichte  der  pkilosophisch-philologischeu  und  historischen  Classe 
der  h.  b.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Mànchen,  année  1889,  n°  II 
(Munich,  in-8''); 

Società  reale  di  Napoli.  Atti  délia  Reale  Accademia  di  archeologia,  let- 
tereet  belle  arti,  vol.  Xlll,  1887-1889  (Naples,  1889,  in-/i°); 

Société  centrale  des  architectes  français.  Bulletin  mensuel,  6"  série, 
vol.  VI,  II- /1-6  (Paris.  1889.  in-H"). 


(.OMPTES    in:\DUS   DES  SEANCKS 

DE 

L'ACADÉMIE    DES    INSCRIPTIONS 

ET  BELLES-LETTRES 

PENDANT   L'ANNÉE  1889. 


COMPTES  RENDUS  DES  SEANCES. 
INOVEMBRK-DÉCEMBRK. 


PRESIDENCE  DE  M.  BARBIER  DE  MEYNARD. 


SÉANCE  DU   8   NOVEMBRE. 

Le  Président  annonce  en  ces  termes  la  mort  de  M.  Cobet, 
associe'  e'tranger  de  TAcade'mie  : 

ffj'ai  un  nouveau  deuil  à  annoncer  à  TAcadémie  :  M.  Cobet, 
professeur  honoraire  à  l'Université  de  Leyde,  vient  de  mourir  à 
1  âge  de  soixante-seize  ans  :  c'est  le  troisième  associe'  e'tranger 
qui  nous  est  enlevé'  en  moins  de  six  mois,  La  mort  de  M.  Cobet 
est  une  perte  cruelle  pour  la  philologie  grecque,  à  laquelle  il 
avait  consacré  sa  vie  entière  et  qu'il  a  enrichie  de  travaux  qui 
préserveront  son  nom  de  l'oubli.  Je  n'ai  pas  qualité  pour  les 
apprécier,  mais  je  sais  et  nous  savons  tous  en  quelle  estime  le 
public  savant  tient  les  excellentes  éditions  de  Diog^ne  Laerce,  de 
Denys  d'Halicarnasse,  de  VAnabase  de  Xénophon,  et  surtout  la 
revue  Mnémnsyne,  cette  mine  d'observations  criti(jues,  qui  ont 
sufïi  pour  londer  la  réputation  d'un  helléniste  consommé. 

frM.  Cobet  nous  appartenait  comme  correspondant  depuis  1 87 1 
et  il  avait  été  élu  associé  étranger  on  1876.  L'Académie  regrette 

XVU.  ,.g 


IHI-niurRiK    •*!• 


—  AlO  — 

sincèrement  la  perte  de  ce  savant,  dont  la  vie  studieuse  et  entiè- 
rement voue'e  au  culte  de'sinte'resse'  des  lettres  perpe'tuait  les  tra- 
ditions de  ces  grands  e'rudits  de  la  Renaissance  et  du  xvif  siècle 
dans  un  pays  ou  la  culture  classique  a  toujours  e'te' en  honneur,  w 

Le  SegRiÉtaire  perpétuel  donne  lecture  d'une  lettre  par  la- 
quelle M.  Berthelot,  secrétaire  perpe'tuel  de  l'Académie  des 
sciences,  prie  la  Compagnie  de  vouloir  bien  désigner  quelques- 
uns  de  ses  membres  pour  être  adjoints  à  une  Commission  nom- 
mée par  l'Académie  des  sciences,  en  vue  d'examiner  un  mémoire 
qui  lui  a  été  adressé  par  M"""  Richenet-Bayard,  sur  La  véritable 
situation  d'Alesia,  en  Auvei'gne. 

L'Académie  désigne  MM,  Deloche,  Alexandre  Bertrand  et 
Longnon. 

Sont  adressés  à  l'Académie  : 

1°  Pour  le  concours  des  antiquités  de  la  France  : 

Epigmphie  romaine  du  Poitou  et  de  la  Saintonge,  avec  cinquante- 
six  planches,  par  M.  Emile  Espérandieu  (Paris  et  Melle,  1889, 

in-8°); 

Le    Havre  d'autrefois,   ouvrage    publié    sous    la    direction    de 

M.  A.-G.  Lemalc  (le  Havre,  i883,  in-/i°); 

■  9"  Pour  le  concours  La  Fons-Mélicocq  : 

Les  Clabault,  famille  înunicipale  amiénoise ,  i3ùg-i53g ,  par 
M.  A.  Janvier  (Amiens,  1889,  m-k°); 

3°  Pour  le  prix  de  numismatique  (Duchalais)  : 

Répertoire  des  sources  imprimées  de  la  numismatique  française ,  par 
MM.  Arthur  Engel  et  Raymond  Serrure  :  supplément  et  table 
(Paris,  1889,  in-8°). 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  le  Président  annonce  que 
l'Académie  a  décidé  d'attribuer  au  R.  P.  Augouard,  provicaire 
apostolique  du  Congo  français,  une  somme  de  6,5oo  francs  à 
pi'élever  sur  les  arrérages  de  la  fondation  Benoît  Garnier.  Le 
R.  P.  Augouard  devra  examiner  les  diverses  questions  de  géo- 
graphie, d'ethnographie  et  de  linguistique  que  peut  soulever 
l'élude  des  populations  établies  sur  les  rives  de  l'Oubangui  et 
du  haut  Ogowé. 


—  /l  1 1  — 

M.  Georf^es  Perrot  termine  sa  lecture  sur  l'art  antique  do  la 
Perse. 

Il  s'attache  à  démontrer  que  l'art  est  reste',  en  Perse,  pure- 
ment otriciel,  que  ça  ét('  l'art  d'une  dynastie  et  d'une  cour,  non 
point  un  art  vraiment  national.  Il  se  demande  si  des  Perses  de 
naissance  ont  pris  quelque  part  à  l'e'rection  de  ces  e'difices  et  à 
Fexe'cution  de  ces  sculptures.  L'hypothèse  qui  se  pre'sente  à  son 
esprit,  comme  celle  qui  re'pond  le  mieux  à  l'ensemble  des  faits 
observés,  c'est  celle  d'un  e'tranger,  grec  ou  phe'nicien,  qui,  charge' 
par  Darius  de  la  direction  de  ses  grandes  entreprises  monumen- 
tales, aurait  re'uni  dans  une  synthèse  intelligente  tous  ceux  des 
éléments  des  arts  antérieurs  ou  contemporains  qui  paraissaient 
le  plus  aptes  à  entrer  dans  un  ensemble  tel  que  celui  dont  la 
fantaisie  royale  avait  conçu  la  pensée  et  tracé  le  plan. 

M.  Oppert,  en  rendant  hommage  à  l'intéressante  communi- 
cation de  son  savant  confrère,  présente  une  observation  sur  un 
simple  détail.  M.  G.  Perrot  identifie  les  ruines  de  Mourghàb  avec 
celles  de  Pasargades,  ville  du  couronnement  des  rois  perses.  Cette 
assimilation,  que  Lassen  a  déjà  combattue,  il  y  a  cinquante  ans, 
par  des  raisons  convaincantes,  ne  peut  être  maintenue.  Pasargades 
se  trouvait  dans  le  sud-est  de  la  Perse,  à  cent  lieues  de  Mour- 
ghàb, près  de  la  ville  moderne  de  Darabdjerd,  ainsi  que  M.  Op- 
pert croit  l'avoir  démontré  dans  une  lecture  faite  à  l'Académie. 

M.  Georges  Perrot  communique,  de  la  part  de  M.  de  Vogiié, 
une  note  du  P.  Delattre  sur  des  fouilles  qu'il  a  faites  cet  été  à 
Byrsa.  Des  tombeaux  de  l'époque  phénicienne  ont  été  ouverts; 
on  y  a  recueilli  des  objets  intéressants,  une  amphore  en  bronze 
doré,  des  scarabées  de  style  égyptisant,  des  figurines  en  terre 
cuite  qui  ont  cet  intérêt  d'apj)artenir  à  une  série  représentée 
jusqu'ici  seulement  par  des  figures  recueillies  en  Syrie  et  à 
Rhodes.  Cette  série,  qui  a  été  étudiée  d'abord  par  Longpérier, 
puis  par  M.  Heuzey,  est  celle  de  ces  statuettes  qui  sont  encore 
asiatiques  par  les  attributs  comme  par  le  costume,  mais  oii  l'on 
sent  déjà  l'influence  de  l'art  grec  et  ce  que  M.  Heuzey  appelle  le 
«choc  en  retour''  de  rhelh-nismo. 

M.  Cartailhac  présente  à  l'Acadc'mie  deux  bijoux  d'or,  un  bra- 

39- 


—  /il2  — 

celet  el  un  collier,  qui  sont  la  propriété  du  Musée  de  Toulouse  et 
qui  proviennent  du  village  de  Lasgraïsses  (Tarn).  Le  collier,  par 
certains  détails,  rappelle  d'autres  colliers  d'or  trouvés  autrefois 
dans  la  même  région;  les  uns  et  les  autres  sont  évidemment 
gaulois.  Le  bracelet  offre  un  caractère  plus  original.  Rien,  dans 
ce  qu'on  connaît  des  parures  du  reste  du  territoire  gaulois,  ne 
saurait  être  comparé  à  ces  beaux  produits  de  l'industrie  antique 
des  bords  du  Tarn. 

M.  Cleumoint-Ganneau,  continuant  ses  recberches  sur  la  géo- 
graphie de  la  Palestine  au  moyen  âge,  présente  diverses  remar- 
ques relatives  au  fleuve  de  Jaffa,  appelé  ^Audja  ou  Nahr  el-'Audja. 

La  "^Audja  est  désignée  abusivement,  dans  des  documents  de 
l'époque  des  Croisades,  sous  le  nom  de  fleuve  Eleuthérus.  Ce 
nom  ne  convient  qu'à  un  fleuve  célèbre  (le  Nahr  el-Kebir  actuel), 
qui  se  jette  dans  la  mer  bien  loin  de  Jaffa,  au  nord  de  Tripoli, 
et  qui  marquait  la  limite  entre  la  Syrie  septentrionale  et  la 
Phénicie  :  comment  a-t-il  été  transporté  par  les  croisés  au 
fleuve  voisin  de  Jaffa?  L'origine  de  cette  méprise  est  l'inter- 
prétation inexacte  d'un  passage  de  Flavius  Josèphc,  qui  prête  à 
l'équivoque,  et  duquel  il  semblerait  résulter,  à  première  vue, 
que  l'Éleuthérus  se  jetait  à  la  mer  entre  Jaffa  et  le  Carmel.  Les 
croisés  sont  d'ailleurs  coutumiers  de  ces  identifications  arbi- 
traires. I^lus  ou  moins  familiers  avec  les  textes  anciens,  sacrés 
et  profanes,  ils  étaient  constamment  préoccupés  de  retrouver  sur 
le  terrain  les  noms  géographiques  anciens  et  ils  le  faisaient  sou- 
vent avec  la  plus  grande  inexactitude.  C'est  ainsi  qu'ils  plaçaient 
Beisabée  à  Bcit-Djibùn  et  Antipatris  à  Arsoûf. 

La  "^Audja,  dont  le  nom  présent  est  une  simple  dénomination 
descriptive  (le  Méandre),  porte  chez  les  anciens  auteurs  arabes 
un  nom  inexpliqué  jusqu'à  présent  :  le  fleuve  d'Abou  Fotros 
ou  d'Abi  Foiros.  M.  Clermont-Ganneau  propose  de  reconnaître 
dans  ce  nom  la  transcription  de  celui  d'Antipatris  ou  Antipalros, 
ville  antique  construite  par  Hérode  dans  les  parages  de  Jaffa  et 
dont  la  position  a  soulevé  de  très  vives  controverses.  Il  en  tire 
un  argument  géographique  :  si  la  'Audja  s'appelle  le  fleuve 
d'Antip;itris.  c'est  qu'Anlipatris  devait   être  située  sur  ses  bords 


—  ^il3  — 

ou  à  sa  source.  Ainsi  se  frouve  excluo  du  clianip  des  conjeclures 
toute  localité  qui  ne  répond  pas  à  ces  conditions.  Cet  argument 
viendrait  à  l'appui  de  la  théorie  qui  a  proposé  de  mettre  Anti- 
palris  à  Medjdel  Yàba.  On  pourrait,  à  Tappui,  faire  valoir  un 
nouvel  argument;  un  ancien  géographe  arabe,  Yàqoût,  donne, 
ff  d'après  Ptoléméen,  dit-il,  la  longitude  et  la  latitude  de  Medjdel 
Yàba.  Or,  si  l'on  se  reporte  au  texte  grec  du  passage  correspon- 
dant de  Ptolémée,  on  n'y  trouve,  pour  représenter  Medjdel  Yàba, 
d'autre  nom  que  celui  d'Antipatris. 

M.  le  commandant  Gaston  Marmier  commence  une  commu- 
nication sur  la  situation  du  pays  biblique  d'Aram-Aaharaim,  de 
la  ville  de  Qédesch  et  du  Néharina  des  Egyptiens. 


SEANCE  DU    1  0  NOVEMBRE. 

Le  Ministre  de  l'instruction  publique  transmet  à  l'Académie 
l'estampage,  relevé  par  M.  Ledoulx,  consul  de  France  à  Jéru- 
salem, d'une  plaque  de  marbre  revêtue  d'inscriptions  cunéi- 
formes. 

Ce  document  est  renvoyé  à  l'examen  de  M.  Menant. 

Sont  adressés  à  l'Académie  : 

1°  Pour  le  concours  des  antiquités  de  la  France: 

Château-Guillaume  en  Poitou,  histoire,  mœurs  et  coutumes,  par  le 
comte  de  Beauchamp  (Paris,  i888,  in-fol.); 

Dictionnaire  des  appellations  ethniques  de  la  Fiance  et  de  ses  colo- 
nies, par  iM.  André  Rolland  de  Denus  (Paris,  1889,  in-8°); 

2"  Pour  le  concours  La  Fons-Mélicocq  : 

Statistique  de  r Ile-de-France  ou  ancienne  nation  des  Sénones  (Joi  - 
gny,  1888,  in-8°). 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret  pour  l'exanjen  des  titres 
des  candidats  présentés  aux  deux  places  d'associés  étrangers 
vacantes  par  suite  du  décès  de  MM.  de  Witle  et  Amari. 

La  séance  redevient  publique. 

Le  Président  rappelle  (ju'aucun  des  savants  dont  les  titrer 
vieiment  d'èti-e  exposés  n'ayant  posé  sa  candidature,  il  convient 


—  àih  — 

de  ne  donner  à  la  publicité'  que  les  noms  de  ceux  qui  auront  e'të 
élus. 

11  est  proce'dé  au  scrutin  pour  le  remplacement  de  AI.  le  baron 
de  Witte. 

M.  Gurtius  est  e'iu  au  deuxième  tour  de  scrutin. 

11  est  ensuite  proce'dé'  au  scrutin  pour  le  remplacement  de 
M.  Amari. 

M.  Layard  est  élu  au  premier  tour  de  scrutin. 

Ces  deux  élections  seront  soumises  à  l'approbation  du  Prési- 
dent de  la  République. 

M.  Schliemann  ayant  demandé  à  TAcadémie  de  déléguer  un 
de  ses  membres  pour  assister  aux  nouvelles  fouilles  qu'il  va  faire 
à  Hissarlik,  sur  l'emplacement  de  l'ancienne  Ilion,  M.  Croiset, 
au  nom  de  la  Commission  des  Ecoles  françaises  d'Athènes  et  de 
Rome,  consultée  au  sujet  de  cette  demande,  fait  le  rapport  sui- 
vant : 

rrLa  Commission  propose  à  l'Académie  d'accueillir  le  projet  de 
M.  Schliemann  et  de  désigner  un  délégué. 

ffLa  Commission  pourra  s'occuper  de  préparer  cette  désigna- 
tion, si  l'Académie  en  accepte  le  principe,  w 

L'Académie  adopte  la  proposition  de  la  Commission,  qui  est, 
en  conséquence,  chargée  de  désigner  un  délégué. 


SÉANCE  DU    2  2   NOVEMBRE. 
Séance  publique  annuelle  présidée  par  M.  Barbier  de  Meynard  ''>. 

ORDRE  DES  LECTURES  : 

i"  Discours  de  M.  le  Président,  annonçant  les  prix  décernés 
en  1889  et  les  sujets  de  prix  proposés; 

2°  Notice  historique  sur  la  vie  et  les  travaux  de  M.  Emile  Egger  , 
membre  ordinaire  de  l'Académie,  par  M.  Henri  Wallon,  secrétaire 
perpétuel  ; 

3°  De  quelques  jeux  populaires  dans  V ancienne  France ,  à  propos 

(')  Voir  l'AprENiiicE  n°  V  (p.  UliQ-hicj). 


—  VI  :>  — 

d'une  urdonnance  de  Charles  V,  par  M,  Siméon  Luck,  membre  de 
1  Académie. 


SEANCE  DU   29    NOVEMBRE. 

Le  Secrétaire  perpétuel  donne  connaissance  à  TAcade'mie  de 
ia  lettre  qu'il  a  reçue  de  M.  Gurtius,  et  dont  voici  la  traduc- 
tion : 

Berlin,  18  novembre  1889. 
Très  honore  Monsieur, 

J'ai  l'eçu  avec  une  véritable  gratitude  votre  lettre  du  1 5  novembre.  Je 
suis  fier  de  la  distinction  qui  m'a  e'té  faite,  et  je  signe 

Votre  tout  dévoué, 
Ernst  CcRTius. 

MiM.  Diculafoy,  Hamy  et  de  la  Borderie  écrivent  à  rAcadémie 
pour  se  porter  candidats  à  la  place  de  membre  libre,  laissée  va- 
cante par  la  mort  de  M.  Ch.  Aisard. 

Est  adressé  au  prochain  concours  des  antiquités  de  la  France: 

Glossaire  du  pays  blaisois ,  par  M.  Adrien  Thibault  (manuscrit 
de  U'^i  pages,  in-8°). 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret  pour  l'examen  des  titres 
des  candidats  au  fauteuil  de  M.  Gh.  Nisard. 


b 


séance  du   6  DÉCEMBRE. 

Le  Ministre  de  Tinstruction  publique  adresse  à  l'Acade'mie  les 
ampliations  de  deux  décrets,  en  date  des  26  et  3o  novembre, 
par  lesquels  sont  approuvées  les  e'iections  de  MM.  Layard  et  Gur- 
tius, comme  associés  étrangers,  en  remplacement  de  MM.  Amari 
elle  baron  de  Witte,  décédés. 

Sont  adressés  à  l'Académie,  pour  le  prochain  concours  des  an- 
tiquités de  la  France: 

Catalogue  des  incunables  de  la  bibliothèque  publique  de  Dijon,  par 
M.  Pellechet  (Dijon,  1888,  in-S"); 

Bibliothèque  publique  de  Versailles.  Catalogue  des  incunables  et  des 


—  AK)  — 

livres  imprimés  de  md  à  m  dix,  avec  les  marques  typographiques  des 
éditions  du  .yv^  siècle,  par  le  même  auleur  (Paris,   1889,  in-8°); 

Notes  sur  les  imprimeurs  du  Comtat  Venaissin  et  de  la  principauté 
d'Orange  et  Catalogue  des  livres  imprimés  par  eux  qui  se  trouvent  à 
la  bibliothèque  de  Carpentras,  par  le  même  auteur  (Paris,  1887, 
in-8n; 

Etude  sur  le  Kef,  par  le  lieutenant  Em.  Esperandieu  (Pans, 
1888,  in-8°); 

Une  voie  gallo-romaine  dans  la  vallée  de  TUbaije  et  passage  d'An- 
nibal  dans  les  Alpes ,  étude  historique ,  par  M.  le  D""  Ollivier  (Digne, 
i889,in-8°); 

Les  quatre  âges  de  V homme,  traité  moral  de  Philippe  de  Navarre, 
publie'  pour  la  première  fois,  d'après  les  manuscrits  de  Paris,  de 
Londres  et  de  Metz,  par  M.  Marcel  de  Fre'ville  (Paris,  1888, 
in-8°,  publication  de  la  Société' des  anciens  textes  français). 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  M.  Duruy  donne  lecture 
d'un  mémoire  intitulé  :  Recherches  sur  V emplacement  du  champ  de 
bataille  au  passage  du  Graniqne,  par  M.  Teplow,  ancien  secrétaire 
îi  l'ambassade  russe  de  Constantinople. 

Ce  mémoire  a  été  transmis  à  l'Académie  par  l'intermédiaire  de 
S.  E.  M.  l'Ambassadeur  de  Russie  en  France. 

Après  avoir  rapporté  les  diverses  opinions  des  modernes  et 
discuté  tous  les  textes  anciens,  l'auteur  a  fait  un  examen  attentif 
des  lieux,  examen  qui  lui  a  permis  de  joindre  fi  son  mémoire 
une  pbotograpbie  de  la  vallée  du  Granique  cl  une  carte  des 
marches  d'Alexandre,  depuis  Abydos  et  llion  jusqu'à  Sardes,  en 
passant  par  le  village  de  Tèpè  Keuï,  non  loin  des  sources  du  Gra- 
nique. ("est  l'endroit  011  M.  Teplow  met  la  rencontre  des  deux 
armées.  Pour  des  stratégistes  modernes,  ce  lieu  serait  bien  choisi. 
Adossés  aux  dernières  pentes  des  collines  de  l'Ida,  les  Perses  au- 
raient barré  la  route  aux  Macédoniens  dans  une  bonne  position 
défensive. 

cfMais,  ajoute  M.  Duruy,  les  satrapes  de  Darius  se  préoccu- 
paient-ils beaucoup  de  stratégie?  Ils  ont  dû  rassembler  leurs 
forces  le  plus  près  possible  des  lieux  où  les  Macédoniens  avaient 


dél)aiiiué  ot  moins  songer  à  de  savantes  manœuvres  <ju'à  frapper 
un  coup  rapide  sur  l'audacieux  qui  osait  envahir  une  province  du 
grand  Roi.  En  somme,  i'aute  de  renseignements  positifs  fournis  par 
les  anciens,  le  problème  nous  paraît  insoluble  et,  nous  ajoutons, 
sans  importance.  Le  Granique  est  si  court  et  la  masse  de  ses 
eaux  si  peu  considérable  qu'il  importe  peu  que  raclion  se  soit 
passe'e  un  peu  plus  haut  ou  un  peu  plus  bas.  Le  mémoire  de 
M.  Teplow  n'en  est  pas  moins  une  curieuse  élude  d'une  contrée 
sur  laquelle  de  grands  souvenirs  appelleront  toujours  l'attention. 
Aussi  notre  Compagnie  lui  est-elle  fort  obligée  de  la  communi- 
cation de  cet  intéressant  travail  où  le  diplomate  a  fait  place  à 
lérudit.i 

M.  l'abbé  Duchesne  communique,  de  la  part  de  MM.  Lelaille 
et  Audollent,  actuellement  en  mission  scientifique  en  Algérie, 
une  inscription  chrétienne  trouvée  par  ces  messieurs  aux  envi- 
rons de  Sétif.  C'est  la  dédicace  d  une  memoria  en  l'honneur  des 
martyrs  Victorinus  et  Miggin.  Le  dernier  de  ces  saints  est  connu 
par  la  correspondance  de  saint  Augustin  avec  le  rhéteur  païen 
i\Iaxime  de  Madaure.  L'inscription  mentionne  d'autres  reliques 
disposées  dans  la  memoria  avec  celles  des  saints  éponymes.  Dans 
cette  liste  figurent  des  reliques  de  saint  Pierre  et  de  saint  Paul  et 
de  plusieurs  martyrs  africains,  notamment  saint  Cyprien,  le  bois 
de  la  Croix,  et  la  rr terre  promise  oià  est  né  le  Christ??.  L'inscrip- 
tion est  de  l'année  SSg.  C'est  le  plus  ancien  document  épigra- 
phique  du  culte  des  reliques  de  Jérusalem,  de  Bethléem  et  de 
Rome.  En  ce  qui  regarde  le  bois  de  la  Croix,  on  doit  constater 
une  concordance  remarquable  avec  une  homélie  prononcée  par 
saint  Cyrille  de  Jérusalem,  en  867,  où  il  est  dit  que  les  frag- 
ments de  cette  relique  étaient  répandus  dans  le  monde  entier. 

M.  l'abbé  Dlchesne  présente  ensuite,  au  nom  des  mêmes  ex- 
plorateurs, une  inscription  qui  mentionne,  pour  la  première 
fois,  l'enceinte  réservée  dans  les  églises  aux  vierges  sacrées: 
VIRGINVM  CANCc//(/s. 


—  418  — 

SÉANCE  DU   l3   DÉCEMBRE. 

Le  Président  prend  la  parole  en  ces  termes  : 

ttj'ai  la  douleur  d'annoncer  à  rAcadëmie,  déjà  si  tristement 
ëprouve'e  cette  anne'e,  qu  un  nouveau  deuil  vient  de  la  frapper. 
Voici  la  lettre  que  j'ai  reçue  ce  matin  : 

Paris,  12  décembre  1889. 
Mon  cher  ami , 

Nous  venons  d'être  frappés  bien  douloureusement  aujourd'hui.  Mon 
beau-frère,  M.  Pavel  de  Gourteille,  souffrant  depuis  quelques  jours,  nous 
a  été  enlevé  subitement  cette  après-midi,  entre  trois  et  quatre  heures. 

Je  vous  prie  de  vouloir  bien  vous  charger  de  porter  cette  triste  nou- 
velle à  la  connaissance  de  vos  confrères  de  l'Académie,  qui  s'associeront 
certainement  au  deuil  de  sa  famille. 

Veuillez,  mon  cher  ami,  recevoir  la  nouvelle  assurance  de  mes  bien 
affectueux  sentiments. 

G.  Blanchart. 

tf  L'Académie  prendra  une  part  bien  vive  à  cette  perte  sou- 
daine, qui  l'atteint,  je  puis  le  dire,  dans  ses  plus  chères  affec- 
tions. M.Pavet  de  Courteille  n'était  pas  seulement  notre  confrère. 
Par  sa  bonté,  sa  cordialité,  son  dévouement,  il  était  pour  nous 
tous  un  ami.  Jaurai  après-demain  à  lui  rendre  les  derniers  hon- 
neurs au  nom  de  notre  Compagnie  et  je  rappellerai  ses  titres 
scientifiques  et  les  services  éminents  qu'il  a  rendus  aux  études 
orientales.  Par  une  sorte  de  fatalité,  il  semble  que  ce  triste 
devoir  ait  été  réservé  à  celui  qui  a  été  son  condisciple,  le  com- 
pagnon de  ses  jeunes  années  et  son  collaborateur.  Aujourd'hui 
je  dois  me  borner  à  me  faire  l'interprète  de  notre  commune 
affliction  et  à  transmettre  à  la  famille  de  notre  bon  et  cher  con- 
frère l'expression  de  nos  regrets  sincères  et  de  nos  condoléances 
les  plus  sympathiques,  fl 

Le  Président  ajoute  que  l'Académie  va  lever  sa  séance  en 
signe  de  deuil,  mais  qu'elle  doit,  avant  de  se  séparer,  procéder  à 
divers  votes  qui  sont  à  l'ordre  du  jour  et  qui  ne  pourraient  être 
remis  sans  inconvénient. 


—  /il  9  — 

L'Académie  se  lorine  en  comile'  secret. 

La  se'ance  étant  redevenue  publique,  l'Académie  procède  à 
Télection  d'un  membre  libre,  en  remplacement  de  M.  Gh,  Ni- 
sard,  décédé. 

Le  Président  lit  les  articles  du  règlement  relatils  à  l'élection  des 
membres  libres.  Il  rappelle  les  noms  des  candidats  :  MM.  Dieu- 
lafoy,  Hamy  et  A.  de  la  Borderie. 

Il  est  procédé  au  scrutin.  Il  y  a  42  votants.  Majorité,  2  9. 

Au  premier  tour  de  scrutin,  M.  de  la  Borderie  obtient  i6  suf- 
frages; M.  Hamy,  i5;  M.  Dieulaloy,  ii. 

Au  deuxième  tour,  M.  de  la  Borderie  obtient  2 4  suffrages; 
M.  Hamy,  i6;  M.  Dieulafoy,  2. 

M.  de  la  Borderie,  ayant  obtenu  la  majorité  absolue  des  suf- 
frages, est  proclamé  élu  membre  libre  de  l'Académie. 

Son  élection  sera  soumise  à  l'approbation  du  Président  de  la 
République. 

Le  Secrétaire  perpétuel  donne  lecture  de  la  liste  des  corres- 
pondants. Il  en  résulte  (juc  quatre  places  de  correspondants  étran- 
gers et  trois  places  de  correspondants  français  sont  vacantes. 

L'Académie  procède  à  la  noiuinalionde  deux  Commissions,  ([ui 
seront  chargées  de  présenter  des  listes  de  trois  candidats  pour 
chacune  des  places  vacantes,  tant  parmi  les  correspondants  fran- 
çais que  parmi  les  correspondants  étrangers.  Ces  Commissions 
devront  être  composées  de  six  membres. 

Sont  désignés  : 

1°  Pour  les  places  de  correspondants  étrangers:  MM.  Renan, 
G.  Paris,  Weil,  Paul  Meyer,  Maspero,  Boissier; 

2°  Pour  les  places  de  correspondants  français  :  MM.  Delisle, 
de  Rozière,  Heuzey,  Georges  Perrot,  Bréal  et  Anatole  de  Barthé- 
lémy. 

La  séance  est  ensuite  levée  en  signe  de  deuil. 


SEANCE   DU    2  0   DECEMBRE. 

Le  Secrétaire  général  de  la  Présidence  écrit  au  Secrétaire  per- 
pétuel pour  le  prier  de  vouloir  bien  lui   faire  adresser,  en  vue 


—  /i20  — 

des  invitations  aux  l'êtes  que  doit  donner  M.  le  Pre'sident  de  la 
Re'publique,  la  liste  de  MM.  les  membres  de  TAcade'mie  des 
inscriptions  et  belles-lettres  qui  de'sireraient,  eux  ou  leurs  fa- 
milles, être  invite's  à  ces  fêtes. 

M.  le  Maire  de  Lille  invite  les  membres  de  l'Académie  à  s'as- 
socier, par  leurs  souscriptions,  au  projet  formé  par  la  ville  de 
Lille  d'élever  une  statue  au  général  Faidherbe. 

M.  Geffroy,  directeur  de  l'Ecole  française  de  Rome,  écrit  au 
Président  pour  lui  communiquer  les  résultats  des  fouilles  pra- 
tiquées à  Rome,  dans  le  quartier  des  Prati  di  Castello,  et  de 
celles  de  Cività  Casteilana,  l'ancienne  Falérie.  M.  Geffroy  an- 
nonce aussi  dans  sa  lettre  qu'il  attend  à  Rome  trente  caisses 
contenant  les  résultats  des  fouilles  que  M.  Gsell,  membre  de 
l'Érole  française  de  Rome,  a  fait  exécuter  à  Vulci.  Il  signale  en 
terminant  les  explorations  faites  en  Algérie,  par  M.  Audollent, 
membre  de  la  même  Ecole,  en  compagnie  de  M.  Letaille-^'. 

M,  Héron  de  Villefosse,  absent  en  ce  moment  de  Paris, 
adresse  au  Secrétaire  perpétuel  une  note  qu'il  a  rédigée  sur  une 
inscription  trouvée  à  Cartbage  et  mentionnant  le  proconsulat  de 
Synimaque,  dont  la  copie  lui  a  été  envoyée  par  le  R.  P.  De- 
iattre(2). 

M.  le  D''  Carton,  médecin  militaire  des  hôpitaux  de  Tunisie, 
directeur  des  fouilles  actuellement  pratiquées  dans  l'antique  né- 
cropole de  RuUa  Regia,  adresse  au  Président  une  note  Sur  h 
disposition  du  bûcher  funéraire  employé  par  les  habitants  de  Bulla 
Regia'^^\ 

Sont  adressés  à  l'Académie,  pour  les  divers  concours  de  l'an- 
née 1890  : 

Antiquités  de  la  France  :  Vallée  de  Barcelonnette ,  simple  rela- 
tion sur  quelques  monuments  celtiques  découverts  dans  cette  vallée,  par 
M.  Je  D^  Ollivier  (Digne,  i88i,  in-8°); 

Age  préhistorique  dans  les  Basses-Alpes.  Période  de  bronze,  par  le 
même  (Digne,  1886,  in-8°); 

'•'  Voir  aux  Commlmcatioas,  n"  XXXII  (p.  'iaG-A2  7). 
'-'  Voir  aux  Communications,  n°  XXXIII  (p.  ^138-/129). 
'^'   Voir  aux  Communications,  n"  XXXIV  (p.  /lag-iSa). 


—  V21    — 

Topographie  hislorique  de  la  ville  de  Chdlons-sur- Marne ,  par 
M.  Louis  Grignoii  (Chàlons-sur-Marne,  1889,  in-8"); 

Rosnij-sur-Seine ,  où  est  né  SulUj,  notice  historique,  par  M.  l'abbé 
H.  Thouars  (Paris,  1889,  in-S'"); 

Dictionnaire  étymologique  du  patois  lyonnais,  livraisons  1  à  6 , 
par  M.  N.  du  Puitspelu  (Lyon,  1889  ,  in-8°); 

Histoire  de  la  novelle  118  dans  le  pays  de  droit  écrit,  depuis  Justinien 
jusqu'en  ijS().  Ettule  sur  le  régime  des  successions  au  mx)yen  âge  dans 
le  midi  de  la  France,  par  !\L  Em.  Jarriaud  (Paris,  1889,  {0-8°); 

La  maison  du  Temple  de  Paris ,  histoire  et  description,  par  M.  H.  de 
Curzon  (Paris,  1888,  in-8"); 

Abbayes  de  Vévêché  de  Bayeux ,  Cercoy,  Cordillon,  Fontenay,  Lon- 
gues, par  iM.  P.  de  Farcy  (Laval,  1888,  in-i"); 

Sigillographie  de  la  Normandie  [évéché  de  Bayeux),  par  ic  même 
(Caen,  i885-i886,  in-/i°); 

Histoire  du  G astinois ,  T^ar  dom  Morin,  nouvelle  e'dition,  publiée 
par  MM.  H.  Laurent  el  P.  Quesvers  (Paris,  Pithiviers  et  Orléans, 
1888-1889,  in-Zi"); 

Prix  Gobert  :  Louis  M  le  Gros,  annales  de  sa  vie  et  de  son 
règne,  io8i-ii3y,  par  M.  Ach.  Lucbairo   (Paris,  1890,  in-8°); 

Prix  La  Fons-Mélicocq  :  La  vallée  du  Liger  et  ses  environs,  par 
M.  A.  Lediou  (Paris,  1887,  in-8''); 

Deux  années  d'invasion  en  Picardie,  i635-i636 ,  par  le  même 
(Paris,  1887,  in-S''); 

Monographie  d'un  bourg  picard,  2^  partie  :  Vhistoire  de  De- 
muin  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  nos  jours,  par  le  môme 
(Paris,  1889,  in-8°); 

Notices  et  choix  de  documents  inédits  sur  la  Picardie,  par  le  même 
(Paris,  1889,  in-S"); 

La  guerre  de  Trente  ans  en  Picardie  et  en  Artois,  par  le  même 
(Paris,  1889,  in-8°); 

Mélanges  sur  Abbeville  et  le  Ponthieu,  par  le  même  (Abbeville, 
1889,  in-8°); 

Cartulaire  des  établissements  religieux  du  Boulonnais,  t.  VI  :  Ab- 
baye de  Licques,  ordre  de  Prémonlré ,  lojS-iSii,  par  M.  l'abbé 
D.  Haigneré  (Boulo{;ne-sur-.Mor,  1889,  in-8"). 


—  ^22  — 

M.  Edmond  Le  Blant  est  désigné  pour  lire,  à  la  prochaine 
séance  Irimestrielie  de  Tlnslitut,  sa  note  intitulée  :  Les  songes  et 
visions  des  tnarttjrs. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secreL 

M.  Georges  Perrot  communique,  de  la  part  de  M.  le  D' A.  Ver- 
coutre,  médecin-major  à  Ranibervillers,  une  note  sur  un  aureus 
de  Publius  Clodius. 

On  sait  que  Publius  Clodius  a  fait  frapper,  en  711  (^3  avant 
notre  ère)  un  aureiis  à  Teffigie  de  jMarc  Antoine,  aureus  dont  le 
revers,  diversement  interprété,  est  en  somme  resté  jusqu'ici  inex- 
pliqué. 

M.  le  D'  Yercoutre  propose  de  voir,  dans  le  groupe  qui  figure 
aux  pieds  du  personnage  représenté  sur  ce  revers,  non  point, 
comme  on  Ta  voulu  jusqu'ici,  un  aigle  sur  un  cippe,  mais  un 
corbeau  sur  un  rocher,  ce  groupe  constituant  alors  les  armes  par- 
lantes, bien  connues,  de  la  ville  de  Lyon. 

Le  revers  en  question  serait  alors  expliqué  très  naturellement 
de  la  manière  suivante  : 

trLe  Génie  de  la  ville  de  Rome,  victorieux  et  pacifique,  pro- 
tège la  ville  de  Lyon,  colonie  romaine  naissante,  et  lui  apporte 
le  commerce  et  la  richesse,  i^ 

Et  il  faudrait  voir  Marc  Antoine  lui-même  sous  les  traits  du 
Génie  radié  qui  figure  la  ville  de  Rome. 

Cette  explication ,  qui  rend  compte  de  tous  les  détails  du  type 
du  revers  de  Yaureus,  s'accorde  avec  la  date  de  la  fondation  de 
la  ville  de  Lyon,  et  avec  ce  fait  que  Marc  Antoine  (à  cette  date, 
gouverneur  de  la  Gaule)  a  été  le  protecteur  avéré  de  la  colonie 
nouvelle. 

Ce  serait  donc  pour  perpétuer  le  souvenir  de  cette  protection 
que  Yaureus  en  question  aurait  été  frappé. 

M.  Edmond  Le  Blant  communique  : 
1°  Une  note  sur  une  inscription  juive  trouvée  à  Auch'^'; 
2°   Une  note   sur  les  lectures  laites  à  la  dernière  séance  de 
l'Académie  d'archéologie  chrétienne,  et  notamment  sur  la  décou- 

■')   Voir  aux  (Iommi  .mcvtio.ns,  n''XXXV  (p.  !tîi9.-h3']). 


—  A'23  — 

verte  d'un  iVagmenl   d'une  inscription  niétri({ue  du  papt)  saint 
Damase  ''>. 


SEANCE  DU    S'y   DECEMBRE. 

Le  Ministre  de  l'instruction  publique  adresse  à  TAcadëmie 
Tampliation  d'un  décret,  en  date  du  19  de'cembre,  par  lequel  le 
Président  de  la  République  a  approuve  l'élection  de  M.  de  la 
Borderie  comme  académicien  libre ,  en  remplacement  de  M.  Ch.  Ni- 
sard,  de'ce'dé. 

M.  de  la  Borderie  sera  pre'senté  à  l'Académie,  lorsqu'il  sera 
de  retour  à  Paris. 

M.  Maurt,  par  une  lettre  qu'il  adresse  au  Secre'taire  perpe'tuel, 
fait  connaître  que  son  e'tat  de  santé'  le  mettra  dans'  l'impossibilité 
de  se  rendre,  pendant  tout  l'hiver,  aux  séances  de  l'Académie.  Il 
prie,  en  conséquence,  ceux  de  ses  confrères  qui  seraient  disposés 
à  le  réélire  dans  les  Commissions  auxquelles  il  appartenait,  de 
reporter  sur  d'autres  leurs  sufirages. 

L'Académie  procède  au  renouvellement  de  son  bureau  pour 
l'année  1890. 

M.  Schefer  est  élu  président;  M.  Oppert,  vice-président. 

Il  est  ensuite  procédé  à  l'élection  des  membres  de  la  Commis- 
sion du  prix  Gobert. 

Sont  élus  :  MM.  L.  Delisle,  de  Rozière,  Viollct  et  Clermont- 
Ganneau. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  redevient  publique. 

Le  Président  annonce  ainsi  qu'il  suit  le  résultat  du  vote 
qui  vient  d'avoir  lieu,  en  comité  secret,  pour  les  élections  des 
correspondants  étrangers  et  des  correspondants  français: 

Correspondants  étrangers:  M.  Nauck,  à  Saint-Pétersbourg,  a 
été  élu  en  remplacement  de  M.  Curtius;  M.  Neubauer,  à  Oxford, 
en  remplacement  de  M.  Wright;  sir  Henry  Yulc,  à  Londres,  en 
remplacement  de  M.  Layard;  M.  Radloff,  à  Saint-Pétersbourg, 
en  remplacement  de  M.  Weil. 

t"   Voir  aux  Commlnicatio.ns,  n"  XXXVI  (p.  liS'j-hiç^). 


Correspondants  français  :  M.  Sauvaire  a  été  élu  en  remplace- 
ment de  M.  Clermont-Ganneau  ;  M.  Bailly,  en  remplacement  de 
M. Rebond;  M.  Champoiseau,  en  remplacement  de  M.  de  la  Bor- 

derie. 

Sont  adressés  pour  les  divers  concours  de  l'Académie  en  1890: 

Antiquités  de  la  France  :  Gesta  domni  Aldrici  Cenomannicœ  iirbis 
episcopi  a  discipuUs  suis,  texte  publié  par  MM.  Tabbé  R.  Charles  et 
rabbé  L.  Froger  (Mamers,  1889,  in-/i°); 

Dénombrement  du  comté  de  Faix  sous  Louis  XIV  {lÔjo-iôjâ); 
étude  sur  T organisation  de  cette  province ,  suivie  du  texte  du  dénombre- 
ment, par  M.  Barrière-Flavy  (Toulouse,  1889,  in-8°); 

Autun  et  ses  monuments,  par  M.  Haroid  de  Fontenay,  avec  un 
précis  historique  par  M.  An.  de  Charmasse  (Autun,  1889,  in-8°); 

Notice  biograplwpie  sur  Louis  Malet  de  Gravilk ,  amiral  de  France 
{iââ-l-i5i6),  par  M.  P.-M.  Perret  (Paris,  1889,  in-8'^); 

Coutumes  et  institutions  de  V Anjou  et  du  Maine  [antérieures  au 
xvi"  siècle),  par  M.  Beautemps -Beaupré,  tome  I,  2"  partie  : 
Recherches  sur  les  juridictions  de  l'Anjou  et  du  Maine  pendant  la  pé- 
riode féodale  (Paris,  1890,  in-8°)-, 

Cinq  publications  de  M.  P.  Lanéry  d'Arc,  intitulées: 

Le  culte  de  Jeanne  d'Aide  au  .xvf  siècle  (Orléans,  1889,  in-S"); 

Du  franc  alleu  (Paris,  1888,  in-8''); 

Bibliographie  des  ouvrages  relatifs  à  Jeanne  d'Arc  (Paris,  1888, 

111-8°); 

Mémoires  et  consultations  en  faveur  de  Jeanne  d'Arc,  par  les  juges 
du  procès  de  réhabilitation,  d'après  les  manuscrits  authentiques  (Paris, 
i889,in-8°); 

La  Piuzela  d'Orlhienx,  récit  contemporain,  en  langue  romane,  de 
la  mission  de  Jeanne  d'Arc  (Paris,  1890,  in-8°); 

Prix  Stanislas  Julien  :  Cours  éclectique  graduel  et  pratique  de 
langue  chinoise  parlée,  t.  I  à  IV,  par  M.  Imbault-Huart  (Paris, 
1888,  in-^"); 

Manuel  de  la  langue  chinoise  écrite ,  destiné  à  faciliter  la  rédaction 
des  pièces  dans  cette  langue,  par  M.  Abel  des  Michels  (Paris,  1888, 
in-S»); 


't'} 


Les  annales  impériales  de  VAnnam,  traduites  en  entier  pour  la  pre- 
mière fois  du  texte  chinois,  par  le  même  (Paris,  1889,  in-8''); 

Prix  Delalande-Guéri.neau  :  Monuments  pour  servir  à  l'histoire  de 
rEgj/pte  chrétienne  au  iv'  siècle.  Histoire  de  saint  Pakome  et  de  ses 
communautés,  par  M,  E.  Amelineau  (Paris,  1889,  in-^%  extrait 
du  (orne  XMl  des  Annales  du  Musée  Guitnet); 

Prix  La  Fons-Méhcocq  :  Géographie  historique  et  statistique  de 
r arrondissement  de  Montdidier  (Montdidier,  1889,  in-8°). 


XVII. 


lurKlurmic  x&rtijttLt. 


^26  — 


COMMUNICATIONS. 


N°  XXXII. 

LETTRE  DE  M.  GEFFROY,   DIRECTEUR  DE  L'ECOLE  FRANÇAISE  DE  ROME. 

(séance  Dn    20    DÉCEMBRE  1889.) 

Rome,  le  lo  décembre  1889. 

Monsieur  le  Président  et  cher  confrère, 

La  saison  d'automne  n'a  pas  produit  ici  d'importantes  dé- 
couvertes, et  il  y  a  lieu  de  craindre  que,  par  diverses  causes, 
la  saison  d'hiver  ne  soit  pas  puissamment  active.  Il  faudrait 
d'énormes  dépenses  pour  creuser  suffisamment  le  sol,  par 
exemple  dans  le  Ghetto,  où  l'on  n'a  fait  encore  que  démolir. 
Il  n'arrive  pas  souvent  que  l'on  fouille  jusqu'à  une  profon- 
deur de  8  mètres,  comme  on  l'a  fait  pour  établir  les  fonda- 
tions du  futur  Palais  de  justice,  dans  le  nouveau  quartier  des 
Prati  di  Caslcllo,  les  anciens  horti  Domitiœ,  sur  la  rive  droite 
du  Tibre,  vers  le  Vatican. 

C'est  là  qu'on  a  découvert,  le  10  mai  dernier,  les  deux 
sarcophages  de  Crepereia  Try|)haena  et  de  Crepereius  Evhodus. 
C'est  là  qu'on  vient  de  trouver  encore  deux  sarcophages  inté- 
ressants, l'un  par  les  traces  visibles  de  dorure  sur  la  face  an- 
térieure, l'autre  par  ses  proportions  massives,  2™  35  de  long, 
et  par  l'énorme  pierre  lui  servant  de  couvercle,  pierre  déta- 
chée évidemment  d'une  belle  et  grande  inscription  impériale. 
On  lit,  en  effet,  à  la  surface  intérieure  de  ce  couvercle,  en 
caractères  de  1 8  et  de  1 3  centimètres  : 

IMP-CAESARI- 

TRIBVNIC-PO 

PROVIN 


—  h'21  — 

La  principale  fouille  en  pleine  activité  est,  hors  de  Rome, 
celle  (le  Cività  Castellana,  l'ancienne  Falérie.  Elle  a  déjà  pro- 
duit la  quantité  considérable  d'objets  qui  a  permis  d'installer 
tout  un  nouveau  musée,  celui  de  la  villa  di  Papa  Giulto,  très 
habilement  disposé  par  les  soins  du  professeur  Barnabei.  Mais 
la  nécropole  n'est  pas  épuisée  :  il  s'en  faut  de  beaucoup;  les 
fouilles  continuent,  pratiquées  par  les  propriétaires  du  soi. 
Le  gouvernement  n'y  prend  pas  une  part  active  principale; 
seulement,  grâce  au  droit  de  préemption  que  lui  garantit  la 
loi  Pacca,  il  choisit  les  objets  à  sa  convenance;  le  reste  est 
livré  au  commerce. 

Nous  attendons  à  Rome  trente  caisses  contenant  les  résul- 

r 

tats  des  fouilles  de  M.  Gsell,  membre  de  l'Ecole  française,  à 
Vulci.  La  restauration  des  principaux  vases  a  été  faite  pendant 
la  saison  d'été.  Une  fois  les  objets  disposés  comme  il  convient 
chez  le  j)rince  Torlonia ,  qui  a  pris  à  sa  charge  la  dépense  de 
ces  fouilles,  il  faudra  faire  dessiner  ces  vases;  nous  espérons, 
malgré  la  longueur  inévitable  de  ce  travail,  publier  dans  le 
cours  de  cette  saison  le  rapport  étendu  de  M.  Gsell,  avec 
représentations  figurées. 

Un  autre  membre  de  l'Ecole  française  de  Rome,  M.  Au- 
dollent,  explore  en  ce  moment,  et  depuis  le  commencement 
d'octobre,  une  partie  de  l'Algérie,  en  compagnie  de  M.  Le- 
tadle,  envoyé  par  l'Ecole  des  hautes  études.  J'ai  déjà  reçu 
toute  une  série  d'inscriptions,  que  les  deux  explorateurs  pu- 
blieront dans  leur  ensemble  à  leur  retour.  M.  l'abbé  Duchesne 
a  entretenu  l'Académie,  dans  sa  séance  du  6  décembre,  de 
deux  de  ces  inscriptions.  MM.  Audollent  et  Letaille  étaient  à 
Batna  le  9  i  novembre. 

Veuillez  agréer,  etc. 

A.  Geffrot. 


00 . 


—  /i28  — 
N°  XXXIII. 

INSCRIPTION  DE  CARTHAGE , 

MENTIONNANT    LE    PROCONSULAT    DE    SYMMAQDE, 

COMMUNIQUÉE  PAR  M.  HERON   DE  VILLEFOSSE. 

(séance   du    90    DÉCEMBRE    1889.) 

Le  R.  P.  Delattre,  dont  le  zèle  ne  se  ralentit  jamais,  m'en- 
voie, à  la  date  du  9  décembre  1889,  en  me  priant  de 
la  communiquer  à  l'Académie,  une  intéressante  inscription 
récemment  découverte  à  Carthage.  Elle  est  gravée  sur  un 
piédestal  mesurant  en  hauteur  l'hall  et  en  largeur  hS  cen- 
timètres environ  ;  la  hauteur  des  lettres  est  de  1 0  centi- 
mètres. 

Il  est  difficile  de  dire  si  cette  base  était  surmontée  d'une 
statue  ou  si  elle  avait  été  élevée,  avec  une  autre  destination,  à 
l'endroit  où  elle  a  été  découverte.  En  tout  cas  le  texte  gravé 
sur  la  face  antérieure  nous  apprend  qu'elle  avait  été  placée 
par  ordre  du  proconsul  d'Afrique  Q.  Aurelius  Symmacitus ,  plus 
connu  sous  le  simple  nom  de  Symmaque. 

Q_-AVRELIVS- 

SYMMACHVS-V-C 
PROCONSVLE-P-A 
•V-S-I   CONSTlTVI   IVSSlT- 

Q{uintus )  Aurelius Symmachus ,  v{ir)  c[lanssimus) , proconsule  p{rovinciae) 
A{fricae),  v{ice)  s[acra) j[uclicans) ,  constitui  jussit. 

On  trouve  au  Gode  Théodosien  une  loi,  datée  du  3o  no- 
vembre 373,  adressée  par  les  empereurs  Valentinien,  Valens 
et  Gratien  à  Symmaque,  proconsul  d'Afrique,  mais  jusqu'ici  on 


—  /i-20  — 

n'avait  dt^couvcrt  on  Afrique  aucun  monument  épigraphique 
intact  se  rapportant  à  son  administration.  Sur  un  fragment 
très  mutilé  d'une  inscription  municipale  de  Guelma^'\  perdu 
aujourdhui  et  connu  seulement  par  de  mauvaises  copies, 
L.  Renier  avait  reconnu  la  mention  de  ce  proconsulat,  auquel, 
du  reste,  le  célèbre  orateur  fait  souvent  allusion  dans  ses 
lettres.  Les  uns  font  commencer  sa  mission  en  Afrique  en  870, 
les  autres  en  3^3;  elle  prit  fin  probablement  dans  l'été 
de  376. 

En  comptant  une  inscription  de  Rome,  qui  contient  des 
renseignements  assez  complets  sur  la  carrière  de  Symmaque^^^ 
l'inscription  découverte  à  Garthage  est  le  troisième  texte  épi- 
graphique  connu,  relatif  à  cet  illustre  personnage ^^^. 


N"  XXXIV. 

note  sur  la  disposition  du  bûcher  funeraire 

emploie'  par  les  habitants  de  BULLA  REGIA, 

par  m.  le  docteur  carton, 

médecin  aide-major  de  premiere  classe  des  hopitaux  de  tunisie. 

(séance  du   2  0    DÉCEMBr.E    1889.) 

Les  fouilles  dans  l'antique  nécropole  de  Bulla  Regia,  dont 
M.  de  la  Blanchère  a  bien  voulu  me  confier  la  direction,  m'ont 
fait  découvrir  quelques  faits  intéressants  au  point  de  vue  de 
l'histoire  et  des  mœurs  de  la  cité  romaine.  C'est  sur  l'un  de 
ceux-ci  que  j'ai  l'honneur  d'attirer  l'attention  de  l'Académie 
des  inscriptions  et  belles-lettres. 

<"  Inscriptions  romaines  de  l'Algérie,  n"  3740. 

C'  Corpus  inscriptionum  latinannn ,  t.  VI,  n°  1699. 

(^i  Voir  à  ce  sujet  Ch.  Tissot,  Fastes  de  la  province  romaine  d'Afrique,  p.  208- 
260. 


—  A30  — 

A  part  les  squelettes  intacts  que  j'ai  rencontrés  dans  un 
mausolée,  tous  les  sujets  exhumés  de  la  nécropole  ont  subi 
l'incinération. 

L'état  des  ossements  et  la  disposition  du  contenu  des  tombes 
m'ont  permis  de  préciser,  je  crois,  de  quelle  façon  l'inciné- 
ration était  pratiquée  à  Bulla  Regia. 

Ce  n'est  pas  à  l'état  de  cendres  que  l'on  retrouve  les  restes 
du  défunt.  Ce  sont  des  fragments  d'os  carbonisés,  de  2  ou 
3  centimètres  d'épaisseur. 

Un  certain  nombre  d'entre  eux,  principalement  les  côtes, 
les  phalanges,  étaient  intacts.  Incomplètement  incinérés,  ils 
formaient  une  masse  d'un  certain  volume  et  les  restes  d'un 
individu  pouvaient  remplir  un  récipient  de  9  ou  3  litres  de 
capacité. 

A  côté  d'eux,  et  sur  le  sol  du  sarcophage  (fait  de  tuiles 
disposées  enferme  de  toit,  ou  de  jarres),  j'ai  rencontré  une 
couche  de  charbon  de  bois,  dont  les  morceaux  atteignaient 
souvent  la  grosseur  du  poing.  Au  milieu  de  ceux-ci  gisaient 
un  grand  nombre  de  clous  en  fer  au  nombre  de  dix  à  trente 
par  tombe,  de  différentes  dimensions.  Les  plus  nombreux 
avaient  l'y  centimètres  de  longueur,  et  une  épaisseur  de  8  à 
10  millimètres  près  de  la  tête,  qui  était  ronde,  aplatie,  et 
mesurait  2  centimètres  de  diamètre.  Les  plus  petits,  de  même 
forme,  avaient  de  7  à  1  0  centimètres  de  longueur.  Les  pre- 
miers étaient  invariablement  recourbés  vers  leur  extrémité 
aiguë,  et  la  dislance  entre  l'angle  ainsi  formé  et  la  tête  était 
d'environ  8  centimètres.  La  grosseur  de  ces  clous  prouve  suf- 
fisamment qu'ils  n'ont  pu  servir  à  fixer  les  parois  d'un  coffret. 
Ils  sont  même  trop  volumineux  pour  avoir  été  employés  à 
réunir  les  parties  d'un  sarcophage  en  bois,  qui,  d'ailleurs, 
n'aurait  pas  trouvé  place  dans  l'espace  exigu  compris  entre  les 
tuiles  de  la  tombe.  Si  ce  sarcophage,  dont  on  ne  trouve  pas 
trace,  avait  existé,  les  clous  se  seraient  rencontrés  en  plus  grand 


—  ^31   — 
nombre  vers  les  angles  et  ils  eussent  été  disposés  régulière- 
ment, ce  qui  n'est  point. 

Enfin,  j'ai  mesuré  avec  soin  et  très  fré({uemment  la  dis- 
lance  entre  la  tête  et  la  courbure,  et  celle-ci  indique  d'une 
façon  péremptoire  qu'ils  ont  dû  être  enfoncés  dans  des  mor- 
ceaux de  bois  volumineux,  destinés,  suivant  moi,  à  constituer 
un  bûcher. 

Ce  dernier  était  forme  de  poutres  régulièrement  équarries, 
car,  pour  une  même  tombe,  la  distance  de  la  tête  à  la  cour- 
bure du  clou  est  toujours  la  même.  La  partie  inférieure  de- 
vait être  formée  de  bois  plus  fort  que  celui  de  la  partie  supé- 
rieure, car,  allant  d'un  bord  à  l'autre  de  la  fosse  creusée 
au-dessous,  elle  avait  à  supporter  tout  le  poids  du  bûcher.  Les 
clous  plus  petits  que  j'ai  retrouvés  devaient  réunir  les  poutres, 
plus  grêles,  de  la  partie  supérieure. 

Une  zone  de  terre  brûlée  (pour  employer  l'expression  de 
mes  ouvriers)  se  rencontre  dans  toutes  ces  tombes.  Epaisse 
de  1  à  /i  centimètres,  elle  est  dure,  rouge,  et  a  évidemment 
subi  l'action  du  feu.  Dans  la  tranchée,  la  coupe  do  cette  zone 
forme  une  ligne  courbe  à  concavité  supérieure,  qui  donne 
une  idée  bien  nette  de  la  forme  de  la  fosse.  Elle  est  tellement 
constante  que  tout  point  de  la  nécropole  où  on  la  rencontrait 
était  considéré  par  mes  terrassiers  comme  devant  être  fertile 
en  trouvailles,  ce  que  confirmaient  toujours  les  recherches 
ultérieures. 

De  ce  qui  précède  je  crois  pouvoir  conclure  que  le  bûcher 
destiné  à  incinérer  le  corps  était  dressé  au-dessus  d'une  fosse. 
Le  charbon  de  bois,  les  clous,  la  terre  brûlée  en  sont  la 
preuve.  Le  bûcher  éteint,  on  recueillait  les  ossements  et  on 
enlevait  les  grosses  poutres.  Le  reste,  c'est-à-dire  (pielques 
fragments  d'os,  quelques  braises,  tombait  dans  la  tombe;  de 
là ,  la  cuisson  d(f  la  terre. 

11  a  dû  arriver  même  que  le  bûcher,  mai  conslruit,  s'f?t 


—  -132  — 

effondré  dans  la  fosse  ;  on  se  serait  alors  contenté  d'en  retirer 
les  gros  morceaux  de  bois  non  brûlés  et  les  ossements  les 
moins  altérés.  De  là,  les  très  nombreux  débris  de  cliarbon  et 
les  cendres  osseuses  que  j'ai  rencontrés  dans  plusieurs  cas, 
alors  même  que  l'ossuaire  renfermait  déjà  des  ossements.  Après 
l'écroulement  ou  l'enlèvement  du  bûcher,  on  plaçait  le  mo- 
bilier funéraire,  avec  les  cendres,  dans  la  fosse,  et  on  jetait 
dans  celle-ci  ou  dans  la  terre  sus-jacente  quelques  pièces  de 
monnaie.  Plusieurs  de  celles  que  j'ai  trouvées  étaient  altérées 
par  le  feu  et  ont  dû  être  placées,  avec  le  corps,  sur  le  bûcher. 
Celte  hypothèse  de  la  position  du  bûcher  au-dessus  de  la 
fosse,  appuyée,  il  me  semble,  sur  des  fails  probants,  a  trouvé 
sa  confirmation  dans  une  découverte  faite  par  M.  le  lieute- 
nant Margier.  Il  a  rencontré,  en  effet,  dans  la  même  nécro- 
pole une  lampe  représentant  un  bûcher  funéraire,  au-dessous 
duquel  était  figurée  une  fosse.  Cette  lampe  a  été  placée,  par 
les  soins  de  M.  de  la  Blanchère ,  dans  une  vitrine  de  la  section 
tunisienne  de  l'Exposition  centennale. 


N°  XXXV. 

NOTE  SUR    UNE    INSCRIPTION    JUIVE  D'AUCH, 
PAR   M.   EDMOND  LE  BLANT. 

(séance  du    90  DÉCEMBRE    1889.) 

L'inscription  juive  dont  je  reproduis  un  fac-similé  provient 
des  fouilles  d'Auch.  Elle  appartient  au  musée  de  Saint-Ger- 
main-en-Laye. 

A  l'extrémité  de  la  première  ligne  manque  la  lettre  finale 
du  mot  sancto,  écrit  en  abrégé  :  SCT(o).  Au  bas  figurent  la 
palme,  le  chandelier  à  sept  branches,  le  slhofar  et  le  mot 
schalom  {^pax)  en  lettres  hébraïques. 


i 


—  /i33  — 
Notre  regretté  conl'rèro  M.  de  Saulry,  (jiii  le  premier  Ji  fait 


connaître  ce  monument,  a  proposé  d'y  lire  ce  qui  suit  : 

In  Dei  noinine  sancto 
Pcleger  qui  hic  Ben  Nid. 
Deposilus  est  cum  ipso  locoli 
tnvidiosi.  Crepen  dédit. 
Donum  Joua  fecit  ''^ 

M.  Laroque,  ne  reconnaissant  qu'un  simple  trait  séparatif 
et  non  pas  un  L  dans  la  barre  qui  précède,  à  la  troisième 
ligne,  les  cinq  lettres  OCOLI,  a  présenté  cette  autre  lecture: 

In  Dei  nomine  sancto 

féliciter 

dcposilus  est .  .  .  oculi 
invidiosi  crepen(t)!  dedicatum 
donum  Jona  fecel  '"'. 

Une  troisième   transcription  a  été  donnée  par   M.  l'abbé 

Canéto  : 

In  Dei  nomine  sancto 
Pelester  qui  hic  Ben  Md. 
Deus  esto  cum  ipso!  o  cœli 
invidiosi  !  Crepen  dédit 
donum.  Jona  fecit. 

Au  saint  nom  de  Dieu!  Pelester  qui  est  ici,  fils  de  Nid.  Que  Dieu  soit 
avec  lui  !  ô  cieux  jaloux  !  Crepen  a  fait  don.  Jonas  a  gravé.  In  pace'-^K 

(''  Comptes  rendus  de  l'Académie  des  inscriptions,  1869,  p.  173.  (Cl.  Revue 
de  l'instruction  publique,  7  octobre  1869,  p.  /i36.) 

'')   Revue  de  l'instruction  publique,  7  octobre  18*19,  p.  i.36. 

(^'   Bulletin  de  lu  Société  des  antiquaires  de  France,  1870,  p.   1^6. 


—  hZk  — 

A  ces  lectures  vient  se  joindre  ta  suivante,  qu'un  jeune 
savant,  M.  Th.  Reinach,  a  publiée  il  y  a  quelques  jours ''^  : 

In  Dei  noniine  scto  [sanclo) 
pelester  (féliciter?)  qui  ic  (hic).  Bennid 
(Ds  (Deus)  esto  c\y\m  ipso;  ocoli  (oculi) 
invidiosi  crêpent)  dédit 
donum ,  Jona  fecet  (fecit). 

Au  saint  nom  de  Dieu 

heureusement  (repose  celui)  m\\  est  ici;  Bennid 
(Dieu  soit  avec  lui!  que  les  yeux 
envieux  crèvent  !  )  a  fait 
don  ;  Jonas  a  grave'. 
Paix. 

Je  hasarderai  à  mon  tour  quelques  mots  sur  l'interpréta- 
tion de  cette  légende. 

Après  la  première  ligne,  sur  laquelle  tout  le  monde  est 
naturellement  d'accord,  je  lis  le  nom  de  Pekger,  pour  Pe- 
reger,  qui  représente  le  vocable  juif  Gerson,  comme  veut  bien 
me  l'apprendre  M.  Halévy,  et  dont  le  G  se  retrouve  plusieurs 
fois  avec  la  même  forme.  Je  signalerai  d'abord  ce  caractère 
dans  une  antique  inscription  cursive  récemment  découverte 
aux  catacombes  de  Rome'-^;  on  le  voit,  aux  temps  mérovin- 
giens, dans  les  noms  de  Pelagia,  Paragor,  Rcgnoveiis^^^  gravés 
sur  des  marbres  et  sur  une  agrafe  de  bronze,  puis  par  trois 
fois  dans  cette  ligne  en  onciale  d'un  manuscrit  de  Grégoire 
de  Tours  ap])artenant  au  vu"  siècle  :  Dum  hœc  ngerctur,  Si- 
gibertus  rex  gcntes  illus  ''l   II  reparaît  au   xi"  siècle  dans  un 

(^)   Revue  des  éludes  juives ,  1889,  p.  219. 

'^'  Mariicclii ,  Le  rrcenii  scoperle  pressa  il  cimilero  diS.  Valentino  (  Bnllettino  délia 
Commissionc  archc(dogica  dl  lioma,  1888,  p.  AS"). 

f^'  Inscriptions  chrétiennes  de  la  Gaule,  planches  n°'  ioi  et  5i  i;  Th.  Reinach, 
Revue  des  éludes  juives,  1 889 ,  p.  75  ;  Nouveau  recueil  des  insci-iplions  chrétiennes 
de  la  Gaule,  n"  5^. 

''')  Ms.  de  Corbic,  Bibi.  nat.,  londs  latin,  11°  17655,  fol.  57.  (Voir  le  fac- 
similé  donné  par  M.  Prou,  Manuel  de  paléographie ,  pi.  I.) 


—  /i35  — 

manuscrit  de  Oiicdlinbourg  '''  et  se  montre  ailleurs  plus  lard 
encore. 

Je  n'ose  proposer  pour  la  fin  de  la  ligne  une  transcription 
qui,  bien  que  justifiable  par  les  voies  méthodiques,  ne  me 
parait  pas  assez  certaine.  Viennent  ensuite,  non  pas,  comme  l'a 
cru  M.  Laroque,  les  mots  doposilus  est  cum  ipso,  mais  Dcus  esto 
cum  ipso,  après  lesquels  il  a  lu  avec  raison  l'acclamation  Ocoli 
ùwunosi  crepen  (  Ocuh  invidiosi  crêpent  fj.  On  peut  noter,  ii  l'appui 
de  cette  leçon,  que  souvent,  sur  les  marbres,  le  T  final  de  cer- 
tains mots  disparaît,  comme  il  a  fait  ici  pour  crepent^-K 

Ce  qui  reste  de  l'inscription  ne  me  semble  pas  avoir  été 
compris  jusqu'à  présent;  on  a  vu,  dans  les  dernières  lettres  de 
la  quatrième  ligne,  le  mot  dédit  ou  dedicatum.  Il  y  a  là,  je 
crois,  une  erreur  et  c'est  sur  ce  point  que  j'appellerai  l'atten- 
tion de  l'Académie. 

La  fin  de  notre  légende  présente,  si  je  ne  me  trompe, 
une  formule  dont  l'existence  peut  s'établir  par  de  nombreux 
exemples:  de  Dei  r/o;»fm(pour  dono^^')  Jonafecit,  formule  équi- 
valente aux  mots  de  suo  fecit.  C'est  l'expression  de  la  pensée 
de  l'homme  reconnaissant  et  proclamant  que  tous  ses  biens 
sont  un  don  du  Très-Haut.  Ainsi  que  je  l'ai  noté  ailleurs,  elle 
est  d'origine  biblique  et  nous  la  retrouvons  dans  le  texte  d'une 
inscription  juive  de  l'île  d'Egine,  reproduisant  les  mots  des 
Paralipomènes  : 

Cuncla  qiiae  in  cœlo  sunt  et  iu  terra  tua  sunt.  .  .  Tua  sunt  omnia  et 
qua;  de  manu  tua  accepimus  dediiuus  tibi'*^ 

'''  Delisle,  Mémoire  sur  l'Ecole  calligraphique  de  Tours,  pi.  Jll  {Mémoires  de 
l'Académie  des  in.icriplioiis ,  t.  XXXII). 

'•'  Retifsius,  Inscripliones  anluiuœ,  xx,  8a,  et  Fassioiici,  Iscrizioni  anliche, 
G3,  17  :  FECERVN,  elc. 

^^>  C'était  là,  comme  on  ie  sait,  une  erreur  des  plus  fréquentes  aux  bas 
temps  et  dans  laquelle  Giéjjoiro  de  Tours  s'accuse  de  tomber,  ttconfondant,  dit- 
il,  l'ablaliT  et  raccusaliln  {De  f^loria  Confessorum,  Prœfalio). 

f*'  I,  V.  11,  l 'i  et  it)i.  (Cf.  Corpus  iuscript.  grœc,  n"  989/i.) 


—  ^36  — 

Les  chrétiens  aussi  l'ont  employée;  à  chaque  page  les  re- 
cueils de  l'épigraphie  grecque  ou  latine  nous  en  offrent  des 
exemples.  DE  DONIS,  EX  DONIS  DEI.  DEDIT,  OFFRIT, 
FECIT,  y  lisons-nous,  en  même  temps  que  les  mots  TA  CA  GK 
TCON  COJN  nPOC(DePOMeN(i)  empruntés,  comme  les  précé- 
dents, au  langage  de  la  liturgie^-', 

La  formule  de  l'inscription  d'Aucli  se  retrouve,  avec  la 
même  faute,  de  donum  pour  de  dono  Dei,  dans  la  légende 
d'une  mosaïque  de  Grado  que  Bertoli  a  reproduite  en  fac- 
similé  : 

LAVRENTIVS  VC 

PALATINVS  VO 

TVM  CVM  SVIS 

SOLVIT  ET  DE  DO 

NVM  DEI  FECE 

RVNT  IN  PACE(') 

En  résumé,  je  proposerai  de  lire  ici,  avec  un  point  d'inter- 
rogation [)our  la  fin  de  la  seconde  ligne  : 

In  Dei  nomine  sancto.  Pekger 

Dcus  csto  cuni  ipso.  Oculi  invidiosi  crêpent.  De 
Dei  dono  Jona  fecit. 

Au  point  de  vue  paléographique,  notre  monument  n'est  pas 
sans  intérêt.  J'y  ai  signalé  un  G  d'une  forme  assez  exception- 
nelle, mais  fort  persistante.  L'O  affectant  la  figure  d'un  8  non 
fermé  par  le  haut,  et  qui  est  fréquent  dans  l'écriture  du  vu"  et 
du  vni^  siècle ^^^,  se  montre  ici,  pour  la  première  fois,  que  je 

")  Mabiilon ,  Muséum  italicum ,  p.  2 1 3  ;  Marini ,  dans  Mai ,  Scriptorum  veterum 
nova  collectio,  l.  V,  p.  80,  I102  ;  Fonlanini,  Disco  votivo,  p.  17  et  suivantes;  De 
Rossi,  Roma  solterr.  cristiana ,  t.  I,  p.  3oo,  etc. 

'^'  Soi  Kîipt£  à  ©eos  rifJiôiv  ta  aà  e'x  tùv  aùv  tsposBriKaitEv  (Renaudot, 
Lilur g.  orient.,  I.  I,  p.  i56). 

f^'   Le  atitickità  d'Aquileia,  p.  347. 

'*'  Delisle,  Authentiques  de  reliques  de  l'époque  mérovingienne  {Mélanges  d'his- 
toire et  d'archéologie  publiés  par  l'Ecole  française  de  Rome,  188/1,  pi.  I). 


—  /i37  — 

sache,  sur   un  monument  opigrapliique.  Je  n'ai  pas  encore 
rencontré  le  type  de  l'F  de  la  dernière  ligne. 

Je  m'occuperai  ailleurs  de  l'inscription  d'Aucli,  ne  m'étant 
proposé  ici  que  de  soumettre  à  l'Académie  la  lecture  d'une 
ligne  non  déchiffrée  jusqu'à  cette  heure. 


N°  XXXVI. 

COMMUMCATIONS  FAITES  À  L'ACADEMIE  D'ARCHEOLOGIE  CHRETIENNE. 
NOTE  DE  M.   EDMOND  LE  BLANT. 

(séance   du    20   DÉCEMBRE   1889.) 

L'Académie  sait  quel  ingénieux  usage  l'un  de  ses  plus 
illustres  associés,  M.  de  Rossi,  a  su  faire  des  inscriptions  mé- 
triques composées  par  le  pape  saint  Damase  pour  être  placées 
sur  la  tombe  des  martyrs,  comment  il  a  démontré  que  ces 
vers  avaient  été  gravés  dans  un  caractère  spécial  dû  au  calli- 
graphe  Furius  Dionysius  Philocahis,  comment  il  a  trouvé 
ainsi,  dans  quelques  débris  de  marbres  maintenant  faciles  à 
reconnaître,  des  lumières  inattendues  pour  rétablir  la  topo- 
graphie des  catacombes  romaines. 

L'un  de  ces  fragments,  récemment  exhumé  dans  le  cime- 
tière d'^  Saint-Laurent-hors-les-Murs,  donne  les  premiers 
mots  de  quatre  hexamètres  dont  l'un  paraît  indiquer  que  saint 
Damase  avait  fait  graver  les  noms  des  martyrs  de  la  voie  Ti- 
burlinc  sur  les  parois  d'un  édifice  dont  les  restes  ont  d'ailleurs 
été  retrouvés  dès  l'année  186/1. 

A  côté  des  pièces  qui,  comme  cette  dernière,  n'ont  pas  été 
relevées  dans  les  recueils  des  œuvres  de  l'illustre  pape,  il  en 
est  d'autres  qui,  au  contraire,  connues  par  les  seuls  manu- 
scrits, n'ont  pas  été  retrouvées  sur  les  marbres.  Telle  est  l'épi- 


—  /i38  — 

taphe  métrique,  composée  par  saint  Damase  pour  sa  sœur 
Irène,  morte  à  vingt  ans,  qui  débute  ainsi  : 

HOC  TVMVLO  SACRATA  DEO  NVNC  MEMBRA  QVIESCVNT. 
HAEC    SOROR    EST    DAMASI     NOMEN    SI   QVAERIS    IRENE 

{0pp.,  Carmen  xxxi.) 

Un  fragment,  découvert  dans  les  fouilles  du  Forum,  près 
de  l'église  des  Saints  Cosme  et  Damien ,  vient  de  nous  rendre 
la  partie  de  l'épitaphe  oii  figure  le  second  de  ces  vers.  Ainsi 
s'augmente  le  nombre  des  pièces  chrétiennes  métriques  qui, 
relevées  par  les  anciens  collectionneurs  de  poésies  lapidaires, 
se  retrouvent  en  original,  comme  nous  l'avons  déjà  vu  à 
Rome,  à  Vercelli,  et  chez  nous-mêmes,  à  Vienne. 

Si  l'épitaphe  d'Irène  n'avait  pas  été  déjà  connue,  rien  n'au- 
rait indiqué  que  le  débris  nouvellement  rendu  au  jour  nous 
conservât  le  texte  d'une  œuvre  de  saint  Damase.  Les  carac- 
tères spéciaux  qui  font,  entre  tant  d'autres,  reconnaître  les 
marbres  où  figurent  des  pièces  dues  à  sa  main,  ne  se  retrou- 
vent pas,  en  effet,  dans  l'épitaphe  d'Irène.  Le  fait  s'explique 
facilement  :  ç^Philocalus,  dit  M.  de  Rossi,  n'est  devenu  le 
calligraphe  de  saint  Damase  qu'après  l'élévation  de  ce  dernier 
au  pontificat,  et  c'est  avant  ce  temps  qu'est  morte  la  jeune 
fille.  » 

La  double  découverte  dont  je  parle  a  été  annoncée  dans  la 
dernière  séance  de  l'Académie  d'archéologie  chrétienne.  Son 
savant  secrétaire,  M.  Marucchi,  qui  a  bien  voulu  me  la  faire 
connaître,  a  signalé  de  nouvelles  fouilles  opérées  sur  le  lieu 
où  s'élevait  la  basilique  du  prêtre  saint  Valentin,  c'est-à-dire 
aux  portes  mêmes  de  Rome,  à  l'entrée  de  la  voie  Flaminienne. 
Des  fragments  d'une  inscription  damasienne,  qui  viennent  d'y 
être  trouvés,  montrent  que  le  pape  poète  avait  fait  graver 
une  pièce  de  vers  sur  le  tombeau  de  saint  Valentin. 

Une  découverte  importante  a  été  faite  à  Capharnaiim,  celle 


—  ^i39  — 

d'un  tombeau  creusé  dans  la  roche  vive  et  dont  l'entrée  est 
ornée  de  figures  d'animaux  fantastiques.  Sur  la  porte  sont 
sculptés  deux  vases  d'oii  s'échappent  des  pampres;  au-dessus, 
deux  dauphins  et,  plus  bas,  deux  colombes,  avec  une  croix 
accostée  des  lettres  symboliques  ACl).  A  l'intérieur  sont  trois 
tombeaux  en  forme  d'arcosolimn,  et  tout  auprès  une  autre 
chambre  sur  la  porte  de  laquelle  se  lit  une  inscription  grecque 
dont  je  n'ai  que  la  traduction  : 

Seigneur  Christ,  protège  Samuel  et  aie  pitié  de  ses  enfants. 

Des  dessins  des  deux  monuments  dont  a  parlé  le  R.  P.  Cozza, 
ont  été  présentés  par  M.  de  Rossi.  Le  savant  romain  a  signalé 
la  ressemblance  de  ces  tombes  à  arcosolia  avec  certaines  sé- 
pultures des  catacombes  de  Priscille  et  de  saint  Calliste.  Ces 
chambres  funéraires  paraissent  appartenir  au  vi^  siècle. 


APPENDICE  N°  V. 


SÉANCE  PUBLIQUE  ANNUELLE 

DU  VENDREDI    i>  a   ^OVEMBRE    1889. 


DISCOURS  D'OUVERTURE 

DE 

M.  BARBIER  DE   MEYNARD, 

PRÉSIDENT  DE  L'ANNEE  1889. 

Messieurs, 

Avant  de  proclamer  le  résultat  de  nos  concours,  avant  de 
vous  rappeler  les  succès  d'aujourd'hui  et  les  espérances  de 
demain,  au  risque  d'assombrir  les  débuts  de  cette  séance,  je 


dois  vous  parler  de  nos  deuils.  Ce  pieux  et  triste  devoir,  il  est 
bien  rare  que  votre  président  n'ait  pas  à  le  remplir  dans  le 
cours  d'une  année,  mais  celle  qui  va  bientôt  se  terminer  comp- 
tera pour  nous  parmi  les  plus  néfastes.  Elle  commençait  à 
peine  quand  mon  prédécesseur  vous  annonçait  la  perte  pré- 
maturée, quoique  trop  prévue,  d'un  de  nos  plus  jeunes  con- 
frères. Le  comte  Paul  Riant  ne  nous  a  appartenu  que  pendant 
deux  ans,  mais  le  mérite  de  ses  travaux  l'avait  fait  nôtre  de- 
puis longtemps.  11  nous  a  quittés  dans  la  pleine  maturité  de 
son  talent;  oublieux  du  mal  qui  le  minait,  jusqu'à  la  der- 
nière heure  il  est  resté  fidèle  à  sa  lâche,  l'accomplissant  avec 
la  foi  énergique,  avec  la  force  d'âme  de  ces  preux  de  Pales- 
tine dont,  mieux  que  personne,  il  a  connu  et  raconté  les 
exploits.  L'histoire  du  moyen  âge  et  des  croisades  perd  en  lui 
un  annaliste  merveilleusement  informé,  la  Société  de  l'Orient 
latin  son  fondateur  et  le  plus  zélé  de  ses  membres,  l'Académie 
un  confrère  qui,  dans  sa  trop  courte  apparition,  a  su  nous 
faire  apprécier  l'étendue  de  son  savoir  et  les  nobles  qualités 
de  son  cœur. 

La  mort  ne  s'est  pas  contentée  de  cette  seule  victime,  mais, 
par  un  contraste  cruel,  elle  a  attendu,  pour  nous  porter  de 
nouveaux  coups,  l'heure  où  la  grande  fête  de  l'industrie  et 
des  arts  que  Paris  a  donnée  au  monde  brillait  de  tout  son 
éclat.  Le  17  juillet,  s'éteignait  un  des  meilleurs  représentants 
delà  vieille  culture  classique,  notre  cher  et  bon  Charles  Ni- 
sard.  Personne  n'a  été  plus  que  lui  de  la  famille  académique. 
Vous  vous  rappelez  avec  quelle  ferveur  il  suivait  nos  séances, 
toujours  affable  et  souriant,  communicatif  même  en  dépit  de 
l'âge;  vous  l'entendez  encore  lisant,  d'une  voix  chaude  et 
émue,  les  vers  de  Fortunat  et  de  sainte  Radegonde.  Lati- 
niste consommé,  traducteur  élégant,  écrivain  d'un  goût  sévère 
sans  être  exclusif,  Ch.  Nisard,  dans  le  cours  de  sa  longue 
existence,  a  soutenu  vaillamment  l'honneur  do  son  nom,  un 


—  M\\   — 

nom  clier  aux  lettres  et  (jui  ne  réveille  que  tie  nobles  sou- 
venirs. 

Il  est  juste  de  rendre  le  même  hommage  à  M.  le  baron  de 
Wilte,  qui  nous  a  été  enlevé  quelques  jours  plus  tard.  Il  était 
le  doyen  de  nos  associés  étrangers  et  le  plus  assidu  depuis 
qu'il  avait  fait  de  la  France  sa  patrie  d'adoption.  Je  n'ai  pas  à 
vous  rappeler  les  services  qu'il  a  rendus  à  l'étude  des  monu- 
ments antiques,  où  il  exerçait  l'autorité  d'un  maître;  la  Gazette 
archéologique  qu'il  avait  fondée,  la  Revue  de  numismatique  qu'il 
dirigeait  de  concert  avec  Longpérier,  sont  là  pour  l'attester. 
Par  le  noble  usage  qu'il  faisait  de  sa  fortune,  par  son  obli- 
geance et  sa  courtoisie,  il  s'est  acquis  de  nouveaux  titres  à 
nos  plus  sympathiques  souvenirs. 

Après  l'érudit  laborieux  et  modeste  est  tombé  le  soldat 
illustre  dont  la  France  porte  le  deuil.  Le  général  Faidherbe 
n'avait  que  deux  passions  :  celle  du  devoir  et  celle  de  l'étude. 
Pendant  son  existence  si  bien  rem[)lie,  en  Algérie,  au  Sé- 
négal et  plus  tard  dans  le  fauteuil  où  de  glorieuses  infirmités 
le  clouaient,  il  n'a  jamais  interrompu  ses  recherches  érudites 
qui,  en  fortifiant  l'ethnographie  et  la  philologie  africaines, 
lui  ont  valu  l'honneur  de  siéger  parmi  nous.  C'est  à  ce  titre 
que  Faidherbe  a  appartenu  à  notre  Compagnie,  comme  il 
appartient  «i  la  France  et  à  l'histoire  par  l'éclat  de  ses  services 
militaires  et  son  héroïsme  au  jour  des  grandes  luttes. 

Après  ce  triple  deuil,  il  semble  que  la  mort  dut  être  satis- 
faite :  elle  a  pourtant  fait  encore  de  nouveaux  vides  parmi  nos 
collaborateurs  du  dehors  et  ce  sont  les  études  orientales  qu'elle 
n  plus  particulièrement  frappées.  C'était  un  orientaliste  émi- 
nent,  ce  Michel  Araari,  qui,  pendant  vingt  ans,  a  été  l'hôte 
de  la  France  et  qui,  en  dépit  des  llucluations  politiques,  en 
était  resté  l'ami  et,  comme  il  le  disait  lui-même,  l'obligé.  Il 
avait  appris  l'arabe  avec  Reinaud  et  Caussln  de  Perccval  et 
recueilli  à    la  Bibliothè([U('  nationale  les  matériaux  des  ou- 

XVII.  -'l 


—  h!x1  — 

vrages  historiques  qui  ont  rendu  son  nom  populaire  dans  son 
pays  natal  :  il  lègue  aussi  à  l'Italie  un  enseignement  oriental 
établi  sur  des  bases  solides,  l'exemple  de  la  fidélité  aux  sou- 
venirs et  celui  du  plus  pur  patriotisme  allié  au  culte  désin- 
téressé de  la  science. 

Il  y  a  quinze  jours  à  peine,  au  début  d'une  de  nos  séances, 
j'annonçais  à  l'Académie  une  perte  nouvelle,  celle  d'un  autre 
de  nos  associés  étrangers,  M.  Gabriel  Cobet,  professeur  à 
l'Université  de  Leyde  depuis  18/17.  Helléniste  d'un  savoir 
étendu  et  d'un  goût  délicat,  doué  de  cette  intuition  qui, 
alliée  à  la  sagacité,  fait  les  excellents  critiques,  M.  Cobet 
était  un  maître  en  philologie  grecque,  et  le  dialecte  attique, 
en  particulier,  n'avait  j)lus  de  secrets  pour  lui.  Toutes  ces 
qualités  se  retrouvent  dans  ses  belles  éditions  de  Diogène 
Lacrce,  de  XAnahase  de  Xénophon  et  surtout  dans  la  revue 
Mnémosyne  dont  il  a  été,  pendant  un  demi-siècle,  le  principal 
collaborateur.  Cobet  écrivait  et  parlait  le  latin  avec  une  rare 
facilité  et  il  faisait  toujours  son  cours  en  latin.  C'est  chez  lui 
un  trait  de  ressemblance  de  plus  avec  ces  grands  érudits 
des  xvi*  et  xvn"  siècles  qui  ont  illustré  la  Hollande  et  dont  il 
était  l'héritier  direct. 

Je  dois  rendre  enfin  un  dernier  hommage  à  trois  de  nos 
correspondants  qui  se  sont  suivis  de  près  dans  la  tombe  :  le 
D""  Reboud,  un  des  fondateurs  de  l'étude  des  idiomes  ber- 
bères, qui  a  longtemps  enrichi  notre  Commission  du  Corpus  de 
précieuses  inscriptions;  —  William  Wright,  une  des  illustra- 
tions de  l'orientalisme  en  Angleterre,  qui  a  professé  avec  éclat 
à  l'Université  de  Cambridge;  —  Gustave  Weil,  ancien  pro- 
fesseur de  langues  sémitiques  à  Heidelberg,  envers  qui  l'his- 
toire musulmane  a  de  sérieuses  obligations. 

Quelle  longue  et  triste  nomenclature.  Messieurs,  et  comme 
elle  s'accorde  mal  avec  l'ancienne  devise  de  notre  Compagnie  : 
Vetal  mori!  Mais,  si  cruellement  ironique  qu'elle  soit,  devant 


la  iVagilito  de  nos  existences,  cette  devise  est  pourtant  l'ex- 
pression véritable  de  l'esprit  scientifique  qui  est  notre  raison 
d'être,  qui  inspire  nos  travaux  et  les  préserve  de  la  sénilité 
rapide  et  de  l'oubli  réservés  aux  œuvres  frivoles.  C'est  bien 
ainsi  que  l'entendaient  nos  prédécesseurs,  ceux  qu'on  appelait 
alors  la  petite  Académie,  lorsqu'ils  inscrivaient  ce  défi  à  la  mort 
au  fronton  de  leur  salle  de  séances.  Aujourd'hui  plus  que 
jamais,  ils  en  reconnaîtraient  la  justesse  en  entendant  l'énu- 
mération  des  travaux  entrepris  sous  vos  auspices  et  que  vous 
avez  mission  de  couronner.  Ce  sera  en  même  tem[)s  pour 
nous  le  meilleur  dédommagement  aux  douloureux  souvenirs 
que  j'évoquais  tout  à  l'heure  et  la  meilleure  raison  d'avoir  foi 
en  l'avenir. 

Le  sujet  pro[)osé  pour  le  prix  ordinaire  était  une  Elude  cri- 
tique sur  le  ihéùlre  hindou.  Dans  l'état  actuel  des  études  san- 
scrites, il  eût  été  prématuré  de  demander  une  histoire  pro- 
prement dite  de  l'art  dramatique  dans  l'Inde;  toucher  aux 
questions  d'origine  est  toujours  chose  difficile,  et  en  particu- 
lier dans  ce  pays  des  merveilles  où  la  genèse  et  le  développe- 
ment du  théâtre  se  perdent,  comme  son  passé  historique, 
dans  le  crépuscule  de  la  légende  et  de  la  fable.  Il  était  donc 
jjrudent  de  se  borner  à  l'examen  des  œuvres  dramatiques  qui, 
à  partir  du  vi''  siècle  environ,  occupent  une  place  éminente 
dans  la  littérature  indienne.  L'unique  mémoire  présenté  à 
notre  examen  se  recommande  par  une  vue  large  et  originale 
des  différents  aspects  de  la  question,  et  aussi  par  la  solidité 
et  la  bonne  direction  des  recherches.  Peut-être  l'auteur  n'a- 
t-il  pas  toujours  observé  la  juste  mesure,  par  exemple  quand 
il  suppose  que  la  théorie  du  drame  a  précédé,  chez  les  Hindous, 
la  pratique  littéraire;  peut-être  aussi  pourrait-on  lui  repro- 
cher quelques  longueurs,  quelques  digressions  superllues. 
Mais  ces  taches  légères  n'enlèvent  rien  aux  qualités  sérieuses 
de  l'ensemble.  En  décernant  le  prix  à  l'auteur  du  mémoire, 


—  hhlx  — 

r 

M.  Sylvain  Lévi,  maître  de  conf«'?rences  à  l'Ecole  des  hautes 
études,  l'Académie  est  heureuse  d'encourager  un  essai  qui 
permet  de  hien  augurer  de  l'avenir  des  études  indiennes  si 
cruellement  éprouvées,  en  France,  dans  le  cours  de  ces  der- 


nières années. 


Vous  êtes  habitués  à  considérer  le  concours  des  Antiquités 
nationales,  et  à  juste  titre,  comme  un  des  plus  importants 
que  vous  ayez  à  juger  par  le  nombre  et  la  valeur  des  travaux 
qui  y  figurent.  Comment  s'en  étonner  quand  on  songe  aux 
richesses  que  le  sol  de  notre  pays  offre  à  la  curiosité  de  l'érudit 
et  ù  toutes  celles  qu'il  tient  encore  en  réserve?  Je  ne  saurais 
mieux  louer  le  concours  de  cette  année  qu'en  disant  qu'il  a 
dépassé  ceux  des  années  ])récédentes.  Trente-cinq  concurrents 
y  ont  pris  part,  qui  ont  tous  fait  preuve,  à  des  degrés  divers, 
de  qualités  sérieuses  et  d'un  véritable  esprit  scientifique  :  je 
ne  saurais  d'ailleurs  rien  de  plus  honorable  pour  eux  que  le 
minutieux  examen  et  les  longues  hésitations  qui  ont  précédé 
le  jugement  définitif  de  votre  Commission. 

La  première  médaille  a  été  accordée  à  M.  Jarry  pour  son 
Mémoire  sur  la  vie  politique  de  Louis  de  France,  duc  d  Orléans. 
L'auteur  a  voulu  en  quelque  sorte  réhabiliter  ce  prince  que 
l'on  ne  connaissait  guère  jusqu'il  présent  que  par  ses  qualités 
brillantes  et  un  peu  superficielles.  Dans  le  courtisan  spirituel, 
le  protecteur  des  lettres,  il  y  avait  aussi  un  homme  d'Etat, 
un  fin  politique  qui  sut  gagner  à  la  France  de  puissants  alliés 
et  tenir  en  respect  la  maison  de  Bourgogne,  dont  la  rivalité 
ne  recula  pas  devant  le  crime.  C'est  cet  aspect  ignoré  du  fils 
de  Charles  V  que  M.  Jarry  met  en  lumière,  utilisant  pour 
cela,  avec  un  véritable  talent  de  mise  en  œuvre,  non  seule- 
ment les  chroniques  et  les  documents  publiés,  mais  aussi  les 
archives  de  France  et  de  l'étranger.  Voici  donc  une  excellente 
thèse  de  plus  à  mettre  à  l'actif  de  l'Ecole  des  chartes,  qui  en 
compte  d(^à  bon  nombre  de  si  remarquables. 


—  Vif)  — 

M.  Paul  Guériii  a  obtenu  la  dcuxièine  inédaillc  pour  S(3S 
Dociimenls  concernant  le  Poitou.  Vous  connaissez  déjà  ce  vaste 
recueil  dont  les  quatre  premiers  volumes  ont  été  envoyés  aux 
concours  précédents.  On  y  trouve  tous  les  actes  relatifs  au 
Poitou  que  fournissent  les  registres  du  Trésor  des  chartes. 
A  ces  documents  importants  M.  Guérin  a  joint  de  savantes 
préfaces  et  un  appareil  de  notes  qui  font  honneur  à  sa  saga- 
cité. La  récompense  que  vous  lui  décernez  ne  s'adresse  pas 
seulement  à  son  œuvre  si  méritoire;  elle  doit  être  considérée 
aussi  comme  un  encouragement  promis  à  toute  entreprise 
analogue  qui  contribuera  à  faire  mieux  connaître  nos  archives 
provinciales  du  xiv*  et  du  xv*  siècle. 

Nous  quittons  momentanément  la  France  avec  M.  Fallu  de 
Lessert  qui  reçoit  la  troisième  médaille  pour  son  livre  sur  Les 
fastes  de  la  Numiche  sons  la  domination  romaine.  L'auteur,  qui 
doit  à  ses  éludes  spéciales  et  à  plusieurs  explorations  en  Al- 
gérie une  excellente  préparation,  a  tiré  le  meilleur  parti  des 
documents  épigrapliiques  dont  le  sol  africain  n'est  jamais  avare. 
De  ces  textes  combinés  heureusement  avec  les  renseignements 
des  auteurs  anciens  ressort  pour  nous  la  connaissance  [)osi- 
tive  du  rôle  politique  et  militaire  des  légats  de  Numidie.  M.  de 
Lessert  en  dresse  la  liste  aussi  complète  que  possible,  en  ré- 
tablit la  succession  dans  l'ordre  chronologique  le  plus  rigou- 
reux, en  complète  les  lacunes  et  nous  fournil  de  la  sorte  dans 
un  récit  suivi  et  bien  coordonné  d'utiles  niatériaux  pour  l'his- 
toire î'énérale  de  l'Empire  romain. 


o 


Plusieurs  fois  déjà,  dans  les  années  d'abondance  comme 
celle-ci.  l'Académie,  n'ayant  pas  assez  des  trois  médailles  que 
comporte  régulièrement  le  concours  des  Antiquités  nationales, 
n'a  pas  hésité  à  demander  une  médaille  supplémentaire  au 
Ministère  de  l'inslruclioM  [)ul)lique,  qui  ne  l'a  jamais  refusée. 
C'est  pour  MM.  Favre  et  Leceslre  qu'elle  a  obtenu,  celte 
année,    une  quatrième  médaille,  et  celte   faveur  exception- 


—  Z(/i6  — 

nelle  est  pleinement  justifiée  par  le  mérite  de  leur  édition  cri- 
tique du  Jouvencel  de  Jean  de  Bueil,  suivie  du  commentaire  de 
Guillaume  Tringant.  On  sait  que  le  maréchal  de  Bueil,  un 
des  compagnons  d'armes  de  Jeanne  d'Arc,  s'est  plu  à  retracer 
sous  une  forme  romanesque  les  souvenirs  de  sa  vie  militaire 
où  abondent  les  plus  curieuses  révélations  sur  les  idées  et  les 
mœurs  de  la  France  du  xv*  siècle.  Mais  il  eût  été  difficile  de 
les  découvrir  sous  le  voile  d'allégories  et  de  dénominations 
fictives  qui  les  recouvre,  si  Guillaume  Tringant,  son  secré- 
taire, n'avait  pris  soin  de  les  expliquer  pour  le  plus  grand 
profit  de  la  postérité.  On  ne  possédait  de  ce  curieux  ouvrage 
et  du  commentaire  qui  l'accompagne  que  d'anciennes  édi- 
tions d'une  exactitude  douteuse;  les  deux  nouveaux  éditeurs 
en  ont  établi  le  texte  sur  un  manuscrit  très  voisin  de  l'original , 
en  y  joignant  une  bonne  notice  biographique  sur  Jean  de 
Bueil  et  les  éclaircissements  littéraires  qui  peuvent  la  com- 
pléter. Nous  devons  à  cette  collaboration  consciencieuse  la 
restitution  d'une  œuvre  qui  gardera  sa  place  parmi  les  meil- 
leurs documents  relatifs  à  cette  période  si  intéressante  de 
notre  histoire  nationale. 

C'est  à  la  même  époque  que  se  rapportent  les  Archives  d'un 
serviteur  de  Louis  XI,  publiées  par  M.  le  duc  de  la  Trémoïlle, 
à  qui  vous  avez  attribué  la  première  mention  honorable.  Le 
sire  de  la  Trémoïlle,  seigneur  de  Craon,  héros  de  cette  mono- 
graphie, a  été  non  seulement  le  témoin,  mais  un  des  prin- 
cipaux acteurs  dans  les  événements  considérables  de  son 
temps  et  notamment  dans  les  négociations  qui  ont  préparé  la 
restitution  de  la  Bourgogne  à  la  couronne  de  France.  C'est 
au  chartrier  de  Thouars,  c'est-à-dire  à  ses  propres  archives  de 
famille,  que  M.  de  la  Trémoïlle  a  emprunté  les  renseignements 
qui  lui  ont  permis  de  rétablir,  avec  une  parfaite  exactitude, 
le  rôle  polilicpie  d'un  ài^  ses  aïeux.  Il  a  joint  au  document 
original  de  nombreux  extraits  et  annotations,  pour  lesquels 


—  Mxl  — 
il  a  mis  à  conUibutioii  le  Trésor  des  chaiies,  les  repislres 
(lu  Parlement  et  les  archives  de  la  Côle-d'Or.  L'Académie 
avait  donné,  l'année  dernière,  une  mention  hors  rang  au 
savant  éditeur  pour  la  publication  de  quatre  documents  pro- 
venant de  la  même  source.  En  lui  accordant  une  nouvelle 
mention,  celte  année,  vous  voulez  surtout  reconnaître  le  noble 
usage  qu'il  fait  des  trésors  historiques  de  sa  famille,  l'acti- 
vité et  le  soin  avec  lesquels  il  les  rend  accessibles  au  monde 
savant. 

Si  le  concours  n'avait  eu,  cette  fois,  une  importance  excep- 
tionnelle, c'est  sans  doute  mieux  qu'une  mention  honorable 
qu'aurait  obtenue  M.  Charles  More!,  pour  son  mémoire  inti- 
tulé :  Gcnècc  cl  la  colonie  de  Vienne.  Celte  savante  étude,  qui 
nous  fait  connaître  sur  le  vif  les  actes  de  l'administration 
romaine  en  Gaule,  suflirait  à  elle  seule  pour  prouver,  s'il  en 
était  encore  besoin,  de  quelles  clartés  nouvelles  l'épigraphie 
latine  peut  illustrer  l'histoire  et  la  topographie  de  notre  sol 
nalal. 

Une  troisième  mention  est  partagée  entre  MM.  Bleichcr  et 
Faudei,  auteurs  du  recueil  intitulé:  Matériaux  pour  une  étude 
prctmtorique  de  ï Alsace.  C'est  une  œuvre  à  la  fois  de  science  et 
de  patriotisme,  conduite  avec  une  compétence  et  un  sentiment 
de  réserve  dignes  de  tout  éloge.  Outre  ses  renseignements  sta- 
tistiques, elle  fournit  à  la  géologie,  à  l'anthropologie  et  à 
l'étude  de  l'art  ancien,  notamment  à  la  céramicjue,  des  don- 
nées bonnes  à  recueillir. 

Ce  ne  sont  certainement  pas,  comme  dans  le  travail  pré- 
cédent, les  documents  qui  ont  fait  défaut  à  M.  A.  Prudhomme 
pour  son  Histoire  de  Grenoble,  qui  obtient  la  quatrième  men- 
tion honorable.  Bien  que  toutes  les  parties  de  son  livre  ne 
présentent  pas  le  même  intérêt,  la  Commission  a  voulu  ré- 
compenser l'heureux  emploi  ([u'il  a  su  faire  des  archives  de 
l'Isère,  le  labeur  considérable  qui  en  est  résulté  et  la  sagesse 


—  /i/i8  — 

(les  conclusions  qu'il  en  a  tirées.  D'ailleurs  toutes  ces  mono- 
graphies locales  sont  dignes  d'encouragement,  et,  plus  que 
toute  autre  province,  le  Dauphiné,  par  le  rôle  important  qu'il 
a  joué,  méritait  d'avoir  son  historien. 

La  cinquième  mention  est  attribuée  à  M.  Henri  Stein  pour 
son  livre  sur  Olivier  de  la  Marche.  Ce  personnage,  qui  fut 
secrétaire  de  Charles  le  Téméraire,  maître  d'hôtel  de  Maxi- 
milien  et  précepteur  de  Philippe  le  Beau,  a  laissé  de  sa  vie 
accidentée  des  souvenirs  historiques  sous  forme  de  mémoires 
qui  ont  servi  de  base  au  travail  de  M.  Stein.  Malgré  quelques 
erreurs  de  détail,  surtout  en  ce  qui  touche  l'histoire  littéraire, 
son  récit  est  clair,  bien  conduit  et  d'une  lecture  instructive  et 
attrayante. 

M.  d'Espinay,  ancien  conseiller  à  la  cour  d'appel  d'Angers, 
a  obtenu  une  sixième  mention  honorable  pour  son  livre  sur  la 
Coutume  de  Touraine  au  xv'  siècle.  Le  savant  magistrat  ne  s'est 
pas  borné  à  rétablir  dans  son  intégrité  le  texte  devenu  si  rare 
de  1/161  ;  il  y  a  joint  un  glossaire  qui  donne  le  sens  précis 
des  termes  juridiques,  et  une  longue  introduction  où  les  prin- 
cipes de  droit  et  les  règles  de  procédure  sont  exposés  de  la 
façon  la  plus  lumineuse.  Le  jurisconsulte  et  même  l'historien 
auront  beaucoup  à  prendre  dans  ce  recueil  qui  dénote  une 
connaissance  profonde  des  textes  angevins  du  moyen  âge. 

Faute  d'avoir  à  sa  disposition  un  ])lus  grand  nombre  de 
récompenses,  la  Commission  s'est  vue  forcée  cette  année,  et  ce 
n'est  pas  la  première  fois  qu'elle  en  exprime  le  regret,  d'écarter 
ou  d'ajourner  d'autres  travaux  estimables  qui  auraient  eu  un 
meilleur  sort  si  la  moisson  avait  été  moins  abondante.  Sans 
cette  circonstance,  l'Académie  aurait  certainement  accordé  ses 
suffrages  aux  Itinéraires  de  Philippe  le  Hardi  et  de  Jean  sans 
Peur,  par  M.  Ernest  Petit;  à  l'Histoire  de  la  baronnie  de  Craon, 
par  M.  Jaubert;  à  la  Maison  de  Graule,  élude  sur  les  Convers 
de  Cileaux  en  Auvergne,  par  M.  A.  de  Rochemonleix;  à  l'/i/s-- 


—  /j/i'J  — 

loire  monumentale  de  la  France,  bon  livre  du  vulgarisation,  par 
M.  Sainl-l^uil;  à  Y  Etude  sur  la  cathédrale  et  le  palais  épiscopalde 
Paris,  par  M.  Mortel;  enfin  à  deux  ouvrages  en  cours  d'exé- 
cution et  dont  il  convient  d'attendre  l'achèvement,  V Histoire 
de  l'Afrique  septentrionale,  par  M.  Mercier,  et  ÏEpi^raphie 
romaine  du  Poitou  et  de  la  Saintonge,  par  M.  Espérandieu. 

Cette  liste,  dont  vous  voudrez  bien  excuser  l'inévitable  sé- 
cheresse, était  un  acte  de  justice.  Les  cités  grecques  se  fai- 
saient un  titre  d'honneur  de  figurer  au  catalogue  d'Homère  : 
je  n'oserais  espérer  que  cette  énumération  aura  le  même  prix 
aux  yeux  des  savants  que  je  viens  de  nommer,  mais  je  me  se- 
rais reproché  de  passer  sous  silence  au  moins  le  titre  d'œuvres 
érudites  exécutées  avec  un  talent  et  une  sincérité  qu'on  ne 
saurait  méconnaître. 

C'est  encore  l'élude  de  notre  pays,  de  son  passé  politique 
et  littéraire  que  la  généreuse  fondation  du  baron  Gobert  a 
pour  but  d'encourager;  il  n'y  a  donc  pas  lieu  de  s'étonner  de 
la  noble  émulation  qu'elle  suscite  et  de  la  valeur  qu'on  attache 
à  cette  récompense.  Des  cinq  ouvrages  présentés  au  concours, 
celui  de  M.  Noël  Valois,  intitulé  :  Le  Conseil  du  Roi  aux  xiy% 
Av^  et  xvf  siècles,  a  obtenu  le  premier  rang.  L'auteur  n'a  pas 
reculé  devant  l'étendue  d'une  pareille  tâche  :  étudier  les  ori- 
gines, les  progrès  et  le  fonctionnement,  depuis  Philippe  le 
Bel  jusqu'à  Louis  XIV,  de  ces  Conseils  de  la  couronne  qui 
contenaient  en  germe  notre  Conseil  d'Etat.  M.  Valois  en  avait 
donné  en  quelque  sorte  les  prémices  en  publiant  Vlnventaire 
des  arrêts  du  Conseil  d'Etat  sous  Henri  IV,  précédé  d'une  savante 
introduction.  Mais,  si  remarquable  que  fût  ce  premier  travail, 
il  ne  reposait  que  sur  l'autorité  des  registres,  sans  fournir 
aucun  détail  sur  le  personnel  même  des  conseils;  le  présent 
ouvrage  comble  heureusement  cette  lacune  et  nous  donne 
une  série  d'études  sur  les  conseillers  royaux,  la  nature  de 
eurs  fonctions,  leurs  opinions  politiques  et  religieuses,  fin- 


—  /i50  — 

11  uence  qu'ils  exerçaient,  etc.  C'est,  en  un  mot,  une  œuvre 
personnelle  et  originale  sur  une  des  plus  importantes  institu- 
tions de  la  France,  où  se  retrouvent  les  qualités  ordinaires 
de  l'auteur  :  persévérance  et  sûreté  dans  les  recherches,  clarté 
et  précision  dans  l'arrangement  des  faits. 

Le  mémoire  de  M.  Auguste  Molinier,  à  qui  est  dévolu  le 
second  prix,  est  intitulé  :  Géographie  historique  de  la  province 
fie  Lano-ucdoc  au  moyen  âge.  L'entreprise  présentait  de  sérieuses 
difficultés.  Il  ne  s'agit  plus  ici  d'une  institution  exactement 
circonscrite  et  sur  laquelle  les  documents  jettent  toute  la  lu- 
mière désirable:  les  renseignements  au  contraire  sont  épars, 
souvent  contradictoires  et  suspects;  chaque  localité  présente 
un  petit  problème  de  topographie  et  les  chances  d'erreur  sont 
fréquentes  dans  ce  réseau  de  circonscriptions  administratives 
qui,  depuis  l'époque  romaine  jusqu'aux  temps  modernes,  ont 
subi  de  si  nombreux  remaniements.  Il  était  juste  de  tenir 
compte  de  ces  difficultés,  et  de  juger  l'ensemble  sans  se  mon- 
trer trop  rigoureux  sur  les  détails.  En  donnant  le  second  prix 
à  M.  Molinier,  l'Académie  a  entendu  récompenser  moins  une 
œuvre  de  tous  points  originale  et  définitive,  qu'une  coura- 
geuse tentative  de  complément  à  la  belle  histoire  du  Lan- 
guedoc de  Dom  Vaissète,  qui  fait  tant  d'honneur  a  l'érudition 
bénédictine. 

D'autres  travaux,  recommandables  par  le  choix  du  sujet  et 
le  mérite  de  l'exécution,  avaient  été  présentés  à  l'examen  de 
la  Commission  :  La  maison  du  Temple  de  Pans,  par  M.  Henri 
de  Curzon,  des  Archives  nationales;  Les  registres  d'Honorms  IV, 
par  M.  Maurice  Prou,  ancien  élève  de  l'Ecole  française  de 
Rome  et  de  l'Ecole  des  chartes.  C'est  toujours  pour  nous  un 
regret  de  constater  que  les  limites  de  la  fondation  ne  nous 
permettent  pas  de  donner  mieux  qu'une  simple  citation  à  des 
œuvres  méritoires  qui  rencontreront  un  accueil  favorable  dans 
le  monde  de  l'érudition. 


—  ^51   — 

Le  prix  qui,  d'après  les  volonlés  d'un  amateur  éclairé, 
M.  Allier  de  Hauteroche,  doit  récompenser,  tous  les  deux  ans, 
le  moillctir  ouvrage  sur  la  numismatique  ancienne,  est  dévolu 
à  M.  Théodore  Reinach  pour  son  mémoire  sur  Les  monnaies 
de  trois  royaumes  d'Asie  Mineure.  Cette  étude,  qui  com[)rend 
les  séries  monétaires  de  Cappadoce,  de  Bithynie,  et  les  mon- 
naies des  rois  de  Pont,  exigeait  de  longues  recherches.  M.  Rei- 
nach les  a  poursuivies  avec  persévérance,  ne  négligeant  au- 
cune des  indications  que  j)ouvaient  lui  fournir  les  grandes 
collections  publiques  de  Paris  et  de  Londres  et  aussi  plusieurs 
collections  particulières.  Si  quelques-unes  des  attributions 
proposées  par  l'auteur  peuvent  faire  naître  des  ol)jections, 
notamment  dans  la  suite  des  rois  de  Pont,  il  n'en  est  pas 
moins  juste  de  reconnaître  que  la  richesse  des  matériaux 
réunis,  l'heureux  emploi  qui  en  est  fait,  la  critique  judicieuse 
qui  préside  à  leur  distribution  donnent  une  valeur  sérieuse  à 
cet  ouvrage  et  permettent  de  le  considérer  comme  réalisant 
un  progrès  véritable  dans  l'étude  des  monnaies  anciennes. 

En  décernant  le  prix  fondé  par  le  marquis  de  la  Grange  à 
M.  Emile  Picot,  la  Commission  n'a  pas  voulu  seulement  l'at- 
tribuer aux  deux  éludes  qu'il  avait  présentées  au  concours  : 
Le  monologue  dramatique  et  Les  moralités  polémiques  dans  l'an- 
cien théâtre  français.  Elle  a  entendu  aussi  récompenser  l'en- 
semble des  travaux  de  M.  Picot,  ses  catalogues  qui  sont  des 
modèles  d'érudition  bibliographique,  ses  nombreuses  disser- 
tations qui  fournissent,  soit  à  l'étude  de  notre  poésie  nationale 
au  moyen  âge,  soit  à  la  bibliographie  générale  et  à  l'histoire 
littéraire,  les  renseignements  les  plus  variés  et  les  plus  dignes 
de  confiance. 

L'Académie  avait  mis  au  concours,  pour  le  prix  Bordiii  de 
cette  année,  X Elude  des  sources  qui  ont  servi  à  Tacite  pour  com- 
poser ses  Annales  et  ses  Histoires;  c'est  à  regret  qu'elle  se  voit 
obligée  de  [)roroger  la  question  au  concours  de  i8()i,  aucun 


des  mémoires  soumis  à  son  examen  n'ayant  réuni  les  condi- 
tions exigées.  Qu'il  me  soit  permis  de  rappeler,  à  l'occasion 
du  même  concours,  que  différentes  questions  d'un  intérêt 
réel,  soit  pour  la  philologie  et  la  géographie  orientales,  soit 
pour  l'histoire  littéraire  du  moyen  âge,  n'ont  provoqué,  jus- 
qu'à présent,  aucun  mémoire.  L'Académie  se  plaît  à  espérer 
qu'elle  n'aura  pas  à  laisser  encore  sans  emploi ,  l'année  pro- 
chaine, une  des  plus  libérales  fondations  dont  l'Institut  ait 
été  doté. 

Je  pourrais,  jusqu'à  un  certain  point,  exprimer  le  même 
vœu  au  sujet  du  prix  que  notre  ancien  confrère,  M.  Stanislas 
Juhen,  a  fondé  pour  encourager  l'étude  qui  a  été  l'unique 
passion  de  sa  vie,  et  l'honneur  de  son  enseignement  au  Col- 
lège de  France.  Le  prix  destiné  à  couronner  le  meilleur  ou- 
vrage relatif  à  la  Chine  ne  sera  pas  non  plus  décerné  celle 
année,  aucun  des  ouvrages  présentés  ne  répondant  complè- 
tement aux  vues  du  fondateur.  Toutefois  votre  Commission 
a  cru  pouvoir  allouer  une  récompense  de  mdle  francs  au 
P.  Boucher  pour  son  recueil  de  textes  destinés  à  faciliter  l'étude 
de  la  langue  mandarine.  Elle  a  jugé  équitable  d'accorder,  au 
même  titre,  une  somme  de  cinq  cents  francs  à  M.  Terrien  de 
Lacouperie,  pour  l'ensemble  de  ses  recherches,  mais  en  fai- 
sant cependant  toute  réserve  sur  les  opinions  émises  par  cet 
auteur  touchant  l'ethnographie,  l'origine  de  l'écriture  et  des 
livres  canoniques  chez  les  anciens  Chinois. 

Ce  ne  sont  plus  les  recherches  d'une  érudition  sédentaire 
que  M.  Benoît  Garnier  a  voulu  encourager  en  nous  léguant 
une  somme  de  quatre  cenl  mille  francs,  mais  de  véritables 
expéditions  scientifiques  dans  les  régions  où  il  avait  lui-même 
servi  la  France  comme  consul,  l'Afrique  centrale  et  la  haute 
Asie.  L'immense  étendue  de  ce  champ  d'exploration  et  l'obliga- 
tion d'y  pourvoir  chaque  année  n'ont  pas  été  sans  créer  quel- 
ques embarras  à  notre  Compagnie.  Elle  a  fidèlement  inter- 


—  ^53  — 

niV'té  les  intentions  du  donateur,  en  appliquant  les  arrérages 
de  sa  riche  fondation  d'abord  à  des  recherches  philologiques 
dans  le  Sénégal  et  en  subventionnant,  l'année  dernière,  trois 
pères  des  Missions  de  l'Afrique  équatoriale.  Ces  courageux 
explorateurs,  aussi  dévoués  aux  intérêts  de  la  science  qu'à 
ceux  de  la  religion,  parcourent,  en  ce  moment,  les  régions 
situées  au  nord  du  lac  Nyanza  et  les  grands  lacs  de  l'intérieur: 
ils  répondront  bientôt,  je  l'espère,  aux  questions  d'ethnogra- 
phie, de  linguistique  et  de  géographie  commerciale  sur  les- 
quelles vous  avez  appelé  leur  attention.  En  attendant  les  rap- 
ports qu'ils  ne  manqueront  pas  de  nous  adresser,  et  pour 
continuer  leur  œuvre,  vous  venez  d'attribuer  au  P.  Augouard, 
])rovicaire  apostolique  du  Conga  français,  une  somme  de  six 
mille  cinq  cents  francs,  en  le  chargeant  de  recueillir  des  ren- 
seignements du  même  ordre  parmi  les  tribus  établies  sur  les 
rives  de  l'Oubangui  et  du  haut  Ogowé. 

Les  prix  dont  vous  venez  d'entendre  l'énumération  ont  tous 
une  origine  française  :  ils  sont  dus  à  la  générosité  d'anciens 
confrères  ou  d'amateurs  éclairés,  qui  ont  tenu  à  honneur  de 
favoriser,  avec  le  patronage  et  sous  la  direction  de  l'Aca- 
démie, le  développement  des  sciences  historiques  et  philolo- 
giques. Le  noble  exemple  donné  par  nos  compatriotes  ne 
pouvait  manquer,  tôt  ou  tard,  de  se  propager  hors  de  France. 
Un  des  membres  les  plus  distingués  de  la  Société  historique 
de  New-York,  M.  Loubat,  a  doté  l'Académie  d'une  rente  an- 
nuelle de  mille  francs ,  qui  permet  de  donner,  tous  les  trois 
ans,  un  prix  de  trois  mille  francs  au  meilleur  ouvrage  publié 
sur  l'Amérique  du  Nord.  Le  donateur  voulait  laisser  un  champ 
aussi  large  que  possible  aux  travailleurs.  Dans  cette  pensée, 
il  ouvrait  à  leurs  investigations  l'histoire,  la  géographie,  l'ar- 
chéologie, l'élude  des  races  et  des  langues  et  même  celle 
de  la  numismatique  américaines.  Mais  avec  une  bonne  vo- 
lonté qui  double  le  prix  de  ses  lii)érales  dispositions,  M.  Lou- 


—  A5/1  — 

bat  n'a  pas  hésité,  d'accord  avec  nous,  à  resserrer  un  peu  les 
limites  de  son  premier  programme,  afin  d'établir  plus  facile- 
ment la  comparaison  entre  les  concurrents.  Il  a  fait  plus  en- 
core :  par  un  don  additionnel  de  trois  mille  francs,  il  nous  a 
fourni  les  moyens  d'adjuger,  dès  cette  année,  le  prix  qui  por- 
tera désormais  son  nom.  Nous  l'avons  partagé  entre  M.  Léon 
de  Rosny,  professeur  à  l'Ecole  des  langues  orientales  vivantes, 
pour  son  travail  si  curieux  de  paléographie  américaine,  inti- 
tulé: Codex  Peresianus,  et  M.  Rémi  Siméon  qui,  en  publiant 
les  Annales  de  Chmalpahin,  a  fait  preuve  d'une  connaissance 
approfondie  de  l'ancienne  langue  du  Mexique.  C'est  en  1892 
que  le  nouveau  prix  sera  donné  pour  la  seconde  fois.  Nous 
croyons  devoir,  dès  à  présent,  rappeler  aux  concurrents  que, 
parmi  les  ouvrages  relatifs  à  l'histoire  américaine,  ceux-là 
seuls  seront  admis  à  concourir,  qui  s'arrêtent  à  la  date  de 
1776,  c'est-à-dire  aux  débuts  de  la  guerre  de  l'Indépen- 
dance. 

J'arrive  maintenant  aux  deux  Ecoles  d'Athènes  et  de  Rome, 
qu'on  a  surnommées  les  k  Filles  de  l'Académie  5?  :  elles  pro- 
cèdent de  nous,  il  est  vrai,  à  peu  près  comme  Minerve  de 
Jupiter;  mais  elles  justifient,  chaque  jour  davantage,  ces 
liens  de  parenté  intellectuelle  par  l'activité  et  le  succès  de 
leurs  travaux.  Les  lenteurs  inévitables  que  subit  l'envoi  de 
leurs  mémoires  m'obligent  à  réunir  dans  un  résumé  rapide 
le  résultat  de  ces  deux  dernières  années. 

M.  Fougères,  l'heureux  explorateur  de  Délos,  a  ouvert  la 
tranchée,  depuis  1887,  en  Arcadie  sur  l'emplacement  de 
Mantinée,  un  des  trois  boulevards  destinés  à  protéger  l'At- 
lique  contre  les  empiétements  de  Sparte.  Outre  l'enceinte  et  le 
théâtre  dont  il  rétabht  avec  certitude  la  topographie,  M.  Fou- 
gères a  mis  au  jour  bon  nombre  d'inscriptions  intéressantes  et 
des  vestiges  de  sculpture  où  il  serait  téméraire  de  reconnaître 
le  ciseau  de  Praxitèle,  mais  qui  appartiennent  certainement  à 


la  bonne  époque  de  l'art.  Vous  l'avez  autorisé  à  passer  en 
Grèce  une  quatrième  année  et  il  saura,  à  coup  sûr,  la  rendre 
profitable  pour  l'achèvejnent  d'une  campagne  si  heureusement 
commencée. 

Tout  aussi  fructueuse  sera  celle  que  M.  Gaston  Deschamps 
poursuit  à  travers  les  sanctuaires  célèbres  de  la  Carie.  Les 
textes  épigraphiques  par  lui  découverts  fourniront  un  jour  de 
précieuses  données  pour  l'élude  de  la  mythologie  de  ces  po- 
pulations à  peine  hellénisées. 

Un  problème  non  moins  digne  de  l'attention  des  érudits 
est  la  légende  athénienne  de  Thésée,  à  laquelle  M.  Lechat 
avait  consacré,  l'année  dernière,  un  mémoire  remarquable 
par  l'heureuse  interprétation  des  textes  et  des  monuments  de 
l'art  ancien.  L'auteur  s'est  a[)pliqué  avec  succès  h  rechercher 
l'origine  et  les  développements  de  cette  légende  nationale  dans 
laquelle  se  reflète  la  civilisation  de  l'Attique  et  qui  finit  avec 
le  rôle  politique  d'Athènes.  L'étude  que  M.  Lechat  nous  a 
donnée,  cette  année,  est  consacrée  aux  sculptures  archaïques 
de  l'Acropole  d'Athènes  ;  cette  étude ,  qui  témoigne  d'un  sens 
archéologique  déjà  bien  exercé,  est  un  premier  essai  de  clas- 
sification appuyé  sur  des  observations  pleines  de  précision  et 
de  finesse. 

Le  droit  d'asile  dans  le  monde  grec,  tel  est  le  sujet  fort 
complexe  auquel  M.  Doublet  s'est  résolument  appliqué.  L'au- 
teur démontre,  par  l'étyraoiogie  et  les  documents  historiques, 
que  ce  privilège  appartint  d'abord  exclusivement  aux  sanc- 
tuaires; que  peu  à  peu,  par  suite  de  stipulations  politiques, 
il  s'étendit  aux  personnes,  et  fut  tellement  prodigué  qu'il 
n'était  plus  sous  Tibère  qu'une  sorte  de  droit  à  l'impunité  au 
profit  des  esclaves  fugitifs  et  des  malfaiteurs.  Dans  un  travail 
plus  récent,  M.  Doublet  a  cherché  à  jeter  (juclque  jour  sur  la 
chronologie  si  obscure  des  voyages  de  l'empereur  Hadrien. 

L'essai  de  M.  Bérard  sur  l'arbitrage  international  chez  les 


—  Z»56  — 

Grecs  ne  néglige  aucun  document  de  quelque  importance.  Il 
nous  fait  voir  clairement  que  les  Grecs  avaient  le  sentiment 
très  net  de  leur  décadence  politique  et  de  leur  impuissance. 
M.  Jamot,  eu  traitant  du  portrait  dans  la  sculpture  grecque, 
s'est  attaqué  à  une  question  des  plus  controversées;  mais  son 
travail,  qui  est  loin  d'être  sans  mérite,  montre  les  difficultés 
du  problème  plutôt  qu'il  n'en  donne  la  solution. 

L'Ecole  de  Rome  nous  a  fourni  deux  mémoires  l'année 
dernière,  et  trois  cette  année.  M.  Gsell  nous  a  donné  une 
étude  fort  développée  sur  l'empereur  Domitien,  pour  laquelle 
il  a  demandé  à  la  numismatique,  à  l'épigraphie  et  aux  fouilles 
les  plus  récentes,  dirigées  dans  Rome  par  M.  de  Rossi,  le  com- 
plément d'informations  que  les  sources  historiques  ne  lui 
apportaient  pas.  M.  Gsell  a  pu ,  cette  année,  explorer,  pendant 
quatre  mois,  une  des  plus  célèbres  nécropoles  de  l'Etrurie. 
Son  mémoire,  intitulé  :  Fouilles  à  Vulci,  est  un  inventaire 
dressé  avec  soin  des  objets  recueillis  dans  les  tombes;  une 
fois  achevé ,  ce  sera  le  document  le  plus  important  que  puisse 
consulter  le  futur  historien  de  la  civilisation  étrusque. 

M.  Léon  Cadier  nous  avait  envoyé  un  essai  sur  l'adminis- 
tration du  royaume  de  Sicile  à  la  fin  du  xnf  siècle.  Ce  travail, 
où  M.  Cadier  a  su  déployer  les  qualités  que  vous  avez  déjà 
appréciées  dans  son  livre  sur  les  Etats  de  Béam,  aura  en  outre 
le  mérite  de  provoquer  de  nouvelles  recherches  sur  les  docu- 
ments administratifs  contemporains  de  saint  Louis  et  de  con- 
tribuer ainsi  à  combler  une  des  plus  regrettables  lacunes  de 
l'histoire  du  xni'  siècle.  M.  Cadier  l'a  fait  suivre,  cette  année, 
d'une  étude  sur  la  grande  cour  royale  de  Sicile  pendant  les 
règnes  de  Charles  I"  et  Charles  II  d'Anjou,  étude  qui  com- 
plète heureusement  ses  premières  investigations  et  présente 
les  mêmes  qualités. 

Enfin  M.  Michon,  dans  son  étude  sur  Aleria,  réunit  et 
classe  avec  ordre  les  trop  rares  documents  que  l'on   possède 


'i:rj 


sur  la  condition  de  la  (lorsc  dans  l'antiquilé;  pour  suppléer 
au  silence  des  textes,  il  a  entrepris  sur  remplacement  même 
d'Aleria  des  fouilles  qui,  si  elles  n'ont  donné  encore  qu'un 
faible  résultat,  n'en  méritent  pas  moins  nos  encouragements. 
Vous  le  voyez.  Messieurs,  nos  deux  grandes  écoles  conti- 
nuent à  se  montrer  dignes  du  patronage  paternel  (jue  vous 
leur  accordez  et  dont  le  meilleur  témoignage  est  dans  le  choix 
des  directeurs  que  vous  placez  à  leur  tête.  Je  m'estime  heu- 
reux, à  cette  occasion,  de  pouvoir  remercier,  au  nom  de 
l'Acadénn'e,  notre  cher  confrère  M.  Le  Blant,  qui  a  dirigé 
pendant  six  années  l'Ecole  de  Rome  avec  un  succès  dont  nos 
séances  hebdomadaires  ont  reçu  si  souvent  la  preuve.  M.  Gef- 
frov,  de  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques,  en 
reprenant  la  direction  de  cette  Ecole  à  laquelle  il  avait  déjà 
donné  sept  années  d'un  entier  dévouement;  me  permettra  de 
l'associera  ces  remerciements  et  de  l'accompagner  de  nos  vœux. 
En  présence  des  difticultés  que  les  fouilles  archéologiques 
rencontrent  actuellement  en  Italie,  en  Grèce  et  en  Turquie, 
nous  souhaitons  vivement  que  le  directeur  de  l'Ecole  de  Rome 
continue  à  tourner  vers  l'exploration  de  l'Afrique  française 
l'activité  scientifique  des  jeunes  savants  dont  il  dirige  les  re- 
cherches. 

Ma  tâche  est  terminée,  et  d  ne  dépendait  pas  de  moi  de 
l'abréger.  Cet  examen  des  travaux  dont  nous  sommes  les 
juges  naturels  prouve  que  la  race  des  travailleurs  généreux 
et  désintéressés  n'est  pas  près  de  s'éteindre  en  France.  Il 
prouve  aussi  que,  dans  le  cours  de  cette  année,  l'essor  intel- 
lectuel de  notre  [)ays  n'a  pas  été  inférieur  à  celui  de  son  génie 
industriel,  à  cette  puissance  de  création  dont  le  merveilleux 
spectacle  nous  a  valu  l'admiration  et  les  sympathies  du  monde. 
Nous  aussi,  dans  le  champ  de  l'histoire,  de  l'archéDlogie  et 
des  lettres,  nous  ne  nous  sonunes  laissé  déj)asser  par  aucune 
autre  nation  de  l'Europe  savank». 

X\ll.  3-! 


lUI-nlUKal»:    SATIOMIF. 


—  458  — 

Et  pourtant,  pourquoi  n'en  ferais-je  pas  l'aveu?  ce  champ 
est  si  vaste  que  certaines  parties  en  sont  encore  délaissées  ou 
imparfaitement  cultivées.  Il  serait  regrettable  que  tout  l'effort 
des  travailleurs  se  concentrât  sur  le  terrain  plus  étroitement 
limité  de  notre  ancien  héritage  :  l'antiquité  classique  et  le 
moyen  âge.  Sans  nul  doute  les  littératures  de  la  Grèce  et  de 
Rome  devront  rester  la  source  du  vrai  et  du  beau,  car  sans 
elles  toute  culture  intellectuelle  serait  frappée  de  stérilité.  La 
recherche  de  nos  origines  nationales ,  de  nos  institutions  poli- 
tiques, de  notre  vieille  poésie  continuera,  ce  qui  est  justice,  à 
être  en  haute  estime  et  largement  récompensée.  Mais  les 
études  orientales  réclament,  à  leur  tour,  la  place  qui  leur  est 
due  et  attendent  de  vous  les  encouragements  dont  elles  ont 
besoin  pour  se  fortifier. 

L'Orient  renferme  l'origine  de  toutes  choses.  La  con- 
naissance de  ses  antiques  civilisations  est  indispensable  aux 
sciences  religieuses  dont  elles  éclairent  le  berceau ,  aux  sciences 
historiques  qu'elles  ont  fécondées ,  à  la  philosophie  dont  elles 
révèlent  l'origine  et  les  premiers  développements,  aux  sciences 
exactes  dont  elles  disent  les  premiers  essais,  à  la  philologie 
qu'elles  ont  enrichie  d'une  science  nouvelle,  la  grammaire 
comparée. 

Certes,  je  ne  veux  pas  être  ingrat,  et  je  me  hâte  de  recon- 
naître qu'un  des  meilleurs  titres  de  notre  Compagnie,  en  ce 
siècle,  sera  d'avoir  compris  le  rôle  prépondérant  de  l'Orient 
dans  la  renaissance  des  sciences  historiques.  En  ne  reculant 
devant  aucun  sacrifice  pour  publier  ce  splendide  répertoire 
épigraphique,  le  Corpus  inscriptionum  seimticarum,  vous  avez 
maintenu  la  su])rématie  de  la  France  dans  les  études  sémi- 
tiques; vous  avez  doté  le  monde  savant  d'un  puissant  instru- 
ment de  travail  et  de  découverte.  Mais  il  reste  encore  beau- 
coup à  faire  et  nous  attendons  davantage  de  votre  influence 
et  de  votre  initiative  généreuse.  Nos  études  n'ont  jusqu'à  pré- 


—  à5d  — 

sent  droit  de  cité  qu'à  Paris  et  à  Lyon  :  le  reste  de  la  France 
en  est  déshérité.  Chaque  Faculté  des  lettres  devrait  posséder 
trois  ou  quatre  chaires  d'enseignement  oriental.  Il  faudrait 
que,  les  encouragements  du  gouvernement  et  du  public  éclairé 
répondant  à  voire  appel,  il  devînt  bientôt  possible  de  créer 
un  plus  grand  nombre  de  bourses  d'étude  et  de  voyage.  Le 
reste  serait  encore  plus  directement  votre  œuvre  :  rédiger  de 
nouveaux  programmes,  provoquer  la  fondation  de  nouveaux 
prix,  et  enfin  accorder  plus  largement  à  ceux  qui  se  vouent  à 
ces  études  la  récompense  la  plus  enviée,  parce  qu'elle  est  la 
plus  difficile  à  obtenir,  l'honneur  de  s'asseoir  parmi  vous. 

Et  ne  l'oubliez  pas.  Messieurs,  favoriser  le  développement 
des  lettres  orientales,  c'est  coopérer  implicitement  à  une  œuvre 
d'une  plus  haute  portée.  L'Europe  tient  aujourd'hui  entre  ses 
mains  les  destinées  de  l'Orient,  mais  elle  connaît  à  peine  sa 
nouvelle  conquête.  Elle  a  besoin  de  mieux  étudier  l'Orient 
dans  son  passé,  afin  de  le  gouverner  avec  plus  de  modération 
et  de  sagesse,  de  le  tirer,  si  c'est  possible,  de  la  décadence 
qui  le  menace,  ou  tout  au  moins  de  prévenir  les  réactions 
violentes  qui  arrêteraient  la  marche  du  progrès.  La  Science 
française  ne  faillira  pas  à  cette  noble  tâche  où  l'humanité  et 
la  civilisation  sont  également  intéressées,  et  ce  sera  le  devoir  et 
l'honneur  de  l'Académie  de  l'avoir  dirigée  dans  cette  voi(\ 


JUGEME>iT   DES   CONCOURS. 

PRIX.  ORDINAIRE  DF,  L'ACADEMIE. 

L'Académie  avait  proposé,  pour  Tannée  1889,  le  sujet  suivant  : 
Elude  cnlique  sur  le  théâtre  hindou;  en  exposer  l'histoire,  marquer  sa 
place  dans  l'histoire  générale  de  la  littérature  de  l'Inde,  en  donnant  une 
attention  particulière  à  la  poétique  dramatique  des  Hindous,  telle  qu'elle  est 
développée  dans  les  traités  techniques. 

3a. 


—  à60  — 

L'Académie  décerne  ie  prix  à  M.  Sylvain  Lkvi  ,  niaîlre  do  conférences 
à  l'Ecole  des  hautes  études ,  pour  son  mémoire  portant  l'épigraphe  sui- 
vante :  Mé{ivy}(TO  bri  VTTOuptTijs  sï  hpifiaros  oïov  dv  ^éXrf  à  StSâo-xaAos 

(Epictète). 

antiquités  de  la  france. 

L'Académie  décerne  quatre  médailles  : 

La  première  à  M.  E.  Jarry,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  La  vie  politique 
de  Louis  de  France,  duc  d'Orléans  (iSya-iâoy); 

La  deuxième  à  M.  Paul  Guérin,  pour  son  Recueil  des  documents  con- 
cernant le  Poitou  contenus  dans  les  registres  de  la  Chancellerie  de  France; 

La  troisième  à  M.  Clément  Fallu  de  Lessert,  pour  son  volume  :  Les 
fastes  de  la  Numidie  sous  la  domination  romaine; 

La  quatrième,  autorisée  pour  cette  année  par  une  décision  ministé- 
rielle, à  MM.  Camille  Favre  et  Léon  Lecestre,  pour  leur  publication 
intitulée  :  Le  Jouvencel,  par  Jean  de  Bueil,  suivi  du  Commentaire  de  Guil- 
laume fringant. 

L'Académie  accorde  en  outre  six  mentions  : 

La  première  à  M.  le  duc  de  la  Trémoïlle,  pour  ses  Archives  d'un  ser- 
viteur de  Louis  XL  Documents  et  lettres  [iâ5i-iù8i) ,  publiés  d'après  les 
originaux; 

La  deuxième  à  M.  Gh.  Morel,  pour  son  volume  :  Genève  et  la  colonie 
de  Vienne.  Etude  sur  une  organisation  municipale  à  l'époque  romaine; 

La  troisième  à  MVL  les  D"  Bleicher  et  Faudel,  pour  leur  ouvrage 
intitulé  :  Matériaux  pour  une  étude préhistoriqiie  de  l'Alsace; 

La  quatrième  à  M.  Prudhomme,  pour  son  Histoire  de  Grenoble; 

La  cinquième  à  M.  Henri  Stein,  pour  son  volume  intitulé  ;  Olivier  de 
la  Marche,  historien,  poète  et  diplomate  bourguignon; 

La  sixième  à  M.  G.  d'Espinay,  pour  sa  publication  :  La  coutume  de 
Touraine  au  xv'  siècle. 

prix  de  numismatique. 

Le  prix  de  numismatique  fondé  par  M,  Allier  de  Hauteroche,  et 
destiné  au  meilleur  ouvrage  de  numismatique  ancienne  publié  depuis 
le  mois  de  janvier  1887,  est  décerné,  cette  année,  à  M.  Théodore 
Reinach,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Trois  royaumes  de  l'Asie  Mineure: 
Cappadoce,  Bithynie,  Pont. 


—  àùï   — 

PRIX  FONDÉ  PAR  LE  BARON  GOBERT 

POUR    LE  TnAVAIU  LE  PLLS  SAVANT  ET  LE   PLUS  PROFOND  SUR  LMlISTOinE  DE  FRANCK 
ET  LES  ÉTUDES    QUI   S'Y  RATTACHENT. 

Le  premier  prix  est  dt^cerné  à  M.  Noël  Valois,  pour  ses  deux  ou- 
vrages ialitulës  :  Inventaire  des  arrêts  du  Conseil  d'Etat  {règne  de  HenrilV) 
et  Le  Conseil  du  Roi  aux  xiv%  xv'  et  xvi'  siècles. 

Le  second  prix  est  de'cernë  à  M.  Auguste  Molinier,  pour  sa  Géogra- 
phie historique  de  la  province  de  Languedoc  au  moijen  âge. 

PRIX  bordin. 

L'Acadëmie  avait  proposé  pour  i'anne'e  1889  la  question  suivante  : 

Étudier  les  sources  qui  ont  servi  à  Tacite  pour  composer  ses  Annales  et 
ses  Histoires. 

Le  prix  n'est  pas  de'cerné. 

L'Acade'mie  proroge  le  concours  sur  la  même  question  à  l'année  1891. 
(Voir  p.  /.G5.) 

PRIX  STANISLAS  JULIEN. 

Par  son  testament  olographe  en  date  du  26  octobre  1872,  M.  Sta- 
nislas Julien,  membre  de  l'Institut,  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres  une  rente  de  quinze  cents  francs  pour  fonder  un  prix 
annuel  en  faveur  du  vieilleur  ouvrage  relatif  h  la  Chine. 

Le  prix  n'est  pas  décerné;  mais  à  tilre  d'encouragement  l'Académie 
distribue  le  montant  des  intérêts  de  la  fondation,  df.ns  la  proportion  de 
mille  francs  au  P.  Boucher  pour  son  ouvrage  en  deux  volumes  intitulé  : 
La  boussole  du  langage  mandarin,  et  de  cinq  cents  francs  a  M.  Terrien 
DE  Lacouperie,  pour  l'ensemble  de  ses  mémoires  et  notices  sur  l'ethno- 
graphie des  populations  méridionales  de  l'empire  chinois. 

PRIX  DE  la  GRANGE. 

M.  le  marquis  de  la  Grange,  membre  de  l'Académie,  par  son  testa- 
ment en  date  du  h  août  1871,  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  une  rente  annuelle  de  mille  francs,  destinée  à  fonder  un  prix 
en  faveur  de  la  publication  du  texte  d'un  poème  inédit  des  anciens  poètes 
de  la  France. 

L'Académie  décerne  le  prix  à  M.  Emile  Picot,  pour  ses  deux  ouvrages 
intitulés  :  Le  monologue  dramatique  dans  l'ancien  théâtre  français ,  et  Les 
moralités  polémiques  dans  l'ancien  théâtre  français ,  et  pour  l'ensemble  de 
ses  travaux  relatifs  à  la  poésip  française  du  moyen  âge. 


—  UQ'2 


FO:<DATION  GARNIE?.. 


M.  Benoît  Garnier,  ancien  consul  de  France  à  Batavia,  par  son  testa- 
ment en  date  du  ii  avril  i883,  a  léguë  à  l'Acade'raie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  la  totalité  de  ses  biens  (legs  réduit  d'un  tiers  en  faveur  des 
héritiers,  par  décret  du  97  septembre  188/i),  a  la  condition  d'alTecler 
cliac^ue  année  les  intérêts  du  capital  provenant  de  la  licpiidation  craux 
frais  d'un  voyage  scientifique  à  entreprendre  par  un  ou  plusieurs  Fran- 
çais, désignés  par  l'Académie,  dans  l'Afrique  centrale  ou  dans  les  régions 
de  la  haute  Asie". 

L'Académie  attribue,  cette  année,  au  B.P.  Acgocard  ,  provicaire  apo- 
stolique du  Congo  français,  une  somme  de  six  mille  cinq  cents  francs  à 
prélevé  jsur  les  arrérages  de  la  fondation.  Le  R.  P.  Augouard  devra  exa- 
miner les  diverses  questions  de  géogiaphie ,  d'ethnographie  et  de  lin- 
guistique que  peut  soulever  fétude  des  populations  étabhes  sur  les  rives 
de  rOubangui  et  du  haut  Ogowé. 


prix  lodbat. 


M.  Loubat,  membre  de  la  New-York  Historical  Society,  a  fait  don  à 
l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  d'une  rente  annuelle  de  inille 
francs  pour  la  fondation  d'un  prix  de  trois  mille  francs,  qui  sera  décerné 
tous  les  trois  ans  au  meilleur  ouvrage  imprimé  concernant  l'histoii-e,  la 
géographie,  l'archéologie,  l'ethnographie,  la  linguistique,  la  niunisma- 
tique  de  l'Amérique  du  Nord. 

L'Académie  a  décidé  de  n'admettre  au  concours  de  cette  année  : 

1"  Que  les  ouvrages  imprimés  depuis  le  1"  janvier  188/1; 

2°  En  ce  qui  concerne  l'histoire  politique,  que  des  ouvrages  traitant 
d'événements  antérieurs  aux  débuts  de  la  guerre  de  l'Indépendance  des 
États-Unis. 

Neuf  ouvrages  ont  été  adressés  au  concours. 

Le  prix  est  décerné  à  M.  Léon  de  Rosny,  pour  son  Codex  Peresianus. 

Grâce  à  la  libéralité  du  fondateur,  l'Académie  est  en  mesure  de  dis- 
poser exceptionnellement ,  pour  cette  année ,  d'une  somme  de  mille  francs , 
qui  est  attribuée  à  M.  Rémi  Siméo.x,  à  titre  de  second  prix,  poiu*  ses 
Atiiuiles  de  Chvnalpahin. 


—  'iG3  — 
AiNiNONCK  DES   CONCOURS 

DONT  LES  TERMES   EXPIRENT   EN    1889,    189O    ET    189I, 


PRIX  ORDINAIRE  DE  1,'ACADEMIE. 

L'Académie  rappelle  qu'elle  a  prorogé  à  rannée  1890  la  question 
suivante  : 

Etudier,  d'après  les  chroniques  arabes  et  principalement  celles  de  Tabari, 
Maçoudi ,  etc. ,  les  causes  politiques ,  religieuses  et  sociales  qui  ont  déterminé 
la  chute  de  la  dynastie  des  Omeyyades  cl  l'avènement  des  Abasstdes. 

L'Académie  rappelle,  en  outre,  qu'elle  a  proposé  pour  l'année  1891 
la  question  suivante  : 

Etudier  la  tradition  des  guerres  médiques ,  déterminer  les  éléments  dont 
elle  s'est  formée ,  en  examinant  le  récit  d'Hérodote  et  les  données  fournies 
par  d'autres  écrivains. 

L'Académie  propose  pour  l'année  1892  le  sujet  suivant  : 

Etude  sur  les  ouvrages  composés  en  France  et  en  Angleterre  qui  sont 
(jénéralement  connus  soms  le  nom  d'rrArs  dictaminisn. 

Les  mémoires  sur  chacune  de  ces  questions  devront  être  déposés  au 
secrétariat  de  l'Institut  avant  le  1"  janvier  dt;  l'année  du  concours. 

Chacun  de  ces  prix  est  de  la  valeur  de  deu-x  mille  francs. 

ANTIQUITÉS  DE  LA  FRANCE. 

Trois  médailles,  de  la  valeur  de  cinq  cents  francs  chacune,  seront  dé- 
cernées aux  meilleurs  ouvrages  manuscrits  ou  publiés  dans  le  cours  des 
années  1888  et  1889,  sur  les  antiquités  de  la  France,  qui  auront  été  dé- 
posés en  double  exemplaire  au  secrétariat  de  l'Institut  avant  le  i"janvier 
1890.  Les  ouvrages  de  numismatique  ne  sont  pas  admis  à  ce  concours. 

PRIX  DE  NUMISMATIQUE. 

L  Le  prix  biennal  de  numismatique  fondé  par  M""  veuve  Duchalais 
sera  décerné,  en  1890,  au  meilleur  ouvrage  de  numismatique  du  moyen 
âge  qui  aura  été  publié  depuis  le  mois  de  janvier  1888. 

II.  Le  prix  de  numismatique  fondé  par  M.  Allier  de  Hauteroche 
sera  décerné,  en  1891,  au  meilleur  ouvrage  de  numismatique  ancienne 
qui  aura  été  publié  depuis  le  mois  de  janvier  1889. 

Chacun  de  ces  pris  est  de  la  valeur  de  huit  cents  francs. 


—    /4GA    — 

Les  ouvrages  devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut,  pour 
le  concours  Duchalais,  le  oi  de'cembre  1889;  pour  le  concours  Allier 
DE  Hacteroche,  le  3i  décendjre  1890. 

l'RL\  FONDÉS  PAR  LE   BARON  GOBERT. 

Pour  l'année  1890,  rAcadémie  s'occupera,  à  dater  du  1"  janvier,  de 
l'examen  des  ouvrages  qui  auront  paru  depuis  le  1"  janvier  1889  et 
qui  pourront  concourir  aux  prix  annuels  fondés  par  le  baron  Gobert. 
En  léguant  à  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  la  moitié  du  ca- 
pital provenant  de  tous  ses  biens,  après  l'acquittement  des  frais  et  des 
legs  particuliers  indiqués  dans  son  testament,  le  fondateur  a  demandé: 
trque  les  neuf  dixièmes  de  l'intérêt  de  celte  moitié  fussent  proposés  en 
prix  annuel  pour  le  travail  le  plus  savant  et  le  plus  profond  sur  l'histoire 
de  France  et  les  études  qui  s'y  rattachent,  et  l'autre  dixième,  pour 
celui  dont  le  mérite  en  approchera  le  plus;  déclarant  vouloir,  en 
outre,  que  les  ouvrages  couronnés  continuent  à  recevoir,  chaque  année, 
leur  prix,  jusqu'à  ce  qu'un  ouvrage  meilleur  le  leur  enlève,  et  ajoutant 
qu'il  ne  pourra  être  présenté  à  ce  concours  que  des  ouvrages  nou- 
veaux.» 

Tous  les  volumes  d'un  ouvrage  en  cours  de  publication  qui  n'ont  point 
encore  été  présentés  au  prix  Gobert  seront  admis  à  concourir,  si  le  der- 
nier volume  remplit  toutes  les  conditions  exigées  par  le  programme  du 
concours. 

Sont  admis  à  ce  concoui^  les  ouvrages  composés  par  des  écrivains 
étrangers  à  la  France. 

Sont  exclus  de  ce  concours  les  ouvrages  des  membres  ordinaires  ou 
libres  et  des  associés  étrangers  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles- 
lettres. 

L'Académie  ra])pelle  aux  concurrents  que,  pour  répondre  aux  inteu- 
lions  du  baron  Gobert,  qui  a  voulu  récompenser  les  ouvrages  lés  plus 
Bavants  et  les  plus  profonds  sur  l'histoire  de  France  et  les  études  qui  s'y 
rattachent,  ils  doivent  choisir  des  sujets  qui  n'aient  pas  encore  été  suffi- 
samment approfondis  par  la  science.  La  haute  récompense  instituée  par 
le  baron  Gobert  est  réservée  à  ceux  qui  agrandissent  le  domaine  de 
la  science  en  pénétrant  dans  des  voies  encore  inexplorées. 

Six  exemplaires  de  chacun  des  ouvrages  présentés  à  ce  coiicours  de- 
vront être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  (délibération  du  97  mars 
18/40)  avant  le  f  janvier  i8f)o,  et  ne  seront  pas  rendus. 


—   'iGâ  — 

PRIX  BORDIN, 

M.  Boudin,  notaire,  voulant  contribue!' aux  progrès  des  lettres,  des 
sciences  cl  dos  arts ,  a  fonde  par  son  testament  des  prix  annuels  qui  sont 
décernes  par  chacune  des  cinq  Académies  de  Tlnstitut. 

L'Académie  rappelle  qu'elle  a  proposé  les  sujets  suivants  : 

1°  Pour  l'année  1890  : 

Etudier  In  géographie  de  l'Egijpte  au  moment  de  la  conquête  arabe, 
d'après  les  documents  coptes  et  grecs.  Belevcr  dans  les  vies  des  saints,  chro- 
niques ,  sermo)is  en  langues  copte  et  grecque ,  les  noms  de  lieu,  nomes ,  villes, 
villages,  couvenls,  montagnes  et  nvières  qui  ij  sont  cités;  les  identifier  avec 
les  noms  arabes  mentionnés  dans  les  historiens  et  dans  les  cadastres  modernes 

r 

de  VEguple. 

9°  Pour  l'année  1891  : 

Etude  sur  les  travaux  entrepris  à  Vépoque  carlovingienne  pour  établir  et 
reviser  le  texte  latin  de  la  Bible. 

L'Académie  rappelle  ensuite  qu'elle  a  prorogé  : 

1°  A  l'année  1890  les  trois  sujets  suivants  : 

L  Etude  sur  la  langue  berbère  sous  le  double  point  de  vue  de  la  grammaire 
et  du  dictionnaire  de  cette  langue.  Insister  particulièrement  sur  la  forma- 
tion des  racines  et  sur  le  mécanisme  verbal.  S'aider,  pour  cette  étude,  des 
inscriptions  libijques  recueillies  dans  ces  dernières  années.  Indiquer  enfin  la 
place  du  berbère  parmi  les  autres  familles  de  langues. 

IL   Examen  de  la  Géographie  de  Strabon. 

Les  concurrents  devront,  après  avoir  résumé  brièvement  l'histoire  de  la 
constitution  du  texte  de  cet  ouvrage ,  étudier  les  sources  d'information  et  la 
méthode  de  Sli'abon. 

m.  Etude  critique  sur  les  ouvrages  en  vers  et  en  prose ,  connus  sous  le 
titre  de  Chronique  de  Normandie. 

9°  A  Tannée  1891  les  sujets  suivants  : 

L  Etudier  l'histoire  politique ,  religieuse  et  littéraire  d'Edesse  jusqu'à  la 
première  croisade. 

IL  Etudier  les  sources  qui  ont  servi  à  Tacite  pour  composer  ses  Annales 
et  ses  Histoires. 

L'Académie  propose,  en  outre,  pour  l'aimée  1899: 

Rechercher  ce  que  Catulle  doit  aux  poètes  alexandrins  et  ce  qu'il  doit  atuv 
vieux  lyriques  grecs. 


—  à66  — 

Les  métiioires  sur  chacune  de  ces  questions  devront  être  déposés  au 
secrétariat  de  l'Institut,  avant  le  i"  janvier  de  l'année  du  concours. 
Chacun  de  ces  prix  est  de  la  valeur  de  trois  mille  francs. 

PRIX  LOUIS  FOULD. 

Le  prix  fondé  par  M.  Louis  Folld  ,  pour  Y  Histoire  des  arts  du  dessin 
jusqu'au  siècle  de  Pèriclh ,  sera  décerné,  s'il  y  a  lieu,  en  1890. 

L'auteur  de  cette  fondation ,  amateur  distingué  des  arts  de  l'antiquité, 
a  voulu  engager  les  savants  à  en  éclairer  l'histoire  dans  sa  partie  la  plus 
reculée  et  la  moins  connue. 

Il  a  rais  à  la  disposition  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles- lettres 
une  somme  de  vingt  mille  francs ,  pour  être  donnée  eu  prix  à  l'auteur 
ou  aux  auteurs  de  la  meilleure  Histoire  des  arts  du  dessin  :  leur  origine , 
leurs  progrès,  leur  transmission  chez  les  différents  peuples  de  l'antiquité 
jusqu'au  siècle  de  Périclès. 

Par  les  arts  du  dessin,  il  faut  entendre  la  sculpture,  la  peinture,  la 
gravure,  l'architecture,  ainsi  que  les  arts  industriels  dans  lem-s  rapports 
avec  les  premiers. 

Les  concurrents,  tout  en  s'appuyant  sans  cesse  sur  les  textes,  devront 
apporter  le  plus  grand  soin  à  l'examen  des  œuvres  d'art  de  toute  nature 
que  les  peuples  de  l'ancien  monde  nous  ont  laissées,  et  s'efforcer  d'en 
préciser  les  caractères  et  les  détails ,  soit  à  l'aide  de  dessins ,  de  calques 
ou  de  photographies,  soit  par  une  description  fidèle,  qui  témoigne  d'une 
étude  approfondie  du  style  particulier  à  chaque  nation  et  à   chaque 

époque. 

Les  ouvrages  envoyés  au  concours  seront  jugés  par  une  commission 
composée  de  cinq  membres  :  trois  de  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres ,  un  de  celle  des  sciences ,  un  de  celle  des  beaux-arts. 

Le  jugement  sera  proclamé  dans  la  séance  publique  annuelle  de  l'Aca- 
démie des  inscriptions  et  belles-lettres. 

L'auteur  de  la  donation  ajoutait  : 

rrDans  le  cas  oii  aucun  ouvrage  ne  paraîtrait  mériter  le  prix  de  vingt 
mille  francs,  l'intérêt  de  cette  somme  pendant  trois  ans  serait  attribué 
comme  accessit  à  l'ouvrage  qui  aurait  le  mieux  traité  le  sujet  ou  une 
partie  du  sujet.  Si,  dans  vingt  et  un  ans  révolus,  au  septième  concours 
triennal,  le  prix  ne  semblait  pas  devoir  être  encore  décerné  selon  mes 
désirs,  la  Commission,  qui  devra  toujours  être  maintenue  au  complet  de 
cinq  membres,  pourra  proposer  de  décerner  le  prix  à  l'ouvrage  qui,  sans 
remplir  tout  le  programme,  serait  cependant  le  traité  le  meilleur  et  le 


—  ZiG7  — 

plus  complet  sur  la  ({uestiou.  L" Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres 
décidera  alors  s'il  convient  de  le  décerner  de  suite,  ou  de  l'ajourner  à  un 
huitième  et  dernier  concours. 

ffLe  concours  serait  ouvert  à  tous  les  membres  de  l'Institut  qui  ne 
feraient  pas  partie  de  la  Commission  et  à  tous  les  savants  français  ou 
étrangers;  mais  les  ouvrages  manuscrits  ou  imprimés  devront  être  écrits 
ou  traduits  en  français  ou  en  latin. r» 

Après  un  nombre  de  périodes  triennales  (pii  excède  même  le  terme  fixé, 
aucun  ouvrage  n'ayant  complètement  résolu  la  question  comme  elle  était 
posée,  l'Académie  décernera  le  prix  en  1890,  conformément  à  cette  der- 
nière clause  do  la  donation. 

En  conséquence,  à  défaut  d'un  ouvrage  remplissant  tout  le  programme, 
le  prix  sera  attribué  au  traité  le  meilleur  et  le  plus  complet  sur  ia 
question. 

Le  concours  sera  ouvert  aux  membres  de  l'Institut  qui  ne  feront  pas 
partie  de  la  Commission  d'examen,  et  à  tous  les  savants  français  ou 
étrangers.  Les  ouvrages  manuscrits  ou  impiimés  devront  être  écrits  ou 
traduits  en  français  ou  en  latin  et  déposés  en  double  exemplaire,  s'ils 
sont  imprimés,  au  secrétariat  de  l'Institut  avant  le  1"  janvier  1890. 

Après  avoir  prélevé  sur  la  fondation  la  somme  de  vingt  mille  francs, 
destinée  au  lauréat  de  1890,  l'Académie  pourra  encore  disposer  sur  les 
inl('nHs  de  la  fondation  d'une  somme  suffisante  pour  instituer  un  prix 
bieimal  de  cinq  mille  francs  qui  sera  décerné  pom-  la  première  fois 
en  1892  au  meilleur  ouvrage  sur  l'histoire  des  arts  du  dessin,  en  s'arrê- 
tant  au  xvf  siècle. 

PRIX  LA  FONS-MÉLICOCQ. 

Un  prix  triennal  de  dix-huit  cents  francs  a  été  fondé  par  M.  de  la  Fons- 
Mélicocq  en  faveur  du  meilleur  ouvrage  sur  l'histoire  et  les  antiquités  de  la 
Picardie  et  de  l' Ile-de-France  {Paris  non  compris). 

L'Académie  décernera  ce  prix,  s'il  y  a  lieu,  en  1890;  elle  choisira 
entre  les  ouvrages  manuscrits  ou  imprimés  en  1887,  t888  et  1689 ,  qui 
lui  auront  été  adressés  avant  le  3i  décembre  1889. 

PRIX  BRUNET. 

M.  Brunet,  par  son  testament  en  date  du  i/i  novembre  1867,  a  fondé 
un  prix  triennal  de  trois  mille  francs  pour  un  ouvrage  de  bibliographie 
savante  que  l'Académie  des  inscriptions,  qui  en  choisira  elle-même  le  sujet, 
jugera  le  plus  digne  de  cette  récompense. 


—  /i68  — 

L'Académie  rappelle  qu'elle  a  propose  pour  i'aiine'e  i8gi  la  question 
suivante  : 

Dresser  le  catalogue  des  copistes  de  mamiscrits  grecs;  indiquer  les  copies 
qui  peuvent  être  attribuées  à  chacun  d'eux  ;  ajouter  les  indications  chronolo- 
giques,  biographiques  et  paUogrnphiques  relatives  à  ces  copistes. 

Les  ouvrages,  qui  pourront  être  imprimés  ou  manuscrits,  devront 
être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut,  avant  le  i"  janvier  i  891. 

PRIX  STANISLAS  JDLIEN. 

Par  son  testament  olographe  en  date  du  îî6  octobre  1872,  M.  Sta- 
nislas Julien,  membre  de  l'Institut,  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres  une  rente  de  quinze  cents  francs  pour  fonder  un  prix 
annuel  en  faveur  du  meilleur  ouvrage  relatif  h  la  Chine. 

Les  ouvrages  devront  être  déposés,  en  double  exemplaire,  au  secré- 
tariat de  rinstitut,  avant  le  1"  janvier  1890, 

PRIX  DELALANDE-GUÉRINEAU. 

M™'  Delalande,  veuve  Guérinead,  par  son  testament  on  date  du 
16  mars  1 879  ,  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  une 
somme  de  vingt  mille  francs  (réduite  à  dix  mille  cinq  francs),  dont  les 
intérêts  doivent  être  donnés  en  prix,  tous  les  deux  ans,  au  nom  de  Dela- 
lande-Guérineau ,  à  la  persomie  qui  am-a  composé  l'ouvrage  jugé  le  meil- 
leur par  l'Académie. 

L'Académie  rappelle  qu'elle  décernera,  en  1 890 ,  le  prix  au  meilleur  ou- 
vrage manuscrit  ou  public  depuis  le  1"  janvier  1888 ,  concernant  les  études 
orientales. 

Les  ouvi'ages  destinés  à  ce  concours  devront  être  déposés,  en  double 
exemplaire,  s'ils  sont  imprimés,  au  secrétariat  de  l'Institut,  avant  le 
1"  janvier  1890. 

L'Académie  a,  en  outre,  décidé  que  le  prix  sera  décerné  en  1899  au 
meilleur-ouvrage  de  critique  sur  des  documents  imprimés  ou  manuscrits  re- 
latifs à  l'histoire  ecclésiastique  ou  à  l'histoire  civile  du  moyen  âge. 

Les  ouvrages  manuscrits  ou  publiés  depuis  le  1"  janvier  1890,  des- 
tinés h  ce  concours,  devront  être  déposés,  en  double  exemplaire,  s'ils 
sont  imprimés,  au  secrétariat  de  l'Institut  avant  le  1"  janvier  1899. 

.     PRIX  JEAN  REY.NAUD. 

M"'  veuve  Jean  Reinaud.  fr voulant  honorer  la  mémoire  de  son  mari 


—  AG9  — 

ot  perpëtuer  son  zèle  pour  tout  ce  qui  touclie  aux  gloires  de  la  France», 
a,  par  un  acte  en  date  du  3  dëcetnbre  1878,  fait  donalion  à  l'Inslitut 
d'une  renie  de  dùv  mille  francs,  destinée  à  fonder  un  prix  annuel  qui  sera 
successivement  décerné  par  chaciuie  des  cinq  Académies. 

Conformément  au  vœu  exprimé  par  la  donatrice,  frce  prix  sera  ac- 
cordé au  travail  le  |)lus  méritant,  relevant  de  chaque  classe  de  l'Institut, 
qui  se  sera  produit  pendant  une  période  de  cinq  ans. 

ffll  ira  toujours  à  une  œuvre  originale,  élevée,  et  ayant  un  caractère 
d'invention  et  de  nouveauté. 

ffLes  membres  de  l'Institut  ne  seront  pas  écartés  du  concours. 

ffLe  prix  sera  toujours  décerne'  intégralement. 

rrDans  le  cas  où  aucun  ouvrage  ne  paraîtrait  le  mériter  entièrement, 
sa  valeur  serait  délivrée  à  quelque  grande  infortune  scientifique,  litté- 
raire ou  artistique. 

ffll  portera  le  nom  de  son  fondabnu'  Jean  Reyivaud.» 

L'Académie  décernera  ce  prix,  s'il  y  a  lieu,  en  1890. 

PRIX  DE  LA  GRANGE. 

M.  le  marquis  de  la  Grange,  membre  de  l'Académie,  par  son  testa- 
ment en  date  du  A  août  1871,  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  une  rente  annuelle  de  mille  francs,  destinée  à  fonder  un  prix 
en  faveur  de  la  publication  du  texte  d'un  poème  inédit  des  anciens  poètes 
de  la  France;  à  défaut  d'une  œuvre  inédite,  le  prix  pourra  être  donné  au 
meilleur  travail  sur  un  poème  déjà  publié,  mais  appartenant  aux  anciens 
poètes. 

Ce  prix  sera  décerné,  s'il  y  a  lieu,  en  1890. 

FONDATION  GARNIER. 

M.  Benoît  Garmer,  par  son  testament  en  date  du  11  avril  i883,  a 
légué  à  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  la  totalité  de  ses  biens, 
legs  réduit  d'un  tiers  en  faveur  des  héritiers  par  décret  du-  'J7  sep- 
tembre i884.  Les  intérêts  du  capital  résultant  de  la  liquidation  de  la 
succession  doivent  être  affectés,  chaque  année,  f^aux  frais  d'un  voyage 
scientifique  à  entreprendre  par  un  ou  plusieurs  Français,  désignés  par 
l'Académie,  dans  l'Afrique  centrale  ou  dans  les  régions  de  la  haute 
Asie.  Ti 

L'Académie  disposera,  eu  1890,  des  revenus  de  la  fondation  selon  les 
intentions  du  testateur. 


—  470  — 


PRIX    LOUBAT. 


M.  LouBAT,  membre  de  la  New-York  Historical  Society,  a  fait  don  à 
l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  d'une  rente  aninielie  de  7n{lle 
francs  pour  la  fondation  d'un  prix  de  trois  mille  francs,  qui  sera  de'cerné 
tous  les  trois  ans  au  meilleur  ouvrage  imprimé  concernant  Ihistoire,  la 
géographie,  l'archéologie,  l'ethnographie,  la  linguistique,  la  numisma- 
tique de  l'Amérique  du  Nord. 

L'Académie  fixe,  comme  limite  de  temps  exlrême  des  matières  traitées 
dans  les  ouvrages  soumis  au  concours,  la  date  de  1776. 

Ce  prix  sera  décerné  en  1892. 

Seront  admis  au  concours  les  ouvrages  publiés  en  langues  latine ,  fran- 
çaise, anglaise, espagnole  et  italienne,  depuis  le  1" janvier  1889. 

Les  ouvrages  présentés  à  ce  concours  devront  être  envoyés  au  nonibre 
de  deux  exemplaires,  avant  le  3i  décembre  1891,  au  secrétariat  de  l'in- 
stitut. 

Le  lauréat,  outre  les  exemplaires  adressés  pour  ie  concours,  devra  en 
déhvrer  deux  autres  à  l'Académie,  qui  les  fera  parvenir,  l'un  au  Columbia 
Collège  à  New-York,  et  l'autre  h  la  New-York  Historical  Society  de  la 
même  ville. 


CONDITIONS   GENERALES 

DES  CONCOURS. 

Les  ouvrages  envoyés  aux  différents  concours  ouverts  par  l'Académie 
devront  parvenir, /ra«cs  de  port  et  brochés,  au  secrétariat  de  l'Institut, 
avant  le  1  "  janvier  de  l'année  où  le  prix  doit  être  décerné. 

Ceux  qui  seront  destinés  aux  concours  pour  lesquels  les  ouvrages  im- 
primés ne  sont  point  admis  devront  être  écrits  eu  français  ou  en  latin. 
Ils  porteront  une  épigraphe  ou  devise,  répétée  dans  un  billet  cacheté  qui 
contiendra  ie  nom  de  l'auteur.  L'es  concurrents  sont  prévenus  que  tous 
ceux  qui  se  feraient  connaître  seront  exclus  du  concours  :  leur  attention 
la  plus  sérieuse  est  appelée  sur  cette  disposition. 

{^'Académie  ne  i-end  aucun  des  ouvrages  imprimés  ou  manuscrits  qui 
oui  été  soumis  à  son  examen;  les  auteurs  des  manuscrits  ont  la  liberté 
d"en  faire  prendre  des  copies  au  secrétariat  de  l'Institut. 


—  471   —     . 
DÉLIVRAINCK  DES   BREVETS 

D'ARCHIVISTES   PALEOGRAPHES. 

En  exécution  d'im  arrêté  du  Ministre  de  l'instruction  publique  rendu 
en  i833,  rAcadémie  déclare  que  les  élèves  de  l'École  des  chartes  qui 
ont  été  nommés  archiiistes  paléographes  par  arrêté  ministériel  du 
3i  janvier  1889,  conformément  à  la  liste  dressée  par  le  conseil  de  per- 
fectionnement de  cette  École,  sont  : 

MW.  Lkonardon  (Henri-Louis), 

FInlart  (Désiré-Louis-Camille) , 

Picard  (Auguste-Eugène), 

Batiffol  (Louis-Jules), 

Portai.  (  Cliarles-Louis-Henri-Félix-Antoine ) , 

RicHEBÉ  ( Raymond-Auguste-Léon) , 

Socf.HOX  (Joseph-Auguste), 

MicHEi,  (Ephraïm-Georges) , 

Nerlinger  (Charles-Jean-Népomucène), 

EcKEL  (Henri-Auguste). 

Sont  nommés  archivistes  paléographes  hors  rang,  comme  apparte- 
nant à  des  promotions  antérieures  : 

MM.  Desplanque  (Emile-Alexandre-Joseph), 
SouLiÉ  (Louis-Pierre-Henri), 
AuBERT  (Hippoly te- Victor). 


,     _  /i72  — 

NOTICE 
SUR  LA  VIE  ET  LES  TRAVAUX 

DE 

M.  EMILE   EGGER, 

MEMBRE   DE    L'ACADEMIE    DES    INSCRIPTIONS    ET    BELLES-LETTRES, 

PAR  M.  H.  WALLON, 

SECRÉTAIRE  PERPETUEL   DE   L'AGADEiMIE. 

Messieurs, 

La  mort,  depuis  notre  dernière  séance  publique,  a  frappe 
de  coups  redoublés  notre  Compagnie.  Elle  nous  a  enlevé, 
parmi  nos  associés  étrangers,  M.  Amari,  le  savant  bistorien, 
si  cordialement  attaché  à  la  France,  et  M.  le  baron  de  Witte, 
l'éminent  archéologue,  qui  par  son  assiduité  à  nos  séances 
était  devenu  comme  un  des  nôtres;  parmi  nos  membres  ordi- 
naires, M.  Riant,  qui  a  enrichi  de  tant  de  textes,  par  lui  dé- 
couverts, l'histoire  de  l'Orient  latin;  parmi  nos  membres 
libres,  M.  Charles  Nisard,  ce  lettré  curieux  et  habile,  et,  dans 
ces  derniers  jours,  le  général  Faidherbe,  l'illustre  soldat  qui 
avait  su,  dans  son  gouvernement  du  Sénégal,  associer  les  tra- 
vaux de  l'érudit  à  la  vie  active  du  commandant;  qui,  rappelé 
en  France,  à  la  voix  de  la  patrie  envahie,  nous  donna  un 
jour  de  joie  et  d'espérance  au  milieu  de  nos  revers,  et  qui, 
dans  les  douloureux  loisirs  d'une  vie  usée  par  tant  de  fati- 
gues, trouvait  encore  la  force  de  reprendre  et  de  compléter 
ses  anciennes  études  par  un  livre  sur  les  langues,  sur  les 
races,  sur  le  passé,  sur  l'avenir  de  la  grande  colonie  africaine 
dont  il  avait  été  le  gouverneur. 

Notre  président  vient  de  leur  rendre  un  plus  digne  hom- 
mage que  je  ne  saurais  le  tenter  à  cotte  heure.  Parmi  les 
membres  donl  l'i-loge  reste  à  faire,  un  de  i-enx  dont  la  porle 


—  M'^  — 

a  été  le  plus  sentie  est  assurément  notre  confrère  Emile  Kfjjjer. 
Depuis  la  mort  de  MM.  Boissonade,  Hase,  Victor  Le  Clerc, 
Naudet  et  Guigniaut,  il  tenait  le  premier  rang  dans  l'ordre 
des  études  de  langues  et  de  littératures  grecques  et  latines.  Il 
avait  invariablement  sa  place  dans  nos  commissions  les  plus 
importantes;  et  qui  d'entre  nous  fut  j)lus  assidu  à  nos  séances, 
plus  mêlé  à  nos  discussions,  plus  habile  à  les  éclairer  par  des 
observations  toujours  nettes  et  précises,  placées  à  propos? 
Tous  ces  mérites  et  bien  d'autres  encore  ont  déjà  été  signalés 
dans  les  discours  prononcés  sur  sa  tombe  ^'\  dans  la  leçon 
que  son  successeur  à  la  Sorbonne,  notre  confrère  aujour- 
d'hui, a  consacrée,  en  prenant  sa  place,  à  sa  mémoire'-',  dans 
plusieurs  notices  où  des  collègues  de  sociétés  savantes  et  d'an- 
ciens élèves  ont  reproduit  leurs  souvenirs,  avec  l'accent  d'un 
cœur  ému  ' .  Il  était  bien  juste  qu'un  semblable  hommage 
lui  fut  rendu  au  sein  de  notre  Compagnie,  et  j'ai  moi-même 
plus  d'une  raison  de  l'entreprendre.  Nous  avons  pour  ainsi 
dire  toujours  marché,  parallèlement  l'un  et  l'autre,  dans  la 
même  carrière.  Nous  étions  de  la  même  génération  d'écoliers. 
Nous   faisions  ensemble,  dans  le  même  temps,  les  mêmes 

^''  Discours  prononcé  par  MM.  Desjaidins,  président  de  l'Académie;  Himly, 
doyen  de  la  Faculté  des  ictlres;  Hauréau,  au  nom  du  Journal  des  Savants;  Jour- 
dain, président  de  V Association  pour  l'encouragement  des  études  grecques  en 
France;  Saiipolos,  au  nom  de  la  colonie  hellénique. 

^-)  Emile  Egger,  leçon  d'ouverture  du  cours  d'éloquence  grecque ,  par  Alfred 
Croiset  (7  décembre  i885). 

''■■^''  Il  faut  placer  en  première  lifjiic  la  Notice  sur  Emile  Egger,  sa  vie  et  ses 
travaux,  par  Anatole  Bailly,  professeur  au  lycée  d'Orléans,  membre  du  Conseil 
académique  de  Paris,  nolice  faite  sur  les  documents  communiqués  par  la  famille 
et  à  laquelle  je  renverrai  plus  d'une  fois.  On  y  trouve,  sous  le  titre  d'appendice 
littéraire  et  bibliographique,  un  éibanlillon  do  la  correspondance  de  notre  con- 
frère, et  différentes  pièces  françaises,  latines  ou  grecques  qui  remontent  jusqu'à 
l'époque  de  ses  premiers  concours;  puis  la  Notice  lue  par  M.  le  marquis  de 
Queux  de  Sainl-Hilaire  devant  VAssociation  pour  l'encouragement  des  éludes 
grecques  en  France;  la  Notice  biographique  do  M.  Eug.  Chatel,  membre  de  l'Aca- 
Hémio  nationale  des  spjpnces,  art-»  et  liplles-leltres  de  Caen. 

wii.  33 


iHraiH»«tt.    iiAit4.V4ia. 


—  lilh  — 

classes,  lui  dans  un  collège  de  Paris,  moi  dans  un  collège  de 
province.  Nous  aurions  été  de  la  même  promotion  à  l'Ecole 
normale,  si  les  raisons  les  plus  dignes  de  respect  n'avaient  fait 
qu'il  ne  s'y  présentât  point;  mais  nous  étions  ensemble  reçus 
licenciés  en  1882,  agrégés  en  i83/i;  attachés,  au  sortir  de 
nos  deux  agrégations  particulières,  en  des  emplois  fort  mo- 
destes, à  deux  collèges  de  Paris,  l'un  à  Saint-Louis,  l'autre 
à  Louis-le-Grand;  puis,  à  la  suite  d'un  prix  obtenu  par  l'un 
à  l'Académie  des  inscriptions,  par  l'autre  à  l'Académie  des 
sciences  morales,  chargés  de  conférences  à  l'Ecole  normale 
(1888-1839);  agrégés  des  Facultés  (18/10)  et  attachés  à  la 
Faculté  des  lettres  de  Paris,  où  il  me  devança  comme  sup- 
pléant et  où  le  hasard  des  événements  fit  seul  que  je  le  de- 
vançai comme  titulaire;  enfin,  membres  de  cette  Académie, 
où  nous  eûmes  l'honneur  d'entrer  à  peu  d'années  d'intervalle, 
nous  tendant  la  main  l'un  à  l'autre  (i85o-i85/i).  Mais  alors 
quels  titres  il  s'était  faits  déjà  dans  le  monde  savant  et  quelles 
épreuves  il  avait  traversées! 

Emile  Egger  naquit  à  Paris  le  18  juillet  181 3.  Son  nom 
indique  une  origine  allemande.  Sa  famille,  en  effet,  était 
originaire  d'un  lieu  nommé  Strassburg,  à  peu  de  distance  de 
Klagenfurt,  en  Carinthie;  mais  son  grand-père,  Maximihen 
Egger,  s'étabht  en  France,  à  Orléans,  où  il  se  maria  à  une 
jeune  fille  du  pays.  Un  des  sLx  enfants  nés  de  ce  mariage, 
Gaston-MaximiHen,  se  fixa  en  1797  à  Paris  et  il  eut  six  en- 
fants aussi,  dont  quatre  ne  dépassèrent  pas  les  limites  de 
l'enfance  :  les  deux  autres  étaient  notre  confrère  et  sa  sœur 
Anne -Ida,  plus  âgée  que  lui  de  quatre  ans.  Gaston -Maxi- 
milien  Egger  avait  commencé  au  collège  d'Orléans  des  études 
que  la  Révolution  interrompit.  A  Paris,  il  ouvrit  un  atelier  de 
tapissier,  où  il  aurait  pu  faire  fortune  par  son  habileté  et  son 
goût  d'artiste  dans  le  dessin  des  meubles  et  des  tentures; 
mais  il  avait  le  génie  de  l'invention  :  il  avait  inventé  des  tentes 


—  f^l:^  — 

mobiles  qui  figurèrent  à  rEx[)Osition  iiidiistrieile  de  1897 
(notre  confrère  se  plaisait  à  ra[)|)eler  qu'écolier  alors,  il  sup- 
pléait son  père,  les  jours  de  congé,  pour  en  exj)liqucr  le  mé- 
canisme aux  visiteurs  dans  la  cour  du  Louvre);  il  inventa  un 
moteur  t\  vent,  des  appareils  orthopédiques,  dont  il  fit  tous  les 
frais,  et  il  trouva  des  exploitants  ([ui  en  tirèrent  tout  le  profit. 
Il  était  ruiné,  quand  il  mourut  le  3o  avril  t8oo,  laissant 
une  veuve  et  ses  deux  enfants. 

Ce  fut  l'époque  critique  de  la  vie  d'Emile  Egger.  Sa  sœur, 
élève  de  Redouté,  pouvait  subvenir  un  j)eu  à  la  vie  de  la  fa- 
mille, en  peignant  des  fleurs  et  en  donnant  quelques  leçons 
de  dessin;  mais  lui,  élève  de  rhétorique,  qu'allait-il  faire?  Il 
fut  un  instant  question  de  le  mettre  dans  un  atelier,  jusqu'à 
ce  qu'il  put  reprendre  l'état  de  son  père,  avec  l'espoir  de  re^ 
trouver  sa  clientèle.  Mais  l'industrie  avait  bien  peu  réussi  à 
la  maison,  et  le  jeune  Egger  avait  eu  au  collège  Saint-Louis, 
au  concours  même,  des  succès  qui  lui  ouvraient  une  autre 
carrière-  Une  femme  dont  les  biographies  de  notre  confrère 
ont  justement  gardé  le  nom,  car  c'est  elle  qui  décida  de  son 
avenir.  M'""  Duverdv,  fit  résoudre  qu'il  achèverait  ses  études, 
et  le  1"  août.  5  dix-huit  ans,  il  les  couronnait  par  le  bacca- 
lauréat. 

C'est  alors  qu'il  aurait  pu  entrer  à  l'Ecole  normale  et  y  dis- 
puter les  premiers  rangs.  Mais  l'Ecole,  qui  admettait  gratui- 
tement ses  élèves,  ne  leur  offrait  pas,  pour  le  moment,  d'autres 
ressources,  et  le  jeune  Egger  voulait  partager  avec  sa  sœur  le 
soin  de  soutenir  sa  mère.  11  se  résigna  donc  à  poursuivre  ses 
études  tout  seul,  se  partageant  entre  les  cours  qu'il  suivait  et 
les  répétitions  qu'il  donnait,  durant  l'année  classique  dans 
quelques  pensions,  pendant  les  vacances  dans  quelques  fa- 
milles. Et  ses  études  n'y  perdirent  rien,  puisque,  dès  l'année 
suivante,  il  était  licencié,  et  l'année  d'après  docteur  avec  deux 
thèses,  dont  le  doyen.  Victor  Le  Clerc,  avait  pu  dire:  «Enfin, 

.•i;5. 


—  MÇ>  — 

voilà  des  thèses  qui  nous  apprennent  quoique  chose!  w  allusion 
sans  doute  à  quelques  thèses  médiocres  soutenues  antérieure- 
ment, mais  non  pas  à  tout  le  passé;  car,  l'année  précédente, 
(rois  élèves  de  troisième  année  de  l'Ecole  normale,  Hamel, 
Barry  et  Monin,  avaient  présenté  des  thèses  qui  avaient  fait 
quelque  sensation:  Hamel  sur  les  Œuvres  d'Hésiode,  Barry  sur 
la  Légende  de  Robin  Hood,  et  Monin  sur  le  Roman  de  Roncevaux, 
qu'il  fut  le  premier  à  exhumer  des  manuscrits. 

En  1 83/i ,  Emile  Egger  était  reçu  le  premier  à  l'agrégation 
des  lettres,  prenant  ainsi  le  pas  sur  les  élèves  de  l'Ecole  des 
mêmes  études  et  du  même  temps;  le  troisième  était  notre 
ancien  et  regretté  confrère  Thomas-Henri  Martin.  M.  Ville- 
main,  président  du  concours,  avait  été  frappé  de  l'érudition 
dont  plusieurs  de  ses  compositions  portaient  l'empreinte,  par 
exemple  une  pièce  devers  latins,  le  Songe  d'Enni  us,  où  le  can- 
didat, au  risque  de  paraître  moins  virgilien  dans  la  coupe  de 
l'hémistiche  et  dans  le  choix  des  mots,  avait  su  refléter  quel- 
que chose  des  archaïsmes  du  vieux  poète.  Le  président  du 
concours,  qui  était  en  même  temps  vice-président  du  conseil 
royal  de  l'Université,  lui  offrit  la  chaire  de  rhétorique  de 
Rouen,  la  première  après  la  rhétorique  de  Paris  et  de  Ver- 
sailles; mais  le  jeune  agrégé  avait  toujours  les  mêmes  raisons 
de  rester  à  Paris.  Il  fut  donc  heureux  de  rentrer  au  collège 
Saint-Louis  comme  agrégé  volant  (c'était  le  titre);  ce  fut  seu- 
lement trois  ans  après  qu'il  fut  chargé  de  la  rhétorique  sup- 
plémentaire, puis  d'une  division  de  seconde  au  même  collège 
et  l'année  suivante  au  collège  Charlemagne,  avec  un  traite- 
ment d'un  peu  moins  de  deux  mille  francs. 

On  comprend  qu'avec  ses  charges  de  famille  il  ait  eu 
besoin  de  suppléer  à  la  modicité  des  allocations  universitaires 
par  des  leçons  et  par  des  travaux.  Les  leçons  ne  ralentirent 
point  chez  lui  les  travaux,  même  ceux  qui  donnent  moins  de 
profit  que  d'honneur.   C'est  ainsi  qu'il  publia  en  iSSy  une 


A  7  7 


édition  plus  complète  de  Longiii,  et  le  traité  de  Varron  De 
lingua  latina,  d'après  l'édition  de  Leipzig;  en  i838,  une  nou- 
velle recension  des  fragments  de  Verrius  Flaccus,  avec  un 
fragment  de  Sextius  Pompeius  Flaccus.  En  même  temps  il 
suivait  les  leçons  des  deux  maîtres  dont  il  devait  plus  tard 
continuer  les  traditions  :  Boissonade  au  Collège  de  France, 
Hase  à  l'École  des  langues  orientales  vivantes  :  le  grec  sous 
sa  double  forme,  ancienne  et  moderne;  et  il  abordait  les  tra- 
vaux de  l'Institut.  L'Académie  des  inscriptions  avait  mis  au 
concours  en  1887  X Examen  critique  des  historiens  anciens  de  la 
vie  et  du  règne  d'Auguste.  Ce  fut  le  mémoire  d'Egger  qui  rem- 
porta le  prix  en  1889;  et  le  public  savant  put  ratifier  la  dé- 
cision de  l'Académie,  quand  le  mémoire  parut  en  un  volume 
de  près  de  cinq  cents  pages  en  i84/i.  Pendant  le  cours  de  ce 
travail,  il  s'était  cassé  le  bras;  le  mémoire  ne  put  être  achevé 
que  par  l'aide  de  sa  sœur  qui  tint  la  plume.  Elle  put  donc 
jouir  doublement  de  son  succès,  mais  ce  ne  fut  point  pour 
longtemps  :  elle  mourut  au  commencement  de  l'année  sui- 
vante (29  janvier  18/10),  laissant  un  vide  bien  douloureux 
dans  la  maison;  au  moins  pouvait-elle  se  dire  que  le  sort  de 
sa  mère  et  l'avenir  de  son  frère  étaient  désormais  assurés. 

Dès  1889,  à  la  suite  du  prix  remporté  par  Emile  Egger  à 
l'Académie  des  inscriptions,  il  avait  été  chargé  par  M. Cousin 
de  la  conférence  de  grammaire  à  l'Ecole  normale.  Ce  cumul 
lui  procurait  environ  8,000  francs  de  revenus  :  car  l'Ecole 
normale  donnait  alors  1,000  à  i,5oo  francs  aux  chargés 
de  cours  et  8.000  francs  aux  titulaires. 

Avant  d'arriver  au  titre,  en  i8/i8,  il  avait  du  subir  une 
nouvelle  épreuve  et  celle-là  au  moins  allait  le  faire  entrer 
dans  l'enseignement  qu'il  était  destiné  à  rendre  si  fécond. 
En  i8/io,  M.  Cousin  avait  voulu  signaler  son  ministère  en 
instituant  le  concours  d'agrégation  des  Facultés,  Les  jeunes 
docteurs  devaient  s'y  présenter.  Emile  Egger  y  était  tout  par- 


—  /J78  — 

ticulièrement  appelé  par  la  position  qu'il  occupait  à  l'Ecole 
normale.  Ce  concours  est  resté  fameux  par  l'éclat  que  lui  don- 
nèrent trois  des  concurrents  de  la  section  des  lettres,  Ozanam, 
Egger  et  Berger.  L'éloquence  d'Ozanam ,  l'érudition  d'Egger, 
servie  par  une  élégante  facilité  de  parole,  le  savoir  solide  et 
imperturbable  de  Berger  semblaient,  jusqu'à  la  fin,  balancer 
les  chances  des  concurrents;  mais,  à  la  dernière  épreuve, 
Ozanam,  qui  n'avait  point  le  fonds  d'études  classiques  des 
deux  autres,  put  se  croire  perdu,  quand  le  sort  lui  assigna 
comme  sujet  de  leçon  à  préparer  en  vingt-quatre  heures: 
YHistoire  des  scholiastes  grecs  et  latins.  C'était  un  sujet  fait  pour 
ses  rivaux  et  qui,  tombant  entre  ses  mains,  pouvait  les  servir 
d'une  autre  manière.  Comment  et  par  quelle  aide  s'en  est-il 
tiré?  Lui-même  l'a  raconté  dans  une  lettre  à  un  ami  : 

aCeci,  lui  disait-il,  semblait  une  méchanceté  du  sort,  et 
l'on  savait  si  bien  que  je  n'étais  nullement  au  courant  de  ces 
spécialités  philologiques  que  la  lecture  du  billet  fut  accueilli 
par  un  rire  général  de  malice.  .  .  Je  me  croyais  perdu,  et, 
bien  qu'un  de  mes  rivaux,  M.  Egger,  avec  beaucoup  de  géné- 
rosité, m'eût  fait  passer  d'excellents  livres,  cependant,  après 
une  nuit  de  veilles  et  une  journée  d'angoisses,  j'arrivai  plus 
mort  que  vif  au  moment  de  prendre  la  parole.  Bref,  votre 
ami  parla  sur  ces  scholiastes  pendant  sept  quarts  d'heure  avec 
une  assurance,  une  liberté,  dont  il  s'étonnait  lui-même;  il 
parvint  à  intéresser,  à  émouvoir  même,  à  captiver  non  pas 
seulement  ses  juges,  mais  l'auditoire,  et  se  retira  avec  tous  les 
honneurs  de  la  guerre,  ayant  mis  les  rieurs  de  son  côté.  5) 

Ainsi,  dans  une  épreuve  qui  devait  décider  de  l'issue  du 
concours,  c'est  Egger  qui  tendait  la  main  à  son  rival  et  pré- 
venait sa  chute.  Rien  ne  fait  plus  honneur  à  son  désintéres- 
sement, rien  ne  prouve  mieux  comme  il  recherchait  le  bien 
en  toute  chose,  fût-ce  aux  dépens  de  sa  propre  fortune.  Il 
courait   le  risque  d'être  battu,  mais  comme  on   allait  bien 


—  /479  — 

parler  des  sclioliastes!  La  première  |)lacc  lui  en  effet  dikernée 
à  Ozaiiam,  la  seconde  à  Egger,  la  troisième  à  Berger.  Ozanam 
entra  dès  lors  dans  la  Faculté  des  lettres  de  Paris,  et  très 
heureusement  Egger  avec  lui.  La  suppléance  de  la  chaire  de 
littérature  étrangère  que  notre  confrère  avait  déclinée,  deux- 
ans  auparavant,  ne  se  sentant  point  suffisamment  initié  aux 
langues  de  nos  voisins,  échut  à  Ozanam  sur  la  proposition 
de  Fauriel;  mais  la  suppléance  de  la  chaire  de  grec  se  trou- 
vant vacante  par  la  retraite  de  David  (fds  du  grand  peintre) 
qui  remplaçait  Boissonade ,  Egger  y  fut  appelé.  C'est  le  point 
initial  d'un  enseignement  qu'il  continua  comme  suppléant 
d'ahord,  puis  comme  titulaire,  pendant  plus  de  quarante  ans. 
Il  entrait  dans  la  carrière  de  l'enseignement  sous  le  pa- 
tronage du  président  du  concours,  Victor  Le  Clerc,  doyen  de 
la  Faculté  des  lettres.  Il  y  trouvait  aussi  l'appui  d'un  autre 
professeur  de  la  Faculté,  président  du  concours  de  sa  pre- 
mière agrégation,  M.  Villemain,  successeur  de  M.  Cousin  au 
Ministère  de  l'instruction  publique,  et  toujours  passionné 
pour  la  littérature  ancienne,  bien  qu'ayant  acquis  sa  re- 
nommée dans  la  chaire  d'éloquence  française.  Ce  fut  lui  qui , 
se  rappelant  la  pièce  de  vers  sur  le  songe  d'Ennius,  suggéra  à 
notre  confrère  l'idée  de  mettre  au  jour  un  choix  de  morceaux 
de  l'ancienne  langue  latine  :  Latini  sennonis  vetustions  rehquiœ 
selectœ,  publication  originale  dont  plusieurs  textes  auraient  pu 
être  établis  d'après  des  leçons  meilleures,  mais  qui  n'en  avait 
pas  moins  le  mérite  d'appeler  l'attention  sur  cette  langue 
primordiale,  trop  négligée  des  humanistes.  M.  Villemain  avait 
parlé  à  Egger  d'un  autre  projet;  mais,  cette  fois,  c'était  lui 
seul  qui  pouvait  le  mener  à  bonne  lin,  comme  ministre.  II. 
s'agissait  de  faire  un  recueil  d'épigraphic  latine,  sur  le  mo- 
dèle du  Corpus  inscriplionum  grœcarum  publié  en  Allemagne 
sous  les  auspices  de  Bœckh.  Une  commission  fut  nommée  par 
lui,  qui  réunissait  les   noms   les  plus  considérables  dans  la 


—  480  — 

science  de  l'histoire  ou  du  droit  des  anciens  Romains  :  Bur- 
nouf  le  père,  Le  Clerc,  Hase,  Naudet,  Patin,  Letronne,  Bu- 
reau de  la  Malle,  Giraud  (lo  juillet  18 4 3).  Egger,  si  jeune 
encore,  en  était  le  secrétaire,  et  un  mois  ne  s'était  pas  écoulé 
(  3  août)  qu'il  fit  un  rapport  oii  le  plan  et  les  grandes  divisions 
de  l'ouvrage  étaient  tracés.  Personne  ne  nous  faisait  concur- 
rence. Borghesi,  en  Italie,  Momnisen.  en  Allemagne,  offraient 
leur  collaboration.  Mais  M.  Villemain  sortit  du  ministère,  et 
l'entreprise,  qui  n'avait  pas  reçu  un  commencement  d'exécu- 
tion, fut  abandonnée.  C'est  ainsi  qu'elle  échut  à  l'Académie 
de  Berlin  qui  l'achève  aujourd'hui. 

Egger  se  trouva  dès  lors  plus  exclusivement  ramené  aux 
études  grecques  qui  faisaient  l'objet  de  son  enseignement. 
Il  avait  donné  une  physionomie  nouvelle  à  sa  chaire.  Bois- 
sonade,  qui  joignait  à  la  connaissance  la  plus  sûre  de  la 
langue  un  goût  exquis,  se  bornait,  au  Collège  de  France  (car 
il  avait  les  deux  chaires  de  grec),  à  prendre  une  tragédie 
d'Eschyle,  de  Sophocle  ou  d'Euripide  et  à  ghsser  dans  le 
texte,  en  forme  de  commentaires,  ses  aperçus  littéraires,  tou- 
iours  si  fins,  mais  toujours  si  discrets.  A  la  Sorbonne,  son 
ancien  suppléant  se  contentait  de  l'explication.  Emile  Egger 
pensa  que  la  littérature  grecque  pouvait  bien  être  traitée, 
comme  la  prose  et  la  poésie  latine  dans  les  chaires  de  MM.  Vic- 
tor Le  Clerc  et  Patin.  A  côté  de.  sa  leçon  d'explication,  il  eut 
sa  leçon  littéraire  où  il  développait,  soit  le  système  des  poèmes 
homériques,  soit  l'histoire  de  la  tragédie,  de  la  comédie  ou 
de  l'éloquence.  C'est  ce  qu'on  appela  la  grande  et  la  petite 
leçon;  car  la  petite  leçon  n'est  pas  née  avec  les  conférences 
établies  depuis  dans  les  Facultés,  et  il  serait  regrettable  que, 
sous  l'influence  de  cette  institution  si  utile,  elle  fît  oublier, 
comme  cela  arrive,  dit-on,  en  quelques  facultés  de  province, 
la  grande  leçon.  Dans  tous  les  cas,  on  peut  être  assuré  que, 
quel  que  soit  le  vent  qui  souffle  au  ministère,  on   trouvera 


toujours,  à  la  Sorbonne,  des  professeurs  résolus  ù  ne  pas 
laisser  perdre  les  glorieuses  traditions  des  Villemain,  des 
Guizot  et  des  Cousin,  des  Saint-Marc  Girardin,  des  Ozanam, 
des  Jules  Simon  et  des  Caro. 

Emile  Egger  ne  s'emprisonna  jamais  dans  l'étude  littérale 
des  textes.  Grande  ou  petite  leçon,  son  esprit  curieux  et  péné- 
trant y  tenait  l'auditeur  en  éveil,  en  appelant  à  son  aide  deux 
sciences  qui  jettent  la  plus  vive  lumière  sur  l'antiquité  :  l'épi- 
graphie  et  l'archéologie.  Peut-on  parler  des  poèmes  homé- 
riques, ou  du  théâtre  grec,  sans  rien  dire  des  vases  peints,  où 
les  personnages  mis  en  scène  par  les  poètes  sont  figurés?  C'est 
ce  qui  fit  que  son  enseignement  fut  si  fécond  et  qu'il  suscita 
non  seulement  tant  d'hellénistes  excellents,  mais  aussi  tant 
d'archéologues  ou  d'épigraphistes. 

Je  n'essaierai  point  de  résumer  les  quarante  années  de  cet 
enseignement  à  la  Sorbonne.  La  matière  serait  trop  abon- 
dante et,  à  d'autres  égards,  elle  ferait  défaut:  car  si  le  savant 
professeur  parlait  sur  un  programme  déterminé  et  sur  un 
fond  richement  accru  par  le  travail,  il  parlait  sous  l'inspi- 
ration du  moment.  Avec  sa  prodigieuse  facilité  d'improvi- 
sation, sa  pensée  eût  trouvé  des  entraves  dans  une  forme 
trop  arrêtée  d'avance.  Mais  il  y  a  quelques  leçons,  des  leçons 
d'ouverture,  qu'il  a  voulu  lire;  il  y  en  a  d'autres  qu'il  a  ré- 
digées plus  tard  et  données  à  divers  recueils,  ou  recueillies 
lui-même,  avec  d'autres  travaux,  en  deux  volumes 'i';  enfin  il 
V  a  deux  cours  qu'il  a  publiés  intégralement  :  le  cours  de 
18/10  à  1 861  qui  a  inauguré  son  enseignement  dans  la  chaire 
de  Boissonade^2)  ^t  le  cours  de  1867  à  1868,  professé  dans 

(')  Mémoire»  de  littérature  ancienne  (Paris,  Aug,  Durand,  1862);  —  Mémoires 
d'histoire  ancienne  et  de  philologie {iS&3). 

(')  Essai  sur  Vhistoire  de  la  critique  chez  les  Grecs.  11  y  a  joint  la  Politique 
d'Aristote  et  des  Extraits  de  ses  problèmes  avec  traduction  française  et  commen- 
taire (Paris,  18^9,  et  2' édition,  »886). 


-^  Zi82  — 

la  pleine  maturité  de  son  talent,  sur  rinjluence  des  études 
grecques  dons  le  développement  de  la  langue  et  de  la  littérature 
française  '^^. 

On  pourrait  se  demander  pourquoi,  ayant  enseigné  pen- 
dant plus  de  quarante  ans,  presque  un  demi-siècle,  la  litté- 
rature grecque,  et  pénétré  à  fond,  comme  on  le  peut  croire, 
toutes  les  parties  d'un  si  vaste  sujet,  il  n'en  a  pas  écrit  une 
histoire  générale.  On  le  lui  a  demandé  à  lui-même,  en  le 
pressant  de  le  faire.  Il  s'y  est  refusé,  s'excusant  sur  le  grand 
nombre  de  ses  obligations,  mais  disant  aussi  «que  les  vérités 
banales  et  les  lieux  communs  tiennent  nécessairement  une 
grande  place  dans  un  ouvrage  d'ensemble.  Or,  ajoutait-il, 
sans  méconnaître  l'utilité  des  lieux  communs  (loin  de  là,  je  la 
défendrais  si  elle  était  méconnue),  j'avoue  qu'ils  m'attirent 
peu.  Surtout  en  dehors  de  l'enseignement  public,  je  préfère 
l'étude  des  questions  nouvelles.  Choisir  un  sujet  étroit,  mais 
peu  connu,  l'explorer  dans  tous  les  sens,  avec  toute  la  péné- 
tration dont  on  est  capable,  me  paraît  déjà  un  bon  emploi 
de  la  critique  ^~\  "  Ce  serait  la  condamnation  de  l'histoire. 
On  a  pu  lui  répondre  qu'il  y  avait  plus  d'une  manière  d'être 
neuf  sur  des  sujets  déjà  traités'^*;  et  lui-même  avait  trop  d'ex- 
périence pour  ne  pas  le  savoir.  Aussi  son  excuse  n'avait-elle 
rien  d'absolu  :  <:tDans  tous  les  cas,  continuait-il,  on  m'accor- 
dera sans  peine  que  ce  genre  de  travail  aura  été  pour  moi 
une  préparation  efficace  à  l'œuvre  autrement  difficile  d'une 
histoire  générale  de  la  littérature  grecque,  si,  connne  je  l'es- 
père, il  m'est  permis  un  jour  de  l'entreprendre.??  Il  devait 
persévérer  dans  cette  voie,  tant  qu'il  verrait  quelque  chose  à 


"'  Il  l'a  fait,  paraître  l'année  suivante  sous  le  litre  de  :  L'Iiellémsme  en  France 
(Paris,  Didier,  2  vol.  in-S",  18G9).  Nous  aurons  à  y  revenir. 

'''  Mémoires  d'hisloire  ancietme  et  de  philologie ,  préface,  p.  x. 

'•^'>  Alfred  Croiset,  Emile  Egger,  p.  9.  —  Notre  jeune  confrère,  avec  son 
Irère,  est  en  Irain  d'en  fournir  la  démonstration. 


—  Zi83  — 

découvrir.  Mais  il  entrevoyait  toujours  quelque  chose  à  dé- 
couvrir. 11  y  usa  sa  vie. 

La  première  publication  originale  qu'il  fit  après  ses  deux 
thèses,  c'est  le  mémoire  qui  lui  avait  valu  un  prix  de  notre 
Académie  :  Examen  critique  des  historiens  anciens  de  la  vie  et  du 
règne  d'Auguste  (i8/i4).  Un  peu  après  eut  lieu  un  événement 
considérable  dans  sa  vie.  Ayant  procuré  à  sa  mère  une  situa- 
tion indépendante,  grâce  aux  libéralités  d'un  ami  qui  l'avait 
pris  pour  héritier,  il  songea  à  son  propre  bonheur  et  l'assura 
en  épousant  la  fille  d'un  ingénieux  et  fin  helléniste,  qui  fut 
l'un  de  nos  plus  aimables  confrères,  M.  Dehèque.  Elle  fut  la 
joie  et  l'honneur  de  sa  maison,  la  compagne  de  sa  vie  labo- 
rieuse, sa  consolation  et  son  aide  dans  les  épreuves  qui  en 
marquèrent  la  fin;  et  c'est  elle  qui  après  sa  mort  a  fait  le  plus 
pour  sa  mémoire,  en  rédigeant  avec  une  si  parfaite  diligence 
et  un  soin  si  pieux  la  bibliographie  de  ses  travaux,  c'est-à-dire 
la  meilleure  de  ses  notices  biographiques;  car  ses  travaux,  c'est 
bien  sa  vie,  et  cette  nofice  est  la  source  où  quiconque  voudra 
parler  de  lui  viendra  puiser'^'. 

C'est  un  peu  après  qu'Emile  Egger  publiait  son  Histoire  de 
la  critique  chez  les  Grecs,  qui  est  son  cours  de  début  à  la  Sor- 
bonne.  puis  ses  Notions  élémentaires  de  grammaire  comparée, 
petit  livre  qui  supposait  de  bien  vastes  études  et  introduisait 
dans  nos  lycées  les  éléments  d'une  science  dont  les  preuves 
étaient  faites  et  le  domaine  déjà  fort  étendu.  Ayant  doté  nos 
établissements  de  ce  livre  d'école  qui  fut  traduit  en  plusieurs 
langues  et  qui,  en  1880  déjà,  ne  comptait  pas  moins  de  huit 
éditions,  Egger,  revenant  aux  anciens,  donna  la  mesure  de 
son  érudition  en  cette  matière,  dans  un  travail  sur  le  gram- 
mairien grec  Apollonius  Dyscole,  un  érudit  d'un  assez  mau- 
vais caractère,  comme   son  surnom   rindi(jue   et    comme   le 

("   On  trouvera  celle  précieuse  bibliographie  à  ia  suite  de  la  notice  de  M.  Bailly. 
Je  n'aurais  pu  que  rabiéger  ici;  je  n'ai  pas  su  m'y  résoudre. 


—  àSà  — 

prouve  l'aigreur  de  ses  attaques  de  savant  à  savant.  Les  frag- 
ments étendus  qui  en  sont  restés  ont  permis  à  notre  confrère 
de  reconstituer  son  œuvre  et  de  l'agrandir  en  publiant  un 
Essai  sur  l'histoire  des  théories  grammaticales  dans  l'antiquité 
(i85/i).  Il  s'y  proposait  de  faire  connaître,  par  un  remar- 
quable exemple,  les  travaux  de  ces  hommes  qui  furent  les 
grands  fondateurs  de  la  grammaire  philosophique  en  Occi- 
dent. Or,  dit-il,  «Apollonius,  le  seul  d'entre  eux  dont  il 
nous  soit  resté  de  longs  écrits,  est,  au  jugement  des  anciens, 
le  plus  habile  des  philologues  qui  aient  traité  de  l'analyse  du 
langage.  35  Et  pour  traiter  de  la  philosophie  de  la  parole,  il  ne 
savait  qu'une  langue  :  le  grec. 

Par  cet  ouvrage,  Emile  Egger  avait  marqué  sa  place  parmi 
les  maîtres  qui  cultivaient  alors  ces  études  dans  notre  Aca- 
démie, les  Hase,  les  Naudet,  les  Le  Clerc.  Il  fut  élu  au  fau- 
teuil laissé  vacant  par  un  savant  éminent  d'un  autre  ordre, 
M.  Guérard  (96  avril  i85/i). 

Désormais  il  se  partagea  entre  la  Sorbonne  et  l'Institut,  et 
ses  principaux  travaux  enrichirent  les  recueils  de  notre  Aca- 
démie'^l  Plus  d'une  fois  il  fut  appelé  à  en  donner  lecture, 
soit  dans  nos  séances  publiques,  soit  dans  les  séances  trimes- 
trielles de  l'Institut;  on  le  désignait  volontiers,  et  plus  sou- 
vent peut-être  qu'aucun  autre,  pour  cet  olTice  et  cet  honneur, 
parce  qu'on  le  savait  toujours  prêt  et  qu'on  était  sûr  qu'il 
intéresserait  toujours.   L'Académie  avait  confié    à  notre  re- 

"'  Mémoire  sur  un  document  inédit  pour  servir  à  l'histoire  des  langues  ro- 
manes (i855);  —  Observations  sur  rpielquos  fragments  de  potn-ie  antique  pro- 
venant d'Egypte  et  qui  portent  des  inscriptions  grecques  (i856);  —  Mémoire 
historique  sur  les  traités  publics  dans  l'antiquité  depuis  les  temps  héroïques  de  la 
Grèce  jusqu'aux  premiers  siècles  de  l'ère  chrétienne  {iS^6)\ —  Observations  sur 
un  procédé  de  dérivation  très  fréquent  dans  la  langue  française  et  dans  les  idiomes 
néo-latins  (1860);  —  Mémoire  sur  quelques  nouveaux  fragments  de  l'orateur  Hy- 
péride  (1866);  —  Sur  les  historiens  officiels  et  les  panégyriques  des  princes  dans 
l'antiquité  grecque  (1870);  — Sur  les  OEconomica  d'Aristote  et  de  Thénphrasle 
(1879).  —  Je  donne  les  dates  des  premières  lectures  devant  l'Académie. 


—  'i85  — 
grelté  confrère  Brunet  de  l^esles  la  j)ul)lication  des  Papyrus 
grecs  (l Egypte,  dont  Letronne  avait  été  charge.  Quand  Egger 
fut  de  notre  Compagnie,  il  y  fut  associé  sur  la  demande  de 
Brunet  de  Presles  lui-même,  son  ami.  Il  accepta  avec  le  même 
empressement    de    faire,   plusieurs    années    de    suite,   après 
M.  Guigniaut,  le  rapport  sur  les  travaux  de  l'Ecole  française 
d'Athènes,  cette  pépinière  d'archéologues  et   d'épigraphistes 
qui  lui  était  si  chère  à  ce  double  titre.  Il  fut,  depuis  i865 
jusqu'à  la  fin,  annuellement,  élu  membre  de  la  Commission 
des  travaux  littéraires,  où  ses  avis  étaient  si  appréciés.   En 
1860,  il  devint  membre  de  la  Commission  des  inscriptions  et 
médailles,  cette  petite  académie  qui  jadis  rédigeait  les  inscrip- 
tions des  monuments  et  les  légendes  des  médailles  du  grand 
roi,  et  qui  ne  serait  pas  moins  utile  encore,  si  l'on  savait  en 
faire  plus  d'usage,  aujourd'hui  que  l'on  érige  tant  de  statues, 
tant  de  bustes,  tant  de  plaques,  sans  avoir  plus  de  grands 
hommes  ou  de  grandes   choses  à  célébrer.  Mais  enfin  il  y  a 
des  circonstances  où  elle  n'est  pas  oubliée ,  où  l'on  a  recours  à 
son  savoir-faire  :  chacun  des  membres  apporte  alors  son  con- 
tingent sur  le  sujet  proposé;  et  si  l'on  faisait  le  dépouillement 
de  notre  Registre,  on  verrait  que  notre  habile  épigraphiste, 
de  l'aveu  de  ses  collègues,  remportait  bien  souvent  le  prix. 

A  l'Institut,  d'ailleurs,  il  ne  se  renfermait  pas  seulement 
dans  notre  Compagnie.  Par  l'antiquité,  il  touchait  à  une 
foule  de  questions  qui  intéressaient  aussi  les  autres  Acadé- 
mies. Il  y  allait  faire  volontiers  des  lectures  qui  n'étaient  pas 
accueillies  avec  moins  d'empressement,  même  à  l'Académie 
des  sciences;  et  les  savants  à  leur  tour  venaient  aussi  à  lui, 
car  les  savants  avaient  parfois  besoin  de  son  aide.  La  science 
crée  des  catégories,  elle  découvre  des  choses  qu'il  faut  nom- 
mer. Or.  on  ne  fait  scientifiquement  des  noms  nouveaux 
(ju'avec  le  grec.  Les  arts  industriels,  à  cet  égard,  rivalisent 
avec  les  sciences  naturelles;  et  notre  confrère  recevait  à  ce 


—  /i86  — 

sujet  de  nombreuses  visites.  Disons  qu'il  les  recevait  volon- 
tiers. Il  aurait  pu  tenir  bureau  de  consultations,  consulta- 
tions gratuites  où  il  se  serait  cru  volontiers  l'obligé  :  car  il 
souffrait  de  voir,  en  bien  des  cas,  l'admirable  instrument  que  la 
langue  grecque  nous  offre  pour  cette  fabrication  de  mots,  bien 
maladroitement  employé.  Il  ne  suffit  pas,  en  effet,  de  juxtaposer 
deux  racines  pour  en  faire  un  nom  composé;  il  y  a  des  règles 
pour  cette  composition;  faute  de  les  suivre,  on  fait  des  mots 
qui  disent  tout  le  contraire  de  ce  que  l'on  veut  dire.  On  ne 
dit  pas  indifféremment,  par  exemple,  Théophile  ou  Phi- 
lothée. 

La  science  d'Egger  se  répandait  donc  libéralement  hors  de 
notre  Académie  et  même  de  l'Institut.  Auprès  de  l'Institut,  le 
Journal  des  Savants  est  le  lieu  oii  sa  critique  se  trouvait  le  plus 
à  l'aise.  A  partir  de  i8/i8,  bien  qu'étranger  encore  au  journal, 
il  y  avait  fait  admettre  plusieurs  articles.  Nommé  auteur  en 
1872,  il  remplit  largement  les  obligations  que  ce  titre  lui 
imposait  et,  sous  forme  de  comptes  rendus  d'ouvrages  récem- 
ment publiés,  il  enrichit  le  journal  d'une  foule  d'aperçus 
nouveaux  que  sa  profonde  érudition  se  trouvait  toujours  en 
mesure  d'ajouter  aux  produits  du  savoir  des  autres;  il  y  a 
d'ailleurs  dans  l'ensemble  de  ces  articles  une  vue  générale  sur 
la  critique  moderne  en  matière  de  littérature  et  d'antiquités 
grecques  et  romaines  qui  ne  perd  rien  à  s'étendre  sur  tant 
d'objets  divers. 

J'ai  dit  pourquoi  notre  confrère  refusait,  ou,  du  moins, 
différait  d'entreprendre  une  histoire  de  la  littérature  grecque. 
Il  évitait  les  sentiers  battus:  il  aimait  et  respectait  les  vieilles 
vérités,  mais  il  était  plus  volontiers  à  la  recherche  des  vérités 
nouvelles.  Aussi  avait-on  l'assurance  de  rencontrer  toujours 
quelque  chose  de  neuf  dans  ce  qu'il  offrait  au  public,  et  les 
plus  érudits  eux-mêmes  y  trouvaient  leur  profit.  Il  s'adressait 
du  reste  avec  une  certaine  complaisance  aux  gens  du  monde 


—  àSl  — 

et  se  faisait  fort  de  les  attirer  aux  choses  d'érudition  par  le 
piquant  de  ses  aperçus.  Les  Grecs  ont-ils  connu  la  profession 
d'avocat?  Voilà  un  sujet  qui  devait  éveiller  la  curiosité,  en  un 
temps  où  les  avocats  ont  une  si  grande  part  à  la  direction 
des  aflaires.  Sans  qu'il  se  fût  jamais  (fort  heureusement  pour 
la  science)  mêlé  aux  choses  de  la  politique,  il  ne  dédaignait 
pas  de  prendre,  dans  les  événements  du  jour,  occasion  de 
quelque  travail  instructif.  Un  des  faits  les  plus  considérables 
du  dernier  Empire,  un  grand  succès  qui  devait  avoir  un  si 
fatal  revers,  le  Congrès  de  Paris  (i855),  lui  suggéra  l'idée 
d'une  fort  intéressante  étude  historique  Sur  les  traités  publics 
cliez  les  Grecs  et  chez  les  Romains  depuis  les  temps  les  plus  anciens 
jusqu'aux  premiers  siècles  de  l'ère  chrétienne.  Il  en  fit  lecture  dans 
la  séance  annuelle  de  notre  Académie,  le  8  août  i  856,  et  la 
publia  un  peu  plus  tard  avec  plus  d'étendue  :  ce  discours  était 
devenu  un  livre  (i  861) ^'l 

Le  premier  mémoire  qu'il  donna  à  notre  recueil  était  Sur 
un  document  inédit  pour  servir  à  l'histoire  des  langues  romanes  ^"^^  ; 
et  un  peu  plus  tard  il  y  publiait  encore  des  Observations  sur 
tm  procédé  de  dérivation  très  fréquent  dans  la  langue  française  et 
les  idiomes  néo-latins  (i86/i)'^'.  C'est  un  signe  que  l'étude  des 
langues  anciennes  ne  l'avait  pas  désintéressé  de  notre  langue; 
bien  au  contraire,  et  il  en  donna  une  preuve  plus  concluante 
encore  dans  sa  chaire  de  grec  à  la  Sorbonne,  quand  il  y  con- 
sacra toute  une  année  à  exposer  l'influence  des  études  grec- 
ques dans  le  développement  de  la  langue  et  de  la  littérature 
française. 

C'est  ce  cours  de  1867  à  1868  qu'il  publia  intégralement, 
comme  nous  l'avons  indiqué,  sous  le  titre  de  :  L'hellénisme  en 
France.   Le  savant  professeur  possédait   trop  bien  son  sujet 

^')  Une  seconde  édition  en  a  paru  en  186G. 

(''   Mémoires  de  l'Académie  des  inscriptions ,  t.  XXI,  i"  partie  (1857),  p.  Hg, 

(')   Ihid.,  t.  XXIV,  2' partie  (1866),  p.  079. 


pour  se  laisser  entraîner  à  le  surfaire.  Une  colonie  de  Pho- 
céens a  fondé  Marseille.  Des  apôtres  de  race  hellénique,  saint 
Pothin,  saint  Irénée,  furent  les  premiers  évêques  de  l'Eglise 
de  Lyon.  Les  villes  de  Marseille  et  de  Lyon  seront-elles  des 
foyers  d'hellénisme  dans  la  Gaule?  Non,  c'est  surtout  par  les 
écoles  des  Romains  que  la  Gaule  connut  la  Grèce,  et  l'inva- 
sion barbare  ensevelit  bientôt  ce  qui  pouvait  rester  de  cet 
enseignement:  ce  qu'on  sut  de  la  Grèce  à  la  cour  de  Ghar- 
lemagne  lui  venait  de  l'Irlande  où  les  barbares  n'avaient  point 
pénétré.  On  jugera  facilement  par  là  du  peu  de  part  qu'aura 
le  grec  à  la  formation  de  la  langue  vulgaire,  dérivée  du  latin  : 
la  langue  romane,  tant  la  langue  d'oïl  que  la  langue  d'oc,  en 
fait  de  mots  grecs,  n'aura  que  du  grec  latinisé;  et  nos  pre- 
miers poèmes  chevaleresques  ne  s'inspireront  pas  davantage 
de  V Iliade. 

Nous  sommes  ici  au  temps  des  croisades.  Le  passage  des 
Francs  à  Constantinople,  la  conquête  de  Constantinople  par 
les  Latins  vont-ils  relever  l'hellénisme  en  France?  Non  encore. 
Mais  voici  l'empire  des  Francs  détruit,  voici  un  autre  ennemi 
qui  se  montre  aux  portes  de  Constantinople,  qui  l'environne 
de  sa  domination,  qui  s'en  empare.  Cet  événement  si  consi- 
dérable dans  les  rapports  des  Etats  de  l'Europe  aura  son 
contre-coup  dans  le  développement  de  la  civilisation.  Les 
relations  qui  s'étaient  formées  en  vue  de  sauver  Constanti- 
nople ne  seront  pas  rompues  par  sa  chute,  au  contraire. 
L'émigration  des  Grecs  va  féconder  le  sol  de  l'Occident.  Les 
œuvres  originales  de  l'antiquité  grecque  sont  apportées  en 
manuscrits.  L'imprimerie  qui  vient  de  naître  travaille  à  les 
répandre;  c'est  l'époque  de  la  Renaissance  :  l'hellénisme  re- 
fleurit et  triomphe,  et  notre  confrère  a  bien  le  droit  de  pro- 
poser à  nos  hommages  les  grands  Français  qui,  à  la  suite  des 
Aides,  ont  aidé  à  cette  rénovation  par  la  publication  et  l'in- 
terprétation des  textes  grecs,  Robert  et  Henri  Eslienne,  sans 


—   'i89  — 

oublier  nos  grands  érudils  du  xvi"  siècle,  les  Scaliger,  les  Ca- 
saubon,  les  Sauniaise.  Dans  quelle  mesure  et  de  quelle  ma- 
nière notre  littérature  s'est-elle  ressentie  de  cette  résurrection 
des  chefs-d'œuvre  de  la  Grèce?  C'est  ce  qu'enseigne  notre 
confrère  par  une  suite  de  leçons  qui  du  xvf  siècle  nous  mè- 
nent au  xvii^  et  jusqu'à  la  fin  du  xviii^  :  leçons  où  il  montre 
autant  de  sagacité  dans  les  jugements  que  de  variété  dans 
l'érudition.  Tous  ceux  qui  aiment  notre  littérature,  et  qui 
veulent  l'étudier  dans  ses  rapports  avec  l'antiquité  grecque, 
ne  sauraient  prendre  un  guide  ])lus  exact,  plus  attachant  et 
plus  sûr. 

J'ai  dit  l'œuvre  considérable  d'Emile  Egger  dans  l'ensei- 
gnement. Mais  son  rôle  de  professeur  ne  se  bornait  pas  aux 
leçons  publiques.  Lorsqu'il  n'était  encore  que  suppléant  à  la 
Sorbonnc,  avant  qu'il  eût  à  y  siéger  comme  juge  dans  les 
examens,  il  faisait  chez  lui  des  conférences  préparatoires  ù  la 
licence  et  il  y  compta  des  étudiants  qui  sont  devenus  des 
maîlres  :  je  puis  nommer  notre  confrère  M.  Renan.  Il  profes- 
sait d'une  autre  manière,  en  faisant,  à  l'Ecole  des  Carmes, 
subir  des  examens  aux  élèves  ecclésiasti(pies  qui  se  préparaient 
aux  mêmes  épreuves;  car,  à  l'exemple  de  notre  vénéré  doyen 
Victor  Le  Clerc,  et  à  la  différence  de  beaucoup  d'autres,  il 
témoignait  une  bienveillante  sollicitude  pour  le  développe- 
ment des  éludes  littéraires  dans  le  clergé.  Il  était  d'ailleurs 
toujours  à  l'Ecole  normale  et,  tout  en  y  professant  la  gram- 
maire, il  y  suscita  les  vocations  les  plus  heureuses,  non  seu- 
lement pour  cette  science  fondamentale  qu'il  avait  su  agrandir 
et  élever  aux  considérations  philoso[)hiques,  mais  pour  l'épi- 
graphie  et  l'archéologie  :  témoin  plusieurs  de  ses  anciens  élèves 
qui  sont  devenus  nos  confrères,  MM.  Bréal,  Perrot,  lleuzey, 
Foucart,  Benoîl.  Et  quand,  devenu  professeur  titulaire  à  la 
Sorbonne.  il  eut  quitté  l'Ecole,  quand  il  rut  à  faire  et  non 
plus  seulement  à  former  des  licencii^s,  il  conserva  l'habit ndi' 

xvîi.  'M\ 


luraïui aïK 


—  /i90  — 

de  recevoir  chez  lui,  le  dimanche  matin,  ceux  qui,  universi- 
taires ou  non,  étaient  heureux  d'entendre  sa  parole  familière. 
C'était  comme  un  enseignement  socratique  où  se  pressaient  les 
jeunes  maîtres,  particulièrement  ceux  qui  se  destinaient  à 
l'enseignement  supérieur.  De  cette  libre  école  sont  sorties 
bien  des  thèses  dont  il  suggérait  l'idée  première  et  suivait 
l'élaboration  avec  un  intérêt  soutenu,  amendant  le  plan, 
indiquant  les  sources  à  explorer,  donnant  ses  avis  et  prêtant 
ses  livres  avec  une  égale  libéralité.  Il  n'y  a  pas  un  professeur 
de  la  Faculté  à  qui  aient  été  dédiées  un  plus  grand  nombre 
de  thèses  :  et  c'était  justice;  car  il  n'y  en  a  pas  un,  je  le  dis 
sans  craindre  de  provoquer  la  contradiction  ni  d'éveiller  la 
-susceptibilité  d'aucun  de  nos  anciens  collègues,  qui  se  soit 
plus  prodigué,  depuis  notre  maître  Victor  Le  Clerc,  dans 
•cette  œuvre  difficile  du  doctorat. 

Par  ses  petites  leçons  à  la  Sorbonne  et  par  ses  conférences 
privées,  Emile  Egger  avait  préludé,  en  quelque  sorte,  à  cette 
institution  des  conférences  qui,  dans  toutes  les  Facultés,  au- 
jourd'hui, sont  devenues  comme  les  séminaires  de  l'enseigne- 
ment public.  11  prit  aussi  une  grande  part  à  un  autre  genre 
^renseignement  qui  a  passé  dans  l'Université,  je  veux  parler 
de  l'enseignement  des  jeunes  filles.  Mais  ceux  qui  ont  créé  à 
Paris  cette  institution  n'avaient  pas  la  prétention  d'en  faire 
des  lycées  :  on  n'enlevait  pas  la  jeune  fdle  à  sa  mère.  C'étaient 
des  cours  publics  où  la  mère  amenait  sa  fdle  et  où  il  y  avait, 
pour  l'une  comme  pour  l'autre,  un  enseignement  élevé  au 
niveau  de  l'enseignement  universitaire  par  des  professeurs  de 
l'Université.  Emile  Egger  a  montré  comment  la  science  la  plus 
haute  peut  se  mettre,  sans  s'abaisser,  à  la  portée  de  cet  audi- 
toire nouveau,  à  force  de  simplicité,  de  clarté,  de  tact  et  de 
délicatesse.  On  en  peut  juger  par  les  allocutions  qu'il  a  pro- 
noncées, comme  président  de  l'Association,  à  l'ouverture  des 
cours  pour  les  années  iSyb,  1876,  1877  et   1878-1 87c), 


—  ^i91   — 

discours  recueillis,  avec  beaucoup  d'autres  morceaux  divers, 
dans  un  des  derniers  volumes  qu'il  ait  publiés,  sous  ce  litre: 
La  tradition  et  les  réfonnes  dans  l'enseignement  universitaire  ^^\ 

Cet  enseignement  des  jeunes  filles,  inauguré,  à  titre  privé, 
en  1867,  sous  le  ministère  de  M.  Duruy  qui  lui  prêta  une 
salle  de  la  Sorbonne,  nous  a  fait  dépasser  la  fatale  année 
1870.  Les  cours  qui  s'étaient  rouverts  encore,  malgré  le  siège, 
avaient  dû  se  fermer  dans  les  premiers  jours  de  janvier.  Le 
bombardement  avait  commencé  et  un  de  nos  collègues,  féli- 
citant  l'auditoire  de    sa   constance,   lui   appliquait   les  vers 

d'Horace  : 

Sifractiis  illabalur  orbis, 
Impavidum  Jerienl  ruinœ , 

quand  le  fracas  d'un  obus  éclatant  dans  la  cour  {^si  fractm 
illabalur  orbis)  dispersa  tout  le  monde  et  fît  renoncer  à  pousser 
plus  loin  l'épreuve.  Emile  Egger,  demeuré  avec  la  plupart 
d'entre  nous  à  Paris,  se  partagea  dès  lors  entre  les  séances 
de  notre  Académie  et  les  devoirs  de  la  garde  nationale.  Il  se 
fit  inscrire  parmi  les  vétérans,  faisant  le  pénible  service  de  la 
rue  aux  portes  des  boucheries;  on  respirait  plus  à  l'aise  aux 
remparts!  Et  le  vendredi,  il  venait  à  l'Institut,  c[ue  le  feu  de 
l'ennemi  n'atteignait  pas;  puis  il  rentrait  dans  la  région  des 
obus  et  s'installait  tranquillement  à  son  bureau. 

Avec  son  érudition, ses  charges  s'étaient  accrues  dans  l'Uni- 
versité et  au  dehors.  Il  fut  en  1871  président  du  concours 
d'agrégation  de  grammaire ,  et  il  le  présida  assez  longtemps  pour 
imprime"  à  ce  concours,  et  par  suite  à  l'enseignement  qui  en 
sortait,  ce  caractère  large  et  compréhensif  qu'il  avait  donné 
aux  théories  grammaticales  par  ses  leçons  et  par  ses  livres.  Il 
entra  en  1878  au  Conseil  supérieur  de  l'instruction  publique 
parle  choix  de  notre  Académie,  et  ce  mandat  lui  fut  renou- 

'"    Paris.  Massnn,  iHS.I,    i   \ol.  iii-S". 


—  /j92  — 

vêlé  en  1880,  malgré  lui-même,  quand  ses  infirmités  lui  de- 
venaient une  excuse. 

Le  gouvernement  de  la  France,  à  toute  époque,  ne  lui  mé- 
nagea point  les  distinctions  qu'appelait  son  mérite.  Chevalier 
de  la  Légion  d'honneur  sous  Louis-Philippe  (i845),  il  fut 
promu  au  grade  d'otlicier  sous  l'Empire  (1866),  et  sous  la  Ré- 
publique actuelle  à  la  dignité  de  commandeur  (1879);  les 
gouvernements  étrangers  ne  laissèrent  pas  de  témoigner  com- 
bien, dans  toutes  les  parties  du  monde  savant,  on  reconnais- 
sait les  services  qu'il  avait  rendus  à  la  science  :  officier  de 
l'ordre  des  Sainls-Maurice-et-Lazare  (1866)  et  de  l'ordre  de 
Léopold  (1872),  il  était  commandeur  de  l'ordre  du  Sauveur 
de  Grèce  (1876)  et  de  la  Rose  du  Brésil  (1878).  En  quelque 
lieu  pour  ainsi  dire  qu'il  allât,  à  Athènes,  à  Constantinople, 
à  Bucarest,  à  Turin,  à  Rome,  à  Bruxelles,  à  Berlin,  à  Saint- 
Pétersbourg,  il  avait  droit  de  siéger  aux  Académies,  soit  à 
titre  de  correspondant,  soit  même  à  titre  d'associé  étranger. 
Je  ne  parle  pas  de  la  France,  où  un  grand  nombre  de  sociétés 
savantes  se  faisaient  honneur  de  le  compter  parmi  leurs 
membres''^. 

(•)  Voici  la  liste  chronologique  de  ces  distinctions  dressée  non  par  lui,  mais 
par  une  main  qui  avait  le  droit  d'en  être  fière  : 

Lcifion  d" honneur  :  chevalier,  37  avril  i8/i5;  officier,  i3  août  1866;  comman- 
deur, 27  juillet  1879. 

Sauveur  de  Grèce:  chevalier,  i3  juini856;  officier,  20  avril  1867  ;  comman- 
deur, 18  novembre  1876. 

La  Rose  du  Brésil  :  commandeur,  3i  mars  1873. 

Ordre  de  Léopnld  :  officier,  1  6  août  1872. 

Sainls-Maurice-et-Lazare  :  chevalier,  i"  février  1 866  ;  officier,  A  octobre  1  866. 

Académies  diverses. 

97  novembre  i846:  Membre  associé  correspondant  de  TAcadémie  royale  de 
Caen. 

7  janvier  i8a6  :  Membre  correspondant  de  la  Société  des  antiquaires  de  Nor- 
mandie. 

5  mai  i858  :  Membre  résidant  de  la  Société  des  anti(piaires  de  France. 


—  ^i93  — 

Honneur  obli{je.  Il  ne  refusait  pas  lui-nioine  son  concours 
partout  ou  il  était  réclamé;  il  avait,  en  18/18,  pris  part  aux 
examens  «le  l'Ecole  d'administration;  il  accepta  (1(^  m«Mnc 
d'être  membre  de  la  Commission  des  publications  gratuites, 
fonctions  délicates  où,  sans  rebuter  les  jeunes  savants,  il  faut 
ménager  les  intérêts  de  la  science,  en  donnant  une  applica- 
tion utile  aux  charges  que  l'Etat  s'impose  pour  l'encourager. 

iG  février  1861  :  Membre  correspondant  de  la  Société  archéologique  d'Athènes. 
i4  décembre  i86i  :  Membre  honoraire  de  la  Société  archéologique  de  l'Or- 
Icannis. 

7  janvier  i863:  Membre  non  résidant  de  l'Académie  de  Dijon. 

i3  juillet  i863  :  Membre  du  Syliogue  littéraire  grec  de  Constantinople. 

18  février  i86i  :  Associé  correspondant  de  l'Académie  royale  des  sciences 
de  Turin. 

9  décembre  j864  :  Membre  ordinaire  de  riustilut  archéologique  de  Rome. 
31  décembre  i866:  Membre  correspondant  de  l'Académie  d'Aix. 

1 1  avril  1867  :  Membre  de  l'Académie  royale  des  sciences  de  Berlin. 

19  juillet  1867  :  Membre  correspondant  de  la  Société  liavraise  d'études 
diverses. 

10  mai  1869  :  Associé  de  l'Académie  royale  de  Belgique  (classe  des  lettres), 
a  juin  1871  :  Membre  titulaire  de  la  Société  des  antiquaires  de  Normandie. 
6  mai  1872  :  Membre  honoraire  de  la  Société  académique  roumaine  à  Bu- 
carest. 

12  mars  1878  :  Membre  correspondant  de  l'Académie  de  Sainte-Croix  d'Or- 
léans. 

1 3  juin  1873  :  Associé  correspondant  de  l'Académie  d'Amiens. 

29  juin  1873  :  Associé  étranger  de  l'Académie  royale  des  sciences  de  Turin. 

18  septembre  187  4  :  Membre  de  l'Ecole  évangéhque  de  Smyrnc. 

a'i  septembre  1870  :  Membre  correspondant  et  honoraire  de  la  Société  duii- 
kerquoise. 

1876:  Membre  honoraire  de  la  Société  d'agriculture,  sciences,  bclles-lellrcs 
et  arts  d'Orléans. 

i5  mai  1876:  Membre  correspondant  de  l'Académie  d'Amiens. 

28  août  1876:  Membre  correspondant  de  l'Académie  royale  des  sciences  de 
Lisbonne. 

29  décembre  1876  :  Associé  de  l'Académie  impériale  des  sciences  de  Saint- 
Pétersbourg. 

1879  :  Membro  honoraire  de  la  Société  d'enseignement  proiessionml  du 
Rhône. 

23  février  i883  :  Correspondant  do  la  Société  historique  et  ethnologique  dt" 
Grèce  à  Athènes.  ' 


—  à\)à  — 

Depuis  longtemps  il  collaborait  à  un  grand  nombre  de 
recueils  périodiques.  Accueilli  avec  empressement  par  les 
revues  ou  les  journaux  les  plus  accrédités,  la  Revue  des  Deux- 
Mondes,  la  Revue  archéologique,  la  Revue  de  l' instruction  publique, 
le  Correspondant ,  et  surtout  les  Débats,  il  aidait  volontiers  par 
ses  articles  et  par  son  nom  au  succès  des  publications  nou- 
velles, dignes  de  son  patronage  :  le  Dictionnaire  des  sciences 
philosophiques ,  l'Encyclopédie  du  ma"  siècle,  la  Nouvelle  biogra- 
phie universelle,  la  Revue  contem'porame ,  la  Revue  européenne, 
VAthenœum  français,  etc.^'^  Cette  collaboration,  commencée 
aux  premiers  temps  de  sa  carrière,  se  continua  presque  jusqu'à 
la  fin. 

Dans  ses  dernières  années,  sa  vue  s'affaiblissait,  usée  pro- 
gressivement par  le  travail,  et  ni  les  soins  les  plus  empressés, 
ni  le  traitement  surveillé  avec  tant  de  sollicitude  par  un  gendre 
qui  était  l'un  des  maîtres  dans  l'art  de  guérir,  ne  purent  préve- 
nir la  conclusion  fatale.  Cette  infirmité ,  la  plus  redoutable  pour 
tout  le  monde,  la  plus  douloureuse  pour  un  homme  qui  a  vécu 
par  les  livres  et  pour  les  livres,  n'abattit  point  son  courage; 
elle  ne  fit  que  modifier  ses  procédés  pour  apprendre  et  pour 
enseigner.  Il  continua  de  monter  dans  sa  chaire.  Il  avait  un  tel 
trésor  dans  sa  mémoire,  il  avait  des  notes  si  régulièrement 
classées,  qu'avec  un  peu  d'aide  il  pouvait  préparer  ses  leçons, 
leur  garder  même,  grâce  aux  lectures  qu'il  se  faisait  faire  par 
un  secrétaire,  leur  caractère  de  nouveauté,  en  sorte  que  l'au- 
ditoire qui  l'entourait  n'avait  point  à  souffrir  de  ce  qui  était  si 
pénible  pour  lui-même.  Il  n'avait  pas  davantage  renoncé  à  ses 
travaux.  Bien  qu'élevé  du  rang  d'auteur  à  celui  d'assistant  au 
Journal  des  Savants  (1879),  il  ne  laissait  pas  de  payer  à  la 
rédaction  un  tribut  qui  n'était  plus  exigible.  Il  donnait  encore 
des  articles  aux  Débats,  et  faisait  des  communications  à  l'Aca- 

'"  Voyez  la  Hibliographic  cic'jà  citée,  à  la  siiilc  de  la  notice  de  M.  A.  lîailly, 
p.  171.  % 


—  /il).')  — 

dérnie^'^.  Dans  cette  période  luéme,  il  j)iiblia  le  petit  livn;  (|ui 
suppose  le  plus  de  lectures,  ïUisloirc  du  Lri-c  depuis  ses  ori- 
gines jusqu'à  nos  jours,  ouvrage  inipriiué,  il  est  vrai,  dès  1 878  , 
en  onze  chapitres,  dans  le  Magasin  d'éducation  et  de  récréation, 
mais  remanié  et  augmenté  alors  par  un  prodige  de  mémoire. 
Rien  ne  peut  donner  une  idée  plus  complète  de  ce  qu'il  y 
avait  de  sérieux  et  d'attrayant  tout  à  la  fois  dans  son  érudi- 
tion, j'allais  dire  dans  sa  conversation  :  car  ce  livre,  avec  sa 
trame  solide  et  ses  charmantes  broderies,  est  comme  une  con- 
versation en  |)lusieurs  journées.  C'est  le  livre  le  moins  didac- 
tique et  le  plus  instructif  en  même  temps,  s'il  m'est  permis 
d'opposer  ainsi  deux  mots  qui  semblent  se  traduire.  On  peut 
le  recommander  à  tout  lecteur  :  avec  certaines  choses  que  l'on 
sait,  on  v  trouve  bien  des  choses  que  l'on  croyait  savoir,  et 
plus  encore  que  l'on  ne  savait  pas. 

A  part  cette  infirmité  si  cruelle,  mais  adoucie  pour  lui  par 
le  redoublement  d'affection  de  ceux  qui  l'entouraient,  notre 
confrère  avait  une  santé  qui  pouvait  donner  l'espoir  de  voir 
se  prolonger  une  vie  toujours  si  fructueusement  occupée.  Avec 
ses  deux  lils  qui  avaient  si  bien  répondu  à  ses  soins  et  qui 
tenaient  très  honorablement  leur  place  dans  l'Université,  on 
voyait  se  grouper  autour  de  lui  ses  petits-enfants,  enfants  de 
sa  fille,  dont  les  heureuses  dispositions  ne  lui  donnaient  pas 
moins  de  promesses.  Quelle  joie  pour  un  père  qui  avait  tant 
fait  en  vue  de  l'éducation!  Mais  il  avait  eu  de  bonne  heure 
le  pressentiment  d'une  mort  imprévue.  11  l'avait  consigné  pour 

''  Le  Journal  des  Débats  publia  dans  ces  derniers  temps  deux  articles  de  lui 
qui  étaient  diMix  liommages  funèljres,  l'un  à  Adrien  de  Longpérier,  l'autre  à 
Alliert  Dumont  (11  et  i3  août  188/1).  Un  article  intitulé  :  Une  belle  découverte 
dans  Vite  de  Crète,  ne  précéda  sa  mort  que  de  quelques  jours  (30  août  188;")). 
A  riuslitut,  une  dernière  lecture  (c'était  aussi  un  lioinniage  fuuèlire!)  fut  laite 
après  sa  niort  en  son  nom, 'par  notre  confrère  M.  Bréal,  dans  la  séance  publique 
des  cinq  Acadén)ies  :  c'était  le  morceau  qui  résumait  les  conclusions  de  VHisloirc 
de  In  critique  chez  les  Grecs,  dont  une  fl^uxième  édition  allait  paraître. 


—  /i96  — 

lui-même  clans  un  pli  tenu  secret,  à  une  époque  où  des  dou- 
leurs aiguës,  persistantes,  lui  avaient  fait  croire  à  une  ma- 
ladie de  cœur,  en  i856  ,  quand,  marié,  père  de  famille, pro- 
fesseur en  titre  à  la  Sorbonne  et  membre  de  l'Institut,  il  se 
voyait,  jeune  encore,  au  comble  du  bonheur  et  de  ce  qui  est 
pour  un  savant  la  fortune.  Ces  paroles  ont  été  citées  déjà  et  je 
ne  saurais  mieux  faire  que  de  les  reproduire  ici  : 

«J'ai  le  pressentiment  d'une  mort  subite.  .  .  Ce  pressenti- 
ment m'afflige  sans  me  troubler.  .  .  Ma  vie  est  en  ce  moment 
si  heureuse  que  je  dois  la  quitter  avec  regret;  la  tâche  d'ail- 
leurs que  j'ai  à  y  remplir  est  loin  d'être  achevée,  et  j'ai  tou- 
jours tenu  à  la  vie  plus  encore  pour  ses  devoirs  que  pour  ses 
plaisirs.  Mais  je  veux  me  défendre  de  toute  faiblesse.  Si  je 
suis  frappé  subitement,  que  ma  chère  femme,  que  mes  chers 
enfants,  que  tous  mes  amis  sachent  que  l'àme  du  moins 
n'aura  pas  été  surprise,  qu'elle  est  depuis  longtemps  clair- 
voyante et  résignée.  La  Providence  a  ses  secrets  où  je  me 
confie  sans  murmure.  .  .  Les  épreuves  ne  m'ont  pas  manqué; 
puis-je  être  sûr  de  les  avoir  traversées  sans  erreur  et  sans 
fautes?  Mais  la  volonté  du  bien,  une  volonté  constante,  me 
fait  espérer  que  Dieu  me  jugera  avec  indulgence,  et  que,  s'il 
reste  ici-bas  quelque  souvenir  de  moi,  ce  sera  pour  tous  les 
miens  un  titre  acquis  à  l'estime  des  honnêtes  gens.  » 

Mais  ce  n'était  pas  seulement  dans  ce  souvenir  des  hon- 
nêtes gens  qu'il  comptait  se  survivre.  En  avril  1837  décrivait: 
«Quel  triste  spectacle  que  celui  de  ce  monde  avec  l'instabilité 
de  nos  fortunes  et  la  brièveté  de  notre  vie,  si  l'âme  ne  trouvait 
pas  un  appui  hors  d'elle-même  et  au-dessus  d'elle-même.  .  . 
Sursum  corda.  Non,  ces  misères  de  la  vie  ne  peuvent  être  une 
fin.  Elles  commencent  au  contraire  quelque  chose  qu'elles 
n'achèvent  pas.  Les  liens  sacrés  et  doux  qui  m'attachent  à  ma 
famille,  à  mes  amis,  à  mes  élèves,  ne  peuvent  être  rompus 
sans  retour  par  la  mort.  Il  y  a  entre  l'autre  monde  et  celui-ci 


—  /J97  — 

une  coniiuunion  des  àines  où  je  m'atlache  avec  ardeur.  Dieu 
est,  donc  il  est  juste,  et  j'ai  besoin  de  sa  justice,  non  tant 
pour  moi  que  peut-être  il  a  comblé  déjà,  que  pour  ces  mil- 
liers d'autres  âmes  plus  éprouvées  et  plus  malheureuses  que 
la  mienne^''.  » 

Cette  ferme  croyance  à  l'immortalité,  cette  confiance  en  un 
Dieu  juste  et  bon,  c'est  là  ce  qui  le  soutenait  devant  les  appré- 
hensions de  la  mort,  et  ce  qui  resta  la  règle  de  sa  vie,  lorsque, 
sans  doute,  le  cours  paisible  des  années  eut  dissipé  ces  ombres. 
Et  pourtant  son  pressentiment  n'avait  pas  été  vain.  Bien  des 
morts  l'avaient  affligé  dans  les  dernières  années,  morts  de 
contemporains,  comme  Brunet  de  Presles,  Michel  Chasles, 
morts  de  plus  jeunes  aussi,  d'anciens  élèves,  l'abbé  Thenon, 
Albert  Dumont.  Bien  n'indiquait  pourtant  que  son  heure  fût 
venue  à  lui-même.  Il  était  allé  en  famille  passer  les  vacances 
à  Boyat  :  tout  lui  promettait  ce  bien-être  que  l'on  éprouve  à 
laisser  les  travaux  et  les  soins  de  la  vie  de  tous  les  jours  pour 
se  reposer  au  milieu  des  siens,  quand  un  matin,  après  une 
journée  paisible,  cette  terrible  maladie  de  cœur,  qui  depuis 
près  de  trente  ans  n'était  plus,  pour  ainsi  dire,  qu'un  mauvais 
rêve,  le  réveilla.  Il  appela  :  il  aurait  pu  appeler  une  heure 
plus  tôt,  s'il  n'avait  craint  d'alarmer  sa  famille.  M.  Lcreboullet 
était  là  :  ses  soins  adoucirent  la  souffrance.  Le  malade  se 
leva,  désira  prendre  du  repos  dans  son  fauteuil.  On  pouvait 
croire  le  péril  conjuré.  Pour  lui  laisser  plus  de  calme,  on  se 
retira  dans  la  chambre  voisine  :  mais  peu  après  un  long  et 
bruyant  soupir  donna  l'éveil;  on  le  trouva  renversé  sur  le 
fauteuil;  un  quart  d'heure  après  il  était  raort'"^).  • 

Le  coup  qui  frap[ia  si  durement  tous  les  siens  n'atteignit 
pas  moins  cette  famille  plus  nombreuse  qu'il  s'était  faite  dans 
le  mond(î  savant:  tant  de  sociétés  de  confrères,  tant  de  gêné- 

*')  \.  Bailly,  Notice  sur  Emile  Egger,  p.  128,1  2g. 
-'   .3o  août  1880. 


—  /i98  — 

rations  de  disciples!  L'impression  en  fut  d'autant  plus  vive 
qu'on  y  était  moins  préparé.  On  l'avait  quitté  plein  de  vie,  ne 
suspendant  ses  travaux  qu'avec  la  pensée  de  les  reprendre 
plus  activement  au  retour,  et  l'on  apprenait  qu'on  ne  le  rever- 
rait plus.  On  put  voir  quels  profonds  regrets  il  laissait,  à 
l'empressement  de  ses  amis,  accourant  des  lieux  oiî  le  temps 
des  vacances  les  avait  dispersés ,  pour  faire  cortège  à  ses  funé- 
railles. On  le  vit  dans  les  hommages  qui  lui  furent  adressés 
au  nom  des  corps  dont  il  avait  été  l'honneur,  au  nom  même 
de  ce  peuple  hellénique  dont  d  avait  si  bien  mérité  par  ses 
enseignements  publics  et  privés;  et  l'empereur  du  Brésil, 
notre  auguste  confrère,  qui  avait  été  aussi  son  auditeur,  nous 
envoya  de  par  delà  les  mers  le  témoignage  du  deuil  qu'il  par- 
tageait avec  nous.  Vanter  sa  science  et  son  érudition,  signaler 
les  services  qu'il  avait  rendus  pendant  une  si  longue  carrière, 
c'était  un  lieu  commun  qu'on  aurait  pu  rédiger  à  l'avance, 
comme  tant  d'articles  nécrologiques  qui  sont  tout  préparés 
dans  l'officine  des  journaux.  Mais  ce  qui  fait  l'originalité  de 
ces  éloges  sur  un  même  sujet,  c'est  l'émotion  qui  les  anime; 
ce  (jui  est  le  trait  dominant  de  ces  derniers  adieux,  c'est  le 
souvenir  de  son  dévouement  sans  égal  pour  tous  ceux  qui 
s'étaient  groupés  autour  de  lui,  qui  faisaient  son  école;  c'est 
l'accent  de  la  reconnaissance,  c'est,  si  je  puis  le  dire,  le  res- 
sentiment de  sa  bonté. 

Notre  Académie  est  la  compagnie  qu'il  affectionnait  le  plus, 
qu'il  a  le  plus  honorée,  et  personne  ne  l'oubliera  parmi  nous. 
Comment  d'ailleurs  s'occuper  des  matières  où  il  était  passé 
maître,  sans  se  rappeler  la  manière  dont  il  prenait  part  à  nos 
débats,  l'étendue  de  son  érudition,  la  sûreté  de  ses  jugements, 
la  lucidité  de  sa  critique,  son  aménité,  sa  courtoisie;  com- 
ment le  faire  sans  invoquer,  en  bien  des  cas,  son  autorité?  Il 
avait  donc  bien  le  droit  d'en  recevoir  un  témoignage  public 
dans  cette  enceinte.  C'est  l'homméige  que  ses  confrères,  par 


—  VJU  — 

ma  voix,  leiideiit  à  su  mémoire;  t'est  l'adieu  qu'adresse  à  un 
ami  l'un  des  plus  anciens  compagnons  d'études  à  qui  il  ait  été 
donné  de  lui  survivre. 


1)K  QUELQUES  JEUX  POPULAIRES 

DANS  L'AlVCIENiNE  FRANCE, 

À  PROPOS  D'UNE  ORDONNANCE  DE  CHARLES  V, 
PAR  M.  SLMÉON   LUGE, 

MEMBRE  DE  LWCADÉMIE. 

Messieurs, 

Bien  décidé,  dès  son  avènement  au  trône  en  i  3()/i ,  à  saisir 
ou  même  au  besoin  à  provoquer  une  occasion  favorable  de 
rompre  le  funeste  traité  de  Brétigny,  Charles  V  avait  employé 
les  cinq  premières  années  de  son  règne  à  se  ménager  sur  ses 
frontières  des  alliances  nombreuses  et  sures.  Il  avait  ainsi 
rempli  l'une  des  conditions  qui  s'imposent  à  la  prudence  d'un 
chef  d'Etat  lorsqu'il  veut  mettre,  autant  que  possible,  toutes 
les  chances  de  son  côté  à  la  veille  d'une  grande  guerre.  Mais 
il  importe  encore  plus  d'avoir  de  bons  soldats.  Le  prince  que 
ses  contemporains  avaient  surnommé  le  Sage,  et  auquel  la 
postérité  a  confirmé  ce  surnom,  était  trop  bien  informé,  trop 
clairvoyant  et  trop  réfléchi  pour  ne  s'être  pas  rendu  compte 
des  deux  grandes  causes  de  la  supériorité  militaire  des  Anglais. 
Ces  causes  étaient  la  prédominance  de  l'infanterie  dans  leurs 
armées  et  l'habileté  extraordinaire  de  leurs  archers.  Cette  habi- 
leté, les  vainqueurs  de  Crécy  et  de  Poitiers  l'avaient  acquise 
dans  les  continuels  exercices  de  tir  aux((uels  le  prévoyant 
Edouard  lU,  à  l'exemple  de  son  aïeul  Edouard  l",  astreignit 
SCS  sujets  presque  dès  son  avènement  au  trône.  Par  une  ordon- 
nance rendue  eii  1087  et  renouvelée  plusieurs  fois  pendant 


—  500  — 

le  cours  de  son  règne,  ce  prince  défendit,  sous  peine  de  mort, 
par  tout  son  royaume  de  se  divertir  à  un  autre  jeu  que  celui 
de  l'arc  à  main  et  du  tir  de  flèches  '''.  Par  la  pénalité  terrible 
édictée  contre  les  délinquants,  on  peut  apprécier  la  rigueur 
avec  laquelle  cette  ordonnance  avait  été  mise  à  exécution.  Dans 
tous  les  comtés  et  dans  tous  les  hameaux  de  l'Angleterre,  on 
avait  établi  des  buttes  où  les  hommes  valides  de  chaque  pa- 
roisse se  donnaient  rendez-vous,  les  dimanches  et  fêtes,  pour 
s'exercer  au  tir  de  l'arc.  A  la  faveur  de  ces  exercices,  les 
«bowmen??,  comme  on  commençait  à  les  appeler  au  delà  du 
détroit,  étaient  devenus  en  peu  d'années  les  premiers  archers 
du  monde. 

Cette  supériorité  de  l'infanterie  anglaise  pendant  les  deux 
premiers  tiers  de  la  guerre  de  Cent  ans,  de  Crécy  à  Azincourt, 
ne  saurait  être  sérieusement  contestée.  A  vrai  dire,  elle  était 
écrasante  et  peut  seule  expliquer  l'attitude  purement  défen- 
sive des  Français  du  temps  de  Charles  V,  au  cours  des  trois 
expéditions,  on  pourrait  presque  dire  des  trois  promenades 
mihtaires  à  travers  la  France,  entreprises  par  Robert  Knolles 
en  1870,  par  le  duc  de  Lancastre  en  1873,  et  par  le  comte 
de  Buckingham  en  i38o.  Ainsi  en  jugeait,  du  reste,  quelqu'un 
qui  maintes  fois  avait  vu  à  l'œuvre  les  «bowmen»  et  qui  les 
connaissait  mieux  que  personne,  parce  qu'il  les  avait  souvent 
battus,  Bertrand  du  Guesclin.  Vers  le  milieu  du  mois  de  sep- 
tembre 1  878 ,  le  duc  de  Lancastre  était  arrivé  jusqu'aux  portes 
de  Paris,  brûlant,  ravageant  tout  sur  son  passage,  oftrant 
sans  cesse  la  bataille  et  ne  trouvant  pas  à  qui  parler.  Aussi 
barons,  chevaliers  et  bourgeois  des  bonnes  villes  commen- 
çaient-ils à  murmurer  de  divers  côtés;  ils  ne  comprenaient 
pas  que  l'on  se  bornât  à  rester  sur  la  défensive,  et  ils  disaient 
bien  haut  que  c'était  une  honte  pour  la  noblesse  de  France  de 

O   Hisloire  de  Bertrand  du  Guesclin  et  de  son  époque;  la  jeunesse  de  Bertrand, 
1"  édition,  in-S",  p.  i5/i;  2' édition,  in-12,  p.  1  3o  et  ]3i. 


—  501  — 

laisser  les  Anglais  traverser  de  la  sorte  le  royaume  fort  à  leur 
aise,  sans  qu'on  marchât  à  leur  rencontre  et  qu'on  essayât  de 
leur  tenir  tête.  Charles  V  voulut  connaître  la  pensc^e  intime 
des  deux  capitaines  qui  lui  inspiraient  le  plus  de  confiance, 
et  réunit  un  conseil  de  guerre  où  figuraient  au  premier  rang 
Du  Guesclin  et  Clisson.  Invité  à  parler  le  premier,  Bertrand 
fut  d'avis  de  ne  livrer  bataille  aux  Anglais  que  si  l'on  avait  sur 
eux  un  avantage  marqué  au  point  de  vue  du  nombre  comme 
de  la  position.  Il  appela  alors  en  témoignage  le  seigneur  de 
Clisson,  son  compagnon  d'armes,  qui  avait  été  nourri  dès 
l'enfance  et  avait  fait  ses  premières  armes  avec  les  envahisseurs. 
Celui-ci  se  rangea  à  l'opinion  du  connétable  et  dit  qu'au  lieu 
d'offrir  le  combat  aux  Anglais,  dont  l'audace  naturelle  avait 
été  accrue  par  une  longue  série  de  victoires,  ou  de  l'accepter 
d'eux,  il  était  préférable  de  persévérer  dans  la  défensive  et  de 
se  tenir  simplement  prêt  à  profiter  de  toutes  les  fautes  qu'ils 
pourraient  commettre.  Ce  judicieux  avis  prévalut,  et  le  roi 
chargea  Du  Guesclin  et  Clisson  d'appliquer  leur  svstème  de 
temporisation  et  de  pourvoir  à  la  défense  du  royaume. 

Cet  aperçu  de  la  situation  militaire  des  deux  pays,  à  l'époque 
de  la  rupture  du  traité  de  Brétigny,  n'était  pas  inutile  pour 
faire  comprendre  le  but  et  la  portée  d'une  ordonnance  qui  va 
nous  fournir  l'occasion  d'indiquer  quelques-uns  des  jeux  ou 
des  divertissements  du  peu[)le  de  France  pendant  la  guerre  de 
Cent  ans.  Comme  Charles  le  Sage  estimait  avec  raison  qu'il 
n'est  pas  de  plus  sûr  moyen  de  venir  à  bout  de  ses  adversaires 
que  de  leur  enqirunter  ce  qu'ils  ont  pu  faire  de  bon,  de 
fécond  et  d'utile,  il  avait,  dès  les  premiers  mois  de  1869,  pris 
une  mesure  inspirée  évidemment  par  celles  qui  avaient  tant 
contribué  aux  succès  de  ses  ennemis.  Le  3  avril,  il  avait  interdit, 
sous  peine  d'une  amende  de  quarante  sous,  presque  tous  les 
jeux  d'exercice  ou  de  hasard,  en  |)articulier  les  dés,  les  tables 
ou  les  dames,  la  |)aume,  les  quilles,  le  palet,  les  billes  et  la 


—  502  — 

■0 

soûle.  f]n  meQie  temps,  il  avait  enjoint  à  ses  sujets  de  s'exercer 
au  tir  de  l'arc  et  de  l'arbalète,  de  choisir  des  emplacements 
convenables  pour  ces  exercices,  de  décerner  des  prix  aux  plus 
habiles,  de  donner  à  ces  concours  le  caractère  de  véritables 
fêtes  et  de  les  entourer  de  tout  l'attrait  possible.  Six  semaines 
environ  après  la  promulgation  de  cette  ordonnance,  le  28  mai, 
le  roi  avait  eu  soin  de  la  renouveler  et,  pour  stimuler  le  zèle 
des  sergents  chargés  de  veiller  à  son  exécution,  il  avait  alloué 
le  quart  de  l'amende  encourue  à  ceux  qui  dresseraient  procès- 
verbal  des  délits  et  qui  appréhenderaient  les  délinquants.  Le 
lendemain  2/4 ,  elle  avait  été  publiée  à  son  de  trompe  dans  les 
rues  et  les  carrefours  de  Paris  ^^l 

Il  nous  a  semblé  intéressant  de  rechercher  dans  quelle 
mesure  cette  ordonnance  avait  été  appliquée  et  quelle  influence 
elle  avait  exercée  sur  les  mœurs  publiques.  Nous  avons  donc 
compulsé  à  ce  point  de  vue  les  registres  de  la  Chancellerie 
royale  correspondant  aux  règnes  de  Charles  V,  Charles  VI  et 
Charles  VII  et  nous  apportons  ici  le  résultat  de  notre  examen. 
Les  dés,  qui  figurent  en  première  ligne  dans  le  texte  de  l'or- 
donnance de  1369,  étaient  alors  le  plus  répandu  peut-être  des 
jeux  de  hasard;  mais  les  joueurs  de  dés  ne  paraissent  pas  avoir 
été  moins  nombreux  après  la  promulgation  de  cette  ordon- 
nance qu'auparavant.  On  ne  com])te  pas  les  cjuerelles  amenées 
par  ce  jeu,  dont  il  est  fait  mention  au  Trésor  des  chartes 
pendant  les  dix  dernières  années  de  Charles  V  aussi  bien 
qu'avant  et  après  cette  période.  Les  princes  du  sang,  il  faut 
bien  l'avouer,  donnaient  à  leur  entourage  un  pernicieux 
exemple.  Telle  était  la  passion  du  duc  de  Berry  pour  les  dés 
qu'en  1870,  un  jour  qu'il  n'avait  plus  d'argent  de  poche,  il 
engagea  jusqu'à  ses  patenôtres,  en  d'autres  termes,  son  cha- 
pelet, sur  lequel  on  lui  prêta  une  somme  de  quarante  francs, 

'')   RpnifiU  ilox  oril<m»nncps  tJen  mis  de  Frniicf ,  I,  ]'j-r-i']'.L 


—  r)03  — 

pour  pouvoir  jouer  avec  plusieurs  de  ses  chevaliers.  En  iGyS, 
Charles  de  Navarre,  fils  aîné  de  (îharles  le  Mauvais,  nui  avait 
quitté  son  père  pour  venir  vivre  à  Paris  à  la  cour  du  roi  de 
France  son  oncle,  se  faisait  donner  de  temps  à  aulro  des 
sommes  assez  considérables  pour  jouer  aux  dés.  Les  joueurs 
peu  scrupuleux  recouraient  dès  lors  à  des  dés  crfaux  et  avan- 
tageux ?7,  ou,  comme  on  dirait  aujourd'hui,  pipés.  Une  variété 
de  ce  jeu  s'appelait  la  «rafle 55  et  aussi  le  «poulain».  Cette 
variété,  qui  se  jouait  d'ordinaire  avec  trois  dés,  était  fort  en 
usage  dans  les  campagnes,  où  le  gagnant  recevait  le  plus 
souvent  un  ol)jet  en  nature,  une  oie,  une  poule,  un  canard, 
un  Kconnil»  ou  lapin.  A  Paris,  la  place  de  Grève  fut  longtemps 
le  rendez-vous  de  prédilection  des  joueurs  de  dés. 

L'ordonnance  paraît  avoir  été  mieux  observée  en  ce  qui 
concerne  le  jeu  de  tables,  ou  du  moins  nous  n'avons  trouvé 
qu'un  très  petit  nombre  de  mentions  de  ce  jeu  pendant  la 
seconde  moitié  du  règne  de  Charles  V  et  les  dix  premières 
années  de  Charles  VI.  On  donnait  alors  ce  nom  à  tous  les  jeux 
où  l'on  em{)loyait  des  dames  et  un  échiquier  ou  tablier.  La 
table  sur  laquelle  on  jouait,  divisée  en  carrés  alternativement 
blancs  et  noirs,  s'appelait  d'ordinaire  «tablier 55,  lorsqu'elle 
servait  au  jeu  de  dames,  et  «échiquier»,  lorsqu'elle  était  des- 
tinée à  un  jeu  d'échecs.  En  i/n6,  Isabeau  de  Bavière  avait, 
dans  sa  chambre  à  parer,  un  «tablier»  fait  de  bois  de  noyer; 
mais  sur  un  inventaire  de  1898  figure  un  jeu  de  tables  et 
d'échecs  renfermé  dans  une  boîte  en  ivoire.  Les  mentions  du 
jeu  de  tables  ne  redeviennent  très  fréquentes  dans  les  registres 
de  la  Chancellerie  royale  que  vers  la  fin  du  règne  de  Charles  VII, 
époque  où  les  diverses  classes  de  la  société  recherchèrent  avec 
une  sorte  d'emportement  les  amusements  de  tout  genre.  Toute- 
fois, les  échecs  restèrent  toujours  une  distraction  réservée  au 
petit  nombre,  un  délassement  aristocratique. 

La  pi'olnbition  relative  an  jeu  de  paume  fut  si  peu  observée 


—  50/1  — 

que  nous  avons  recueilli  un  certain  nombre  d'exemples  de 
rixes  plus  ou  moins  sanglantes  amenées  par  ce  jeu,  ou  ayant 
éclaté  au  cours  d'une  partie,  de  iS^ô  à  1878,  quelques 
années  seulement  après  la  promulgation  de  l'ordonnance  de 
1869.  Les  statuts  du  collège  parisien  de  Marmoutier,  rédigés 
en  i3qo,  renouvelèrent  l'interdiction  de  jouer  à  la  paume. 
A  Marolles,  près  Lisieux,  le  jeu  de  paume  était  fort  en  usage 
sous  le  nom  de  «jeu  de  bonde  55,  et  les  jeunes  gens  s'y  livraient 
à  ce  jeu,  dans  les  dernières  années  du  xiv"  siècle,  en  se  ren- 
voyant la  bonde  ou  paume  par-dessus  le  toit  de  l'église  placée 
sous  le  vocable  de  saint  Martin,  ce  qui  avait  lieu  également 
vers  le  même  temps  à  Haudivillers  en  Beauvaisis  et,  vers  le 
milieu  du  xvi"  siècle,  sur  la  chapelle  d'Etreham,  aux  environs 
de  Bayeux.  En  Vermandois,  on  se  réunissait  en  bandes  pour 
jouer  à  la  paume  dans  beaucoup  de  villages;  et  à  Fieulaine, 
paroisse  située  dans  les  environs  de  Saint-Quentin,  l'endroit 
oii  ces  réunions  avaient  lieu  s'appelait  ^de  Caiel».  A  Blain- 
court,  dans  la  prévôté  de  Péronne,  le  jeu  de  paume  four- 
nissait aux  gens  mariés  l'occasion  de  se  mesurer  contre  les  non 
mariés. 

La  paume  a  été,  pendant  toute  la  durée  du  moyen  âge,  le 
jeu  d'exercice  véritablement  national  du  peuple  de  France  et 
surtout  de  la  bourgeoisie  des  villes,  tandis  que  la  soûle  était 
le  divertissement  par  excellence  des  paysans.  On  cite  plusieurs 
de  nos  rois,  Charles  VI,  Charles  VII,  Louis  XI,  Louis  XII, 
François  I",  Henri  II,  comme  ayant  été  les  plus  forts  «pau- 
miers»  de  leur  temps.  «S'il  ne  montait  à  cheval,  nous  dit 
Brantôme  de  Henri  II,  il  jouait  à  la  paume,  et  très  bien; 
jamais  il  ne  voulait  tenir  le  jeu,  mais  secondait  ou  tierçait, 
qui  sont  les  deux  places  les  plus  diflicultueuses  et  dange- 
reuses; aussi  était-il  le  meilleur  second  ou  tiers  (mais  meilleur 
tiers)  de  son  royaume.  .  .  S'il  ne  jouait  à  la  paume,  il  jouait 
à  la  balle  à  emporter  ou  au  ballon,  ou  au  j)allt'-maille,  qu'il 


—  505  — 

avait  fort  bien  en  main,  car  il  était  fort  et  adroit  et  en  faisait 
(le  très  belles  et  longues  bottes  ou  coups  ^'Iw 

Le  jeu  de  paume  a  pris  ce  nom  du  creux  de  la  main  dont 
on  se  servait  à  l'origine  pour  lancer  la  balle  ou  «éteuf».  Cetle 
façon  déjouer  fut  la  seule  jusque  vers  le  milieu  du  xv'' siècle, 
ainsi  que  le  prouve  le  passage  suivant  du  Journal  d'un  bour- 
geois (le  Pans  :  «En  1/127,  ^^"^  ^  Paris  une  femme  nommée 
Margot,  assez  jeune,  comme  de  vingt-huit  à  trente  ans,  qui 
était  du  pays  de  Hainaut,  laquelle  jouait  à  la  paume  le  mieux 
que  oncques  on  eiit  vu,  et  avec  ce  jouait  devant  main  (d'a- 
vant-main ou  de  la  paume),  derrière  main  (d'arrière-main) 
très  puissamment,  très  malicieusement,  très  habilement, 
comme  pouvait  faire  homme;  et  peu  venait  d'hommes  à  qui 
clic  ne  gagnât,  si  ce  n'était  les  plus  puissants  joueurs.  Et  était 
le  jeu  de  Paris  où  le  mieux  on  jouait,  en  la  rue  Garnier 
Saint-Ladre  (Grenier-Saint-Lazare),  qui  était  nommé  le  Petit- 
Temple  '-'.  V 

Le  jeu  de  ballon,  très  populaire  encore  aujourd'hui  chez  les 
Basques,  dont  quelques-uns,  dit-on,  se  font  déserteurs  pour 
pouvoir  s'y  livrer,  n'est  en  réalité,  sous  un  nom  différent, 
qu'une  forme  particulière  de  la  paume  jouée  à  la  manière  pri- 
mitive, c'est-à-dire  sans  raquette,  avec  ces  deux  seules  diffé- 
rences, d'une  part,  que  la  balle  dont  on  se  sert  a  les  proportions 
d'un  ballon  analogue  à  celui  de  la  soûle,  d'autre  part,  que  les 
joueurs  s'entourent  la  main  droite  d'un  gantelet  de  cuir  pour 
lancer  ou  repousser  ce  ballon.  La  substitution  de  la  raquette 
ou  du  battoir  à  la  paume  de  la  main  pour  lancer  l'éteuf  ou 
la  balle  ne  remonte  guère  plus  haut  que  la  fin  du  xv*  ou  le 
commencement  du  xvf  siècle. 

Délaissé  de  plus  en  plus  de[)uis  la  Révolution,  le  jeu  de 

'•'    Œuvres  complètes  de  Brantôme,  éilit.  Lnlaiino,  III,  p.  977. 
''>  Journal  d'un  hnurffeois  de  Parix  [t  'iof)-t'i'in),  édit.  Tiiolcy  (Paris,  18K1)) 
p.  af^a. 

XVII.  35 


—  506  — 

paume  n'a  repris  faveur  que  dans  ces  dernières  années  oii 
nous  l'avons  vu,  un  peu  altéré,  il  est  vrai,  redevenir  à  la 
mode  sous  un  nom  exotique  et  servir  de  passe-temps  aux 
classes  oisives.  Le  «lawn-tennis»,  en  effet,  comme  l'indiquent 
les  deux  mots,  ^^ tennis «,  paume,  et  rclawnjj,  gazon,  n'est  pas 
autre  chose  qu'une  variété  de  la  récréation  la  plus  recher- 
chée de  nos  pères,  et  les  Anglais  l'ont  ainsi  nommé  parce  que 
c'est  sur  une  pelouse  qu'ils  se  livrent  d'ordinaire  à  ce  diver- 
tissement. 

Le  quatrième  des  exercices  défendus  par  l'ordonnance  de 

1869  est  le  jeu  de  quilles.  Si  la  boule,  très  cultivée  dès  le 

xiv^  siècle,  n'est  point  nommée,  c'est  selon  toute  apparence 

parce  que  le  rédacteur  de  l'ordonnance  de  i36c),  trompé  par 

la  synonymie  des  mots  «boule??  et  «bille»,  qui  s'employaient 

parfois  l'un  pour  l'autre,  aura  désigné  ces  deux  jeux  par  la 

même  expression,  quoiqu'ils  formassent  déjà  des  récréations 

distinctes.  La  boule,  en  effet,  restée  si  chère  aux  Angevins  et 

aux  Vendéens,  était  notre  jeu  des  grosses  boules  où  l'on  prend 

à  tâche  de  faire  rouler  celles-ci  le  plus  près  possible  d'un  but 

marqué  par  un  piquet,  enfoncé  en  terre  à  ras  du  sol,  ou  par 

une  boule  plus  petite  dite  «cochonnet 55.  On  ne  peut  relever 

qu'un  assez  petit  nombre  de  textes  concernant  la  boule  dans 

les  registres  du    Trésor  des  chartes   qui  correspondent    aux 

onze  dernières  années  du  règne  de  Charles  V.  Une  variété  do 

cet  exercice  avait  reçu,  pendant  la  seconde  moitié  du  xv'' siècle, 

le  nom  de  jeu  de  la  «courte  boule».  L'enjeu  le  plus  ordinaire 

était  la  consommation  d'une  ou  plusieurs  chopines  de  vin,  de 

cidre  ou  de  cervoise,  et  l'on  appelait  cela  «jouer  à  la  boule 

pour  le  vin?'.  Vers  le  milieu  du  règne  de  Charles  VII,  deux 

bourgeois  d'Orléans  «jetèrent  la  boule»,  depuis  les  faubourgs 

de  la  porte  Regnart,  à  l'entrée  de  cette  ville,  jusqu'à  ceux  de 

la  porte  Saint-Aignan. 

Il  importe,  dès  maintenant,  de  faire  remarquer  quf  la  boule. 


—  507  — 

telle  qu'on  la  pratiquait  au  moyen  âge,  ne  doit  pas  être  con- 
fondue avec  ce  que  l'on  appelait  alors  le  jeu  des  «grosses 
quilles».  A  ce  dernier  jeu,  au  lieu  de  se  servir  comme  aujour- 
d'hui d'une  houle,  on  s'efforçait  d'abattre  les  quilles  en  lançant 
de  loin  un  hâton  d'une  aune  de  longueur,  et  ce  bâton  s'emploie 
encore  en  Angoumois. 

De  tous  les  amusements  prohibés  par  Charles  V,  le  palet 
est  le  seul  dont  on  ne  trouve  aucune  mention  dans  les  registres 
de  chancellerie  des  dernières  années  du  règne  de  ce  prince- 
Ce  jeu  semble  avoir  eu  moins  d'attrait  pour  la  jeunesse  au 
moyen  âge  que  de  nos  jours,  puisque  Du  Cange  et  ses  conti- 
nuateurs n'ont  recueilli  que  deux  extraits  relatifs  à  l'usage  du 
palet,  l'un  de  i352,  l'autre  de  1862. 

De  i3Gc)  à  i38o,  nous  avons  pu  réunir,  en  compulsant 
les  registres  de  la  Chancellerie  royale,  une  dizaine  de  lettres 
de  rémission  oii  l'on  voit  que  le  jeu  des  billes  ou  du  billard 
ne  cessa  point  d'avoir  cours  malgré  la  défense  du  roi  de 
France.  On  désignait  ce  jeu  sous  des  noms  différents  suivant 
les  pays.  A  Montlhéry,  c'était  la  «boule  ou  billette»;  à  Saint- 
Jean-d'Angélv,  la  «rule  ou  boule»;  à  Béthisy,  le  «boulet»;  à 
Beaune,  «la  billotte,  autrement  les  boules»;  ailleurs  encore, 
le  «billon»  et  la  «billette».  Comme  nous  le  disions  tout  à 
l'heure  à  propos  des  quilles,  il  ne  serait  pas  impossible  que 
quelques-unes  de  ces  expressions  s'appliquassent  à  la  boule 
proprement  dite  plutôt  qu'aux  billes  ou  au  billard.  Le  bâ- 
ton, gros  et  court,  recourbé  j)nrfois  en  façon  de  crosse,  dont 
on  se  servait  pour  pousser  les  bUles,  s'appelait  ici  un  «bil- 
lart»,  là  un  «billouer».  Deux  compagnons  attablés  dans  une 
taverne  se  disaient  volontiers  l'un  à  l'autre  :  «Allons  faire 
cette  quarte  de  vin  au  jeu  des  billes.  »  Et,  quand  on  en  venait 
dans  une  dispute  aux  gros  mots  et  aux  voies  de  fait,  on  se 
cassait  la  tête  à  coups  de  «billart».  On  ne  connaissait  alors 
que  le  billard  de  terre,  analogue  au  croquet,  qui  se  jouait  en 

3."). 


—  508  — 

plein  air  et  au  ras  du  sol.  Le  billard  monté,  d'où  est  venu 
notre  jeu  actuel,  ne  date  que  de  l'époque  de  la  Renaissance. 

La  soûle,  du  \alin  soka,  sandale,  la  «clioule??,  si  l'on  adopte 
la  prononciation  normande  et  picarde,  est  un  jeu  qui  consiste 
à  se  disputer  un  ballon  ou  une  énorme  balle,  soit  en  la  pous- 
sant du  pied,  soit  en  la  lançant  à  l'aide  d'une  crosse.  Ce  genre 
de  lutte  constituait,  au  moyen  âge,  le  plus  populaire  des 
jeux  de  force  ou  d'exercice,  comme  les  dés  étaient  le  plus 
usuel  des  jeux  de  hasard.  La  soûle  avait  de  vieille  date  de 
trop  profondes  racines  dans  presque  toutes  les  parties  du 
royaume,  particulièrement  dans  les  campagnes,pour  que  l'or- 
donnance de  Charles  V  pût  la  détruire.  Au  xiv^  siècle,  ce  jeu, 
qui  se  ressentait  de  la  rudesse  des  mœurs,  n'allait  guère  sans 
plaie  ou  bosse,  et  ceux  qui  s'y  livraient  devaient  s'estimer 
heureux  s'ils  n'avaient  ni  un  œil  crevé,  ni  un  bras  rompu,  ni 
une  jambe  cassée.  C'est  qu'en  réalité,  dans  beaucoup  d'en- 
droits, la  soûle  perpétuait,  sous  la  forme  d'un  amusement 
violent,  ici  des  haines  de  races  et  des  luttes  locales  séculaires, 
là  des  rivalités  inspirées  par  la  différence  d'âge  et  de  situation 
sociale. 

On  sera  frappé  de  cette  particularité  que  le  jeu  de  soûle 
n'était  nulle  part  plus  en  honneur  qu'à  la  limite  des  petits 
pays  de  l'ancienne  Gaule  tels  que  le  Vermandois,  le  Bray,  le 
Vexin,  le  Meldois  ou  pays  de  Meaux,  la  Brie,  le  Gâtinais,  le 
Beauvaisis,  l'Amiénois,  l'Artois,  etc.  Comment  l'ordonnance 
de  i36()  aurait-elle  pu  faire  disparaître  un  genre  de  lutte 
qui  s'était  ainsi  transmis  de  génération  en  génération  à  travers 
les  siècles?  Aussi  cette  ordonnance  fut-elle  plus  impuissante 
encore,  s'il  est  possible,  contre  la  soûle  que  contre  les  autres 
jeux  dont  il  vient  d'être  question.  Dès  187/1,  on  soûlait  à 
Chauny,  et  la  lettre  de  grâce  où  il  est  fait  mention  de  ce  jeu 
contient  le  préambule  suivant  :  «Comme,  en  icelui  pays  de 
Vermandois,  spécialement  environ  les  dites  villes  de  Chauny 


—  509  — 

et  de  Cailloucl,  il  soit  accoutumé,  de  si  longtemps  qu'il  n'est 
mémoire  du  contraire  ,  faire  certaines  soûles  déjeunes  hommes 
et  enfants,  c'est  à  savoir  des  villes  contre  autres,  csquelles 
soûles  les  uns  rencontrent  aux  autres  des  poings  es  visages  ou 
es  corps  et  si  fort  et  si  durement  comme  ils  peuvent.  »  Nous 
apprenons  par  un  autre  acte,  daté  de  i38o,  que  l'on  n'avait 
pas  cessé  de  se  livrer  à  ce  même  exercice  à  Neufchàlel-en- 
Bray  :  «La  soûle,  en  la  manière  accoutumée,  se  fit  en  dehors 
d'icelle  ville  de  Neufchàtel,  et  certains  joueurs,  en  soûlant, 
férirent  par  le  visage  à  effusion  de  sang  un  prêtre,  présent  le 
dit  Perceval  qui  leur  dit  :  Soûlez  paisiblement  ou  vous  en 
allez  hors  de  la  soûle,  v  Une  charte  remontant  aux  premières 
années  du  règne  de  Charles  VI  nous  fait  assister  à  une 
grande  partie  de  soûle  livrée  entre  les  habitants  du  Vexin 
nonnand  et  ceux  de  la  forêt  de  Lyons  :  «Comme,  de  si 
longtemps  qu'il  n'est  mémoire  du  contraire,  les  gens  du  pays 
du  Vexin  normand  et  de  la  forêt  de  fuyons  aient  accoutumé 
de  eux  ébattre  et  assembler  chacun  an  pour  soûler  et  jouer  à 
la  soûle  les  uns  contre  les  autres  devant  la  porte  de  l'abbaye 
de  Notre-Dame  de  Mortemer.  w  Le  même  caractère  de  lutte  de 
pays  à  pays  se  retrouve  dans  les  parties  de  soûle  qui  se  li- 
vraient encore  vers  le  milieu  du  xv"  siècle,  le  (j  mai,  entre 
Picards  et  Artésiens,  près  la  chapelle  de  Vauchelles'^',  «es 
mettes»  ou  confins  du  bailliage  d'Amiens,  «en  une  place  où 
étaient  assemblées  deux  cents  personnes  et  plus  des  villages 
d'environ,  en  intention  de  voir  la  soûle  et  ébattement  qui  là 
se  devait  faire,  ainsi  que  l'on  avait  accoutumé  de  tout  temps.  » 
Lorsque  la  partie  de  soûle  se  jouait  entre  habitants  de  la 
même  localité,  c'était  d'ordinaire  entre  les  gens  mariés  et 
ceux  qui  ne  l'étaient  pas;  et  l'ordonnance  de  Charles  V ne  sup- 
prima pas  plus  ces  soûles  locales  que  celles  qui  peuvent  être 

O  Vaucheiles-sur-Authie  (Somme),  arr.  de  Doullens,  c""  d'Achcux. 


—   510  — 

dites  régionales  Ces  exercices  avaient  lieu  surtout  pendant  les 
fêtes  de  l'iiiver,  à  Noël,  le  jour  du  premier  janvier,  à  la  Chan- 
deleur, à  Carême-prenant  ou  mardi  gras  et  à  la  mi-carême. 
«Le  jour  de  la  Chandeleur,  la  justice  de  Meaux  a  accoutumé 
par  chacun  an  de  bailler  aux  gens  mariés  et  à  marier  du  dit 
lieu  de  iMeaux  une  soûle  pour  aller  jouer  dehors  et  près  de 
la  dite  ville,  c'est  à  savoir  les  compagnons  mariés  contre  les 
compagnons  à  marier. 5?  «Le  mardi,  jour  de  Carême  prenant, 
après  dîner,  à  Guise,  en  Thiérache,  les  compagnons  de  la  ville 
allaient  soûler  à  la  soûle,  qui  de  tout  temps  est  accoutumé 
d'être  faite  à  la  Petite-Coulure,  des  compagnons  à  marier 
contre  les  compagnons  mariés.  5^  En  Bourbonnais,  dans  le 
bailliage  de  Cusset,  le  jour  fixé  pour  cette  lutte  des  maris 
contre  les  célibataires  de  chaque  localité  était  le  plus  souvent 
la  fête  de  Noël,  et  dans  certains  villages  de  ce  baiUiage  on 
n'a])pelait  pas  ce  jeu  la  soûle,  mais  la  «boule  de  Chalandas». 
Des  prix  étaient  décernés  aux  vainqueurs. 

Les  mêmes  habitudes  s'étaient  conservées  en  basse  Nor- 
mandie pendant  la  seconde  moitié  du  x\f  siècle,  comme  on  le 
voit  en  parcourant  le  curieux  journal  d'un  gentilhomme  du  Co- 
tentin,  Gilles  Picot,  sire  de  Gouberville.  Dans  celte  région,  pa- 
roisse contre  paroisse,  et,  dans  chaque  paroisse,  mariés  contre 
non  mariés,  des  hommes  de  toute  condition  et  de  tout  âge, 
confondus  ensemble ,  se  livraient  au  jeu  de  soûle ,  les  dimanches 
et  jours  de  fête,  après  la  messe,  avec  une  véritable  fureur.  Les 
parties  duraient  souvent  jusqu'à  la  nuit,  et  l'on  s'y  disputait  la 
K  pelotte  »  avec  un  tel  acharnement,  qu'il  n'était  pas  rare  qu'elle 
se  perdît  en  forêt  ou  même  fût  poussée  jusque  dans  les  flots 
de  la  mer;  mais  ni  l'épaisseur  des  taillis,  ni  la  nécessité  de  se 
jeter  à  l'eau  jusqu'au  cou  pour  la  rattraper  n'arrêtaient  les 
joueurs.  Voici  une  note  prise  par  le  sire  de  Gouberville  au 
lendemain  d'une  de  ces  grandioses  parties  :  «Le  i/i  jan- 
vier  i5o2  au  soir  sur  les  onze  heures,  j'envoyai   François 


—  511   — 

Doisnard  ciiez  mon  cousin  de  Hrill(.'vast  ot  chez  le  ca[)il;une  du 
ïlieil,  alin  qu'ils  nous  amenassent  de  l'aide  pour  la  choule  de 
Saint-.Maur  le  lendemain.  Je  lui  envoyai  par  Jacques  et  Lajoie 
un  sou  pour  sa  peine  et  lui  mandai  qu'il  me  fit  réponse  de  son 
message  avant  la  messe.  Le  lundi  i5,  jour  de  saint  iMaur, 
avant  que  je  fusse  levé,  Quinéville,  Groult  et  Ozouville,  soldats 
au  fort,  arrivèrent  céans,  venant  de  Valognes,  Nous  déjeunâmes 
tous  ensemble,  puis  allâmes  à  Saint-Maur^^\  eux,  Ganfepic, 
Simonet,  Moisson,  Lajoie,  Gaultier  Birelte  (ces  trois  derniers 
étaient  au  service  du  sire  de  Gouberville)  et  plusieurs  autres. 
Nous  y  arrivâmes  comme  on  disait  la  messe,  laquelle  dite, 
maître  Robert  l'otetjeta  la  pelotte  et  fut  débattue  jusqucs  en- 
viron une  heure  de  soleil  et  menée  jusques  à  Brctleville'-'  où 
Gratian  Gabart  la  prit  et  la  gagna.  Y  étaient  mon  cousin  de 
Ralfovillo,  mon  cousin  de  Brillevast,  maître  Guillaume  Vaste! , 
de  Réville,  le  capitaine  du  Theil,  Nicolas  Goliel,  Boullart  d'Or- 
glandes  et  plusieurs  autres  de  mon  ])arti;  et  des  adversaires, 
Le  Parc,  Arteney,  maître  Guillaume  Gabart  et  leur  bande  et 
quebjue  peu  de  Gherbourg.  En  nous  en  revenant,  Gantepie 
demeura  à  souper  chez  Jacques  Gabart,  parce  qu'il  s'était  mis 
en  la  mer  et  avait  été  fort  mouillé  et  changea  d'accoutrements 
chez  Rou\el,  à  Bretteville.  En  passant  [)ar  chez  Gosme  du 
Rose.  Simonnct,  le  Leuvron,  Moisson,  Lajoie,  (|ui  menait 
mon  cheval,  Nicolas  Drouet,  Jean  Groult,  Lorimier  et  autres, 
nous  humes  k  pots  de  bon  cidre  et  [mangeâmes]  un  «cyme- 
«neaul»  (sorte  de  gâteau);  pour  ce,  /J  sous.  Il  était  nuit  quand 
j'arrivai  céans  *^'.  v 

'  Ancienne  clmpelle  do  la  paroisse  de  Tourlavilie,  près  de  Cherbourfj,  où 
l'on  avait  couUinn'  do  célébrer  tous  les  ans  la  messe  le  jour  de  la  fête  de  saint 
iMaur,  patron  de  celte  chapelle. 

'*>  Manche,  arr.  de  Cherbourg,  c°"  d'Ocleville.  De  la  chapelle  Saint- Maur  à  la 
grève  de  Brcllcville,  la  rpeloKen  avjiil  parcouru  environ  trois  kilomètres. 

'■^'  Journal  manuscrit  dit  sire  de  Gouberville,  publié  partiellement  par  l'abbé 
Tollemer,  a'édit. ,  1879,  I,  p.  178  et  17'i. 


—  512  — 

Les  Bretons  ne  s'adonnaient  pas  avec  moins  de  fougue  au 
divertissement  de  la  soûle  que  les  Normands,  et  les  récits 
d'Emile  Souvestre,  publiés,  il  est  vrai,  il  y  a  près  d'un  demi- 
siècle,  nous  montrent  les  habitants  de  la  presqu'île  armori- 
caine, particulièrement  ceux  du  Morbihan,  se  ruant  de  nos 
jours  encore  à  ces  mêlées  avec  une  frénésie  qui  n'était  pas 
toujours  exempte  d'arrière-pensées  de  haine  et  de  vengeance*^'. 

Il  ressort  de  nombreux  textes  qu'au  moyen  âge  on  distin- 
guait déjà  deux  variétés  du  jeu  de  soûle.  Il  y  avait  d'abord  la 
soûle  proprement  dite  ou  «soûle  au  pied  55,  suivant  l'expression 
usitée  dans  certains  actes  des  xiv^  et  xv"  siècles,  où  le  jeu  con- 
sistait, comme  l'indique  du  reste  l'étymologie,  à  pousser  avec 
le  pied  la  boule  ou  l'éteuf,  ce  que  nous  appelons  aujourd'hui 
le  ballon  ou  la  balle.  C'est  le  «foot  bail  55  ou  ballon  au  pied 
des  Anglais,  qui  passent  pour  nous  avoir  emprunté  ce  jeu  à 
l'époque  de  la  guerre  de  Cent  ans.  Un  amusement  parisien,  la 
barrette,  n'est,  comme  le  «foot  bail»  d'outre-Manche,  qu'une 
variété  un  peu  adoucie  du  ballon  au  pied  ou  de  la  soûle  pri- 
mitive. 

Une  seconde  forme  du  jeu  de  soûle  était  celle  où  les  joueurs 
se  servaient  pour  lancer  le  ballon  d'une  crosse,  sorte  de  bâton 
plus  ou  moins  long  dont  une  des  extrémités  était  recourbée. 
L'expression  «chouler  à  la  crosse»,  que  l'on  rencontre  dans 
une  lettre  de  rémission  datée  de  1 38 1 ,  ne  laisse  pas  le  moindre 
doute  sur  la  manière  dont  se  pratiquait  cette  variété  de  la  souie. 
La  même  conclusion  ressort  de  ce  passage  du  journal  du  sire 
de  Gouberville  où  nous  lisons  que  le  curé  de  Tourlaville,  après 
avoir  dit  sa  messe,  «bâtonna  à  la  choule  tout  le  reste  du 
jour».  De  cette  soûle  à  la  crosse  dérivent  en  droite  ligne  la 
crosse,  portée  par  nos  colons  de  Normandie  et  de  Bretagne  au 
Canada ,  où  elle  est  devenue  le  jeu  national  sous  la  dénomi- 

'•'">  Voyez,  (tans  Les  dernieys  Bretons  (Paris,  1866,  I,  p.  j  ao-iSo),  le  conte 
de  [''ranrois  le  Soulcur.  Cf.  Perrin ,  Galerie  bretonne. 


—  513  — 

nation  barhaie  de  la  «la  crosse»,  le  polo,  variante  an^jlo-caua- 
ilienne  de  la  crosse,  le  «hockey  des  Anglais,  la  «Ireiie»  ou 
«truie»  de  Rabelais  et  des  Bourguignons,  le  «horet»  des  bas 
Normands,  le  «goret»  de  l'Ile-de-France,  le  «gouret»  ou  la 
«maruiite»  de  nos  provinces  du  centre.  Le  français  «goret» 
qui  signifie  petit  porc,  le  bas  normand  «horet»,  le  bour- 
guignon «treue»,  le  berrichon  «gouret»,  désignaient  ori- 
ginairement la  balle  ou  boule  que  l'on  poussait  avec  la  crosse, 
et  c'est  abusivement  que  dans  le  jeu  actuel  le  mot  «gouret» 
s'applique  à  la  crosse  elle-même. 

Avant  la  Révolution,  le  jour  du  mardi  gras,  l'évêque 
d'Avranches  et  ses  chanoines,  armés  chacun  d'une  crosse  et 
suivis  du  bas  clergé  et  des  enfants  de  chœur,  se  rendaient  en 
troupe  sur  la  grève  la  plus  voisine  de  la  ville,  près  du  pont  Gil- 
bert; et  là  ils  jouaient  une  partie  de  «horet»  ou  de  «crosserie» 
dont  on  donnait  le  signal  en  sonnant  à  toute  volée  la  grosse 
cloche  de  la  cathédrale'^'.  Ce  jeu  s'est  même  maintenu  jusqu'à 
nos  jours  dans  l'Avranchin,  notamment  à  Genêts  et  sur  toutes 
les  grèves  de  la  baie  du  Mont-Saint-Michel;  il  n'a  disparu 
complètement  que  vers  i8/io'-'.  Passée  presque  à  l'état  de 
souvenir  dans  les  campagnes  normandes,  la  crosse  s'est  beau- 
coup mieux  conservée  dans  quelques-uns  de  nos  départements 
du  Nord,  surtout  dans  l'ancien  Hainaut  et  la  Flandre  fran- 
çaise. Dans  ces  pays,  la  boule  de  cornouiller  qu'on  lance  avec 
la  crosse  est  désignée  d'ordinaire  sous  le  nom  de  «cholclte». 
Les  joueurs  de  crosse  ou  «choleurs»  y  forment  toujours  une 
espèce  de  corporation  placée  sous  le  patronage  de  saint  An- 
toine, et  tout  Flamand  de  la  vieille  roche  ne  voyage  guère 
sans  avoir  une  crosse  à  la  main'^'. 


f''   Richard  Sofjiiin,  Essai  sur  l'histoire  el  l'industrie  du  Bocage,  p.  35i. 
'-'   L'abbé  E.  Pijjeon,  Le  diocèse  d' Avranches ,  I,  p.   ii3  et  ii'i. 
(3)   Voyez  dans  les  Contes  du  roi  Gamhrinus ,  par  Charles  Deulin  (Paris,  Dentu, 
187A,  1  vol.  in-12,  p.  319-2/ii),  la  nouvelle  inlilulée  Le  grand  Chaleur. 


—  5U  — 

Le  mail,  qui  jouit  en  France  d'une  si  grande  faveur  aux 
xvf  et  xvif  siècles  et  qui  est  resté  le  jeu  favori  des  habitants 
de  Montpellier,  consiste  dans  une  modification  de  la  crosse  où 
l'on  remplace  celle-ci  par  un  maillet  ferré.  On  l'appelait,  au 
XIV*  siècle,  le  stecon « ,  nom  donné  à  la  balle  que  l'on  poussait 
à  l'aide  de  la  crosse  ou  du  maillet.  Les  Anglais,  après  nous 
avoir  emprunté  ce  jeu  qu'ils  cultivèrent  longtemps  avec  beau- 
coup d'ardeur,  comme  l'indique  ce  nom  de  Pall-Mall,  calqué 
sur  le  français  palemail  et  donné  à  l'une  des  rues  les  plus  aris- 
tocratiques de  Londres,  l'ont  transformé  en  le  combinant  avec 
le  billard  de  terre  pour  le  mettre  plus  à  portée  des  jeunes 
gens  des  deux  sexes.  Le  résultat  de  cette  combinaison  a  été  le 
«croquet 55,  qui  est  à  notre  ancien  mail  ce  que  le  «lawn-ten- 
nis55  est  à  la  paume.  On  voit  par  ce  qui  précède  que  nos  voi- 
sins nous  ont  emprunté  la  plupart  de  leurs  jeux  d'exercice  et 
notamment  quelques-uns  de  ceux  qui  nous  reviennent  aujour- 
d'hui sous  des  noms  exotiques.  Il  ne  faut  faire  une  exception 
que  pour  le  «cricket 55,  jeu  national  et  véritablement  indigène 
de  l'autre  côté  de  la  Manche,  comme  le  «  base-bail '^^j  au  delà 
de  l'Atlantique,  dans  les  divers  Etats  de  l'Amérique  du  Nord. 

A  le  bien  prendre,  un  peuple  n'a  guère  lieu  d'être  moins 
fier  de  la  vigueur,  de  fagilité  et  de  la  beauté  viriles  de  ses 
jeunes  gens,  déployées  avec  éclat  dans  de  tels  jeux,  que  de  ses 
hommes  de  génie.  Le  génie  est  comme  un  germe  merveilleux 
qui  tombe  soudain  du  ciel  :  Dieu  le  peut  faire  lever  partout 
où  il  lui  plaît,  dans  le  terrain  le  plus  ingrat  en  apparence  et 
jusque  sur  le  roc  sauvage;  mais  la  volonté  humaine  a  sa  part 
plus  ou  moins  large  dans  la  beauté,  privilège  héréditaire  des 
familles  d'élite  où  le  sang  a  su  se  maintenir  pur,  sa  part  aussi 
dans  la  force  musculaire  qui  ne  s'acquiert,  ne  s'entretient  et 

'•'  Voir  dans  le  journal  le  Figaro  du  i3  mars  1889  la  descriplion  d'une  partie 
de  ffLase-balh?  jouée  au  bois  de  Boulogne  par  les  équipes  rivales  des  deux  clubs 
trChicago»  et  «Ali  America". 


—  515  — 

ne  s'accroît  que  par  des  habitudes  laborieuses  ou  des  exercices 
continuels.  Qu'il  y  ait  là  un  rapport  de  cause  à  effet  ou  une 
simple  coïncidence,  la  statistique  constate  que  partout  le  mou- 
vement de  la  population  apparaît  dans  une  étroite  connexité 
avec  la  propagation  et  la  vogue  des  jeux  d'exercice.  Les  con- 
trées où  l'on  s'adonne  le  plus  à  ces  jeux  sont  aussi  celles  où 
les  naissances  atteignent  le  chifîre  le  plus  considérable.  En 
Normandie,  la  population  n'a  pas  cessé  de  décroître  depuis  que 
les  divertissements  où  bourgeois  et  paysans  luttaient  de  force 
et  d'adresse  ont  été  délaissés  pour  le  cabaret  ou  les  jeux  de 
hasard,  tandis  qu'au  contraire  elle  suit  toujours  une  marche 
ascendante  dans  quelques-unes  de  nos  anciennes  provinces, 
telles  que  la  Bretagne,  la  Flandre,  le  pays  basque,  où  les 
nobles  récréations  qui  ont  passionné  nos  pères  continuent 
d'être  en  honneur. 

On  remarquera  que,  parmi  les  jeux  défendus  par  l'ordon- 
nance de  1869,  ne  figurent  point  les  cartes.  La  raison  en  est 
que  ce  jeu,  qui  nous  vint  probablement  de  l'Italie  du  Nord,  ne 
fut  introduit  en  France  qu'au  commencement  du  règne  de 
Charles  VI.  La  grande  vogue  des  cartes  ne  date  même  que  de 
l'époque  de  Charles  Vil,  puisque  l'on  en  rencontre  à  peine 
une  dizciine  de  mentions  dans  les  registres  de  la  Chancellerie 
royale  qui  correspondent  au  premier  tiers  du  xv"  siècle. 

Nous  venons  de  montrer  que  l'on  n'observa  nulle  part  la 
défense  édictée  par  Charles  V  en  ce  qui  concerne  les  jeux  spé- 
cialement dénommés  par  le  texte  de  l'ordonnance.  Il  en  fut  de 
même  d'une  foule  d'autres  divertissements  dont  cette  ordon- 
nance ne  parle  pas  et  que  nous  nous  proposons  de  passer  en 
revue  quelque  jour  dans  un  travail  spécial  qui  fera  suite  à  la 
présente  étude  ^^'. 

(')  Ce  travail,  que  nous  croyons  à  peu  près  complet,  fait  partie  d"un  volume 
qui  paraîtra  dans  quelques  jours  à  la  librairie  Haclicite,  sous  ce  litre  :  La  France 
pendant  la  guerre  de  Cent  ans. 


—  516  — 

Il  nous  reste  maintenant  à  rechercher  ce  qu'il  advint  du  tir 
de  l'arc  et  de  l'arbalète  ainsi  recommandé  ou  plutôt  imposé  aux 
populations  par  l'ordonnance  de  1069  comme  l'amusement 
pour  ainsi  dire  unique  qui  se  devait  substituer  à  tous  les  au- 
tres. A  ce  point  de  vue,  on  aurait  pu  prévoir  que  le  résultat 
serait  très  variable  suivant  les  régions,  et  ce  fut  précisément 
ce  qui  arriva.  11  y  avait  certaines  parties  du  royaume  où.  les 
ordres  royaux  ne  faisaient  en  quelque  sorte  que  consacrer  des 
habitudes  contractées  depuis  des  siècles.  C'était  le  cas  de  la 
plupart  des  provinces  situées  au  nord  de  la  Loire,  telles  que 
la  Champagne,  la  Bourgogne,  l'Ile-de-France,  la  Picardie, 
l'Artois  et  la  Flandre,  où  l'ordonnance  de  Charles  V  ne  pouvait 
avoir  d'autre  effet  que  de  généraliser  un  exercice  depuis  long- 
temps florissant,  au  moins  dans  les  cités  et  les  forteresses  de 
quelque  importance. 

Aux  xn"  et  xnf  siècles,  toutes  les  villes,  tous  les  bourgs,  qui 
prirent  part  au  mouvement  communal,  principalement  dans 
le  Beauveaisis,  le  Valois,  le  Soissonnais,  le  Vermandois  et 
l'Amiénois,  avaient  mis  sur  pied  des  compagnies  ou  confréries 
d'arbalétriers  et  d'archers  qui  jouissaient  de  privilèges  impor- 
tants. Ces  compagnies  avaient  dès  lors  leurs  champs  d'exercice 
appelés  le  plus  souvent  ^bersautsw,  mot  qui  désignait  la  cible 
ou  le  but  des  flèches  et  d'où  vinrent  les  verbes  «berserj^  et 
« bersailler 5) ,  tirer  en  visant,  tirer  à  la  cible,  que  l'italien  a 
conservés.  A  Sens,  ce  champ  de  tir  s'appelait  le  «clos  du  roi, 
auquel,  lit-on  dans  un  acte  du  temps  de  Charles  V,  les  com- 
pagnons de  la  ville  ont  accoutumé  traire  de  l'arbalète  et  de 
l'arc»;  le  premier  qui  gagnait  quatre  coups  recevait  comme 
récompense  ç^un  gansw,  c'est-à-dire  une  paire  de  gants.  Vers 
le  même  temps,  deux  valets  de  ferme  du  Tanu,  petit  village 
de  l'Avranchin,  qui  gardaient  des  troupeaux  dans  les  champs, 
étaient  munis  d'arcs  et  de  «saiettes??  ou  flèches  «dont  ils 
s'ébattaient  à  traire  ??.  Le  seul  pays  pour  lequel  nous  avons  pu 


—  517  — 

trouver  la  mention  de  champs  de  lii-  établis  dans  les  campagnes 
avant  l'ordonnance  de  i  3G()  est  le  Beauvaisls,  dont  les  vilains 
avaient  du  reste,  au  moyen  âge,  la  ré|)utation  proverbiale 
d'être  les  premiers  du  monde.  Dès  1867,  les  jeunes  gens 
d'Offoy,  village  situé  à  peu  de  distance  de  Beauvais,  dans  le 
canton  de  Grandvilliers,  s'exerçaient  à  tirer  de  l'arc  «aux  es- 
taches  ou  barsaux  d'Offoy,  si  comme  accoutumé  est  en  la  dite 
ville  et  au  pays  d'environ». 

Il  convient  de  noter  dans  ce  passage,  que  nous  citons  à 
dessein  textuellement,  l'emploi  du  mot  «barsail  »  que  l'on  trouve 
d'ordinaire  sous  la  forme  «berseilw  ou  «bersaii»,  pour  dési- 
gner l'endroit  où  était  fixée  la  cible.  Ce  mot  ancien  allait  bientôt 
être  remplacé  dans  l'usage  courant  par  un  mot  nouveau  qui 
ne  se  répandit  et  ne  fut  communément  employé,  si  nous  ne 
nous  trompons,  qu'à  l'époque  où  la  royauté  s'efforça  de  créer 
des  exercices  réguliers  de  tir  dans  toute  l'étendue  du  royaume. 
Ce  mot  nouveau,  dont  l'histoire  se  rattache  ainsi  par  un  lien 
étroit  aux  origines  mêmes  de  nos  troupes  légères,  c'est  le  mot 
butte.  Charles  V  avait  placé  à  la  tête  de  ses  bailhages  des 
hommes  aussi  dévoués  que  capables,  et  plusieurs  d'entre  eux, 
Oudart  d'Atlainville,  par  exemple,  seraient  tout  à  fait  dignes 
d'une  étude  approfondie.  C'est  assez  dire  que  rien  ne  dut  être 
négligé  par  ces  hauts  fonctionnaires  pour  que  l'ordonnance  de 
1869  reçût  ])leine  et  entière  exécution. 

Le  premier  soin  des  sergents  et  autres  agents  inférieurs, 
auxquels  incomba  en  définitive  le  soin  de  faire  observer  cette 
ordonnance  dans  les  campagnes,  fut  de  trouver  un  terrain 
convenable,  communal  ou  autre,  afin  de  l'approprier  et  de 
l'affecter  spécialement  aux  exercices  qu'il  s'agissait  d'instituer. 
A  cet  effet,  on  choisit  dans  chaque  localité  un  endroit  à  sur- 
face unie,  généralement  en  pente,  où  l'on  plaça  au  point  le 
plus  élevé ,  au  besoin  sur  un  tertre  artificiel ,  le  but  des  tireurs, 
ce  que  nous  appelons  aujourd'hui  la  cible.  La  destination  de 


—  518  — 

cet  endroit  lui  fit  donner  presque  partout  le  nom  de  butte,  fé- 
minin de  but,  qui  n'a  pris  à  une  époque  plus  récente  i'acception 
de  hauteur  en  général  que  par  une  extension  de  sens  facile  ù 
comprendre. 

On  voit  par  plus  d'un  exemple  que,  pendant  la  seconde 
moitié  du  règne  de  Charles  le  Sage  et  les  premières  années 
du  gouvernement  de  son  successeur,  il  fut  de  mode  d'encou- 
rager par  des  prix  et  des  récompenses  de  tout  genre  les  exer- 
cices de  tir.  Ainsi,  en  1882,  Gautier  de  Monchel,  écuyer, 
châtelain  et  garde  du  château  d'Étaples,  donna  un  épervier 
d'argent  au  meilleur  tireur  d'arbalète,  «au  mieux  jouant  de 
l'arbalète,  pour  plus  entretenir  et  accoutumer  icelui  jeuj?.  Peu 
après  son  avènement,  en  i38/i,  Charles  VI  eut  soin  de  re- 
nouveler l'ordonnance  du  roi  son  père  et  défendit  de  nouveau 
de  jouer  à  quelque  jeu  que  ce  fut,  sinon  à  l'arc  et  à  l'arbalète. 
Le  chroniqueur  Jouvenel  des  Ursins,  qui  a  relaté  cette  défense, 
ajoute  avec  quelque  optimisme  que  les  Français  furent  bientôt 
tellement  duits  ou  façonnés  au  tir  de  l'arc,  grâce  à  ces  exer- 
cices, qu'ils  devinrent  plus  habiles  que  les  Anglais  eux-mêmes. 
L'organisation  des  buttes  ou  champs  de  tir,  et  c'est  tout  ce 
que  nous  voulons  retenir  ici  de  l'assertion  de  Jouvenel,  devait 
être  dès  lors  un  fait  accompli. 

Les  considérations  qui  précèdent  n'auraient  pas  été  peut- 
être  complètement  inutiles  si  elles  avaient  pour  conséquence 
d'attirer  désormais  l'attention  des  historiens  locaux,  des  archéo- 
logues et  des  topographes  sur  les  très  nombreux  lieux-dits 
auxquels  s'est  appliqué  ce  nom  si  significatif  de  butte  vers  la 
fin  du  moyen  âge.  Sans  doute,  la  réaction  féodale  qui  suivit 
la  chute  des  Marmousets  ne  tarda  pas  à  porter  un  coup  fu- 
neste aux  buttes  et  fit  délaisser  pour  un  temps  les  exercices 
dont  elles  avaient  été  le  théâtre.  Entraîné  dans  la  chute  de 
l'institution,  le  mot  lui-même  subit  alors  une  éclipse  passagère 
et  ne  reprit  faveur  que  pendant  les  quinze  dernières  années 


—  519  — 

(lu  règne  de  Charles  VII.  L'ordonnance  du  3  avril  iSGq  n'en 
doit  pas  moins  être  considérée  comme  la  préface  des  lettres 
patentes  du  98  avril  ilihS  qui  inslituèrent  les  francs  archers, 
et  chacun  sait  que  c'est  dans  cette  création  des  francs  archers 
qu'il  faut  chercher  les  véritables  origines  de  notre  infanterie 
moderne. 


—  520 


LIVRES  OFFERTS. 


SÉANCE  DU  8   NOVEMBRE. 

Sont  offerts  : 

Extraits  de  la  Chanson  de  Roland  et  de  la  Vie  de  saint  Louis  par  Jean 
de  Joinville,  publiés,  avec  introduction,  notes  et  glossaires  complets,  par 
M.  Gaston  Paris,  membre  de  l'Institut  (Paris,  i889,in-i6); 

Mémoires  et  comptes  rendus  de  la  Société  royale  du  Canada  pour  l'an- 
née 1888,  tome  VI  (Montréal,  1889,  m-k"). 

M.  Delisle  offre,  au  nom  des  auteurs,  les  ouvrages  suivants  : 

1  "  Cartulnire  de  l'abbaye  de  Landévenec ,  publié ,  pour  la  Société  archéo- 
logique du  Finistère,  par  M.  Arthur  de  la  Borderie,  correspondant  de 
l'Institut,  1"  livraison  (Rennes,  1888,  in-8°,  avec  planches). 

rrLe  cartulaire  de  Landévenec  n'est  pas  seulement  un  recueil  de 
chartes  ;  il  renferme  des  récits  hagiographiques ,  en  prose  et  en  vers ,  et 
des  catalogues  historiques.  On  n'en  avait  encore  publié  que  des  fi-ag- 
ments.  Il  était  nécessaire  d'en  avoir  une  édition  complète  pour  éclaircir 
les  nombreuses  questions  qu'il  soulève. 

ffM.  de  la  Borderie,  qui  se  propose  de  discuter  ces  questions,  a  com- 
mencé par  nous  donner  un  texte  complet  du  cartulaire,  en  prenant  pour 
base  le  manuscrit  conservé  à  Quimper,  et  en  mettant  à  contribution  plu- 
sieurs manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale.  Il  a  ainsi  mis  à  la  portée 
des  savants  un  document  d'une  grande  importance  pour  les  études  bre- 
tonnes. Le  texte  qu'il  en  a  donné  mérite  une  confiance  entière  et  permet 
de  se  rendre  un  compte  exact  du  cartulaire  de  Landévenec  sans  qu'il 
soit  besoin  de  recourir  aux  manuscrits,  n 

2°  Das  Testament  des  Erasmus  vom  22.  Januar  iSaj,  texte  publié  par 
M.  L.  Sieber  (Baie,  1889,  in-8°). 

ffDans  cette  élégante  plaquette,  1\I.  le  D'  Louis  Sieber,  bibliothécaire 
de  l'Université  de  Bâle,  a  mis  en  lumière,  d'après  les  papiers  d'Anier- 
bach,  un  document  fort  intéressant,  comme  tout  ce  qui  se  rattache  à  la 
personne  d'Erasme.  On  y  remarquera  les  termes  affectueux  dans  lesquels 
le  célèbre  humaniste  se  recommande  au  souvenir  des  imprimeurs  et  des 
correcteurs  qui  avaient  travaillé  h  la  publication  de  ses  ouvrages  et  à 
qui  il  confiait  le  soin  d'imprimer  ses  œuvres  posthumes.  1 


—  521   — 

3°  Etudes  critiques  sur  l'histoire  du  droit  romain  an  moyen  âge ,  avec 
textes  inédits,  par  M.  J.  Flacli  (Paris,  i8<)0,  in-S"). 

ffCe  volume  est  divisé  on  trois  parties. 

ffDans  la  première,  M.  Flacli  s'est  attaché  à  constater  quel  tut,  sur- 
tout eu  France,  l'état  des  connaissances  juridiques  depuis  la  ciiule  de 
l'empire  romain  jusqu'à  la  renaissance  des  études  de  droit  à  la  fin  du 
xi°  siècle.  11  examine  minutieusement  les  textes  d'après  lesquels  on  a 
essayé  de  soutenir  que  l'étude  scientifique  du  droit  romain  avait  persisté 
à  peu  près  sans  interruption  et  il  démontre  (jue  la  pc'riode  conq)rise 
entre  le  vu''  siècle  et  la  fin  du  xi°  n'a  produit  aucune  œuvre  originale  de 
droit  romain  qui  ait  une  valeur  théorique  et  scientifique.  A  cette  époque 
on  ne  trouve  en  France  aucune  trace  d'école  de  droit.  C'est  seulement 
par  les  écoles  des  arts  lihéraux  que  se  répandirent  alors  des  notions 
juridiques  plus  ou  moins  exactes,  plus  ou  moins  sommaires. 

ffLa  seconde  partie  est  consacrée  à  la  compilation  connue  sous  le 
titre  à' Exceptioncs  Pétri.  L'Académie  a  eu  la  primeur  des  observations 
que  M.  Flach  a  été  amené  à  faire  sur  cette  compilation,  qui  était  encore 
si  mal  connue. 

crDans  la  troisième  partie,  l'auteur  a  analysé  un  manuscrit  du  collège  de 
la  Trinité  de  Cambridge,  qui  renferme  les  Eœcepliones  Pétri,  ÏEpitome  ex- 
actis  et  plusieurs  autres  morceaux  de  droit,  dont  le  caractère  n'avait  pas 
été  bien  déterminé. 

rrLes  textes  que  M.  Flach  a  insérés  dans  son  volume  permettront  d'ap- 
précier la  justesse  des  solutions  qu'il  propose  et  dont  plusieurs  sont  tout 
à  fait  nouvelles,  n 

M.  ScBJEFKR  présente,  de  la  part  de  l'auteiu-,  M,  Aristide  Marre,  deux 
brochures  intitulées,  la  première  :  Code  malais  des  successions  et  du  ma- 
riage, troisième  et  dernier  fascicule.  Notes  et  observations  (Paris,  1889, 
iu-8'');  —  la  seconde:  Sourat  per.oupama.an  malayou ,  le  livre  des  pro- 
verbes malais  (Paris,  1 889 ,  in-8  ",  extrait  du  Recueil  de  textes  et  de  traduc- 
tions publiés  par  les  professeurs  de  l'Ecole  des  langues  orientales  vivantes). 

M.  Paul  Mkyer  jirésenle  à  l'Académie  le  tome  P'  des  Annales  du  Midi, 
revue  archéologique ,  historique  et  philologique  de  la  Erance  méridionale , 
pubhée  par  M.  Antoine  Thomas,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de 
Toulouse  (Toulouse  et  Paris,  1889,  in-8"). 

(fCe  recueil,  dont  l'objet  est  bien  déterminé  (ce  qui  n'est  pas  toujours 
le  cas  des  annales  publiées  par  les  facultés),  contient  d'intéressants 
articles,  au  nombre  desquels  il  faut  citer  l'étude  de  notre  confrère 
M.  L.  Dclisie  sur   Peii-esc   et  un  mémoire  de  M.  Thomas  sur  les  états 

xvii.  .{r. 


lUTHIVI  nti 


—  522  — 

généraux  au  temps  de  Charles  VII.  Chacun  des  quatre  fascicules  dont  se 
compose  ce  premier  volume  est  accompagné  d'une  l)ihliogra|)hie  très 
bien  eniendue  des  publications  les  plus  récentes,  concernant  l'histoire, 
la  géographie,  la  littérature  ou  lart  de  nos  provinces  méridionales.» 

SÉANCE  DU    l5   NOVEMBRE. 

Le  Secrétaire  perpétuel  offre,  au  nom  de  M.  l'abbé  Fabre  d'En- 
vieu,  sa  traduction  d'après  le  texte  hébreu,  araméen  et  grec  du  Livre  du 
prophète  Daniel ,  t.  I,  i"  et  2"  parties  (Paris  et  Toidouse,  1888,  in-S"). 

Le  Secrétaire  perpétuel  présente  ensuite,  de  la  part  de  M.  Piprre 
Lanéry  d'Arc,  sa  publication  des  Mémoires  et  consultations  en  faveur  de 
Jeanne  d'Arc,  par  les  juges  du  procès  de  réhabilitation,  d'après  les  ma- 
nuscrits authentiques  (Paris,  1889,  in-8°). 

rf C'est  une  partie  du  procès  de  réhabilitation  de  Jeanne  d'Arc  que 
M.  Quicherat  n'avait  pas  publiée  et  que  l'auteur  présente  comme  un 
supplément  à  la  grande  publication  de  l'ancien  directeur  de  l'Ecole  des 
chartes,  n 

Sont  encore  offerts  : 

Koan  hoa  tche-nan.  Boussole  du  langage  mandarin,  traduite  et  an- 
notée par  le  P.  H.  Boucher,  missionnaire  au  Kiang-Nan  (Zi-ka-vyei, 
1887,  in-8°); 

Dœdalus,  or  the  causes  and  principles  of  the  excellence  of  Greek  sculp- 
ture, par  M.  Edward  Falkener  (Londres,  1860,  in-8°); 

David' s  vision:  vcith  a  preliminary  dissertation  shovoing  David's  prophecfi 
of  Christ,  par  un  pèlerin  de  la  Terre  Sainte  (Londres,  1872  ,  in-8"); 

Does  the  nrevised  version-n  ajfect  the  doctrine  of  the  New  Testament  as 
exhibited  in  the  authorized  translation?  par  E.  F.  0.  Thurcaston  [Edward 
Falkener,  of  Thurcaston]  (Londres,  i884,  in-8°). 

M.  Gaston  Paris  offre,  au  nom  des  auteurs,  les  deux  publications 
suivantes  : 

Rapport  sur  une  mission  en  Allemagne,  par  M.  Ch.  Joret,  professeur  à 
la  Faculté  des  lettres  d'Aix,  correspondant  de  l'Institut  (Paris,  1889, 
in-8°); 

Esquisse  du  véritable  système  primitif  des  voyelles  dans  les  langues  d'ori- 
gine indo-européenne,  par  M.  Paul  Regnaud,  professeur  à  la  Faculté  des 
lettres  de  Lyon  (Paris,  1889,  in-8"). 


—  523  — 

SÉANCE  DU   2  2    NOVEMBRE. 

(Séance  publique  annuelle.) 

SÉANCE  DU    29  NOVEMBRE. 
(Aucun  ouvrage  n'a  été  offert  dans  cette  séance.) 

SÉANCE  DU   6    DÉCEMBRE. 

Le  Secrétaire  perpétuel  dépose  sur  le  biu-eau  le  quatrième  fascicule 
des  Complet  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles- 
lettres,  pendani  Tannée  1889,  juillet-août  (Paris,  1889,  in-8°). 

Le  Secrétaire  perpétuel  offre  ensuite  à  l'Académie  les  ouvrages  sui- 
vants : 

Charluhtrium  unicersttatis  Pansiensis,  publié  sous  les  auspices  du 
Conseil  général  des  Facultés  de  Paris,  par  le  P.  Denifle  et  M.  Emile 
Châtelain,  t.  I,  1200-1-386  (Paris,  1889,  gr.  in-^'')i 

La  9/  partie  du  grand  et  bel  ouvrage  de  M.  l'abbé  Raboisson, 
intitulé  :  En  Orient.  Ce  volume  comprend  la  Palestine  et  la  Syrie 
(Paris,  gr.  in-/i°). 

Sont  encore  offerts  : 

Deux  lettres  éthiopiennes  du  xvi'  siècle,  mémoire  traduit  sur  le  texte 
portugais  de  M.  Esteves  Pereira,  par  M.  René  Basset  (Rome,  1889, 
in-8'',  extrait  du  Giornalc  délia  Socielâ  asialica  italiana); 

Apollo  Hikesios,  par  M.  Barclay  V.  Head  (1889,  in-8°,  extrait  du 
Journal  of  Hellenic  studios,  vol.  X); 

Brilish  Muséum.  Department  of  coins  and  medals.  A  guide  ta  tke  prin- 
cipal gold  and  silver  coins  of  the  ancienls ,  from  cire.  B.C.  noo  to  A.D.i, 
par  le  même  (Londres,  1889,  in-8°); 

The  muséum  of  classical  antiquities ,  being  a  séries  of  essays  on  ancient 
art,  par  .M.  Edward  Falkonci-,  nouvelle  édition  (Londres,  1860,  in-S"); 

Psaltirea  Scheianà  {làS-?.),  ms.  fi'tç^  B.A.R.,  publié  par  M.  le  profes- 
seur I.  Bianu,  bibliothécaire  de  TAcadéinie  roumaine  (Bucarest,  1889, 
in-8°,  publication  de  l'Académie  roumaine); 

]\unta  la  Romani,  studii  tslorico-etnografcu  comparativà ,  par  Elena 
Sevastos  (Bucarest,  1889,  in-8°,  publication  de  la  même  Académie); 

Catahghi  dei  codici  orientali  di  alcune  biblioteche  dltalia,  stampati  a 
spese  del  ministero  délia  pubblica  istiuzione,  fasc.  h,  contenant  les  manu- 

30. 


—  52/i  — 

scrils  hëbreux  de  Bologne  et  les  manuscrits  orientaux  de  Palerme  (Flo- 
rence, 1889,  in-8°); 

Catalogue  of  ihe  Sanshrit  manmcripts  in  the  Uhrarij  of  the  India  office , 
part  II,  Samskrit  Ikcrature ,  par  M.  Julius  Eggeling  (Londres,  1889, 
in4°); 

Quelques  mots  sur  deux  vers  léonins  de  la  période  médiévale  (in-8°,  ex- 
trait du  Bulletin  archéologique  du  Comité  des  travaux  historiques,  1888); 

Une  visite  à  Sa)iœay,  suivi  de  :  La  nationalité  d'Atectoriœ  (1889,  in-8°, 
extrait  de  la  Bévue  poitevine ,  t.  VI). 

M.  Le  Blant  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

rr L'antiquité  nous  a  légué  une  nombreuse  série  de  tessères  d'ivoire  ou 
d'os  portant  sur  la  face  des  marques  diverses,  bustes  de  divinités  ou 
d'hommes,  représentations  d'animaux  et  d'édifices.  Au  revers  de  la  plu- 
part est  un  nom  propre  accompagné  d'un  chifTre  exprimé  à  la  fois  en 
grec  et  en  latin.  D'autres  tessères  de  même  sorte  ne  présentent  que  des 
chiffres,  des  types  ou  des  légendes.  M.  J.-Adrien  Blanchet  a  consacré  à 
ces  petits  monuments  une  notice  qu'il  a  l'honneur  de  présenter  à  l'Aca- 
démie :  Tessères  antiques,  théâtrales  et  autres  (Paris,  1889,  in-8'',  extrait 
de  ia  Bévue  archéologique).  On  ne  sait  quel  en  a  été  l'usage.  L'opinion  la  plus 
répandue  est  qu'ils  ont  servi  do  jetons  d'entrée  dans  les  théâlres  et  que 
le  chiffre  qu'ils  portent  était  celui  de  la  place  à  occuper  dans  les  divers 
cunei.  On  saura  gré  au  jeune  auteur  d'avoir  réuni  avec  soin  et  étudié 
avec  savoir  des  types  jusqu'à  présent  dispersés  dans  des  recueils  divers 
et  qui  soulèvent  plus  d'une  question  relative  aux  usages  de  la  vie  privée 
chez  les  anciens,  i 

Le  Président  offre  deux  ouvrages  de  la  part  des  auteurs  : 

1°  Petits  mémoires  inédits  de  Peiresc ,  publiés  et  annotés  par  M.  Ph.  Ta- 
mizey  de  Larroque  (Anvers,  1889,  in-8"'). 

ffM.  Tamizey  de  Larroque,  dans  son  enthousiasme  très  légitime  d'édi- 
teur de  la  correspondance  de  Peiresc,  donne  (d'après  le  catalogue  Libri), 
le  titre  de  Petits  mémoires  à  ce  qui  n'est  en  réalité  qu'un  registre  où 
Peiresc  notait,  jour  par  jour,  les  lettres  qu'il  répandait  dans  le  monde 
entier.  Mais  à  côté  de  cette  nomenclature  un  peu  sèche  se  groupent  de 
nombreuses  indications  sur  les  manusci'its,  les  médailles,  les  envois  de 
plantes  rares  qui  accompagnent  ses  lettres  et,  çà  et  là,  de  curieuses  allu- 
sions à  divers  événements  de  sa  vie.  Le  savant  éditeur  les  a  accompagnées 
de  tous  les  éclaircissements  nécessaires  qu'il  a  tirés  de  la  riche  correspon- 
dance qu'il  publie,  et  de  son  éruflilion  non  moins  riche.  En  parcourant 
ces  listes,  on  est  émerveillé  de  la  prodigieuse  activité  d'esprit,  de  la  variété 


525 


de  connaissances  et  de  ce  mélange  do  science  profonde,  d'esprit  et  d'ai- 
mable enjouement  qui  donnent  à  Peiiesc  une  place  à  ])ail  parmi  les 
savants  du  xvii°  siècle  et  expliquent  la  synq)atlne  dont  il  est  encore 
l'objet  dans  le  monde  des  lettres.  Le  fragment  que  je  présente  aujourd'hui 
sera  donc  accueilli  avec  faveur,  en  attendant  le  tome  II  des  Lettres  aux 
frères  Diipuy,  que  M.  Tamizey  de  Larroque  promet  de  nous  donner  dans 
quelques  semaines,  n 

9°  L'ère  de  Yczdegerd  et  le  calendrier  perse ,  par  M.  E.  Drouin  (Paris, 
1889,  in-8°,  extrait  de  la  Revue  archéologique). 

frM.  Drouin  s'est  proposé,  dans  ce  mémoire,  d'étudier  la  composition 
de  l'année  sassanide  et  de  rechercher  l'origine  du  calendrier  usité  chez 
les  Perses  avant  l'introduction  de  l'ère  musulmane.  La  question  est  d'au- 
tan! j)lus  intéressanle  que  ce  calendrier,  dont  les  premiers  essais  se  rat- 
lachenl  aux  souvenirs  de  l'Avesta  et  de  la  caste  sacerdotale,  a  traversé, 
sans  graves  atteintes,  une  période  d'environ  deux  mille  ans,  et  que  les 
derniers  sectateurs  de  Zoroastre  en  font  encore  usage  de  nos  jours. 

ff  Pour  procéder  avec  plus  de  sûreté,  l'auteur  va  du  connu  à  l'inconnu, 
en  commentant  par  l'époque  la  plus  récente,  celle  des  Sassanides.  11  jette 
un  coup  dœil  rapiile  sur  le  calendrier  égyptien  et  chaldéen,  passe  suc- 
cessivement en  revue  la  période  des  Mèdes  et  celle  des  Arsacides  et,  après 
avoir  établi  avec  beaucoup  de  solidité  en  quoi  consistait  l'ère  de  Yezdegerd , 
le  dernier  roi  de  la  Perse  mazdéenne,il  termine  par  un  exposé  lumineux 
de  la  réforme  de  Djelal-eddln  et  du  calendrier  en  vigueur  chez  les  Parsis 
de  rinde  moderne. 

ffCe  travail  fait  grand  honneur  h  l'érudition  et  à  la  sagacité  de  l'au- 
teur et  foui-nit  à  l'étude  si  complexe  de  la  chronologie  orientale  un  do- 
cument des  plus  complets  et  des  plus  dignes  de  confiance,  -n 

M.  DE  RoziÈRE  présente,  de  la  pari  de  l'éditeur,  M.  l'abbé  Paul  Guit- 
laume,  deux  ouvrages  intitulés  : 

Chartes  de  N.-D.  de  Bertand ,  monastère  de  femmes,  de  l'ordre  des 
Chartreux,  diocèse  de  Gap  (Paris  et  Gap,  1888,  in-8''); 

Istorio  de  sanct  Panez,  mystère  en  langue  provençale  du  xv'  siècle, 
publié  d'après  un  manuscrit  de  l'époque  (Gaj)  et  Paris,  t888,  in-8"). 

M.  Anatole  de  Barthélémy  présente  à  l'Académie  une  Note  sur  la  géo- 
graphie de  l'embouchure  de  la  Loire,  par  M.  (î.  de  la  Noë  (Paris,  1889, 
in-8\  extrait  du  Bulletin  de  géographie  historique  et  scientifique). 

frLe  sujet  du  mémoire  que  M.  le  lieutenant-colonel  G.  de  la  Noë  a  dé- 
siré que  joiïrisse,  de  sa  part,  à  l'Académie,  semble  au  premier  abord 
être  surtout  de  la  compétence  de  l'Académie  des  sciences.  Il  s'agit,  en 


—  526  — 

effet,  de  savoir  si,  h  l'embouchure  de  la  Loire,  le  niveau  de  la  mer  s'est 
élevé,  ou  si,  au  contraire,  le  littoral  s'est  peu  à  peu  affaisse'.  Les  dé- 
couvertes faites  en  1874  à  l'occasion  de  la  construction  du  bassin  à  flot 
de  Saint-Nazaire  ont  fourni  les  e'iéments  de  cette  étude  déjà  abordée  par 
M.  l'ingénieiu"  en  chef  Kerviler.  M.  de  la  Noë  ne  partage  pas  l'opinion  de 
cet  archéologue;  il  soutient  que  le  sol  du  continent  s'est  affaissé,  qu'à 
une  époque  bien  antérieure  à  toute  tradition  historique,  l'embouchure  de 
la  Loii'e  était  à  ho  kilomètres  du  littoral  actuel;  que  ce  mouvement  s'est 
continué  pendant  la  période  historique. 

ff Cette  étude  géologique  intéresse  l'histou'e;  en  effet,  si  on  accepte  le 
système  très  méthodiquement  exposé  par  M.  de  la  Noë,  il  faut  renoncer 
k  placer  la  bataille  navale  des  Vénètes  et  des  Romains  sur  remplacement 
des  marais  et  des  tourbières  de  la  Grande-Brière ,  qui  n'aurait  jamais  été 
occupé  par  la  mer;  il  faut  également  renoncer  à  y  chercher  le  Brivates 
portus  et  à  étendre  le  territoire  des  Vénètes  jusqu'à  la  Loire.» 

M.  Oppert  présente  l'ouvrage  intitulé  :  Allhahijlonisches  Maass  und 
Gewicht  und  deren  Waiiderung ,  par  M.  G.-F.  Lehman,  docteur  en  droit 
et  en  philosophie  (1889,  in-8°,  extrait  des  Verhandlungen  de  la  Société 
anthropologique  de  Berlin). 

ffCe  mémoire,  très  développé,  est  un  tirage  à  part  des  comptes  rendus 
de  la  Société  anthropologique  de  Berhn;  le  jeune  auteur,  l'un  des  assy- 
riologues  de  l'Allemagne  qui  promettent  à  la  nouvelle  science  un  con- 
cours sérieux  et  fécond  dans  un  avenir  prochain,  s'attache  à  suivre  les 
mesures  de  longueur  et  de  capacité  dans  leur  pérégrination  à  travers  les 
pays  civilisés  de  l'antiquité,  groupés  autour  de  la  Méditerranée,  à  travers 
l'Asie  Mineure,  la  Syrie,  l'Egypte  indigène  et  grecque,  la  Grèce  et 
l'Italie.  Si  quelques-uns  des  calculs,  quelques-unes  des  conclusions  at- 
tendent encore  leur  preuve  complète  et  absolue,  cet  écrit  d'un  volume 
considérable  contient  une  quantité  de  vues  justes  et  constitue,  sur  plu- 
sieiu's  points,  un  véritable  progrès  sm'  les  travaux  de  ses  devanciers.» 

SÉANCE  DU  l3   DÉCEMBRE. 
(Séance  levée  à  cause  de  la  mort  de  M.  Pavet  de  CoiirteiUe.) 

SÉANCE  DU  2  0    DECEMBRE. 

Le  Secrétaire  perpétuel  présente  à  l'Académie,  de  la  part  de  M^'  G.  De- 
haisnes,  prélat  de  la  maison  de  Sa  Sainteté,  La  vie  et  l'œuvre  de  Jean 
Bellegambe  (Lille,  1890,  gr.  in-8''). 


—  527  — 

Le  Ski^iiktaire  perpétuel  olViv  ousuile,  en  son  propre  nom,  le  cjua- 
trième  volume  de  son  ouvra^je  inlilule'  :  Les  rcprésculuuls  du  ijeuple  en 
mission  el  la  justice  révolutionnaire  dans  les  départements  en  l'an  ii  (Paris, 
in-S"),  volume  qui  contient  les  missions  aux  armées  du  Nord,  des  Ar- 
dennes,  de  Sambre-et-Meuse ,  de  la  Moselle  et  du  Rhin,  et  la  justice 
révolutionnaire  en  Alsace. 

M.  BoissiEit  présente  à  l'Académie  la  seconde  édition  du  Cours  d'épi- 
graphie  latine,  par  M.  Gagnât  (Paris,  i88g,  in-8°). 

rr Cette  seconde  édition,  qui  vient  si  vite  après  la  première,  [)rouve  à 
quel  point  le  livre  était  nécessaire.  M.  Gagnât  Ta  fort  augmenté;  il  y  a 
ajouté  une  étude  importante  sur  la  paléograjjhie  des  inscriptions  et  une 
liste  des  sigles  qui  se  retrouvent  le  plus  souvent  sur  les  monuments.  Avec 
ces  additions,  le  livre  de  M.  Gagnât  rendra  encore  plus  de  services  qu'il 
n'en  a  rendu  jusqu'ici,  -n 

M.  Georges  Perrot  oDfre,  au  nom  des  auteurs,  les  ouvrages  sui- 
vants : 

1°  Collections  du  Musée  Alaoui,  publiées  sous  la  direction  de  M.  R.  de 
la  Blanchère,  i"  partie  (1890,  in-i"). 

rr  L'Académie  a  témoigné,  il  y  a  deux  ans,  de  lintérêt  (|u'elle  prenait 
à  la  fondation  du  nuisée  qui  est  appelé  h  recueillir  toutes  les  richesses 
que  livrera  ce  sol  de  l'ancieiuie  province  d'Africjue,  où  les  restes  de  i'an- 
tiquilé  sont  presque  aussi  abondants  qu'en  Italie.  L'encouragement 
qu'elle  a  ainsi  donné  aux  ellorts  du  Bey  de  Tunis  et  du  Résident  français, 
si  bien  secondés  par  l'intelligente  activité  de  ^L  de  la  Blanchère,  a  porté 
ses  fruit-^.  On  ne  s'est  pas  contenté  d'avoir  fondé,  à  Tunis,  un  musée 
qui  renferme  déjà  un  grand  nombre  de  monuments  curieux;  ce  musée, 
doimant  ainsi  l'exemple  à  plus  d'une  galerie  de  notre  Eiu-ope,  vise  déjà 
à  faire  connaître  les  plus  curieuses  des  pièces  qu'il  renferme;  il  a  entre- 
pris une  publication  qui  doit  les  mettre  à  la  disposition  des  savants  et 
des  archi'ologues  de  tout  pays.  Plusieurs  membres  de  l'Académie  ont 
dc^àjelé  les  yeux  sur  la  première  livraison  de  ce  recueil,  le  Bey  ayant 
bien  voulu  en  mettre  à  la  disposition  de  ceux  de  nos  conlrères  qu'il  peut 
intéresser  un  certain  nombre  d'exemplaires.  Il  est  donc  inutile  d'insister 
sur  le  plan  et  l'exécution  de  l'ouvrage.  Le  format  adopté  est  commode; 
c'est  un  in-quarto  qui,  tout  en  restant  d'un  maniement  facile,  permettra 
pourtant  de  reproduire  les  monuments  à  assez  grande  éclu'llo  pour  que 
î  image  en  soit  aisément  lisible.  Chaque  livraison  contiendra  une  ou  deux 
planches,  acconq)ognées  de  notices  descriptives,  et  les  noms  des  savants 
qui  ont  promis  leur  concours  suflisenl  à  garantir  l'exactitude  et  1  intérêt 


—  528  — 

(lu  commentaire.  La  première  livraison  est  due  tout  entière  à  M.  de  la 
Blanchère,  qui  a  conçu  le  plan  du  recueil  et  qui  en  conservera  la  haute 
direction;  elle  renferme,  outre  une  description  succincte  du  Bardo  ou 
plutôt  de  ce  harem  du  Bardo  où  a  e'té  établi  le  Musée,  une  étude  inté- 
ressante sur  les  mosaïques  d'Hadrumète  et  particulièrement  sur  cette 
grande  mosaï(jue  du  Triomphe  de  Neptune  qui  forme  aujourd'hui  le 
plus  bel  ornement  du  musée  Alaoui.  Ce  monument  est  reproduit  dans  une 
planche  double ,  d'une  exécution  très  soignée ,  qui  rend  bien  l'aspect  de 
l'ensemble.  Plusieurs  dessins,  insérés  dans  le  texte,  donnent  une  idée 
des  autres  mosaïques  qui  ont  été  découvertes  dans  cette  même  villa,  mo- 
saïques dont  plusieurs  ont  été  malheureusement  détruites  ou  tout  au 
moins  fort  endommagées  depuis  le  moment  de  la  découverte,  n 

2°  Introduction  à  l'étude  des  monnaies  de  l'Italie  antique,  par  M.  Soutzo 
(Paris,  1887-1889,  9  vol.  in-8°). 

rrL'étude  que  M.  Soutzo  a  consacrée  aux  monnaies  de  Tltalie  antique, 
quoiqu'elle  évite  avec  soin  les  apparences  d'un  écrit  de  polémique,  est 
surtout  une  discussion  et  une  réfutation  indirecte  des  théories  de  M.  Momm- 
sen  sur  la  monnaie  de  la  république  romaine.  11  résulterait  des  re- 
cherches et  des  observations  de  M.  Soutzo  que  ces  théories  sont  en  con- 
tradiction formelle  et  presque  constante  avec  les  textes  des  auteurs  anciens 
les  plus  autorisés,  qu'elles  reposent  sur  une  série  d'hypothèses  toutes 
également  fausses,  enfin  qu'elles  n'expliquent  rien  et  ne  résolvent  sérieu- 
sement aucune  des  ditlicultés  du  sujet.  Nous  n'avons  pas  qualité  pour 
nous  prononcer  entre  l'illustre  auteur  de  YHistoire  romaine  et  son  con- 
tradicteur; nous  pouvons  seulement  dire  que  les  objections  quil  présente 
paraissent  appuyées  sur  une  étude  consciencieuse  et  approfondie  de 
toutes  les  données  du  problème,  que  M.  Soutzo  paraît  connaitri^  égale- 
ment bien  et  les  textes  des  auteurs  qui  peuvent  fournir  quelque  éclair- 
cissement utile  et  les  suites  monétaires  dont  il  entreprend  la  description 
et  la  discussion.  On  soupçonne,  en  lisant  son  travail,  qu'il  y  a  tout  au 
moins  lieu  de  soumettre  h  une  revision  critique  des  solutions  que  l'éru- 
dition moderne  s'est  peut-être  trop  pressée  d'accepter,  par  déférence 
pour  la  haute  autorité  d'un  savant  éminent.  La  question  offre  assez  d'in- 
térêt pour  appeler  et  mériter  une  nouvelle  enquête ,  et  l'essai  de  M,  Soutzo , 
quand  il  n'aurait  d'autre  résultat  que  d'inviter  les  numismates  à  entrer 
dans  celte  voie,  laisserait  par  là-même  sa  trace  dans  l'histoire  des  études 
auxquelles  il  se  rattache." 

3°  Horace,  élude  psychologique  et  littéraire,  par  Jules  Poirel  (Paris, 
in-18). 


—  5-29  — 

ff  M.  Poiret  ôtait  déjà  connu  par  deux  thèses  qui  traitaient  de  l'histoire 
(hi  barreau  romain^'*.  Aujourd'hui,  c'est  d'Horace  quil  s'occupe,  et, 
{rràce  au  tour  original  do  son  esprit ,  il  a  trouve  moyen  d'exposer,  sur  un 
sujet  qui  pouvait  sembler  banal  et  rebattu,  des  idëes  et  des  vues  qui 
paraissent  souvent  nouvelles.  Il  est  moins  critique  littéraire  que  mora- 
liste; c'est  surtout  l'homme  qu'il  étudie  dans  le  poète.  A  la  différence  du 
professeur  allemand  dont  le  livre'"',  analysé  dans  une  spirituelle  pré- 
face, lui  a  doimé  la  pensée  de  cet  essai,  il  a  l'horreur  des  formules  pé- 
dantesques  et  des  grands  mois.  Sa  langue  est  saine,  alerte  et  dégagée. 
On  y  sent  partout  rinlluencc  de  l'écrivain  qu'il  aime  et  qu'il  goûte  sin- 
cèrement tout  en  se  permettant  parfois  de  le  railler.  L'ouvrage  est  court, 
et,  grâce  à  la  vivacité  du  ton,  il  le  paraît  plus  encore.  On  doit  y  regarder 
de  très  près  pour  deviner  ce  que  cette  étude  a  coûté  de  travail,  de  re- 
cherches consciencieuses  et  approfondies,  n 

M.  A.  DK  Barthélémy-  offre  à  l'Acadc^mie  Les  sceaux,  par  A.  Lecoy  de 
la  Marche  (Paris,  i  vol.  de  la  Bibliollièque  de  l'enseignement  des  heaux- 
arts). 

frM.  Lecoy  de  la  Marche  m'a  chargé  de  faire  hommage  à  l'Académie, 
en  son  nom,  du  livre  récemment  publié  par  lui  sur  les  sceaux;  il  a  fait 
pour  ces  monuments,  si  précieux  pour  l'histoire  et  pour  Part,  un  travail 
analogue  h  celui  que  notre  regrelt('  confrère  Fr.  Lenormant  a  donni'  sur 
les  monnaies  et  les  médailles,  dans  cette  même  Bibliothèque  de  l'enseigne- 
ment des  beaux-arts,  éditée  par  la  maison  Quantin. 

ffM.  Lecoy  n'a  pas  voulu  faire  un  traité  de  sigillographie,  pas  plus  que 
Lenormant  n'a  prétendu  rédiger  un  traité  de  numismatique;  tous  deux 
sont  parvenus  à  donner,  dans  un  format  portatif,  d'excellentes  photogra- 
vures, accompagnées  de  notes  très  précises  sur  ces  deux  branches  de  l'ar- 
chéologie. 

ffEn  présentant  des  types  choisis  avec  soin,  depuis  le  sceau  d'un  roi 
de  Mouracir,  au  viii'  siècle  avant  J.-C,  jusqu'à  celui  de  l'administration 
des  subsistances  militaires  de  Strasbourg  en  1798,  M.  Lecoy  de  la 
Marche  fait  passer  sous  les  yeux  de  ses  lecteurs  cent  trente-quatre  repro- 
ductions qui  forment  le  plus  éloquent  résumé  de  l'art  sigillaire.  Cette 
collection  est  accompagnée  d'observations  personnelles  à  l'auteur;  en 

(')  Essai  sur  l'éloquence  judiciaire  à  Rome  pendant  In  République;  —  De  cen- 
tumviris  et  cautis  centumviralihnx  (Paris,  in-S"). 

'•■'1  Komik  Hud  Humor  bei  Horaz,  von  Theodor  Oesterien  (Stutigarl,  i885, 
in- 8°). 


—  530  — 

effet,  il  n'est  pas  lui  simple  compilateur  des  travaux  de  ses  devanciers; 
les  questions  d'art,  dans  lesquelles  il  est  très  compétent,  ne  lui  font  pas 
oublier  l'e'rudition,  on  peut  en  signaler  de  nombreuses  preuves.  Je  me 
contenterai  d'indiquer  des  observations  très  judicieuses  sur  la  continua- 
tion de  la  glyptique  au  moyen  âge;  c'est  aussi  M.  Lecoy  de  la  Marche 
qui  est  le  premier,  je  crois,  à  signaler  le  roi  Robert  comme  ayant  sub- 
stitué le  sigillum  à  Xannulus  employé  jusqu'à  son  règne,  ri 

M.  DE  RoziKRE  présente,  de  la  part  de  M.  Beautemps-Beaupré,  une 
Notice  sur  Guillaume  des  Roches,  sénéchal  d'Anjou,  du  Maine  et  de  Tou- 
raine,  iigg-i2a2  (Ghaumont,  1889,  in-8°). 

M.  ViOLLET  a  la  parole  pour  un  hommage  : 

frj'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  au  nom  de  M.  Tamizey  de  Lar- 
roque,  un  volume  intitulé  :  Livre  de  raison  de  la  famille  de  Fontainemarie , 
iCâo-i'jjâ  (Agen,  1889,  in-8°).  Ce  nouveau  livre  de  raison ,  précieux 
pour  l'histoire  des  mœurs  du  passé,  intéresse  aussi  l'histoire  de  la  cour 
des  aides  de  Guyenne  et  peut,  à  certains  égards,  être  considéré  comme 
une  petite  chronique  bordelaise. 

ffM.  Tamizey  de  Larroque  a  joint  à  cette  intéressante  publication  mie 
très  riche  annotation  qui  en  augmente  beaucoup  la  valeur.  Il  l'a  fait 
suivre  d'une  bibliographie  des  livres  de  raison,  qui  rendra  elle  aussi  de 
grands  services.  Je  me  permettrai  d'ajouter  quelques  noms  à  cette  biblio- 
graphie, qui  n'a  pas  d'ailleurs  la  prétention  d'être  complète.  Je  songe  à 
M.  Fagniez,  qui  a  publié  le  Livre  de  raison  de  Ve7-soris  dans  les  Mémoires 
de  la  Société  de  l'histoire  de  Paris;  à  MM.  Guibert  et  Leroux,  à  qui  nous 
devons  une  importante  collection  des  livres  de  raison  limousins,  t; 

Le  Secrétaire  perpétuel  dépose  sur  le  bureau  la  deuxième  partie  du 
tome  XXXIII  des  Notices  et  extraits  des  manuscrits  de  la  Bibliothèr/ue  na- 
tionale et  autres  bibliothèques,  publiés  par  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  (Paris,  1889,  in-/i°). 

Sont  encore  offerts  : 

r 

Etude  sur  l'argot  français,  par  MM.  Marcel  Schwob  et  Geoi'ges  Guieysse 
(Paris,  1889,  in-8°); 

Etude  de  littérature  canonique,  Rtifin  et  Huguccio ,  par  M.  Tanon,  con- 
seiller à  la  Cour  de  cassation  (Paris,  1889,  in-8''); 

Mémoires  de  la  Société  indo-chinoise  de  France,  t.  I,  aimées  1877- 
1878  (Paris,  i879,in-^°). 


—  531  — 

SÉANCE   DU    2*7  DECEMBRE. 

M.  DE  Vogué,  au  nom  de  la  Commission  du  Corpus  inscn'plionum 
sewttkanim ,  présente  le  premier  fascicule  de  la  deuxième  partie  de  cette 
publication,  contenant  les  inscriptions  araméennes,  texte  et  allas  (Paris, 

1889,  in-lbl.). 

Ce  fascicule  comprend  les  textes  aramëens  ])roprement  dits,  qui  for- 
ment une  section  à  part,  les  deux  autres  dtant  réservëes  aux  textes  na- 
batéens  et  palmyréniens.  L'introduction  renferme  un  re'sumë  de  la  paléo- 
graphie sémitique,  et  pose  les  règles  à  l'aide  desquelles  s'établit  la 
classification  des  écritures.  Les  textes,  suivant  la  tradition  du  Corpus, 
sont  distribués  d'après  l'oi'dre  géographique:  l'Assyrie,  l'Asie  Mineure, 
l'Arabie,  l'Egypte  sont  ainsi  successivement  passées  en  rex-ue.  M.  de  Vogué 
rappelle  les  confirmations  que  les  briques  bilingues  de  Ninive  ont  appor- 
tées à  la  lecture  des  textes  ctméiformes  :  le  fascicule  en  renferme  un  grand 
nombre  d'inédites;  il  reproduit  aussi  la  précieuse  stèle  de  Teima,  qui  a 
jeté  un  jom-  inattendu  sur  le  développement  de  l'aramaïsme  en  Arabie 
au  \i'  siècle  avant  notre  ère. 

Ont  encore  été  offerts  : 

Analele  Academiei romane ,  t.  X,  1887-1888  (Bucarest,  1889,  in-4°); 

Annales  de  la  Société  d'émulation  du  département  des  Vosges,  65'  année 
(Épinal,  i889,in-8°); 

Annales  du  commerce  extérieur,  1889,  11°  fascicule  (Paris,  1889, 
gr.  in-8°); 

Atti  délia  Reale  Accademia  dei  Lincei,  k"  série,  Rendiconti,  vol.  V, 
fasc.  /let  5  (F\ome,  1889,  in-Zi°); 

Biblioleca  nazionale  centrale  di  Firenze.  Bollettino  délie  pubblicazioni  ita- 
liane  recevute  per  diritto  di  stampa,  n"  99-9^  (Florence,  1889,  in-8''); 

Bulletin  d'histoire  ecclésiastique  et  d'archéologie  religieuse  des  diocèses 
de  Valence,  Gap,  Grenoble  et  Viviers,  9'  année  (V^alence,  1889,  in-8°); 

Bulletin  de  l'Académie  d'Hippone,  n"  28  (Bône,  1889,  in-8°); 

Bullettino  d'archeologia  cristiana,  publié  par  le  commandeur  G.-B.  de 
Bossi,  k'  série,  5*  aonée,  n"  i-4  (Borne,  1887,  gr.  in-S"); 

Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité,  par  M\L  Georges  Pcrrot,  membre  de 
l'Institut,  et  Charles  Chipiez,  livraisons  262-969  (Paris,  1889,  grand 
in-8"); 

Journal  asiatique ,  S'  série,  t.  XIV,  n"  1  (Paris,  m-S"); 


—  532  — 

Mémoires  de  la  Société  des  sciences  naturelles  et  archéologiques  de  la 
Creuse,  9°  série,  t.  II,  3' bulletin  (Giiéret,  1889,  iQ-8°); 

Proceedings  of  the  Society  of  Biblical  archœology ,  vol.  XI ,  8'  partie; 
vol.  XII,  1"  partie  (Londres,  1889,  in-S"); 

Bevista  archeologica ,  publiée  par  A.-G.  Borges  de  Figueiredo,  vol.  III, 
n"  9  et  10  (Lisbonne,  1889,  in-8°); 

Revue  africaine,  n"  19/i  (Alger,  1889,  in-8°); 

Revue  archéologique,  publie'e  sous  la  direction  de  MM.  Alex.  Bertrand 
et  G.  Perrot,  membres  de  l'Institut,  3'  se'rie,  t.  XIV,  septembre-oc- 
tobre 1889  (Paris,  1889,  in-8°); 

Revue  des  Pyrénées  et  de  la  France  méridionale,  t.  I,  4^  trimestre  (Tou- 
louse, 1889,  in-8°); 

Revue  géographique  internationale ,  n°  168  (Paris,  1889  ,  in-/j°); 

Société  des  antiquaires  de  la  Moi^nie.  Bulletin  historique,  38°  année, 
nouvelle  série,  i5i'  livraison  (Saint-Omer,  1889,  in-8°); 

Viestnik  hrvatskoga  arkeologiclwga  druztva,  11' année,  n°  4  (Agram, 
1889,  in-8°). 


TABLE   DES   MATIERES 


DU  DIX-SEPTIEME  VOLUME  DE  LA  QUATRIEME  SERIE. 


AbbassiJes  [Avènetnent  des),  p.  /i63. 
Abbeville  {Mémoires  sur),  p.  49 1. 
Abraham  (L'époque  d'),  p.  3o9-3i2. 
Acensement  [Charte  d'),  p.  aa-j. 
Acropole,  p.  iG5,  405. 
Afghane  (A  la  frontière) ,  p.  82. 
Africaine  (Revue),  p.  ib'],  283,  298, 

53f!. 
Afrique  (Armée  romaine  d'),  p.  176. 
Afrique  française  {Revue  de  l'),  p.  91; 

—  septentrionale ,  p.  898,  filig. 
Ages  {Les  Quatre)  de  l'homme,  p.  3, 

41  G. 
Agnès  (L'abbesse)  et  Fortunat,  p.  12, 

16,  17,  So-ig. 
Aii-e  {Diocèses  d')  et  de  Dax ,  p.  75. 
Aissaoua  {Les),  p.  i58. 
Alaoui  {Musée),  p.  537. 
Alberums  Tndia,  p.  i3i. 
Alchimique  {Enigme) ,  p.  81. 
Aldrici  {Gesta),  p.  ia/i. 
Aleria,  p.  1 G8,  456. 
Alesia  en  Auverfjne,  p.  4 10. 
Alexandri  expeditin  Indien,  p.  7g. 
Alexis  {Saint),  p.  281. 
Alger  {Inscriptions  israélites  d'),  p.  78. 
Algérienne   (Sociélé   historique).  Voir 

Africaine  {Revue). 
Alimentation     de     l'armée     romaine, 

p.  17/.. 
Alislian.  Léon  le  Magnifique,  p.  7fi. 


Allemagne  {Mission  en),  p.  5a9. 
Alleu  {Franc),  p.  4a4. 
Alleux  {Histoire  des),  p.  809. 
Allier  de  Hauteroche  (Prix),  p.  4,  5, 

171,  807,  45i,  46o,  4G8. 
Allmer.    Revue    épigraphique ,    p.    91, 

157,  298. 
Alpes     (Basses-).    Age    préhistorique, 

p.  43  0.^ 
Alsace    {Etude    préhistorique    de    V), 

p.  aSG,  386,  447,  46o. 
Amari.  Sa  mort,  p.   347,   295,  44 1. 

—    Son    remplacement,    p.    3i2, 

4i8-4i5.  —  Bibliotheca,  p.  i43. 
Ambassadeurs  à  Rome,  p.  76. 
Amélineau.  Saint  Pakome,  p.  495.  — 

Schnoudi,  p.  381.  —  Sectes  gnos- 

tiques,  p.  71 . 
Aménophis  IV  et  Hammurabi,  p.  17, 

58-58. 
Américaine  (Philologie),  p.  aSg. 
American    commonwealth ,    p.     4;    — 

journal  of  philology,  p.  90. 
Amérique.  Voir  Loubat  (Prix). 
Amiaud.  Saint  Alexis,  p.  281. 
Anagnoslakis.     Méthode     antiseptique, 

p.  21 5. 
Analogie  (Prétendus  cas  d'),  p.  203, 

"56, 801. 
Ancona  (A.  d').  Giornale  di  Montaigne , 


p.  1  '1 


f,f, 


—  53/1 


Andomns  (Lepagus),  p.  178. 

Angers     (Société     (V  agriculture     d'), 
p.  157. 

Angleterre  (Relations  de  l')  et  des  Pays- 
Bas,  p.  287. 

Anglo-saxonne  (Industrie),  p.  i53. 

Anjou  (Coutumes  de  l') ,  p.  h^tx. 

Annam  (Annales  de  F),  p.  975,  hzb. 

Annamites  (Contes),  p.  i53. 

Anneaux-monnaies  du  Caucase, p.  268. 

Annibal  dans  les  Alpes,  p.  hi6. 

Anthropique  (Ere),  p.  SgS. 

Antipatris  ou  Medjdel  Yâba,  p.  ^12. 

Antiquaires  de  France  (Société  des), 
p.  90,  91. 

Antiquités  de  la  France,  p.  2.35,  286, 
likU,  li6o,  i63.  —  Ouvrages  en- 
voyés au  concours  pour  1889,  p.  9, 
Zi;  —  pour  1890,  p.  io5,  2/19,  967, 
3o6,  Aïo,  Zn3,  4i5,  420,  li^li. 
—  Rapports,  p.  286,  3o5,  875. 

Antiquités  (Dictionnaire  des),  p.  979. 


—  Gentilices,  p.  10,  27-29.  — 
Virdumaros,  p.  95,  11 1-11  A.  — 
Composition  riiez  les  Celtes,  p.  97. 

—  Duel  conventionnel,  p.  180.  — 
Emploi  des  hijotuv  comme  prix  d'achat, 
p.  78. 

Arc  (Jacques  d'),  p.  loû,  176.  —  Voir 

Jeanne. 
Archeologia   cristiana   (BuUettino  d') , 

p.  58i. 
Archeologica    (Revista),    p.    91,    167, 

298, 4o8,  582. 
Archéologie  chrétienne  (Académie  d'), 

p.  98,  ^22,  /187-/189. 


9I' 


i5 


7' 


Archéologique    (Revue),    p 

288,  298,  582, 
Archéologiques  (Etudes),  p.  80. 
Architectes     (Société     centrale    des), 

p.  178,  176.  — (Amiuaire),  p.  i58. 

—  (Bulletin),  Y).  167,  282,  /108. 
Architects  (Institute  of  British),  p.  233. 
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Antonescu.  Cullul  Cabirilor,  p.  276. 
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Araméen  (Papyrus),  p.  108. 
Araméennes  (Inscriptions),  p.  72  ,  io3, 


9'    7'' 


ili-à. 


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Voir  Pebrot  ;  —  pendant  la  Renais- 
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Aseneth  (Prih'c  d'),  p.  898. 

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292, 


171. 


—  535  — 


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AuaALE  (Le  duc  d').  Lettre,  p.  967. 
Aurès.  Mesures  assyriennes,  p.  287. 
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BaêwpTtts,  p.  3o6. 
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Baclro-chinoise    (Monnaie),   p.    3oi, 

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Bader  (M"').   Le  comte  de  Chamhrun, 

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nédite,  p.  9.  —  L'étain,  p.  161. 
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bond, p.  173.  —  M.  Cb.  Nisard, 
p.  94o.  —  M.  Aniari,  p.  947.  — 
Dom  Pedro,  p.  247.  —  Inauguration 
de  la  Sorbonne,  p.  9  48.  —  M.  de 
Witte,  p.  9  5o.  —  M.  G.  Weil, 
p.  995.  —  Le  général  Faidhcrbe, 
p.  3o3.  —  M.  Cobet,  p.  409.  — 
Séance  publique  annuelle,  p.  4i4, 
439-459.  —M.  Pavet  deConrteille, 
p.  4 18.  —  L'ours  et  le  voleur, 
p.  4o3.  — Hommages,  p.  977,  981, 
286,  291,  4o9-4o4,  524. 

Barbiers  de  Rome,  p.  80. 

Barcelonnettc  (  Vallée  de),  p.  420. 

Barrière-Flavy.  Comté  de  Faix,  p.  494. 

Barth.  Garrez,  p.  86. 

Barthélémy  (A.  de).  Membre  de  diverses 
Commissions,  p.  5,  180,  419.  — 
Les  cités  alliées  et  libres  de  la  Gaule, 
p.  3o6,  354-36o.  —  Revue  numis- 
matique, p.  91,  157,  933,  'loH.  — 


536  — 


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525,  Say. 
Bartolommeo  {Retable  defra),  p.  222. 
Basselin  (Olivier),  p.  ^07. 
Basset.  Lettres  éthiopiennes ,  p.   52  3. 
Batiffol.  Saint  Macaire,  p.  98.  — Stu- 

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Batifl'ol,  arcliiviste  paléographe,  p.  ^7 1 . 
Baudin.  Katekismu,  p.  166. 
Baxter.  OU  new  world,  p.  280. 
Bayan,  Léon  le  Magnifique ,  ^.  76. 
Baye  (J.  de).  Industrie  anglo-saxonne, 

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Bayeux  {Evêché  de),  p.  ^21. 
Beauchamp  (De).  Château-Guillaume, 

p.  2i3,  ^  i3. 
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de),  p.  2/19. 
Beamie.  Olivier  de  la  Marche,  p.  io5. 
Beaurepaire  (Ch.  de).  Etats  de  Nor- 
mandie, p.  9  2^. 
Beaurepaire  (E.  de).  Dubourg,  p.  i3o. 
Beautemps-Beaupré.  Coutmties  de  l'An- 
jou,   p.    A 2^1.     —     Guillaume    des 

Roches,  p.  53 0. 
Belgique  [Acadénue  de),  p.  291,  292, 

298;  —  (Lois  delà),  p.  292. 
Bellegambe  (Jean),  p.  526. 
Beltrami.  Paris,  p.  127. 
Bénédite.  Mission,  p.  9,  3o8. 
Bengesco.  Voltaire,  p.  io5. 
Benndorf.  Ileroon,  p.  279. 
Bérard.    Arbitrage    chez    les    Grecs, 

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Bergci(J.).  Contrat  bilingue ,  \).  1A9. 
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123.  —  Revue  archéologique,  p.  91, 
157,  333,298,  532. — Hommages, 
p.  217,  225 ,  283,  Aoo. 

Bertrand  de  Broussillon.iS!g'(7/og-rfljj/M'e, 
p.  3,  392. 

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157,  288. 532. 

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Bibliographique  {Co)igrès),  p.  225. 

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Biaisais  {Glossaire),  p.  61 5. 

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Boèce  chiélion,  p.  287. 

Bohnsldn  {Glyphes  du),  p.  217. 

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toires, p.  22  1.  —  Hommages,  p.  8'i , 
2 1  '1 ,  221. 


—  537 


BoissiER.  Membre  de  diverses  (^oiiimis- 
sioiis ,  p.  T) ,  3 1 3 ,  ^  1  (j.  —  Anli(|iiités 
de  h'iilérie,  p.  17.  —  Gallo-nuriiains 
cl  Barbares,  p.  loC). —  Cbiislia- 
nisniedeBoèce,  p.  237.  —  M.  Aniari, 
p.  968.  —  Hommages,  p.  920, 
975,  896,  537. 

Bologne.  .Manuscrits  bébreux,  p.  62/1. 

Bondiirand.  Charte  d'acensement,  Hom- 
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Bonvalol.  Fcaules,  p.  219. 

Bordeaux  {Société  de  géographie  de), 
p.  233. 

Bordin  (Prix),  p.  h,  5,  2  38,  807, 
309,  45i,  46i,  /i65. 

Borelli.  Itinéraire,  p.  ]55. 

Borges  de  Figuciredo.  Revistu  archeolo- 
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Bouchart  {Alain),  p.  221. 

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Boucher.  Langage  mandarin,  p.  175, 
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Brassarl.  Flandre  wallonc ,  p.  1 5  2 ,  291. 


Bréal.  Membre  de  diverses  Commis- 
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logie, p.  253,  9  56,  3oi.  —  Etymo- 
logies,  p.  2  56.  —  Hommages, 
p.  88,399. 

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Brissaud.  Culte  chez  les  Romains , 
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Bronze  {Période  de),  p.  /190. 

Bruel.  Chartes  de  Cluny ,  p.  22  3. 

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Brnnet  (Prix),  p.  Z167. 

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Bubaste  (Fouilles  de),  p.  289. 

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Bueil  (J.  de).  Le  Jouiencel,  p.  3 ,  286 . 
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Bugge.  Gotter-  und  Heldensagen, 
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Bnhot  de  Kersers.  Chei;  p.  4oo. 

Buiic.  Hrvatski  spomenici,  etc.,  p.  228. 

Bulla  Begia  ou  Hammam  Derradji  (Tu- 
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Burgess.  Epigraphia  Indica,  p.  99  1 . 


Cabiriloi-  {CuUul),  p.  27». 

Caboul  (Pierres  gravées  de),  p.  loa. 

Cadicr.  Sicile,  p.  58,  G7,  1G8,  656. 

Cœlum,  de  cmlire,  p.  9  56. 

Gagnât.  Alimentation  de  l'armée  ro- 
maine d'Arri(|iie,  p.  17/1,  —  Année 
épigrapliKjue,  Cainpde  Lamhèse,  Gra- 
veurs d'inscriptions ,  p.  220.  —  Epi- 
graphie,  p.  527. 


XVI! 


Calendrier  juif,  p.  96. 

Calleja.        Inscription      d'Esmunazar, 

p.  171. 
Cailler.   Voyages,  p.  266. 
Canada  {Société  royale  du),  p.  020. 
Campa  {Inscriptions  de),  p.  71. 
Canopc  {Décret  de),  p.  227. 
Capsella  offerta  a  Leone  XUI,  p.  281. 
Carapanos.  Fouilles  de  Corfou,  p.  9A5. 

37 


iHrAlUKBIR     lktTIU»«lk 


538 


Cariens  (Cultes),  p.  61,  455. 

Carlos  (Don),  p.  998. 

Carnot  (Lazare).  Slatiie,  p.  2  35. 

Carpentras  {Incunables  de) ,  p.  4 16. 

Carré.  Parlement  de  Bretagne,  p.  SgS. 

Cartailhac.  Monuments  des  Baléares, 
p.  i63.  —  Bijoux  de  Lasgraisses, 
p.  Un.  —  France  préhistorique, 
p.  288. 

Cartilage.  Découvertes,    p.    i5,    /i90, 

Cartilage  en  Arménie,  p.  807. 
Carton.     Fouilles     de     BuUa    Regia, 

p.  3o5,  420,  49g-432. 
Cartulaires  français  en  Italie,  p.  65. 
Casablanca.   Coloinb,  p.  4  07. 
Casati.  Antiquités  étrusques,  p.   298. 
Castan.  Épitaphes  de  Besançon ,  p.  176. 

—  Bibliothèque    de    Saint-Claude, 
p.  397.  —  Claude   Rately,  p.  280. 

—  Musées  de  Besançon,  etc.,  p.  222. 
Castelnau-Tursan  {Les),  p.  3. 
Castillans  {Vieux  auteurs),  p.  85. 
Catacombes  do  Borne,  p.  99,  439. 
Caleau-Cambrésis  {Traité  de),  p.  2 2 4. 
(Calorie  (Lac  de),  p.  260. 

Catulle  {Ce  que)  doit  aux  Alexandrins 

et    aux    vieux    lyriques,    p.    809, 

465. 
Caucase     (Anneaux  -  monnaies     du), 

p.  268. 
Célius.  Voir  Saints-Jean-et-Paul. 
Celtibérien  {Plat),  p.  87. 
Ceiisius.  Liber  censuuni,  p.   i4i. 
Censuum  {Liber),  p.  lAi. 
Céramiques  de  la  Grèce,  p.  75,  277. 
Cerlangue  (La),  p.  a. 
César  {Prwmia  dans),  p.  97. 
Ceylon  {ToolJi  relie  of),  p.  2  85. 
Cliabaneau.     Saint  Fanuel,    Parnasse 

provençal,  p.  79.  —  Roman  d'Arles, 

p.  275. 
ChaboiiilleL  Discours,  p.   1A7. 
Chahlée  {  Découvertes  en  ) ,  p.  1 4 1 . 


Chaldéen    (Cylindre),   p.    252,   3oo, 

334-888. 
Chaldéennes  (Mesures),  p.  95,   ii5- 


1 1' 


Challamel.    Loi   du    3o    mars    tSSy, 

p.  74. 
Châlons-sur-Marne  {Topographie    de), 

p.  4ii. 
Chambrun  {Le  comte  de),  p.  212. 
Champoiseau,  correspondant,  p.  49  4. 
Cliangars ,  p.  4 08. 
Chanson  de  Roland,  p.  520. 
Clinnson  poHlique  des  Huns,  p.  io5. 
Chantilly    (Visite     du     château     de), 

p.  247. 
Chapelain  {Lexique  de),  p.  180. 
Chapellier.  Documents,  p.  895. 
Cil  VPLAIN.  Céramiques,   p.  76 ,  977. 
Charencey  (De).  Langue  mara,  p.  108. 

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Charité  {Bureaux  de),  p.  897. 

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Charmasse  (A.  de).  Aulun,  p.  494. 

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Chartres  {  Vitraux  de),  p.  83. 

Château-Guillaume  en  Poitou,  p.  91 3, 
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Châtelain.   Chartularium ,  p.  53  3. 

Chatil  and  Bassein ,  p.  286. 

Chénon.  Alleux ,  Sainte-Sévèi'e ,  p.  809. 

Cher  {Histoire  et  statistique  monumen- 
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Chercbell  (Découvertes  à),  p.  171, 
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338-3^8. 
Chinoise  [Langue),  p.  ùnU. 
Chinoises  (Nouvelles) ,  p.  289. 
('.hipioz.   Histoire  de  l'art.  Voir  Pkiuîot. 
Chrestutniilhie  grecque  (i8a3),  p.  :'i)6, 

3i5-336. 
Chypre.  Inscriplion  {jrocque,  p.   258. 
Circourt    (A.    de).    Louis    d'Orlrans, 

P-78; 

Cilés  alliées  et  libres,  p.  3 06. 

Civilisatiotis  [Les  premières),  p.  8;î. 

Civilà  Castellana(Anliquilés(lo),  p.  17, 
5o-53,  ^30,  h2~j. 

Clabault{Les),  p.  4 10. 

Clermokt-G.4nneai]  ,  candidat,  élu, 
p.  17,  93,  glx ,  97,  listi.  —  Membre 
de  diverses  comniissioiis,  p.  180, 
'193.  —  Inscription  de  Chypre, 
p.  9  58.  —  Géographie  de  la  l'a- 
lestine,  p.  9 59,  ^12. 

Ciichy  (Concile  de),  p.  9^1. 

Clodius(P.).  Aureux ,  p.  Ziaa. 

Cluny  [Charles  de),  p.  2a3. 

CoBET.   Décédé,  p.  '109,  hti-:i. 

Cobham.  Cylindre  clialdécn,  p.  a5a, 
3oo,  334-338. 

Cochinchine  française ,  p.  4o8. 

Colin.  Philonis  libellus,  p.  aSo. 

Coins  belonging  to  G.  du  Cunha,  p.  i86  ; 
—  f}f  the  ancients ,  p.  593;  — 
(Greek),  p.  ilio. 

Colomb  [Christophe)  ,  p.  319,  607. 

Colonna-Ceccaldi.  Inscription  de  Chy- 
pre, p.  9  58. 

Commerce  extérieur  [  Annales  du),  p.  90, 
i56,  233,  393,  liw].  53 1. 

Comminges  [  Hevue  rie) ,  p.  233. 

Compirgne  [Jeanne  d'Arc  devant), 
p.  2  j3. 

Composition  chez  les  Celles,  p.  97. 

Comptes  rendus  des  séances,  p.  85, 
9i3,  999,  981,  600,  523. 


Conches  (G.  de).   Voir  Guillaume. 

(Conciles  de  Reims,  p.  9/1,  107. 

Concours  général.  Distribution  des 
prix,  p.  939. 

Conseil  d'Etat,  du  Roi,  p.  5,  181. 

Constantine  [Société  archéologique  de). 
p.  393. 

Copistes  des  manusaits  grecs,  p.  668. 

Corfou  (Fouilles  de),  p.  2/i5. 

Connlh  [(joiîis  of),  p.   t'iS. 

(jorol.   Hachettes  celtiques ,  p.  978. 

Corpus  inscriptionum  setnilicarum ,  p.  9 , 
7t,  86,  100,  io3,  180,  /io6,  53i. 

Corse  [La)  et  Colomb,  p.  919,  1^07. 

Cosneau.   Richemonl ,  p.  6. 

Costomiris.  Médecins  grecs,  p.  169, 
16/1,  168,  190-197. 

Courajod,  candidat,  p.  17,  93.  — 
Polychromie,  p.    139. 

Coutume  de  Touraine,  p.  237,  Sgo, 
ttliS,  660. 

Coutumes  de  l'Anjou,  p.  'la/i. 

Cozza.   Inscriplion  grecque,  p.  9g. 

Cozza-Luci.  Novum  Testamentum, 
p.  93o. 

Craon  [Baronnie  de),  p.  392,  4/i8. 

Crepereia  [Gens),  p.  168,  198-200, 
696. 

Creuse  [Société de  la),  p.  533. 

Croate  (Société  archéologique).  Viest- 
nik,  p.  99,  i58,  993,  53a. 

Croates  (Ecrivains),  p.  223. 

Croisades  [Histoi-iens  des),   p.  lo,  70. 

CnoiSET  (Alfred).  Membre  de  diverses 
Commissions,  p.  5,  j8o.  —  Rap- 
ports, p.  58-70,  l\ïh.  —  Hom- 
mage, p.  226. 

Cioiset  (Maurice).  Second  acteur  d'Es- 
chyle, p.  71. 

Culte  chez  les  Romains,  p.  aSo. 

Cunéiformes.  Voir  Inscriptions. 

Cunha  (G.  da).  Voir  Gersou. 

Cursus  [  Le)  dans  les  lettres  des  papes, 
p.  100. 

37. 


—  bàO  — 

CuRTiDS,  élu  associé  étranger,  p.  tnh,  Cyclopéens  (Monuments),  p.  i63. 

Zii5,  /laS.  Cylindre  chaldéen,  p.  aSa,  3oo,  336- 

Curzon  (H.  de).  Temple, Tp.  3,  5,  6iai,  338. 

Z.5o. 


D 


Dacia  [Cultul  cahirilor  in),  p.  975. 

Damascius,  p.  261,  262,  297,  326- 
336  ,601. 

Daraase  (Saint).  Inscription,  p.  628, 
A37-439. 

Daniel.  Livre,  p.  022. 

Darc  (Jeanne).  Voir  Jeanne. 

Darmesteter  (James).  Lettres  sur  l'Inde, 
p.  82. 

Darmesteter  (M°"  James).  End  of  the 
middle  âges,  p.  128. 

David' s  prophecy,  p.  622. 

Deane.  Pierres  gravées,  p.  102. 

Degrand.  Inscriptions  de  Maronée, 
p.  3oi,  3o2,  363-35o. 

Dehaisnes.  Jean  Bellegambe ,  p.  626. 

Delalande-Guérineau  (Prix),  p.  807, 
3io,  625,  668. 

Delattre.  Fouilles,  p.  i5.  —  Neferis, 
p.  176,  3o5-2o8.  — Byrsa,  p.  Ai  1. 
—  Symmaque,  p.  620,  628-629. 

Delaville  Le  Roulx.  Règle  des  Tem- 
pliers ,  p.  101.  —  Joyaux  d'Aragon , 
p.  197. 

Delisle  (L.).  Membre  de  diverses  Com- 
missions, p.  807,  3i3,  896,  619, 
^28;  —  secrétaire  intérimaire, 
p.  269.  —  Chronique  des  Tard- 
Venus,  p.  181.  —  Enquêteurs  de 
saint  Louis,  p.  296,  3i5-326.  — 
Fonds  Libri  et  Bnrrois,  p.  78.  — 
Histoire  littéraire,  p.  7].  —  Peiresc , 
p.  7.5.  —  TempUjrs,  p.  70,  86.  — 
Hommages,  p.  78,  83,  127,  129, 
i3o,  iSa,  i55,  2i3,  221,  226, 
270,  io5,  520. 

Dëlocue.   Membre   de   diverses   Com- 


missions, p.  5,  610;  —  secrétaire 
intérimaire,  p.  269.  —  Tanistry, 
p.  11,  12.  —  Gallo-Romains  et 
Barbares,  p.  107.  —  Assemblées 
populaires,  p.  109.  —  La  loi, 
p.  3o6.  —  La  Lunade,  p.  71;  — 
Hommages,  p.  87,  169. 

Délos  (Planches  sur),  p.  378. 

Démotique  (Contrat),  p.  169. 

Démotiques  (  Versions  )  du  déci'et  de 
Canope ,  p.  227. 

Detnuin  (Histoire  de),  p.  421. 

Démy.  Loi  de  Narbonne,  p.  aSS. 

Denifle.  Chartulnrium ,  p.  523. 

Dereubourg  (  Hartwig  ).  Sîbawaihi, 
p.  i5i. 

Derenboup.g  (J.).  Fouilles  de  Carthage, 
p.  ]  6.  —  Commentaire  de  Maïmo- 
nide,  p.  127.  —  Hommage,  p.  78. 

Deschamps.  Cultes  cariens,  p.  58,  60, 
655. 

Des  ^Michels.  Mémoire ,  p.  7 1  ;  —  Chan- 
son pohtique  des  Huns,  p.  io5  ;  — 
Annales,  p.  275,  625.  —  Contes 
annamites, p.  i58.  —  Mamiel,  p.  636. 

Desplanquo,  archiviste  paléographe, 
p.  671. 

Devéi  ia.  Candidat  à  l'École  des  langues , 
p.  2 ,  181,  •y.^G. 

Diclaminis  (Etude  sur  les  Ajs),  p.  809, 
/.59. 

DiohI.  Exarchat  de  U avenue ,  Saint-Luc 
en  Phoctde,  p.  83. 

Dieulalby,  candidat,  p.  61 5,  619.  — 
Ossuaires,  p.  3i3,  869-876. 

Dijon  (Inscription  de),  p.  178.  —  In- 
cunables, p.  610. 


'il  — 


Diurinu  (Liber),  p.  i-iç). 

Djuricheii  (  The)  o/' Maiidsknria ,  p.  281. 

DomiliiMi,  p.  GG,  hbC). 

Doiméiny  (Fort  de),  p.  lo/j,  175. 

Doniol.    Catahirues   de    Fontainebleau, 

p.  60'). 
Doiiay.  Pliilolojjie  aracricaine,  p.  209. 
Doublet.  Droit  d'asile,  p.  58,  64,  455. 
Douglity.  Inscriptions  d'Arabie,  p-  71. 
Drapoyioli.  Image  de  la  France,  p-  1^7. 
Droit    (Manuel    de)    de    Sidi    Khalil, 

p.  a8i. 
Droit  public  romain,  p.  279  ;  —  romain 

au  moyen  âge,  p.  5?îi. 
Drouin.  Ere  de  }ezdegerd.  p.  5 a 5. 
Dubourg  au  Mont-Sainl-Michel ,  p.  i3o. 
Du   Boys,    Con-espondants  de  Niçoise, 

p.  89. 


Duclialais  (Piix),  p.  /iio,  463. 

Du  Cliâleilier.  Fpoques  préhistorique  et 
gauloise,  p.  393. 

DiîciiES.NK  (L'abl)é).  Rapport,  p.  5. — - 
Concile  de  Ri'ims,  p.  96.  —  Cursus 
dans  les   l^t'cs  dos  papes,  p.  100. 

—  Vies  des  papes,    p.  2  38,  a 4 5. 

—  Memoria  de  Sétif,  p.  417.  — 
Liturgie,  p.  317.  —  Hommages, 
p.  1  '4 1,  317. 

Duel  conventionnel,  p.  180. 
DcMONT  (A.).  Céramiques,  p.  76,  277. 
Du  Puitspelu.  Dictionnaire,  p.  42 1. 
Durègne.  Forêts  du  littoral,  p.  213. 
DuRiy.  Assemblées  populaires,  p.  109. 

—  Bataille  du   Granique,   p.  4 16. 

—  Histoire  des  Grecs ,  p.  91. 
Dussart.  Jacques  Meyer,  p.  i56. 


E 


Eckel ,  archiviste  paléographe ,  p.  671. 

École  des  chartes ,  p.  1  a  ,  47 1 .  —  Biblio- 
thèque, p.  90,  167,  289,  299, 
4  08. 

Ecole  des  langues  orientales,  p.  a, 
181,  235. 

Ecoles  françaises  d'Athènes  et  de  Rome , 
p.  6, 58-70,  io4 , iG5 ,  1G8, 173, 
175,  176,  181,  248,  355,  3oi, 
3o5,  454.  —  Mélanges,  de  Rome, 
p.  373,  393.  —  Voir  GEOFFnoï, 
Hellénique. 

Economique  (Etat)  au  moyen  âge, 
p.  2l3. 

Ecriture  hunno-scylhique,  p.  262. 
Edesse  (Histoire  </'),  p.  4G5. 
Education  athénienne ,  p.  276. 
Eggeling.  Samskrit  lilerature,  p.  5a4. 
EcGER  (Emile).  Sa  vie  et  ses  travaux, 

p.  4i4,  473-499. 
Kgyple.  Carte,  p.  4o6.  —  Géographie , 

p.  465. —  Institut,   p.    333,   4oK. 


—  Langue,  p.  147.  —  Moines, 
p.  381.  —  Morale,  p.  919.  —  My- 
tholngi?,  p.  I  47.  —  Temples,  p.  87, 
i43. 

Engel.  Numismatique,  p.  4  10. 

Enlart,  archiviste  paléographe,  p.  47  1 . 

Enquêteurs  de  saint  Louis,  p.  996, 
3i  5-33  6. 

Epigraphia  Itulica,  p.  291. 

Epigraphie  latine,  p.  527;  —  du  Poi- 
tou, p.  3,  393,  4  10,  4^19. 

Epigraphique  (Année),  p.  220;  -• 
(Revue)  du  Midi,  p.  91,  107,  298, 
4o8. 

Erasme.  Inventarium,  p.  i55.  —  7c»- 
tament ,  p.  5 30. 

Eschyle  (Second  act£urd'),  p.  71. 

Esmunazar  (Inscription  d'),  p.  171. 

Espagne  (Sarcophages  d'),  p.  99. 

Espérandieu.  Epigraphie,  p.  3,  39.S, 
4io,  449.  —  Le  KeJ,  p.  4j6.  — 
Varenilla,  p.  78. 


562 


Espinay    (d').   Coutume    de    Tour  aine, 

p.  287,  890,  i/i8 ,  i6o. 
Es-Senou9sy.  Voir  Senoussy. 
Etain  (Provenance  de  1'),  p.  161. 
Ethiopiennes  {Lettres) ,  p.  5a3. 
Ethniques  (Appellations),  p.  hi'à. 
Etrusque  (Art),  p.  75. 
Etrusques  (Antiquités),  p.  298. 
Etymologies,  p.  a  56. 
Euting.  Palmyre ,  p.  390. 


Evans  (A.-J. ).   Horsemen  ofTarentum, 

p.  807. 
Evans  (J.),  correspondant,  présent  à 

i'Académie,  p.  2  58.  —  Numismatic 

Society,  p.  i53.  —  Society  of  anti- 

(juaries ,  p.  939. 
Exposition  (  Projet  d')  en  iZi70,p.  161, 

183-189. 
Exposition  universelle,  palais  tunisien, 

p.  396. 


Fabre    (A.).    Lexique    de    Chapelain, 

p.  i3o. 
Fabre  (P.).  Liber  censuum,  p.  iZii. 
Fabre  d'Envieu.  Daniel,  p.  52  2. 
Fabrelti.  Papyrus  araméen ,  p.  io3. — 

Documenti,  Cronache,p.  ili']. 
Fage.  Tulle,  p.  898. 
Fagnan.  Sidi  Khalil,  p.  281. 
Fagniez.  Le  P.  Joseph,  p.  86. 
Faidhehbe  (Le  général).  Nouvelles  de 

sa    santé,    p.    259.    —    Sa   mort, 

p.  3o2  ,  i/ii.  —  Son  remplacement, 

p.  3 19.  —  Statue,  p.  620. 
Falérie  (Antiquités  de),  p.  17,  5o-53, 

^90,  lis-]. 
Falkener.  Ouvrages,  p.  522,  SaS. 
Fanuel  (Soinl),  p.  79. 
Farcy  (P.  de).  Abbayes,  p.   631.  — 

Sigillographie,  p.  3,  892,  iai. 
Faudel.  Etude  préhistorique  de  l'Alsace, 

p.  a36,  386,  /1/17,  /160. 
Favaro.  Per  l'edizione  di  Galilei,  p.  87. 
Favé.  L'empire  des  Francs,  p.  5. 
Favre  (C).  Le  Jouvencel,  p.  3,  a36, 

38i,  U5,  ti6o. 
Fayoum  (Peintures  du),  p.  i65,  166. 
Féautés  en  Lorraine,  p.  219 
Firkcr.  Sarcophages  d'Espagne,  p.  99. 


Figueiredo  (B.de).  Voir  Borges. 
Finistère  [Monuments  du),  p.  3g9. 
Fischer  (K.-A.)-  A  Ihtn-Magyar  iras, 

etc.,  p.  281. 
Flach.  Droit  romain,  p.  59 1. 
Flandre  wallone ,  p.  1 5 2 ,  291. 
Florence.  Bollettino  délie  pubblicazioni 

italiane,  p.   90,    i56,   282,    292, 

607,  53  t.  —  Codici  palatini ,  p.  91. 
Foix  ( Comté  de),  p.  hsli. 
Fontainebleau   (Manuscrits    grecs    de), 

p.  /io5. 
Fontainemarie   (Livre    de    raison    de), 

p.  53o. 
Fontenay  (H.  de).  Aiilun,  p.  626. 
Forêts  du  littoral,  p.  212 
Forez  pittoresque,  p.  280. 
Fortunat  et  sainte  Radegonde,'  p.  12, 

16,  17,  80-69. 
Fougères.  Mantinée,  p.  58,  656. 
Fould  (Prix),  p.  666. 
Francs  (Empire  des),  p.  5. 
Fréville  (De).  Quatre  âges ,  p.  3,  616. 
Froger.  Gesta  Aldi^ici,  p.  626. 
Frotté  {Louis  de),  p.  i35. 
Funéraires   (Monuments)    des    Grecs, 

p.  7,  8.  10,  96,  97,  io3. 


I 


5/i3  — 


Gah(^  ol  Gafsa  (Tiinisio),  p.  i  79 ,  -i  1  o. 
(Jalilci  {Pcr  l'edizmw  di),  p.  87. 
Oallo-Romains   et   Barbares,   p.    io5, 

106. 
Gardnor.  Naulcratis,  p.  87. 
Ganiier  (Fondation    Benoît),    p.     6, 

169,  ^10,  /i59,  663,^69. 
G.vR.MEn  (Ch.).  Lettre,  p.  178. 
Gan-ez  [Gustave),  p.  8(). 
Garrigou.  Revue  des  Pyrénées,  p.  107, 

333,  393 ,  539. 
Gascogne  (Dunes  de),  p.  313. 
Gasié.  Insuirections ,  p.  407. 
Gaslinois  [Histoire  du),  p.  fiii. 
Gaule  (Cités  de  la),   p.    3o6,   354- 

36o. 
Gadtier  (L.).  Monibre  d'une  Commis- 
sion, p.  6.  —  Rapport,  p.  173.  — 
Hommages,  p.  383,  287,  390. 
Gay-Lussac.  Carte  de  l'Egypte,  p.  lioO. 
Geffrot,  dircclem-  de  l'École  française 
de  Rome,  p.  ^57.  —  Lettres,  p.  6, 
9,  17,  >9-33,  25-97,  5o-53,97, 
117-131,    1G8,     173,     198-201, 
9o'i-9o5,  h-20,  lisQ-li-2'].  —  Rap- 
port, p.  955.  —  Vulci,  p.  262,  2G5 
2G9.  —  Voir  Écoles. 
Genève  et  Vienne,  p.  336,  384,  hk'], 

lido. 
Genocchi  (A.),  décédé,  p.  97. 
Genre  (Orijjine  dn),  p.  3  50. 
Gentiliccs  romains,  p.  10,  37-99. 
GeoflVoy.  Revue  de  V Afrique  française , 

p.  91. 
Géographique   {Revue),    p.    91,     107, 

333,  533. 
Gerbert.  Lettres,  p.  i59. 
Gerniano.   Fouilles,   p.   8,   9,   26-27, 

97' '17- 
Geroglijico    [VocaOolario),  p.  i38. 

Gerson  da  Gunha.  Ouvra;;es,  p.  ab5 


Gililcisleevc.  Journal,  p.  90. 
GiriAKu  (J.).  Membre  de  diverses  Com- 
missions, p.  5,  807.  —  Hommages, 
p.  376,  391,  /ici. 

Girard    (P.).     Education    athénienne, 
p.  976. 

Girard  (P.-F.).  Droit  publie,  p.  379. 

Giulio  {Villa  di  Papa),  p.  17,  5o-53, 
497. 

Gjolhaschi-Trysa,  p.  979. 

r.iac,  p.  895. 

Gley.  Documents  ,  p.  890. 

Glyphes  du  Bohuslân,  p.  317. 

Gnostiques  [Sectes) ,  ^.  71. 

Gobert  (Prix),  p.  3-6,  181,  Ii-m,  linB, 
4/19,  461,  464. 

ropaH.-4y  (O  uamncy  y),  p.  895. 

Grâce  de  Dion  (Rois  par  la),  p.  255. 

Graf.  Peintures  du  Fayoum,  p.  166. 

Grand.  Temples,  p.  87,  i48. 

Granique  (Bataille  du),  p.  4i6. 

Granvclle.  Coircspondance ,  p.  387. 

Grasset  { Le  ph-e  ) ,  p.  216. 

Graille  {Maison  de),  p.  899,  448. 

Graveurs  d'insa-iplions  {Manuels  des), 
p.  230. 

Gravier.  Le  Ravennate,  p.  i43. 

Gravitle  {Malet  de),  p.  42  4. 

Grecs  {Histoire  rfes),  p.  91. 

Grenoble  {Annales  de  l'enseignement  su- 
péneur  de),  p.  975;  —  {Histoire 
de),  p.  946,  887,  447,  4Go. 

Grève  (Philippe  de),  p.  107. 

Grignon.  Châlons,  p.  49  1. 

GrofT.  Décret  de  Canapé,^.  297. 

Gseil.  Membre  de  l'École  de  Rome, 
p.  3oi,  3o5.  —  Domilien,  p.  58 
66,  456.  —  Découvertes  épigra- 
pbicpa-s,  p.  6,  93.  — Vulci,  p.  98, 
190,  178,  176,  3o5,  263,  265- 
969,  4ao, 437, 456. 


^Ixk 


Guérin.  Documents  concernant  h 
Poitou,  p.  3,  936,  377,  hli^, 
4Go. 

Guerre  de  Trente  ans,  p.  691. 

Guevarre  (Le  P.),  p.  397. 

Guichard,  héréliqiie,  p.  107. 

Guieysse.  Argot,  p.  53o. 


(P.).      Chartes,      Istorio, 


Guillaume 

p.  53  5. 
Guillaume  de  Conches,  p.  3io. 
Guimet   [Annales  du   Musée),    p. 

i56 , 992. 
Guiraldenc.  Poésies,  p.  2  3o. 
Guises  (La  mère  des),  p.  395. 


90, 


H 


Hachettes  celtiques,  p.  278. 

Hadrumète.  Fouilles,  p.  160. 

Haigneré.  Cartulaire,  p.  Ii2î. 

Maillant.  Bibliographie,  p.  980,   397. 

Halévy.  Martyrs  de  Nedjrâu,  p.  109, 
toi,  109.  —  Psaume  Exsurgat 
Deiis,  p.  9A6,  9/18.  —  L'époque 
d'Abraham,  p.  Sog,  3 10. 

Hamatéen  (Cippe),  p.  ici. 

Hamatli  (Inscriptions  de),  p.  162, 
169. 

Hamilton.  Moods,  p.  280. 

Hammam  Derradji.  Voir  Bulla  Regia. 

Hammurabi,  p.  17,  53-58,  3 10, 
3i  1. 

Hamy,  candidat,  p.  htb,  4ig. 

Hanotaux.  Instructions  aux  ambassa- 
deurs, p,  76. 

Harlez  (De).   Yih-king,  p.  286. 

Hauréau  (B.).  Membre  de  diverses 
Commissions,  p.  3 07,  3g k.  —  De 
copia  verborum ,  Martin  de  Braga  et 
Sénèque,  p.  97,  iG3,  169.  — 
Gailo-Romains  et  barbares,  p.  toG. 

—  Concile  de  Reims,  p.  107.  — 
Le  Moralium  dogma  philo sophor uni, 
p.  3 10.  —  Histoire  littéraire  ,^.  71. 

—  Hommage,  p.  76. 
Havet  (J.).   Gerhert,^.  i52. 
Havet  (  L  ).  Phlégijas ,  p.  81. 
Havre  (Le),  p.  Ai  0. 

Head.  A  polio  Uikesios ,  p.  53  3.  — 
Greek  coins,  p.  1^5.  —  Notanda, 
p.  396. 


Hébreu-italien  {Dictionnaire),^.  275^ 
Heidelberg  et  Strasbourg ,  p.  80. 
Heiss.   Jeanne   la   Folle,  p.    167.  — 

Don  Carlos,  p.  298.  —  Plat  celti- 

bérien,  p.  87. 
Hellénique  {Bulletin  de  correspondance), 

p.  1  36,  i5i,  232,  277. 
Hcmenwaij  expédition,  p.  a3o. 
Henry   (V.).    Bergaigne,  p.    16  3.  — 

Infinitifs,  p.  i52. 
Hermès  (Statues  d'),  p.  i3. 
Héuon  de  Villefosse  (A.).  Membre  de 

diverses  Commissions,  p.  307,  Sgi. 

—  Mercures  gallo-romains,  p.  i3. 

—  M.  de  la  Martinière  au  Maroc, 
p.  99.  —  Neferis,  p.  174,  2o5-2o8. 

—  Le  pagus  Andomus ,  p.  178.  — 
Gabès  et  Gafsa,  p.  179,  208-211. 

—  Antiquités  de  la  France,  p.  2  36, 
3o5,  375-39/j.  —  Loi  de  Nar- 
bonne,  p.  2  38.  —  Symmaque, 
p.  /i20,  h-28-liùÇ).  —  Hommages, 
p.  74,  227,  298,  aSo. 

Heroon  von  Gjôlbaschi-Trysa ,  p.  379. 

Hervey  de  SAl^T-DENïs (Le  marquis  d'), 
président  en  1888,  p.  1,  9.  — 
Membre  de  diverses  Commissions, 
p.  5,  309.  —  Tunique  de  perles,  etc., 
p.  982.  —  Hommages,  p.  i53, 
926,  370,  981. 

Hétéens  ou  Hittites,  p.  101,  162, 
169,  971. 

Heuzey  (L. ).  Membre  de  diverses  Com- 
missions,  p.    307.  /il 9.  —  Décou- 


—  5^ 

vei-tes  en  Chaldée,  p.  l'ii.  —  Hom- 

niapos,    p.    70,    189,    l'ii,    277, 

•J7S. 
Uimyariles  (Inscriphons) ,  p.  7a,  86. 
Mine,     Cylindre    chaklôon,    p.    aBa, 

3oo,  33/1-338. 
lUppnne  {Académie   d'),  p.  991,  A08, 

53i. 
Hirscli.  Mitteihingen ,  p.  /ioo. 
Hissarlik.  Fouilles,  p.  lit  h. 
Histoire  litléraire,  p.  71. 
l]islorii')is  de  France,  p.  71. 
Historiques  ( lieviie  des  queslions),  p.  9 1 , 

157,    293,    /jo8;    —    {Société   des 

études),  p.  157. 
Hiltites.  Voir  Hétcens. 
Hoersclielnianii.  Metrik,  p.  79. 


Homolle.  Délos,  p.  378. 

Ilouoriiis  IV,  p.  3,  5,  45o. 

I{(n-ace,  p.  5 '8. 

Hoiinza  (Lo),  p.  3o5,  35o-35A.  — 

Voir  Hunza. 
Howorlli.  il/o/i/j-o/s,  p.  77. 
Huart.  Bab,  p.  ioa. 
Hucher,  décédé,  p.  10a. 
Humbert  (G.).     Antiquités     romaines, 

p.  83,379. 
Hun-Magyar  {A)   iras  es   annak  fenn- 

maradt  emlékei ,  p.  981. 
Hiimio-scylhiqiie  (Écriture),  p.  261. 
Huns  (Chanson  politique  des),  p.  io5. 
Hunza    handbook,  p.    lio3.    —    Voir 

Hounza. 
Hypéride  (Fragment  d'),  p.  8,  319. 


1 


Île-de-France  [Statistique  de  l'),  p.  i  i3. 

Image  de  la  France,  p.  87. 

Inibaull-Huart,  p.  18 j,  286. —  Cours 
éclectique,  p.  tiali. 

Imbert.   Lettre,  p.  88. 

Incunables ,  p.  Ai  5 ,  ù  1 6. 

Inde  {Lettres  sur  l'),  p.  83. 

India  njpce.  Mnnuscripts ,  p.  52^. 

Indica  {Epigraphia) ,  p.  291. 

Indici  e  catalogin,  p.  91. 

Indo-chinoise  {Société),  p.  530. 

Indo-Portugucse  numismatics ,  p.  286. 

Infinitifs  latins,  p.  iSa. 

Innocent  IV,  p.  5. 

Inscriptions  d'Arabie,  p.  9,  71,  3o8, 
lioG;  —  cunéiformes,  p.  i3.5,  200, 
2.54,  267,  3oi,Ai3;  —  grecques, 
p.  99,  102,  121-123,  358,  3oi, 
3oa,   348-35o;   —   hamaléennes, 


p.  101,  163 ,  169;  —  indo-bac- 
triennes,  p.  103,  io3;  —  juives, 
p.  78,  299,  ^32,  Ii3z-U3'];  — 
libyques,  p.  178;  —  lyciennes, 
p.   88;  —    romaines,    p.    6,    32, 

I7G,    178,     388,     399,    /1I7,    /l99, 

A83-439;  —  sanscrites,  p.  71  ;  — 

sémitiques.  Voir  Corpus. 
Institut  (L')  de  France,  p.  21 5. 
Institutions  {Histoire  des),  p.  897. 
Insurrections  normandes ,  p.  607. 
International  language,  p.  1 3 1 .  —  Voir 

Langue. 
Irlande  {Bijoux  en),  p.  78. 
-Ita,  suffixe,  p.  7. 
Italianc   {Pubblicazioni) ,  p.  90,    i5G, 

33a,  393,  ho'],  58i. 
Italie  antique  {Monnaies  deV),  p.  538. 


5^6 


Jametd,  p.  2,  181. 

Janiot.    Le  portrait  dans  la  sculpture 

grecque,  p.  171,  ItbQ. 
Janvier.  Les  Clabault,  p.  iio. 
Japon  (Ancien),  p.  226. 
Jarriaud.  Novelle  118,  p.  iai. 
Jarry.  Louis  de  France,    p.    3,    286, 

375,  Utiti,  Zi6o. 
Jean  V,  duc  de  Bretagne,  p.  3o6. 
Jeanne  d'Arc,  p.  88,  ihZ,  31 3,  280, 

A2/4,  522. 
Jeanne  ia  Folie,  p.  167. 
Jennepin.  Maubeuge,  p.  287. 
Jérusalem.  Inscription,  p.  61 3. 
Jeux  populaires,  p.  3o2,  807,  hili, 

A99-519. 
Joinville  [Extraits  de),  p.  5 90. 
Jordan,  membre  de  l'Ecole  de  Rome, 

p.  3oi,  3o5. 


Joret.  Guevarre,  p.  897.  —  Mission, 
p.  52  2.  —  Taverniei',  p.  276. 

Joseph  {Le  P.)  et  Richelieu,  p.  8i. 

Jouarre  {Cryptes  de),  p.  216. 

Joubert.   Craon,p.  892,  /168. 

Journal  des  Débals  {Centenaire  du), 
p.  229. 

Jouvencel  {Le),  p.  3,  286,  38i,  ii6, 
A60. 

Juif  (Calendrier),  p.  96. 

Joyaux  de  la  couronne  de  France  { His- 
toire des),  p.  21 5. 

Jtiive  {Histoire),  p.  Itof*. 

Juives  (Inscriptions),  p.  78,  299,  ^22  , 
/i82-i87. 

Juives  {Revue  des  éludes),  p.  298. 

Julien  (Prix  Stanislas),  p.  ii,  5,  176, 
li-2à,  Zi52,  liGi,  liGS. 


K 

Khalil  { Sidi  ) ,  p.  281. 
Kinoshita.  Ancien  Japon,  p.  396. 
Kiidly.      Ecriture     hunno-scythique, 
p.  2  0 ] . 

Kernïev.La  Bretagne  à  r Académie,  \i.  83.     Konkanî  language,  p.  28G. 
Kervyn    de  Letlenhove.    Relations  des     Kremer  (A.  de),  correspondant,  p.  8. 
Pays-Bas  et  de  l'Angleterre,  p.  287.     Krishnadâsa ,  p.  319. 


Karacsay  {Codex) ,  p.  262. 
Karkemis,  p.  297,  802,  3o6. 
Kawczynski.  Rythmes,  p.  280. 
Kef   {Elude  sur   le),    p.   /ii6. 


La     Blancbère     (R.    de).     Mémoire,  Lacomble  (De).  Hadrumète,  p.  169. 

p.  71.  —  Hadrumète,  p.  159.  —  Lacouperie.  Voir  Terrien. 

Bulla    Uogia,    p.    806.   —    Musée  La  Fons-Mélicocq  (Prix),  p.  101,  4io, 

Alaoui,ç.  527.  —   Palais  tunisien,  /ii3,  621,  ^25,  ^167. 

p.  896.  La    Grange   (Prix),   p.   li ,    6,    178, 
La  lioBDEiiiK  (A.   de),   candidat,  élu,  A5i,  ti6i,  /169. 

p.  615,^19,  ^28,  hall.  —  Alain  Laloux.  Olympie,  p.  171,  17/1. 

Bouchart,  p.  221.    —  Landévenec,  La  Marsonnièrc   (De).    M.    Lecoinlre- 

p.  520.  Dupont,  p.  381. 


5/1 7 


La  Marlinière(H.  (le).  Exploration  du 

Maroc,  p.  99. 
Lamhèsc    {Camp    et    praetorium    de), 

p.   9  20. 

Lamprechl.  Etat  économique ,  ^.  213. 
Lanciani.  Fouilles,  p.  98,  118,  130, 

201. 
Landes  (Les)  sous  la  Révolution,  p.  70. 
Landévenec  {Cartulaire  de),  p.  5ao. 
Landsdonme  House  (  Marbles  a( ) ,  p.  1 3  5. 
Lanéry  d'Arc.  Jeanne  d'Arc,  p.  /jai, 

592.  —  Franc  Alleu,  p.  bùli. 
Langlois  (E.).  Manuscrits  français  de 

Rome ,  p.  7 1 . 
Langue  internationale,  p.  i3i,  i3.5. 
Languedoc   {Géographie  de),  p.  3,  5, 

181. 
Languedociennes  {Poésies),  p.  93o. 
La   Noë  (G.   de).    Embouchure  de    la 

Loire,  p.  59  0. 
Lasgraïsses  (Tarn).  Bijoux,  p.  iii. 
La  Sicotière  (L.  de).  Frotté,  p.  i35. 
Laslevrie  (R.    de),  candidat,    p.    17, 

03. 
La  Trémoille.  Archives  d'un  serviteur 

de  Louis  XI,   p.   936,  383,  i66, 

UQo. 
Laurent  (H.).   Gastinois,  p.  601. 
Laval.  Facidlé  d'Avignon,  p.  896. 
Laval  {Sigillographie  de),  p.  3,  892. 
La  Ville  de  Mirmont.  Mosella,  p.  399. 
Lavigerie     {(japsella     offerta     da)    a 

Leone  XIII,  p.  38t. 
Laïard,  associé  étranger,  p.  i  1  /) ,  i  1 5 , 

493. 

Lcbaigiie.  Réforme  orthographique, 
p.  291. 

Le  Blant.  Eglise  des  saints  Jean  et  Paul , 
p.  8,  2/1-25.  —  Sa  direction  à 
Rome,  p.  G9,  457.  —  Académie 
d'archéologie  chrétienne,  p.  98, 
'122,  /\'.i']-li3().  —  Songes  cl  vi- 
sions dos  martyrs,  p.  359,  /193.  — 
Inscription   juive  d'Auch,  p.    /i-io. 


63a-437.    —    Hommages,   p.  83, 

398,  59/1. 
Lebon.   Premières  civilisations ,  p.  89. 
Lecestre.    Le    Joxivencel,  p.  3,    286, 

38i,  445,  ûGo. 
Lechat,  membre  de  l'École  d'Athènes, 

p.  1 8 1 ,  2  4  8.  —  Légende  de  Thésée , 

p.  58,    63.   —  Acropole,  p.  i65, 

455.  —  Corfou,  p.  345. 
Le  Clerc  (J.-V.).  Chrestomathie  grec- 
que,t^.  296,  3i5-336. 
Lecocq.  Pli  cacheté,  p.  3  55. 
Lecoinire-Dupont  (M.),  p.  381. 
Lecoy  de  la  Marche.  Sceau  de  majesté , 

p.  170.  —  Les  sceaux,  p.  539. 
Ledieu.   Ouvrages,  p.   43 1. 
Ledoulx.       Inscription       cunéiforme, 

p.  4i3. 
Lefèvre-Pontalis    (E.).    Saint-Maclou , 

p.  i54. 
Légé.   Les  Castelnau-Tursan ,  p.  3.  — 

Les  Landes  sous  la  Révolution,  Tp.  75. 
Lehman.  Maass  und  Gewicht ,  p.  596. 
Leitner.    Le    Hounza,  p.  3o5,    35o- 

354.  —  Ouvrages,  p.  4o3. 
Lemale.   Le  Havre,  p.  4 10. 
Léon  le  Magnifique,  p.  76. 
Léonard  de  Vinci,  p.  277. 
Léonardon,     archiviste     paléographe, 

p.  471. 
Leoninus  {Le  cursus),  p.  101. 
Letaille.    Loi  de   Narbonne,   p.    289. 

—  Exploration  en  Algérie,  p.  417, 
43  0,  497. 
Levasseuk.  Population,  p.  273. 
Lever  des  planètes,  p.  991. 
Levi     (S.).     Vocabolario      gemglifco, 

p.  i38. 
Lévi  (Sylvain).  Théâtre  hindou ,  p.  175, 

444,  46o. 
Lezius.  De  Alexaudri  expedilioup,  p.  79. 
Libri  et  Raii-ois  {Fonds),  p.  78. 
Libyques  (inscriptions),  p.  178. 
Lirinins  Hiéroclès,  p.  171,  30i-2o4. 


—  5/i8  — 


Licques  {Abbaye  de),  p.  Uai. 
Liger  (  Vallée  du),  p.  hai. 
Lille  (Maire  de).  Lettres,  p.  Ziao. 
Lincei  {Accademia  dei),  p.  90,   i56, 

982,  993,  407,  53i. 
Lihirgie  avant  Charlemagne,  p.  217. 
Loi  (Notion  de  la),  p.  Soi. 
Loi  du  3o  mars  iSSy,  p.  7^. 
Loire  (Embouchure  de  la),  p.  5 a 5. 
Londres  (Antiquaires    de),    p.    22a, 

293. 
LoNGNON.  Membre  d'une  Commission, 

p.  4 10. 
LoNGPÉRiER  (A.  de).  Balles  de  fronde, 

p.  3 06.  —  Carthage  en  Arménie, 

p.  307. 
Loret.  Langue  égyptienne ,  p.  1/17. 
Lorraine  (Féaulés  en),  p.  219. 
Loth.  Mabinogion,  p.  79. 
Loubat  (Prix),  p.   li ,   5,    159,  809, 

3i3,  653,  i62,  669. 
Louis  F7  le  Gros,f.  hst. 


188-189.  —  Archives  d'un  servi- 
teur, p.  286,  383,  iA6,  i6o. 

Louis  de  France,  p.  3,  986,  876, 
hbh,  460. 

Lot«s  d'Orléans,  p.  78. 

Louis-Lucas.  Organisation  de  l'empire 
romain,  p.  83. 

Louvain  [Université  de),  p.  289. 

LncE  (S.).  Membre  de  diverses  Com- 
missions, p.  6,  807.  —  Jacques 
d'Arc  et  le  fort  de  Domremy,  p.  loli, 
175.  — •  Jeux  populaires,  p.  802, 
807,  kik,  499-519.  —  Hommages, 
p.  88,  i35,  i45,  i54,  276,  280, 
607. 

Lucbaire.  Lotds  VI,  p.  Zi2). 

Lucques.  Inventai-io  del  R.  archivio, 
p.  i48. 

Luillier.  Lettres,  p.  299. 

Lunade  (Procession  de  la),  p.  71. 

Lunet.  Rodez,  p.  i55. 

Luxembourg  (Institut  de),  p.  9  33. 


Louis  IX.  Enquêteurs,  p.   296,  3i5-     Lyciennes  (Inscriptions),  p.  88. 

826.  Lyon.  Aureus  de   P.  Clodius,  p.  /122. 

Louis  XI.  Projet  d'exposition,  p.  161,     Lyonnais  (Patois),  p.  /121. 


M 


Mabinogion  (Les),  p.  79. 
Macaire  (Saint)  le  Romain,  p.  98. 
Magdalénienne  (Epoque),  p.  895. 
Maimonide.    Commentaire,  p.  137. 
Maine  (Coutumes  du),  p.  4 2 4. 
Malais   (Code),    p.    i53,    275,   52i; 

—  (Proverbes),  p.  59 1. 
Mam  (Langue),  p.  108. 

Man darin   ( Langage ),   p.    175,    459, 

46i,  592. 
Mandshuria  (  The  Djurtchen  of) ,  p.  a8 1 . 
Mantinée  (Fouilles  de),  p.  58,  454. 
Manuscrits  français   de  Rome ,   p.  7 1  ; 

—  grecs  de  Fontainebleau ,  p.  4o5. 
Maqré  Dardeqé,  p.  275. 


Marbles  (Catalogue  of),p.  i35. 
Marignan.  Etat  économique,  p.  219. 
Marin.  Jeanne  Darc  laclicicn,  p.  280. 
Marinier.  Aram-Naharaïm,  p.  4i3. 
Maroc  (Exploration  du),  p.  99. 
Maronée.   Inscriptions,  p.   3oi,   8o3, 

348-850. 
Marquardl.  Antiquités  romaines,  p.  83 , 

379- 
Marre.    Code    malais,    p.    i5i,    975, 

52  1.  —  Proverbes,  p.  59 1. 
Marseille    (Académie  de  peinture   de), 

p.  989. 
Maillia  (J,).  Art  étrusque,  p.  75. 
Martin  (A.).   La  Ccrtangue,  p.  3. 


—  5/i9  — 


Martin  (H.).  Manusci-itx  dr  l'Arsenal, 
p.  în3. 

Mailiii  do  Bra{»a,  p.  iG-j,  iGç). 

Mailjrs  (Songes  el  visions  dos),  p.  0.59, 
/i  3  a . 

Marucchi.  Académio  d'aichéolojjiocliré- 
tienne,  p.  98,  /i38. 

Mas  d'Azil  (Grotte  du),  p.  179. 

Mas-Lathie  (L.  de).  Historiens  des 
croisades  .  p.  10,  71. 

Masi'eko.  Membre  de  diverses  Com- 
missions, p.  5,  (3,  309,  3i3,  /il 9. 

—  Pointures  du   Fayoum,  p.  iGG. 

—  M.  Xaville,  p.  20g.  —  Mytho- 
logie, p.  1^7.  —  Hommages, 
p.  i38,  4o6. 

Maulieiige {Histoire  de),  p.  987. 

Maulde  (R.  de).  Projet  d'exposition 
en  1^70,  p.  161,  183-189. 

Maury.  Membre  de  diverses  Commis- 
sions, p.  ^1,5,  309,  39^. —  Nou- 
velles de  sa  santé,  p.  aoi,  907.  — 
Lettre,  p.  ^^3.  —  Genlilices  ro- 
mains d'origine  non  latine,  p.  7, 
10,  37.  —  Tanisiry,  p.  ii.  — 
L'étaiii ,  p.  iGi.  —  Hommages, 
p.  a  I  G,  2  93. 

Mazon.  Le  P.  Grasset ,  p.  216. 

Médecine  {Faculté  de)  d'Avignon, 
p.  :ip(>. 

Médecins  grecs,  p.  162,  iG^i,  168, 
190-197. 

Médiqiies  {Gueires),p.  663. 

Mély  (F.  de).  Etienne  de  Vancza, 
p.  li,  '311.  —  Crosse  de  Ragen- 
froid ,  Maisons  normandes,  Vitrau.v 
de  Chartres,  p.  83.  —  Poisson, 
p.    9  30.   —    Table   de  don    Pedro, 

p.    22  1  . 

Mémoires  de  l'Académie,  p.  70,  71, 
SG. 

Menant.  Inscriptions  hamatéennes, 
p.  101,  1G2,  1G9.  —  Cylindre 
cbaldéen  apocryphe,  p.   9.'i2,  .'^no. 


33A-338.  —  Karkeniis,  p.  997, 
3o9,  3o/i.  —  Bas-relief  de  Monr- 
ghab,  p.  3i3.  —  Inscription  de  Jé- 
rusalem, p.  fii'S.  —  Honnnages, 
p.  1  'i3,  320,  371. 

Mende  {  Hommage  à  l'évéque  de) ,  p.  3  3  3. 

Mercier.  Afrique  seplenti'iouale ,  p.  3g3 , 

Ho- 
Mercurcs  gallo-romains,  p.  i3. 

Mesures  assyriennes ,  p.  987. 


95, 


ii5- 


Mesures    chaldéennes,    p. 
117. 

Metrik  {Lehrbach  der),  p.  79. 

Métrologie  assyrienne,  p.  3oi. 

Mexicains  (Manuscrits),  p.  1  h. 

Meyer  (Jacques).  Dernier  manuscrit, 
p.  i55. 

Mëyer  (Paul).  Membre  de  diverses 
Commissions,  p.  6,  807,  619. 
—  Rêver,  rahies,  p.  257.  —  Hom- 
mages, p.  83,  221,  375,  521. 

Michel ,  archiviste  paléographe,  p.  671. 

Michon.  Aléria,  p.  168,  456. 

Middle  âges  {End  qfthe),  p.  127. 

Midi  {Annales  rf»),  p.  Ssi  ;  —  {Revue 
épigrapliique  du),  p.  91,  157,  293. 

Minds  {Historia  de),  p.  ili3. 

Mischnah  {Commentaire  sur  la) ,  p.  137. 

Modi.  Ossuaires,  p.  3i3,  369-876. 

•Mohammed  es-Senoussy.  Voir  Senoussy, 

Molinier  (A.).  Géographie,  p.  3,5, 
iSi,  /i5o,  'iGi. 

Mommsen.  Antiquités  romaines,  p.  83, 

279- 
Monaco.  Sceaux  de  Rethel,  p.  290. 

Monceaux.   Olympie,  p.  171,  176.  — 

Thessalie,  p.  318. 
Mongols  {History  of  thc),  p.  77. 
Monnaie  baclro-chinoise,  p.  3oi,  338- 

3 '18. 
Monnaies  arsacides,  p.  96;   —   Ça»- 

loises,  p.  3o6,  356-3Go. 
Monnaies  d'Asie  Mineure,  p.  171.  65 1. 

6 Go;  —  de  l'Italie,  p.  52  8. 


—  550  — 


Mont    SainI- Michel     {Dubourg     au), 

p.  i3o. 
Montaigne.   Giornale,  p.  ilitt. 
Montdidier  (  Arrondissement  f/t»  ) ,  p.  6  3  5 . 
Montpellier  (Académie  de),  p.  291. 
Monumentale  (Histoire),  p.  SgS,  iig. 
Monuments  (Conservation  des) ,  p.  1 80. 
Monuments  (L'Ami  des),  p.    225. 
Moods  of  the  English  Bible,  p.  380. 
Moralium  dogma  philosopliorum ,  p.  3 1  o. 
Morel  (Cil.).  Genève  et  Vienne,  p.  286, 

384,  4/17,  46o. 
Morgan   (J.   de).    Anneaux -monnaies 

du  Caucase,  p.  268. 
Morin.   Gastinois,^.  hù\. 
Morinie  (Antiquaires  de  la),  p.  92  ,  167, 

292,  533, 
Mortel.  Cathédrale  de  Paris,  p.  3,892, 

^,69. 


Mosella,  p.  899. 

Mossmann.     Cartulaire  de    Mulhouse, 

p.  975. 
Moulenq.  Beaumont  -  de  -  Lomagne , 

p.  369. 
Mourghab  (Bas-relief  de),  p.  3i3. 
Movvat.  Papiers  de  L.  Renier,  p.  228. 
Mulhouse  (Cartulaire  de),  p.  275. 
MûHer  (D.-H.).   Epigraphische  Denk- 

màler,  Glossen,  p.  ttoQ, 
Millier  (E.).  Senlis,  p.  101. 
Munich.  Akademie,  p.  go,  93,   i5G, 

383,  4o8. 
Mùntz  (Eug.).  Histoirede  l'art,  p.  1 36. 
Musée  britannique.  Cylindre  chaldéen, 

p.  202,  3oo,  384-838. 
Musicale  (Paléographie) ,  p.  3  83. 
Mytfudogie  égyptienne,  p.  1^7. 


N 


Nabuchodonosor  (Inschriften  von),  p.  85 , 

383. 
Nago  (Langue),  p.  167. 
Namèche.  Philippe  II,  p.  80. 
Naples.  Società  reale,  p.  UoS. 
Narbonne.    Inscription  juive,  p.   399. 

—  Loi,  p.  388. 
Nauck,  correspondant,  p.  628. 
Naukratis,  p-  87. 

Naville.  Fouilles  de  Bubastc,  p.  289. 
Nodjrân  (Martyrs  de),   p.   102,  io4, 

109. 
Neferis,  p.  176,  3o5-2o8. 
Néharina,  p.  /ii3. 
Néolithique  (Epoque),  p.  895. 
Nerlinger,      archiviste      paléographe, 

p.  471. 
Neubauer,  correspondant,  p.  /laS. 
Nicaise  (Con-espondanls  de),  p.  83. 
Nicaragua   (Populations   du),    p.    78, 

149. 


Nicolas.   Langu£  internationale ,  Tp.  18 5. 

NisARD  (Charles).  Fortunat,  Rade- 
gonde  et  Agnès,  p.  13,  16,  17,  3o- 
4g.  —  Sa  mort,  p.  3/10,  44o.  — 
Son  remplacement,  p.  369,  3iâ, 
4i5,  4ig,  438. 

Noirs  peints  par  eux-mêmes ,  p.  1 40. 

Noms  de  lieu,  p.  6,  10,  37-29. 

Nordische  Gottersugeii ,  \).  21a. 

Normand.      L'Ami      des     monuments, 

p.   235. 

Normandes  (Maisons),  p.  88. 
Normandie.  Antiquaires ,    p.    i48.  — 

Chronique,  p.  465.  — Etats,  p.  3  2  4. 
Noùccs  et  c.rirails ,  \t.  71,  53o. 
Notium  (Inscription  de),  p.  103,  121- 

1 33. 
Novelle  1 1 S ,  p.  4  2 1 . 
Numides  (Monnaies),  p.  94. 
Numidie   (Fastes   de    la),   p.  8,  286, 

878,  445,  4Go. 


—  551   — 

Numismatic  cabinet,  p.  ^86;  —  So-  ISutmsmatifiue  {Reuue),  |).  91,  i57, 
ciely,  p.  153.  233,  /ioH;  —  française,  p.  610. 

!SHmsmalics{liulo-Pofluguese),p.i>.ii(}.  Niuntsinatiques  {Eludes),  p.  80. 

Niimisniatiqiio  (  Prix  de).  Voir  Allier  do  Nij  Carlsbei'g  (  Glyplolhèqxie  de),  p.  290. 
Hauloroclie,  Duciiaiais. 


o 


Obitiiairos  français  (>n  Italie,  p.  fi."). 
Odobesco.   Trésor  de  Pdlrossn,p.  i3'J. 
Oesterreichisclie  Geschichie  {Archivfiir), 

p.    !!32. 

Olivier  de  la  Marche ,  p.  3,  io5,  237, 

389. 
Ollivicr.     Voie    de    l'Uhnyc,    Annibal, 

p.  A 16.  —  Vallée  de  Barcelonnelle , 

Age  })réhisk>i-i(jue ,  p.  A  90. 
Olympie   (Restauration    d'),   p. 


i?' 


17/K 


Oineijijades  [Chute   des),  p.  663. 

Oiuoiit.   Catalogues,  p.  6o5. 

-0ns,  désinence,  p.  3  53. 

Opaon  Alélantliios,  p.  268. 

Opère  moderne  straniere,  p.  90,  i56, 
232 ,  ''107. 

Oi'PERT  (J.).  Membre  de  diverses  Com- 
missions, p.  /i ,  5,  309.  —  Vice- 
président  de  l'Académie,  p.  /i23.  — 
Tauistry,  p.  11.  —  Hammurabi  et 
Aménophis  IV,  p.  17,  53-58.  — 
Mesures  ciialdéenncs,  p.  95,  ii5- 


117.  —  L'étain,  p.  iGi.  —  In- 
scriptions liamatéennes,  p.  170.  — 
Géographie  de  l'Assyrie,  p.  357. 
—  Inscription  métrolojrique  assy- 
rienne, p.  3oi.  —  L'époque  d'Abra- 
ham, p.  3o9-3i9.  —  Pasai'gades, 
p.  Un.  —  Hommages,  p.  80,  85, 
i3'i ,  139,  1/19,  382,  525. 

Ordinaire    (Prix),   p.    6,   175,    307, 
309,  liliS,  A59,  A63. 

Orléanais  {Société  de  V),  p.  608. 

Orléans  {Louis,  duc  d'),  p.  3,  236, 
375,  lihli,  /160. 

Oronio  et  Sidama  {  Voyage  aux  pays  ) , 
p.  i55. 

Orthographique  {Ré/orme),  p.  391. 

Ossuaires   de   Perse,    p.    3i3,    36g- 
37Û. 

Ostie  (Fouilles  d'),  p.  98,  lao,  168, 
201. 

Ouest    {Antiquaires    de    l'),    p. 
392,  4o8. 

Ours  (L')  et  le  voleur,  p.  6o3. 


157, 


Pakôme  {Saint),  p.  /J2  5. 
Palutini  {Codici) ,  p.  91. 
Palcnqué  {Temple  de),  p.  i5,  /19-50. 
Paléographie  et  diplomatique,  p.  127. 
Paléologiic.  Art  chinois,  p.  h. 
Palermo.  Manuscrits  hébreux,  p.  594. 
Palestine  (Géographie  de  la),  p.  ".59, 
/il  9. 


Palestine  et  Syrie,  p.  52  3;  —  {Sceaux 

de),  p.  85. 
Pallu  de  Lessert.  Briques,  p.  76.  — 

Fastes,  p.  3  ,  236,  378,  /i/i5,  /160. 
Pahnyre  {Sculptures  et  inscriptions  de), 

p.  290. 
Pandolplio,  biographe  ponlifiral,  p.  938, 

9  A  5. 


55 


9    


Panjab,  p.  liod. 

Papes  {Vies  des),  p.  a38,   245;  — 

{Lettres  des),  p.  loo. 
Pârasîprahâça ,  p.  aï  g. 
Paris  (Gaston).  Membre   de  diverses 

Commissions,  p.  6,3i3,394,Ai9. 

—  Martin  de  Braga,  p.  i63,  169. 

—  M.  Amari,  p.  2/18  ;  —  Désinence 
-ons ,  p.  2  54.  —  Chanson  de  Roland, 
p.  520;  —  Histoire  littéraire,  p.  71. 

—  Hommages,  p.  79,  85,  127, 
ikk,  a3o,  270,  522. 

Paris  sous  François  I"^,  p.  127;  —  en 
i']8g,  p.  275;  —  [Cathédrale  de), 
p.  3,  392,  li'iQ. 

Parlement  de  Bretagne,  p.  3g3. 

Parnasse  provençal,  p.  79. 

Parrocel.  Académie  de  peinture  de  Mar- 
seille, p.  282. 

Pasargades ,  p.  4 1 1 . 

Patristica  {Sludia),  p.  398. 

Pavet  de  Coubteille.  Membre  de  di- 
verses Commissions,  p.  5,  6.  — 
L'étain,  p.  1G2.  —  Ecriture  hunno- 
scythique,  p.  261.  —  Hommage, 
p.  924.  —  Sa  mort,  p.  4 18. 

Pays-Bas  [Relations  dea)  et  de  l'Angle- 
terre, p.  287. 

Pector.  Populations  du  Nicaragua, 
p.  78,  149. 

Pedro  (Dom).  Attentat,  p.  247. 

Pedro  [Table  de  don),  p.  221. 

Peinture  [Académie  de)  de  Marseille, 
p.  282. 

Peintures  du  Fayoum,  p.  i65,  166. 

Peints  (Galets)  du  Mas  d'Azil,  p.  172. 

Peiresc,  p.  75.  —  Correspondants, 
p.  329,  277.  —  Petits  mémoires, 
p.  52  4. 

Pélasgiques  (Monuments),  p.  i63. 

Pellochet.  Incunables,  p.  4i5,  4 16. 

Pereira,  [listoria  de  Minas,  p.  i43.  — 
Lettres,  p.  52  3. 

Ptresianus[Codex),f.  h,  ibg,  454,469. 


Peretti.  Colomb,  p.  219. 
Perret.  Malet  de  Gràville,  p.  424. 
Perrichon.  Carte  de  l'Egypte,  p.  4 06. 
Perrier  du  Carne.  Teyjat,  p.  4oi. 
Perrot  (G.).  Membre  d'une  Commis- 
sion, p.  419;  —  Carthage,  p.  16. 

—  Cippe  hamaléen,  p.  101.  — 
Dédicace  à  Licinius  Hiéroclès,  p.  1 7 1, 
20i-3o4.  —  Chercbel,  p.  307,  36o- 
3(38.  —  L'art  de  la  Perse,  p.  3i3, 
4 11.  —  Byrsa,  p.  4 11.  —  Aureus 
à  l'effigie  de  Marc-Antoine,  p.  42  2. 

—  Histûire  de  l'art,  p.  91,  167, 
232,  292,  3i3,  4o8,  53 1.  —  Revue 
archéologique ,  p.  91 ,  i57,  233,  293, 
539.  —  Hommages,  p.  75,  ia6, 
132,145,151,218,273,977,537. 

Perse  (Art  de  la),  p.  3i3,  4ii.  — 

Ossuaires,  p.  3i3,  369-374. 
Perugia  [Cronache  di),  p.  147. 
Perugina  [Storia),  p.  147. 
Petit.  Itinéraires  des  ducs  de  Bourgogne , 

p.  391,  448. 
Petitot.  Cercle  polaire,  p.  147. 
Pétrossa  [Trésor  de),  p.  i32. 
Phéniciennes  [Inscriptions) ,  p.  71- 
Philippe  II  [Règne  de),  p.  80. 
Philotogùjue  [Société),  p.  126. 
Philology  [Amei'ican journal  of),  p.  90. 
PhitomathiqUL-  [Société),  p.  91. 
Pbilon.  De  opificio  miindi ,  p.  93o. 
Phlégyns  [Supplice  de),  p.  81. 
Phonétique  [Transcription),  p.  4o5. 
Picard,  archiviste  paléographe,  p.  471. 
Picardie  [Antiquaires  de),  p.  157,  292, 

293.  —  Notices,  p.  42  1. 
Picbon.  Bague,  p.  io3,  i33-ia5. 
Picot    (E.).    Ancien    théâtre  français, 

p.  174  ,  45 1,  46 1 . 
Pierres  gravées  de  Caboul,  p.  102. 
Piette.  Grotte  du  Mas  d'Azil,  p.  179. 

—  Epoque  magdalénienne.  Ere  an- 

ihropique,  p.  395. 
Pimodan.  La  mère  des  Guises,  p.  395. 


,5H 


Piot.     Correspondance     de     draurelle, 

p.  387. 
Platon  de  Paris  (  Manuscrit  du  ropiste 

du),  p.  aai. 
Poinssot.  Jîevtie  de  V Afrique  frnnçnine , 

p.  gt. 
Poiret.  Horace,  p.  ôaS. 
Poisson  dans  les pieiTcs  gravées ,  p.  i>.:>0. 
Poitou  [Documtnts  concernant  le),  p.  3  , 

a36 ,  377,  465 ,  660  ;  —  {Épifrrnpbip 

du),  p.  3,  393,   110,  yig. 
Polaire  [Sous  le  cercle),  p.  1  67. 
Polychromie  dans  la  statuaire,  p.  iSp. 
Poncz  {Istorio  de  sancl),  p.  5a5. 
Ponlhieu  (Mémoires  sur  le),  p.  'iai. 
Pantoise  {Sninl-Maclou  de),  p.  i5i. 
Poole.  Greefc  coin*,  p.  tio. 
Population  française ,  p.  a7a. 
Portai ,  areliiviste  paléograplio .  p.  67  1 . 
Pollier.  Céramiques ,  p.  7."). 
Prœmia  dans  César,  p.  97. 
Prarond.  Z)e  g-esfis  Joannœ,  p.  88. 
Pratt  dt  Castello,  p.   168,    198-300, 

4ao,  4a6. 


Praxitèle  (Hermès  do),  p.  i3. 
Préhistorique  (La  France),  p.  •>.83;  — 

(/l/«nce),  p.  ;î36,  38G,  667,  660; 

—  [Basses- Alpes),  p.  A  an;  —  (Fi- 
nistère), p.  39a. 
Présidence  de  la  RépiiMiqiie.  Iiivilalion , 

p.  hiç). 
Priscille  (Catacomlje  de),  p.  99. 
Privât.  Découvertes  en  Tunisie,  p.  179, 

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Prix  et  fondations,  p.  ^59-/170. 
Prodrome  (Th.).  Commentarii ,  p.  aag. 
Properce  sur  Virdumaros.  p.  96,  1 1 1- 

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Prothade  (Frère)  de  Besançon,  p.  980. 
Prou.   Ilonorius  IV,  p.  3,  5,  65o. 
Prudhomme.   Grenoble,  p.  9  36,  387, 

/1/47,  l^6o. 
Psaltirea  Scheianà,  p.  5a 3. 
Psaume  Exsurgat  Deus.  p.  966,  aA8. 
Puy maigre   (De).    Auteurs    castillans, 

p.  85. 


Pyrénées  (Revue  des),   p,    i5 
agS,  539. 


/' 


0.33. 


Q 


Qédoscli,  p.  '11  3. 


Quesvers.  Gastinois,  p.  /)  -t  1 . 


R 


Rabies,  péfxêw,  r.'ver,  p.  a  50. 
Raboisson.  Géographie  de  l'Assyrie,  etc. , 

p.  aBo,  a5/j,   937.  —  En  Orient, 

p.  5a3. 
Racine  et  sufTixe,  p.  J79. 
Radegonde (Sainte)  et  Forlunat,  p.  la, 

16,  17,  So-Ag. 
Radiot.  Similitudes ,  p.  397. 
RadlolT.   correspondant,    p.    4a3.    — 

Antiquités  sibériennes,  p.  137. 
Ragenfroid  (Crosse  de),  p.  83. 


XVII. 


Ralely  (Claude),  p.  980. 

Ravaisson.  Monuments  funéraires  des 
Grecs,  p.  7,  8,  10.  96,  97,  io3. 
—  Carthage,  p.  16.  —  Peintm-es 
du  Fayoum,  p.  166.  —  Congrès 
des  monuments,  p.  180.  —  Hom- 
mages, p.  80,  16g,  377. 

Ravaisson-Mollien  (Ch.).  Léonard  de 
Vinci,  p.  977. 

Ravennate  (Le),  p.  ii3. 

Ravenne  (Exarchat  de),  p.  83. 

38 


ivrRiupRie   RftTiosAtr. 


—  55Zi 


Ravet.  Aïssaoua,  p.  i53. 

Reboud ,  correspondant ,  décédé ,  p.  1 78 , 

Records  ofthepast,  p.  189. 
Regnaud.  Racine  et  suffixe,  p.  179. — 
Le  Rig-Véda,  p.  899.  —  Voyelles, 

p.  52  2. 

Reilhac  {Jean  de),  p.  3,  892. 

Reims  (Conciles  de),  p.  96,  107. 

Reinach  (Salomon).  Inscription  de  No- 
tium, p.  102  ,  I  21-128.  —Voyages 
du  général  Callier,  Temenolhyraî, 
p.  2Î6.  —  Inscription  de  Chypre, 
p.  267.  —  Musée  de  Saint-Ge7-main , 
p.  257. 

Reinach  (Théodore).  Monnaies  arsa- 
cides  et  calendrier  juif,  p,  96.  — 
Inscription  juive  de  Narbonne, 
p.  299.  —  Ralles  de  fronde,  p.  806. 

—  Cartilage  en  Arménie,   p.  807. 

—  Monnaies  d'Asie  Mineure,  p.  171, 
i5i,  660. 

Religions  (  Revue  de  l'histoire  des  ) ,  p.  90  , 
i56,  293. 

Renan.  Membre  de  diverses  Commis- 
sions, p.  6,  3i8  ,  il 9.  —  Carthage, 
p.  16.  —  Tablettes  de  Tell  Amarna, 
p.  3l2.  —  Histoire  littéraire,  p-  71  • 

—  Hommage,  p.  229. 

Renard.  Culte  de  Jeanne  d'Arc,  p.  \h2>. 
Renaud.    Revue  géographique,  p.   91, 

167,  288. 
Renier  {Papiers  de  Léon),  p.  a  a  8. 
Renne  (Bois  de)  sculptés,  p.  172. 
Représentants  en  mission,  p.   80,  226, 

527. 
Rethel  {Sceaux  de),  p.  290. 
Relhoré.  Cryptes  de  Jouarre ,  p.  a  16. 
Rêver,  rabies,  p.  i56. 
Révilie.  Revue  de  l'histoire  des  religions , 

p.  90,  i56,  399. 
ReviHoul.   Fragment  dHypéride,  p. 8, 

319.  —  Morale  égyptienne,  p.  219. 
Reynaud  (Prix  Jean),  p.  468. 


Rhin    (Le),    ancêtre  de    Virdumaros, 

p.  90,    111-11/1. 
Riant    (Le    comte),    décédé,    p.    70, 

'i/io.  —  Son  remplacement,  p.  9, 

17'  9-3' 97- 
Richard.  Enquêteurs   de   saint  Louis, 

p.  295,  815-826. 

Richebé ,  archiviste  paléographe ,  p.  i  7 1 . 

Richemont  {Connétable  de),  p.  6. 

Richenet-Bayard.  Alesia,  p.  ùio. 

Richter.  Peintures  du  Fayoum,  p.  i65. 

Rig-Véda  (Le),  p.  899. 

Ristelhuber.  Heidelberg  et  Strasbourg, 

p.  80. 

Robort  (Le  roi)  et  le  sceau  de  majesté, 

p.  170. 

Robert  [l].).  Annuaire, p.  162. — Saint- 

Mandé ,  p.  i53. 

Robinson.  End  of  ihe  middle  âges ,  p.  1  2  8 . 

Rochemonteix.     Maison     de      Granle, 

p.  392,  468. 
Roches  {Guillnwne  des),  p.  58o. 
Rodez  à  l'époque  romaine ,  p.  i55. 
Rodocanachi.  Barbiers  de  Rome,  p.  80. 
Rois  par  la  grâce  de  Dieu,  p.  255. 
Rolland  de  Denus.  Ethniques,  p.  /ii8. 
Roma  neiproverbi,  p.  895. 
Romaines  {Antiquités) ,  p.  83,  279. 
Rome  (Plan   de),    p.   6,   19.  —  Voir 

Écoles,  Saints-Jean-et-Paul. 
Rome  {Ambassadeurs  à),  p.  76. 
Roque-Ferrier.  Poésies  de  Guiraldenc, 

p.  280. 
Piosuy  (L.  de).  Codex  Peresianus,  p.  A, 

iSg,  454,  462. 
Ro>7iy-sur-Seine ,  p.  ûai. 
Rossi  (dk).  Conférence,  p.   6,  ao.  — 

Fouilles,  etc.,  p.  99,  487.  —  Bollet- 

tino,  p.    53 1.  —  Capsella  offerta  a 

Leone  XIII,  p.  2H1. 
Roumaine  (Académie),  p.  593,  58i. 
Ro^cn.  3anncKii,  p.  890. 
PyccKaro  apxeojormecKaro  06mecT- 

Ba  (3anHCKn),  p.  895. 


;)o.) 


RoziènE  (E.  de).  Membre  de   diverses 

Commissions,  p.   3()i,    '119,    A:î3. 

—  Hommages .  p.  3 1 3 ,  919,  ;'-  2  9 , 

595,  53o. 
Rubic  (A.  de).  Traité  de  Caleau-Cam- 

brésls,  p.  936. 
Ruelle.  Damascius,  p.  3G1,  3G3,  397, 


3  9  6-3  3  ii,  Agi.  —  C7ia»i(  des  voyelles 
grecques.  —  dopisle  du  IHalun  de 
Paris,  p.  92^.  —  Eniipne  alchi- 
mique, p.  81. 

Ihiftii  et  lluguccio,  p.  53o. 

Ruvarac.  O  iiaTnncy,  p.  390. 

Hylhmcs  {Essai  sur  les),  p.  gSo. 


S 


Sacaze.    Revue,    p.    i')-].    233,    293, 

533. 
Sachaii.  Alberuni ,  p.  i3i. 
Saglio.  Dictionnaire ,  p.  279. 
Saige.  Sceaux  de  Rethel,  p.  290. 
Saint-Claude  [Bibliothèque  de),  p.  097. 
Sain  t  -  Germain  -  en  -  Laije  (  Musée  de  ) , 

p.  957. 
Sttint-Jean-d'Âbetot,  p.  3. 
Sainl-Jérôme  (OEuvre  de),  p.  i/iG. 
Saint-Luc  en  Phocide,  p.  83. 
Sainl-Maclou  de  Pantoise,  p.  i5'i. 
Saint-Mandé.  p.  i5"). 
Saiul-Paiil.      Histoire      monumentale, 

p.  393,  h[\Ç). 
aaint-Sinjon.  Lettres,  p.  321. 
Saint-Vcnaul  (De).  Foies,  p.  j/ig. 
Sainte-Sévèreen-lierry,  p.  oO(j. 
Saintonge   [Epigraphie  de   la),   p.   3, 

393 ,  ^10,  6/19. 
Sainloux.  Legs,  p.  9o5. 
Saints    Jean   et  Paul   (Église    des),    à 

Rome,  p.  8,  9.  3/1-27,  97,  1  17. 
Salon  de  1889,  p.  10g. 
èamsi      Rammàn      (Insciiplioii      de), 

p.  i35.  3Ô0,  n')k,  -l'ô-j. 
Sanskrit  manuscripls ,  p.  52'i. 
Sanxay  (Viiite  à),  p.  5 3/1. 
Sarcophages  d'Espagne,  p.  99. 
Sarzec  (De).  Découvrrles ,  p.  1 /n  . 
Sauvaire,  corrcspomiaril,  p.  tfjli. 
Savants  étrangers  (Mémoires  dils  des), 

u.  71. 


Sayce.  Hittites,  p.  371;  —  Records  of 

the  pasl,  p.  139. 
Sceau  de  majesté,  p.  170. 
Sceaux,  p.  .539;  —  de  Rethel,  p.  390; 

—  de  Syrie,  p.  85. 

ScHEFEiî,  vice-président  de  l'Académie, 
p.  1  ;  —  président,  p.  /i9  3.  —  In- 
scription hamatéenne,  p.  101.  — 
Historiens  des  croisades,  p.  71.  — 
Hommages,  p.  76,  77,  82,  i3i, 
101,  21 5,  375,  521. 

Sclieil.  Inscription,  p.  i35. 

Schlegel.  Chineaschtvoordenboek ,  p.  2 1 9. 

Schliémann.  Eouilles,  p.  4j4. 

SciiLCMBERGKn.  ^lemLre  de  diverses 
Commissions,  p.  5,  39/1.  —  Bague 
byzantine,  p.  io3,  1 33-135.  — 
Revue  numismatique,  p,  91,  157, 
9  33,  ^108.  —  Sept  sceaux,  p.  85. 

—  Hommages,  p.  127,  1/17. 
Schnoudi  (Vie  de),  p.  981. 
Schwab.  Maqré  Dai-deqé,  p.  375. 
Schvvob.  Argot,  p.  53o. 

Sculplure   grecque    (Le   portrait   dans 

la),  p.  171,  'i56. 
Sculpture  {(îrecti),  p.  52  3. 
Séance    publique    annuelle,    p.     '1 1 /i , 

639-519. 
Ségovie  {Plat  de),  p.  87 
Séliuonte     (Découverte    à),    p.    i(J8, 

173  ,  900  ,  30/1. 
Sémitiques  (Inscrijilions).  Voir  Corpus. 
Senart.  Membre  de  diverses  Commis- 


556 


sions,  p.  5,   (i.  —  Pierres  gravées 

de    Caboul,    p.    102.    —    Garrez, 

p.   86.  —    Inscriptions   de   Campa, 

p.  71.  —  Hommages,   p.   81,  80, 

985,  099. 
Sénèqne  et  Martin  de  Rraga,  p.  i63, 

169. 
Senlis  [Guide,  elc,  à),  p.  101. 
Sénones  [Nation  des),  p.  il 3. 
Senoussy  (Si   Mohammed   es-).    Lever 

des  planètes,  p.  291. 
Serrure.  Nitmismatique,  p.  tuo. 
Sétif  (Uue  memoiia  à),  p.  lii'j. 
Sevastos.  Nunta  la  Romani,  p.  5 2 3. 
Sîbawaihi  [Livre  de),  p.  i5i. 
Sibériennes  [Antiquités),  p.  197. 
SibyUina  [Enigme  des  Oraciila),  p.  81. 
Sicile  (Royaume  de),  p.  58,  67,  168, 

456. 
Sickel.  Libe7'  diumus,  p.  129- 
Sicoré.  Lettre,  p.  3A0. 
Sidi  Khalil,  p.  281. 
Siebor.  Erasmus,  p.  i55,  ôao. 
Sigillographie  de  la  A  ormandie,  p.  dsi. 
Simeon.  Manuscrits  mexicains,  p.  t5. 

—  CItimalpahin ,  p.  i59,  l\bli,  i62. 
Simonsen.  Sculptures  et  inscriptions  de 

Pulmyre,  p.  ago. 
Sinai.  Mission,  p.  9,  3o8. 
Slaves  du  Sud  (Académie  des),  p.  2  33. 
Smith.  Lnndsdoivne  House,  p.  i35. 
Soiesmes (Bénédictins de).  Paléographie 

musicale,  p.  283. 


Songes  et  visions  des  martyrs,  p.  aSg, 

622. 
Sorbonne  (  Inauguration  de  la  ) ,  p.  2  i  0 , 

ahS. 
Sove\.  Jeanne  d'Arc,  p.  21 3. 
Souchon ,      archiviste       paléographe , 

F-  571- 
Soulié,  archiviste  paléographe,  p.  ^71. 

Sousse.  Fouilles,  p.  160. 

Soutzo.  Monnaies,  p.  628. 

Spanheim.  Lettres,  p.  82. 

CpncKa  AKaAesiHJa,  p.  SgS. 

Stanislas  [Académie  de) ,  ^.  293. 

Statistique  [Annuaire),  p.  i56, 

Stein.  Olivier  de  la  Marrhe,  p.  3,  387, 

389,  li!i8,  460. 
Sterrett.  Journey  in  Asia  Minor,  p.  78. 
Stevenson.  Codices  grœci,  p,  280.  — 

Prodromi  Commentarti,  p.  299. 
Slrabon  [Géographie  de),  p.  465. 
Strasbourg  et  Heidelberg,  p.  80. 
Strassmaier.  Babylonische  Texte,  p.  85, 

282. 
2'j    dans    les    inscriptions   indo-bac- 

triennes,  p.  io3. 
Successions  au  moyen  âge,  p.  49 1. 
Suffixe  et  racine,  p.  179. 
Svoronos.  Etudes,  p.  80. 
Symmaque,  p.  /430,  ^28-429. 
Syriaque    [Légende)  de    saint   Alexis, 

p.  23 1. 
Syrie  [Sceaux  de),  p.  85. 


Tacite  [Sources  de),  p.  4,  5,  288, 
45i,  46i ,  465. 

Tamizey  de  Larioque.  Correspondants, 
p.  939,  277.  —  Fonlainemarie , 
p.  53o.  —  Peiresc,  p.  75,  524. 

Tanistry,  p.   1  0-19. 

'fanon.   R'ijin,p.  53o. 


Tapisserie  du  Fayoum,  p.  160,  166. 
Tard-\euus  (Chronique  des),  p.  181. 
Tardieu  [Charles) ,  p.  4o3. 
Tarentum  [Horsernen  o/"),  p.  807. 
Tavernier,  p.  274. 
Tell-Amarna  (Tablettes  de),   p.  ojo. 

3l2. 


—  557  — 


Temenothyrae,  p.  266. 

Temple  {Maison  du)  de  Paris,  p.  3,  5, 
6ai,  libo. 

Temples  cgiiptiens ,  j».  87,  iliS. 

Templiers.  Règle,  p.  101.  —  Opéra- 
tions Jînancières ,  p-  70,  86. 

Teplow.  Granique,  p.  ^16. 

Teriiea  de  Lacouperie.  Monnaie  bac- 
tro-cliinoise ,  p.  3oi,  338-3^8.  — 
Ouvrages,  p.  h,  175,  281,  iSa, 
46i. 

Tessères  antiques,  p.  52^. 

Testament  (New),  p.  522. 

Testamentutn  {Novum),  p.  33o. 


Thessalie    (Légende    cl     histoire     en), 

p.  318. 
Tliessaliennc  (Ligue),  p.  a  18. 
Thibault.   Glossaire,  p.  4i5. 
Thiollier.  Forez,  p.  23 0. 
Tliomas.  Annales,  p.  5a  1. 
Tliouras.   Rosny-sur-Seine ,  p.  /121. 
T(;o//i  re/tc  of  Ceylon,  p.  285. 
Torlonia    (Fouilles  du    prince).    Voir 

Vulci. 
Toulouse  (Académie  de),  p.  Qi- 
Touraine  (Coutume  de),  p.  237,  Sgo, 

liliS,  /160. 
Travaux  littéraires  (Commission  des), 

p.  10. 


Teyjat  (Grotte  de),  p.  /Joi. 

Théâtre   français    (Ancien),  p.   17Z1,      Irt/Ze  (Le  l'î'eu.r),  p.  393. 

i5i,  /161;  —  hindou,  p.  A,  175,      Tunique  de  perles ,  etc.,  p.  282. 

iZi3,  ^59.  Tunisien  (Palais),  p.  SgS. 

Thésée  ( Légende  de),  p.  62.  Turin.  Società  di  archeologia,  p.  1/17. 


u 

Ubaye  (Voie  gallo-romaine  de  la  vallée     Universitatts  (Charlulariuin),  p.  523. 
del*),  p.  616.  Uvea  (Dictionnaire),  p.  ii6. 


Valence,     Gap.    etc.     (Diocèses     de), 

p.  .^)3i. 
Valois.   Conseil,]).  5,  181,  ^4/iq,  iOi. 
Vancza  (Etienne  de),  p.  ih,  aai. 
Varanii  De  gestis  Joannœ,  p.  88. 
Varenilla  (Inscription  de),  p.  78. 
Vttticnnae  (  Codices  bibliothecae ) ,  p.  aSo. 
Vendôme  (La  place  de),  p.  221. 
Vemes.  Histoire  juive ,  ^.  hoh. 
Vers  léonins  (Deux),  p.  52^). 
Versailles.  Incunables,  p.  4i5. 
FidoîVes  (La  place  des),  p.  231. 
Vienne.  Akademie,  p.  233. 
Vicnncet  Genève, p.  336, 38i,  /i 67,  ^160. 
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ViOLLET.  Membre  d'une  Commission, 
p.  A33.  —  Tanistry,  p.  10-12. — 
Gallo-Romains  et  barbares,  p.  io5, 
106.  —  Assemblées  du  peuple, 
]!.  109.  —  Rois  par  la  grâce  de 
Dieu,  p.  !î55.  —  La  loi,  p.  3o4. 

—  Hisloire  des  institutions ,  p.  397. 

—  Hommages,  p.  126,  ai2,  396, 
397,  53o. 

Virdumaros,  p.  95,   111-ili. 
Virginuui  cancellus,  p.  Ui^. 
\iti  (Langue  de),  p.  1/16. 
Vittorio  Emnnuele  (Biblioteca),  p.  90, 
i56,  232,  407. 


—  558 


VoGiJÉ  (Le  marquis  de).  M.  Bénéditc, 
p.  g.  —  Carthage,  p.  i5.  —  Byrsa, 
p.  /iii.  —  Hommage,  p.  53 1. 

Voies  antiques,  p.  lig. 

Voltaire ,  p.  io5. 

Vosges.  Bibliographie,    p.    380,    897. 


—    Documents,    p.    3.    —    Société 

d'émulation,  p.  53 1. 
Voyelles,  p.  5 fia  ;  —  grecques,  p.  aai. 
Vulci  (Fouilles  de),  p.  «jS,  120,  173, 

176,    2o5,    263,    365-269,   ^20, 

427,  i56. 


w 


Waille.  Cherche!!,  p.  171,201-20/1, 
807,  36o-368. 

WAiLLr{M.  oe),  p.  80. 

Wallon  (H.),  secrétaire  perpétuel. 
Nouvelles  de  M.  Bénédite,  p.  9.  — 
Rapports  semestriels,  p.  10,  70- 
72,  2/10,  269-'!70.  —  Inaugura- 
tion de  la  Sorbonne,  p.  ùh8.  — 
Lettre,  p.  259.  —  M.  Egger,  p.  lu  à, 
473-/199.  —  M.  de  Wailly,  p.  80. 
—  Beprésentntits  en  mission,  p.  80, 
226,  527.  —  Hommages,  p.  80, 
83,  85,  86,  212,  2i3,  2i5,  219, 

222,     279,     381,     liOO,     522,523, 

526,  527,  53o. 


Weber.  Pdrastprakâca ,  p.  219. 

Weil  (G.),  correspondant,  décédé, 
p.  390,  /isS,  /J/l2. 

Weil  (H.).  Membre  de  diverses  Com- 
missions, p.  5,  807,  il  9.  —  In- 
scription de  Nolium,  p.  103;  — 
de  Maronée,  p.  3oi,  3o3,  8/18- 
35o.  —  Hommages,  p.  81,  23o. 

Weiss.  Empire  romain,  p.  83. 

WiTTE  (Le  baron  de).  Sa  mort, 
p.  35o,  /i/ii.  —  Son  remplace- 
ment, p.  295,  3i2,  /ii3-/ii5. 

Wright,  correspondant,  décédé , p.  168, 
/i23,  hh'2. 


Yczdegcrd  {Ere  de),  p.  5 a 5. 
Yih-Kiiig,  p.  286. 


Yoruba  {Kalehismu  l'ede),  p.  1/16. 
Yule,  correspondant,  p.  /128. 


--4 


>>^, 


/ 


/ 


•  AS 
162 
P315 

yll889 


Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres,  Paris 

Comptes  rendus  des  séances 


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